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anniversaire : 10 ans de trop ! / Gay Pride

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Festivitésdu 19 au 30 juin,Act up-Paris fête ses <strong>10</strong> <strong>ans</strong>le 19 juin, Scream celebrates Act Up au BataclanAct Up-Paris a, durant sonexistence, organisé <strong>de</strong> nombreusessoirées et concertsd<strong>ans</strong> Paris, au Palace, auQueen, à l’Elysée Montmartre,au Zénith <strong>de</strong>rnièrementavec le groupe LouiseAttaque. Un <strong>de</strong> nos motsd’ordre fut au plus fort <strong>de</strong>l’épidémie :DANSER = VIVRE.Cette année, c’est au Bataclanqu’aura lieu une Scream auprofit d’Act Up-Paris.du 24 au 30 juin,exposition «<strong>10</strong> <strong>ans</strong> <strong>de</strong> <strong>trop</strong>», ga113, rue Oberkampf, Paris 11 èmeLe combat et l’univers d’ActUp-Paris sera présenté surdifférents types <strong>de</strong> supportsvisuels (photographies, affiches,ban<strong>de</strong>roles, pancartes,tracts et publications), audiovisuel(vidéos) et sonores(manifestations, zaps, interventionà l’Assemblée Nationale,etc.).La scénographie conçue autourd’une collection <strong>de</strong> documentschoisis aura pourobjectif <strong>de</strong> traduire les métho<strong>de</strong>sd’actions d’Act Up-Paris : zaps, manifestations,collage d’affiches, distribution<strong>de</strong> tracts.8


le 26 juin défilé <strong>Gay</strong> Pri<strong>de</strong>La naissance d’Act Up-Paris est lié à la<strong>Gay</strong> Pri<strong>de</strong> <strong>de</strong> 1989. Cet événement estune date <strong>anniversaire</strong> pour l’association.Cette <strong>Gay</strong> Pri<strong>de</strong> a en elle même son importance.Elle fêtera les 30 <strong>ans</strong> du soulèvement<strong>de</strong> Stonewall à New York,acte politique majeur pour la communautéhomosexuelle.Cette année : une ban<strong>de</strong>role au motd’ordre « <strong>10</strong> <strong>ans</strong> <strong>de</strong> <strong>trop</strong> », un semi-remorquechargé d’enceintes diffusant lespécial-mix <strong>de</strong> Patrick VIDAL, « Act upfor ever » et « Sida is disco, in<strong>de</strong>ed !»écrits en blanc sur les toiles rouges duchar. Un grand ventilateur pour rafraîchirles militantEs portant <strong>de</strong>s oriflammesrouges.Et tee-shirts par BARBARA BUI, PAULSMITH et JOSÉ LEVY À PARIS.lerie Glassbox<strong>10</strong> <strong>ans</strong> <strong>de</strong> <strong>trop</strong> !Encore !9


Bernard Kouchner ment« Premier faux-pas du gouvernement Jospin ». C’est ainsi qu’ActUp-Paris avait qualifié la nomination <strong>de</strong> Bernard Kouchner auposte <strong>de</strong> secrétaire d’Etat à la Santé le 4 juin 1997. D<strong>ans</strong> le numéro<strong>de</strong> juillet-août 1997 <strong>de</strong> la revue Têtu, celui-ci s’était déclaréchoqué d’une telle réaction : selon lui, il avait déjà donné, aucours <strong>de</strong> son premier mandat en 1992, les gages <strong>de</strong> son efficacitéet d’un engagement sincère, notamment en matière <strong>de</strong> réduction<strong>de</strong>s risques liés à la toxicomanie, dont les résultats n’auraient étévisibles qu’après son départ : « L’impulsion a été donnée lorsquej’étais ministre <strong>de</strong> la Santé et je suis heureux qu’elle ait été prolongéepar mes succes-seurs. ». Pourquoi, dès lors, les accusationsd’Act Up-Paris ? On interprète l’histoire comme on peut.T 04.04.92Cela fait maintenant <strong>de</strong>ux <strong>ans</strong> queBernard Kouchner occupe à nouveaule secrétariat d’Etat à la Santé.Faudra-t-il attendre ses successeurs,pour voir, enfin, les traces visibles<strong>de</strong> ses engagements ? Car force est<strong>de</strong> constater que le « faux-pas »s’est tr<strong>ans</strong>formé en un immensevautrage : Bernard Kouchner necesse <strong>de</strong> mentir aux mala<strong>de</strong>s et auxmilitants que nous sommes.L’inventaire <strong>de</strong> ses engagements nontenus est, à cet égard, édifiant. Qu’ils’agisse <strong>de</strong> ses promesses en terme<strong>de</strong> campagne <strong>de</strong> prévention, <strong>de</strong> sesengagements pour l’abrogation <strong>de</strong> laloi <strong>de</strong> 1970, <strong>de</strong> ses coups <strong>de</strong> cœurpour la lutte contre le virus <strong>de</strong> l’hépatiteC, <strong>de</strong> sa volonté <strong>de</strong> créer unaccès à une véritable santé publiquepour tous, un seul constat peut êtrefait : en <strong>de</strong>ux <strong>ans</strong>, ce fut beaucoup<strong>de</strong> bruit pour rien.- Aucune campagne <strong>de</strong> préventionen direction <strong>de</strong>s homosexuels n’estvenue remplacer celle censurée parMatignon en juillet 1998 ;- le plan <strong>de</strong> lutte contre le VHC,malgré un lancement fort médiatique,en est toujours au même sta<strong>de</strong>: celui du papier ;- Les volontés d’abroger la loi <strong>de</strong>1970, d’ouvrir la palette <strong>de</strong> substitution,<strong>de</strong> développer <strong>de</strong>s recherchessur les interactions médicamenteuses<strong>de</strong>s traitements VIH et traitements<strong>de</strong> substitution, sont restées vaines ;- l’engagement du Ministère sur lemaintien la Boutique <strong>de</strong> la rueBeaurepaire (Paris <strong>10</strong>ème) a fini enfeu <strong>de</strong> paille : elle sera prochainementtr<strong>ans</strong>férée à la gare du Nord ;- les velléités <strong>de</strong> créer un véritableaccès aux soins et aux droits ont disparu: le projet CMU crée <strong>de</strong> nouvellesexclusions parmi les excluseux-mêmes, la réforme du régime<strong>de</strong>s COTOREP (promis pour septembre)n’a pas été engagée, <strong>de</strong> plusen plus <strong>de</strong> projets du gouvernementvisent à la réduction <strong>de</strong>s droits sociauxaccordés aux mala<strong>de</strong>s ;- les cas d’étrangers en situation irrégulièren’arrivant pas à obtenir les traitementsdont ils ont besoin sont courants; là où Bernard Kouchner pouvaitfaire évoluer la situation, il ne fait quereprendre ce qu’il avait entrepris avecses prédécesseurs : le cas par cas ;- les recherches sur <strong>de</strong> nouvelles moléculespour sortir <strong>de</strong> l’impasse thérapeutiquequi se <strong>de</strong>ssine peu à peun’ont pas été impulsées ; là où on attendd’un ministre qu’il donne uneforte impulsion, nous n’avons qu’unfaible remou ;- l’accueil <strong>de</strong>s toxicomanes reste toujoursaussi déplorable même si celabouleverse notre ministre ; d’ailleursl’accueil hospitalier <strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s du sidare<strong>de</strong>vient peu à peu problématique,montrant les signes d’une déliquescen-<strong>10</strong>


ce <strong>de</strong> ce que nous avions réussi à imposer ;- la réforme <strong>de</strong> la DGS n’est toujours pas visible; cette administration reste toujours aussidécalée, son directeur démisionne aprèsun an <strong>de</strong> fonction.On n’en finirait pas <strong>de</strong> faire le décompte <strong>de</strong>ses mensonges, <strong>de</strong> ses engagements non tenus,<strong>de</strong> ses effets d’annonce non suivis.Pourtant lorsqu’on l’interroge, BernardKouchner n’est pas en manque <strong>de</strong> justifications.Il a, par exemple, « oublié » avoir promis,en juillet 1998 à la conférence <strong>de</strong>Genève, une campagne <strong>de</strong> prévention cibléegay d<strong>ans</strong> <strong>de</strong>s médias grand public. Il se « souvient» d’avoir été interpellé à Genève, mais ilne se « rappelle » plus le motif. L’oubli et lamémoire sélective sont les fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> samétho<strong>de</strong>. Il l’avoue lui-même, il n’est pas rigoureux,il faut faire avec. Il affirme, parexemple, que les campagnes <strong>de</strong> préventionsont efficaces, mais est incapable d’en décrireune seule. Comment, dès lors, accor<strong>de</strong>r ducrédit au moindre <strong>de</strong> ses engagements ?C’est que ses promesses sont vagues. Ne jamaiss’engager formellement, ne jamais fourniraucune échéance, fait partie intégrante<strong>de</strong> sa stratégie <strong>de</strong> séduction. « On verra »est son expression favorite. Un décret surl’élargissement <strong>de</strong> la palette <strong>de</strong> substitution ?« On verra. ». Accor<strong>de</strong>r l’AAH aux personnesinfectées par le virus <strong>de</strong> l’hépatiteC ? « On verra » (variante : « On peutvoir »). Améliorer l’accueil <strong>de</strong>s toxicomanesd<strong>ans</strong> le milieu hospitalier ? « On verra. ».Abroger l’article L630 ? « On verra ».Il imagine qu’il peut retirer tout bénéfice <strong>de</strong>cette rhétorique. D’un côté, il affiche un intérêtpour les mala<strong>de</strong>s et pour leurs revendications.De l’autre, le flou <strong>de</strong> ses engagementslui épargne, pense-t-il, d’avoir àrendre <strong>de</strong>s comptes sur un quelconque calendrier,sur d’éventuels résultats.Malheureusement pour lui, les mala<strong>de</strong>s sontexigeants. Les activistes sont rigoureux etexigent un calendrier et <strong>de</strong>s résultats.Alors il a une <strong>de</strong>rnière para<strong>de</strong> : sa positon<strong>de</strong> faiblesse d<strong>ans</strong> le gouvernement. Ses adversaires,ce seraient la lour<strong>de</strong>ur <strong>de</strong>s administrationset le pouvoir <strong>de</strong>s autres ministères.Appliquer véritablement la loi <strong>de</strong>1994 sur la continuité <strong>de</strong>s soins en prison ?Il le voudrait bien, mais l’AdministrationPénitentiaire et Elisabeth Guigou font obstacle.Régulariser les s<strong>ans</strong>-papiers mala<strong>de</strong>safin qu’ils puissent bénéficier <strong>de</strong> prestationssociales et d’un véritable accès aux soins ?C’est son plus cher désir, mais cela est duressort <strong>de</strong> Jean-Pierre Chevènement, donton connaît l’attachement à la cause <strong>de</strong>s s<strong>ans</strong>papiers,mala<strong>de</strong>s ou non. Améliorer l’accueil<strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s d<strong>ans</strong> les COTOREP et accélérerle traitement <strong>de</strong>s dossiers d’AllocationAdulte Handicapé ? Il a d<strong>ans</strong> ses bagages unprojet <strong>de</strong> réforme, mais difficilement applicable,car tout dépend <strong>de</strong> Martine Aubry, etsurtout <strong>de</strong> Dominique Strauss-Kahn.Ces <strong>de</strong>rniers prétextes révèlent au moinsclairement les priorités <strong>de</strong> cegouvernement : les impératifs <strong>de</strong> la Santé publiquesont soumis aux directives budgétaires<strong>de</strong> Bercy ou aux préjugés <strong>de</strong> Guigou et <strong>de</strong>Chevènement. Mais loin <strong>de</strong> l’excuser, ce jeu<strong>de</strong>s pouvoirs <strong>de</strong>vrait inciter BernardKouchner à plus <strong>de</strong> pru<strong>de</strong>nce d<strong>ans</strong> ses effetsd’annonce enthousiastes. Comment a-t-il eu,par exemple, l’inconscience <strong>de</strong> déclarer, àpropos du FSTI, que « pour un mala<strong>de</strong> traitéau Nord, un mala<strong>de</strong> sera traité au Sud »,alors qu’il connaît la réticence <strong>de</strong> ses partenaireseuropéens et américains à financer cefonds et la faiblesse <strong>de</strong> l’engagement <strong>de</strong> sonpropre gouvernement (25 millions <strong>de</strong> francsen 1999 pour sauver le mon<strong>de</strong> du sida) ? Sixmois plus tard, il <strong>de</strong>vra d’ailleurs corriger sapromesse à Genève : « pour un mala<strong>de</strong> traitéau Nord, <strong>de</strong>s efforts seront faits au Sud ».Susciter <strong>de</strong> faux espoirs chez les mala<strong>de</strong>s,voilà à quoi aboutissent la légèreté et l’inconséquence<strong>de</strong> Bernard Kouchner.Ce manque <strong>de</strong> rigueur n’excuse en rien le secrétaired’état à la Santé. Bien au contraire, ilrend ses mensonges encore plus intolérables.Act Up-Paris va fêter prochainement ses dix<strong>ans</strong>. En dix <strong>ans</strong>, jamais nous n’avons eu affaireà un ministre aussi vain ; jamais nous n’avonseu à entendre autant <strong>de</strong> promesses non tenueset <strong>de</strong> paroles creuses. Considérant sonpassé militant comme une caution suffisantepour se faire « comprendre » et « aimer »<strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s et <strong>de</strong>s activistes, il estime quenous nous satisfaisons <strong>de</strong> ces promesses, etque nous n’avons pas à lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>de</strong>comptes. Il se trompe lour<strong>de</strong>ment. Nousn’aurons <strong>de</strong> cesse qu’il ren<strong>de</strong> effectifs, dèsmaintenant, les engagements qu’il a pris <strong>de</strong>puisqu’il est à son poste.Post Scriptum : soyons justes, il arrive parfoisà Bernard Kouchner <strong>de</strong> dire la vérité. Ou dumoins <strong>de</strong>s vérités. Bien profon<strong>de</strong>s. Ainsi, letitre <strong>de</strong> ce texte, qu’il a publié d<strong>ans</strong> Libérationle 15 mai : « Quand on est mort, c’est pour lavie ». On en rit encore d<strong>ans</strong> les cimetières.11


Dossier d4T !« Avant la d4T »mic. sion.Les enquêtes <strong>de</strong> mic. sion.« Willy Rozenbaum »« Je voudraisqu’on m’expliquel’urgence qu’il y aà traiter un taux<strong>de</strong> triglycéri<strong>de</strong>sélevé.»« Après la d4T »« Depuis le début <strong>de</strong> l’année,<strong>de</strong> fortes présomptionspèsent sur l’implication<strong>de</strong> la d4T (Zerit®)d<strong>ans</strong> le syndrôme <strong>de</strong> la lipoa<strong>trop</strong>hie: joues creuses,fonte <strong>de</strong>s boules <strong>de</strong> Bichat,bras et jambes amaigris. Finavril, <strong>de</strong>s cliniciens ont présentéleurs observations aucolloque Nutrition <strong>de</strong>Cannes, allant d<strong>ans</strong> le sensd’une incrimination du produit.Mais Bristol-MyersSquibb, le laboratoire produisantle Zérit®, n’a toujourspas annoncé qu’ils’engageait d<strong>ans</strong> <strong>de</strong>s recherchesà ce sujet, malgréune <strong>de</strong>man<strong>de</strong> active <strong>de</strong> lapart <strong>de</strong>s associations. »d4T ou grêve <strong>de</strong> la faim ?<strong>10</strong> <strong>ans</strong> <strong>de</strong> <strong>trop</strong> !12


Toxpri<strong>de</strong>Le 7 juin 1998, <strong>de</strong>s usagers <strong>de</strong> drogues pour la premièrefois s’affichaient d<strong>ans</strong> la rue. Trois mille personnesdéfilaient pour l’abrogation <strong>de</strong> la loi <strong>de</strong> 1970, qui réprimela consommation <strong>de</strong> substances « illicites ». Le 5 juin 1999,la secon<strong>de</strong> « Toxpri<strong>de</strong> » défilait à Marseille à l’appel du« Collectif Grand-Sud », antenne régionale du Collectifparisien pour l’abrogation <strong>de</strong> cette loi.De cette manifestation, nous voulonsfaire une Pri<strong>de</strong>, une« Toxpri<strong>de</strong> », qui soit aux usagers<strong>de</strong> drogues ce que la <strong>Gay</strong> Pri<strong>de</strong> estaux pédés et aux lesbiennes : unmoment <strong>de</strong> fierté et <strong>de</strong> visibilité.Afficher une fierté d’usager <strong>de</strong>drogues, c’est d’abord refuser laclan<strong>de</strong>stinité que la loi nous imposeparce qu’elle nous met endanger. Aujourd’hui, près <strong>de</strong> lamoitié <strong>de</strong>s usagers <strong>de</strong> droguespar voie intraveineuse sont atteintspar le virus du sida, etplus <strong>de</strong> 80% par celui <strong>de</strong> l’hépatiteC. C’est qu’en criminalisantl’usage <strong>de</strong> drogues, la loi <strong>de</strong>1970 condamne à la précarité,expose au risque, entrave l’accèsaux soins et nous prive <strong>de</strong>savancées <strong>de</strong> la recherche.Afficher une fierté d’usager, c’estaussi parler pour son proprecompte. C’est substituer au discoursconvenu sur la « toxicomanie» un témoignage d’usager régulierou irrégulier, dépendant ounon-dépendant, mais hédonisteet fier <strong>de</strong> l’être. C’est s’opposer àtous ceux qui, d’une manière oud’une autre, font métier <strong>de</strong> la représentationdu « drogué » et tirentprofit <strong>de</strong> son silence : <strong>de</strong>smé<strong>de</strong>cins et <strong>de</strong>s psychiatres, <strong>de</strong>spoliciers et <strong>de</strong>s juges, <strong>de</strong>s conservateurs<strong>de</strong> droite et <strong>de</strong> gauche.Afficher une fierté d’usager, c’estencore contester les catégories officiellesau nom d’une expériencevécue. C’est avouer un plaisir et lerevendiquer parce qu’il est réel –ni plus ni moins que les dangersencourus. Ce que l’usager sait, etque le rapport Roques a confirméil y a bientôt un an, c’est qu’il n’y apas d’un côté <strong>de</strong>s drogues «douces » et inoffensives méritantd’être légales, et <strong>de</strong> l’autre <strong>de</strong>sdrogues « dures », diaboliques parnature et vouées à l’interdiction. Ily a <strong>de</strong>s produits plaisants s’ils sontbien utilisés, et dangereux s’ils lesont mal. Il y a l’héroïne et l’alcool,le cannabis et la cigarette, lacocaïne et l’automobile, l’opiumet le prozac : une variété <strong>de</strong> produitslégaux (qui ne l’ont pas toujoursété) et <strong>de</strong> produits illégaux(qui ne le resteront pas toujours),dont les effets dépen<strong>de</strong>ntentièrement <strong>de</strong> leurs usages.Etre « responsable », c’est admettrela réalité <strong>de</strong>s drogues plutôtque prétendre les éradiquer,et écouter les usagers <strong>de</strong>drogues que nous sommes, plutôtque les traîner en justice.C’est ai<strong>de</strong>r au développement <strong>de</strong>la maîtrise pratique <strong>de</strong>s droguesplutôt que l’empêcher. C’estcontrôler et garantir la qualité<strong>de</strong>s produits plutôt que les diaboliser.Le <strong>de</strong>voir <strong>de</strong> l’Etat, aujourd’hui,c’est <strong>de</strong> légaliser lesdrogues, toutes les drogues.Act Up-Paris exige la suppression<strong>de</strong> l’article L.630du co<strong>de</strong> <strong>de</strong> la santé publique,qui bloque le débatsur les drogues ; l’abrogation<strong>de</strong> la loi <strong>de</strong> 1970, qui réprimeleur consommation ;et la légalisation <strong>de</strong> tous lesproduits, pour en permettreun usage maîtrisé.T 27.03.9813


Fiers <strong>de</strong> la BoutiqueBeaurepaire : cachez ces usagers que je ne saurais voirOuverte <strong>de</strong>puis le 20 avril 1998 d<strong>ans</strong> le <strong>10</strong> ème arrondissement, la « Boutique » <strong>de</strong> la rue Beaurepaire est lasecon<strong>de</strong> du genre à Paris. Maigre performance pour un gouvernement qui disait il y a <strong>de</strong>ux <strong>ans</strong>, par le biais<strong>de</strong> son ministre <strong>de</strong> la santé, vouloir mettre en place « une ambitieuse politique <strong>de</strong> santé publique d<strong>ans</strong> lechamp <strong>de</strong> la toxicomanie ». Un an tout juste après son ouverture, la « Boutique » est promise à la fermeture,ou plus exactement à une « relocalisation » d<strong>ans</strong> la Gare du Nord. Contre l’avis <strong>de</strong> ses usagers, quin’ont jamais été consultés. Contre l’avis <strong>de</strong>s riverains partis<strong>ans</strong> <strong>de</strong> son maintien, soigneusement tenus àl’écard <strong>de</strong>s négociations. Contre l’avis <strong>de</strong>s élus du <strong>10</strong> ème arrondissement, qui en avaient voté le principe.Contre les « convictions profon<strong>de</strong>s » <strong>de</strong>s autorités sanitaires et sociales, évacuées s<strong>ans</strong> résistance face à laviolence d’une poignée d’opposants. Le 29 mai, nous avons occupé la DDASS du X ème arrondissement : historique<strong>de</strong> l’affaire et compte-rendu <strong>de</strong> notre action.T 01.11.91Janvier 1998, les riverains <strong>de</strong> la rueBeaurepaire découvrent la décision <strong>de</strong> laDDASS et <strong>de</strong> la Mairie du <strong>10</strong> ème arrondissementd’implanter une « Boutique » d’accueild’usagers <strong>de</strong> drogues. Structure dite <strong>de</strong> «bas seuil » gérée par l’association Charonne,elle entend proposer un « premier contact »aux usagers les plus chaotiques, souvent s<strong>ans</strong>domicile et s<strong>ans</strong> couverture sociale :douches, échange <strong>de</strong> seringues, suivi sanitaireet social <strong>de</strong> base – une logique <strong>de</strong>« réduction <strong>de</strong>s risques » comme on rêveraitqu’il en existe encore, s<strong>ans</strong> prétention àéradiquer ni à médicaliser les pratiques <strong>de</strong>sconsommateurs <strong>de</strong> drogues illicites.Avril 1998, la « Boutique » ouvre. Réactionimmédiate <strong>de</strong>s riverains <strong>de</strong> la rueBeaurepaire : manifestations, permanencesquotidiennes <strong>de</strong>vant la « Boutique », jetsd’encre sur sa <strong>de</strong>vanture, menaces sur lepersonnel, traque à l’usager. La violenceconfine bientôt à l’hystérie. Une plainte pour« trouble <strong>de</strong> voisinage » avait été déposéepar l’Association République Canal SaintMartin contre l’association Charonne avantmême l’ouverture <strong>de</strong> la structure.Les usagers sont pris en otage. Les opposantsmenacent la DDASS <strong>de</strong> créer <strong>de</strong>toutes pièces un inci<strong>de</strong>nt violent, dont ilsferaient porter la responsabilité aux « toxicomanes» – prévenue, la police se contentera<strong>de</strong> patrouiller, s<strong>ans</strong> enquêter sur cechantage. De son côté, Charonne, s<strong>ans</strong> avoirà aucun moment songé à consulter les usagerssur ses projets, se livre à une étrangepolitique géographique : également gestionnaire<strong>de</strong> la seule autre boutique parisienne,l’association restreint l’activité <strong>de</strong> son antenne<strong>de</strong> la rue Philippe <strong>de</strong> Girard, pour « pousser» les usagers <strong>de</strong>s quartiers chauds du18 ème vers un <strong>10</strong> ème arrondissement pluscalme – rappel étrange <strong>de</strong>s techniques policières<strong>de</strong> « déplacement » ou <strong>de</strong> « contention» <strong>de</strong>s indésirables.L’association Côté Quartier - regroupement<strong>de</strong>s riverains favorables à l’installation <strong>de</strong> laBoutique - ne parviendra pas à briser ceface-à-face faussé entre un Charonne ambivalent,qui hésitera jusqu’au bout à mobilisersur sa cause, et une poignée <strong>de</strong> commerçantspoujadistes, <strong>de</strong> retraités aigris et <strong>de</strong>propriétaires inquiets. La timi<strong>de</strong> intercession<strong>de</strong>s pouvoirs publics non plus. BernardKouchner, jugeant inutile <strong>de</strong> se déplacer luimême,nomme un « médiateur », lePr. Pissarro : d’emblée, cette médiation poseles opposants en interlocuteurs légitimes. Ledroit privé suit donc son cours, contre lesnécessités <strong>de</strong> la santé publique.Octobre 1998, un accord est signé entre les<strong>de</strong>ux parties, par lequel l’associationCharonne accepte <strong>de</strong> restreindre ses activités,<strong>de</strong> s’abstenir <strong>de</strong> toute publicité sur sonexistence, et d’envisager une « relocalisation» du centre d’accueil, en échange d’un allégement<strong>de</strong> la pression <strong>de</strong>s opposants, jusqu’àce que le tribunal statue. Une partie du personnelest mutée, et les nouveaux arrivantsà la « Boutique » sont éconduits. Prévu pourrecevoir une soixantaine d’usagers, le centre14


3615 JH


Pub télémédia 185x133allogaySi vous n’avez pas accès à internet,créez votre BAL internet sur le 3615 Act Up, 1,23 la minute.. Depuis peu : Archives en ligne.Act Up-Paris sur le Nethttp://www.actupp.org/déjà 31 401 connectionsBEAUCOUP DE FRAICHEUR ET SEULEMENT 2 CALORIES


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Le port militant du Tee Shirt,avec l’aimable participation <strong>de</strong> certains <strong>de</strong> nos militants.Zap Agence National <strong>de</strong>sProduits <strong>de</strong> SantéPour se PaCSer avec un arbrisseau...Pour mieux relire les textes du prochain numéro<strong>de</strong> Protocoles...Pour raconter sa vie sur unechaîne internationale...Pour crier <strong>de</strong>s slog<strong>ans</strong> rageurs ou chanter<strong>de</strong>s ch<strong>ans</strong>ons sympas... « Vent frais, vent dumatin,... »TEE-SHIRTSModèles Taille Prix Quantitéagnès b. GuilbertM n L n 50 FD<strong>ans</strong>er=VivreM n L n 50 FNous sommes la gaucheM n L n 50 FPar le sang, par le sperme, par la loi S n M n L n XL n <strong>10</strong>0 Fagnès b. (blanc ou noir)S n M n L n XL n <strong>10</strong>0 FParis is burning, (Asia is burning M ou L) M n L n XL n <strong>10</strong>0 FSilence=Mort14<strong>ans</strong> n S n M n L n XL n <strong>10</strong>0 FAction=VieS n M n L n XL n <strong>10</strong>0 FColère=ActionS n M n L n XL n <strong>10</strong>0 FAct-Up Paris Logo noir sur gris ou blanc M n L n XL n <strong>10</strong>0 FKnowledge is a weapon* 14<strong>ans</strong> n S n M n L n XL n <strong>10</strong>0 FIgnorance is your enemy** 14<strong>ans</strong> n S n M n L n XL n <strong>10</strong>0 F* ce modèle existe en bleu n , vert n , violet (14 <strong>ans</strong>, Sou L) n** ce modèle existe en bleu n , vert n , violet (14 <strong>ans</strong>, S ou L) n , bor<strong>de</strong>aux (S, M ou L) nSWEAT-SHIRTSModèles Taille Prix QuantitéAct Up-Paris capuche (bleu, vert) L n XL n XXL n 180 FAct Up-Paris s<strong>ans</strong> capuche (bleu) L n XL n XXL n 160 FO* (1er Décembre 1996) M n L n XL n <strong>10</strong>0 FBADGESModèles Prix QuantitéColère=Action, Action=Vie, Silence=Mort 20 FJ’ai envie que tu vives 20 FPersonne ne sait que je suis séropositif(ve) 20 FAttention : les prix indiqués n’incluent pas les frais <strong>de</strong>port qui s’élèvent à 20 F, à rajouter systématiquement.Bon <strong>de</strong> comman<strong>de</strong>. Complétez et retournez accompagné d’un chèque libellé à l’ordre d’Act Up-Paris. BP 287. 75 525. Paris ce<strong>de</strong>x 11.Nom ................................ Prénom ........................ Adresse .............................................................................Après avoir coché les cases, précisez ici le montant total <strong>de</strong> votre chèque Total F .................23


1995) ; les équipes <strong>de</strong>s Unités <strong>de</strong> Consultation et <strong>de</strong> SoinsAmbulatoires (UCSA) et <strong>de</strong>s Secteurs <strong>de</strong> Psychiatrie enMilieu Pénitentiaire (SMPR) doivent coordonner leur actionpour répondre aux besoins <strong>de</strong>s personnes incarcérées (circulairedu 3 avril 1996) ; les traitements <strong>de</strong> substitution par laMéthadone ou le Subutex peuvent être poursuivis ou initiésen détention (circulaire du 5 décembre 1996).Mais personne ne semble veiller à leur application. Sur le terrain,l’incohérence est totale. Diverses rencontres avec <strong>de</strong>smé<strong>de</strong>cins exerçant en milieu pénitentiaire nous ont permisd’en prendre la mesure. Les mé<strong>de</strong>cins <strong>de</strong>s UCSA et <strong>de</strong>s SMPRse disputent la prérogative <strong>de</strong>s prescriptions - les détenus sontpromenés d’un service à l’autre, parfois s<strong>ans</strong> voir aboutir leur<strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> traitement. Les tr<strong>ans</strong>ferts d’établissements sontresponsables d’interruptions brutales <strong>de</strong> prescription - or, onle sait, les sevrages <strong>de</strong> Subutex ou <strong>de</strong> Méthadone sont extrêmementviolents, beaucoup plus que les sevrages d’héroïne, etprovoquent <strong>de</strong>s dépressions graves. Le changement d’établissement« justifie » parfois un changement <strong>de</strong> traitement s<strong>ans</strong>indication médicale ni mesure <strong>de</strong> précaution – alors que les effetscontradictoires du Subutex et <strong>de</strong> la Méthadone peuvententraîner <strong>de</strong>s réactions d’une violence inouïe.Chaque établissement invente sa propre philosophie <strong>de</strong> lasubstitution, et impose aux détenus l’originalité <strong>de</strong> ses pratiques,invoquant, qui <strong>de</strong>s« problèmes éthiques »,qui le statut judiciaire <strong>de</strong>sdétenus, qui <strong>de</strong>scontraintes matérielles ettechniques, mais bien rarement<strong>de</strong>s logiques <strong>de</strong>soin. A Fresnes, jusqu’enmars <strong>de</strong>rnier, les prévenusétaient sevrésd’office ; les tr<strong>ans</strong>itaires etcondamnés à <strong>de</strong>s peinescourtes étaient maintenussous substitution lorsqu’ilsétaient sous traitementavant l’incarcération ; lesautres étaient sevrés puisremis sous traitementquelques mois avant leursortie. A Marseille,l’UCSA et le SMPR ont« décidé <strong>de</strong> suspendreprovisoirement la prescription<strong>de</strong> Subutex, décisiondiscutable et discutée,au profit <strong>de</strong> la Méthadone», annonçait le DocteurPaulet le 11 mai <strong>de</strong>rnier. Ala Maison d’Arrêtd’Avignon entre autres, leSubutex est pilé et diluéd<strong>ans</strong> <strong>de</strong> l’eau. A la Maisond’Arrêt <strong>de</strong> La Santé(Paris), il est administréavec un verre d’eau, avalétout rond au lieu <strong>de</strong>fondre sous la langue, perdant ainsi une partie <strong>de</strong>s vertus <strong>de</strong> la« libération prolongée ». Les mé<strong>de</strong>cins <strong>de</strong>s unités pénitentiairesveulent-ils nous faire croire à leur ignorance <strong>de</strong>s propriétéspharmacologiques <strong>de</strong>s produits qu’ils prescrivent ?Au Ministère <strong>de</strong> la Santé le 11 mai <strong>de</strong>rnier, les intervenants invoquaientleur « souci <strong>de</strong> réinsertion du détenu toxicomane »ou leur grand intérêt pour la « réduction <strong>de</strong>s risques ». Ils exposaientd<strong>ans</strong> le même temps les procédés par lesquels ils sacrifientles choix thérapeutiques <strong>de</strong>s détenus avant leur incarcérationet le travail <strong>de</strong> leurs confrères à l’extérieur <strong>de</strong> la prison.Les pouvoirs publics se disent quant à eux impuissants.Provoqué en janvier <strong>de</strong>rnier par Act Up-Paris sur ces questions,Bernard Kouchner se bornait à nous proposer une nouvellecirculaire. Mais six mois après, rien n’a été fait, ni même esquissé.On laisse <strong>de</strong>s mé<strong>de</strong>cins invoquer une « clause <strong>de</strong>conscience » qui leur interdirait, pour <strong>de</strong>s raisons éthiques, <strong>de</strong>« donner <strong>de</strong> la drogue substituée à <strong>de</strong>s personnes qui sont endétention pour usage <strong>de</strong> drogues » : s<strong>ans</strong> doute, dit-on, les mé<strong>de</strong>cinssont-ils en droit <strong>de</strong> ne pas reprendre à leur compte <strong>de</strong>spratiques qu’ils désavouent. Mais les détenus, eux, n’ont pas lapossibilité <strong>de</strong> choisir leur mé<strong>de</strong>cin : <strong>de</strong> fait, les autorités sanitaireslaissent s’installer une éthique <strong>de</strong> refus <strong>de</strong> soins. Et leprincipe <strong>de</strong> continuité et d’égalité <strong>de</strong>s soins <strong>de</strong> l’extérieur à l’intérieur<strong>de</strong> la prison est bafoué en permanence. Cette situationne peut être tolérée. Une réglementation nouvelle est nécessaire: l’obligation doit être imposée à tous les établissements pénitentiaires<strong>de</strong> trouver <strong>de</strong>s mé<strong>de</strong>cins capables <strong>de</strong> prendre encharge les soins <strong>de</strong>mandés, quelle qu’en soit la nature.La logique judiciaire ne doit plus prendre le pas sur la logique<strong>de</strong> soin. L’épidémie <strong>de</strong> sida a contribué à le montrer :seuls les processus thérapeutiques librement consentis etchoisis sont susceptibles d’efficacité. Mais la prison vientcontredire jusqu’à la liberté <strong>de</strong> suivre <strong>de</strong>s traitements instituésà l’extérieur. Elle remet en cause les choix <strong>de</strong>s individus,ceux <strong>de</strong> leurs mé<strong>de</strong>cins. Elle fait régner sa loi – au méprismême <strong>de</strong> ses autorités <strong>de</strong> contrôle.Les usagers <strong>de</strong> drogues n’ont rien à faire en prison. La prisonest une réponse dangereuse à l’usage <strong>de</strong> drogues. Elle sanctionne<strong>de</strong>s choix <strong>de</strong> consommation s<strong>ans</strong> nocivité pour la société.Elle remet en cause les choix thérapeutiques faits parles usagers avant leur incarcération. Elle les expose à <strong>de</strong>scontaminations. Elle met en danger les mala<strong>de</strong>s en les privant<strong>de</strong>s conditions d’hygiène élémentaires.Act Up-Paris <strong>de</strong>man<strong>de</strong> :- la libération immédiate <strong>de</strong>s détenus incarcérés pourusage <strong>de</strong> drogues,- la continuité <strong>de</strong>s soins entre l’extérieur et l’intérieur<strong>de</strong> la prison,- <strong>de</strong>s traitements <strong>de</strong> substitution pour tous les usagers<strong>de</strong> drogues qui en font la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>,- la création d’un dispositif <strong>de</strong> surveillance et <strong>de</strong>contrainte visant l’application <strong>de</strong> la loi <strong>de</strong> 1994.Détenus, saisissez les services <strong>de</strong> l’IGAS (InspectionGénérale <strong>de</strong>s Affaires Sociales, 25-27 rue d’Astorg 75008Paris) <strong>de</strong>s entraves mises à vos traitements. N’hésitez pasà nous contacter. Nous vous soutiendrons.17


Tox/PrisonSubstitution en prison : à chacun sa loiLa loi <strong>de</strong> 1994 est claire : les détenus doivent bénéficier d’ « une qualité et une continuité <strong>de</strong> soins équivalentesà celles offertes à l’ensemble <strong>de</strong> la population ». Les circulaires ministérielles le sont tout autant : encas d’incarcération, les usagers <strong>de</strong> drogues sous traitement <strong>de</strong> substitution doivent pouvoir bénéficier <strong>de</strong>la poursuite <strong>de</strong> leur traitement. Pourtant, il n’en est rien. Le 11 mai <strong>de</strong>rnier, <strong>de</strong>ux enquêtes sur la substitutionen prison étaient présentées au Ministère <strong>de</strong> la Santé, avec <strong>de</strong>s résultats s<strong>ans</strong> équivoque. Les usagers<strong>de</strong> drogues incarcérés sont entièrement soumis à l’arbitraire <strong>de</strong>s réglementations locales. Le ministère <strong>de</strong>la Santé l’avoue et le déplore. Mais il ne fait rien.Ministère <strong>de</strong> la Santé, 11 mai 1999. Environ 150 personnesparticipaient à la journée consacrée à l’accès aux traitements<strong>de</strong> substitution en milieu carcéral - pour l’essentiel, <strong>de</strong>s mé<strong>de</strong>cinsexerçant en milieu pénitentiaire et <strong>de</strong>s représentants<strong>de</strong>s institutions concernées (Santé, Justice, MILDT). Deuxenquêtes sont présentées : « La substitution aux opiacés enmilieu carcéral d<strong>ans</strong> la région Rhône-Alpes : réalité <strong>de</strong>s pratiques», réalisée en 1997 ; et une « Enquête surles traitements <strong>de</strong> substitution en milieu pénitentiaire», réalisée « un jour donné » entre le 2 et le6 mars 1998 auprès <strong>de</strong> l’ensemble <strong>de</strong>s unités médicalesfrançaises implantées en milieu pénitentiaire(168 unités médicales interrogées : 160 ont réponduau questionnaire concernant le Subutex,150 à celui sur la Méthadone).une qualité et une continuité <strong>de</strong> soins équivalentes à cellesoffertes à l’ensemble <strong>de</strong> la population » (loi <strong>de</strong> 1994) ; en casd’incarcération, les usagers <strong>de</strong> drogues sous traitement <strong>de</strong>substitution doivent pouvoir bénéficier <strong>de</strong> la poursuite <strong>de</strong>leur traitement (circulaire du 11 janvier 1995) ; les mé<strong>de</strong>cinspsychiatres en milieu pénitentiaire doivent être associés ausuivi <strong>de</strong> la politique <strong>de</strong> substitution (circulaire du 31 marsDébut mars 1998, 52937 personnes étaientécrouées d<strong>ans</strong> les établissements pénitentiairesayant participé à l’enquête sur le Subutex et5<strong>10</strong>01 d<strong>ans</strong> ceux <strong>de</strong> l’enquête sur la Méthadone.Parmi elles, <strong>10</strong>56 bénéficiaient d’un traitement <strong>de</strong>substitution : 879 (85%) recevaient du Subutex,159 (15%) <strong>de</strong> la Méthadone.En France, 30% <strong>de</strong>s personnes incarcérées le sontpour Infraction à la Loi sur les Stupéfiants (ILS).Mais 2% seulement <strong>de</strong>s détenus sont sous traitement<strong>de</strong> substitution. Traduction : les usagers <strong>de</strong>drogues incarcérés sont pour la plupart sevrésd’office - qu’ils soient ou non substitués lors <strong>de</strong> leurentrée en prison. Sur 168 établissements pénitentiaires,44 ne prescrivent aucune substitution et 74détiennent moins <strong>de</strong> 6 usagers <strong>de</strong> drogues substitués: la prison <strong>de</strong> Fleury-Mérogis concentre à elleseule 28% <strong>de</strong>s usagers substitués. Quant au principe<strong>de</strong> continuité <strong>de</strong>s soins <strong>de</strong> l’extérieur à l’intérieur<strong>de</strong> la prison, il est largement bafoué : 22% <strong>de</strong>straitements Subutex et 13% <strong>de</strong>s traitementsMéthadone sont interrompus en moyenne lors <strong>de</strong>l’entrée en prison – avec <strong>de</strong>s privations <strong>de</strong> traitementplus fréquentes d<strong>ans</strong> les « établissements13 000 » que d<strong>ans</strong> les établissements publics.La loi et les circulaires ministérielles sont pourtantlimpi<strong>de</strong>s : les détenus doivent bénéficier d’ «T 06.05.94


trées par les personnes touchées par le VIH, mais qui en réalitén'a pas fonctionné. Les problèmes d'assurabilité que nous rencontronsrejoignent ceux <strong>de</strong>s personnes touchées par le VHCou le cancer, nous refusons <strong>de</strong> laisser les compagnies d'assurancetraiter ces pathologies selon <strong>de</strong>s procédés analogues.Notre revendication d’un droit universel à l'assurance privilégiela réforme du cadre juridique <strong>de</strong>s assurances, afin d'offriraux personnes touchées par VIH <strong>de</strong>s moyens d'action efficacescontre les injustices commises par les compagnies d'assurance.Le régime <strong>de</strong> l'assurance est hors du champ <strong>de</strong> la loi anti discriminations90-902 du 12 juillet 1990. Si l'article 225-1 duCo<strong>de</strong> Pénal stipule : "Constitue une discrimination toute distinctionopérée entre les personnes physiques à raison <strong>de</strong> leurorigine, <strong>de</strong> leur sexe, <strong>de</strong> leur situation <strong>de</strong> famille, <strong>de</strong> leur état<strong>de</strong> santé, <strong>de</strong> leur handicap, <strong>de</strong> leurs moeurs, <strong>de</strong> leurs opinionspolitiques, <strong>de</strong> leurs activités syndicales, <strong>de</strong> leur appartenanceou <strong>de</strong> leur non appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie,une nation, une race ou une religion déterminée", l'article 225-3 précise qu'"en vertu du caractère aléatoire <strong>de</strong> certainscontrats, ces dispositions ne sont pas applicables aux discriminationssur l'état <strong>de</strong> santé quand elles consistent en <strong>de</strong>s opérationsayant pour objet la prévention et la couverture du risquedécès, <strong>de</strong>s risques portant atteinte à l'intégrité physique <strong>de</strong> lapersonne ou <strong>de</strong>s risques d'incapacité <strong>de</strong> travail ou d'invalidité".Nous exigeons l’abrogation <strong>de</strong> l’article 225-3 et la soumission<strong>de</strong>s assurances à <strong>de</strong>s sanctions pénales pour discrimination surl’état <strong>de</strong> santé <strong>de</strong>s personnes.uniformisation et leur respect à l’échelle nationale, afin <strong>de</strong>rendre les tables <strong>de</strong>s actuaires plus conformes aux réalités médicaleset sociales du VIH.Etant donné les difficultés particulières rencontrées par lespersonnes touchées par le VIH, la création d'un dispositif chargé<strong>de</strong> régler les problèmes <strong>de</strong> terrain est indispensable. Arcatpropose la création d'une commission interassociative chargée<strong>de</strong> traiter les dossiers problématiques avec les assureurs, en<strong>de</strong>hors du comité <strong>de</strong> suivi. Cette commission pourrait bénéficierdu savoir-faire <strong>de</strong> Sida Info Droit en la matière. Son actionserait renforcée par la mise en place d'un fonds <strong>de</strong> solidarité.En France, le secteur <strong>de</strong>s assurances est un domaine privé,donc soumis aux lois du marché. Par solidarité et pour le respect<strong>de</strong> la dignité <strong>de</strong>s personnes touchées par le VIH, nous exigeonsque le gouvernement, en concertation avec les partiesconcernées, prenne les mesures nécessaires permettant l'accèsà tous au régime <strong>de</strong> l'assurance, l'assouplissement du régime <strong>de</strong>l'assurance vis-à-vis <strong>de</strong>s pathologies lour<strong>de</strong>s, le respect réel <strong>de</strong>la confi<strong>de</strong>ntialité <strong>de</strong>s informations sur la santé <strong>de</strong>s personnes.Nous <strong>de</strong>mandons la révision <strong>de</strong> la loi du 31 décembre 1989sur les questionnaires d’assurance et exigeons leur suppression,tout au moins, comme le propose Ai<strong>de</strong>s Fédération, en<strong>de</strong>ssous d'un certain seuil (par ex. <strong>10</strong>0 000 FF), toutes <strong>de</strong>man<strong>de</strong>sd'emprunts confondues. Cette exigence s’accompagneraitd’une mutualisation <strong>de</strong>s risques en <strong>de</strong>ssous <strong>de</strong>s<strong>10</strong>0 000 FF. Au <strong>de</strong>ssus du seuil, l'assureur pourrait recourir auquestionnaire ou à l'examen médical, mais selon <strong>de</strong>s modalitésstrictes assurant la confi<strong>de</strong>ntialité <strong>de</strong>s informations médicales.Le candidat serait alors intégré au régime <strong>de</strong> l'assurance avecsurprime, d<strong>ans</strong> le cadre d'une codification rigoureuse <strong>de</strong> la notiondu risque aggravé, afin d'éviter les surprimes abusives.La convention <strong>de</strong> 1991 et son annexe envisageaient les conditionsd<strong>ans</strong> lesquelles l’assureur pouvait <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r au souscripteur<strong>de</strong> se soumettre à <strong>de</strong>s examens médicaux, les modalités<strong>de</strong> circulation <strong>de</strong>s informations du souscripteur à l’assureurpar l’intermédiaire du mé<strong>de</strong>cin-conseil et leur nature. Nousexigeons que le rôle du mé<strong>de</strong>cin-conseil <strong>de</strong> l’assurance soit réviséet contrôlé, afin <strong>de</strong> rendre passible <strong>de</strong> sanctions la divulgationd’informations confi<strong>de</strong>ntielles. En aucun cas l’assureurn’est en droit d’exiger d’accé<strong>de</strong>r directement aux informationsmédicales. Nous <strong>de</strong>mandons également que les questionnairesd’assurance soient uniformisés et régulièrement mis à jour, afind’en exclure les questions et les formulations tendancieuses.Notre réflexion concerne les modalités d'assurance pour toute<strong>de</strong>man<strong>de</strong> d'emprunt (immobilier, à la consommation,concernant l'acquisition <strong>de</strong> locaux et <strong>de</strong> matériels professionnels),la couverture du risque décès, mais aussi la couverture<strong>de</strong>s risques portant atteinte à l'intégrité physique <strong>de</strong> la personneet <strong>de</strong>s risques d'incapacité <strong>de</strong> travail. Pour chaque cas, il importe<strong>de</strong> contrôler les métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> calcul <strong>de</strong>s primes, leurT 14.09.9715


Assurances et VIHLa convention <strong>de</strong> 1991 et les dérives <strong>de</strong> l’assuranceLa Convention sur l'assurabilité <strong>de</strong>s personnes séropositiveset sur les règles <strong>de</strong> confi<strong>de</strong>ntialité du traitement <strong>de</strong>s informationsmédicales par l'assurance a été signée entre leMinistère <strong>de</strong> l'Economie, <strong>de</strong>s Finances et du Budget, leMinistère <strong>de</strong> la Santé, la Fédération Française <strong>de</strong>s Sociétésd'Assurances, l'Union Syndicale <strong>de</strong>s Sociétés Etrangèresd'Assurances, le Groupement <strong>de</strong>s Sociétés d'Assurances àcaractère mutuel et la Caisse Centrale <strong>de</strong>s MutuellesAgricoles le 3 septembre 1991.La convention encadre les questions liées aux infections àVIH pouvant figurer d<strong>ans</strong> les questionnaires médicaux queles compagnies d'assurance font remplir aux candidats lors<strong>de</strong> l'évaluation du risque avant l'établissement du contrat.Les questions autorisées sont les suivantes : "Avez-vous ounon subi un test <strong>de</strong> dépistage <strong>de</strong> la séropositivité ? Si oui, indiquezle résultat du test et sa date." et "Avez-vous eu uneinfection conséquence d'une immuno-déficience acquise ?".La convention <strong>de</strong> 1991 cautionne donc le principe du questionnairemédical, instauré par la loi du 31 décembre 1989.Or, les questionnaires <strong>de</strong>s assurances sont loin <strong>de</strong> tous s'entenir aux <strong>de</strong>ux questions autorisées et bien souvent, la réponseaffirmative à au moins l'une <strong>de</strong>s questions entraîne lerefus pur et simple du dossier, s<strong>ans</strong> plus <strong>de</strong> justification. Deplus en plus <strong>de</strong> personnes séropositives ou ayant déclaré unsida sont amenées à être candidates à l'assurance, d'autantque le recours à l'assurance est quasiment systématiquepour <strong>de</strong> nombreux actes courants (emprunts bancaires...).Pour éviter <strong>de</strong> se voir exclues du régime <strong>de</strong> l'assurance,nombre <strong>de</strong> personnes touchées par le VIH sont tentées parla fausse déclaration. Or toute fausse déclaration peut entraînerla nullité du contrat, conformément à l'article L 113-8 du Co<strong>de</strong> <strong>de</strong>s Assurances, ce que nous a rappelé avec forcela décision <strong>de</strong> la Cour <strong>de</strong> Cassation du 7 octobre 1998.Les compagnies d'assurance sont également autorisées à <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rle test <strong>de</strong> dépistage <strong>de</strong> la séropositivité, lorsque"l'importance <strong>de</strong>s capitaux souscrits ou les informations recueilliesà l'occasion du questionnaire <strong>de</strong> risques le justifient",et d<strong>ans</strong> les conditions suivantes : l'assurable donne son accordpréalable ; le test est toujours prescrit par un mé<strong>de</strong>cin ;le mé<strong>de</strong>cin d'assurance veille à ce que <strong>de</strong>s informationssoient données au candidat à l'assurance avant et après l'examenbiologique ; le test est intégré à un examen médical pluscomplet ; le mé<strong>de</strong>cin d'assurance invite le candidat à désignerun mé<strong>de</strong>cin auquel le résultat du test est adressé.D<strong>ans</strong> son annexe, la convention <strong>de</strong> 1991 insiste sur lamarche à suivre pour préserver le secret médical et la confi<strong>de</strong>ntialité<strong>de</strong>s informations médicales. En réalité, ces précautionssont fréquemment bafouées et l'on compte nombre<strong>de</strong> cas où le questionnaire médical est directement remplipar le candidat à l'assurance sous les yeux du banquier.Lorsqu’une compagnie d’assurance accepte le dossier d’uncandidat, elle est tenue <strong>de</strong> respecter ses engagements lorsdu règlement <strong>de</strong> la prestation garantie. Cela n'empêche pascertains assureurs <strong>de</strong> contester le contrat et <strong>de</strong> se retournercontre le souscripteur.La convention <strong>de</strong> 1991 propose la couverture du risque décèspour un emprunt immobilier contracté par une personne séropositive,sur un montant maximum <strong>de</strong> 1 million <strong>de</strong> francs etune pério<strong>de</strong> comprise entre 5 et <strong>10</strong> <strong>ans</strong>, avec surprime.Un comité <strong>de</strong> suivi, réuni <strong>de</strong>ux fois par an, était chargé <strong>de</strong> faireconnaître cette convention auprès <strong>de</strong>s assureurs, <strong>de</strong> la faireappliquer, d'en sanctionner les dysfonctionnements et <strong>de</strong>la faire évoluer en fonction <strong>de</strong>s avancées thérapeutiques. Il secomposait <strong>de</strong> représentants <strong>de</strong>s pouvoirs publics, du ConseilNational du Sida, <strong>de</strong>s assurances, <strong>de</strong>s personnes atteintes parle VIH (participation <strong>de</strong> Ai<strong>de</strong>s Fédération), <strong>de</strong>s banques, <strong>de</strong> laprofession médicale (dont un mé<strong>de</strong>cin conseil <strong>de</strong> l'assurance),du corps scientifique et <strong>de</strong>s consommateurs. En réalité<strong>de</strong>puis 1991, la convention est restée quasiment ignorée <strong>de</strong>sassureurs et du public. Elle n'a réglé qu'une quinzaine <strong>de</strong> dossiersen tout, alors que la ligne téléphonique <strong>de</strong> Sida InfoDroit enregistre environ 400 appels par an pour <strong>de</strong>s problèmesd'assurance. Le comité <strong>de</strong> suivi a fini par ne plus seréunir, les assurances refusant <strong>de</strong> jouer le jeu <strong>de</strong>s négociations.Compte tenu du caractère restrictif et <strong>de</strong> la mauvaiseapplication <strong>de</strong> cette convention, les représentants <strong>de</strong>s personnestouchées par le VIH l'ont très vite boycottée.Les positions d'Act Up-ParisSuite à la relance du dossier assurances et VIH par les pouvoirspublics en novembre 1998, Act Up a accepté <strong>de</strong> participerau dialogue avec le secrétariat d’Etat à la Santé et àl’Action Sociale, aux côtés <strong>de</strong> Ai<strong>de</strong>s Fédération, Sida InfoService et Arcat-Sida. En parallèle, une plate-forme <strong>de</strong> travailinterassociative s’est mise en place, afin <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s propositionsaux pouvoirs publics et aux compagnies d’assurance, et<strong>de</strong> construire un dispositif offrant <strong>de</strong>s solutions concrètesaux problèmes que rencontrent les personnes.Act Up est prêt à participer aux réunions d'un nouveau comité<strong>de</strong> suivi sur l'assurabilité <strong>de</strong>s personnes touchées par leVIH, si ce comité sort <strong>de</strong>s modalités <strong>de</strong> la convention <strong>de</strong>1991 et est élargi aux quatre associations <strong>de</strong> lutte contre lesida. Il aurait pour but principal <strong>de</strong> publier après six mois unrapport à l'attention <strong>de</strong>s Ministres concernés. Ses missionsprincipales seraient : informer les participants sur l'évolution<strong>de</strong> la maladie et ses conséquences sur l'activité d'assurance ;examiner les difficultés particulières signalées et les problèmesque pose l'accès au régime <strong>de</strong> l'assurance ; proposer<strong>de</strong>s mesures pour améliorer les conditions <strong>de</strong> souscriptionet d'exécution <strong>de</strong>s contrats ainsi que la couverture <strong>de</strong>srisques ; faire un compte-rendu à l'usage <strong>de</strong>s Ministresconcernés à l'issue <strong>de</strong> ses réunions.Nous refusons <strong>de</strong> réactiver par la convention <strong>de</strong> 1991 un systèmequi a pu donner l'impression au début <strong>de</strong>s années 1990que les assurances se penchaient sur les difficultés rencon-14


gné. Soutenu par l’AFVP, il obtient un financement<strong>de</strong> l’Union Européenne et le projet VieNouvelle prend forme : en échange <strong>de</strong> 1 500FCFA par mois (50% <strong>de</strong> « salaires » et 50%pour une caisse « au cas où ») les témoignagescommencent. Il est rejoint par 4autres personnes qui déci<strong>de</strong>nt elles-aussi <strong>de</strong>se faire connaître en tant que séropositifs, aurisque <strong>de</strong> se faire jeter <strong>de</strong> leur travail, bannir<strong>de</strong> leur famille et expulser <strong>de</strong> leur logement.Pour que ce projet ne soit pas une fin en soi,les séropos qui y participent déci<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>monter en parallèle une association <strong>de</strong> soutienaux personnes atteintes. Mais pourtoutes sortes <strong>de</strong> raisons plus ou moins absur<strong>de</strong>s- <strong>de</strong> sordi<strong>de</strong>s raisons personnelles,<strong>de</strong>s ragots circulant sur la vie privée <strong>de</strong>smembres du Projet Vie Nouvelle, le désintérêt<strong>de</strong> l’Etat - le projet s’arrête en décembre1998, l’Union Européenne cesse <strong>de</strong> verserles sol<strong>de</strong>s mensuelles, s<strong>ans</strong> aucune explication.D<strong>ans</strong> un premier temps la caisse sert <strong>de</strong>dépannage, pour quelques semaines. Maisquand on n’a ni argent, ni soutien familial ouamical, ni logement, ni travail, les maigres réservesfon<strong>de</strong>nt vite. La dynamique associative,biaisée et minée dés le début par lesquestions <strong>de</strong> rétributions <strong>de</strong>s témoignages et<strong>de</strong> paiement <strong>de</strong>s séropositifs pour apparaîtreen tant que tels, n’est pas d’un grand recours.Aujourd’hui l’association rencontreénormément <strong>de</strong> difficultés pour s’organiser,d’autant que beaucoup <strong>de</strong>s personnes activesd<strong>ans</strong> le projet - celles qui sont encore en vieaujourd’hui - sont très mala<strong>de</strong>s.Le seul moyen d’accé<strong>de</strong>r aux soins, quand onn’a plus les moyens, c’est le centre Arc EnCiel <strong>de</strong> Cotonou : <strong>de</strong>ux chambres <strong>de</strong> 2 et 3lits, un salle d’examens vi<strong>de</strong>, une pièce quifait office <strong>de</strong> laboratoire, vi<strong>de</strong>, un bureau avecquelques médicaments et une salle d’osculation,vi<strong>de</strong>. Le personnel qui y travaille est bénévole,attend un salaire improbable qui n’estjamais versé. Hormis quelques dons, il n’y apas <strong>de</strong> budget, pas <strong>de</strong> financement, pas <strong>de</strong>médicaments, pas <strong>de</strong> nourriture. Le dimancheprécédant notre venue, un séropo yest mort... <strong>de</strong> faim. Pour terminer la visite<strong>de</strong>s lieux, en fond <strong>de</strong> cour, cachée, une pièce,barreaux aux fenêtres, ca<strong>de</strong>nas à l’entrée, unlit occupant tout l’espace ; c’est la chambred’agonie où sont placées les personnes en fin<strong>de</strong> vie pour éviter <strong>de</strong> déprimer les mala<strong>de</strong>sencore vivants. Le gardien, séropo <strong>de</strong> 60 <strong>ans</strong>,conclu d’un sourire : « Qui vit d’espoir, nemeurt pas <strong>de</strong> chagrin. »T 23.02.9813


Le sida au CamerounOrigine du sida et débauche du capitalismeLes quinze millions d’habitants qui peuplent le Camerounsont soumis <strong>de</strong>puis dix-sept années maintenant au très fermeprési<strong>de</strong>nt Paul Biya, ami notoire <strong>de</strong> Jacques Chirac.Depuis dix <strong>ans</strong>, la mauvaise gestion du pays, la dévaluationdu franc CFA, et les programmes d'ajustement structurel,ont conduit le Cameroun à un appauvrissement catas<strong>trop</strong>hique(les fonctionnaires ont, par exemple, perdu 75% <strong>de</strong>leur pouvoir d'achat) ; enfin la corruption déjà bien implantéen'a fait que s'accroître.Le passage du régime totalitaire à une dictature "light", aconduit à l’édiction <strong>de</strong> la loi du 19 décembre 1990, qui reconnaît,enfin, le regroupement associatif, mais n'autorisetoujours pas les ONG à recevoir dons ou subventions sielles ne sont pas reconnues d'utilité publique - seulementquatre associations sanitaires ont à ce jour reçu cet agrément.Ces structures sont, en effet, assimilées à un contrepouvoirdangereux par les autorités. Les bailleurs <strong>de</strong> fondsne peuvent donc pas soutenir les associations, exception faite<strong>de</strong> la coopération alleman<strong>de</strong> (GTZ) qui dès 1993, pressentantla nécessité d'une action sanitaire, a souhaité malgrétout démarrer un projet "santé sexuelle <strong>de</strong>s jeunes et <strong>de</strong>sadolescents" avec les associations - dont l'association <strong>de</strong>sfrères et sœurs unis, AFSU, partenaire <strong>de</strong> Planet Africa.Après quatre années <strong>de</strong> tractations avec le gouvernement,qui souhaitait que le contrôle du projet soit assuré par leMinistère <strong>de</strong> la santé publique, la GTZ s’est tournée vers lesassociations pour un appui direct (financement <strong>de</strong> loyers,équipements, conseils…), à l’insu <strong>de</strong>s pouvoirs publics.Au Cameroun, il y a <strong>de</strong>ux <strong>ans</strong>, le Ministère déclarait n'avoiraucun cas <strong>de</strong> sida sur son territoire ; il y a un an, il ne reconnaissaitpas la tr<strong>ans</strong>mission materno-fœtale ; aujourd'hui laprévalence à VIH est <strong>de</strong> 5% selon l'ONUSIDA, 6,5% selon leCNLS, 9% selon le centre Pasteur, et 12% selon Mé<strong>de</strong>cinss<strong>ans</strong> Frontières. D<strong>ans</strong> ce contexte <strong>de</strong> déni <strong>de</strong> la maladie, iln'est pas surprenant qu'aucune campagne <strong>de</strong> prévention efficacen’ait été menée. Ce ne sont pourtant pas les structureset le personnel qualifié médical qui font défaut.Malheureusement pour la très gran<strong>de</strong> majorité <strong>de</strong>s camerounaisl'accès aux soins est payant, le coût <strong>de</strong>s services,exorbitant, est basé sur le pouvoir d’achat d’il y a <strong>10</strong> <strong>ans</strong>(entrée <strong>de</strong>s hôpitaux, "motivation du mé<strong>de</strong>cin", médicaments,chambre…) et ceux-ci en sont exclus.D<strong>ans</strong> ce pays où l'on a démontré la tr<strong>ans</strong>mission du virus dusinge à l'homme et découvert <strong>de</strong>s sous-types tels que le Oou le N, certaines ve<strong>de</strong>ttes françaises <strong>de</strong> nos hôpitaux mènentune course effrénée au prix Nobel : en échange d'uneboîte <strong>de</strong> paracétamol, ils bénéficient pour leur recherched’un véritable réservoir <strong>de</strong> mala<strong>de</strong>s précaires donc dociles.(cf. essai Presica d<strong>ans</strong> le prochain numéro d'Action ouConceptrol d<strong>ans</strong> le prochain numéro <strong>de</strong> Protocoles). ActUp-Paris fera tout pour renforcer les soins et les droits <strong>de</strong>spersonnes atteintes inclues d<strong>ans</strong> ces protocoles et dénoncele ministère <strong>de</strong> la santé publique camerounais pour son incompétenceet son inaction <strong>de</strong>puis 1985.Le sida au BéninBailleurs <strong>de</strong> fonds cherchent société civile...Cité en exemple pour son adoption <strong>de</strong> la démocratie, le régimepolitique au Bénin reste pourtant mitigé. Avec les Pl<strong>ans</strong>d’Ajustement Structurel successifs du Fond MonétaireInternational, l’Etat n’a pas embauché <strong>de</strong>puis 1986 : pas <strong>de</strong>remplacement, aucun recrutement, voire même un certaindégraissage durant ces 13 <strong>de</strong>rnières années. Pour rembourserla <strong>de</strong>tte, il faut savoir faire <strong>de</strong>s économies ! Economiessur le personnel <strong>de</strong> santé par exemple. Mais comment restreindreson budget quand on ne connaît même pas le montantalloué ? Le ministère <strong>de</strong>s finances ne communique aucunchiffre ; les lignes budgétaires restent inconnues <strong>de</strong> tous. Detoute façon la règle est simple : il n’y a pas d’argent.En 1995, lorsque Bruno Edico vient <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong>l’Association Française <strong>de</strong>s Volontaires du Progrès pour menerson <strong>de</strong>rnier combat face au sida, il est pris pour un fou ; ilveut témoigner en tant que personne séropositive et montrerqu’au Bénin le sida existe, qu’il a un visage, en l’occurrencecelui d’un homme défiguré par un zona oculaire mal soi-12


N/SBurundi is Burning200 000 morts du sida, 260 000 personnes vivantavec le VIH/sida, <strong>10</strong>0 personnes sous traitement.L’ONU reconnaît enfin, que la première cause <strong>de</strong> mortalitéen Afrique, est le sida. « Quand la maison brûle, on ne peutplus cacher la fumée ». Ce proverbe, cité le 23 avril par leministre <strong>de</strong> la santé du Burundi pour qualifier la propagationet les ravages <strong>de</strong> l’épidémie <strong>de</strong> sida, n’est en rien exagéré.Avec une population <strong>de</strong> six millions d’habitants, et un salairemoyen <strong>de</strong> 300 FF par mois, le Burundi compte 260 000 séropositifs.Déjà 200 000 personnes sont mortes du sida, etce chiffre est, <strong>de</strong> l’aveu même du ministre <strong>de</strong> la santé, sousestimé.Proportionnellement, c’est comme si on comptait enFrance 2 000 000 <strong>de</strong> morts. Derrière cette litanie <strong>de</strong>chiffres, il y a <strong>de</strong>s hommes, <strong>de</strong>s femmes, dont l’âge varieentre 15 et 40 <strong>ans</strong>. Derrière ces morts, il y a aujourd’hui1<strong>10</strong> 000 orphelins du sida, dont beaucoup sont contaminés.Depuis le plan <strong>de</strong> restructuration imposé au gouvernementpar la Banque Mondiale, le système <strong>de</strong> soin est <strong>de</strong>venu à gestionprivée. Le mala<strong>de</strong> paie pour avoir un lit à l’hôpital, il paieaussi pour avoir <strong>de</strong>s médicaments. Il fournit lui-même lescompresses, seringues, sa nourriture et ses couvertures, etc.Le système <strong>de</strong> couverture sociale (privé) profite à 5% <strong>de</strong>sBurundais, et <strong>de</strong> toute façon, le remboursement est plafonné.Les médicaments importés (la gran<strong>de</strong> majorité <strong>de</strong>s médicamentspour le soin <strong>de</strong>s maladies opportunistes) sont 50%plus chers qu’en France. Quand ils sont disponibles !Lors <strong>de</strong> notre séjour au Burundi, le gouvernement a annoncéle lancement d’un plan stratégique <strong>de</strong> lutte contre le sida surtrois <strong>ans</strong> : prévention, accès aux soins, traitements, tout yest… sauf les moyens. Le budget proposé par le PNLS(Programme National <strong>de</strong> Lutte contre le Sida) est <strong>de</strong> 6 millions<strong>de</strong> dollars, dont 5 restent à trouver auprès <strong>de</strong>s bailleurs<strong>de</strong> fonds internationaux. Nous avons interrogé le Dr Jeanine,responsable du point focal ONUSIDA au Burundi, sur lecontenu du programme <strong>de</strong> lutte contre le sida qui se met enplace. Elle nous a répondu, avec une langue <strong>de</strong> bois consommée,et en refusant <strong>de</strong> nous communiquer le budget <strong>de</strong> ceprogramme, qu’une gran<strong>de</strong> priorité serait donnée à la prévention,avec un volet « soins à domicile » pour les mala<strong>de</strong>s.Les mala<strong>de</strong>s, <strong>de</strong> toute façon, tout le mon<strong>de</strong> s’en fout, celacoûte <strong>trop</strong> cher <strong>de</strong> les soigner.Mais le manque d’argent n’est pas seul responsable <strong>de</strong>l’abandon <strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s à la mort. L’absence <strong>de</strong> volonté politique,le cynisme <strong>de</strong> la Banque mondiale et <strong>de</strong>s laboratoirespharmaceutiques (qui refusent <strong>de</strong> baisser les prix <strong>de</strong>s trithérapieset font du lobbying d<strong>ans</strong> le cadre <strong>de</strong>s accords Tripspour empêcher la fabrication <strong>de</strong>s génériques par les payspauvres), l’inertie <strong>de</strong> l’ONUSIDA et <strong>de</strong> l’OMS participentaussi à accentuer l’hécatombe qui a décimé toute une génération,ramenant l’espérance <strong>de</strong> vie d<strong>ans</strong> ce pays à 39 <strong>ans</strong>.Les associations burundaises <strong>de</strong> lutte contre le sida, dontl’ANSS, association partenaire d’Act Up-Paris, font un travailadmirable, avec <strong>de</strong>s moyens ridicules. Elles représentent leseul espoir pour ces mala<strong>de</strong>s puisque globalement tout ce quiest fait pour les séropos d<strong>ans</strong> ce pays, ce sont elles (ANSS,SWAA Burundi, FVS, AVESI) qui le font : dépistage anonyme,consultations médicales et fourniture <strong>de</strong> médicaments gratuits,soutien psychologique, prévention, soutien alimentaire,placement d<strong>ans</strong> <strong>de</strong>s familles d’accueil <strong>de</strong>s orphelins du sida,etc. Leurs volontaires et leurs salariés, généralement séropositifs,Théophile, Jeanne Gapiya et Juvenal <strong>de</strong> l’ANSS, DrJanvière et Isabelle Baema <strong>de</strong> la SWAA, Caritas Habonimanocoordinatrice <strong>de</strong> FVS, Mboko Louis porte-parole <strong>de</strong>s séropositifset coordinateur d’AVISI, sont <strong>de</strong> véritables militants.Les mala<strong>de</strong>s, eux, savent que les trithérapies sont hors <strong>de</strong>portée pour l’instant. Les associations savent que si unprogramme d’accès à ces trithérapies se met en place, ilbénéficiera d’abord à ceux qui ont <strong>de</strong> l’argent et/ou <strong>de</strong>s relations.C’est pourquoi, avec le soutien d’Act Up, elles proposentau gouvernement et à ONUSIDA, l’adoption dutraitement par le Bactrim® en préventif, produit localementen générique. Ce traitement, d’un coût mensuel <strong>de</strong>6 FF par mala<strong>de</strong>, permettrait à <strong>de</strong>s dizaines <strong>de</strong> milliers <strong>de</strong>séropositifs, aujourd’hui s<strong>ans</strong> soins, <strong>de</strong> tenir un peu pluslongtemps en bonne santé, en attendant mieux.Cette mission <strong>de</strong> la commission Nord/Sud d'Act Up-Paris auBurundi a eu lieu d<strong>ans</strong> le cadre du projet Planet Africa (quiconsiste à mettre en réseau les associations <strong>de</strong> lutte contrele sida africaines via Internet, pour qu’il y ait échange d’informations).Le second objectif était <strong>de</strong> recueillir <strong>de</strong>s informations,et <strong>de</strong> rencontrer les séropositifs <strong>de</strong> ce pays. Nousavons constaté que les diverses composantes <strong>de</strong> l’ONUopérant au Burundi, ainsi que les ONG internationales, netravaillent pas avec les ONG locales et ne les soutiennentpas financièrement. Elles préfèrent <strong>de</strong> l’aveu <strong>de</strong>s responsables<strong>de</strong> ces organismes, soutenir le gouvernement, quandbien même une gran<strong>de</strong> partie <strong>de</strong>s fonds qui lui sont versésdisparaît d<strong>ans</strong> la nature. Les budgets <strong>de</strong> ces organismes internationauxsont eux aussi absorbés par <strong>de</strong>s frais <strong>de</strong> fonctionnementperdus en paperasserie, enquête <strong>de</strong> tout genre,groupes thématiques, forums et congrès.Nous avons arraché la promesse d’une ai<strong>de</strong> financière <strong>de</strong> cesassociations au Dr Yankalbé, directeur <strong>de</strong> l’OMS au Burundi,à M. Athanase Nzokirishaka, responsable du volet sida auFNUAP, au Dr Schwartz responsable <strong>de</strong> la coopération françaiseà Paris qui dispose d’un budget <strong>de</strong> 1,4 millions <strong>de</strong> FFpour le Burundi, ainsi qu’à Monsieur Rudd, représentant <strong>de</strong>l’Union Européenne sur place, qui dispose d’un Budget <strong>de</strong>50 Millions d’Euros pour l’ai<strong>de</strong> au Burundi et ne fait rienpour l’instant. Nous comptons bien sûr surveiller les actes<strong>de</strong> tous ces bailleurs <strong>de</strong> fonds.<strong>10</strong>


Commentaire sur la table ron<strong>de</strong> VIH lors <strong>de</strong> l’AMS le 19 mai 1999.Lors <strong>de</strong> l’AMS alors que plusieurs ministres<strong>de</strong> la Santé africains (Swaziland, Zambie,Côte d’ivoire, etc.) tentaient d’alerter l’assembléesur la tragédie que représente lesida d<strong>ans</strong> leur pays, la menace qu’il représenteau niveau mondial et la nécessité absolued’une mobilisation internationale (« lesida d<strong>ans</strong> notre pays, c’est la guerre ; uneguerre qui ne se limite pas aux frontières<strong>de</strong>s Etats... que peut-on faire lorsqu’une personnesur quatre est contaminée.. »Ministre du Swaziland, 19/5/99), la ministre<strong>de</strong> la Santé <strong>de</strong>s Etats Unis, Dona Shalala, estintervenue tenant <strong>de</strong>s propos d’une platitu<strong>de</strong>consternante, en totale inadéquationavec la situation. Elle s’est cantonnée à undiscours insupportable rappelant la nécessité<strong>de</strong> renforcer la prévention et faisant miroiterl’espoir <strong>de</strong> la découverte d’un vaccin.15 <strong>ans</strong> <strong>de</strong> politique <strong>de</strong> lutte contre le sidaorientée exclusivement sur la prévention parsouci d’économie sont responsables <strong>de</strong> la situationactuelle. Nous savons pertinemmentmaintenant à quoi ont menée ces volontésfarouches d’économie : une catas<strong>trop</strong>he humaineinternationale, une catas<strong>trop</strong>he économiquepour nombre <strong>de</strong> pays. Nous savonsque s<strong>ans</strong> accès aux soins et aux traitements,on ne peut espérer la mise en place <strong>de</strong> politiques<strong>de</strong> prévention efficaces, ni stopperl’exp<strong>ans</strong>ion <strong>de</strong> l’épidémie ; nous savons que<strong>de</strong>s moyens bien supérieurs à ceux qui ontété mis en oeuvre jusqu’à présent sont indispensables.Pourtant, la ministre <strong>de</strong> la Santé<strong>de</strong> la première puissance mondiale n’a pasmême consenti à prononcer le mot «traitement»,pas plus qu’elle n’a évoqué la prise encharge médicale.Au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> la honte que représente une telleprise <strong>de</strong> position - au sein d’uneAssemblée Mondiale <strong>de</strong> la Santé et <strong>de</strong>vantune salle remplie <strong>de</strong> responsablespolitiques - on ne peut que s’alarmer etcraindre le pire pour les années à venir. Unechose est certaine, <strong>de</strong>s déci<strong>de</strong>urs politiquestels que D. Shalala portent et porteront laresponsabilité <strong>de</strong> la propagation <strong>de</strong> l’épidémie<strong>de</strong> sida et <strong>de</strong>s millions <strong>de</strong> morts à venir.Commentaire suite au passage <strong>de</strong> la résolution sur la StratégiePharmaceutique Révisée.Pour nous les choses sont claires, l’OMS <strong>de</strong>vrafaire ses preuves :- utiliser le mandat qui lui a été donné,- jouer enfin son rôle en garantissant l’équité<strong>de</strong> l’accès aux traitements d<strong>ans</strong> le mon<strong>de</strong>,aux médicaments essentiels, mais aussi àtous les traitements récents indispensablespour faire face aux maladies les plus meurtrièresen tête <strong>de</strong>squelles se trouve le sida,- défendre les intérêts <strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s face àceux <strong>de</strong>s industries.Bref, justifier <strong>de</strong> son existence en imposantla santé comme une véritable priorité lors<strong>de</strong>s négociations internationales (et notammentles renégociations <strong>de</strong>s accords <strong>de</strong>l’OMC en novembre 1999 à Seattle).T 26.06.959


N/SAssemblée Mondiale <strong>de</strong> la Santé (AMS)Du 17 au 25 mai se tenait à Genève l’AMS, réunissant les ministres <strong>de</strong> la santé<strong>de</strong>s Etats membres <strong>de</strong> l’OMS. A cette occasion, la résolution intitulée « StratégiePharmaceutique Révisée (SPR) » était proposée au vote. Donnant mandat àl’OMS pour s’introduire d<strong>ans</strong> les négociations internationales relatives aux politiquesd’accès aux traitements, elle <strong>de</strong>vrait lui permettre <strong>de</strong> contrebalancer lespositions dangereuses soutenues par l’OMC (Organisme Mondial du Commerce)d<strong>ans</strong> ce domaine et menaçant nombre <strong>de</strong> pays en développement. Pourtant, àl’occasion d’une table ron<strong>de</strong> sur le sida, l’OMS, se prêtant à <strong>de</strong>s compromis honteux,ne nous a pas convaincus sur sa capacité réelle à jouer son rôle et imposerla santé comme une priorité absolue - communiqué <strong>de</strong> presse du 14 mai 1999.D<strong>ans</strong> le contexte actuel où s’exercent<strong>de</strong>s pressions intenses autour <strong>de</strong> l’application<strong>de</strong>s accords internationauxsur la propriété intellectuelle en matière<strong>de</strong> produits pharmaceutiques,les enjeux du vote <strong>de</strong> la SPR sont déterminants: l’OMS doit pouvoir jouerson rôle <strong>de</strong> garant <strong>de</strong>s intérêts <strong>de</strong>smala<strong>de</strong>s <strong>de</strong>s pays en développement.La SPR, dont une première versionavait été rejetée en 1998 parce quejugée peu favorable aux intérêts commerciaux<strong>de</strong> certains pays industrialisés,reste clairement orientée en faveurd’un meilleur accès aux traitementsd<strong>ans</strong> les pays pauvres.Pourtant, le jeu <strong>de</strong> l’OMS s’avère plusque douteux lorsqu’elle invite les ministres<strong>de</strong> la santé autour d’une tableron<strong>de</strong> intitulée : « VIH/SIDA : stratégiespropices à une réaction adéquateet durable face à l’épidémie » à se poserla question suivante :« Comment les gouvernements peuvent-ilsmaîtriser les dépenses liéesaux soins palliatifs et aux soins enphase terminale et freiner la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>croissante en thérapeutiques antirétrovirales? » (ordre du jour <strong>de</strong>l’AMS, 19 mai 1999).Ce texte est une véritable honte !Face à une épidémie incontrôlable :- l’OMS ne remet pas en question lescoûts prohibitifs <strong>de</strong>s traitements fixéspar les compagnies pharmaceutiquesqui les produisent, qui font <strong>de</strong>s bénéficesexorbitants et qui conservent unmonopole criminel sur le marchémondial <strong>de</strong>s médicaments ;- l’OMS ne pose pas la question <strong>de</strong>savoir comment trouver <strong>de</strong>s ressourcessupplémentaires, publiquesou privées, pour permettre à <strong>de</strong>s millions<strong>de</strong> personnes <strong>de</strong> ne pas mourir ;- l’OMS ne s’interroge pas sur la solidaritéou l’équité <strong>de</strong> l’accès aux traitements,mais se <strong>de</strong>man<strong>de</strong> commentfaire taire les mala<strong>de</strong>s qui exigent cetaccès aux traitements.Faut-il purger l’OMS <strong>de</strong> certains <strong>de</strong>ses fonctionnaires pour espérer qu’ellejoue son rôle ou est-ce toute l’institutionqui campe sur <strong>de</strong>s positionsinsoutenables ?Face à l’ampleur <strong>de</strong> l’épidémie et auxmenaces que font peser les compagniespharmaceutiques et certains gouvernementsocci<strong>de</strong>ntaux sur la santé<strong>de</strong> millions <strong>de</strong> personnes, il est grandtemps que l’OMS agisse avec autoritépour garantir l’accès aux médicamentspartout d<strong>ans</strong> le mon<strong>de</strong>, plutôt que <strong>de</strong>se laisser manipuler et d’accepter lescompromis les plus scandaleux.Act Up-Paris exige que MmeGro Harlem Brundtland reviennesur les propos émis par l’institutionqu’elle dirige et énonceles mesures qu’elle compteprendre pour répondre aux appels<strong>de</strong> millions <strong>de</strong> mala<strong>de</strong>s pourle moment condamnés.T 26.06.958


pation à <strong>de</strong> nombreux congrès, saparfaite connaissance d’une littératureen croissance exponentielle ;s<strong>ans</strong> mentionner les incessantscoups <strong>de</strong> fil à passer aux collèguescardiologues, endocrinologues, radiologues,orthopédistes, etc. Avecceci, il faut prendre le temps <strong>de</strong> voirles mala<strong>de</strong>s (30 minutes pour ceuxqui vont bien et 1h15 pour ceux quivont mal) afin, qu’au fil <strong>de</strong> la conversation,soit fait un bilan <strong>de</strong>s effetsindésirables, même les plus anodins,qu’il faudra ensuite mettre en corrélationou pas avec le traitement,et plus précisément la ou les molécules<strong>de</strong> ce traitement : une vigilancequant aux effets secondaires quiimpose au mé<strong>de</strong>cin <strong>de</strong> revoir assezsouvent ses patients.Laurent Roudière : « Et aussi d’appelerla pharmaco-vigilance <strong>de</strong>slaboratoires pour leur signaler vosremarques. Mais, alors, vous rentrezd<strong>ans</strong> une véritable chaîne infernale,avec le dossier <strong>de</strong> pharmacovigilanceà remplir et <strong>de</strong> la paperasseriequi s’ajoute. »Parce qu’en plus, les conditionsmatérielles <strong>de</strong> travail du docteurRoudière sont insupportables.Ayant dû changer <strong>de</strong> lieu <strong>de</strong> consultationau sein <strong>de</strong> l’hôpital, il seretrouve s<strong>ans</strong> secrétaire, s<strong>ans</strong> fax,s<strong>ans</strong> ordinateur. Un mala<strong>de</strong> lui prêteun ordinateur, le docteur s’achèteun fax et s’approvisionne en papier.Mais la secrétaire manque toujours :c’est à lui <strong>de</strong> passer les 20 coups <strong>de</strong>fil quotidiens pour l’organisation <strong>de</strong>sren<strong>de</strong>z-vous, <strong>de</strong> sortir et reclasserdossiers et examens complémentaires(le dimanche), <strong>de</strong> taper unegran<strong>de</strong> partie <strong>de</strong> son courrier.Laurent Roudière : « J’ai toujoursespéré <strong>de</strong>puis dix <strong>ans</strong> qu’à unmoment, pour bons services rendus,pour m’être bien démené, pour montravail <strong>de</strong> consultation, mais aussi, il ya quatre <strong>ans</strong>, avant l’arrivée <strong>de</strong>s trithérapies,pour mon travail <strong>de</strong> suivihospitalier, je pensais qu’à unmoment on me dirait : Allez, on vafaire un effort pour votre situation. »Du coup, comme <strong>de</strong> nombreuxautres mé<strong>de</strong>cins, après douze <strong>ans</strong><strong>de</strong> VIH et une expérience précieuse,il quitte l’hôpital pour l’industrie.L’exercice absur<strong>de</strong> d’une spécialités<strong>ans</strong> statut ne lui semble plus possibled<strong>ans</strong> ces conditions. A moins,peut-être, que l’État fasse un effortfinancier pour gar<strong>de</strong>r ces travailleurs<strong>de</strong> l’ombre (par exemplerevaloriser le prix <strong>de</strong> la vacation ouen augmenter le nombre, <strong>de</strong> manièreà ce que les consultations payéescorrespon<strong>de</strong>nt à celles effectuées).Laurent Roudière : « C’est bien qu’ily ait <strong>de</strong>s gens très connus, c’est bienpour les congrès, c’est bien pour lesessais thérapeutiques. Mais il<strong>de</strong>vient difficile <strong>de</strong> trouver <strong>de</strong>smé<strong>de</strong>cins qui ont le temps <strong>de</strong> voirassez longuement les patients, quidisposent <strong>de</strong> plages horaires assezélastiques pour satisfaire tout lemon<strong>de</strong>, et qui jouent beaucoup <strong>de</strong>rôles, <strong>de</strong> mé<strong>de</strong>cin spécialiste duVIH, <strong>de</strong> mé<strong>de</strong>cin généraliste, etd’assistante sociale. »Lorsqu’il entre d<strong>ans</strong> l’industrie,un mé<strong>de</strong>cin doit abandonner80% <strong>de</strong> sa file active. A quiconfier ces mala<strong>de</strong>s ? Qui auraencore le temps <strong>de</strong> les suivrecorrectement ?T 17.05.977


T&RMé<strong>de</strong>cin VIH : bonne à tout faireEntretien avec Laurent RoudièreDepuis 1986, avant même l’arrivée <strong>de</strong>spremiers antirétroviraux, le docteurLaurent Roudière s’est consacré au suivi<strong>de</strong>s séropositifs : d’abord à l’hôpitalNecker, au début <strong>de</strong> l’épidémie, alorsque pas grand chose n’était en place,d<strong>ans</strong> le service <strong>de</strong> néphrologie où <strong>de</strong>uxlits étaient réservés au mala<strong>de</strong> du sida ;puis à la prison <strong>de</strong> Fresnes : expériencetriste au cours <strong>de</strong> laquelle il s’est surtoutattaché à essayer d’améliorer le confort<strong>de</strong> vie <strong>de</strong>s prisonniers ; ensuite à SaintJoseph, puis à Laennec, <strong>de</strong>puis 1989, oùil doit s’arranger pour suivre 259patients avec seulement 26 heures <strong>de</strong>consultation par semaine. La solution ?Travailler 50 heures. Mais le salaire, lui,ne bouge pas : 7500 francs net.Laurent Roudière : « Je suis moins bien payéqu’un interne, et j’ai l’impression <strong>de</strong> régresserpar rapport à ma situation financière d’il y a dix<strong>ans</strong>. En province, <strong>de</strong>s gens comme moi arriventà se faire nommer praticien hospitalier à pleintemps au titre du sida. Le problème, c’estl’Assistance publique <strong>de</strong>s Hôpitaux <strong>de</strong> Paris.C’est une grosse structure, on a du mal à fairebouger les choses. A Paris, quand on n’est paspassé par la voie royale <strong>de</strong> l’internat <strong>de</strong> spécialité,c’est certain qu’on ne peut pas avoir d’autreposte que celui d’attaché. »Or, ce poste n’est pas une sinécure. Vue l’évolutiontrès rapi<strong>de</strong> <strong>de</strong>s connaissances, la "formationcontinue" du spécialiste VIH implique sa partici-T 17.05.976


pour les patientsen échecthérapeutiquelourdNationale <strong>de</strong> Recherche sur le Sida, <strong>de</strong>vra réaliser <strong>de</strong>s essais cliniques associantplusieurs produits nouveaux. Il faut espérer que ces trois interlocuteursauront bien conscience <strong>de</strong> l’urgence <strong>de</strong> la situation.Le calendrierCar le calendrier est serré : encore un mois, et c’est l’été. Si aucune décisionn’est prise avant juillet, rien ne pourra se mettre en place avant la fin<strong>de</strong> l’année. C’est pourquoi les responsables <strong>de</strong>s associations se sont donnés<strong>de</strong>s échéances rapprochées. D’abord, il s’agit <strong>de</strong> constituer un dossier<strong>de</strong> presse comportant un catalogue <strong>de</strong>s molécules à venir, un argumentaire,les données d’épidémiologie que nous aurons recueillies auprès <strong>de</strong>certains centres, ainsi que <strong>de</strong>s propositions sur le dispositif à mettre enplace : ce dossier est quasi prêt. Il faut ensuite contacter l’ensemble <strong>de</strong>sassociations <strong>de</strong> lutte contre le sida en France, afin que tout le mon<strong>de</strong>puisse bénéficier <strong>de</strong>s fruits <strong>de</strong> notreaction (le mailing est parti), puis obtenir<strong>de</strong> l’Agence Nationale <strong>de</strong>sProduits <strong>de</strong> Santé qu’elle accepte <strong>de</strong>rencontrer les associations en présence<strong>de</strong> l’ANRS et <strong>de</strong> la DirectionGénérale <strong>de</strong> la Santé : les contactsont été pris et l’Agence paraît d’accordsur le principe ; le groupe interassociatifTRT5 aura entre tempsconsulté les laboratoires sélectionnés.Y aura-t-il une résistance <strong>de</strong> la part<strong>de</strong>s institutions ? Une série d’actionspubliques, débutée dès le mois <strong>de</strong>juin, <strong>de</strong>vrait permettre <strong>de</strong> les levers<strong>ans</strong> <strong>trop</strong> <strong>de</strong> difficulté…T 01.12.98Zap <strong>de</strong> l’Agence Nationale <strong>de</strong>s Produits <strong>de</strong> Santé - 2 juin 1999.5


T&RAccès immédiataux nouvelles moléculesSous l’impulsion d’Actions Traitements et àl’initiative d’Act Up-Paris, une réunion regroupantles responsables <strong>de</strong>s principales associations <strong>de</strong>lutte contre le sida s’est tenue d<strong>ans</strong> nos locaux.Étaient présents, Actions Traitements, Act Up,Ai<strong>de</strong>s, Arcat, Nova Dona, Sida Info Service, VLS,TRT5. A l’ordre du jour : les personnes enéchappement thérapeutique lourd, ceux surlesquels les médicaments actuellement disponiblesn’ont aucun effet. Compte-rendu <strong>de</strong> cet après-mididu 28 avril qui a marqué les premiers jalons d’uneaction collective sur les nouvelles molécules.L’objectifSi nous sommes incapables <strong>de</strong> chiffrer le nombre <strong>de</strong> personnesen échappement (les banques <strong>de</strong> données statistiquessont muettes sur cette question), <strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s <strong>de</strong> plus enplus nombreux (certains d<strong>ans</strong> notre entourage direct) nouscontactent afin <strong>de</strong> témoigner <strong>de</strong> l’inefficacité <strong>de</strong> leur traitement: leur charge virale augmente <strong>de</strong> manière incontrôléetandis que leur immunité s’effondre, au point qu’ils développentun problème clinique (infection opportuniste, pathologietumorale, cancer, cachexie). Leur virus échappant à tousles traitements aujourd’hui disponibles, il s’agira donc <strong>de</strong> lesfaire disposer <strong>de</strong> plusieurs nouvelles molécules, sachant quele rajout <strong>de</strong> seulement une nouvelle molécule serait vraisemblablementinutile. La <strong>de</strong>uxième étape a donc consisté, avecl’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> François Houyez <strong>de</strong> VLS, à isoler, parmi l’ensemble<strong>de</strong>s molécules disponibles ailleurs qu’en France, celles quicomporteraient un intérêt pour les personnes lour<strong>de</strong>mentprétraitées : ainsi, il y aurait, par exemple, le FddA du laboratoireUS Bioscience, le PMPA du laboratoire Gilead Sciences,le Tipranavir <strong>de</strong> Pharmacia & Upjohn, et le T20 <strong>de</strong> Trimeris.Bien sûr, cet accès précoce à <strong>de</strong> nouveaux produits <strong>de</strong>vra sefaire d<strong>ans</strong> le cadre d’une pharmaco-vigilance accrue quantaux effets indésirables et aux problèmes <strong>de</strong> résistance (dosagesplasmatiques et intra-cellulaires, tests <strong>de</strong> résistance).T 01.12.98Les ciblesCette mise à disposition <strong>de</strong> plusieurs nouvelles molécules vadépendre <strong>de</strong> plusieurs institutions ou groupes décisionnels. Ily a bien sûr les laboratoires pharmaceutiques sélectionnés,qui <strong>de</strong>vront s’engager à assurer une production suffisante <strong>de</strong>ces produits et d<strong>ans</strong> les délais qui sont les nôtres. Mais aussil’Agence Nationale <strong>de</strong>s Produits <strong>de</strong> Santé : celle-ci <strong>de</strong>vra faireen sorte d’accélérer la mise à disposition <strong>de</strong>s nouvelles moléculesd<strong>ans</strong> le cadre d’un accès compassionnel ; elle <strong>de</strong>vra aussiinformer les cliniciens <strong>de</strong> la nouvelle disponibilité <strong>de</strong> ces médicaments,en mettant en place la cellule d’information qu’ellenous promet <strong>de</strong>puis <strong>trop</strong> longtemps. Enfin, l’Agence4


d e t r o p : e n c o r e !tout ce qui les concerne au premier chef).Aujourd’hui, personne (ou presque) ne sesouvient <strong>de</strong> ce zap. Il faut dire qu’aucunjournaliste ne nous avait accompagnépour en témoigner. Si j’en parle, pourtant,c’est parce qu’il fut récemment évoquépar <strong>de</strong>s agents <strong>de</strong> la sécurité <strong>de</strong> l’OMS à<strong>de</strong>s militants d’Act Up qui assistaient àl’Assemblée mondiale <strong>de</strong> la Santé. Eux engardaient un souvenir cuisant.Act Up a peu <strong>de</strong> mémoire : <strong>de</strong>s militantssont morts, qui auraient pu raconter telleou telle autre action à laquelle ils avaientparticipé ; d’autres sont partis après avoirconsacré à Act Up toute leur énergie.Maintenant que nous fêtons nos dix <strong>ans</strong>, ilnous faut rassembler <strong>de</strong>s souvenirs souventéparpillés et toujours subjectifs. Il y a ceuxqui se rappellent avec émotion un « âged’or » où nous étions d’autant plus bruyantsqu’on nous refusait le droit à participer auxdécisions et que nous peinions à être considéréscomme <strong>de</strong>s interlocuteurs sérieux. Ily a ceux qui privilégient les initiatives lesmoins médiatiques, mais peut-être parfoisles plus efficaces : les réunions d’informationaux mala<strong>de</strong>s, Protocoles, Planet Africa, lespratiques <strong>de</strong> cas par cas pour résoudre certainessituations inextricables rencontréespar <strong>de</strong>s séropositifs. Il y a ceux qui considèrentque l’on ne peut traiter certains sujetss<strong>ans</strong> les envisager d<strong>ans</strong> une perspective politiqueplus générale. Il y a ceux qui ne retiennentau contraire d’Act Up que le travailexclusivement lié au sida etc.L’an <strong>de</strong>rnier, Act Up est entré d<strong>ans</strong> <strong>de</strong>smanuels scolaires où le sida est pourtant àpeine mentionné : nous y sommes citépour avoir introduit en France <strong>de</strong>s formesinédites <strong>de</strong> mobilisation politique. Visionpartielle, diront certains, qui auraient préféréqu’on parle <strong>de</strong> tout ce que nous avonscontribué à obtenir <strong>de</strong> concret en dix <strong>ans</strong> :l’accélération <strong>de</strong>s procédures <strong>de</strong> mise àdisposition <strong>de</strong> médicaments, l’inexpulsabilité<strong>de</strong>s personnes atteintes <strong>de</strong> pathologiesgraves, la généralisation <strong>de</strong> la proposition<strong>de</strong> prophylaxie après exposition au virusetc. D’autres parmi nous estiment que l’essentiel<strong>de</strong> l’efficacité d’Act Up est à chercherd<strong>ans</strong> le domaine symbolique : nousavons profondément modifié la représentation<strong>de</strong>s personnes atteintes en France.D’autres, encore, soulignent la part quenous avons prise d<strong>ans</strong> l’émergence d’unnouveau type <strong>de</strong> rapport à sa propre maladieet à ceux qui en sont a priori considérécomme les experts, etc.Pour dresser le portrait d’Act Up après dix<strong>ans</strong>, il faudrait s<strong>ans</strong> doute aussi faire lasomme <strong>de</strong>s reproches qui nous ont étéfaits. Souvent, nous les revendiquons malgréceux qui nous les adressent. Oui, ActUp est <strong>trop</strong> pédé, <strong>trop</strong> violent, <strong>trop</strong> politique,<strong>trop</strong> intr<strong>ans</strong>igeant. Cela pourrait êtrel’un <strong>de</strong>s sens, grammaticalement incorrect,du mot d’ordre que nous avons choisi pourcet <strong>anniversaire</strong> : « Dix <strong>ans</strong> <strong>de</strong> <strong>trop</strong> ». Dix<strong>ans</strong> d’excès, en effet, quand beaucoupauraient aimé nous voir plus sages, plus raisonnableset plus conciliants. Comme si cen’était pas l’épidémie qui était <strong>de</strong> <strong>trop</strong>.Car « Dix <strong>ans</strong> <strong>de</strong> <strong>trop</strong> » est aussi le motd’ordre paradoxal d’une association dontnous aurions tous aimé pouvoir nous passer.Il eût fallu pour cela d’autres politiques<strong>de</strong> lutte contre le sida, <strong>de</strong>s mentalitésmoins ignares, <strong>de</strong>s institutions moinsincompétentes, <strong>de</strong>s interlocuteurs moinshaineux : une autre histoire.« Dix <strong>ans</strong> <strong>de</strong> <strong>trop</strong> », encore, parce que nosfaits d’arme et nos victoires, si enthousiasmantssoient-ils, pèsent peu en regard <strong>de</strong>nos échecs. A cet égard, chaque mort d’unproche, chaque décès d’un militant, a étéconsidéré par nous comme une défaite. Ilfaudrait profiter <strong>de</strong> cet <strong>anniversaire</strong> pourles citer tous. Je serai injuste en ne rappelantque <strong>de</strong>ux d’entre eux, qui me manquentencore plus que d’autres : NathalieDagron et Cleews Vellay.« Dix <strong>ans</strong> <strong>de</strong> <strong>trop</strong> », c’est ce que pensents<strong>ans</strong> doute ceux que nous n’avons pascessé d’emmer<strong>de</strong>r <strong>de</strong>puis dix <strong>ans</strong>. Ils ontnotre mot d’ordre sur le bout <strong>de</strong> la langue.Et c’est un plaisir <strong>de</strong> le leur voler.« Dix <strong>ans</strong> <strong>de</strong> <strong>trop</strong> », mais pas questionpour autant d’arrêter. Pour s’enconvaincre, on lira le présent numérod’Action. Nous avions d’abord envisagé <strong>de</strong>consacrer toute ses pages à une rétrospective.Notre actualité en a décidé autrement: elle a, petit à petit, rogné l’espaceprévu pour la commémoration.Je lis d<strong>ans</strong> Nova magazine une interview<strong>de</strong> Didier Lestra<strong>de</strong> à propos <strong>de</strong> ces dix<strong>ans</strong>. Il y dit, entre autres, que noussommes « aujourd’hui en pleine crise ». Jesuis arrivé à Act Up en 1990 ; cela faitdonc neuf <strong>ans</strong> que je connais Didier. Etcela fait neuf <strong>ans</strong> que je l’entends parler <strong>de</strong>« la crise actuelle ». Je me souviens <strong>de</strong> matoute première réunion : il y avait undébat animé entre <strong>de</strong>s militants, que leprési<strong>de</strong>nt d’Act Up avait tranché en évoquantune « crise <strong>de</strong> croissance ».Mais Didier a raison, évi<strong>de</strong>mment : <strong>de</strong>puisdix <strong>ans</strong>, la crise est le régime d’Act Up.Jamais contents, souvent sur la brèche,presque toujours au bord <strong>de</strong> la faillite. Unparadoxe d’association, qui peut ériger laschizophrénie en art <strong>de</strong> vivre et en pratiquepolitique : financé en partie par ceux<strong>de</strong>s laboratoires pharmaceutiques quenous zappons le plus régulièrement ; soutenantpubliquement Bernard Kouchnerquand il est le seul ministre blanc àdéfendre l’accès aux traitements d<strong>ans</strong> lesPVD, mais lançant au même moment unecampagne publique intitulée « Kouchnerment » ; attaquant régulièrement l’inertie<strong>de</strong>s pédés et <strong>de</strong>s goudous tout en se réclamant<strong>de</strong> la communauté homosexuelle ;tapant systématiquement sur <strong>de</strong>s médiasdont nous avons pourtant absolumentbesoin. Un pied d<strong>ans</strong> les institutions et unpied au <strong>de</strong>hors. Surtout, les yeux plus grosque le ventre : Act Up est un groupe quipeut formuler <strong>de</strong>s choses aussi urgentes etfolles que « Nous sommes la gauche »,alors qu’il peine à rassembler plus <strong>de</strong> centmilitants en réunion hebdomadaire. ActUp est incapable <strong>de</strong> renoncer tout à fait àun sujet important même quand lesmoyens lui font défaut. Et Act Up est uneassociation résolument joyeuse ayant pourobjet la lutte contre le sida.Les imbéciles y verront <strong>trop</strong> <strong>de</strong> contradictions.Quand nous avons discuté <strong>de</strong>s motsd’ordre pour cet <strong>anniversaire</strong>, certainsd’entre nous pouvaient pencher à la foispour « Dix <strong>ans</strong> <strong>de</strong> <strong>trop</strong> » et pour« Encore ! » (ou pour sa version folle : «Act Up for ever »). Laissons donc dire lesimbéciles. Il y en avait déjà, il y a dix <strong>ans</strong>,pour juger qu’Act Up ne passerait pas l’année: c’est que nous étions <strong>trop</strong> américainspour la culture française. Encorejoyeux dix <strong>ans</strong> <strong>de</strong> <strong>trop</strong>.Philippe Mangeot.----------------------- Internet Hea<strong>de</strong>r --------------------------------Sen<strong>de</strong>r: phimange@Received: from front4.grolier.fr(front4.grolier.fr [194.158.96.54])by hpamgaab.compuserve.com(8.8.8/8.8.8/HP-1.4) with ESMTP idDAA27332;for ;Sat, 5 Jun 1999 03:08:27 -0400 (EDT)X-Mailer: Microsoft Outlook Express forMacintosh - 4.01 (295)Date: Sat, 5 Jun 1999 09:12:37 +0200Subject: Edito Action <strong>10</strong> AnsFrom: "Philippe Mangeot" To: galk@compuserve.comMime-version: 1.0X-Priority: 3Content-type: multipart/alternative;boundary="MS_Mac_OE_3011443793_5657593_MIME_Part"


SommaireNouvelles molécules : plus vite ! .4Mé<strong>de</strong>cin sida, grosse déprime .6Encore Geneva .8Allons au Burundi .<strong>10</strong>Pourquoi pas le Togo ? .11Ou bien le Cameroun .12Sur la fin, le Bénin .12Les raclures .14Epouvantable .16Port militant .18Action. La lettre mensuelle d’Act Up-ParisDirecteur <strong>de</strong> publication :Philippe MangeotRédactrice en chef :Gaëlle KrikorianOnt participé à ce numéro :Laura Davis • Jean Cazentre • Victoire Patouillard • Sophie Poinsot • Au<strong>de</strong>Lalan<strong>de</strong> • Stany Grelet • Ludovic Laugier • Dominique Blanchon • ClaireVannier • Axel Delmotte • Didier Lestra<strong>de</strong> • Brigitte Tijou • Marc Jaffeux • VincentHuet • Serge Lastennet • Jérôme Martin • Marie <strong>de</strong> Cenival • EmmanuelleCosse • Michel Raduget • Sylvain Coudret • Rodrigue Ducourant • JérômeRecours • Younes Mezziane et Christophe Martet.Icono : Act Up-ParisImprimerie : Autographe/Paris. Commission paritaire en cours, ISSN 1158-2197, dépot légalà parution. Ce journal, cofinancé par Ensemble contre le Sida, est réalisé par les militantsd’Act Up-Paris. Il ne peut être vendu. La reproduction <strong>de</strong>s articles <strong>de</strong> ce numéro est autoriséeà la condition <strong>de</strong> citer la source : Action, la lettre mensuelle d’Act Up-Paris.Abonnez-vous, recevezAction. La lettre mensuelle d’Act Up-Paris11 numéros par an = 80 F.Nom ............................... Prénom ............................Adresse .................................................................................................................................................Libellez vos chèques à l’ordre d’Act Up-Paris. BP287 75525 Paris ce<strong>de</strong>x 111 0 a n sSouvent, on nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> quelle fut la plusbelle action d’Act Up. Le jour où l’on fermale laboratoire d’analyses D’Artois qui pratiquait<strong>de</strong>s tests <strong>de</strong> dépistage au rabais ?Cette autre fois où l’on couvrit <strong>de</strong> cendresles petits fours d’un pince-fesses <strong>de</strong> l’UAPqui n’assurait pas les séropositifs ? Un matinoù l’on partit à plusieurs camionnettes bloquerl’accès <strong>de</strong>s usines <strong>de</strong> production <strong>de</strong>slaboratoires Glaxo qui refusaient <strong>de</strong> mettreà disposition en quantité suffisante un médicamentindispensable à certains mala<strong>de</strong>s ?La fois où l’on prit d’assaut la préfecture <strong>de</strong>Melun, parce que le commissariat voisinmaintenait d<strong>ans</strong> ses caves un centre <strong>de</strong>rétention illégal aux conditions sanitairesdéplorables ? Ce 1er décembre où l’on enfilapresque par surprise une capote surl’obélisque ? La journée où l’on mit sens<strong>de</strong>ssus-<strong>de</strong>ssousles bureaux <strong>de</strong> feuel’Agence Française <strong>de</strong> Lutte contre le Sida,qui s’obstinait à justifier la nullité <strong>de</strong>s campagnes<strong>de</strong> prévention par son manque <strong>de</strong>moyens et <strong>de</strong> marge <strong>de</strong> manœuvre ? Cettemesse <strong>de</strong> la Toussaint à Notre-Dame donton empêcha le déroulement parce que lesévêques <strong>de</strong> France avaient déclaré que lacapote favorisaient « paradoxalement »l’extension <strong>de</strong> l’épidémie ?En ce qui me concerne, ma plus belle actionest aujourd’hui presque oubliée. Nousn’étions que six pour la faire. Nous étionspartis à Genève contre l’avis d’une grosseminorité <strong>de</strong> militants pour exiger que <strong>de</strong>smala<strong>de</strong>s d’Afrique et d’Asie soient représentésau Sommet mondial sur le sida organisépar Simone Veil. Nous avions fait bruyammenteffraction d<strong>ans</strong> l’hémicycle, puis nousnous étions allongés silencieusement auxpieds <strong>de</strong>s participants d’une réunion plénièreoù l’on refusait <strong>de</strong> nous donner la parole: interruption <strong>de</strong> séance, radio interne <strong>de</strong>l’OMS relatant en direct l’événement, négociations,rencontre immédiate avec ceux quiavaient jusqu’alors refusé <strong>de</strong> nous recevoir.D<strong>ans</strong> ce zap, tous les ingrédients d’uneaction presque parfaite d’Act Up étaientréunis : l’inconscience joyeuse (une ban<strong>de</strong><strong>de</strong> gamins qui part investir un blockhausinternational), le bricolage minimaliste (pourles dignitaires <strong>de</strong> l’OMS, impossible <strong>de</strong> parleravec aplomb <strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s comme d’uneréalité statistique abstraite quand on a <strong>de</strong>sséropos couchés sur les chaussures), l’efficacité(nos interlocuteurs durent capitulerparce qu’une fois <strong>de</strong> plus, ils maîtrisaient àpeine <strong>de</strong>s dossiers que nous connaissionssur le bout <strong>de</strong>s doigts), la fidélité à nos principes(il s’agissait <strong>de</strong> faire entendre lanécessité pour les mala<strong>de</strong>s <strong>de</strong> prendrepart à la négociation et à la décision pour


Action.La lettre mensuelle d’Act Up-Paris n°61, juin 1999

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