HISTOIRE22<strong>La</strong> <strong>Gazette</strong> numéro 237 du 24 février 2011Triple meurtre dansle ChâtillonnaisEn 1936, Le hameau <strong>de</strong> la Montagne, situéà une petite soixantaine <strong>de</strong> kilomètres <strong>de</strong>Dijon, a été le théâtre d’une sordi<strong>de</strong> affairecriminelle.OUCZOULIAKOFF. BasileGouczouliakoff. À sontableau <strong>de</strong> chasse, cet hommeaffiche un triple meurtre.Pour quelques centaines <strong>de</strong>francs <strong>de</strong> l’époque, il va tuer ses ancienspatrons et leur valet <strong>de</strong> chambre. À aucunmoment il n’éprouvera le moindre remords,le moindre regret. Lors <strong>de</strong>s auditions il sedélectera même à raconter son forfait.Jeudi 9 janvier 1936. Au hameau <strong>de</strong> laMontagne tout près <strong>de</strong> Bellenod-sur-Seine,les habitants sont inquiets. Voilà <strong>de</strong>ux joursque la ferme <strong>de</strong>s frères Bonnot sembledéserte. Les volets sont clos. Personne n’aaperçu Lucien et Jules, ni le commis. Lestrois hommes se sont comme volatilisés. Etdans le petit village, leur disparition ne passepas inaperçue. Tout le mon<strong>de</strong> connaît les<strong>de</strong>ux septuagénaires et leur employé, PierreTriolaire. Peu probable qu’ils soient partisà l’improviste, laissant la bâtisse inoccupée,et les bêtes sans surveillance. Cela ne leurressemble pas du tout. Dans la matinée,une voisine donne l’alerte. Le maire et lesgendarmes d’Aignay se ren<strong>de</strong>nt sur place. <strong>La</strong>disparition est en effet du genre… inquiétante.Les gendarmes font le tour <strong>de</strong> la ferme. Toutest verrouillé. Et toujours aucune réponse<strong>de</strong>s occupants. Un carreau <strong>de</strong> la chambre <strong>de</strong>sfrères est brisé pour pénétrer la maison. Etvisiblement quelqu’un est déjà passé par là.Tout est sans <strong>de</strong>ssus <strong>de</strong>ssous. Le brigadierDumont fait une première découverte.Macabre. Sur le lit, Jules est étendu, mort. Ila la gorge tranchée. Il avait 79 ans. Au piedPHOTOS DRdu lit, Lucien, 71 printemps, baigne dans unemarre <strong>de</strong> sang. <strong>La</strong> crispation <strong>de</strong> ses <strong>de</strong>rniersinstants a marqué son visage. L’autopsie diraqu’il a reçu <strong>de</strong>ux balles en pleine tête avantd’être égorgé lui aussi… à trois reprises.Au rez-<strong>de</strong>-chaussée d’autres gendarmesdécouvrent le cadavre du jeune employé,Pierre Triolaire. Même sanction, <strong>de</strong>ux balles<strong>de</strong> revolver en pleine tête, et un égorgementpour finir le travail. <strong>La</strong> maréchaussée n’enrevient pas. L’enquête débute immédiatementet à ce sta<strong>de</strong>, le mobile du vol semblelargement privilégié. De prime abord, onpense à un vulgaire crime <strong>de</strong> rô<strong>de</strong>ur. Saufque tout ne colle pas dans cette hypothèse.Seuls quelques meubles semblent avoir étévéritablement fouillés. Un peu comme sil’assassin savait ce qu’il allait trouver. Etpuis, à aucun moment le jour du triple meurtrele voisinage n’a entendu les aboiements duchien <strong>de</strong> berger, pourtant du genre soupe aulait avec les étrangers…Le nom d’un homme va bientôt venir sonneraux oreilles <strong>de</strong>s policiers. Il s’agit <strong>de</strong> BasileGouczouliakoff, employé chez les frèresBonnot entre novembre 1933 et mars 1934.Et c’est une certitu<strong>de</strong>, Gouczouliakoff étaitau hameau la veille du crime. Mieux, lanuit précédant la découverte <strong>de</strong>s cadavres.Plusieurs témoins le confirment. En décembre1935, il était même revenu vi<strong>de</strong>r quelquesverres avec ses anciens patrons. Et à cetteépoque tout le mon<strong>de</strong> avait été très étonné <strong>de</strong>voir l’ancien domestique rouler en voiture,bien habillé et fumant le cigare. Lui quiavait quitté son emploi chez les Bonnot pours’engager dans la Légion…Les policiers apprennent également quele 7 janvier Gouczouliakoff avait quittéprécipitamment la région pour se rendre àParis… où il dépensait sans compter. Lespoliciers se forgent une intime convictionsur la culpabilité <strong>de</strong> l’ancien domestique. Unfaisceau <strong>de</strong> présomptions selon le langagepolicier. Le 13 janvier 1936 il est interpelléà la sortie du métro Clignancourt. Embarquédans les locaux <strong>de</strong> la sûreté, Gouczouliakoffne tar<strong>de</strong> pas à se mettre à table. Il raconteavec précision la nuit du 8 au 9 janvier 1936 :« J’étais dans la plus noire misère le jouroù j’ai décidé <strong>de</strong> les expédier dans l’autremon<strong>de</strong>. Je connaissais l’emplacement <strong>de</strong> leurcagnotte. » Il poursuit : « Je savais queSUITE Page 24...
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