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CLAIRLIEU - Canons Regular Blog

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<strong>CLAIRLIEU</strong>TIJDSCHRIFT GEWIJD AAN DEGESCHIEDENIS DER KRUISHERENVIJFENTWINTIGSTE19 6 7J A A R G A N GAflevcring 1 & 2LICHTLAND


<strong>CLAIRLIEU</strong>TIJDSCHRIFT GEWIJD AAN DEGESCHIEDENISDER KRUISHERENVIJFENTWINTIGSTE19 6 7JAARGANGAflevering 1 & 2LICHTLAND— DIEST


UITGEGEVEN IN OPDRACHTVAN DE GESCHIEDKUNDIGE KRING<strong>CLAIRLIEU</strong>DIEST/NIJMEGEN


LES CROISIERS EN NORMANDIELEPRIEURESAINTE-CROIX DE CAENparAlbertDURAND,archiviste du diocese de Laval (France)


TABLE DES MATIERESL'arrivee des Croisiers en France 5I Au Faubourg l'Abbe (1275-1356) ... 14II Pierre Pinchart, prieur, 1355 ; general de TOrdre,1363-1382 ; eveque-nomme de Spire, 1382 . . 22HI Le prieure sous la Guerre des Cent Ans (1346-1450) 28IV Retour a la discipline et foyer universitaire . . 47V Thomas de Gouda, 17me prieur, general de TOrdre,1529-1537 60VI Le prieure aux XVIme et XVIIme siecles (1530-1680) 63VII Miseres et decadence (1680-1760) ... 84VIII La fin dun prieure (1760-1800) .... 122- Extinction de Sainte-Croix . . . . 123- Sous la Revolution 134Pieces justificatives 139Illustrations 147


L'ARRIVEE DES CROISIERS EN FRANCEBon nombre de fideles ne connaissent les Croisiers que parl'indulgence dite des Croisiers attache aux chapelets1. Mais aufait, qui sont les Croisiers ?Les Croisiers, ou Chanoines reguliers de Sainte-Croix, sont desreligieux dont la regie est celle de Saint-Augustin et les Constitutions empruntees aux statuts dominicains, fondes en Belgique en1210 ou 1211 par le Bienheureux Theodore de Celles, a Huy presde Liege. Le fondateur - ainsi la chronique de Russelius - participea la troisieme croisade en 1189 en compagnie de Feveque de Liege,et fait connaissance des Chanoines du Saint-Sepulchre de Jerusalem.Chanoine de Liege depuis 1191, Theodore preche en 1209 contreles Albigeois dans le Midi de la France et gagne l'amitie de saintDominique.De retour au pays en 1210, il fonde TOrdre des Croisiers aveccinq compagnons dans sa retraite de Clair-Lieu, pres de Huy, prechantla Croix dans les environs. A partir de 1248, date de Tapprobationofficielle de ses constitutions, TOrdre se repand tres viteen Belgique, en France, en Angleterre, en Allemagne et en Hollande.L'Ordre ne compte que des couvents ou prieures, avec a la teteun prieur, autrefois elu a vie, et chaque maison pouvait, avec lapermission du general, admettre des candidats au noviciat et a laprofession, et fonder des filiales, ce qui fut le cas pour le prieurede Caen. A Tencontre des Dominicains, les Croisiers conservaientune certaine stabilite de lieu ; on faisait profession pour une maison1 Indulgence de 500 jours accorded par Le*on X, le 20 aout 1516, pour tout fiddleutilisant un chapelet beni par le g£ne*ral de l'Ordre des Chanoines re*guliers de Sainte-Croix. Cf. A. Ramaekers, U indulgence des Croisiers, dans Diet, de droit canonique,t. IV, Paris, 1948, col. 814-816, et De Kruisherenaflaat, dans Clairlieu, VI, 1948, p.


B THEODOHys DECfLLJ3 ma^c.amonm ejm/requcnt'Gs mcnfo cue/Sas paHck


LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENCes quelques lignes sur les Croisiers vont mieux nous faire comprendrece que fut FOrdre, et quelles furent ses activites en Franceoccidentale, specialement en la ville de Caen, siege d'un couventimportant; la cite episcopale SAvranches jouit du privilege deposseder Tun des rares Eveques-Croisiers.* * *Toulouse, Saint-Orens, 1248. Fideles aux preoccupations de leurfondateur, les premiers Croisiers de France viennent des 1248 a larescousse des disciples de saint Dominique, a Toulouse, au cceurde Theresie albigeoise. En 1356, ils sont transferes a Saint-Orens.A la meme epoque sont fondes les premiers couvents beiges, endehors de Clair-Lieu : Namur, 1249 ; La Chantoire (Venders)*1250(?) ; Liege, avant 1270.Paris, Rue de la Bretonnerie, 1258. L'Ordre s'etend en France parles predications du Pere Jean de Sainte-Fontaine, troisieme generaldes Croisiers (1250-1277), et comme ces religieux sont pour lorsen grande estime, le roi saint Louis les fait venir a Paris et leur faitmain, Paris, 1949, t. II, col. 915 ; 1952, t. Ill, col. 321. Sur les prieures croisiers,,voir : L. H. Cottineau, Repertoire Topo-bibliographique des Abbayes et PrieurSs^Macon, 1939 (mais incomplet et beaucoup d'erreurs, cf. Clairlieu, t. VIII, 1950, p.82).


L'ARRIVEE DES CROISIERS EN FRANCE 9batir dans sa Haute Justice, entre les N° 12 et 16 de la rue de laBretonnerie, une eglise et un couvent en Thonneur de l'Exaltationde la Sainte-Croix. Le sire de Joinville parle ainsi de cette fondation:,,Revint une autre maniere de freres, qui se fesaient appeler freres de Saincte Croiz,et portant la croiz devant leur piz (poitrine) et requistrent au roy que il leur aidast.Le roy le fist volontiers et les hebergea en une rue, appele"e le quarre-four du Temple,qui ore est appelee la rue de Saincte-Croix."Fevrier 1258, saint Louis concede a Robert de Sorbonne quelquesbiens pour le recompenser de sa maison, rue de la Bretonnerie,mise a la disposition des Freres de Sainte-Croix3. L'eglise conventuelle,monument gothique assez vaste et bati par Eudes de Montreuil,architecte de la Sainte-Chapelle, a ete detruite au debut duXIX siecle ainsi que la Maison, remplacees par des maisons particulieres.Caen, avant 1275. La presence de Croisiers a Caen est assez mysterieuse,avec impossibilite de connaitre la date exacte de leur arriveeet les raisons de leur venue: presence de Beguines ? envoi parsaint Louis ? En tout cas, la ville de Caen peut se glorifier d'etrela sixieme ou septieme fondation de Croisiers dans le monde.L'ere d'expansion des Croisiers se situe de 1248 a 1517 : la plupartdes prieures allemands sont fondes entre 1300 et 1500 ; lapremiere fondation neerlandaise a lieu a Asperen en 1315 ; la Belgiquese couvre de prieures : Suxy, 1286 ; Tournai, 1284 ; Virton,1366; Kerniel, 1438 ; Maaseik, 1476 ; Dinant, 1490 ; Louvain,1498. II en est de meme en France, ou Ton delaisse desormais lesgrandes villes, pour de petites ou des regions desertiques.Ainsi dans le Nord de la France :Cowdren-Saint-Eloi, 1280, dans l'Aisne, arrondissement de Laon,uni au XVme siecle a celui de Chauny, situe dans les environs.Banet, 1292, dans le Nord.Laine-aux-Bois, 1343, dans FAube, arrondissement de Troyes.Carignan, 1346, dans les Ardennes, arrondissement de Sedan.8 Dulaure, Histoire physique, civile et morale de Paris, t. II, p. 469 ; Hermans,Annales Ordinis S. Crucis, t. I, p. 54 ; II, p. 466-467. Charte de St-Louis a Robertde Sorbonne : Hermans, ibidem, II, p. 530. Cfr. au sujet de la fondation du couventde Paris : H. van Roojjen, Sinte Odilia. Legende of historie, Diest, 1946, p. 32-40.


10 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENLannoy, 1474, dans le Nord, arrondissement de Lille, filiale ducouvent de Tournai.Wateny, 1490, dans le Nord, egalement.Dans l'Ouest du pays :Saint-Ursin, 1302, en Mayenne, arrondissement de Mayenne,commune de Lignieres-la-Doucelle, filiale du couvent de Caen.Saint-Georges de Saint-?ere, 1346, dans les C6tes-du-Nord, arrondissement de Dinan, commune de Tremeur, filiale du couvent deSaint-Ursin.Le Verger, 1493, dans le Maine-et-Loire, arrondissement de Bauge,commune de Seiches, sans doute filiale de Paris.Dans le sud du pays :^ Salignac, 1342, en Dordogne, arrondissement de Sarlat, pourraitetre le meme que Salviac, cite apres 1317.Varenme-sur-Allier, 1391, dans l'Allier, arrondissement de LaPalisse, sans doute filiale de Caen.Buzangais, 1419, dans l'lndre, arrondissement de Chateauroux,sans doute filiale de Caen.Verteillac, en Dordogne, arrondissement de Riberac, fondationtardive du XVIme siecle, la derniere realisee en France.Soit un total de seize a dix-huit couvents ou prieures croisierspour l'ensemble de la France. Faute d* etudes sur les prieures fran-§ais, les dates que nous donnons peuvent fort bien ne pas etre touta fait exactes, sauf pour TOuest, ou nous avons du corriger HenriRusselius, historien de l'Ordre4 qui affirme : Conventus Cadomensis(Caen) in Normannia, 1357 ; S. Ursini (St-Ursin) dicec. Cenomanensis,1566 ; 5. Georgii (St-Georges) prope Trediar in Brittania,dicec. Maclouiensis, 1366; Viridarii (Le Verger) in Francia, 1490.Sous les coups de boutoir du protestantisme bon nombre deprieures anglais, neerlandais et allemands disparaissent au XVIm*4 Chronicon Cruciferorum she Synopsis memorabilium sacri et canonici ordinissanctae cruets, auctore R. P. F. Henrico Russelio, priore Succiacensi ord. sanctae crucis,Coloniae apud Henricus Kraft, 1635 (Succiacensis: Suxy, prov. du Luxembourg,'Belg. ; Coloniae: Cologne en Allemagne). Ouvrage de XXIV-203 pages en latin,reimprime en photo-offset par les soins du Monastere Sainte-Helene d'Amersfoort,Hollande, en 1964. Sur l'auteur de cette chronique, Henri Russelius, voir : H. vanRooijen, De oorsprong van de orde der Kruisbroeders of Kruisheren. dans Clairlieutome 19 (1961), p. 172-193.


L'ARRIVEE DES CROISIERS EN FRANCE 11siecle; ce fut le cas en France pour Banet, Salviac, Wateny. A lafin du regne de Louis XIV, les prieures encore bien vivants sontParis, Toulouse, Caen, Le Verger, Buzan$ais, Varennes et Chauny;d'autres vivotent, tels Saint-Georges et Saint-Ursin dans l'Ouest.Le Roi Louis XV, puis la Revolution Frangaise donnent le coup degrace a ce qui reste de Croisiers frangais. Ceux de Belgique, Hollandeet Allemagne en subissent le contre-choc, de sorte que desquatre-vingts maisons et quinze cents membres des splendeurs duXVm* siecle, il ne reste que quatre vieillards en 1840 en Hollande.Depuis 1790, jamais plus aucun Frangais ne se fera Croisier, niTOrdre ne possedera de maison en France, et cependant sous Factionde Mgr Van den Wijmelenberg, devenu maitre general en 1853,TOrdre des Chanoines de Sainte-Croix se releve lentement, compteune centaine de religieux a la fin du siecle dernier, devient florissanta partir de 1920 et denombre maintenant pres de 750 religieuxdans le monde, d'abord en Hollande (treize maisons), Belgique(sept maisons), Allemagne (cinq maisons) ; et depuis 1910 auxEtats-Unis (sept maisons) ; 1920, une mission au Congo-Kinshasa(diocese de Bondo) ; 1926, une autre a Java (Indonesie)' (diocesede Bandung) ; 1934, le Bresil (sept maisons) ; 1958, une missionen Irian-Barat (Indonesie). Une procure a ete installee a Rome en1921. Le maitre general (depuis 1946, Mgr. Wilhelmus van Hees),habite Amersfoort en Hollande. Comme nous le verrons, deux desgeneraux des Croisiers proviennent des prieures de Caen et duVerger.Le grand et principal historien des chanoines reguliers de Sainte-Croix, C. R. Hermans 5 donne quantite de details et de documentssur TOrdre tout au long de ses trois volumes, mais il reste tresdiscret en ce qui touche la France, et pour ainsi dire muet sur lesfondations de l'Ouest. Presque rien n'a ete ecrit sur les CroisiersFrangais, a part quelques etudes recentes : la fin du prieure deCarignan dans les Ardennes6, une notice biographique de Teveque5 Voir note 2.e E. Fontaine, Mgr. Jacques Dubois et la fin du Prieure de Carignan, dans Clairlieu,t. VIII, 1950, p. 49-66.


12 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENArmoiries de Mgr. W. van Hees, maitre gSneral depuis 1946$Avranches, Cesar le Blanc (1719-1746) \ l'histoire du pricing deLannoy dans le Nord8.Ayant eu Toccasion recemment d'etre cure de Lignieres-la-Doucelle,(Mayenne), nous y avons rencontre les mines du prieure deSaint-Ursin et fait connaissance par cette occasion avec les ChanoinesReguliers de Sainte-Croix beiges et hollandais; grace a leursencouragements et a nos recherches personnelles, il nous a 6te possible de publier l'histoire du prieure de Saint-Ursin9 et d'etendrenos recherches sur tous les prieures de l'Ouest: ainsi, nous est-ilpossible de presenter les Croisiers en Normandie: prieur6 de Caenet Cesar Le Blanc, eveque d'Avranches10, avant de nous consacrer aceux de Bretagne et d'Anjou.Aux archives du Calvados existe un fonds important sur leprieure caennais, parmi les archives de FUniversite, c6te D 575 aD 644. Grace a l'amabilite de Mademoiselle Marie-Josephe LeCacheux, directrice des services d'archives du Calvados, nous avonspu le fouiller de fond en comble. Par contre existent aux Archi-7 L. Heere, CSsar Le Blanc, O.S.C. bisschop van Avranches, 1719-1746, dansClairlieu, t. XI, 1953, p. 30-35 ; A. Durand, CSsar Le Blanc, eveque d'Avranches1719-1746, dans Revue de LAvranchin et du Pays de Granville, 1966, ri° 246, p. 1-25(Tirage a part, en vente chez l'autenr).8 J. van den Bosch, Le Couvent des Croisiers de Lannoy (1474-1792), dansClairlieu, t. XIII, 1955, p. 3-27. (Edition corrigee et augmented du m&ne article,paru dans Bulletin du ComitS flamand de France, Lille, 1954).9 A. Durand, Les Croisiers au Maine. Le Prieure de Saint-Ursin a Lignieres-la-Doucelle (Mayenne), dans Clairlieu, t. XXII, 1964, p. 1-90. (Tirage a part, en ventechez l'auteur).10 Voir note 7.


L'ARRIVEE DES CROISIERS EN FRANCE 13ves Nationales les copies de Lettres Patentes de fondation, le cartulaireet diverses pieces sur Textinction du couvent.Avec variantes possibles selon les prieures, en g6neral les Croisiersfrangais portent: ,,d'azur a une croix patee de gueules etd'argent", Tecu couronne d'une couronne d'epines surmontee d'unemitre et d'une crosse.


14 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENI. - AU FAUBOURG I/ABBE (1275-1356)II existe dans la vieille ville de Caen, une Rue des Croisiers, entrela rue Gemare d'une part, et les rues aux Namps et Froide d'autrepart. Plus de quatre cents ans durant des Croisiers se sont succedeset ont sanctifie cette rue du quartier Saint-Sauveur, a l'ombre duchateau de Caen, mais ce n'est pas la qu'il faut chercher les toutpremiers representants des Freres de Sainte-Croix.Avant les invasions anglaises de la Guerre de Cent Ans, lesCroisiers s'etablissent dans le Vaubourg-VAbbe, paroisse Saint-Martin, a environ six cents metres sud-ouest du chateau, a Test dela Place Saint-Martin, dans ce qui furent les Fosses Saint-Martin,faisant suite aux Fosses Saint-Julien. L'emplacement de la premierefondation se situe en gros dans la partie orientale de la Place Saint-Martin, entre les rues Premagnie et Saint-Manvieu, a quelques centainesde metres de la celebre eglise Saint-Etienne ou Abbaye-aux-Hommes, grandiose specimen de Fart roman normand, fondee parGuillaume le Conquerant en 1063, en expiation du mariage contracteavec sa cousine Mathilde, avant que soit obtenue la dispensedu pape.Au Bourg-l'Abbe existe une maladrerie pour le soin des lepreuxsi nombreux au Moyen-Age, avec les chapelles de Notre-Dame deBeaulieu et du Nombril-Dieu. Des le XIIme siecle des ChanoinesReguliers de Saint-Augustin sont au service des malades au prieurede l'Hotel-Dieu : les religieux sont au nombre de dix, y compris leprieur et un novice ; une bulle du Pape Innocent III du mois d'avril1210 apprend que le fonds ou est situee cette maison a ete aumonepar Guillaume, comte de Magneville.Au debut du XIIF1* siecle, Guillaume Acarin, citoyen de Caen,apres avoir fait le voyage de Jerusalem, fait batir au nord-est duchateau et en direction de l'eglise de la Trinite ou Abbaye-aux-Dames, autre joyau du style roman normand, Teglise du Saint-


AU FAUBOURG I/ABBE 15Sepulchre, de la forme de celle de Jerusalem ; il y fonde un collegede Chanoines en 1219.A la meme epoque la ville de Caen possede un monastere deBeguines, entre le Faubourg-l'Abbe et le chateau.Les chanoines reguliers augustins de VOrdre de Sainte-Croix ouCroisiers ont-ils ete attires a Caen par les maladreries ? Us endesservent dans leurs fondations de Saint-Ursin et de Saint-Georges.Par les Chanoines de THotel-Dieu ? Par un ancien chevalier vaillantdefenseur des Lieux-Saints lors des Croisades, comme ce futle cas pour Saint-Ursin et Saint-Georges sans doute ? Par les Beguines, dont les Croisiers sont frequemment directeurs spirituels ? Oubien par le Roi Saint Louis ?Volontiers nous pencherions pour l'envoi par Saint Louis, a partirde la fondation parisienne. Voici nos raisons : lorsque Philippe leBel (1285-1314) par Lettres Patentes donnees aux Andelys au moisde septembre 1306 permet aux Croisiers de batir une chapelle, iladmet qu'elle soit dediee en l'honneur de Saint-Louis, son grandpere,canonise par Boniface VIII le 11 aout 1297. L'an 1275, ilssont deja connus a plus d'une quinzaine de kilometres de Caen :Thomas Le Marchand, bourgeois d'Argences, dans son testamentleur legue cette annee-la une somme de 10 sous ; c'est la mention laplus ancienne que nous connaissions sur les Croisiers caennais, cequi laisse supposer qu'ils sont deja etablis avant 1275, peut-etrememe avant la mort de saint Louis (1270). Une nuee de religieuxs'abat sur Caen au cours du XIIIme siecle, et les Croisiers qui ontreussi a prouver leur anciennete se trouvent toujours dans les processions generates de la ville, immediatement apres les Carmes et avantles Jacobins et les Cordeliers ; les historiens caennais admettent dansTensemble que les Carmes, fondes par le croise Berthold de Calabre,sont arrives paroisse saint-Pierre en 1278 ; que les Jacobins se disentfondes par saint-Louis ; que les Cordeliers sont arrives en 1262 \1 Les historiens locaux affirment tous l'etablissement des Croisiers soit avant 1290,soit avant 1275 : Huet (Pierre-Daniel), Les origines de la ville de Caen, 2e edition,Rouen, 1706, p. 226-227 ; Frederic Vaultier, Histoire de la Ville de Caen, Caen,Marcel, 1843, p. 88-89 ; Abbe de la Rue, Essais historiques sur la ville de Caen etson arrondissement, Caen, Poisson, 1820, T. I, p. 194 ; Beziers, Memoires pour servira I'etat historique et geographique du diocese de Bayeux, Edition Le Hardy, Rouen,1894, T. Ill, p. 225-226 ; Eugene de Beaurepaire, Caen illustre, Histoire et Monuments, Caen, 1896, p. 320-321 ; Dictionnaire topograhique du Calvados, p. 51. Tousces historiens ne consacrent que quelques pages ou quelques lignes a l'histoire des


16 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENSaintLouisAdmettre que les Freres de Sainte-Croix aient pris position dansla ville dans les dernieres annees du regne de Saint-Louis, entre1269 et 1270, ne nous semble pas deraisonnable, malgre Tabsencetotale de documents.Cependant les religieux vivent toute la fin du XIIIme siecle dansun etat precaire, sans fondation reguliere, ni residence assuree, puisqu'iln'est question qu'en 1306 de la construction de leur eglise enCroisiers. «- Le Tome XXI des Historiens des Gaules (pages 408 et suiv.) parle d'unvoyage de saint Louis en 1269 dans l'ouest de la France. II traverse Verneuil le5 juillet, Essai (Orne) le 8. Dans les jours suivants il passe a Coutances, Saint-Lo,Troarn, Pont-Audemer, le Bec-Hellouin et Rouen. Or, a mi-chemin entre Saint-Lo etPont-Audemer, se trouve Caen. Allant de l'une a l'autre ville, saint Louis n'a pas pune passer par la. C'est si vrai qu'il date un acte de Troarn, pres de Caen. Des lorstout s'explique, et qui sait s'il n'y a pas ete question de fondation eventuelle d'unprieure de Croisiers ?


AU FAUBOURG L'ABBE 17la paroisse Saint-Martin, la ou s'est tenu au XIXrae siecle le marcheaux bestiaux, dans les fosses Saint-Martin.Par lettres patentes donnees a Paris en juillet 1290, Philippe leBel confirme la donation faite precedemment de plusieurs heritages,d'une valeur de 25 sols 4 deniers tournois, sis a la Vavassorerieparoisse de Beuville, a deux lieues au nord de Caen : le donateurest Raoul de Sannerville, clerc bourgeois de Caen 2.L'annee commence en general au Moyen-Age le jour de Paques,entre le 22 mars et le 25 avril, et peut ainsi varier de onze a treizemois ; les documents de fin mars ou d'avril sont souvent precisespar avant Pasques ou apres Pasques, et lorsqu'ils sont des premiersmois de l'annee, ils appartiennent deja a l'annee suivante, ainsi pourcelui qui suit. C'est un edit de 1563-1564 du roi Charles IX qui aramene le debut de l'annee au lr Janvier.Done, le premier jour de mars mil deux cent nonawte (lr mars1291), Jean Samson, de la paroisse de Cambes (Cambes-en-Plaine),donne et aumone aux religieux pour estre associe luy et ses predecesseursaux prieres et oraisons d'iceux une maison situee a la Lon-«de, avec une piece de terre d'une acre et demie3 au terroir de Beuville et deux autres au meme terroir ; une autre au terroir d'Epronet une autre a la Fosse-Taillefer ; puis sept boisseaux de froment,un denier et un hommage a prendre sur Raoul Richer, deux boisseaux de froment sur les heritiers Simon Samson, trois sols tournoiset un chapon a Noel et quinze oeufs a Paques et un hommage aprendre sur Roger Launier4.2 Voir piece justificative I.3 1 acre = 4 vergees ; 1 vergee = 40 perches. La valeur de l'acre varie selon leslieux, ainsi 68 a 66 ca a Noyers ; 67 a 47 ca a Bretteville-sur-Odon et Verson ;64 a 82 ca a Rots et Secqueville ; 60 a 78 ca a Authie, Beuvile, Bieville, Brettevillel'Orgueilleuse,Caen, Cairon, Carpiquet, Colleville, Creuilly, Epron, Herouville, Norjrey,Putot, Saint-Contest, Saint-Manvieu ; 54 a 70 ca a Baron, Herouvillette, Mondrainville,Mouen ; 48 a 62 ca a Anisy, Basly, Beny, Cambes, Courseulles, Mathieu,Ouistreham, Periers, Saint-Aubin d'Arquenay ; 36 a 47 ca a Cresserons, autant delieux que nous allons rencontrer au cours de ce volume. II en va de meme pour lavaleur du boisseau : 2 decalitres 701 a Caen, dit mesure actuelle, mais d'une pluspetite capacite pour celui dit mesure ancienne ; 2 dal. 887 a Evrecy. Pour les monnaies: 1 livre = 20 sols ; 1 sol = 12 deniers ; la livre tournois : monnaie de Tours.4 Archives Nationales, LL 1480, Cartulaire des Croisiers de Caen, p. 9-10 ; Archives) P(hotographiques) H(istoriques de l')O(rdre) S(ainte-)C(roix), N° 416. Microfilms. Les documents que nous avons utilises dans cette etude, conserves aux ArchivesNationales de Paris, ont ete photographies par APHOSC (= Archivutn Pbotographi-*um Historicum Ordinis Sanctae Cruets), le centre de documentation du cercle historiqueClairlieu. APHOSC dispose egalement d'une grande quantite de documentshistoriques et iconographiques sur l'histoire de l'ordre des Croisiers, provenant de


18 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENEn cette meme annee 1291, les Freres de Sainte-Croix de Caenregoivent du pape Nicolas IV des indulgences a gagner dans leureglise aux fetes de Saint-Augustin, Saint-Thibault, patron de lamaison-mere de Huy, et de la Sainte-Croix, ce qui laisse a supposerqu'ils ont deja un petit oratoire que peuvent visiter les fideles 5.Les religieux sont-ils nombreux ? nous pouvons le supposer, puisquequatre d'entre eux essaiment en 1302 pour assurer la fondation duprieure de Saint-Ursin, au Maine. Aucun nom de prieur ou dereligieux de cette epoque ne nous est parvenu : Guillaume de Fontenayet Raoul Alain, cites dans l'acte de fondation canonique deSaint-Ursin le 5 novembre 1316, peuvent fort bien faire partie desquatre religieux tires de Caen en 1302.L'annee 1306 voit la construction d'une chapelle ou eglise enThonneur de Saint Louis. L'abbesse de 1'abbaye de laTrinite (fondeepar la reine Mathilde et consacree en 1066 pour recevoir les demoiselles nobles qui se destinent a la vie monastique), patronne del'eglise et paroisse Saint-Martin, donne son consentement a condition que les religieux celebrent chaque annee deux messes a sonintention, Tune le jour saint Denis, l'autre le jour de la Trinite, etque le jour de cette derniere fete ils lui presentent un cierge a1'abbaye.Philippe VI de Valois (1328-1350), roi de France, permet parlettres patentes datees de 1329, pres de Loches (Indre-et-Loire), laconstruction de deux piliers au-devant de l'eglise, avec avancee dedeux pieds sur la rue, apres enquete de commodo et incommodo deGuillaume Marie, lieutenant du bailli de Caen. II s'agit sans doutede consolider les murs de l'edifice6.De 1306 a 1346 de nombreuses fondations viennent enrichir lesCroisiers: les unes agrandissent le monastere place saint Martin,les autres leur procurent des revenus dans la ville et dans les campagnesenvironnantes. Par suite de la destruction de nombre dedocuments anterieurs a la guerre de Cent Ans, nous n'en connaissonsque quelques-unes.differents depots d'archives, bibliotheques ou monuments historiques. L'inventaireAPHOSC et tout autre information peuvent etre obtenus au secretariat de Clairlieu(H. Verstappenplein 12, DIEST, Belgique).5 Henri van Rooijen, Les Origins des Croisiers, dans Bulletin de la Societe d'Artet d'Histoire du Diocese de Liege, Liege, t. XLII, 1961, p. 97.6 Voir piece justificative II.


AU FAUBOURG L'ABBE 19Le samedi apres les octaves de la Chandeleur (12 fevrier) 1319 (1320), JeanPillet, bourgeois de Caen, donne et aumone une vergee de terre a Courseulles (-sur-Mer), jouxtant Guillemin Pinchart.Le mercredi apres la Saint-Martin (13 nov.) 1314, Alexandre Rufin a achete deRenault Le Gay, de Courseulles, 7 livres tournois une verged de terre a Courseulles,au bout de la ville, entre le chemin du Roy et la terre de Guillaume Aubert, etdiverses autres dont Tune jouxte les heritiers de Vincent Pinchart, avec rente chaqueannee de cinq mines d'orge. Ce nom de Pinchart nous allons bientot le rencontrer.Le mardi avant la Saint-Denis (3 oct.) 1324, le meme Alexandre Rufin donne pourle salut de son ame, de celles de ses pere et mere, de Perronnelle sa femme, dePierre son frere et de Perronnelle sa soeur, toutes ses terres, maisons, places, edifices,revenus et rentes qu'il possede dans les paroisses de Bernieres et de Courseulles afinqu'ils soient employe's a l'ouvrage de leur Eglise. C'est alors qu'apparait le nom dupremier religieux de Caen que nous connaissions : frere Guillaume Langlois, procureur,qui le vendredi apres la Sainte-Croix (9 mai ou 19 sept.) 1326 s'arrange avecles heritiers d'Alexandre Rufin pour obtenir d'eux quarante septiers de froment7.En 1326, Nicolle Andre, de Cambes, et du consentement de Leonor sa femme, laisseaux religieux un manoir et heritages assis a la Londe pour 19 livres 10 sois tournois8.Et puis, c'est le silence des archives...Sous le soleil de juillet 1346, les paysans du Cotentin voient uneflotte immense s'approcher de la cote et debarquer dans le petitport de Saint-Vaast. D'une marche rapide, precise, implacable,l'armee anglaise s'enfonce comme un soc dans la terre normande.Au debut de l'apres-midi du 26 juillet, 1'armee tout entiere, archers,cavaliers, coutiliers, decouvre la ville de Caen : une dolente procession de moines et de religieuses, quittant leurs abbayes, isolees loindes faubourgs, se dirige vers le quartier de Tile Saint-Jean en soulevantune vague de compassion. Le lendemain les vaillants soldatsde la ville sont battus et massacres sous le coup de boutoir de 40.000soldats anglais qui pillent la ville et emportent ses richesses. LesCroisiers disent adieu a leur premiere fondation.Lorsque les Anglais, repus de butin, disparaissent a rhori2on, enoctobre vient un ordre du roi de France, ordonnant aux gens de sabonne ville d'elever des ramparts pour se proteger de la mort etdu pillage. Les bourgeois emploient leurs dernieres forces et leursderniers sols a batir de puissantes murailles. Celles-ci doivent passerau milieu du monastere des Croisiers: eglise et habitations sontlivrees au pic des demolisseurs et les pierres employees a la construction du mur d'enceinte pres de la tour Chatimoine. Faudrait-il voiren ce nom un jeu de mots : chatie-moines ?7 Arch. Nat. LL 1480, p. 30-32.8 Arch. Nat. LL 1480, p. 9.


20 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAEN,,Le moustier et hostel des freres de Ste Croix" ayant ete ,,mis amine et a destruction" ... ,,pour la sur ete et enforcement du pals",les religieux sont plus ou moins disperses dans la nouvelle forteresse,et pour eviter qu',,ils ne fussent deserts et fugitifs du pals", lechevalier Robert de Varigue, bailli et capitaine de Caen, apres ,,aviset deliberation a plusieurs tant chevaliers, bourgeois et habitans"de la ville, les place provisoirement le 10 juillet 1356 en ,,1'hostelou il... y avait beguines, assis en la paroisse de St-Sauveur, dedansla forteresse... hostel preste jusqu'au terme de la St-Michel prochain".Eh bien ! ce provisoire a dure quatre-cent-seize ans !Charles V, n'etant alors que regent-due de Normandie et dauphin de Viennois, a la suite de cette deliberation de la ville, parLettres Patentes donnees a Breteuil et datees du 3 aout 1356, donnedefinitivement le couvent des Beguines aux Croisiers ; il le confirmele 11 Janvier 1359-1360 et en 13669.La ville donne aux beguines une autre demeure dans le MarcheNeufTie Moustier blanc de la couleur de l'habit de ces filles, assisa TAmontoir du chateau. Leur maison primitive etait de faibleenvergure, accompagnee seulement d'une chapelle, integree dans lasuite dans l'eglise des Croisiers. L'historien Pierre-Daniel Huetaffirme que Ton y voit encore en 1706, dans une des vitres du cotedu midi, ces religieuses representees avec un voile blanc sur la teteet un habit gris-blanc10.Pendant ce temps les nouvelles fortifications de la ville en vuede la garantir a l'avenir des invasions de Tennemi, s'edifient sousla conduite et selon les plans de Jean de Melun et Amaury deMeulan, chevaliers commissaires du roi en cette partie; cependantdans leur infortune les Croisiers regoivent quelques donations :9 Voir pieces justificatives III et VII. Arch. Nat., Tresor des chartes, reg. 98, N°646. Les Beguines, genre d'association intermediate entre la vie religieuse et la vieseculiere, ,etaient de pieuses veuves ou filles vivant ensemble par petits groupes dedeux ou trois, dans des maisonnettes distinctes et rapprochees, sous la direction d'unpretre. Le travail de leurs mains assurait leur subsistance et les ceuvres de charitealimentaient leur piete. La premiere association de ce genre parait avoir ete forme*ea Liege en 1184 ; il s'en forma ensuite aux Pays-Bas, en Allemagne, en France. Leconcile de Vienne (1311-1312) condamna huit erreurs de la secte des Beguines dansle royaume d'Allemagne et decreta la suppression de tous les Beguinages ; certainscependant demeurerent, et a Caen en 1356 le couvent n'est plus occupe que par uneseule beguine.10 Les Origines de la ville de Caen, p. 244.


AU FAUBOURG L'ABBE 21En 1348, 11 boisseaux de froment, mesure actuelle de Caen, pair au meilleur a6 deniers de relache et 2 gelinottes grasses de rente fonciere au terme saint-Michel,affectes sur cinq vergees de terre a Colleville(-Montgomery), nommees Le Coquet,rente toujours versee en 1761 et transferee aux hospices civils de Caen apres laRevolution"; le mardi d'apres la Sainte-Croix de septembre (15 sept.) 1349, parPierre Gaast, de saint-Pierre de Caen, un septier de froment, mesure de Caen, a lasaint-Michel (29 sept.), a prendre sur une demie-acre a Marcelet en Saint-Manvieu,ainsi qu'une geline a Noel, dix oeufs a Paques et un hommage.Les Croisiers possedent des terres a Bieville (sur-Orne) : c'est ainsi que le 28 avril1354, Thomas Le Dars, de Cambes, Jean Le Dars, de Bieville et Hamel de laLonde prennent a fieffe sept vergees de terre pour une mine de froment a la Saint-Michel ; ce sont trois acres que pitend Jean Le Dars le 24 septembre 1386 pour septboisseaux de froment, et le 6 mai 1455, un autre Jean Le Dars, toujours de Bieville,avec vingt-trois vergees de terre12.11 Archives du Calvados, D 633.12 Arch. Nat. LL 1480, p. 72-74.


22 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENII. - PIERRE PINCHART, PRIEUR, 1355; GENERAL DEL'ORDRE, 1363-1382 ; EVEQUE-NOMME DE SPIRE, 1382L'une des plus grandes gloires du prieure de Caen nous seraitrestee absolument inconnue si nous avions cantonne nos recherdiesaux seules archives frangaises ; neanmoins les historiens locaux lementionnent et le font figurer parmi les grands hommes de la villede Caen, et ceux de l'Ordre lui assurent une place honorable parmiles generaux \ La plupart ecrivent son nom : Pinchar; d'autresPinchare ou Pinchart; cette derniere fagon d'ecrire est plus conformeaux documents du XIVme siecle mentionnant dans la region deCaen des Pinchart, pas forcement de la famille du prieur de Caen.C'est dans le faubourg de Vaucelles a Caen que voit le jour vers1320 Pierre Pinchart; la famille de ce nom dont il est sorti, subsisteencore, affirme Huet en 1706. Un religieux de Sainte-Croix dupays de Liege, envoye pour un temps au couvent de Caen, l'attirevers lui alors qu'il fait ses etudes ; Pierre Pinchart le suit quand ilretourne dans son pays, prend l'habit de Sainte-Croix a la maisonmerede Huy, et acheve ses etudes (a Paris ?) avec le degre dedocteur en theologie2. Ayant acquis beaucoup de reputation par sascience theologique et par Teloquence de ses predications, il revient1 Huet, Origines de la ville de Caen, p. 225 et 332-334 ; Abb6 de la Rue,Essais historiques sur la Ville de Caen et son arrondissement, t. I, p. 197, 12 lignes ;de Beaurepaire, Caen illustre, Histoire et Monuments, p. 321, 5 lignes ; Beziers,Memoires pour servir a I'Hat historique et geographique du diochse de Bayeux, t. Ill,p. 226, 6 lignes ; - Boisard, Notices sur les hommes du Calvados, Caen, de Pagny,1848, p. 287, 10 lignes ; Frere, Manuel du Bibliographe Normand, t. II, p. 387-388,9 lignes ; Oursel, Nouvelle bibliographie normande, t. II, p. 360, 9 lignes ; Le"p.Martin, Athenae Normannqrum, p. 438, Manuscrit aux Arch, du Calvados, 28 lignesen latin ; Hermans, Annales Canonicorum regularium S. Aueustini, Ordinis S. Crucis,tome IV, Index, p. 148 ; Russelius, Chronicon Cruciferorum, p. 80-85 ; A. van dePasch, Het klooster Clairlieu te Hoei en zijn prioren-generaal 1210-1796, dansClairlieu, tome 17 (1959), p. 109-111.2 Selon certains auteurs ; ou a Louvain, selon C. van Dal, Rond ,,Vestis Nuptialis",dans Clairlieu, tome 11 (1953), p. 3-29, quoique l'universite n'a ete fondee qu'en1425.


PIERRE PINCHART 23a Caen en qualite de prieur l'annee 1355, dans la periode difficileou la communaute essaie de se reformer chez les Beguines.Lorsque Jean de Manneville, prieur du couvent de Paris, est elugeneral fin 1355, Pierre Pinchart quitte Caen. Retourne-t-il a Huy,pres du chef supreme des Croisiers ? C'est possible. Religieux excessivementhumble et pourtant chef prestigieux des Croisiers, Jean deManneville demissionne de sa charge en 1358, pour terminer savie probablement dans le couvent de Caen a se noviter erecto 3(nouvellement erige par lui) ; nous affirmerions plutot: nouvellementremis en place par lui. II est tres possible et meme plausiblequ'il ait ete religieux de Caen avant son elevation au generalat;nos recherches ne nous l'ont jamais fait rencontrer. Manneville estle nom d'un chateau du Calvados, a quelques kilometres a Test deCaen.A la mort de frere Jean de Suole (Zwolle), decede le 4 avril1363, Pierre Pinchart est elu a la tete de l'Ordre a l'unanimite descapitulants et se montre tres digne d'un tel honneur. Ses historiensaffirment qu'il vient directement de Caen dont il est prieur, ce quimontrerait que le mandat triennal de prieur, en usage dans lesderniers siecles du prieure, etait deja en vigueur au XIVme sieclea Caen. Cette charge l'oblige d'aller resider a Huy et de s'employeravec ardeur et avec succes a la reformation de TOrdre, la disciplineet l'obeissance etant plus ou moins tombees sous le predecesseur.Neuf ans apres son election la presence du General est necessairea Caen pour remettre toutes choses en etat. Le prieur et les religieuxde Sainte-Croix contestent une decision de l'official de Bayeux endate du 27 juin 1372, les obligeant d'apres une pretention du doyende Feglise du Saint-Sepulchre a se rendre processionnellement avecla croix et Teau benite a la Collegiale du Sepulchre le jour de TExaltationde la Croix en septembre, pour y celebrer une grand'messea diacre et sous-diacre et y ecouter un sermon. Pierre Pinchart conclutavec Pierre Le Certain, doyen du Sepulchre, un traite obligeantces Peres de Caen a faire tous les ans deux processions en soneglise, aux fetes de l'lnvention (3 mai) et de l'Exaltation de laCroix (14 septembre) et d'y assister a la predication. Et c'est surcet exemple que dans la suite les processions de la ville s'assujetti-3 Hermans, I, 1, p. 74. *- Russelius, p. 80.


24 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENront a aller tous les ans adorer la Croix a la Collegiale le jour desRameaux4.Cest au cours de cette meme annee 1372 que Louis Thezart,,eveque de Bayeux 5, procede a la ceremonie de benediction de lanouvelle chapelle des Croisiers, mise en chantier avec le genereuxconcours de l'epouse du roi de France. Pierre Pinchart signe auproces-verbal qui en est dresse.Depuis le debut du siecle les Papes habitent a Avignon ; a lamort de Gregoire XI (1370-1378), le grand schisme d'Occident estconsomme. Deux Papes sont a la tete de l'Eglise : Urbain VI (1378-1389), pape legitime; Clement VII (1378-1394), reconnu par leroi de France. Pierre Pinchart visite tous les couvents de sa dependancepour les conserver au Pape legitime ; il sent une grande resistance chez ses moines lorsqu'il s'agit d'introduire d'utiles reformes-Chose singuliere, Charles VI s'interpose pour aider de tout son.poids le general des Croisiers dans son oeuvre reformatrice, alorsque Tun et l'autre ne reconnaissent pas le meme chef de TEglise.En 1380, Pierre Pinchart obtient du Pape 100 jours d'indulgencespour son Ordre aux fetes de Noel, TEpiphanie, Vendredi-Saint^Paques, Ascension, Pentecote, Trinite, Fete-Dieu, aux fetes de laVierge et des Apotres ainsi que des saint Jean-Baptiste, Augustin,,Thibault, Marie-Madeleine, Catherine, Agnes et Odile, et pendantles octaves de ces fetes.Russelius suggere que Pinchart n'est pas seulement un homme desciences, mais aussi un administrateur de premier ordre. II s'est donnebeaucoup de peine afin de maintenir dans les couvents frangaisla discipline religieuse; par sa grande patience et son energie il asu obtenir de bons resultats dans les maisons d'Angleterre, pourtantnous n'avons trouve aucune trace d'un sejour dans ce pays bieaqu'ayant entretenu une correspondance tres continue avec Tevequede Londres. Son zele est apprecie specialement par le Nonce Apostoliquea Heidelberg, le cardinal Pileus. Cest probablement celui-ciqui propose Pinchart au siege episcopal de Spire : cette election estpour lui Toccasion de terminer son Generalat par la visite de tous,* Huet, p. 225. •- de la Rue, p. 196. - Inventaire des archives du Calvados, Appendices N° 93, 1834, t. II, p. 381.5 Beziers, t. I, p. 67-68. Louis Thesart, vicaire general de Reims, nomm6 49*eveque de Bayeux, y meurt le IV des ides d'octobre 1374.


PIERRE PINCHART 25les couvents de sa dependance. II commence par la France Tan1381, trouvant toujours une certaine resistance a ses reformes, maissur la fin de sa course il est arrete par la mort au monastere deSaint-Agathe en Brabant, le 13 juillet 1382, avant la prise de possession de son siege de Spire. Le treizieme general des Croisiersavait conserve la direction de l'ordre pendant dix-neuf ans.Sa lutte contre les pratiques simoniaques nous est connue par leschroniques de Russelius. A ce point, Pinchart etait intransigeantpour ne pas vendre les antes, qui ont ete rachetees par le precieuxsang du Christ. L'admission au noviciat et remission des voeuxdevront se faire en toute liberte. On possede aussi de Pinchart uneapologie detaillee, faite pendant son generalat, des droits et desprivileges de TOrdre. Un proces a ce sujet est introduit aupres dela Curie episcopate de Cologne a cause de difficultes d'ailleursinconnues. Mais Russelius ecrit que le Generalat de Pinchart a etecaracterise par des labeurs et des soucis continuels, accompagnesd'un grand chagrin. Sous son administration les couvents de Sainte-Agathe-Cuyck (1371) et d'Aix-la-Chapelle (1372) ont ete fondes.La grande oeuvre de Pierre Pinchart est un livre, reste longtempsmanuscrit, et que les historiens de l'Ordre lui attribuent: Vestisnuptialis, seu ornatus animae deuotae religiosae ad nuptias agntaeternitatis pie anhelantis, sub schemate religiosi habitus sacriordinis Salvificae Crucis, summa ingenii industria ante annos concinnatus,et in tres libros, pro statu triplici, digestus per R. P.Petrum Pincharium, postmodum totius Sacri Ordinis 5. + 13 arestitutione Magistrum Generalem ; nunc demum jussu et auctoritateRev.mi P. F. Augustini Neaerii, Generalis moderni, recognituset luce donatus. Coloniae Agrippinae. Imprimebat Henricus Kraft,sub signo solis, Anno 1639, in-octavo de 432 pages. Cest au couventde Cologne que le 19 mai 1635, le Maitre General Augustin Neaerius(1619-1648) charge le prieur d'Ehrenstein, Egide de Vriese6,de preparer cette edition, dans une adaptation du latin medieval augout du XVP* siecle.fl Egide de Vriese, ne en 1596/97 a Deventer (Pays-Bas), ville occupe'e par lestroupes protestantes depuis 1591 ; decede vers 1650. Egide entra dans le couventcroisier de Cologne, mais il celebra sa premiere messe a Paris : Hostia Parisiis primasacrata mihi est, ou sa famille avait emigre. Cf. A. van Asseldonk, Aegidius deVriese, dichter en leraar aan de latijnse school te Maaseik, in De Kruish&ren teMaaseik, Diest 1955, p. 113-131.


26 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENLa critique interne de l'ouvrage demontre qu'il a ete ecrit auXIVme siecle : tous les auteurs cites datent d'avant 1300 et il estinutile de chercher parmi eux un orateur de la Devotion Moderne.On remarque aussi l'absence absolue de Fecole franciscaine et latendance de Pinchart a la spiritualite augustinienne, notammentdes Victoriens. Cette orientation frangaise apparait encore du faitqu'on ne trouve aucune trace des mystiques dominicains allemandsSuzo et Tauler. Une influence indeniable de la litterature orientalenous amene ainsi en France ou au pays de Liege. Tout ceci prouvela possibility que Pierre Pinchart ait compose son livre a Caen oupeut-etre deja a Huy. Une lecture meme superficielle nous montreFauteur comme un theologien habile et comme une personne quijouit au sein de l'Ordre d'un certain prestige et qui y assume une'fonction responsable.Vestis nuptidis est un traite ecrit pour les Croisiers. II se peutque ce soit un compte-rendu d'une serie d'instructions que le P.Prieur, Pinchart, ait donnees a ses novices et a Foccasion d'un chapitrequotidien, car c'est un manuel succint sur la vie religieusevecue, de sorte qu'il a du etre elabore dans et par la pratique. Sadoctrine est forcement catholique ; Pinchart indique seulement unevoie sure, qui a ete tracee par l'Eglise. Le livre est solidement fondesur les sentences des Peres de l'Eglise, des Papes et des Conciles,de theologiens reconnus et sur les directives de l'Eglise (Decretales).Pourtant par un gout et une vue propres, il a su donner a cetraite un ton et une teinte personnels, tandis que la fagon de s' exprimera ete influencee manifestement par Tautorite dont jouitl'auteur dans l'Ordre7.Le but que Pinchart s'est pose des le debut revient a la rencontreavec le Christ. L'aversion complete du monde et la conversion totalevers Dieu doivent necessairement conduire a un abandon total aDieu (devctio). II conduit 1'ame par les trois etapes traditionnelles,celles des incipientes, proficientes et perfecti. On pourra dire quePinchart considere Faeces a la contemplation comme une expressionnormale de la vie religieuse. De meme que saint Augustin, il considere FAmour parfait comme Fessence de la perfection, mais, inT L'experience de Pinchart nous apparait dans la description des abus dans les>couvents (Vestis Nuptidis, p. 139-141 ; 158-162 ; 286-287 ; 430, etc.), sa connaissancede la vie spirituelle et les preuves de l'existence de differentes vertus (Ibidem, p.171-177 ; 210-211 ; 226-227 ; 264-266, etc.).


PIERRE PINCHART 27eoncreto, il pose cette essence pratiquement dans l'obeissance absolue.Par la on arrive a une abnegation complete et on obtient laconformite avec le Christ qui etait obeissant jusqu*a la mort sur laCroix. Les normes concretes de l'obeissance se trouvent dans laRegie et les Constitutions de l'Ordre, qui contiennent un savoirvivreexperiments. II se refuse de toute singularity car il n'y aqu'un seul chemin qui puisse conduire a la rencontre du Christ, etce chemin c'est l'obeissance. De meme que la tradition de l'Egliselui inspire une doctrine sure de la vie spirituelle, ainsi la traditionde TOrdre lui presente les normes concretes a l'obtention du butpropose.Croisier qu'il est, Pinchart a une devotion speciale au Christcrucifie en qui il voit le modele de la vie spirituelle et il est convaincuqu'il ne sera Croisier que lorsqu'il lui suffira ce qui est dela Croix. A l'occasion de sa profession le Croisier a ete marque dela Croix qu'il porte sur son habit et d'apres laquelle l'Ordre a etenomme. Sa premiere tache de chaque jour (les offices divins : l'Eucharistieet le Choeur) ne lui rappelle pas seulement les mysteresde la passion et de la mort du Christ, mais le met aussi en contactpersonnel avec ces mysteres. II est au service du Negotium Cruciset veut se donner aux besoins de l'Eglise. Pinchart n'appuie passeulement sur l'aspect de la souffrance dans le Mystere de la Croix(Crux salvifica) mais plutot sur l'aspect joyeux de la Redemption(Crux vivifica). De meme que dans la tonsure il porte l'image de lacouronne d'epines du Seigneur, ainsi il espere recevoir un jour lacouronne de gloire. II essaie d'elever sa devotion, son abandon aDieu, a un Amour devoue, humble et ardent du Christ, a un penchant permanent de l'ame qui l'unit a Dieu pour toujours. A sonavis, une abnegation constante et une humilite profonde y sont lacondition indispensable.C'est ainsi que Pierre Pinchart a resume la vie religieuse duCroisier, sous l'image biblique d'une ame qui s'orne du Vestis nuptialiSjafin de se rendre aux noces de VAgneau et d'y rencontrer leChrist. Sous des exigences severes il a pourtant le bel espoir devoir le Christ qui, par sa Croix, triomphe du peche et de la mort,et qui nous conduira vers les delices eternelles 8.8 Ces quelques lignes sur Vestis Nuptialis sont le resume d'une etude documentedde C. van Dal, I.e. (v. note 2).


28 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENIII. - LE PRIEURE SOUS LA GUERRE DE CENT ANS(1346-1450)Nous avons vu la prise de Caen en juillet 1346, un mois avant ledesastre de Crecy. La Normandie s'efforce de rester frangaise et depanser ses plaies. Le dauphin Charles prend le titre de due deNormandie en 1355, tandis que son pere, Jean le Bon, est vaincuet fait prisonnier l'annee suivante a Poitiers par le Prince Noir.Bayeux est pillee par les Anglo-Navarrais en 1357. Du Guesclin estvictorieux pres de Caen en 1370. La region de Bayeux est ravageepar les Anglais en 1388.Apres la reprise des hostilites avec l'Angleterre en 1415 et lagrave defaite d'Azincourt en Picardie, le roi Henri V s'approche deCaen, defendue par le sire de Montenay. Le 4 septembre 1417,apres une resistance opiniatre, les troupes ennemies deferlent dansles rues inondees de sang. Pendant des decades, e'est l'occupationavec Thorreur des jours d'execution sur les places publiques, lebourreau depegant les partisans du roi de France en larges quartiersde chair palpitante.Avec les premiers succes de Jeanne d'Arc en 1429, Tesperancerenait. Ambroise de Lore, un mayennais, tente un coup audacieuxsur Caen a la Saint-Michel 1431 ; avec 700 hommes, Lore enleveun important butin et trois mille prisonniers. Cest l'annee ou leregent Bedford, au nom du roi Henri VI d'Angleterre, a fonde lagrande Universite de Caen.L'heure de la liberation approche: au debut de juin 1450 lecomte de Dunois venant de Bayeux est la avec cinq mille soldats ;au matin du 10 juin arrive dans les faubourgs le roi de France ;Tattaque commence l'apres-midi, et le lr juillet les Anglais quittentdefinitivement la ville.Que devient au milieu dJune epoque si troublee Sainte-Croix deCaen ?


SOUS LA GUERRE DES CENT ANS 29lr Prieur connu: PIERRE PINCHART, 1355, General del'Ordre.Nous venons d'en faire la biographie.2 Prieur connu : HENRI CAUQUETERRE, 1356, 1357.Malgre leurs detresses les Croisiers se reorganised et resolventde nombreux dons au cours de la guerre de Cent Ans. Grace a lacomprehension de la Ville et du due de Normandie, les religieuxsous Fautorite de frere Henri Cauqueterre, s'installent definitivementen Franche-Rue, au couvent des Beguines, Fan 1356. Occupentles batiments freres Roger Guillebert, Jean Le Cloutier, Pierre Belleyet Pierre Desjardins, futur prieur, ainsi que d'autres Croisiersdont les noms se perdent dans la nuit de Fhistoire.Le manoir des Beguines est si etroit que les freres de Sainte-Croixreinvent le mardi apres la Saint-Michel de septembre 1356 de lapart de Johannin des Preys, fils de feu Robert, bourgeois de Caen,et de Pierre Montfort, meneur donne de justice au service de GuillaumeMichel, vicomte de Caen, une place et jardin rue de Guyemaire(Gemare), devant la fontaine sur FOdon, pres des heritiersde Jacques de Contrieres. Les religieux peuvent ainsi s'agrandirlegerement au nord. Johannin, nous revele Facte, a ete meu de pitiedu desert et damage des diz freres etant donne qu'a cause de closures et forteresches de la dicte ville de Caen, le rnoustier, manoirs etjardim des diz freres ant este desers, degradez et abatuz. Les Croisiers restent dans Fobligation de verser chaque annee 100 sols derente a Johannin, 14 livres a Fabbesse du couvent de la Trinite,10 sous aux pretres de Feglise saint-Pierre nouvellement construite,et 10 sous aux malades de Beaulieu. L'acte est confirme le 9 mars1357.Le jeudi devant la saint-Martin (10 nov.) 1328, devant Jean deQuestot, pretre et garde du seel des obligations de la vicomte deCaen, Jean Darrequin, de Saint-Sauveur, du consentement de Cecilesa femme vend a Estienne David et sa femme Nicolle, au prix de20 livres tournois une maison sise Franque-Rue; Guillaume Tourneneel,le nouveau proprietaire, abandonne aux religieux en perpetuelleaumone le 11 avril 1358 son loyer, savoir : 8 sols tournois,un chapon et quinze oeufs. A leur tour, le 17 octobre 1370, Jean


30 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENLe Lionnais et Benoite sa femme, de la paroisse saint-Jean, donnent20 sols de rente qu'ils prenaient sur la meme maison.Le jeudi avant la saint-Martin d'hiver (8 nov.)- 1358, Jeannedeguerpie (veuve) de Robert Andrieu, de Carnbes, vend aux religieuxun septier de froment de rente, mesure de Caen, qu'elle adroit de prendre sur une maison du Hamel de la Londe.Le 25 octobre 1359 Etienne Davy et Philippote, sa femme, desaint-Sauveur, donnent en pure aumone pour participer aux prieresdes religieux et etre enterres dans leur eglise, une maison procheleur monastere et deux autres situees paroisses de Beuville et Bievilleet un certain nombre de pieces de terre : Val de Periers, Val deMaison, Sault-Aubert et Sault-Ozanne \3me Prieur connu : PIERRE DESJARDINS, 1367.Avant d'acceder au sommet de l'Ordre, Pierre Pinchart est denouveau prieur en 1363. Quatre ans plus tard jaillit le nom dePierre Desjardins a l'occasion d'une donation par la reine Jeanned'Evreux, veuve de Charles IV le Bel (1322-1328), dernier fils dePhilippe le Bel (1285-1314) et ultime roi de la branche directe desCapetiens. Elle abandonne aux Croisiers un emplacement sis aufief de Mirovelle, en Franque-Rue, et sur lequel ces derniers ontde nombreuses dettes, les obligeant a mettre en gage la maisond'Etienne David. Cette donation leur permettra d'etablir leur egliseet par reconnaissance de fonder deux messes par semaine pour ladonatrice. L'acte est du 26 mai 1367 :,,A tous ceux qui ces presentes verront, frere Pierre Desjardins (de Gatdinis),prieur du prieure des freres de Sainte-Croix de Caen, du diocese de Bayeux, avec lecouvent dudit lieu, salut sincere en Je'sus-Christ. Qu'il soit notoire a chacun et paraisseevident que nous, prieur et freres susdits etant debiteurs envers la tres illustre ettres excellente dame, Madame Jeanne, reine (de France), que nous e*tions tenus delui payer annuellement huit septiers de bled, savoir deux septiers et huit boisseauxde froment, et cinq septiers quatre boisseaux d'orge, a cause et pour raison decertain heritage appele le fief de Mirovelle (fcedo de Mirovello), dont nous n'avonspu jouir pendant le temps des guerres, pour lequel nous devons a ladite dame douzeannees d'arr6rages ou environ, pour le paiement desquelles a e"te engaged certainemaison avec ses appartenances appele"e la maison d'Estienne dit David (Stephani dictiDavid), situ£e rue Franche (ou Franque-Rue) (in vico franco), paroisse Saint-Sauveurde Caen, qui nous a ete donne"e pour e*difier notre e*glise, pour raison de cet engagement et a cause de notre grande pauvrete, nous n'avons pu et ne pouvons encore batir1 Arch. Nat., LL 1480, p. 22, 26-27, 44 et 75 ; Arch, du Calvados, D 582 et 590.


SOUS LA GUERRE DES CENT ANS 31ladite eglise, ni payer a. la tres respectable dame les arrerages dus ; c'est pourquoinous avons humblement et denotement supplie ladite dame de bien vouloir, pour1'amour de Dieu et de sa be*nigne grace, nous remettre, donner et relacher en entierlesdits arrerages ainsi que ladite maison pour batir notre eglise, de sorte que la tr£srespectueuse dame considerant notre extreme pauvrete, mue de compassion et depiete, ayant vu et examine notre humble supplique, ouvrant pour nous les entraillesde son infinie bonte et grace, accordant misericordieusement et avec piete notrehumble requete en pure aum6ne, nous a cede, donne et nous donne et cede la maisonsusdite pour batir notre eglise, en tout et sans reserve, et aussi par sa grace specialenous a veritablement remis et tenus quittes de tous les arrerages du temps passe ;nous done qui ne voulons pas etre ingrats pour la reception d'un si grand bien parnotre dame, nous avons accorde et accordons a ladite dame ce que nous donnonspour toujours et a perpetuite : deux messes chaque semaine, qui se celebreront dansnotre eglise dans tous les temps a venir, dont l'une sera pour les defunts et se dirale lundi pour le repos de l'ame de son tres illustre prince Charles, roi de France,epoux de notre dame, et l'autre de la Croix, le vendredi pour ladite dame tantqu'elle vivra, et apres son deces, la messe de la Croix sera changee en messe deRequiem, pour leurs successeurs et les notres, presents et a venir, sur le voeu denotre religion et peril de nos ames ; et encore d'abondance, promettons de bonne foique nous ferons approuver et confirmer le tout par le Superieur et prieur general denotre Ordre, le plus tot que faire se poufra, principalement apres la fete de sainteMarie-Madeleine (22 juillet). Donne" a Caen, sous le sceau de notre prieure etcouvent dudit lieu, la meme annee mil trois cent soixante-sept, vingt-sixieme jour dumois de mai".2Cette donation de la reine Jeanne, ajoutee a celle d'EtienneDavid, permet aux religieux d'obtenir de l'eveque Louis, de Bayeux,un acte de fondation canonique en bonne et due forme le 20 mai1368. L'habitation des Beguines, proche la maison de Jean Quatran3,n'avait que quatre-vingts pieds sur soixante; la nouvelledemeure des Croisiers s'augmente d'un nouvel espace de cent piedssur quarante entre les Beguines et la maison de Pierre Lormier,bourgeois de Caen d'une part, la Franque-Rue et les rives du Petit-Odon d'autre part4. Les religieux pourront affecter leurs locaux,situes a l'interieur des limites de la paroisse saint-Sauveur, a lalouange du Dieu Tout-Puissant, de la bienheureuse Vierge Marie2 Arch, du Calvados, D 582, original parchemin, seel perdu. Voir piece justificative VI.3 II existe un hdtel Quatrans, 17, rue Gemare, et dans les environs, 31, rue de laGeole, la Maison des Quatrans, dont la pittoresque facade sur rue fait 1'admirationdes touristes.4 Affluent de la rive gauche de l'Orne, l'Odon prend source a Ondefontaine, ausud-ouest d'Aunay-sur-Odon. Temoin de violents combats, le franchissement de ceruisseau par le 8e Corps brittanique le 27 juin 1944 a e*te plus couteux en hommesque ne sera plus tard celui du Rhin. Avant de se jeter dans l'Orne a Caen, l'Odonse separe en petit Odon, passant sous l'etablissement des Croisiers, et grand Odon,sous la place de la Republique.


32 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENet de tous les saints; edifier une eglise et des habitations daustrales; recevoir des aumones et accorder la sepulture aux fideles quile desireraient avec accord du cure de Saint-Sauveur. L'entente entrecouvent et paroisse est facile5.Malgre la deliberation de la ville et les Lettres Patentes de Charles V, due de Normandie, en 1356, et en raison de la guerre, bonnombre de formalites n'ont pu etre remplies, de sorte que les religieuxvivent toujours dans une sorte de provisoire. Et cependant,il faut construire et s'amenager. Le samedi 28 octobre 1370, LaurentCanivet fait publier et crier solennellement et notoirement tant ajour de dimanche que a jour de marche sur ordre du vicomte deCaen pour savoir s'il n'y a aucun empechement a ce que les freresde Sainte-Croix puissent resider dans la maison des Beguines. Lesouvriers-jures, tant magons que charpentiers, sont convoques a savoirmaitres Guillaume Plaisant, Richard de Villons, Pierre Enquemet,Pierre de la Drette, Samson Auberce, Jean Le Laurent, GuillaumeLe Comte, Guillaume Samson et Guillaume dit Douillon. Le mardisuivant, sur commande de Pierre Felix, sergent en la ville de Caen,on rassemble bourgeois, bonnes gens et proches voisins du futurcouvent6.L'eglise sort de terre en 1372 ; en attendant sa perfection, enpresence de Pierre Pinchart, maitre general, Louis Thezart, evequede Bayeux, consacre une chapelle ou oratoire et benit le cimetiere,le tout du consentement du cure de Saint-Sauveur, auquel les religieuxdonnent pour indemnite la maison qu'ont habitee depuis lescures de la paroisse jusqu'a la Revolution. Mais l'eglise des Croisiersne sera terminee qu'au siecle suivant, sous la domination anglaise,comme le prouve la decouverte par Tabbe de la Rue d'ecus d'ordes Rois d'Angleterre, dans les decombres de la partie demolie audebut du XIXme siecle. L'architecture de la nef toujours debout, dubeau gothique, est bien de cette epoque7.5 Voir pi&ce justificatives IV.6 Arch. Nat. LL 1480, p. 8.T Abbe de la Rue, t. I, p. 196-197. Abbe Gervais de la Rue, ne a Caen le 7 septembre1751, professeur a TUniversite de Caen, ayant le gout des recherches historiques.Puis devient professeur d'Histoire. A publie en 1820 des Essais historiques surla ville de Caen en 2 volumes. Mort a Cambes le 24 septembre 1835. (Boisard,Notice sur les hommes du Calvados, p. 95-99).


—■ >.|)bayeuxLCourseulles-sur-MerA * 4 1^—T\Bernieres-sur-Mer ^V>s^Langrune-sur-Mer** c r^^S^Luc - sur-MerS^Lion-sur-Mer^v.B6ny-sur-Mer• ^s^ft Crsserons ^s^,^^Fontaine-Henry# •Basly CollevUle- ^treham^ .Montgomery*^})Camillyftft^sSecoueville-en-BessinPutot-en-Bessin ^*V>S^BrettH6tsNoyers-Boc%r


SOUS LA GUERRE DES CENT ANS 35Cest alors que les ames charitables ne font pas defaut: il suffitde lire le chartrier de ces Peres8:Jean Mouillard, de Secqueville-en-Bessin, donne quatre acres des terroirs de Brettevilleet Secqueville, dont deux en la Varende pres d'un terrain des religieux desaint-Etienne de Caen, une vergee au Rouzier, une demie-acre a. Mariel et trois autrespieces au Menil, le 13 octobre 1368. Les religieux diront une messe dans la semaine■de la mi-aout pour le salut de son ame et celles de ses amis trepasses.Le 17 avril 1370, Coutance, veuve de Guillaume Anvers, quitte et de*laisse 20 sols,deux chapons et 30 ceufs de rente sur une maison en Franque-Rue, entre le prieureet celle de Jean Levesque. Guillaume Le Gallais, de saint-Pierre, qui vient de fiefferune maison, confesse le 19 novembre de la meme annee devoir aux religieux 20 sols,moitie a. Noel et moitie a. la saint-Jean, et une geline de rente.En 1371 des terres importantes leurs viennent de la commune de Norrey-en-Bessin.Par contrat devant le notaire d'Evrecy le 5 octobre 1722 elles sont louees 68 boisseauxde froment bon, loyal et marchand, mesure du tripot de Caen, pair au meilleura 6 deniers de relache par boisseau, et quatre chapons gras de rente fonciere exempte


36 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENLe 9 Janvier 1390, Thomas Cousin, de Colleville, prend en fieffe trois vergees deterre en une seule piece dans la meme paroisse, pour quatre boisseaux de froment,,mesure de Colleville, deux chapons et trente oeufs de rente. Cette terre avait etedonnee aux religieux le lundi apres la Toussaint 1348 (3 novembre) par Jean Bridel,de Benouville, pour etre assode aux prieres des religieux, ainsi que sa femme, etavoir tous les deux leur sepulture en leur eglise, en la chapelle Saint-Thibault. II estprobable que les deux donateurs n'aient pu reposer dans l'eglise premiere du faubourg Saint-Martin, alors en cours de demolition pour les besoins de la ville.Dans le passe, car les Croisiers ont perdu tous les titres de leur etablissementlorsqu'ils perdirent leur premiere maison par les guerres, une acre et demie de terreleur fut donnee paroisse d'Authie: sur parchemin avec sceau a queue, Guillaumed'Authie reconnait le 6 novembre 1390 leur devoir chaque annee huit boisseaux defroment, mesure de Caen, a la Saint-Michel, une geline a Noel et dix oeufs kPaques 10.Mention de la nouvelle eglise est faite en 1391 : Jean des Jardins, ecuyer, etColette sa femme, donnent 10 sols de rente qu'ils prenaient sur la maison ou depresent est assise l'eglise desdits religieux.Autres mentions de donations anciennes : le 13 decembre 1393, Mathieu Foucquier,de Saint-Ursin d'Epron, prend une terre du terroir d'Epron, fieu du Roy, pourtrois boisseaux de froment, mesure de Caen, a la Saint-Michel et une geline a Noel ;le 30 decembre 1398, Jean Quesnel de Lion-sur-Mer, prend une acre au terroir deCresserons : quatre boisseaux de froment et une geline. Par ailleurs, Jean Cuquechon^de Saint-Sauveur, donne une acre du terroir de Secqueville en la voie du Roy, pouretre associe aux prieres.Une maison donnee a cette epoque merite un court arret de notrepart. Elle se trouve tout pres de la nouvelle eglise, en la rue esCroisiers; la Franque-Rue commence deja a changer de nom ! Eneffet, le 12 novembre 1396, Jean de Verdum le jeune, ecuyer,l'abandonne ainsi qu'un jardin et ses droits de justice et seigneurie :45 sols, un chapon, un denier, un hommage et 15 oeufs de rente.Cette maison avait appartenu precedemment a Jean Cousin, dit leSaintier, batard, apres la mort duquel et pour cette cause remise enla maison du Roi. Apres proces aux assises de Caen contre lamaison royale, Jean de Verdum peut recuperer la maison Saintieren raison de l'hommage, et l'aumoner aux religieux tenus de celebreret chanter chaque vendredi une messe de la Croix du vivantdu donateur et ensuite une messe de Requiem. La maison est situeeentre l'eglise et la venelle de TOdon, deja abandonnee en partie en1378 par Jamot de Verdum. Les religieux ne peuvent en jouirdefinitivement que l'annee suivante a la suite d'une declaration deNicolas Potier, vicomte de Caen, en date du 28 novembre19 Arch, du Calvados, D 640.


SOUS LA GUERRE DES CENT ANS 37faisant connaitre le desistement du procureur du Roi devant laChambre des Comptes de Paris.La maison Saintier est louee 180 livres le 28 septembre 1717 a maitre Gabriel duPissot, dit de la Couture, bourgeois de Caen et marchand de la paroisse Notre-Dame,frere de Antoine du Pissot, cure de Periers-en-Auge. Le 30 septembre 1718 unadditif au bail permet au sieur du Pissot de placer a ses frais un bane ou unebancelle de six pieds au carre, sous la chaire de l'eglise des Croisiers, avec droit desepulture pour lui, sa femme et ses enfants ; le preneur devra faire sonner les clochesa chaque inhumation avec grand'messe et fournir tous les ans, lui et ses successeurs,cinq livres de cire blanche pour le luminaire.Bientot maitre du Pissot se conduit en grand seigneur dans sa maison, l'embellissantde fac.on exageree ; il presente les notes aux proprietaires et oublie d'observerles formalites prescrites en 1718. Un proces s'engage devant le bailliage de Caen.Par sentence du 18 juillet 1732, les Croisiers obtiennent satisfaction d'un cote : lesieur du Pissot devra evacuer sa demeure a la saint Jean-Baptiste 1733 (24 juin) ;d'un autre, ils sont condamnes a rembourser a l'indelicat locataire 1.186 livres pourla plus-value et paj'er les frais de procedure, soit 1.383 livres 6 sols, le 20 decembre1732.Les loyers sont alors recherches en ville de Caen : les Croisiers qui esperaienttrouver preneur a 400 livres sont combles le 11 juillet 1733 avec le sieur Lamy,maitre-menuisier en la ville qui leur en propose 420. Dans la suite divers locatairesse partagent la maison, ainsi en 1748, Jacques Huard, maitre tourneur (90 livres),les demoiselles Pissot de la Couture (160 livres), Nicolas Lamy ,marchand menuisier(80 livres)... ; en 1756, Guillaume Fanet, tailleur d'habits, 80 livres plus une livrede cire pour luminaire ; Jacques Huart, 100 livres et une livre de cire blanche de laplus belle ou cinquante sols a la place a son choix ; Jacques Lelarge de la Vallee,chapelain fonde de Saint-Sauveur... uDepuis le 15 Janvier 1378, par bref du pape Gregoire XI (1370-1378), la maison de Caen prend le titre officiel de prieure ; ilaccorde sa protection sur les terres, dimes, pres, paturages, bois,possessions et autres biens que les religieux possedent en toutejustice et paix. Ce document nous surprend un peu quant a la dateet au lieu : Datum Avinione (Avignon)... Pontificates nostri annosecundo. Nous n'en possedons que des copies et il y a surementerreur de copiste, au sujet de l'annee : anno domini 1378.A 1'epoque l'annee commence a Paques : les ides de Janvier setrouvent en realite en 1379, le 15 Janvier, et Gregoire XI est decededepuis le 27 mars 1378, alors qu'etant venu d'Avignon a Rome ouil arrive le 17 Janvier 1377, il songe a retourner en Avignon et rendTame avant d'y parvenir. Avec sa mort commence le schisme d'Occidentet Telection de deux papes : Urbain VI et Clement VII. Memele 15 Janvier 1378, Gregoire XI est encore a Rome. Elu en 137011 Arch. Nat. LL 1481 ; Arch, du Calvados, D 588.


38 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENa la mort du bienheureux Urbain V, la seconde annee du pontificatde Gregoire XI se situe normalement en 1371-1372, et a Avignon ;il est normal que son decret soit posterieur de quelques annees acelui de l'eveque de Bayeux du 20 mai 1368. Au sujet de 1'erectiondu couvent de Caen en prieure nous tenons pour vraie la date du15 Janvier 1372, annee de la mise en chantier de la nouvelleeglise12.4 Prieur connu : JEAN LE CARPENTIER, 1404.Le prieure connait une certaine prosperite : plus de seize religieuxen 1404, dont les noms se trouvent au bas d'une donation. Ce sont;Jean Le Carpentier, prieur, 1404.Jean Artur, sous-prieur, 1404, 1407, mentionne comme simplereligieux en 1438.Pierre Jourdain, 1404, 1407.Jean Lucas, 1404, 1412, 1438, prieur de Saint-Ursin en 1431.Gilles Le Piquet, 1404.Jean Vaguel, 1404.Thomas Foucquier, 1404.Jean Yon, 1404, 1407.Guillaume Isabel, 1404.Richard Bourget, 1404.Pierre Liard, 1404, tous pretres.Simon Danot ou Davot, 1404, futur prieur, 1438, 1440, 1456.Nicolle de Camilly, 1404.Gilles Fleuret, 1404.Thomas Le Marchand, 1404, tous profes et autres freres.Cette donation est celle d'une maison, rue Gemare, paroisseSaint-Pierre, pres de celle des religieux, le 15 septembre 1404, parmessire Guillaume Ernault, pretre, cure de Tune des portions deTeglise de Baron. II a acquis cette maison le 16 juin precedent. IIaumone de meme, meu de devotion, une rente de 40 sols que lui faitPierre des Aunoys, d'Evrecy, sur une maison du meme lieu. Lesreligieux sont tenus de dire tous les dimanches de fan une messea notte de Notre-Dame a Vheure qu'ils ont acoutume dire unepremiere messe du matin13.13 Beziers donne 1373 ; de Beaurepaire, 1375 ; Huet, 1378.13 Arch. Nat. LL 1480, p. 43-44 ; Arch, du Calvados, D 582.


SOUS LA GUERRE DES CENT ANS 39Depuis le debut du siecle les dons continuent de pleuvoir :Des terres a Courseulles et Bernieres, prises en fieffe devant tabellions a Caen le11 mai 1402 par Garin Le Francois, moyennant 24 boisseaux de froment, mesureancienne de Caen a la Saint-Michel, deux chapons et un denier a Noel. Dans lesbaux posterieures les 24 boisseaux mesure ancienne sont ramenes a 20 boisseaux mesureactuelle de Caen : le volume reste le meme. A la suite d'une condamnation enbailliage de Caen en date du 30 juillet 1770, les detenteurs doivent payer cetterente dans les proportions suivantes : Massieu de Clerval, trois boisseaux un tiers etun chapon ; les heritiers Lepage, cinq boisseaux cinq neuviemes ; le sieur Dulongpre",deux boisseaux sept neuviemes ; la veuve et les heritiers Pasquier, trois boisseauxun tiers ; la veuve et les he"ritiers Postel, cinq boisseaux, un denier et un chapon. Larente a ete transferee a une veuve Simonin apres la Revolution14.Le 17 Janvier 1401, Guillaume Le Grand, ecuyer, d'Anisy, a vendu a Thomassedeguerpie (veuve) de Simon Jourdain, de Saint-Sauveur, une maison rue des FreresMineurs, moyennant 32 livres et 5 sols de vin. La veuve Jourdain donne cette maisonaux religieux le 30 aout 1403, ainsi que des heritages et rentes paroisses de I'Epine etSaint-Clair d'Herouville pour etre participante et associee aux prieres et oraisonsd'iceux religieux et de tout I'Ordre des freres de Sainte-Croix. Le 31 Janvier 1405,Richard Le Moyne, son heritier d'Herouville, promet de donner aux religieux 10 solsde rente a la Saint-Michel, deux gelines et vingt oeufs a Paques. Alors que Caen nesemble pas effectivement occupe, un acte du 29 juillet 1406 nous apprend que lamaison de la rue des Freres Mineurs est occupee par Robert Bourguelif, un Englois,a qui on permet de rester trois ans encore moyennant dix livres au total, alors qu'illa loue jusqu'a present quatre livres par an. Aprds lui, le frangais Roger de la Landene loue pas a moins de huit livres, un chapon et quinze oeufs (21 aout 1410) ; etmessire Robert de Larchant, vicaire a Castilly, six livres (7 novembre 1456) M.Les religieux vivent dans la plus grande pauvrete et leur eglisen'est certainement pas encore terminee ; jamais rien, en dehors ducouvent des Beguines, ne leur a ete donne en recompense des materiauxde leur ancien prieure employes pour la construction desremparts de la ville. Aussi le roi de France Charles VI (1380-1422)est-il sensible a l'humble supplication du prieur et des religieux etordonne a la ville le 10 aout 1404 de verser une indemnite de 200livres, prise sur les aides. La ville est sans doute trop pauvre : lesCroisiers n'obtiennent rien. A la suite d'une nouvelle supplicationdes religieux, le meme bon roi ordonne le 30 Janvier 1414/1415 d'ymettre bon ordre sans delai. Deux mois plus tard, le 5 avril 1415,c'est chose faite par Gilles de l'Epee, vicomte de Caen, a la suitede la reunion des bourgeois de la ville. II en est temps, car la guerrereprend avec plus d'acharnement16.14 Arch, du Calvados, D 619.36 Arch. Nat. LL 1480, p. 48-49 et 60-61 ; Arch, du Calvados, D 582.19 Voir piece justificative VII; Parchemins originaux ties abimes aux arch, duCalvados, D 582.


40 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAEN5me Prieur connu : GUILLAUME LE CHARPENTIER, 1407.L'analogie de nom pourrait faire croire qu'il est le frere du precedent. II est connu a Toccasion d'un acte sur la maison de la rue desFreres Mineurs : manoir a trois combles. Deux noms nouveaux apparaissentparmi les religieux : ]ean Augier et Robin1 de Canville.A ete probablement religieux de Caen, dans les annees precedentes,freres Nicole Trenquart: le 6 avril 1407, Jean Patrice, de la paroisseSaint-Pierre, lui vend 50 livres tournois et 20 sols de vin une maisonde la rue Gemare, pour lui et ses successeurs au couvent de Saint-Ursin au Maine. De fait avec une certaine alteration de nom, unNicole Touchard est prieur de Saint-Ursin en 1410 17.Les pieces des environs de 1410 nous font connaitre quelquesbaux :le 24 novembre 1407 par Thomas Regnault, des terres a Periers, pour quatre boisseauxde froment, mesure de Caen, a la Saint-Michel, une geline a Noel et dix oeufsa Paques ; le 12 decembre 1408, par Colin Perrotte, de Bretteville-l'Orgueilleuse, unemaison et ses appartenances a Brettevilie, pres de la grange de 1'abbe" de Caen (saint-Etienne), trois boisseaux de froment; le 28 Janvier 1409, par Simon Le Febure, dePeriers, diverses terres a Periers et Mathieu, huit boisseaux de froment; le 7 novembresuivant, noble homme Philippe de Mainville verse une rente de vingt sols ; en 1413,le prieure represente par frere Jean Lucas est en proces avec Guillaume et JeanLefebvre, bourgeois de Caen, au sujet de quatre acres de terre a Secqueville.Le 21 mars 1416, noble homme Jean Le Herichy, sieur de Preaux, mu de devotion, donne et aumone quatre boisseaux de froment, mesure ancienne de Caen, qu'ilprend sur diverses terres d'Alain du Four a Camilly, et ce en augmentation d'un obitfonde j ad is par defunt Guerin Le Herichy.Arrive le 4 septembre 1417, journee d'horreur et d'epouvantepour la ville de Caen, ou comme le rappelle un titre des Croisiers:la piteuse, cruelle et inhumaine prinse d1 assault Micelle nostre villede Caen qui fust faicte jd piegd par n\os anemis et adversseres lesAngloys. Roger de la Lande, le locataire de la maison rue des Freres-Mineurs, est tue au cours de l'assaut; ses heritiers restent fideles auRoi de France et sont expulses de la maison requisitionnee parTennemi: apres la prise un Anglois se bouta, par voie de fait ouautrement en ladite maison, et tant fait que les prieur et freres, quipour lors etoient en petit et insuffisant nombre, a I*occasion deladite prise, lui baillerent lesdits heritages pour la crainte et fureurde lui et de ses allies, qui etoient pour lors fort d redouter, moyen-11 Arch. Nat. LL, 1480, p. 33-34.


SOUS LA GUERRE DES CENT ANS 41nant quatre livres de rente settlement apres les trots premieresannees.La maison en question est louee le 17 fevrier 1426 a RobertByourgh, ecuyer, Anglais, qui ne se contente pas d'un si petit masnage;la veille il a fait bail avec Guillaume de Loraille, bourgeoisde la paroisse Saint-Pierre, d'un autre masnage avec jardin et appartenances,en la rue de Franque-Rue, nomme le Four Cambye, presdes heritages de messire Renoul, pretre et de Colin YAnglois. Petita petit l'ecuyer anglais s'approprie les maisons et les transmet a sesinfants dont le nom s'est francise, Laurent et Roger Abourg. Le15 octobre 1448, ils vendent 30 livres tournois et 10 sols de vin lamaison du Four Cambye a Jean Bertin, cure de Saint-Julien d'Urville,au diocese de Coutances, demeurant a Saint-Sauveur ; le 12juin 1450, c'est au tour de la maison rue des Freres-Mineurs, aGuillaume Le Roy, bourgeois et feron de Saint-Pierre. II est sansdoute temps de se debarasser de tous ces biens car les Anglais vontbientot deguerpir de la bonne ville de Caen. Avec leur fuite lesheritiers de l'infortune Roger de la Lande reviennent dans leurancien logis, et en 1452 sur mandement de Charles VII au baillide Caen a la suite d'une supplication du prieur et freres de Sainte-Croix, ces derniers peuvent rentrer en propriete de la maison de larue des Freres-Mineurs18.Avec Inoccupation anglaise, le massacre de bon nombre de Caennaisou leur fuite, les donations se rarefient en faveur des Croisiers.Le Pape Martin V (1417-1431), pontife legitime de Rome, les encourage par l'obtention d'indulgences : Par Martin, pape, lit-on dansle cartulaire, sont donnes huict cent jours de pardon aux festes de^Invention et Exaltation de la Saincte-Croix, aux feste de ]our lesSaincts Apostres et Evangelistes, a la Toussainct, aux feste de sainctDenis, sainct Laurens, sainct Nicolas, sainct Thibault, St Martin,St Louis, St Augustin et le jour de la Dedicace d'icelle Eglise deSaincte-Croix de Caen et mesme aux octaves d'icelles festes, a tousceux et celles qui donneront de leurs biens a icelle Eglise, 1421 19.Cest en fait le silence jusqu'au 10 novembre 1426. Jean Benard,18 Arch, du Calvados, D 369.19 Arch. Nat. LL, 1480, p. 22-23. Le cartulaire donne la date de 1321, erreur ducopiste sans doute, car aucun pape ne se nomme Martin au XIVe siecle, et le seul


42 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENecuyer, seigneur de Poussy, donne et aumone aux vicaires et chapelains servant Dieu en Teglise collegiale du Saint-Sepulchre de Caen,15 livres tournois de rente, moitie a Noel, moitie a la Saint-Jean,avec charge de chanter et celebrer chaque semaine en Feglise desfreres de Sainte-Croix trois messes : une de Requiem le mercredi,une de la Croix le vendredi et Tautre de Notre-Dame le samedi,et apporteront pain et vin iceux chapelains pour celebrer icellesmesses et diront icelles messes apres que tout le service du matinaura ete dit audit Saint-Sepulchre, sans empeschement d'iceluy, etapres chacune desdites messes diront de Profundis et Fidelium.Acte conclu en presence de Michel Riquet, Jean des Erables, JeanJean, Pierre Farcy, messire Maurice de la Londe et Thomas Le Due,chapelains au Saint-Sepulchre. Le jour ou les chapelains serontdefaillants, les quinze livres de rente iront aux religieux tenus decelebrer eux-memes les trois messes hebdomadaires. Une clauseindique que si les chapelains faillissent seulement deux ou troisjours dans la celebration de ces messes, ils perdront definitivementla rente ; il en serait de meme pour les Croisiers, et alors la renteirait obligatoirement alimenter le tresor de Teglise Saint-Pierre.Le meme jour, Jean Benard donne aux religieux trois chasubles,trois aubes et neuf doubliers pour dire icelles messes. Pour leurentretien, l'honoraire du novice charge d'aider les chapelains etrepondre ces messes, une rente de 15 sols est accordee a Sainte-Croix20.6me Prieur connu . RICHARD ANQUETIL, 1431.Un nom normand que Ton rencontre aussi chez un prieur del'Hotel-Dieu de Caen a peu pres a la meme epoque : Simon Anquetil,1449, 1462. Richard Anquetil se fait connaitre dans un acte du15 novembre 1431, ou Massieu Hagot et Jeanne sa femme, de laparoisse Saint-Martin, abandonnent tous leurs biens meubles etheritages, afin que iceix religieux leur soyent tenus querir toutesleurs necessites du boire, manger, vestir, chausser, lict, feu et hostelet autre chose convenable durant leur vie et apres leur decez lesmettre en sepulture humaine en leur dicte eglise et disent le service20 Arch. Nat. LL 1480, p. 86-87.


SOUS LA GUERRE DES CENT ANS 4^divin. Les deux epoux laissent une rente de deux septiers de fromenta prendre sur Raoul Godeheust21.Le prieure est occupe par :Richard ANQUETIL, prieur, 1431. Van de Pasch 22 indique en1453 la mort d'un certain Rychardus, prior a Caen. II est possibleque ce soit le meme.Richard Maresq, sous-prieur, 1431 ; simple religieux, 1438 ; puisselon Van de Pasch, de nouveau sous-prieur en vue de reformer ladiscipline conventuelle en 1461 et envoye en 1470 au couvent deBuzangais dans le meme but, que nous retrouvons simple conventuela Caen en 1477.Jean Monel, 1431, 1438.Thomas du Mesnil, 1431, 1438 ; sous-prieur, 1454, 1455 et 1456.Jean Hellouin, 1431, 1454 ; futur prieur a partir de 1473.Michel Marot, 1431. II est le contemporain de Jean Marot, poete,ne a Mathieu, pere de l'illustre Clement Marot.Van de Pasch mentionne la presence a Caen en 1430 de Pierredes Vallees et de Pierre Borchus, et en 1434 la mort de ArnoldBruen.Le 26 mai 1433 Colin Ogier, de Saint-Aubin d'Arquenay, venda Guillaume Rouxel, estamier, bourgeois a Caen, une acre au terroirde Saint-Aubin, delle du Caillou, butant sur le terroir de Benouville,des fiefs de madame TAbbesse de la Trinite, au prix de 40sols tournois et un pot de vin. La terre vient dans les mains desCroisiers a une epoque indeterminee, est fieffee quatre boisseauxde froment le 11 mars 1438 ; reconnaissance en est faite en 1649;sur le bail de 1742 est ajoute un chapon gras. Transferee a TUniversite,la rente est declaree irrecouvrable en 1818 par jugement dutribunal de Caen23.7me Prieur connu . SIMON DAVOT, 1438, 1440, 1456.Selon les actes, le nom varie parfois en Davoult et meme Danjou,le prenom restant toujours le meme. Ancien religieux du couvent,21 Arch. Nat. LL 1480, p. 65-66 ; Arch, du Calvados, D 582.22 A. v. d. Pasch, o.s.c, De Definities van de Generate Kapittels, manuscrit.23 Arch, du Calvados, D 623.


44 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENson priorat se divise au moins en deux periodes triennales, Tunesous l'occupation anglaise, l'autre apres la liberation. Sous sonpremier regne les limites interieures de son prieure s'augmententconsiderablement.Son voisin immediat est un bourgeois de la ville, Pierre Edouard,proprietaire d'un grand jardin entre la rue Gemare, Teglise desCroisiers et l'Odon. Depuis le 21 octobre 1430, par contrat passeavec Marie, abbesse, et les dames de la Trinite, il le tient en fieffemoyennant huit livres en deux fois aux termes de Noel et de laSaint-Jean et un chapel (chapeau) de roses vermeilles rendu le jourde la feste de la Trinite en laditte abbaye a la grande messe. Le 26juillet 1438, Pierre Edouard donne son jardin aux religieux, n'enconservant sa vie durante qu'une portion pres de la fontaine deGemare : desormais les Croisiers feront hommage a l'abbesse, verseronthuit livres de rente et presenteront le chapeau de roses aujour de la Trinite. En meme temps, Pierre Edouard donne une maisona Saint-Sauveur, jadis propriete de Guillaume de Bion, en larue qui passe sous les Halles, pres de l'hotel Georges de Deauville.Le bon voisin aura droit a deux messes par semaine, Tune de Notre-Dame le mercredi, l'autre du Saint-Esprit le vendredi, et tous lesjours seront recites devant l'image de la Vierge, Inviolata et oraisonapres Vepres, Salve Regina apres Complies. A leur tour, GuillaumeLefebvre et Guillemine sa femme, heritiere en partie de PierreEdouard, offrent le 8 Janvier 1453 une maison, cour et jardin surSaint-Sauveur et 30 sols de rente sur des heritages a Villers-Bocage*\Ainsi les Croisiers peuvent respirer plus a raise et etendre leurmonastere plus vers Test, en reculant le chceur de leur eglise et batirde nouveaux batiments claustraux le long des rives de TOdon. Dejale 2 mars 1438 Eustache Canivet, lieutenant general de M. leBailly de Caen, accorde un permis de construire pour fonder etedifier une maison, dortoir, amenagement et augmentation de leureglise. Sous la conduite de Jean Ranulphe, vicomte de Caen, MichelLeveque, procureur du roi, Ansel Paisant, Jean Heursant, Robin LeSeigneur et autres ouvriers du metier de maqon visitent le futur* Arch. Nat. LL 1480, p. 37-41 ; Arch, du Calvados, D 615.


SOUS LA GUERRE DES CENT ANS 45chantier ; des piliers sont necessaires pour soutenir l'ouvrage toutau long du cours de l'Odon25.De nouvelles donations et fondations vont permettre de continuerles travaux : le 21 decembre 1439, Cardine, veuve de Colin Menard,donne 10 sols de rente sur Jean Marque, de Neuilly-le-Malherbe ;le 10 octobre 1440, Guillaume Nicolle, de la paroisse Saint-Jean,donne une maison et ses appartenances, rue Gemare, a charge dedeux obits annuels, Tun vigille et messe le lendemain de la Tiphagne(Epiphanie), l'autre le lendemain de la Madeleine (23 juillet) ; le28 avril 1444, Jean Radulphe, vicomte de Caen, aumone son grandjardin qui donne sur la Froide-Rue, pres de celui des Croisiers et ducours de l'Odon ; son fils Pierre, ecuyer, confirme le don du vicomtele 18 juillet 1450. Et d'ici cette date, annee de la liberation, lesilence plane sur le couvent occupe par quelques nouveaux religieux:Guillaume Vincent, sous-prieur, 1438.Raoul du Bois, 1438.Pierre Laudrin, 1438, sans doute le Petrus, conventuel de Caensignale par Van de Pasch comme envoye a Liege en 1445 et aSchwarzenbroich 26 en 1446.Nicole Le Beuf, 1438, sans doute le Nycolaus de Caen envoye aTournai en 1451 a cause de son insubordination et pour reapprendrela discipline, tout comme le Petrus precedent et le Bertrandus deplus loin.Germain du Bosq, 1438.Jean Hubert, 1438.Guillaume Vimont, 1440.Jean Courteheuse, 1438, 1454, decede en 1462.Lucas Marescot, 1438, 1454, 1455, envoye a Saint-Georges enBretagne en 1461 et a Saint-Ursin en 1462.Bertrand que Van de Pasch signale comme envoye pour sa sanctificationa Aix-la-Chapelle en 1445, l'annee suivante a Cologne eten 1447 au couvent de Paris.Michel Heurtin, futur prieur, mis a la disposition du prieur deParis en 1445.25 Arch. Nat. LL 1480, p. 35.28 Pr£s de Aix-la-Chapelle.


46 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENEn 1445 le prieur de Caen visite tous les couvents de France encompagnie du prieur de Paris. Est-ce toujours Simon Davot ?8me Pfieur connu . GUILLAUME BRIQUET, 1449.Le prieure de Caen compte dix-huit religieux. Jamais pareil chiffren'a du etre atteint dans la suite. Tous ne sont pas des saints.HABIT RELIGIEUXDES CROISIERSd'apres une miniature du I6me sikcle(Graduate de Joannes van Deventer, croisier ; conserve" au couvent de Saint-Agathe,Cuyk, Pays-Bas)


FOYER UNIVERSITAIRE 47IV. - RETOUR A LA DISCIPLINEET FOYER UNIVERSITAIRE (1450-1529)Sur le plan moral le prieure de Caen a beaucoup souffert de laguerre de Cent Ans ; les religieux tres nombreux n'arrivent pas ase soumettre a la discipline : ce sera la maladie predominante aussibien aux XVIIm* et XVIIIme siecles. Le couvent sera pour ainsi direcolonise par des freres venus des jeunes fondations hollandaises :bon nombre de religieux locaux sont transfer es en d'autres prieur es,bon nombre de freres de Texterieur viennent terminer leurs etudesa TUniversite toute proche, a l'ombre du clocher de Saint-Sauveur,fondee en Janvier 1432 par Henri VI par la grace de Dieu, roy deFrance et d'Angleterre, confirmee en 1437 par une bulle du papeEugene IV, puis en 1450 et 1452 par le roi de France Charles VII.Au milieu du XVme siecle, les religieux s'adonnent a la predication : tout en se qualifiant eux-memes de Chanoines de Sainte-Croix,le titre d'une ancienne fondation de 1451 les mentionne sous lenom de Freres oratems de Sainte-Croix.9me Prieur connu : MICHEL HEURTIN, 1454.Van de Pasch signale en 1450 la mort d'un certain Anoti, religieux du couvent; l'envoi de Bree a Paris en vue de son instructionen 1451 ; la mort en 1453 de Johannes: Jean Monel ou Jean Hubert ? L'envoi de Richard de Marck au couvent de Tournai ou ilreside en 1454, 1455 et 1456 : est-ce le meme Richardus nommedans une assez haute fonction, rector au prieure de Condren-Saint-Eloi, dans l'Aisne, en compagnie d'un autre frere choisi par leprieur de Caen ?En 1454, en dehors de Michel Heurtin, prieur ; Thomas duMesnil, sous-prieur ; Lucas Marescot, Jean Hellouin et Jean Courteheuse,apparaissent les noms de :Jean Derce, 1454.Jean Caron, 1454, decede en 1463.


48 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENJean Binet, 1454, 1455, envoye en 1457 au couvent de Namurpour cause de discipline et mis a la disposition du prieur general,decede en 1461.Pierre Herault, 1454.Jean Beaudoin, 1454, decede en 1462.Gilles Julien, diacre en 1454, pretre, 1473, procureur, 1477, 1479.Jean Pesnel, 1455.Le 31 juillet 1454, Jean dit Balard, de Saint-Pierre, prend a fieffeune maison de la rue Gemare, pres de la fontaine, a charge d'enfaire une taverne de la valeur de trente livres au moins; a l'exceptiondes petits-enfants, seuls les enfants Balard qui naitront en loyalmanage seulement pourront y demeurer \10me Prieur connu : BERTRAND HEREDIS, 1454, 1455.Le lr octobre 1454, Fr. Bertrandus Heredis, prior conventusCrucigerorum de Cadamo est Tun des jures qui elisent le recteurde l'Universite ; trois ans plus tard est egalement jure Jehan LeBouvier, du couvent de Saint-Ursin2.Le 16 avril 1455, Pierre Turquetin, natif de Rouen, et Jeanne safemme, font le don d'une masure, paroisse Saint-Julien, pres de larue Calibourg et la Porte Villaine.11 Prieur : Frere BERTOT, 1456.Connu seulement par la prise a fieffe d'une maison par maitreRobert de Lardiamp, vicquaire de Saint-Julien. Cest aussi l'anneed'un mandat de frere Simon Davot.Le 20 juillet 1458, venerable personne maitre Thomas Fortin,cure de Sainte-Opportune et scribe de l'Universite, aumone auxreligieux une rente de douze sols et d'un cent de pimperneaux*verts a prendre sur Guillaume Mauger, de Danneville-en-Auge,ainsi qu'une maison, cour et jardin a Saint-Sauveur, pres des hotelsde Male Le Patouf, Simon Guesdon et du chapitre d'Avranches,1 Arch. Nat. LL 1480, p. 46-47 ; Arch, du Calvados, D 582.2 Arch, du Calvados, D 89.3 Arch. Nat. LL 1480, p. 59, 84 et 85. Pimpernaux: Selon le Dictionnaire del'Ancienne Langue franchise de Godefroy : petit poisson agile, en principe desanguilles.


FOYER UNIVERSITAIRE 49maison acquise quarante saluts d'or et quarante sols de vin surRaoul Dacre, qui avoit tenu le parti des Englois et qu'il estottfugitif, quarante sols de rente allant pour cela au Roi.Le 21me general de l'Ordre, Georges de Bruges (1452-1458),s'occupe activement a reprimer l'intemperance de ses religieux etsouffre particulierement de la reforme du couvent de Toulouse.Homme sobre, il compare familierement le religieux intemperanta une lanterne crasseuse, fumant, mais n'eclairant pas. Cest sansdoute le cas pour Caen ou il deplace quelques religieux vers lesfondations beiges ; cela ne suffit pas, car il est oblige de depecherde toute urgence a Caen en 1457 le prieur d'Aix-la-Chapelle : leresultat, les Croisiers hollandais viennent reapprendre la disciplinea leurs freres caennais.12me Prieur : JEAN DE GRAVE, 1460-1461.Jean de Grave est un hollandais de la ville de Grave, en 1452prieur a Aix-la-Chapelle; rien n'est impossible que ce soit lui quisoit venu a Caen en 1457. Alors qu'il se trouve au couvent deNamur, il est envoye en 1460 a celui de Caen en qualite de prieur :il n'y reste pas longtemps car la mort le surprend en 1461. II estaccompagne de :Henri de Wesalie, du couvent de Marienfrede, sous-prieur ; envoye a Rome a l'occasion du Jubile de 1475, alors qu'il est prieurde Liege. Le lr octobre 1464 a l'election du recteur de l'Universite,parmi les jures Ton rencontre Ricardus de Wesalia, de Tordre deSainte-Croix ; simple erreur de prenom peut-etre.Jean Unkel, en provenance du couvent de Hohenbusch, toujourspresent en 1461.Leonard de Erkelenz, du meme couvent, toujours a Caen en 1462.Jean Alain, conventuel de Paris.D autres arrivent en 1461 :Roland, du couvent de Tournai, encore a Caen en 1470.Jean Susteren, du couvent de Roermond, jusqu'en 1465.Arnold, du couvent de Marienfrede, jusqu'en 1469.En 1464 : Henri de Windenborch, du couvent de Dusseldorf, present en 1465.Herman Hellinck, frere donne de Cologne, present en 1465,tandis que Jean Marin, conventuel de Caen trop indiscipline est


50 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENenvoye en penitence a Asperen, puis en 1465 dans un couventanglais, en 1467 a Namur, en 1469 a Cologne; devenu bon religieuxil est envoye en 1470 au couvent de Buzangais pour y maintenirla discipline.Jean Rosel, autre indiscipline de Caen est envoye a Falkenhagen.En 1466 arrive de Tournay, Raynald ; 1'annee suivante, NicolasJonin, de Caen est envoye a Paris. En 1469, Caen s'enrichit deRichard du couvent de Namur, present l'annee suivante, et en 1470de Jean, frere donne de Liege.Au bout de dix annees de regime disciplinaire les Croisiers deCaen peuvent a leur tour donner le bon exemple en d'autres fondations; c'est ainsi qu'en 1470, Jean Pennel et Jean Amelin peuventse rendre a Varennes-sur-Allier, et Robert Peregrini a Buzangais encompagnie de Richard Maresq et Jean Marin4.Le chapitre general de 1464, tenu a Huy, demande aux prieursde Saint-Ursin, Saint-Georges prope Trediar, Varennes, Buzangaisde se rendre tous les ans a Huy, et s'ils ne le peuvent, deleguer aleur place le prieur de Caen, qui au nom de ces prieurs fera connaitrel'etat spirituel et materiel de ces couvents au chapitre generalet donnera la contribution annuelle en argent en leur nom. Cetteordonnance tend a prouver que Caen est la Maison-Mere des quatreprieures precedents comme d'ailleurs les frequents deplacements dereligieux a l'interieur de ces cinq maisons. Cette meme annee leprieur de Caen regoit ordre de visiter le prieur e Saint-Georges. Lechapitre general de 1466 nous apprend que les couvents de Caenet de Paris devront donner chaque annee au visiteur quatre courontiesfranchises (quatuor coronas Franciae) 5.Le 26 avril 1462, noble Jean Notan, avocat du roi, pour etreassocie aux prieres et oraisons des Croisiers donne une maison aucoin de YEpinette, pres des rues de Gemare et Franque-Rue. Le21 juin 1463, messire Raoul Regnault, cure de Amaye-sur-Orne,donne douze boisseaux de froment de rente, mesure d'Evrecy, sur4 Van de Pasch, manuscrit; Hermans, I, p. 138 ; II, p. 378-384. Arch, duCalvados, D 89. Hermans signale un Jean de Grave prieur de Namur en 1475 (II,380). Les necrologes des couvents de Bois-le-Duc et Uden, en Hollande, mentionnenta la date du 11 mai : Obiit Fr. Johannes Graviae... XV annis supprioris junctusofficio (Hermans, II, 338). Est-ce le prieur de Caen ?5 Van de Pasch, manuscrit; Hermans, II, p. 317.


FOYER UNIVERSITAIRE 53Jean Le Moyne, de Trouville, pour biens a Mondeville, et six boisseauxet un chapon sur Guillaume Melitte dans la meme commune.De meme, douze boisseaux de froment a Mondeville par RegnaultRuault, ecuyer, le 8 aout 1464. Maitre Robert Ruault, ecuyer, seigneur de Talvende, avait aumone en 1422 douze boisseaux mesurede Caen, sur Raoul Benard, de Mondeville, pour une messe le lundide chaque semaine: ses heritiers augmentent cette messe de troisboisseaux de froment, un chapon et un denier le 19 juillet 1466.13 Prieur : JEAN HELLOUIN, 1473, 1477, 1480.La maison est reprise en mains par un conventuel de Caen, JeanHellouin, deja religieux en 1431, et le sous-prieur, Philippe Menard,1473, 1477, 1500, 1513, simple conventuel en 1514.De 1480 a 1500 aucun nom de prieur ne nous est parvenu : desreligieux qui suivent il est difficile de savoir quels sont ceux quiont vecu sous le priorat de Jean Hellouin. A l'election du recteurde 1'Universite le lr octobre 1470 se trouve Jean Roussel, de lareligion Sainte-Croix.Jean Mouvin, conventuel de Caen, 1477, 1479, 1514.Nicolas Roussel, 1477, futur prieur.Philippe Persillet, envoye au couvent de Paris en 1476, a Caende 1500 a 1514.Pierre Vassal, etudiant a 1'Universite avec Nicolas Roussel en1477, envoye au couvent d'Asperen en i486.Guillaume Mongus, envoye a Varennes, 1477.Guillaume Momer, envoye au meme couvent, 1479.Thomas, parti pour Buzangais, 1482 ; il s'y trouve encore en 1485.Guillaume Barbot, etudiant a 1'Universite, 1488.Au cours de l'annee scolaire 1489-1490, neuf freres de Sainte-Croixde Caen sont inscrits a 1'Universite :Michel Roussel,Martin Manchon, conventuel en 1500,Jacques Hericy,Guillerme Le Maitre,Jehan Le Bouvier, prieur de Saint-Ursin en 1503, 1504,Richard Huet, religieux que Ton rencontre a Caen jusqu'en 1514,Jacques du Housme,


54 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENGuillaume Onfroy, conventuel en 1500, prieur de Saint-Ursin de1504 a 1510, futur prieur de Caen,Robert Bernard.Bon nombre de ces religieux ont du terminer leurs jours en d'autresprieures ; en effet, en 1491 le chapitre general de l'Ordre permetau prieur de Caen de deplacer a sa guise les religieux vers lesautres couvents de France, tout en conservant obeissance a Caen.Le lr octobre 1490, est present a l'election du recteur de l'Universite,frere Adam de Tournai, du couvent de Tournai; il est prieurde Saint-Georges en 1504. Frequente TUniversite en 1494, JacquesGronet, mentionne diacre en 1500 et 1513, pretre en 1540 en 1541.Cette floraison d'etudiants Croisiers n'est pas anormale, le generalde TOrdre, Nicolas Harlem (1473-1482) en envoie egalement beaucoupaux Universites de Louvain, Paris et Toulouse6.Le 19 avril 1472, maitre Eustache Patrice, ecuyer, sieur de Basly, donne unerentede six boisseaux de froment sur deux acres et demi de terre a Basly, a conditionque les religieux disent tous les jours de Tan apres l'antienne d'Inviolata et l'oraisonConcede nos, et qui se dit apres Vespres, une oraison qui se commence Deus qu'tbeatae. Comme la rente ne rentre pas, dix vergees de terre en deux pieces a Baslysont adjugees aux Croisiers le 3 juillet 1498 et les six boisseaux transformed en unesomme de 11 livres aux plaids d'lstreham tenus par Robert de la Vigne, lieutenantgeneral de M. le Vicomte de Caen7.Le 21 aout 1472, noble homme Philippe de Manneville, seigneur d'Urville abandonne20 sols de rente qu'il prend comme he*ritier de Bertrand Campion, ecuyer dela paroisse Saint-Pierre. Le 24 septembre 1475, Guillaume Mourin, de Saint-Pierre,,moyennant une rente de dix livres sur ses heritages et biens meubles, impose auxCroisiers de chanter tous les dimanches une messe de Notre-Dame sur les sept heuresdu matin tandis que brulent deux cierges, et ensuite face a l'image de la Viergechanter le Libera, de Profundis et oraison Fidelium.Le 7 mars 1471, Jean de Sainte-Marie, pretre, natif de Saint Andrieu de Breouze(Saint-Andre de Briouze, Orne), etudiant a. l'Universite, achete une maison ruede la Peusserie, sur la paroisse Saint-Sauveur ; en 1473, il la cede a Guillaume sonfrere, licencie en decret, seigneur et cure de Sainte-Marie-Outre-1'Eau ; apres la mortde ce dernier, de nouveau proprietaire, Jean de Sainte-Marie la donne aux Croisiersa charge de service religieux le 9 Janvier 1476, et des le 1T octobre il y a procesa cause d'une rente due au tresor de Saint-Sauveur. La maison, sise devant les portesdes grandes Halles de la ville, est louee 13 livres en 1563 a Georges de Fiervillexbarbier, et la rente ne semble plus reconnue apres 1742 8.Les pretres de Saint-Pierre possedent des maisons pres des Croisiers, et ces derniers pres de l'eglise Saint-Pierre desservie par ua6 Arch, du Calvados, D 89 ; Van de Pasch, manuscrit.7 Arch. Nat. LL 1480 ; Arch, du Calvados, D 582 ; Manuscrit in-fol. N° 142 dela ville de Caen, en depot aux archives de"partementales.8 Arch. Nat. LL. 1480 ; Arch, du Calvados, D 603.


FOYER UNIVERSITAIRE 55nombreux clerge : Jean Le Chandelier, Guillaume Pinsees, HenriMaunoury, Gilles Saales, Richard Canue, Michel Estenville et EtienneGastey ; deux maisons avec leurs rentes sont ainsi echangees le24 avril 1477. Accord egalement le 23 avril 1478 avec le cure deSaint-Sauveur qui regoit des Croisiers une maison pour en faire sonpresbytere, moyennant une rente fonciere de quatre livres. Cettemaison est acquise sous la Revolution par Jean-Baptiste Samson,fabricant de bas, et la rente eteinte le 5 brumaire, an VII (27 octobre1799), la Republique ayant reuni les qualites de crean\cier et dedebiteur9.Le 6 aout 1480, Guillaume Mouvin, pretre, sans doute frere duCroisier Jean Mouvin, donne une rente de six boisseaux de froment,mesure ancienne de Caen, a prendre sur Raoul Proussel et sa femme|de Baron. Pour participer aux prieres, Guillaume Sonnet aumonetrois vergees de terre a Colleville, en la Capelle de Hermanville.Malgre tout, les fondations sont assez rares en cette fin de sieclequi se termine le 20 mars 1497 par un echange de rentes entre lesfreres de Sainte-Croix et les religieux de l'Hotel-Dieu : Gilles, parla permission divine, prieur de VHotel-Dieu de Caen, Pierre de laMaire, Thomas de la Porte, Jean Philippe, Jean de la Fresnee,Guillaume Royer, Jean Petrait, Jean Bahu, Jean Battard... Sur les30 sols de rente de deux maisons sises paroisse Saint-Martin, 20iront a l'Hotel-Dieu qui abandonne 15 sols, 2 chapons et 30 ceufsde rente a prendre sur une maison des Croisiers10.Le 24 fevrier 1488 le prieure regoit la fondation pieuse de PierreDuval, natif de Rots, pretre en l'abbaye de Saint-Etienne: cinqboisseaux de froment de rente, mesure d'Arques, a prendre sur]ehennequin Gires, de Cairon, au hameau des Buissons, a charged'une messe chantee le jour de Saint-Andre, du Saint-Esprit de sonvivant, de Requiem apres sa mort. Des procedures sont engagees de1642 a 1656 contre Andre Marc, puis son fils Gilles, sieur deVillons. Les baux de 1661, 1667 et 1732 mentionnent quatre boisseaux et un chapon gras ; celui de 1742, six boisseaux de froment,deux chapons gras et quatre poulets bons et valables; celui de 1751,cinq boisseaux et quatre poulets.Une autre donation sur Cairon, hameau du Buron, dont les titres9 Arch, du Calvados, D 602.10 Arch. Nat. LL 1480 ; Arch, du Calvados, D 582.


56 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENprimitifs ont ete perdus, est connue par des actes de procedure auxXVIIm* et XVIIIme siecles : six boisseaux mesure ancienne de Caenet une poule a la Saint-Michel, rente reconnue pour la derniere foisdevant notaires a Caen le 9 Janvier 1743 par Jean-Frangois LeCourtois-Duquesney, tuteur de la fille mineure d'Arthur-AntoineLe Cerf et d'Anne Le Courtois11.l4me pdeur . NICOLE ROUSSEL, 1501-1513.Selon les documents on trouve quelques alterations dans ce nom :Roussel ou Prousset, et dans le prenom : Nicole ou Nicolas, maisdans tous les cas le prieur est qualifie : docteur en Theologie. NousTavons rencontre a 1'Universite en 1477. Le sous-prieur est toujoursPhilippe Menart. En raison de sa valeur le prieur Nicolaus Cadomensisest signale par Hermans12 definiteur au chapitre generaldans les annees 1502 et 1512.Le couvent reste un foyer universitaire ; frequentent par exemple1'Universite en 1503-1504 les freres Philippe Maingot, Andre Gaily,Nicolas Bertram, Andre Marie, Pierre Bacon, Barthelemy Crul,Thomas Roussel, autant de noms qu'on ne rencontre plus dans lasuite, sauf le dernier nomme present a Caen en 1514. Des etudiantslogent meme chez les Croisiers et font leurs etudes a 1'Universite,tels en 1503, Christophe Bacon, du diocese de Seez et Jean Perree,de celui de Bayeux.Au hasard des actes apparaissent quelques noms nouveaux deCroisiers caennais :Guillaume Tourlette, 1501.Gilles Julien, 1501, 1513, a moins que ce soit toujours le religieuxrencontre sous Michel Heurtin en 1454.Jean Genon, 1501, 1513, 1514.Richard et Thomas Vallee, de 1501 a 1514.Roger Faron, 1501, 1513.Le 13 fevrier 1501, honnete homme maitre Pierre des Hays, fils heritier de Richarddes Hays, en son vivant avocat pour le Roi a Caen, et Nicolas des Hays son frere,fondent pour le vendredi de chaque semaine une messe a diacre et sous-diacre, avecvigiles des Trepasses a trois lemons le jeudi precedent; les religieux versent unesomme de 80 livres pour obtenir une rente perpetuelle de six livres et regoivent 36sols de rente sur Jean Dauguet, de Saint-Contest, au lieu des 25 sols et six pigeons11 Arch, du Calvados, D 626.12 Hermans, I (2) p. 139 ; III, p. 13.


FOYER UNIVERSITAIRE 57que percevait precedemment son proprietaire pour un hostel, colombier et jardina Cambes, pres du fief de Moule* et le chemin du Roi; 59 sols sur d'autres heritagesa. Cambes et 15 sols sur une maison de la rue Pemagnie a. Caen.Le 30 avril 1502, Raolline femme de Jean Le Gron et celle de Pierre Le Tendre,de Saint-Contest, en execution du testament de leur mere aumonent deux boisseauxmesure ancienne de Caen a prendre sur une demie vergee de terre au Hamel duBuron, en Saint-Contest; les religieux sont tenus de cel6brer une messe basse chaqueannee au 18 novembre. La rente est reconnue le 2 novembre 1773 par Guillaume LeMounier, du Buron, et transferee aux hospices de Caen a la Revolution.Le 25 Janvier 1503, Jean Le Comte, de Saint-Sauveur, donne en perpetuelleaumone 100 sols de rente, dont 60 sur manoir, cour et jardin, et huit perches deterre, pres de 1'hotel du Maresq, et 40 sur Jean Durand pour maison, cour et jardina Verson; sera cele*bree chaque mercredi une messe du Saint-Esprit pour les donateurs,et a leur mort, Tun des religieux sera tenu d'aller dire une messe de Requiema chaque Quatre-Temps en l'e'glise de Verson.Le 18 septembre suivant par Francois Le Cesne et Noudine sa femme sont accordescinq boisseaux de rente sur Antoine Guesnard, de Tilly-la-Campagne, et trois surGuillaume Dorin, de Langrune-sur-Mer; les donateurs sont des I ourgeois de Caen.Le 15 mars 1504, pour fondation de messe tous les samedis en l'eglise de Froide-Rueleur vie durante, et ensuite en celle de Sainte-Croix, Joel Melitte et son epousePhilippine laissent une rente de 100 sols 6 deniers.Etienne du Val, seigneur de Most, bourgeois de Notre-Dame de Froide-Rue, demandeaux religieux de venir celebrer deux messes basses par semaine les mardi etsamedi a I'heure de huict heures en la chapelle dudit de Most avec le de Profundis,Libera et les oraisons a ce accoutumees. Le 9 octobre 1510 est aumonee une sommede dix livres un sol et six deniers a prendre sur une douzaine de paroissiens dePontenay-le-Pesnel, ainsi que six boisseaux de froment.Le 5 Janvier 1511, Jean Le Compte de Saint-Sauveur, moyennant cent sols d'aumoneperp£tuelle, fonde une messe du Saint-Esprit tous les mercredis, sauf auxQuatre-Temps oii elle sera de Requiem.A une certaine epoque les Croisiers ont regu en don plusieursmaisons de la Rue des Cordeliers: il en est fait mention en 1513;les titres primitifs ont ete perdus. A 1'origine elles rapportaient120 livres de rente fonciere racquitable (a prendre au domicile despreneurs) et payable aux quatre termes ordinaires de l'annee; en1614, il n'est plus question que de 104 livres et certains titres laissent entrevoir des fondations13.15me Prieur : GUILLAUME ONFROY, 1513-1519.Les seules archives du prieure de Caen nous donneraient uneassez pietre idee du prieur Guillaume Onfroy, ou il n'apparaitqu'une seule fois le 27 mai 1514, en compagnie de Thomas de18 Arch. Nat. LL 1480, p. 52-54, 57-59, 63-64, 100-102 ; Arch, du Calvados, D 582,604 et 627.


58 LE PRIFURE SAINTE-CROIX DE CAENGouda, Tun de ses successeurs et futur general de l'Ordre (1529-1537). Ce jour-la maitre David Le Pillois, licencie en decrets, curede Glanville, dans la region de Pont-1'Eveque et du Mesnil-Eudes,dans celle de Lisieux, donne aux Croisiers une maison a Saint-Sauveur, rue des Cordeliers, qu'il a acquise le 24 aout precedentsur messire Henri Manoury, chevalier, sieur du Mont de la Bigne.Les religieux s'engagent a celebrer chaque samedi une messe bassede Notre-Dame, et la premiere semaine du mois a tel jour qu il leurplaira une messe a notte de Requiem avec de Profundis et oraicrvr»c14sonsParmi les religieux, en dehors de noms mentionnes sous le prioratprecedent apparaissent:Jacques Goniet, sous-prieur, 1514.Andre Le Coq, 1514, 1540, prieur en 1541.Guillaume Onfroy est Tun des prieurs les plus celebres de Saint-Ursin, connu surtout par son fameux Quartenier si precieux pourThistoire des deux premiers siecles de ce monastere, qu'il signe le30 juin 1510, sixieme de son priorat: il fait partie de ces religieuxcopistes de chartes anciennes et qui nous les ont ainsi conservees;cent cinquante ans plus tard Caen aura aussi son copiste en lapersonne du prieur Francois Le Vavasseur, auteur du Cartulaire deCaen.L'un des successeurs de Guillaume Onfroy a Saint-Ursin a ecritces mots a la fin du Quartenier: Le Quartenier et Censif de cecouvent de St-Ursin fait par d'heureuse memoire frere GuillaumeONFROY, prieur en Van 1510. Ce livre est un tresor pour cettemaison. Ce R.P. est mort prieur de Caen en 1519, d'ou il etaitprofes, prieur de cette maison (de St-Ursin) depuis 1504 jusqu'en1510.Etudiant a l'Universite de Caen en 1489, il y obtient le grade delicencie en Theologie, et reste au prieure jusqu'a son depart a Saint-Ursin, qu'il quitte en 1510. II dirige Caen peut-etre depuis 1513,du moins en 1514. Dans un bail de Saint-Ursin de 1506, il sequalifie $humilis prior. Dans Tun et Tautre prieure il ne cherchepas a en augmenter le temporel. Le 3 mai 1507 il est present auchapitre general de l'Ordre, tenu apud Huyum (Huy) 15.14 Arch. Nat. LL 1480 ; Arch, du Calvados, D 582.15 Voir notre volume : Le prieur& de Saint-Ursin, p. 41-44.


FOYER UNIVERSITAIRE 59I6me Prieur: ETIENNE LE MONNIER, 1523, 1549.II faut noter chez lui deux epoques differentes de priorat; sansdoute est-il le successeur direct de Guillaume Onfroy, et son premiermandat pourrait se terminer vers 1528. II est mentionne commesimple religieux en 1540,* sous-prieur en 1546, de nouveau prieur


60 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENV. - THOMAS DE GOUDA, 17rae PRIEUR, GENERAL DEL'ORDRE, 1529-1537Encore un grand nom, comme Pierre Pinchart, qui nous seraitreste inconnu si nous en etions reste aux recherches dans les archivesfrangaises: ces dernieres le mentionnent General des Croisiers etpresent a Caen le 27 mai 1514, a Toccasion de la fondation demaitre David Le Pillois, cure de Glanville. En realite en 1514 leGeneral est Guillaume de Rive et le copiste du Cartulaire de Caena cru bon d'ajouter apres le nom de Thomas de Gouda, general deVOrdre de Sainte-Croix.Thomas de Gouda est originaire de HoUande: Gouda est uneville de ce pays. Conventualis Viridarii il doit done etre entre auprieure du Verger Sainte-Croix au diocese d'Angers, nouvellementfonde (1493) par le marechal de Gye. Conventuel, puis prieur decette maison, tandis qu'il en defend les droits et privileges d'uncceur brise, il encourt la haine du Roi de France. Son general lerappelle en 1518 au couvent Mariae Laudis, dit de Kolen, au diocese de Liege. D'abord conventuel, il est promu sous-prieur l'anneesuivante, et prieur en 1520 en la fete de Sainte-Emerentienne (23Janvier). II y reste jusqu'en 1529 \ Par cinq fois il est elu definiteurau chapitre general, cinq fois vicaire general et fait de nombreusesvisites en France, HoUande, Zelande, Brabant, Frise, Westphalie etAngleterre par des temps difficiles : l'heresie de Luther exerce dejasesravages.1 Void ce qu'on lit dans l'histoire de la fondation du couvent Mariae Laudis ouCoolen in Borgloon (Belgique) : ,,...Tertius decimus Prior hujus conventus unanimiomnium fratrum consensu, ex Suppriore tune existente hujus domus, canonice electusfuit Frater Thomas de Gouda, Hollandus natione, conventualis Viridarii (le Verger)in Francia, ubi multis annis antea Prior et provincialis fuerat, electus et confirmatus.in Priorem hujus conventus anno XVc vicesimo, in die Emerencianae virginis, XXilia die Januarii. Qui rexit novem annis et tribus mensibus... Fuit vir stenuus acrigorosus ad intentionem regularis disciplinae in conventu..." D'apres ce texte l'arriveea Caen pourrait se situer fin avril ou debut mai 1529. Hermans, Annales, III, p. 709.


THOMAS DE GOUDA 61Thomas de Gouda est nomme provincial de l'Ordre en Franceet en meme temps prieur du couvent de Caen dans les premiersmois de 1529 ; son historien affirme que cette nomination a lieu aucours de la derniere annee du generalat de Laurent Gladbach,decede le 3 octobre 15292. Done depuis peu a Caen, le 13 novembre1529, en la fete de saint Nicolas, eveque (6 decembre), il est eluprieur de la maison de Huy, et en meme temps Maitre general detout l'Ordre. Toutes choses mises en ordre au couvent de Caen, ilarrive a Huy ou les Freres le regoivent solennellement la veillede TEpiphanie 1530.Ce fut toujours un homme de grande sagacite, gravite et feru dediscipline ; ou comme ecrira frere Henri de Bree, sous-prieur a Huy,d'une tres grande prudence dans ses paroles, appliquant toute savolonte a l'observance tres stricte de la discipline ; lent a parler touten parlant peu, si ce n'est pour des choses utiles et necessaires ouen vue de la louange de Dieu.II demande qu'on prenne grand soin dans le choix des novices :il leur faut d'abord deux mois de probation avant de recevoir l'habit,et connaitre surtout les raisons qui les engagent a entrer dansl'Ordre; si e'est pour assurer le repos de leur corps, une securitematerielle pour le reste de leurs jours, l'amour de la grandeur oudes joies humaines, mieux vaut les ecarter ; si e'est pour l'expiationde leurs fautes, la maitrise de leur corps par une discipline austere,ils sont alors dignes de l'Ordre de Sainte-Croix. Cest Thomas deGouda qui demande que soit celebree solennellement dans toutFOrdre la fete de sainte Odile, vierge et martyre.L'une de ses grandes peines est la perte en 1534 des monasteresanglais, en raison du sdiisme d'Henri VIII: tous les freres sonttransferes en Belgique et distribues en divers couvents.2 Russelius, Chronicon Crucijerorum, p. 148 : ,,Anno deinde postremo GeneralatusGladbacchij pro decore (sic habet definitio) sacri nostri Ordinis, augmentoque regularisobservantiae absolutus a Prioratu Mariae laudis ordinatur Provincialis Franciae.Ubi in cenobio Cadomensi in Normannia, ejusdem domus iam Priori electo in FestoS. Nicolai Episcopi praesentatur electio 13 Novembris de se facta in Priorem Huensemet totius Ordinis generalem Magistrum. Itaque, dispositis rebus Conventus Cadomensis,venit Huum a Fratribus in vigilia Epiphaniae solemniter receptus. Fuit vir totius.sagacitatis, disciplinae et gravitatis..." Nous avons conserve la date du 13 novembre,alors que la fete de Saint Nicolas est le 6 de*cembre. Cf. Russelius, p. 147-155 ^Hermans, I (2), p. 13-19.


62 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENTrentieme general de TOrdre de Sainte-Croix, Thomas de Gouda,apres une vie bien remplie rend son ame a Dieu au cours d'unevisite au couvent de Liege: le 14 decembre 1537. Sa depouillemortelle, transportee par barque a Huy, y regut ensuite une sepulture tres honorable dans le choeur, face a la statue de son ami leCardinal Erard de Marck, prince-eveque de Liege.SAINTE ODILE, PATRONNE DES CROISIERSLes reliques de S. Odile, vierge et martyre, une des compagnes de S. Ursule ont eteretrouvees a Cologne en 1287 par Jean Novelan de Eppa, frere convers du couventde Paris. Transporters a la maison-mere de l'Ordre a Huy (Belgique) elles furentmises en 1292 dans une chasse ornee de peintures, chef-d'eeuvre d'un maitre anonymede Liege. Lors de la suppression de cette maison en 1796 un des croisiers amena lachasse avec les reliques et ceda ce tresor en 1828 a la paroisse de Kerniel (LimbourgBeige) ou elle est conservee depuis lors. Plusieurs documents du prieure de Caenmentionnent la sainte patronne des Croisiers.


AU XVIme ET XVIIme SIECLES 63VI. *- LE PRIEURE AUX XVIme ET XVIIme SIECLES (1530-1680)Desormais le Cartulaire du prieure va nous faire de plus en plusdefaut; a partir de 1602 le registre des Professions nous donnerale nom de tous les religieux jusqu'a l'extinction du couvent; lesdonations et fondations continuent regulierement; cependant l'absencefrequente de documents ne nous permet pas de nous faireune idee exacte de Sainte-Croix au cours de cette periode de centcinquante annees de vie conventuelle assez normale nous semble-t-il.Iff" Prieur : THOMAS BESSELOT, docteur en Theologie, 1540.La qualification de docteur en Theologie accolee au nom duprieur Thomas Besselot souligne sa valeur. Habitent avec lui leprieure:Jean Mourin, sous-prieur en 1540, conventuel en 1541.Jacques Grouet, 1540, 1541.Andre Le Coq, deja mentionne, successeur de Thomas Besselot.Etienne Le Monnier, prieur deja mentionne, de nouveau apresAndre Le Coq.Constantin Le Comte, 1540, 1541.Martin Lefebvre, 1540, 1541, procureur, 1546, 1549.Dans notre volume sur le prieure de Saint-Ursin, nous avonsmentionne Gervais Bouvier, prieur de 1480 a 1502 ; entre 1537 et1556 aucun nom ne nous est conserve. Les archives du prieure deCaen signalent que le 4 Janvier 1540 venerable frere Gervais LeBouvier (tres probablement autre personnage que celui de 1480-1502) prieur de Saint-Ursin et procureur des autres religieux, vendau couvent de Caen une rente de six boisseaux de froment, mesureancienne de Caen, versee jusqu'a present a Saint-Ursin suivant actedu 30 aout 1483, sur Jean Fenisse, de Luc-sur-Mer \1 Arch. Nat. LL 1480, p. 65 ; Arch, du Calvados, D 582.


64 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENLe provincial de France, frere Bertin Copin, est present a Caenle 10 juin 1540, lors de la prise en fieffe par Lucas Picot, de Saint-Etienne, de la moitie de la maison de la rue de la Tannerie, donneeseize ans plus tot. Peut-etre est-il encore la cinq jours plus tard, lorsde la donation de trois boisseaux de froment, mesure d'Arques, pairau meilleur du tripot de Caen a un denier de relache, au terme Saint-Michel et deux gelines bonnes et suffisantes a Noel, a prendre surdeux pieces de terre a Saint-Manvieu, hameau de Marcelet. La renteest reconnue le 9 decembre 1747 par Jacques Heudes, fils de Pierre,Jacques Heudes, fils de Michel et Jean Heudes, fils de Robert, deSaint-Manvieu 2.19me Prieur : ANDRE LE COQ, 1541.En vue d'une messe a note de Requiem chaque annee a la Saint-Thomas (21 decembre), Thomas Sonnet, bourgeois de Caen, faitdon d'une demie-acre de terre a Herouville, hameau de Lebisey, enla delle du chemin de Bieville. Cette terre donnee le 16 novembre1541 avait ete achetee onze livres et dix sols de vin le 14 juin 153&sur Jacques de Landoys, bourgeois de Saint-Pierre. Cette meme terre,augmentee dans la suite de deux acres, est fieffee le 30 septembre1634 a Claude Canivet, moyennant 18 boisseaux de froment, mesured'Arques, bon et loyal a six deniers de relache, deux bons chaponset une poule a la Saint-Michel. Nous trouvons a partir de 1646 laterre de Lebisey entre les mains des Peres Jesuites qui regoiventfrequemment de 1660 a 1708 des sommations de la part des Croisiersau sujet des boisseaux, chapons et poule. La rente est reconnueen bonne et due forme le 11 Janvier 1743 par les Reverends PeresJesuites : Frangois-Rene d'Ailly, recteur du college royal de Bourbona Caen, et Jean-Baptiste Le Blanc, procureur3.Alors que frere Etienne Le Monnier est sous-prieur, noble hommeJacques de Venoix, sieur du lieu, fait un echange de terre avec lesreligieux le lr aout 1546, et le lr mars suivant, Jean Pepin, deBaron, vend 24 sols de rente pour une somme de douze livres et2 sols 6 deniers de vin.Arch. Nat. LL 1480 ; Arch, du Calvados, D 634.Arch, du Calvados, D 622.


AU XVIme ET XVIIme SIECLES 65Et lorsque Etienne Le Monnier se trouve de nouveau prieur en1549, frequentent FUniversite les freres Croisiers suivants4:Thomas Ernault, futur prieur.Guillaume Poulain, 1548, 1549.Thomas Motet, dont le frere, Jean Motet est signale procureurdu couvent en 1546.Roger Simon, 1548, 1549.Guillaume de Roudes, pour lequel Jean de Roudes, ecuyer, demeuranta Argences, son frere, cree une rente de cent sols suivantcontrat du 26 aout 1549 ; le 13 octobre 1550, Jean de Roudes vendaux Croisiers une rente de sept livres moyennant une somme desoixante-dix de capital; de nombreuses procedures s'elevent a l'occasionde cette rente de fevrier a juillet 1602 contre Jean de Rozel,ecuyer, epoux de Frangoise Osmond, veuve d'un Jean de Roudes 5.Sous le priorat de frere Andre Le Coq, apparaissent en 1541 lesnoms de Laurent Boissel, sous-prieur ; Jean Villette, Gillet Hamon,pretres ; Etienne Pourrey, sous-diacre; Jean Louisquet, profes etThomas Ernault, qui suit.Le 15 mars 1552, Jean Frontdebeuf, bourgeois et marchand de laville de Verson, s'oblige a verser chaque annee a pareille date dixlivres de rente de fagon que les religieux prient Dieu pour lui et sesamis trepasses ; le 2 fevrier 1557, maitre Jean de Basly, pretre etbourgeois de la paroisse Saint-Nicolas, prete son nom et ses denierspour une acquisition de quinze vergees de terre sur Pierre Guesnier,bourgeois de Saint-Pierre, et aussitot en fait don aux freres deSainte-Croix.20me Prieur : THOMAS ERNAULT, Bachelier en Theologie,1558-1582.Est sous-prieur en 1561, Simon de la Butyde; sont procureurs :Jacques Le Vavasseur, 1561, 1568 ; Pierre Hubelin, 1580, 1581,prieur de Saint-Georges en 1553, Andre Hubelin, 1582. Religieux :en 1561, Eloi Picquart et Francois Regnault; Baptiste Radiguet,Arch, du Calvados, D 90.Arch, du Calvados, D 636.


66 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAEN1561, 1581, 1582 ; Pierre Bonhourt, 1581, 1582 ; et Pierre Hugues,1582.Avec les Guerres de Religion les documents deviennent rares :en 1558, il est question d'une rente de quinze sols sur une demie-acrea Cambes, echeant au 7 mai, reconnue en 1743 par Philippe Marc,due en 1766 par Toussaint Huet, transferee aux hospices civils deCaen apres la Revolution.A la suite d'un echange en 1555 avec Etienne Duval, de Mondrainville,les Croisiers possedent dix vergees de terre a Carpiquet,louees le 24 Janvier 1562 a Jean Le Quays, moyennant huit boisseauxde froment. Ces terres relevent de l'abbaye de la Trinite aveclaquelle les religieux sont en proces ; l'abbesse parvient a faire casserle contrat, mais les Croisiers reprennent possession de leursfonds apres arret de la Cour du Parlement de Rouen en date du20 juillet 1576, et nouveau bail est engage aux memes conditionsa Jean Le Quays le 24 Janvier 1584. Le 26 octobre 1582, six vergeessont echangees avec Jacques Tellier, sieur de la Fontaine, bourgeoisde Caen, qui en remet autant a Ste-Croix, au meme endroit. Dansla suite, le 13 septembre 1664, le couvent achetera 550 livresdiverses maisons et jardins au bourg de Carpiquet.Le prieure de Caen possede trois acres a Secqueville-en-Bessin,affermees dix boisseaux de froment, mesure d'Arques, le 27 septembre 1568 ; des ennuis naissent bientot avec le fermier FreminLefebvre. Des tres nombreux baux conserves dans la suite, il resulteque la terre est louee par exemple 19 boisseaux en 1581, 13 boisseaux a la Saint-Michel (29 septembre) et six poulets au jourd'Exaltation de Sainte-Croix (14 septembre) en 1663, 45 livres et3 chapons en 1730, 44 livres et 4 chapons en 1771... A BrettevillerOrgueilleuse,ce sont six vergees et demie en 1568, devenues neufvergees en 1621 et fieffees alors pour 22 boisseaux de froment,mesure de Caen, et six chapons gras, rente reconnue le 25 juin 1771par Anne Le Petit, veuve de Jacques Lefebvre.En 1573, don d'une maison paroisse Saint-Gilles, dont les titresprimitifs sont perdus, mais qui louee le 20 mai 1738 a Jean Le Foye,boulanger de la ville, rapporte 15 livres de rente fonciere payablede six mois en six mois, a la Saint-Michel (29 septembre) et a laMarcheque (25 mars).


AU XVIme ET XVIIme SIECLES 67En 1562, le prieur Thomas Ernault a fieffe vingt livres et unchapeau de roses rouges a Jean Le Marchand, bourgeois de la ville,une maison et ses dependances, rue Gemare, aboutant le moulin.Au bout d'un certain temps, proprietaire et locataire ne s'entendentplus sur une question de location, la maison etant de plus grandevaleur. Sur lettres de relief impetrees en la Chancellerie de Rouenles Croisiers obligent Jean Le Marchand a un surplus de cinq livresa partir de 1581. En definitive la maison, cause de nombreux procesest vendue 2.400 livres le 20 Janvier 1622 a un autre bourgeois deCaen, Pierre Allain 6.Entre 1582 et 1598 existe une periode ou le prieure de Caentombe pour ainsi dire dans l'oubli. Depuis 1562, la Normandie estplus ou moins ravagee par les Calvinistes ; l'amiral Coligny se bata Caen le 15 fevrier 1563. Apres la Saint-Barthelemy (23-24 aout1572), la bibliotheque de FAbbaye aux Hommes est saccagee et letombeau de Guillaume le Conquerant profane. Apres 1580, ce sontdes luttes fratricides entre Frangais, Anglais et Espagnols ; une villecomme Mortagne est prise et reprise jusqu'a vingt-deux fois, a lasuite de l'Edit de Nantes en 1598 ; la Normandie se reorganise etaussi notre prieure. Au cours des annees 1576 a 1586, la visitecanonique de Sainte-Croix de Caen est faite par les soins du prieurdu Verger, provincial de France.21me Prieur : PIERRE DE TROISMONT, 1599.Connu uniquement en tant que prieur par un accord passe avecles heritiers de Jean Le Marchand, au sujet de la maison de la rueGemare, aboutant le moulin. II est encore present a Caen une trentained'annees plus tard, mentionne comme simple religieux en1613, et sous-prieur en 1626 et 1629.Beziers signale qu'a cette epoque, Gaspard Vavasseur, chanoineregulier et Croisier, est elu unanimement prieur de THotel-Dieu,pour succeder a Guillaume Malherbe, illustre citoyen de Caen. ,,11fut oblige, dit-il, a la fin de satisfaire a l'arret irrevocable de lanature. Sa mort attira bien des troubles et des divisions, lorsqu'ils'agit de lui donner un successeur. Ces troubles n'etaient pas encore9 Arch, du Calvados, D 599, 606, 612, 613, 6l4, 616, 617, 618, 632.


68 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENfinis en 1608, temps auquel M. Jacques Cahaignes, medecin et professeurroyal, faisait l'eloge de ce prieur" 7.Une rente fonciere de 30 sols a prendre sur des terres a Argencesest connue par une sentence du 26 Janvier 1598 prononcee par JeanTurgot, ecuyer, licencie aux lois, sieur de Tourailles, bailli vicomtal,garde et conservateur du bailliage et haute justice d'Argences etSaint-Gabriel, contre les heritiers de Richard Le Roy au sujet d'arrerages.Les Croisiers sont encore obliges de proceder en justice en1604, 1656, 1658 et 1748. Des condamnations sont portees le 16decembre 1644 contre Isaac de Maloisel, ecuyer, sieur de la Cour,et Michel de Maloisel, ecuyer, sieur des Bissieres, enfants de feuPhilippe, ecuyer, et aussi contre Frangois Collin, ecuyer, sieur deSannerville. La rente est reconnue en 1731 par Pierre Le Feye,avocat au siege presidial et bailliage de Caen et Richard Feret,marchand a Argences; en 1766, par Jean-Jacques Dudouet, duTronquay, et Jacques Dudouet, bourgeois de Rouen. II s'agit detrois acres et demi en la delle du Ronchereul8.22me Prieur : ANTOINE TEXIER, Bachelier en Theologie, 1608,1613, 1626 ; prieur et Provincial, 1633-1636.Le mandat de trois ans pour un prieur etant de regie a Caendepuis un certain temps : de temps immemorial la maison de Caenjouit de la faveur du tviennat, ecrit un prieur le 3 aout 1682, ilsemble qu'Antoine Texier, bachelier en Theologie ait assure quatrepriorats, le dernier en tant que provincial. Cette derniere fonction,il l'assure deja depuis 1624 alors qu'il est prieur de Paris et definiteurde l'Ordre. En 1634 le Pere general Augustin Neerius le nommeson commissaire visiteur et vicaire general pour le royaume deFrance et provincial. De nouveau prieur de Paris et toujours provincial, il retourne a Dieu Tan 1652 9.7 Beziers, III, p. 215-218 ; Cahaignes, Elogia civtum Cadomensium, Caen, 1609,152 pages, decrit ainsi Gaspard Vavasseur, eloge XCVII : ,,Vir fuit apertus, ab omnifuco alienus, et sic a natura factus ut tadtos animi sensus prompte detegeret, qui licetnon ita compti, validi tamen erant. Insuper bonis ecclesiasticis honeste usus, mensampro ratione facultatum quotidie instructam patere hospitibus voluit ad quam etiamprimores civitatis interdum accedebant".8 Arch, du Calvados, D 635.9 Hermans, III, p. 135, 150 et 226.


Prieur6 de Caen 1965.L'une des entries du prieure', Rue Ge'mare.


Prieure' de Caen 1965. La chapelle vue de la Rue Ge'mare.A droite un restaurant en construction.


AU XVIme ET XVIIme SIECLES 71La seule mention de sous-prieur est celle de Pierre de Troismonts,dans les annees 1626 et 1629. Maintenant grace au Registre desprofessions conserve aux Archives Nationales le nom de tous lesreligieux issus de Caen nous est connu. Le premier nom est celui dePierre Gloron qui fait profession le 16 aout 1602. Nous en donnonsle texte, toujours en vigueur sauf quelques variantes dans l'ordredes Croisiers ; naturellement le nom du Maitre general et celui duprieur local varie selon les epoques:,,Ego frater Petrus Gloron facio professionem et promitto obedientiam Deo et beataeMariae et beato Augustino et tibi patri Hieronimo Le Roux priori conventus SanctaeCrucis Parisiensis ac provinciali franciae, vice reverendissimi Patris nostri Schibalia,quod ero obediens tibi, tuisque successoribus secundum regulam beati Augustini Patrisnostri et institutiones fratrum Sanctae Crucis usque ad mortem, teste meo signo hieapposito. Actum anno Domini millesimo sexentesimo secundo die vero Augusti decimosexto" 10.C'est un peu une exception que cette profession soit donnee entreles mains de frere ]erome Le Roux, prieur de Paris et provincial,en visite ce jour-la a Caen ; de fagon generate c'est le prieur de celieu qui la regoit a l'offertoire au cours d'une grand'messe solennelle,souvent en presence de l'elite de la ville.Pierre Gloron, d'abord simple religieux, exerce les fonctions deprocureur a partir de 1626, ainsi qu'a son retour de Saint-Ursindont il est prieur de 1636 a 1642 ; comme le prieur de Caen, ilmeurt en 1652.Nicolas Furet, fait profession entre 1602 et 1608, toujours religieux a Caen en 1613, decede aussi en 1652 a Saint-Georges dontil est le prieur.Nicolas de Guerville, profes le 18 septembre 1608, present aCaen en 1634, retourne a Dieu le 18 novembre 1660.Jean Canu, profes vers 1608, dans la suite prieur a Caen.Guillaume Callais, profes des 1608, futur prieur a Caen.Pierre Sauldebreuil, profes avant 1600, futur prieur a Caen.Jacques Olivier, religieux signale en 1613.Nicolas Jouenne, signale egalement en 1613 ; une decision du10 Arch. Nat. LL 1482. Le nom du maitre general mentionne dans ce texte,Schibalia, est inconnu dans l'histoire de l'ordre ; a ce moment Herman Hasius venaitd'etre elu le 9 juillet 1602. II est decede le 9 decembre 1618. Cfr. A. van de Pasch,Het klooster Clairlieu te Hoei en zijn prioren-generaal, dans Clairlieu, tome 8 (I960),p. 36-38.


72 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENdiapitre general en 1624 porte contre lui Tanatheme de l'Ordre :c'est un membre rebelle, cause de scandalesaiLe 28 juin 1607, les Croisiers regoivent une rente de cinq boisseaux de fromentbon et suffisant, mesure d'Arques et une poule rendue a Caen au terme Saint-Michel,a prendre sur une acre de terre a Norrey-en-Bessin, delle du Perron ; rente reconnueen 1746 et transferee a l'Universite apres la Revolution. En 1609, trois maisons de laRue des Croisiers (ancienne Franque-Rue), situees pres de leur eglise viennent enleur possession et leur rapportent 84 livres de rente fonciere exempte, payable dequartier en quartier ; Tune d'elles est fieffee le 27 aout 1718 a Thimothee de Lince ;en 1771, il est question d'une autre maison de la meme rue munie d'une rente de dix:livres. Titres et rentes sont transferes aux hospices civils de la ville apres laRevolution.Un emplacement de la rue Gemare fut loue 40 sols en 1541 a Thomas Sonnet;depuis, des maisons ont ete baties et sont fieffees a vie. L'une d'elles est situee sur laparoisse Saint-Pierre, au carrefour de l'Epinette : elle est louee a Charles Dupont,ecuyer, avocat pour le Roi en 1'election de Caen, moyennant 60 livres par an, lesreparations et augmentations, ainsi que 100 livres en une fois pour achat d'ornementset promesse de 100 livres pour payer les ouvriers qui travailleront a la reparationdes edifices du couvent. Les nouveaux locataires a vie sont en 1620, noble hommeFrancois Regnaut, sieur des Segretz; en 1642, Pierre de Caumont, ecuyer, sieur dulieu, du Tremble et de Saint-Contest, dont la veuve neglige les reparations en 1671 ;en 1717, Pierre Scelles de la Coquerie ; en 1758, C. Scelles de la Motte, son fils.Ces derniers paient 110 livres a. la Saint-Michel.Une rente de 7 livres 10 sols prise en 1611 par Jean Dumaizeray sur JacquesSevestre, affectee sur les champs Bossent, a Grangues, est transported entre les mainsdes Croisiers en 1615 et versee au jour de Toussaint. Une rente de huit livres, provenantde dons et legs est etablie le 18 fevrier 1625. Le 10 octobre 1626, PierreCallais, bourgeois de Saint-Pierre et Anne Baril son epouse, de la famille du religieuxde meme nom, versent 28 livres 11 sols et 4 deniers de rente pour fondation d'obit rmesse de Requiem a diacre et sous-diacre, avec Vigiles, Libera et de Profundis sur latombe des donateurs et de leurs heritiers en l'eglise des Croisiers, au jour anniversairedu deces du donateur12.Les premieres annees du XVIIme siecle voient le debut de ladecadence des Croisiers en France. Le Cardinal de la Rochefoucauldcherche a devenir le fondateur d'une nouvelle Congregation : fairesupprimer l'Ordre de Sainte-Croix en France et attirer a lui lessujets est une tentation. Avec la complicite du roi Louis XIII, ilobtient du pape Gregoire XV (1621-1623) une bulle datee du11 Hermans, III, p. 138 : ,,Et ne ausus malevolorum ansam malignitatis benevolispraebeat, hinc nostro praesenti hoc decreto Nicolaum Jovenne, professum nostraedomus Cadomensis, tanquam rebellem et injuriosum S. Ordini et Rmo Pri nostroGenerali a corpore Christi velut putridum et scandalizans membrum rescindimus, acanathemate ferimus. In nomine Patris et Filii et Spiritus Sancti. Amen. Nee sinegravi poenitentia recipiendum ad ordinem ducimus, minime vero ad domum suamCadomensem, nisi forte ita religiose et humiliter conversari deprehendatur, ut MagisterGeneralis et capitulum cum ipso dispensandum judicaverint".12 Arch, du Calvados, D 585, 595, 596, 600, 625, 634, 638.


AU XVImc ET XVIIme SIECLES 738 avril 1622, confirmee par Lettres Patentes le 15 juillet suivantl'autorisant a suivre ses noirs desseins. Le Cardinal erige son nouvelOrdre sous le nom de Congregation de Sainte-Genevieve et s'emparedes maisons des Croisiers, forgant les membres a recommencer noviciatet profession. En 1641, sous pretexte de reforme, les chanoinesde Sainte-Genevieve s'introduisent dans la maison Sainte-Croix deParis, s'en emparent et s'y maintiennent l'espace de deux mois amain armee.Comme on le comprend, les Croisiers se rebiffent, veulent a toutprix conserver leur independance et par leurs ecrits essaient dedemontrer la grande antiquite de leur Ordre. Les Croisiers de Caenont-ils ete inquietes ? Cest possible, car on les voit dans la suiteen proces avec les Chanoines de Sainte-Genevieve; possible aussi,car leurs archives conservent des Memoires contre Sainte-Genevieve,ordre nouveau et recent, tandis que le leur est presque d'origineapostolique, disent-ils. Voici quelques extraits de cette litteraturenon conforme a l'Histoire :,,Si Ton voulait s'emparer d'une haute antiquite, on le pourrait aisement faire dansl'Ordre de Sainte-Croix. Cet Ordre est d'une institution si reculee, que quelquesauteurs en font remonter l'origine aux temps des Apotres et disent qu'apres ladignite papale, rien n'est si ancien dans l'Eglise que l'Ordre de Sainte-Croix. D'autresen attribuent l'origine a saint Clet, successeur immediat de saint Lin, second pape. Usdisent que saint Clet fit batir a Rome un hopital pour les pelerins qui faisoient levoyage de Terre Sainte et qu'il institua les Croisiers pour donner a ces pelerins lessecours temporels et spirituels dont ils pouvoient avoir besoin. Le sentiment de cesauteurs est conforme a la bulle de Pie V Nihil in Ecclesia de l'an 1568 et a celle deGregoire XIV, Romanus Pontifex de Tan 1594, bulks qui attribuent aussi au papesaint Clet l'institution de l'Ordre de Sainte-Croix... Et l'un des derniers restaurateursfut le bienheureux Theodore de Celles, chanoine de l'Eglise Cathedrale de Liege..."Rien que cela ! Heureusement que les Papes ne sont pas infailliblesen matiere d'Histoire13.23me Prieur : PIERRE SAULDEBREUIL, 1629.Fait profession entre ses mains le 21 novembre 1629 GorgonBonvoisin, present a Caen jusqu'a sa mort survenue en octobre 1674,sacristain, 1643 et secretaire du chapitre sur la fin de ses jours, saufun sejour a Saint-Ursin vers 1648.13 Arch, du Calvados, D 582.


74 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENLe 21 fevrier 1629, par versement de 150 livres a Jeremie Moutier,bourgeois de Saint-Pierre, les freres de Sainte-Croix se fonttransporter une rente de 10 livres 14 sols et 3 deniers a prendredesormais sur Jacques Prevel, sieur des Buissons, et Daniel sonfrere, tous les deux bourgeois de la ville. Le 2 aout 1631, un autrebourgeois Vincent Thomas, sieur de la Chapeliere, donne une rentede trente livres.A partir de 1630 les Croisiers jouissent des privileges de l'Universite: aggreges a elle ils sont censes etre College de TUniversite,c'est-a-dire que le couvent peut faire enseigner a ceux de son Ordrela philosophic et la theologie.Sous le dernier priorat de Antoine Texier (1633-1636), desormais Provincial, Richard Sambourg, bourgeois, renonce a pretendreaucune droiture du jardin du couvent en consequence d'un pilierqu'il a eu permission de batir a Tinterieur (18 juillet 1634).Antoine Texier regoit a profession le 14 juillet 1634 Louis desVallees, religieux du couvent decede en 1692 a Tage de 78 ans ;le 11 septembre 1636, Isaac Colin, envoye dans un autre prieure.24me Prieur : JEAN CANU, 1636-1639 et 1652-1661.Religieux depuis 1608, Jean Canu exerce plusieurs mandats deprieur : une premiere periode va de 1636 a 1639 et peut-etre jusqu'en1642 ; la seconde au moins de 1652 a 1656 et probablementjusqu'a sa mort survenue le 3 novembre 1661. Au cours de sesmandats les professions sont relativement assez nombreuses :Guillaume des Isles, le 15 fevrier 1637, absent de Caen un certain temps, mentionne religieux de Saint-Ursin en 1648, sans doutelui le prieur de Saint-Georges en 1666, de nouveau a Caen en 1681,sous-prieur a partir de 1683, il y meurt le 26 octobre 1688 a Tagede 72 ans.Michel Perree, le 9 octobre 1639, envoye dans un autre prieure,decede le 4 Janvier 1696.Michel Frontin, le meme jour, sacristain en 1646, procureur ducouvent en 1658, prieur de Caen au cours de trois mandats separespar un priorat a Saint-Ursin de 1680 a 1683 ou il doit poursuivreson meunier pour injures graves contre sa propre reputation.


AU XVImo ET XVIImG SIECLES 75Gabriel Destriac, le 10 novembre 1652, decede le 19 fevrier 1665.Pierre Adeline, le meme jour.Francois Le Vavasseur, le 26 Janvier 1653, futur prieur de Caen.Richard Carne, le 12 fevrier 1653, sans cesse a Caen, decede le27 fevrier 1684.Jean Essiliard, le 10 novembre 1652, frere convers, sans cesse aucouvent, decede le 10 octobre 1702, age de 82 ans. Comme le suivantil fait profession en frangais, le meme jour.Jean Queudeville, frere convers, decede le 8 novembre 1671.Eleazar Helie, le 23 fevrier 1656 en meme temps que son frereFrancois. Eleazar reste toujours au prieure en compagnie de sonfrere et meurt le 4 fevrier 1707 age de 68 ans.Francois Helie, procureur de la maison en 1664, futur prieur deCaen.25me Prieur : GUILLAUME CALLAIS, 1643.Procureur du couvent en 1640, il est signale prieur en 1643, etde nouveau procureur jusqu'en fin 1649 ; il exerce ensuite la memecharge au prieure du Verger, ou il decede en 1652. Un autre GuillaumeCallais, un neveu sans doute, vit a Caen en 1669. Est signalereligieux en 1644, Pierre-Michel Le Touzey.Nous est conserve de cette epoque un registre grand format nousdonnant quelques details sur les activites d'une nouvelle confrerieerigee en Teglise des Croisiers, destinee au soulagement des maladeset des pauvres. Le culte de saint Joseph est a la mode : la confreriese met sous sa protection.Le registre s'intitule ainsi: Resultatz des assemblies de la confrairieSt Joseph, erigee dans la maison des RR. Peres Croisiers deCaen, commengant le jeudy 27° jour de mars 1643. En tete, nomsdes officiers de la Confrerie de la Ste-Famille de Nostre SeigneurJ.C., soubz le nom du glorieux Set Joseph, nommes le 19° jour demars 1643. Directeur : Guillaume Callais, prieur de Ste-Croix ; administrateur: Michel Rocher, grand vicaire de 1'eveque de Bayeux ;sous-administrateur : Hochedey, cure du Buisson; assistants: Deschamps,elu a Caen et de Malfilastre, avocat; secretaire: DomRene du Hamel, religieux de Savigny ; depositaire : de la GuereMace, elu a Caen ; conseillers : de la Briere, cure d'Allemagne, de


76 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENMerville pretre, de Souderne, elu a Caen, Mace, lieutenant generalen la vicomte d'Evrecy ; greffiers : Fontaine et du Quesney ; chapelain: le P. Gorgon Bonvoisin ; sacristain : Morel, marchand.Les reunions ont lieu le dernier dimanche de chaque mois, saufla premiere, jeudi 27 mars, ou Ton decide de visiter les pauvres dela ville et leur accorder des aumones, l'achat de drogues a la foireroyale pour composer les medecines de malades, et de cierges decire blanche au Mans pour l'autel saint Joseph. Les activites materielleset spirituelles vont de pair ; deux troncs sont places, Tunpour les aumones, l'autre pour la decoration de l'autel. Au coursde l'annee celui des pauvres donne 226 livres 12 sols pour unedepense de 179 livres 15 sols ; celui de saint-Joseph, 121 livres1 sol 6 deniers pour une depense de 281 livres 15 sols : en definitive le grand beneficiaire est Saint Joseph pour lequel sont achetesun devant d'autel, des chandeliers, un grand tableau d'une valeurde 36 livres accompagne de deux tableaux d'albatre offerts parmessire Huet, le confesseur des Ursulines. Le 28 fevrier 1644, il estdecide de bien feter la saint Joseph, avec exposition et processiondu Saint-Sacrement a travers les rues des Croisiers, aux Nampts etdes Cordeliers, et le lendemain au cours d'une seance extraordinaireon decrete le percement d'une porte au lieu et place de l'autelSaint-Christophe, pour une meilleure commodite des confreres dela Sainte-Famille.Les pauvres ne sont pas oublies : le jour de la Pentecouste 1643,il est question de donner du potage aux malades et de faire cuireen pain chaque semaine la valeur de deux boisseaux de ble; lespotages sont toujours distribues l'annee suivante. Aux nouvelleselections le 21 mars 1644, deviennent sacristain : Pierre-Louis desVallees et secretaire : Pierre-Michel Le Touzey, croisiers 14.26me Prieur : FLEURY HARENGOT, 1646, 1647.Le 19 novembre 1646, tandis que Jean Canu est sous-prieur etPierre Gloron, procureur, le prieur Fleury Harengot regoit donationde vingt livres de rente par deux freres : Jean Le Neuf, ecuyer,sieur de Montenay, lieutenant du vicomte de Caen, en memoired'Helene de la Menardiere son epouse, et Antoine Le Neuf, ecuyer,14 Arch, du Calvados, D 644.


AU XVIme ET XVIIme SIECLES 77sieur de Courtonne, lieutenant general en l'election de Caen. Usfondent quatre obits : 21 octobre, anniversaire de la mort d'Helenede la Menardiere, 14 novembre, et deux autres aux anniversaires dusecond donateur et de demoiselle Marguerite de Hollandre, sonepouse ; a chacun, vigiles a trois psaumes et messes a diacre et sousdiacre.Les donateurs ont droit de sepulture en 1'eglise des Croisiersou repose deja la dame de la Menardiere. En 1682, la rente estversee par les neveux de Jean : Francois Le Neuf, sieur de Montenayet Pierre Le Neuf, sieur de Courtonne, chanoine en la collegialede Mortain. Au debut du XVIIme siecle la rente est payee parplusieurs : Marie de Prepetit, epouse de Guillaume du Guey, ecuyer,sieur de Fresneville ; Jean-Francois de Cairon, sieur de la Pigassiere;Gabriel Le Neuf, ecuyer, sieur de Montenay, seigneur etpatron de Saint-Victor, Sourdeval et autres lieux.L'un des debiteurs, un du Guey de Fresneville, lieutenant-majorau chateau de Sedan, puis capitaine au regiment de Piemont, se faitsouvent tirer Toreille et invoque frequemment de bonnes raisons,tels ces quelques extraits de lettres envoyees par lui au prieur deCaen :De Metz, le 19 mai 1739 :,,...Les motifs de vos plaintes, Monsieur, sont tres legitimes, et cependant je n'aipas tout le tort que vous le croyez ; permettez-moi de vous dire que je suis incapablede subterfuges ni d'aucuns mauvais detours avec personne, et je suis persuade quevous penserez autrement pour peu que vous vouliez ecouter tranquillement mes raisons; void le fait tel qu'il est, j'ai ete cinq grands mois malade a la campagne, maismalade a ne pas sortir de ma chambre ; je vais a Caen ou je retombe malade a lamort d'une fluxion de poitrine ; au sortir de cette maladie, je regois des ordres pourme rendre au regiment 15 jours plus tot que nous n'avons habitude de les recevoir,etc.".En 1757 il est sur le point de recevoir une honorable pension pourses services, le marechal de Belle-Isle s'occupe de lui, mais uncontre-temps facheux Tempeche encore de payer ; selon la lettre du18 Janvier 1757, cette affaire seroit actuellement consommee sansVenorme et affreux attentat qui vient de se commettre sur la personne de notre bon Roy (Louis XV) : // est bien humiliant pour lanation de produire des monstres de cette espece... 15Sous la seconde periode de priorat de Jean Canu, marquee parde nombreuses professions a partir de 1652, le couvent de Caen15 Arch, du Calvados, D 636.


78 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENest suffisamment riche pour se permettre diverses acquisitions : le26 juin 1653, pour 3.340 livres dix acres et une demie-vergee aNorrey-en-Bessin, six vergees au terroir de Verson et trois vergeeset demie a Rots, le tout dans la mouvance de l'abbaye Saint-Etiennede Caen ; le 14 mars 1656, 1.590 livres pour quatre acres et troisvergees un quart a Rots, et 2.552 livres 10 sols pour dix acres etdemie toujours a Rots, dans la mouvance de Saint-Etienne, ainsiqu'une rente de cinq boisseaux de froment et une poule.Dix-neuf vergees et demie des terres acquises a Rots sont bailleesle 5 octobre 1722 a Pierre Dessillons au prix de cent boisseaux defroment; sept vergees sont prises le 4 novembre 1721 par PierreMarie, de Rots, pour quinze boisseaux de froment et deux poulardesgrasses ; deux vergees un quart sont baillees le lr septembre 1723 aGabrielle Le Bourgeois, veuve de Claude Blouet, cinq boisseaux defroment et deux poules prises sur le fumier. Nombreux sont lesbaux des terres de Rots, et saisie sera faite sur les fermiers le 20avril 1771, sur la requete de Jacques Le Comte, boucher a Caen,pour obtenir paiement de plus de 1.000 livres de viandes fourniesaux religieux pourtant si peu nombreux a l'epoque16.27me Prieur : NICOLAS CHANLATTE, 1662.Ce prieur nous est connu par un proces en cours entre l'abbayed'Ardenne et les Croisiers. Ces derniers a la suite de la demolitionde Tune de leurs maisons pres du chemin de Gemare et du moulinde Gemare, ce dernier propriete de l'abbaye d'Ardenne, et de laconstruction d'un nouveau batiment empietent dans un espace decinq pieds neuf pouces compris entre le moulin et l'ancienne maison; les ouvriers ne peuvent plus visiter les rives et masses dumoulin. Les Croisiers veulent meme y edifier un gable au bout deleur dortoir. Transaction est enfin passee le 15 juillet 1662 entreNicolas Chanlatte, prieur et Frangois Le Vavasseur, procureur dela maison d'une part, et Guillaume Fossard, prieur d'Ardennes etMathieu Trosseille, son procureur, d'autre part: les religieux deSainte-Croix ne pourront continuer la construction du batiment visa-vis des moulins ; Guillaume Brodon, maitre mafon, en est l'entrepreneur17.16 Arch, du Calvados, D 585, 608, 609, 610, 611.17 Arch, du Calvados, D 590.


AU XVIme ET XVIIme SIECLES 79Ce proces donne 1'occasion de mettre un peu d'ordre dans lesarchives du prieure : le temps a efface certaines pages (des ancienstitres) et I'antiquite de Vecriture fait difficulte a lire lors des proces.Francois Le Vavasseur se fait copiste du chartrier des le 6 mars1663 : grace a lui nous est parvenu un Cartulaire de fort belleecriture conserve aux Archives Nationales, LL 1480. Les premierespages nous apprennent que les Croisiers paient 5 sols, un chaponet 15 oeufs de droits feodaux pour leur couvent.28rae Prieur : CLAUDE PAUCQUIER, 1664.Claude Paucquier regoit deux professions en 1664, Tune le lrseptembre, Jean-Claude Patu, futur prieur, decede le 21 mars 1702a 1'age de 54 ans ; l'autre le 17 septembre, David Benard, plus tardprocureur du couvent, que Ton ne rencontre plus apres 1690 : le8 mars il se trouve dans une extreme infirmite, ce qui indique quela mort est proche. Fleury Harengot avait regu a profession le9 juillet 1647 Pierre de Beaurepaire, decede le 22 fevrier 1672.29me Prieur : FRANCOIS LE VAVASSEUR, 1667.Profes le 26 Janvier 1653, Francois Le Vavasseur, procureur depuis1662, est signale par les actes d'archives prieur seulement enl'annee 1667 ; cependant il a du l'etre a diverses reprises, soit aCaen, soit ailleurs : une mention en marge de son acte de professionnous apprend qu'il est mort le 28 octobre 1708, dans la 71me anneede son age, 55me de profession, 47me de sacerdoce et 13me de priorat.Tous les prieurs de Caen nous sont fort bien connus a partir de1682 et son nom n'y figure jamais. A la suite de Tun de ses prioratsa Caen, il quitte son couvent d'origine, et se trouve depuis un certaintemps deja aumonier des flottes royales (ad regias classes) quandil peut reintegrer Caen au cours de Tete 1690 a la suite de demandesreiterees a Pierre Dagneaux, prieur de Paris et provincial. Le22 septembre 1690, il retrouve sa charge de procureur. Apres Tarriveedu prieur Julien Marchis en 1693, il quitte Caen.Les dons et legs continuent d'affluer au prieure :3 livres 11 sols de rentes le 15 mars 1661 ; 30 livres le 10 juillet et 40 livres derentes le 25 octobre de la meme annee ; achat d'une maison, grange et jardin le13 septembre 1664 pour 550 livres ; echanges de terres avec Louis de Madaillan>seigneur marquis de Montataire, de Lassay (Mayenne) et autres lieux en 1666.


SO LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENLe 15 mars 1667, Guillaume Fauvel, boulanger et bourgeois de Saint-Pierre, parrente de 3 livres 11 sols et 5 deniers a prendre sur trois vergees et trois quartiersde terre a Ouistreham, fonde un obit solennel au jour anniversaire de son deces :vigiles des defunts a trois psaumes et lemons, messe de Requiem a diacre et sousdiacre,Libera sur la tombe du donateur qui aura droit ainsi que sa femme de sepulture en Teglise des Croisiers. Dans la suite de nombreuses poursuites et sommationssont exercees pour non-paiement, aussi bien a la fin du XVIIme siecle qu'au XVIIIme;la rente est reconnue en 1734 par Jacqueline Cabien, veuve d'Augustin Vimard,demeurant a Herouville-Saint-Clair, fille de Pierre Cabien bourgeois de Caen dejapoursuivi en 1698. Alexandre, recteur de l'Academie de Caen, continue les sommations en 1815, et la rente est enfin declaree irrecouvrable par decision du 5 millet1816.Le 19 novembre 1669, Richard Regnouf, bourgeois de la paroisse Saint-Juliendonne une vergee et demie, delle des Rougeats ou Courtes-pieces, au terroir deSaint-Gilles, pres des terres des chanoines du Saint-SSpulchre et de celles de l'abbessede la Trinite, a charge par les Croisiers de deux services solennels annuels et de luifournir pour sa sepulture, celle de sa femme et de ses heritiers, une place de sixpieds au carre en haut de l'aile de la chapelle Notre-Dame, ou il pourra faire placerune tombe de six pieds de long et trois et demi de large avec telle inscription qu'ilavisera. La petite terre est louee au prix de onze livres et deux chapons gras, etestimee par le fisc deux cents livres 18.30me Prieur : MICHEL FRONTIN, 1670-1671, 1674, 1676, 1683-1685.Profes depuis le 9 octobre 1639, Michel Frontin, sacristain ducouvent en 1646, procureur de 1658 a 1662, assure divers prioratsa Caen, entrecoupes par une charge de meme ordre a Saint-Ursin(1680-1683) et meurt au cours du dernier le 26 mars 1685. A Caencomme a Saint-Ursin, il gere fort bien son prieure et se trouve tressouvent mentionne dans les baux. Le 16 mars 1671, Michel Frontinregoit la profession de frere Claude Foy, decede diacre le 22 mai1688, age de 37 ans, et plus tard, le 15 juin 1684 preside la prised'habit de Louis Longuet, religieux qui ne semble pas avoir continuedans TOrdre.Le 3 octobre 1670, Michel Frontin loue a vie a Jacques Louvel,ecrivain-jure en la ville et Universite de Caen, et Catherine La Loe,sa femme, une maison de la rue Gemare, sur la paroisse Saint-Pierreet proche du carrefour de l'Epinette. Jacques Louvel, sa femme,Marguerite Vautier sa niece et Catherine Millon, leur bonne etfidele amie, auront droit de sepulture en l'eglise conventuelle enraison du paiement comptant de 1.200 livres. Robert Jugout, facteur18 Arch, du Calvados, D 582, 593, 621.


AU XVPne ET XVIIra* SIECLES 81d'orgues demeurant a Caen, regoit aussitot la somme de mil cinquantelivres en louis d'argent et monnaye ayant cours sur celle de1.989 livres que les religieux lui doivent pour la feature de Vorgueestant dans leur eglise. A la mort du sieur Louvel la maison enquestion est habitee en 1699 par Catherine Halley, veuve de NicolasLe Bourgeois, ecuyer, sieur de Poussy, et par Claude Branu, menuisieret sculpteur, bourgeois de la ville; en 1702, par CharlesLair, sieur de la Mare, autre bourgeois et le tonnelier Daniel Huet.Le 24 septembre 1671, l'epoux de Catherine de la Fosse, LaurentLe Monnier, bourgeois de Saint-Jean, gisant au lit malade, donnetrente livres de rente au denier 18 pour fondation de six servicesa diacre et sous-diacre, vigiles a trois lemons, puis Libera et de Profundisface au Crucifix de l'eglise, l'un le lendemain du jour anniversairede son deces, les cinq autres dans Toctave des Trepasses ;rente amortie en 1712 par M. .de Charsigny, procureur du Roi aubureau des Finances. vD'autres fondations aux conditions peu connues ont lieu en1672 : Tune par le don de trois vergees de terre a Beny-sur-Mer,par Julien Daniel, bourgeois de Caen, terres louees en general douzelivres et un chapon gras, sauf en 1762 : quatorze livres et au choixsoit une douzaine de pigeons ou un chapon gras ; l'autre en date du22 juin, par Andre-Jacques, Gaspar et Jacques Paris, douze livresde rente affectee sur cinq vergees a Noyers-Bocage, dans les carrieresde Botdel.Le couvent est suffisamment riche soit pour amortir certainesrentes, soit pour en creer de nouvelles : le 22 mai 1671 les PeresCordeliers, representes par Pierre Le Pelletier, gardien, Marin LeRoy, vicaire, Simon Haillet et Michel Lamant, religieux, regoivent420 livres pour amortissement d'une rente de 30 livres ; le memejour, venerables et discretes personnes messires Claude Le Grand,.docteur en theologie, cure et archipretre de Saint-Julien, Simon dela Vigne, pretre bachelier en theologie, Gaspar Menil, ecuyer sieurde Secqueville et Etienne Marquis, sieur de la Bertonniere et conseillerdu Roi au bailliage et presidal de Caen, directeurs des fillesnouvelles catholiques de la propagation de cette ville de Caen, regoivent700 livres pour constitution de 50 livres de rente au denier 14.Le 9 juin 1671, Marie Langlois, de la ville de Paris, accepte des


82 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENreligieux caennais par l'intermediaire de Joseph Lemercier, religieuxdu couvent de Paris et leur procureur, la somme de 1.400 livres pouramortissement au denier 14 d'une rente de 100 livres; le 30 dumeme mois, c'est le facteur d'orgues Robert Jugout, 1.900 livrespour constitution de rente nouvelle19.31m* Prieur : FRANCOIS HELIE, 1672.Profes depuis 1656, procureur en 1664, prieur en 1672, FrancoisHelie dans la suite sacristain de la maison, ne s'entend pas tres bienavec tous les religieux et en particulier avec le frere Richard Carne ;il s'enfuit meme du couvent et y rend Tame cependant le 21 avril1699, a Tage de 59 ans.Le 11 decembre 1672, c'est lui qui preside la profession de Louis-Frangois de Prime, decede religieux clerc le 7 mars 1684 a Caen.En 1672, les Reverends Peres Jesuites, arrives a Caen en 1608,fetent avec grand eclat la canonisation de saint Frangois de Borgia,leur troisieme general. Une grande procession doit conduire tousles religieux de la ville vers l'eglise de ces messieurs de la Compagniede Jesus. Mais au fait ces derniers sont-ils en tres bonstermes avec les autres Congregations ? Non, sans doute, car lesreligieux etablis dans la ville brillent par leur absence. A cetteoccasion les Croisiers sont exclus de l'Universite. Le 5 decembre leprieur et les freres presents au couvent: Gorgon Bonvoisin, RichardCarne et David Benard, redigent une requete en latin en vue d'etreretablis dans leurs droits : Us etaient pleins de bonne volonte et ontattendu vainement les religieux de la ville20.32m* Prieur : FRANCOIS GIGOT, 1675, futur Provincial.Le prieur Frangois Gigot n'est pas un profes du prieure; sonpassage est tres court, quelques mois, une annee au plus, apres unbref mandat de Michel Frontin qui lui succede de nouveau en 1676.Frangois Gigot regoit la profession de trois religieux qu'on ne rencontre plus a Caen dans la suite : le 16 juillet, Pierre Cauvin, sousdiacredu diocese de Bayeux ; le 23, Pierre Bougon, fils de Jean19 Arch. Nat. LL 1480 ; Arch, du Calvados, D 585, 592, 631, 638.20 Arch, du Calvados, D 135.


AU XVIme ET XVIIme SIECLES 83Bougon, et le 12 septembre, Robert Duval, fils de Jean. FrangoisGigot revient quelques jours a Caen, debut novembre 1689, enqualite de prieur de Chauny et provincial pour la France.Le 31 aout, par contrat devant tabellions a Caen, Jean Aubreeaumone deux acres et demie de terre a Basly. La terre est prise abail le 3 decembre 1717 par Pierre Le Perrier moyennant 23 boisseauxde froment, mesure de la Halle de Caen, pair au meilleur asix deniers de relache par boisseau et trois chapons gras. La renteest transferee aux hospices de la Ville a la Revolution21.Arch, du Calvados, D 620.


84 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENVII. - MISERES ET DECADENCE (1680-1760)Les siecles de gloire de Caen sont termines, comme au XVmesiecle la discipline est difficile a observer, et malgre l'effort desprovinciaux, le couvent occupe par quatre ou cinq religieux seulementsombre dans une serie de scandales : ce qui en fait souhaiter ladisparition par les catholiques eux-memes. Les vocations en diminution sont les plus nombreuses sous les prieurs indignes, mais quellesvocations ? Le plus souvent au detriment de l'honneur du prieure.Le mal n'est pas de 1680, il remonte aux decades precedentes oules prieurs sont si facilement remplaces, mais grace au registre desVisites Canoniques conserve aux Archives Nationales, cote LL 1481,la vie interieure du monastere est connue en detail. En ce qui concerneles scandales enumeres en long et en large dans les documents,tout en conservant la verite necessaire dans un travail historique,nous nous efforgons de rester assez discrets : la majeure partie sontdes infractions au voeu de chastete des profes.33me Prieurj JEAN-CLAUDE PATU, 1679-1683 et 1698-1702.Profes de Caen depuis le lr septembre 1664, Jean-Claude Patu,mentionne prieur en 1679, Test probablement depuis 1677 succedanta Michel Frontin : en 1682, au bout d'un nouveau mandat, il songea demissionner. Rappele a la tete du prieure en 1698, il y decedele 21 mars 1702.En 1679 le prieur est oblige de proceder contre Alexandre Sallet,ecuyer, sieur du Repas, epoux de Madeleine Pachot, veuve duseigneur de Tourailles Jean Turgot. Les Turgot ont fonde precedemmentune chapelle de la Sainte-Vierge dans Teglise des Croisierset y sont inhumes pres du mur sur lequel est gravee leur epitaphe ;est adjointe une rente de trente livres pour trois obits solennelsannuels, avec messe a diacre et sous-diacre et nocturne, chant duLibera sur la tombe des fondateurs : le 10 juin pour noble hommePierre Turgot, ecuyer, sieur de Rochefort, le 6 juillet pour Claude


MISERES ET DECADENCE 85Turgot, seigneur de Tourailles et le 10 decembre pour Anne deFlavigny, sa veuve.Au deces de Jean Turgot, chevalier, seigneur des Tourailles, larente de trente livres est affectee sur la terre de Mondeville, lot deson second fils Jean-Claude Alexandre Turgot, 23 mars 1686. Denouvelles poursuites ont lieu en 1726 contre Pierre de Neuville,chevalier, seigneur et marquis de Clairey, epoux de la fille du baronde Tourailles, et en 1765-1769 contre le marquis d'Osmond, secondepoux de cette derniere, decedee en 1767 et dont la seule heritiere,fille de son premier mariage est devenue la baronne de Mesple. Labaronne, nee Elisabeth-Perrette-Therese-Dominique de Neuville,epouse en premieres noces de Henri-Frangois, marquis de Rabodanges, et en secondes de Joseph-Frangois des Claux de Mesple, reconnaitla rente le 11 octobre 1773. En 1808, l'Universite poursuittoujours contre le marquis Augustin-Theodore-Maurice Thibault dela Carte, proprietaire du chateau de Rabodanges, heritier de Marie-Anne-Perrette-Henriette de Rabodanges, fille de la baronne deMesple \Le 15 fevrier 1681, le couvent acquiert pour 300 livres sur JeanHelie une demie-acre au terroir de Saint-Gilles de Caen, ainsi qu'unerente de 15 livres sur le meme moyennant pareille somme de 300livres. Possesseurs de nombreux biens, les Croisiers sont obliges d'enfaire declaration le 29 mai 1682 a la Chambre des Comptes : Caen,une acre de terre; Baron, huit acres ; Basly, deux acres et demie;Norrey, trente-deux vergees ; Verson, six vergees ; Colleville, cinqvergees ; Secqueville, trois acres trois vergees ; Bretteville-VOrgueilleuse,quatre vergees et demie ; Beny, Cairon, Carpiquet, Rots, etc...et de nombreuses maisons. Selon la declaration au fisc en 1693, lesCroisiers figurent parmi les grands proprietaires de Carpiquet, leursbiens peuvent valoir 1500 livres de rentes, et ils arrivent apres l'abbayede la Trinite, 2.000 livres ; Henri Hue, ecuyer, 400 livres ;Jacques de Herissy, ecuyer, seigneur de Marcelet, 280 livres etCharles Mace, conseiller au presidial de Caen, 250 livres 2.A partir du 23 juillet 1682, le registre des Visites nous fait entrevoirla vie mouvementee du prieure : ce jour-la Pierre Dagneaux,1 Arch, du Calvados, D 629.2 Arch, du Calvados, D 585.


86 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENbachelier de theologie, prieur de Sainte-Croix de Paris, definiteur,vicaire general et provincial de l'Ordre en France, assiste commeassesseur de frere Louis Dubois, prieur de Chauny, fait la visitecanonique de tous les lieux reguliers de la maison. Les religieuxpretrespresents en dehors du prieur sont: Guillaume des Isles,Richard Carne, Eleazar et Francois Helie, David Benard. Le 3 aoutJean-Claude Patu malgre ses desirs de demission est reinstalle solennellementdans ses fonctions et fait savoir qu'il entend etre obei deses religieux ; Eleazar Helie est nomme procureur.Apres le depart du provincial, les choses ne tournent pas plusrond ; lorsque frere Francois Helie est nomme greffier du couventle 28 septembre, c'est un tolle de protestations. Une maison situeedans l'enceinte du couvent avait ete fieffee a un sieur Louvel, maintenantdecede ; pour eviter le passage de femmes dans le couvent,le provincial a interdit au cours de sa visite toute nouvelle location,ordre reitere le 15 septembre sous peine formelle de desobeissanceet d'excommunication ; or, les religieux n'ont rien trouve de mieuxque d'apposer a la porte conventuelle cet ecriteau : Maison a louerpresentement. Au cours du chapitre du 28 septembre, les religieuxproferent des paroles indignes et peu respectueuses envers le vicairegeneral et le prieur, le frere David Benard affirme meme qu'il nefaut pas differer la sentence d'excommunication, qu'il se tient dejapour excommunie et qu'il n'est pas en peine de trouver des genspour s'en faire relever. Us sortent en. claquant les portes ; le prieurleur interdit de celebrer la messe pour leur desobeissance, ils repondenten choeur : tant mieux !Le frere Benard se fait recevoir par l'eveque de Bayeux, presentce jour-la a Caen. Chaque matin a sept heures une messe doit etrecelebree pour le defunt pere du religieux, et ce dernier accuse sonprieur d'avoir dilapide l'argent place a cet effet, mange et dilapideen promenades et bonne chere, en compagnie du provincial. Defait, chaque matin le prieur refuse les ornements sacerdotaux auxquatre recalcitrants (Francois Helie est hors de cause) qui publienta qui veut les entendre qu'ils n'en connaissent pas la raison. Celle-cileur est de nouveau solennellement donnee au chapitre du lr octobresur les six heures et demie du matin, et ce jusqu'a ce qu'ils aientdonne quelque signe de penitence. Frere Benard en son nom etcelui de ses confreres declare son intention de presenter une requete


Prieur


Prieure de Caen 1965. Details des arcades cfite de la Rue des Croisiers.(Magasin de meubles de M.Desjours.)


MISERES ET DECADENCE 89a l'official de Bayeux et en s'adressant au prieur : Nous auronsbientot raison de cet homme !Suite a la requete presentee le matin meme, sur ordre de l'officialun huissier se pointe a midi a la porte du couvent ordonnant auprieur de donner des ornements a ses religieux ; le lendemain matinun clerc de l'eglise Saint-Pierre porteur de la sentence de l'officialitede Caen enjoint au prieur de donner des ornements propresa celebrer la Sainte-Messe. Le prieur refuse toujours ; convoquea l'officialite le 5 octobre sur les neuf heures, il declare les jugesincompetents dans une affaire purement interieure de son couvent.Ces faits scandaliseront peut-etre le lecteur : le prieure vit desormaisa ce diapason.Jean-Claude Patu n'arrive plus a gouverner sa maison dont il estecarte petit a petit par l'official : las il s'enfuit de la communautedans l'apres-midi du 12 avril 1683 et ses religieux sont quatre moissans nouvelles de lui et pensent qu'il se cache dans une maison deCaen. Le 5 aout, le chapitre le declare apostat, fugitif et hors deVobeissmce des Superieurs.Le provincial Pierre Dagneaux se voit dans 1'obligation de revenira Caen debut mai 1683 et d'y etablir un reglement rigoureux envue de la restauration du couvent et l'edification des religieux :Ceux-ci devront mettre beaucoup d'application et de perfectiondans Toffice divin : inclination au Gloria Patri des psaumes, tete nuepour les religieux qui chantent ou lisent oraisons et legons, pourles ministres qui encensent l'autel; il se plaint de la pauvrete desornements et du trop peu de decence a Tinterieur du tabernacle.Aucune femme ne sera admise tout pres des religieux dans lechceur ; elles ne seront acceptees qu'aux fetes solennelles et au basde Teglise : interdiction de les saluer et obligation d'avoir les yeuxbaisses en passant pres d'elles.Pour que les religieux soient recueillis et evitent tout commerceavec les seculiers et specialement les seculieres, les portes de l'egliseseront constamment fermees en dehors des offices, sauf celle presde l'autel de la Sainte-Vierge. Les novices, trop dissipes, ne sonnerontplus les cloches aux diverses Heures, sauf Matines. Lors desfetes, interdiction de confesser avant sept heures du matin et apres


90 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENsept heures du soir, et jamais de nuit, sauf en hiver ou des chandeliers seront installes pres de la porte de chaque confessionnal,de fagon a rendre bien visibles du prieur ceux qui entrent ou sortentLes portes du couvent seront toujours fermees a sept heures lesoir en ete, six en hiver et les clefs remises la nuit entre les mainsdu prieur; interdiction de sortir du couvent sans permission ou deprendre des boissons au dehors ; beaucoup de modestie et de conformiteest demandee pour le vetement, et seront punis et incarceresceux qui enleveront leurs habits pour s'assurer certaines libertes.Aucun seculier ne sera jamais admis dans les lieux secrets du couvent, et les novices ne devront jamais avoir de contacts avec desfemmes. Punition severe pour ceux qui murmurent au sujet du boireet du manger ; jamais d'invitations aux seculiers, et si parfois leprieur le permettait, jamais au repas du soir. Reduction des tempsde recreation et reprise du jeune certains jours de la semaine, etspecialement pendant le Careme.La suite des evenements nous montre que ce reglement, normalpour des religieux, sera peu suivi.Nouveau mandat de Michel Frontin} 1683-1685. Frere MichelFrontin, rappele de Saint-Ursin, prend ses fonctions le 17 mai ;Guillaume des Isles est sous-prieur. Trois mois plus tard DavidBenard et Richard Carne, les incorrigibles, obtiennent respectivementles charges de procureur et secretaire du chapitre. Imitantson .ancien prieur, Francois Helie, sacristain, s'enfuit dans la nuitdu 4 au 5 juillet; frere Essiliard trouve toutes les portes ouvertesen allant sonner Marines vers quatre heures, une heure plus tardau cours d'un chapitre extraordinaire frere Helie est declare fugitif,mais revient le 30 avril 1684 sur recommandation instante du provincial et apres la mort du frere Carne.En aout 1684, Jean-Claude Patu se trouve a Rouen et essaie deproceder contre son ancien couvent; le 27, Michel Frontin estcharge par ses religieux d'aller a Rouen pour defendre les interetsde Caen contre l'ancien prieur.Elisabeth Helie, veuve de Jean Aulnay, a prete en 1681 neufcent livres aux Croisiers pour acquisitions en la baronnie de Rots :50 livres de rente lui sont payes ; le 29 avril 1684, la rente est


MISERES ET DECADENCE 91transportee en faveur des benedictins de Saint-Etienne et amortiedes le 12 decembre de l'annee suivante3.34"16 Prieur : JEAN-FRANCOIS RUFFIN, 1685-1689, futur Provincial.Le 26 mars 1685, post obttum Michaelis Frontin, les religieuxde Caen elisent pour prieur Jean-Frangois Ruffin, docteur en Sorbonne,religieux profes de Paris, et ce en presence du Pere Leonardde Saint-Nicolas, prieur des Carmes et du Pere Nicolas Bezangon,sous-prieur des Jacobins. Tant que le prieur, entre en fonctions le21 avril, est a Caen, le couvent est assez calme, a part les escapadesde Tun des religieux ; son mandat termine, il est reelu par sesreligieux le 16 mars 1688, sauf Francois Helie, ancien prieur, absentvolontairement. Jean-Frangois Ruffin est present le 2 mai 1688 auchapitre provincial a Paris et se demet de ses fonctions le 2 novembre1689. Dans la suite il devient Provincial a trois reprises, 1695-1696, 1703-1706, 1710 annee de sa mort survenue debut mai.Le prieur regoit les professions : le 26 avril 1685, de PierreDurand, fils de Christophe, bourgeois de Caen ; le 26 juin suivant,de Jean-Jacques-Franfois Hebert, toujours a Caen en 1693 ; et preside le 14 juin 1686 la prise d'habit de Pierre Bosquet, pretre, freremineur de l'observance des Capucins, province de Normandie, admismoyennant dispense du Siege Apostolique ; rien ne nous indiquequ'il ait fait ensuite profession ou soit reste.En 1687 le couvent est habite par le prieur, puis Guillaume desIsles, sous-prieur; David Benard, procureur ; Eleazar et FrancoisHelie, Louis-Olivier de Chantelou, tous pretres et ce dernier signaleseulement en 1687 ; Claude Foy, diacre, a qui le chapitre interditde parler a certaines jeunes filles ; Jacques-Frangois Hebert, diacreet Jean Essiliard, convers. De temps a autre on y rencontre le frerePierre Durand dont la vie est des plus mouvementees : il s'enfuitdans la nuit du 24 au 25 juillet 1686 avec bon nombre d'objets ducouvent, revient le 5 fevrier 1687 pour y recevoir des son arriveela discipline, soit cinq coups de fouet par chacun des religieux etetre mis au silence dans une chambre du vieux dortoir. Le lende-3 Arch. Nat. LL 1481 pour tous les evenements de cette periode.


92 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENmain matin il reussit a defoncer la porte et a se promener dans lacommunaute, jurant et blasphemant, un baton a la main pret a enassener de coups ceux qui l'approchent; on en a enfin raison, etdevetu de son saint habit, il est de nouveau enferme avec deuxreligieux comme sentinelles jour et nuit. Rien n'y fait, le 7 fevrieril reussit a s'echapper errant a travers la ville jusqu'a la fin dumois :,,Moy f. Pierre Durand, humblement prosterne devant Dieu, en presence de toutela communaute, je demande pardon a Dieu et a tous mes confreres, a tous mes superieurset a tout l'Ordre des mauvais exemples et du scandale que j'ay donne par mesfuites et desobeissances, recognois que j'ay justement merite et encouru toutes lespeines et censures portees dans nos constitutions contre les Apostats. Je me soumetshumblement a subir les penitences portees par les memes Constitutions. Fait aucouvent de Ste Croix de Caen ce 25e Febvrier 1687".Signe : f. P. Durand.Le frere ne regoit l'absolution de son apostasie et demission de1'habit que le 12 mars pour etre ensuite transfere a la maisonSaint-Orens de Toulouse pour y subir la penitence imposee par leprovincial. Le 3 aout 1688 le prieur de Toulouse, Andre Calefiniet ses religieux, Pierre Lestrade, Jean Santussans (futur prieur)-,Gerard Santussans et Francois Chambert ecrivent au prieur de Caenpour reprendre sans delai l'indesirable Pierre Durand, irregulierdans 1'assistance aux offices, incapable de discipline, perturbateurdu repos des religieux, infamant dans ses propos, querelleur avecses confreres : le 26 juillet, au grand scandale des fideles, il a battua sang un novice dans l'eglise au cours d'un office.A partir du 30 avril 1687, frere Jacques Lardin, definiteur general, provincial et visiteur en France, assiste du Reverend PereMichel-Denis Feydeau de la Lande4, prieur de Saint-Ursin, assuresa visite canonique. Est reglee la pension a verser a Tancien prieurPatu ; le reglement interieur de 1683 est renforce : toutes portesfermees a l'eglise en dehors des offices, eviter la vanite dans leshabits et posseder une tonsure suffisamment grande et visible selonTantique et louable habitude de l'Ordre, silence impose dans lecouvent et au refectoire, sorties en ville reglementees, manger beau-4 Cf. notre volume sur Saint-Ursin, p. 56-58 ; prieur de 1691 a 1727, mais aussi aucours d'un premier mandat en 1686-1688 ; les documents consulted l'avaient laisseentrevoir, mais rien ne permettait de l'affirmer.


MISERES ET DECADENCE 93coup moins de viande et de poisson, ne pas revenir boire en dehorsdes repas, le procureur doit donner tout ce qui est necessaire auxreligieux de fagon a s'eviter leurs murmures offensants. Le 18 avril1689, vu le peu de religieux, le prieur admet temporairement de neplus chanter la messe conventuelle que les dimanches et fetes,d'assurer les services et obits avec messe basse, de psalmodier lesVepres en semaine.Le 3 avril 1688 dame Anne Callais, heritiere de Pierre Callaisson frere, bourgeois de Saint-Pierre, veuve de Jean-Baptiste Jean,sieur des Terres Noires, aumone une somme de 300 livres pourconstruire dans l'eglise un tabernacle et decorer convenablement lemaitre-autel ; le tabernacle en bois avec deux anges et deux gradinsest confie au sculpteur Lutellis. Les religieux s'engagent a celebrertous les jours de Toctave du Saint-Sacrement une messe basse pourelle et ses amis trepasses, et sur sa demande a faire le quatriemedimanche du mois apres Vepres une procession avec chant desLitanies de la Sainte-Vierge, prieres pour le Roi regnant, puis unde Profundis.La meme dans son testament ecrit le lendemain demande a etreinhumee dans l'eglise et legue 28 livres 11 sols 4 deniers de rentea prendre sur Nicolas Giot, bourgeois de la ville, pour un obit aujour anniversaire de son deces et messe basse le mercredi de chaquesemaine a perpetuite. Pierre-Francois du Quesnay, conseiller en lavicomte de Caen et tuteur principal des filles de la defunte, parceque celle-ci est decedee moins de trois mois apres la redaction dutestament, attaque en nullite les dernieres volontes de la dite dame,d'ou une replique vehemente des Croisiers le 4 novembre suivantqui l'ont inhumee dans leur eglise et tiennent a se faire payer 5.Un religieux du prieure de Paris en mal de priorat, Jean-Claudede Sonning, licencie en droit canonique de l'Universite de Paris,arrive a Caen en mai 1689. Le prieur Ruffin ne le garde pas treslongtemps. II y revient le 28 juillet au soir, porteur d'une lettre duRoi Louis XIV, datee de Versailles le 13 juin et enjoignant auprieur de Caen de bien vouloir l'y recevoir jusqu'a nouvelle obedience. Les choses se gatent tres vite et Jean-Claude Ruffin supplie5 Arch, du Calvados, D 638.


94 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENardemment frere Frangois Gigot, provincial, prieur de Chauny, delui rendre son office de prieur pour retourner a son couvent deParis. Le provincial present a Caen le 2 novembre 1689 accepteenfin la demission, tandis que Pierre Durand essaie de se fairerelever de son interdit d'exercer aucun de ses ordres sacres ; lereligieux rebelle devra se pourvoir devant le Pape, en attendant leprovincial le considere comme suspens, interdit et prive de tous lesprivileges attaches aux religieux clercs dans les ordres sacres.Jean-Claude de Sonning conserve quelques espoirs, mais au coursde Telection du 29 novembre en presence du Pere Norbert deSaint-Etienne, prieur des Carmes et Antoine Texier, sous-prieur desJacobins, le prieur choisi est Pierre Jallet, religieux-pretre du couvent du Verger. Nous ne pouvons resister de dormer la reponse dece dernier par lettre datee du 7 decembre : ,Je vous remercie treshumblement de toutes vos honnetetes et des bonnes intentions quevous avez pour moi, mais je ne puis y repondre... si je ne craignoispoint d'aller essuyer des chagrins chez vous, ne recevant ici quebeaucoup de satisfaction de tous les confreres qui vous saluentcomme moi/' C'est flatteur !Nouvelle election le 16 decembre, le nom se porte sur Jean deSantussans, l'aine, du couvent de Toulouse, qui prend ses fonctionsle 3 fevrier 1690.35me Prieur : JEAN SANTUSSANS, 1690-1693.La maison de Caen tombe dans la misere, aussi bien materielleque spirituelle; le prieur Jean de Santussans ne s'en doutait pastellement tandis qu'il etait a Toulouse, aussi est-il heureux de quitter le couvent des la fin de son mandat. Le frere Durand faittoujours parler de lui et le prieur a des ennuis tres serieux avec deuxautres de ses religieux ; les pages 34 et 35 du Livre des Visites ontete collees et au debut de la page suivante il est possible de lire avecbeaucoup de difficultes : ...aceordons la grace de crime de rebellionaux ... (ratures recouvertes d'encre), laquelle Us m'ont demandeeen toute humilite et repentance, 7 novembre 1690.Les Croisiers n'arrivent plus a payer les impots de leurs maisonset terres ; en 1690 ils sont obliges d'emprunter 1.800 livres au marquis de Rabodange et Anne de la Riviere son epouse, et de vendre


MISERES ET DECADENCE 95186 livres 11 sols une demie acre a Bavent; le 4 fevrier le chapitrerenonce a une donation de Laurent Varin, sieur des Courts, car elleentrainerait de trop grands frais. La taxe imposee par le Roi surles amortissements et acquets se monte a 2.284 livres 2 deniers pour1690, et comme il n'y a plus d'argent, les religieux font amortir unerente de cinq livres due par un sieur Vigor et vendent une autredemie acre a Baron en decembre.Le 3 avril 1691 nouvel amortissement d'une rente de cinq livresdue par maitre Florent de Bonnefoy. La taxe du Roi pour 1692 semonte a 3.395 livres 3 sols 6 deniers ; apres supplication de Sainte-Croix elle est reduite a 3.018 livres, neanmoins il est necessaire defaire amortir au debut de 1693 les rentes suivantes : sept boisseauxde froment, des sieurs de Malherbe a Epron; six boisseaux, dixoeufs et une poule sur Nicolas Helie ; deux boisseaux sur les heritiersde maitre Jean Le Courtois ; trois sur madame Saint-Laurent-Cardonville ; deux sur Colleville Le Sieur et un sur le sieur duDesert, vicaire.Le 8 mars 1690 est nomme procureur frere Eleazar Helie, puisen septembre Francois Le Vavasseur, de retour des Flottes royales.Visite canonique le 15 septembre par Pierre Dagneaux, assiste deClaude Boivin, futur provincial : suppression du lecteur au refectoiretout en gardant le silence ; interdiction de jouer de la musiquepour son usage personnel en dehors des temps de recreation ou desilence ; refection au plus tot du mur du jar din, une breche donnantsur des maisons de particuliers, reparation qui ne convient pas a nosCroisiers.En presence de Jean Bonnet, prieur titulaire du prieure saintThomas et Antoine, chanoine augustin de la Maison-Dieu et deFrancois Estival, superieur des Pretres de l'Oratoire, freres FrancoisLe Vavasseur, Francois Helie, Pierre Durand et Jean-FrangoisHebert elisent pour prieur le 25 fevrier 1693 Claude Boivin ducouvent de Paris. C'est trop d'honneur faire a quelqu'un au courantde la situation de Caen : cette dignite ne peut l'interesser ; est elule 4 mars Julien Marchis, autre religieux de Paris avec prise depossession le 21.


96 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAEN36me Prieur : JULIEN MARCHIS, 1693-1696.Julien Marchis a du plus d'une fois se mordre les doigts de1'acceptation d'une telle charge : ses religieux ne sont pas ce qu'ilen attendait, en particulier le frere Pierre Durand. Sous le prioratprecedent celui-ci avait pu le 25 fevrier 1690 se faire absoudre detoutes ses censures et irregularites sur appel au Pape AlexandreVIII (1689-1691), mais le 3 octobre 1691 dans un acces de colereavait battu a I'extreme detriment de sa sante Pierre Magon, clerc dela sacristie, et cela dans le jardin de la communaute face a un grandnombre de personnes accourues aux fenetres ; le frere Le Vavasseuravait trouve chez lui le malade ayant la fievre et les reins fortmeurtris et fort noirs des coups de baton pliant. Le frere Durandavait regu au chapitre la correction par tous ses confreres, ete condamne a ne plus celebrer la messe jusqu'a nouvel ordre, jete pendant trois mois dans la prison de la communaute et condamne ajeuner au pain et a Veau tous les vendredis psques a Ventiere etparfaite guerison du maltraite.Et voici que le lundi 17 aout 1693 Jean Guilbert, licencie auxdroits, cure et archipretre de Notre-Dame, official de Bayeux ausiege de Caen, ramene au couvent le frere pris la veille en flagrantdelit par des soldats alors qu'il etait dans une ecurie avec une fillede mauvaise vie. En attendant les decisions du Provincial mis aucourant de Venormite du crime le frere Durand est emprisonnedans sa chambre ou il fait le tapage la nuit suivante, sort par lafenetre tout ce qui lui tombe sous les mains y compris les meubleset la literie, puis s'evade. Parmi toutes sortes de choses ses confreresretrouvent a minuit au pied du mur un dessus de viole et son violon.Le frere est condamne le 19 aout a demeurer trois mois dans laprison conventuelle, a y jeuner trois jours par semaine et a perdresa voix au chapitre pour trois ans. De chez son frere a Vaucelles,le frere Durand envoie une lettre a son prieur implorant les sentiments de compassion, de misericorde et de charite de ses confreres,n'ayant nullement l'intention d'apostasier et tres etonne de leurrigueur et severite, pret a recevoir de son provincial une nouvelleobedience. Le 29 aout Francois du Sausson, prieur de Chauny, a re^u1'ordre de son provincial de se rendre immediatement a Caen poury prendre livraison du frere rebelle transfere a Chauny moyennantune pension annuelle de deux cents livres versee par Caen. Jean-


MISERES ET DECADENCE 97Francois Ruffin, provincial, ecrit le 7 fevrier 1695 au prieur deCaen pour lui dire qu'il eut souhaite que sa maison ait aussi verseune pension au frere Jean-Claude Patu, ancien prieur, en souvenirque ]e conserve de toutes les honnetetes que fat regues de votremaison, sauf en bien.Le provincial visite la maison de Caen fin juillet 1695, assiste defrere Claude-Antoine Beaudoin ; le lr aout il rappelle la meditationa faire chaque matin avant Prime, demande la lecture du martyrologe,de veiller chaque semaine a la lumiere devant le Saint-Sacrement,exige la fermeture des portes, interdit la reception de seculiersa table, reitere Tordre de reparer le mur du jardin.Pour le malheur du prieure Julien Marchis admet deux nouveauxmembres dans sa communaute : Jacques du Chemin, profes le lrjuillet 1694 ; Pierre-Charles Got de la Roziere, profes le 14 fevrier1695, decede a la maison Saint-Georges de Bretagne le 6 novembre1721.Au debut de l'annee 1696, en plus du prieur, le couvent de Caense compose de Eleazar et Francois Helie, Jean Essiliard, convers, etdes deux profes que nous venons de rencontrer tout a l'heure. Leprovincial n'attend pas une nouvelle election et nomme prieur le25 Janvier Pierre Le Beau, docteur en Sorbonne, du couvent deParis ; prise de possession le 3 fevrier.37me Prieur . pierre LE BEAU, 1696-1698.Le lr mai 1697 le frere Beaumont, pretre et profes de la maisondu Verger, demande a venir demeurer en la communaute de Caen,en echange du frere Got de la Roziere, envoye pour trois ans parson provincial a Toulouse le 15 aout precedent; le chapitre acceptel'echange pour une duree de vingt et un mois, mais le frere Beaumont s? entretiendra a ses frais et depens comme ledit frere de laRoziere s'y est oblige dans le contrat de pension passe a Caen- le23 juillet 1696 ; ce dernier est transfere au Verger ou son passageest de courte duree.Les feuillets 47 et 48 du Registre de Visites ont ete coupes surTordre du provincial Pierre Dagneaux, prieur du couvent de Paris ;en bas de la page 46 verso se lit l'extrait d'une lettre de ce dernierau prieur de Caen : Nous avons appris avec douleur la... (feuilletscoupes). Les pages suivantes eclairent un scandale que le provincial


98 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENavait voulu cacher a la posterite : le 23 juin 1698, veille de la saintJean-Baptiste, le frere de la Roziere a passe la soiree dans une maisonparticuliere, il en sort a minuit pour etre poursuivi dans lesrues par une troupe d'academistes a demi-ivres, Tepee a la mainet sur le point de le tuer a la suite d'une sortie quelque peu scandaleuse: le hasard d'une porte ouverte favorise sa retraite et empechele pire. Telle est la cause de la demission volontaire de Pierre LeBeau le 23 juillet 1698 avant expiration de son triennat. Le provincial accompagne de Jean-Frangois Ruffin, ancien prieur, fait defrequentes et longues incursions au prieure pour y remettre de l'ordreaussi bien en 1697 qu'en 1698 et nommer procureur de lamaison Jacques du Chemin, pretre, le 23 avril 1698.Pierre Le Beau quitte Caen pour devenir cure quelque part enNormandie : il revient au prieure en novembre 1699 avec l'un deses paroissiens qu'il voudrait faire entrer dans l'ordre de Sainte-Croix et dont la vocation est de courte duree.Nouveau mandat de ]ean>-Claude Patu, 1698-1702. Profes etancien prieur de la maison, presentement au couvent de Buzangais,Jean-Claude Patu a deja beaucoup souffert des religieux caennais ;les dernieres annees de sa vie sont assombries par de nouvellesepreuves, le prieure est devenu ingouvernable.Depuis qu'il est procureur, Jacques du Chemin sort en ville lesoir en cachette du prieur et revient a des heures impossibles ; le12 Janvier 1699, Jean-Claude Patu excede va chercher son procureuren ville ; le religieux refuse de revenir a son couvent; de retourle lendemain a huit heures, il injurie son prieur qui lui interdit decelebrer la messe en de si mauvaises indispositions. II le fait cependantet s'entend signifier une sentence d'interdit et de suspense.Pierre Dagneaux, provincial, passe deux mois au prieure de juina aout 1699 : le dimanche de la Trinite il declare nouveaux conventuelsles freres Frangois Carnot, nomme sous-prieur, Theodore-Frangois Fauvel et Claude Beaudoin, ce dernier sacristain, en provenance de diverses maisons et charges de donner le bon exemple.Le 27 juin le frere du Chemin refuse de donner ses comptes auprovincial ; nouvelle sommation le 10 juillet en presence du frereFeydeau, prieur de Saint-Ursin, sous peine d'excommunication. IIest necessaire de forcer les tiroirs du religieux, ne s'y trouvent que16 livres 3 sols et 6 deniers, car l'argent de la communaute est en


MISERES ET DECADENCE 99depot chez divers particuliers. Le provincial s'empare comme cautiondes manteaux et surplis neufs du recalcitrant et lui demande deprendre I'esprit de religion, d'obeissance et de soumission.En reponse a ces conseils l'ancien procureur se pourvoit aussitotdevant l'eveque de Bayeux et son officialite qui le 12 juillet ordonnentau provincial et au prieur de rendre habits, robes et breviaireavec interdiction de ne prononcer aucunes censures de suspens, interditou excommunication. Nous allons nous trouver en face d'unconflit de juridictions, en effet les Papes et le Concile de Trenteont confirme envers Sainte-Croix qu'il est interdit a ses religieuxsous peine d'excommunication de se pourvoir hors de la juridictiondudit Ordre a d}autres superieurs ecclesiastiques ou seculiers. Leprovincial enjoint le 15 juillet au prieur de ne pas reconnaitre lajuridiction de l'officialite de Bayeux sous peine d'excommunicationipso facto et suppression immediate de sa charge, suspend le freredu Chemin de tous ses ordres, de plus excommunie ipso facto s'ilne vient pas entendre sa sentence dans les vingt-quatre heures.Le 6 aout condamnation definitive du frere du Chemin, convaincude mauvaise conduite, rebellion, manque de respect, sorties furtiveset nocturnes, d'impiete a cause de la profanation du Saint-Sacrificede la Messe indignement celebre, refus de presenter ses comptes,recel et vol contre la communaute, de requete presentee a l'officialitede Bayeux, de machinations pour la destruction de la maisonet la cessation du service divin dans l'eglise du couvent, d'apostasieet de vie scandaleuse dans une maison seculiere, etc... encourt toutesles censures ecclesiastiques ; il est condamne a trois ans de prison,les trois premiers mois dam le lieu de force et de correction ou ilrestera en plus autant de jours et de mois qu'il n'aura pas reintegreson couvent; jeunera tous les mercredis et vendredis au pain et aTeau et comparaitra ces memes jours au chapitre pour y recevoirla correction et reciter les sept psaumes de la penitence ; au boutdes trois mois sera enferme jusqu'a la fin des trois ans dans unautre couvent, et s'il en sort terminera sa peine dans le lieu de forceet de correction ; prive de voix active ou passive jusqu'a la fin deses jours. Fait a Caen le 6 aout 1699 ; signe : Dagneaux, Beaudoin.Le 30 juin precedent evasion du frere Charles-Pierre Got de laRoziere, sorti par l'eglise en juste-au-corps noir avec deux couver-


100 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENtures et un matelas en vue de certaines libertes. La sentence estportee le 29 juillet: convaintu d'exces et violences contre ses prieurs,de desobeissances formelles et de machination contre Vautorite deses superieurs, d'impiete et de derision des choses saintes et du service divin, mepris des sacrements, apostasie, fuites frequentes etfurtives, falsification de la signature et sceau des superieurs, d'intrusiondans Vordre sacre du sous-diaconat et de scandales causespar ses exces et incorrigibilites, il gardera la prison pendant troisans, les six premiers mois dans le lieu de force et de correction ouil jeunera deux fois la semaine dont Tune au pain et a Feau, avecrecitation des psaumes de la penitence ; prive de voix active pendantdouze ans ; interdit et suspens de son ordre de sous-diacre pendantdeux ans ; au bout de six mois recevra une nouvelle obedience desix ans et s'il refus, estera six ans en prison et avant d'y entrer seraamene au chapitre ^diir y recevoir la discipline sur les epaules nues,y avouer ses fautes, en demander pardon a Dieu, a VOrdre, auxsuperieurs et a la communaute, y retracter les calomnies par luimalencontreusement avancees contre Vhonneur dudit prieur.Le 12 septembre 1699, le frere Mathieu Deschamps, cure duprieure-cure de Marcille-la-Ville (Mayenne) depuis le 13 mai 1679,mais la plupart du temps en residence au couvent de Toulouse,vient voir le frere de la Roziere pour le ramener a de meilleurssentiments. Au bout d'un quart d'heure d'entrevue, le prisonnierfeint d'adherer aux charitables remontrances qui lui sont adresseeset alors que le prieur le transfere dans sa chambre, il en profitepour s'enfuir en ville sans autre vetement que sa robe et bonnet denuit, tenant a la main une buche pour la decharger sur la tete dequi voudrait l'arreter.Le frere Pierre Durand, malgre toutes ses suspenses et excommunications a pu obtenir le prieure-cure de Saint-Silville de Beaulieu,au diocese de Tours, a une quarantaine de kilometres du prieurede Buzangais. De passage a Caen en mai 1702 frere Durand estviolemment frappe par frere Got de la Roziere ; ce dernier re^oitensuite deux soufflets qui le marquent jusqu'au sang. Le 5 juinconseil de justice a Sainte-Croix en presence du nouveau prieur dulieu frere Jacques-Henri Contet, du R.P. Dom Richard Thibault,prieur de Tabbaye Saint-Etienne, du P. Andre de Corsin, prieur des


MISERES ET DECADENCE 101Carmes, de dom Jean Langlois, religieux de Saint-Etienne et dufrere Eleazar Helie ; verdict pour tous les deux : l'excommunication.Transfere a Saint-Georges en Bretagne par ordre du provincial,le frere Got de la Roziere n'y demeure que onze mois ; de retoura Caen le 19 novembre 1704 son prieur se demande bien ce qu'ilpeut en faire. L'eveque de Saint-Malo l'a renvoye a cause de samauvaise conduite dans un cabaret de Dinan, ayant bu au coursd'octobre toute la nuit chez Duroun ; sur son ordre des violons ontete amenes, il a danse et ote ses habits et fait meme quelque chosede pis, selon les termes de la lettre episcopale. Le provincial Ruffinle suspend de tous ses ordres sacres le 27 novembre, le condamnea la prison conventuelle avec jeune au pain et a l'eau chaque mercrediet vendredi et au depouillement du scapulaire.Les Croisiers connaissent aussi des difficultes sur le plan temporel:en Janvier 1699 fin d'un proces avec Gillette Vaultier, bourgeois de la ville, pour une rente de sept livres qu'il ne leur a rembourseeque 115 livres au lieu de 140 ; en aout, a la suite des detournementsdu frere du Chemin, le prieur se trouve dans rimpossibilitede faire subsister la communaute accablee de dettes et sans provisions ; le 18 du meme mois un arret du bailliage de Caen condamneles religieux a payer le dixieme denier de toutes leurs rentes seigneurialesau profit du sieur Le Bel, seigneur de Baron et de Courmonville: les freres decident d'en appeler au Parlement.En plein orage des condamnations infligees aux freres du Cheminet de la Roziere deux fils de famille de la ville prennent l'habit :Francois Fortin, frere de Jean-Jacques, ecuyer, et Pierre-Samuel Vielde la Grand'Rue, fils de Charles Viel, sieur de la Grand'Rue, assesseuret ancien eschevin du Chastel de Ville dudit Caen ; Tun etTautre quittent avant la fin du noviciat. La seule profession reguele 22 septembre 1701 par le prieur Patu est celle de Francois DuvalAuguste, fils d'Auguste, ecuyer et de demoiselle Elisabeth de Vallee; le frere decedera le 4 Janvier 1732 au couvent de Paris.38rae Prieur : JACQUES-HENRI CONTET, 1702-1703.A la suite de la mort de Jean-Claude Patu le 21 mars 1702, frereClaude Boivin, prieur de Paris et provincial, nomme prieur a Caen


102 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENfrere Jacques-Henri Contet, du couvent parisien, docteur en theologiede la Faculte de Paris, grand predicateur de la parole de Dieu.Recevant a profession le 8 mai 1702 Jean Rouquant, futur prieur,il a bientot fait de comprendre dans quel guepier il est tombe;Tingratitude de ses confreres lui fait demander sans cesse sa demission, enfin acceptee en Janvier 1703.Au cours de sa visite en juin 1702 le provincial, assiste de GabrielLe Cceur comme assesseur et futur prieur, rappelle avec vehemenceaux religieux la pratique de la charite, l'obeissance, le silence,l'abstinence, la pauvrete et de la chastete en se servant de nombreuxpassages des ecrits de saint Augustin.Les religieux imposes en 1699 en vue de donner un sang nouveauau prieure ne sont plus la, et au cours de son bref mandat le nouveau prieur s adjoint comme sous-prieur, Frangois du Sausson, ancienprieur de Chauny ; le seul frere conventuel est Jean Rouquant.Des reparations urgentes, pressantes et necessaires obligent JacquesContet a accepter le 19 octobre une somme de mille livres, uniquementpour faire plaisir au convent, de Charles Amey, avocat au bailliagede Caen, sieur et patron du Buisson, a charge par les Croisiersde verser une rente de 55 livres 11 sols et un denier aux damesbenedictines de la ville6.39rae Prieur : NICOLAS-FRANCOIS DE PERTHUY, 1703.Le provincial espere que le nouveau prieur en provenance de lamaison de Chauny refera Tunion des coeurs a Caen, de tous cesreligieux qui participent a l'union du pain eucharistique et au memecalice, est-il dit dans la lettre de nomination, mais Nicolas-Frangoisde Perthuy donne deja sa demission au bout de six mois.40 Prieur : JEAN-CLAUDE DE SONNING, 1703-1713.Depuis fort longtemps Jean-Claude de Sonning, religieux profesde la maison de Paris, licencie en droit de TUniversite, attendaitpareille nomination datee du 20 septembre. II se presente le 2 octobre muni d'une lettre patente en compagnie du R. P. Leonor de• Arch, du Calvados, D 638.


MISERES ET DECADENCE 103Saint-Nicolas, ex-provincial et prieur des Peres Carmes, et du P.Norbert de Saint-Etienne, definiteur de 1'Ordre et sous-prieur : lesquelques religieux presents a Sainte-Croix protestent aussitot de toutesleurs forces contre pareille nomination.Le prieur trouve a son arrivee plus de 3.300 livres de dettes;grace a la pension qu'il regoit de sa famille elles sont comblees enmoins de trois ans. S'occupant activement des baux et des rentes, leprieure redevient prospere sur le plan materiel; grace a ses relationsavec l'elite de la ville, les novices arrivent en nombre : aucun prieui4ne recevra plus jamais autant de professions:Louis de Creil, fils d'un controleur de la maison du Roi, 16 decembre1708, en presence de Thomas du Moutier, ecuyer, seigneurde Canisy, conseiller honoraire au Parlement de Normandie, lieutenant general au bailliage et siege presidial de Caen, et de Gervaisde Prepetit, ecuyer, seigneur de Cahan, conseiller-procureur du Roiaudit bailliage. Le frere de Creil avait fait une premiere experiencede noviciat en 1706, puis s'etait enfui. Son frere, Jacques de Creilprend l'habit le 9 mars 1710, mais ne continue pas comme uncertain nombre d'autres novices. Conventuel de Caen, Louis deCreil y meurt en mai 1739.Pierre-Samuel Viel de la Grand'Rue, 15 aout 1709, en presencedes hauts dignitaires du bailliage de Caen, futur prieur.Jean-Baptiste Bourbet, 9 mars 1710, apres un premier noviciatmanque, futur prieur.Michel de la Porte, 15 Janvier 1711, en presence de messireAntoine Jehanne, cure de Saint-Vandrille ; messire Gilles le Coq,ecuyer, avocat au presidial de Caen, conseiller du Roi, son professeuren l'Universite de Caen ; maitre Laurent Lamy, avocat; maitreJean-Frangois Le Couet, medecin professeur en l'Universite... Conventuel, puis procureur du couvent, le samedi 19 mat mil sept centcinquante trois a dix heures du soir est decede Michel de la Porte,pretre, age de 78 an\s et demi, 42 de profession et 38 de pretrise, eta ete enterre le lendemain au has des marches du sanctuaire, a droiteproche la balustrade de la chapelle de la Sainte-Vierge.Pierre Piedavant, 3 mars 1711, en presence de nombreux docteurset professeurs en l'Universite et avocats de la ville. Conventuel,puis procureur en 1714, il meurt le 12 fevrier 1727.


104 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENPierre Pussey, 1712, en presence de messire Pierre de Braglongne,president de Bretagne et Antoine de Fresnel, ecuyer, sieur de Saint-Ouen. Decede le 4 mai 1735, conventuel de Caen.Le 23 mars 1704, jour de Paques, le prieur officie et avec leconsentement du provincial commence a chanter le Detts in adjutorium,l'intonation et la finale des psaumes, les versets, l'epitre etl'evangile selon le chant romain, et la preface selon le chant parisien,conformement aux nouvelles directives liturgiques du diocesede Bayeux. A partir de ce jour est porte le baton de chantre desfetes.Le 16 juillet 1705 le provincial et vicaire general Ruffin transmetau frere Pierre Dagneaux tout pouvoir pour faire en sa place lavisite canonique de quelques couvents de France, avec charge d'yretablir la discipline et de nommer des prieurs. Le visiteur se trouvea Caen le 13 decembre suivant, y ecoute les religieux en general eten particulier ; les remarques qu'il y fait ont un certain interet:Les marines ne peuvent plus se celebrer la nuit a cause du troppetit nombre de religieux ; les jeunes religieux communieront seulementtous les quinze jours, de preference a la grand'messe celebreepar le prieur, tandis qu'ils devront entendre la sainte messe chaquematin avant de dejeuner ; la recreation durera une heure apres lesrepas de midi et du soir, dans le jardin et jamais dans les chambres ;naturellement interdictions reiterees au sujet du monde feminin oudes repas en ville sous quelque pretexte que ce soit.Le prieur veillera a ce que chaque religieux ait une part egaleau refectoire, chacun se contentant de sa portion sans murmurer ;seuls les pretres seront admis a la grande table du prieur, les autresreligieux meme diacres a la petite. Le predecesseur avait etabli unetable ronde et detruit ce qui etait auparavant: nous defendons souspeine d'excommunication ipso facto a aucun prieur de le detruireet de remettre les religieux en table ronde.Trois feux seulement dans le couvent: celui de la cuisine uniquementpour cet usage ; celui de la salle commune allume apres Matines; celui de la chambre du prieur ou les religieux seront regushonnetement, et pour ce dernier sera employe seulement un cent debuches ou un cent de cotterets7, Tun et l'autre pris sur les quais.7 Cotterets ; recipients contenant du bois pret a bruler.


PLAN DU COUVANT EN 1772Arch, du Calvados D583(gHH La partie que se reserve le prieur Yvelin.1 Les batiments ced6s a l'Universite de Caen£££


Prieure de Caen 1965. Rue des Croisiers. Ancienne maisonlivree par les Croisiers au sieur Pissot de la Couture.


MISERES ET DECADENCE 107Les religieux se plaignent de ne pas etre assez bien habilles. Levisiteur enjoint au prieur de fournir en trois ans a partir du lr Janvier 1706, une robe de serge de Londres blanche, et un chaperon etscapulaire de serge de Londres noire, observant que la Croix sort deserge blanche et rouge, et le collet blanc et le scapulaire au moinsd'un demi-tiers de largeur, un chapeau de laine en trois ans du prixde quatre livres, une paire de bas chaque annee de laine blanche ounoire du prix de trois livres, une culotte et une chemisette en troisans de serge de Saint-L6 blanche sans pouvoir en demander d'uneautre etoffe ou d'une autre couleur, quatre paires de souliers dontchacune ne pourra etre ressemelee que deux fois et une paire depantoufles ; en trois ans, six chemises de toile de chanvre, dix-huitpaires de chaussons, six mouchoirs, dix-huit rabats et six coiffes denuit; tous les ans, une culotte de drap et une ceinture, six livresde chandelle pour les pretres et quatre pour les autres religieux ; unbonnet carre par trois ans ; des plumes d'oie, du papier et de l'encre,chacun selon son usage. Si le prieur est de la maison, ses depensesvestimentaires seront celles de ses religieux ; s'il vient d'ailleursclles ne pourront exceder 60 livres par an.Le frere Helie de Souderne (Eleazar Helie) a l'occasion de sesnoces d'or de profession a droit d'autorite sur tous les religieux en1'absence du prieur et a droit desormais a une rente speciale de dixlivres jusqu'a son deces.Trois mois apres cette visite canonique Jean-Claude de Sonningest demis d'office de sa charge par le provincial avec retour a Paris :il ne remet pas la discipline avec assez de vigueur ; les religieux, asavoir Eleazar Helie, sous-prieur, frere Rouquant, frere Duval, religieux de choeur, frere Fran^ois-Etienne Vaudry, clerc profes de Bu-^angais et frere de Creil, novice, le reclament avec tant d'insistancequ'il revient en fonctions le 29 mars 1706, installe par Richard deSaint-Nicolas, prieur des Carmes et Jacques-Antonin Jumelet, prieurdes Jacobins.Le prieur de Caen est present au chapitre provincial tenu a Parisle 18 avril, second dimanche apres Paques, pour Telection du provincial Claude Boivin. En septembre, le prieur n'est plus admis parses subordonnes et se declare pret le 2 octobre a donner sa demissionne tenant pas a etre expose a leurs insultes et mauvais traitements


108 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENcomme tous ses predecesseurs obliges de quitter avant la fin de leurmandat; il est pret a alter vivre tranquillement dans notre maisonde Ste-Croix de la Bretonnerie a Paris ou Von a bien voulu m'admettrepour y vivre et y mourir.Le 4 octobre tous les religieux ecrivent une lettre commune auprovincial l'engageant a venir rapidement mettre un peu d'ordre,ce qu'il refuse deleguant le prieur des benedictins de Saint-Etienneaussitot declare persona non grata par les freres de Sainte-Croix.A la suite de cette affaire le frere Francois Duval Auguste estenvoye le 23 novembre a Saint-Ursin avec six livres pour son viatiqueet port de paquet; ce dernier est assez volumineux : sa chape etgrand chaperon de choeur, deux rochets, deux surplis, une aumusse(fourrure que portent au bras les chanoines), un bonnet carre, unmanteau long et beaucoup d'autres habits qu'il s'engage a remenera Caen quand il y reviendra ; Caen paie cent livres annuelles poursa pension alimentaire a Saint-Ursin. Frere Duval est de retour aCaen en juin 1707 ; le prieur, pour eviter absence si courte a l'ave~nir, l'envoie le 20 au couvent de Toulouse ou il arrive debut aout,apres abandon d'une partie de son linge chez l'abbe du Ronceray,chanoine du Saint-Sepulchre. Quelques mois plus tot le frere de laRoziere s'est egalement vu ecarter de Caen.En septembre 1707 les deux seuls Croisiers presents au couventsont le prieur et le frere Rouquant, et pas pour longtemps car cedernier sous pretexte d'aller se promener a l'abbaye de Fontenay^prend le 19 septembre le chemin de Paris sur ordre secret de sonprovincial. En decembre Jean-Claude de Sonning se voit oblige derecruter divers pretres de la ville pour acquitter les messes de fondations,alors que quatre novices entrent au couvent qu'ils vontd'ailleurs bientot quitter.Chose curieuse, et comprehensible pour qui connait la vie duprieur, il engage le 24 decembre 1706 un certain Monsieur Le Rouxqu'il tire de 1'orgue de l'abbaye Saint-Etienne pour tenir celles del'eglise des Croisiers ; ses honoraires sont de 60 livres. Le contratnous donne une idee des fetes celebrees solennellement au prieureet des horaires des offices : grand'messe a 10 heures; vepres a 2heures et Complies a 5 heures de l'apres-midi. Fetes mobiles : Jeudisaint,Samedi-saint, Paques et deux jours suivants, Quasimodo,


MISERES ET DECADENCE 109Ascension, Pentecote et deux jours suivants, Trinite, Jour du Saint-Sacrement et dimanche de la Fete-Dieu ; fetes fixes : Circoncision,Epiphanie, Purification, Saint-Joseph, Annonciation, Saint Marc etles Rogations, Sainte-Croix en mai et les trois jours suivants (3mai), Saint Jean-Baptiste, Saint Pierre et Paul, le dimanche le pluspres de la Saint Clair et Sainte Odile en juillet, Assomption, SaintAugustin (28 aout), Nativite de la Sainte Vierge, Exaltation de laSainte-Croix (14 septembre), second dimanche d'octobre, Toussaint,Conception de la Vierge (8 decembre), Noel et deux jours suivants,toutes les fetes d'Apotres.Le provincial Claude Boivin au cours de sa visite du 2 juillet 1708donne un certain nombre de regies pour les ...religieux futurs. Enmars 1709 Jean-Claude de Sonning est confirme dans un troisiememandat; freres de la Roziere et Duval sont de retour ; a Paques,frere Jean Rouquant est pourvu du prieure-cure de Courvaudon, aune trentaine de kilometres au sud-ouest de Caen, pres d'Aunaysur-Odon.Dans la nuit du 30 aout 1709 frere Francois Duval Augustes'enfuit de la maison ; de retour seulement le 19 juillet 1711 lors dela visite du provincial, a la suite d'une entrevue avec ce dernier, ilse remet a vagabonder pendant deux jours dans la ville. Place dansla prison claustrale le 21 au soir, il y fait tant de tapage que lesreligieux ne peuvent dormir ; ayant en partie perce le mur, le provincial le fait transferer dans une piece haute ou Ton place desgrilles de fer a la fenetre, et si besoin est ordre est de le livrer aubras seedier. Le frere a toujours fait scandale partout ou il estpasse, aussi bien a Saint-Ursin, Toulouse, Paris, Varennes que lorsqu'ilest alle passer quelques mois de penitence publique chez lesMissionnaires de la Delivrande ou chez les Cordeliers de Bayeux.Le frere Got de la Roziere apres une violente scene d'injures etde coups portes sur son prieur s'enfuit a son tour chez ses parentsa Seez le 3 avril 1710. De retour seulement le 27 mars 1711, ils'entend signifier une sentence d'interdit avec recours a Rome avantd'etre jete dans une chambre forte sans contact avec qui que ce soit,au jeune et a Feau. Le frere Thomas-Pierre Poulain de Vallee,diacre du couvent de Saint-Ursin, sujet egalement impossible, arrivede Paris le 24 fevrier 1710 ; le 31 mai suivant il faut d6ja le renvoyera Saint-Ursin.


110 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENNos religieux etant fort incommodes par le poisson, le prieurobtient du provincial le 15 novembre 1709 dispense de jeune etd'abstinence les dimanches, mardi et jeudis de TAvent qui vient.Sur le plan materiel est consenti le 17 aout 1706 un bail de sixans d'une maison a un marchand d'eau-de-vie nomme de Launay.Le 6 decembre, les Croisiers sont condamnes par l'lntendent a payerune taxe de 31 livres 10 sols pour le contrat d'amortissement de laconfrerie des maitres tourneurs de la ville ; les maitres, representespar Jean Menard, Alexandre Salles, Nicolas Prendpin et Pierre LeCerf offrent seize livres en paiement de la taxe, en revanche lesreligieux celebreront gratuitement l'office de Saint-Joseph en 1707et 1708 et pendant ces memes annees les messes specifiees dans lecontrat avec la confrerie.Le prieure s'enrichit d'une seconde cloche :Aujourd'huy jeudy saize fevrier mil sept cents traize sur les cinq heures d'aprdsmidyla seconde cloche de notre Eglise a este benitte par le R. P. Jean-Claude deSonning, prieur de cette maison et nommee Franc.oise-Elisabeth-Therese par MessireFrancois Guynet, seigneur d'Artel et autres lieux, intendant de la Ge*neralite de Caen,et Madame Elisabeth-Therese de Croismare, epouse de messire Hercule de Vauclin,seigneur et patron de Hermanville, parin et marinne avec les ceremonies accoutumees.Cest la derniere grande action du prieur qui au bout de dix ansa reussi a remplir son couvent d'une dizaine de religieux la pluparttres jeunes ; prieur depuis 10 ans et trois mots, malade depuis avril,et aussi en vue de la tranquillite de la Maison, il donne sa demissionofficielle le 28 decembre 1713 et le meme jour ses confreres elisentJean-Baptiste Rouquant, le cure de Courvaudon, pour regir le couvent en qualite de vice-gerant. Frere Robert Ancelin, provincial etvicaire general, le confirme dans la charge de prieur le 8 Janvier1714.Debarrasses de leur ancien prieur, les freres de Sainte-Croix semettent a parler : les plaintes fusent de toutes parts au sujet de sesmanieres violentes et de ses emportements. II passait de frequentesnuits dans une maison particuliere y allant en habit seculier avecune longue perruque relevee sous le chapeau ; parfois il etait rencontre ivre en ville.Depuis des annees il recevait dans sa chambre plusieurs jours desuite des personnes de sexe auxquelles il portait de la nourriture en


MISERES ET DECADENCE 111cachette. L'avant-veille de Noel il a ete pris en flagrant delit danssa chambre par ses religieux, avec la femme de l'organiste, et sommede donner immediatement sa demission. Nous faisons grace desdetails des diverses depositions des religieux, rappelant qu'il y atout aussi bien accord parfait entre lui et la marraine de la cloche,chez laquelle il se retire en attendant de prendre le carrosse pourParis le 16 Janvier 1714. Les freres de Caen exigent pres du provincial les peines les plus severes envers l'ancien prieur. Le lr fevrieril est declare suspens et interdit jusqu'a Paques 1715, envoy6 enpenitence a la maison de Buzangais, mis dans le lieu de correctionpour trois mois et en claustration les deux annees suivantes, condamnea jeuner tous les vendredis au pain et a l'eau, oblige dereciter tous les jours a genoux et la tete nue les psaumes de lapenitence. II devra rester six ans a Buzangais et ne jamais adresserla parole a une femme sans une permission expresse de son prieur.4lme Prieur : JEAN-BAPTISTE ROUQUANT, 1714.Jean-Baptiste Rouquant surveille de loin la marche de la communautede Caen qu'il visite parfois, mais se sent plus heureux en sonpresbytere de Courvaudon avec moins d'ingratitude du cote de sesparoissiens. Le 20 Janvier Pierre-Samuel Viel de la Grand'Rue, toutjeune pretre de 25 ans, venant tout juste de sortir de l'Universite ouil a conquis ses grades le 21 fevrier precedent tandis qu'il etaitencore diacre, est nomme procureur, puis sous-prieur en juin lorsde la visite canonique de Robert Ancelin assiste de Pierre Dagneaux.Le frere Piedavant devient alors procureur. Le Provincial a surtoutrecommande dans sa visite de ne pas sortir en ville et surtout de nepas y diner ou passer la nuit.Sous-prieur n'est pas assez pour Pierre-Samuel Viel: le 12 aoutil enjoint a Jean Rouquant de faire immediatement acte de residence, faute de quoi la charge de prieur sera consideree vacante ; deuxjours plus tard, Pierre-Samuel Viel de la Grand'Rue elu prieur parses confreres pose les scelles sur la chambre du predecesseur a qui ilordonne de ramener de suite ce qu'il possede en son presbytere.Jean-Baptiste Rouquant conteste l'election et biffe tous les actesdu successeur illegitime ; en definitive le 19 septembre le provincialratifie le choix du frere de la Grand'Rue et Jean Rouquant estoblige d'abdiquer.


112 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAEN42 Prieur : PIERRE-SAMUEL VIEL DE LA GRAND'RUE,1714-1720.Des le 19 novembre les religieux declarent vouloir recevoir enargent et non plus en nature leur entretien dans la maison : le prieurrecevra soixante livres et les freres quarante. Ces messieurs s'intitulentdesormais Dom Pierre-Samuel Viel de la Grand'Rue, DomPierre-Charles Got de la Roziere, Dom Louis de Creil, Dom Francois du Val Auguste : les trois derniers ont commis un tel scandaledans leur eglise au cours des premieres Vepres de Noel qu'ils sontdeclares suspens de tous leurs ordres par le provincial. Le lr octobre1715, Michel de la Porte remplace Pierre Piedavant dans la fonctionde procureur, charge qu'occupe en 1717 Frangois de Saint-Michel,sous-diacre, profes de juin 1716.En mars 1716 le provincial Claude Boivin a tellement honte dese presenter dans une maison cause de tant de scandales en villequ'il charge Jean Rouquant toujours prieur-cure de Saint-Martin deCourvaudon de pratiquer la visite canonique a sa place, assiste dePierre-Thomas de Saint-Joseph, sous-prieur des Carmes et d'Ignacede Saint-Alexis, maitre des novices et ancien prieur du meme couvent.Sont annules les actes pris par le prieur, en particulier celui du19 novembre 1714, et ces messieurs regoivent l'interdiction de bienboire ou manger dans leurs chambres, et de s'intituler Dom alorsqu'ils ne sont que freres de Sainte-Croix.Le 31 decembre 1716 les Croisiers acceptent la supplication duReverend Pere de la Bourdonnaye, grand predicateur et confesseurdu couvent Saint-Frangois de Rennes, religieux Cordelier de lagrande province de Touraine, desireux de revetir l'habit de Sainte-Croix, a condition qu'il en obtienne permission du Pape et de sonprovincial; ce desk n'a pas eu de suite.En avril 1717 frere Boivin, de passage a Caen, remarque que lesabus pullulent dans la maison, en particulier en ce qui concerne lessorties en ville, le vetement, la nourriture, la boisson et c'est avecdouleur (cum dolore) qu'il ecoute tous les murmures regus de lapart des seculiers au sujet de ses religieux. II leur dit toute sonopprobre sur leurs desordres scandaleux et leurs desobeissances,tonne contre leur sensualite, leur ordonne de se couper les cheveuxet de posseder une tonsure toujours apparente. Le frere Duval, en


MISERES ET DECADENCE 113disaccord avec le prieur, confirme dans un second mandat le 10septembre 1717, est envoye vicaire dans une paroisse avec cent livresde pension annuelle.Nouvelle visite du couvent tout au cours du mois d'aout 1718par le frere Pierre Raymond, pretre chanoine du couvent du Verger,envoye par Charles de Tourre, prieur du Verger et vicaire generalde TOrdre: sous peine de suspense encourue ipso facto aucun religieuxne pourra plus pour quelque raison que ce soit sortir de lamaison apres sept heures du soir ; les novices ne recevront l'Eucharistieet la Penitence que deux fois par mois ; est surtout recommandeela charite fraternelle et la fin de continuelles dissensions ;la caisse n'est pas tres remplie et meme en deficit.La peine de suspense est tres vite tournee : au lieu de sortir lesoir, il est plus facile de faire des invitations. Le troisieme dimanchede novembre 1718, le prieur est absent et le frere Rouquant arriveinopinement au couvent apres Vepres ; deux filles de la ville fontla collation puis soupent avec les conventuels ; eprises de vin etd'eau-de-vie, elles en arrivent tout en s'amusant a maculer et dechirerle scapulaire du frere Jean-Baptiste Bourbet, et puis d'autresheures passent. Le frere de la Porte, le grand responsable et surplainte du cure de Courvaudon, s'entend signifier le 15 Janviersuivant la sentence du provincial: suspense de tous ses ordres, excommunication et toutes autres peines adequates.Les Croisiers frequentent aussi l'Universite : obtiennent leursCertificats a la Faculte de Theologie, Pierre-Charles Got de laRo2iere en 1715 ; Pierre Piedavant, 31 ans, pretre, le 29 fevrier1716 ; Jean-Baptiste Bourbet, 35 ans, pretre, le 29 juillet 1716 ;Francois Duval-Auguste, le 23 juin 1717 ; Francois de Saint-Michel,38 ans, sous-diacre, 25 juin 1719, en meme temps que Pierre deGuespel, diacre du diocese de Seez dont un oncle fut prieur deSaint-Ursin 8.Dans leur enclos les freres de Sainte-Croix possedent un pressoirutile pour eux et les gens du voisinage. II en est deja fait mentionen 1698 et il est loue pour la saison des pommes a divers partialliers,ainsi le 12 aout 1715 a Pierre Onfroy, bourgeois de la ville,moyennant 120 livres et le fumier des chevaux ; 110 livres le 168 Arch, du Calvados, D 162, 163, 548, 549.


114 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENjuillet 1719 a Charles Etienne et Francois de la Lande, de la paroisseSaint-Gilles, avec interdiction de piler le dimanche et en semaineapres huit heures du soir. La provision de la maison est transformeeen cidre gratuitement, a part la fourniture de la nourriture ; lespommes doivent etre ecrasees une troisieme fois pour faire du petitcidre et simplement une seconde fois dans le bail de 17199.L'administration de Pierre-Samuel Viel de la Grand'Rue n'estpas des meilleures ; le couvent a besoin de reparations et il estnecessaire de proceder a de frequents emprunts : le 17 octobre 1717^1.000 livres chez Renee Martin, veuve de maitre Jacques Regnault,bourgeois; le 14 mars 1719, 1.420 livres sur le pretre Claude LeVigneur et qu'il faut rembourser l'annee suivante aux heritiers dece dernier ; le 5 juin 1719, 2.000 livres chez messieurs les tresoriersde Teglise Saint-Julien ; le 29 aout 1720, 4.250 livres sur le sieurPissot de la Couture.En 1718 Tune des maisons de la rue Gemare est fieffee bien audessousde son prix au cordonnier Marin Demieux, pour la modiquesomme de 30 livres, alors que dans les baux posterieurs a 1750 lebail est de 70 et 75 livres10; le prieur a peut-etre des raisons personnellesd'agir ainsi, toujours est-il que le 3 octobre 1720, il estoblige de se demettre de sa charge quelques jours avant expiration.Sur ordre du provincial le feuillet 135 du Registre des Visites a etedechire, mais le feuillet 136 debute ainsi:...il perdra toute voi^ active pour le reste de ses jours, reduit au silence perpetuel*interdit et suspens de tous ses ordres encore pendant trois ans apres sa sortie deprison, et pendant son temps de prison jeunera trois fois la semaine, prendra sesrepas au refectoire sur le pave, restera tous les jours a genoux face au Saint-Sacrementapres Vepres pendant une heure, en rr ant les psaumes de la penitence, les Litaniesdes Saints et autres prieres a son c\ , trois fois par semaine il demandera pardonau chapitre de tous ses scandales. $9i***6dre du Provincial, il quittera la maison pourune autre et ne reviendra jamais a Caen a cause de tous ses scandales tant dans la.maison qu'en ville.La signature de Pierre-Samuel Viel de la Grand'Rue ne reparaitplus jamais, et comme lui seul quitte la maison a l'epoque, il semblebien que c'est sur lui que s'abat une si dure sentence.9 Arch, du Calvados, D 592.10 Arch, du Calvados, D 591.


MISERES ET DECADENCE 115-43me Prieur : JEAN-BAPTISTE BOURBET, 1720-1727.Jean-Baptiste Bourbet est d'un tout autre genre, par sa modestieet sa sollicitude il est un exemple vivant de saintete pour tous sesfreres, declare son provincial lors du renouvellement de son mandat.Le couvent est en mauvais etat et en particulier l'eglise: unedonation vient a propos, celle de maitre Jacques Toquet, bourgeoisde Saint-Etienne, 150 livres en une fois pour les reparations les pluspressantes de l'eglise, ainsi qu'une rente de 7 livres 4 sols pourfondation de la benediction du Saint-Sacrement sur les six heuresdu soir avec toutes ceremonies et prieres accoutumees les jours dela Purification de la Sainte-Vierge, Annonciation, Assomption, Nativiteet Conception, au son des trois cloches et six cierges ardenssur I'autel. En reconnaissance des 150 livres versees le 13 fevrier1722 en louis d'argent les Croisiers s'engagent a chanter une messede Requiem pour le donateur le lendemain de ces fetes sur les septheures du matin. La rente est versee en 1727 par Jean Godard,vicaire de Sainte-Honorine-du-Fay et en 1762 par l'abbe Binet,maitre de langues a Paris. La troisieme cloche est toute recente :une declaration d'impots en 1723 nous apprend que l'annee precedentea ete donnee une somme de 100 livres a un certain Jonchon,fondeur de cloches ".Le 23 fevrier 1722 la fonction de procureur disparait, un commergantde la rue de la Montee de la Poissonnerie, paroisse Saint-Pierre, prend en mains les interets materiels pour neuf annees12.Nous prieur, religieux et procureur dud. couvent de Ste-Croix de Caen, capitulairementassemblees au son de la cloche pour deliberer de nos affaires temporelles etsur l'etat pressant des affaires de notre maison qui se trouve extraordinairementsurcharged de dettes passives et depenses qu'il faut faire pour faire subsister ceuxqui restent en communaute, considerant d'un cote l'etat du bien de la maison quiest tres mediocre eu egard aux dettes qui sont faites, et d'autre c6te cherchant lesmoyens de payer peu a peu les anciennes dettes sur le meme revenu, en faisantsubsister les religieux, 1'eglise et batiments en reparations, nous avons trouve qu'iletait plus avantageux pour le bien de notre communaute d'avoir une personne quivoulut bien se charger de recevoir pendant un temps nos rentes en argent et prendresur son compte les rentes et fermages en bled qui nous sont dues ... s'est presenteCharles-Guy Lemarchand, epicier a Caen a ce present et acceptant...Cet acte est tres interessant pour connaitre les revenus du prieure: 481 boisseaux de ble par an et environ 1.200 livres de rentes11 Arch. Nat. LL 1481 ; Arch, du Calvados, D 606.12 Arch, du Calvados, D 639.


116 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENen argent; l'epicier ne livrera que 81 boisseaux, payant le reste araison de 30 sols le boisseau, soit 600 livres. La recette est doned'environ 1.800 livres plus les 81 boisseaux. Tous les baux sontremis entre les mains de Charles Lemarchand, charge en plus depoursuivre tous les creanciers, beneficiant de trois sols par livrequ'il pourra ainsi recuperer.Des dettes il y en a, telles celles-ci du temps du precedent prieuret que reclame Jacques Le Bourguignon, sieur du Perre, marchand,officier en l'Universite : 25 livres 15 sols pour fourniture de drap,serge noire et blanche, camelot, etamine tres fine ; 128 livres 5 solspour de la calamande noire, de la valencienne bleue, de la finette,du castor noir, du camelot et du drap noir13.Claude Boivin, premier definiteur de l'Ordre et provincial, prieurde Laine-aux-Bois, ne peut se rendre a Caen en mai 1722 ; il ydelegue le cure de Courvaudon, d'une grande probite, d'excellentescience et d'une experience consommee en ce qui concerne les chanoinesreguliers. Le couvent compte alors sept pretres, un frere etdeux domestiques ; l'organiste nomme Fouet regoit 160 livres degages et les religieux se servent pour la messe d'un petit vin du paysqui leur vient d'Argences.Confirme pour un second mandat le 30 decembre 1723 par leprovincial Boivin, a la fois prieur de Paris et de Laine-aux-Bois,Jean-Baptiste Bourbet reprend ses fonctions en presence de DomLouis Odon de Clinchamps, prieur des Chanoines reguliers deTHotel-Dieu et de Dom Jean-Frangois Lepouterel de Perteville, Tundes religieux.Le 16 mai 1724 a lieu la prise d'habit de Jean-Jacques Bazin ; lanuit suivante il souille ses nouveaux habits, reduit son scapulaire enmorceaux, devalise une partie du couvent et s'enfuit avec notammentle couvert en argent du frere de la Porte. Le 8 novembre sontportees contre lui les peines suivantes : excommunication, six moisde prison avec jeune les mercredi, vendredi et samedi, puis claustrationde trois mois dans sa chambre avec recitation des psaumespenitentiaux et Litanies des Saints a genoux les jours de jeune aupain et a Teau, correction au chapitre deux fois la semaine a genouxet en baisant la terre, remboursement du montant de ses vols. Nean-13 Arch, du Calvados, D 584.


MISERES ET DECADENCE 117moins il arrive a faire profession entre les mains de Jean-BaptisteBourbet le 19 mai 1725 ! et a exercer du ministere a Bellengrevilleou il est inhume au cimetiere le 8 juin 1768 par Jean-Pierre Massieu,cure de Frenouville, en presence de ceux de Moult, Periers, d'Argenceset de Bellengreville.Le prieur Bourbet donne-t-il sa demission ? Etienne-Simon deGamaches, provincial et prieur de Paris, par lettre du 24 juin 1727,nomme Francois de Saint-Michel prieur, la charge etant vacante.Jean-Baptiste Bourbet continue a vivre a Caen comme simple religieux ; son acte de deces nous est conserve:Le lundi de Paques 11 avril mil sept cent quanrante six est de"cede dans cettemaison Jean-Baptiste Bourbet, age de 65 ans et quelques jours, trente-six de profession, et trente-cinq de pretrise, et a ete enterre dans le cceur au bas des marches dedroite.44m« Prieur : FRANCOIS DE SAINT-MICHEL, 1727-1728.Cet ancien de la maison a fait profession en 1716, devient procureurTannee suivante alors qu'il est sous-diacre, ordre majeur danslequel il reste plus de quatre ans, ne devenant pretre seulementqu'en 1722. Son priorat dure simplement onze mois et ses religieuxcontinuent a faire scandale. Le prieur est-il leur complice ? Apresson bref mandat il disparait definitivement de Caen.Frere Charles de Tourre, chanoine de la maison de Paris, prieurdu Verger (et plus tard de Caen), commissaire provincial pourvisiter les couvents, arrive le 17 septembre 1727 : il voit une sacristieremplie d'ornements et d'argenterie en assez bon etat, les autreslieux reguliers fort pauvres ; les Marines commenceront desormaisa six heures de Paques a la Toussaint et a sept en hiver.L'eveque de Bayeux se plaint fort amerement du frere de Creildont les scandales ne se comptent plus : deux feuillets du Registredes visites les concernant sont arraches sur ordre du visiteur. Lefrere rebelle et impudique est envoye en penitence a Saint-Ursin,endroit ideal pour se remettre face a Dieu, au milieu des bois etloin des hommes.Le frere Duval Auguste est rappele a Tordre pour son peu decharite envers ses superieurs et confreres et on lui demande des'abstenir de liaisons partkulieres avec des personnes de la religionprotestante. Le religieux n'en continue pas moins de flirter avec les


118 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENprotestants, de diffamer en ville sa communaute ou, dit-il, il manque du necessaire, de se pourvoir pres d'un avocat de la ville afind'en referer au Cardinal de Fleury, eveque de Frejus et ministre deLouis XV, en vue de faire chasser les Croisiers et raser ensuite leurmaison. Le 15 decembre il est interne et mis en interdit.45 Prieur: GABRIEL LE CGEUR, 1728-1742, Provincial.Le provincial de Gamaches nomme prieur le 20 mai 1728 frereGabriel Le Coeur qui s'intitule bientot dans certains baux DomGabriel Le Coeur ; il avait accompagne le provincial en 1702 aucours d'une visite canonique ; a son arrivee a Caen le 7 juin, il ytrouve une maison tres pauvre avec des dettes et a la cuisine seulementtrois mauvaises nappes et cinq torchons.Les Croisiers sont aggreges a 1'Universite et a ce titre doiventparticiper aux processions organisees par celle-ci; en 1729 ils demandenta etre dispenses de celle qui doit se faire a l'occasion deTheurese naissance du Dauphin, a moins qu'on ne leur assigne unrang distingue et qu'ils ne puissent etre regardes comme des mendiants,d'autant plus que cela pourrait leur porter prejudice dansle proces en cours avec les Messieurs de Sainte-Genevieve14.Le prieur egalement procureur s'occupe activement des biens deson ordre; on le rencontre dans de nombreux baux ou saisies.Depuis une quinzaine d'annees des maisons et des terres labourablessituees dans la ville de Caen se sont trouvees alienees, il essaie d'enrentrer en jouissance, ce qui occasionne en particulier en 1732 unconflit avec les Chanoines du Saint-Sepulchre obliges de faire appela Rouen. Quelques particuliers en profitent pour demander l'amortissementde leurs rentes, tel le sieur de Gauviers en 1731 quireclame 1.200 livres pour une rente de 45 livres et deux chapons.Les fondations restent assez rares : le 11 octobre 1733 MathurinGuerin, cuisinier du monastere offre 400 livres en vue d'une renteviagere de 25 livres ; ses patrons celebreront trente messes a sondeces et deux chaque annee, l'une a son anniversaire, l'autre le9 novembre, jour de la Saint-Mathurin. Le 16 septembre 1736 lescompagnons cordonniers augmentent leur fondation, de 10 livres10 sols elle passe a 18 livres.14 Arch, du Calvados, D 76, 135.


MISERES ET DECADENCE 119S'il veut rester bedeau et en porter la robe et le baton, le sieurCharles Herice doit porter la location des chaises de Teglise a 42livres 10 sols ; tres fier de cette fonction il fait sans cesse l'impossiblepour la conserver. Chaque annee du 7 au 11 juillet le petitOdon est mis a sec depuis le pont de la rue de l'Odon jusqu'aumoulin de Gemare ; comme il traverse le couvent, les religieux sontobliges de le curer et nettoyer a cette date selon les ordonnancesde la Maitrise des Eaux et Forets de Caen de 1737 et 1743.Les vocations sont rares et lorsqu'elles existent ne durent pas ;seules semblent serieuses celles de frere Eustache Lefeuvre, profesle 11 juin 1733 en presence de Jacques Regnault, cure de Saint-Pierre, Pierre Malet du Hamel et Denis Denis, chanoine de Teglisecathedrale d'Avranches ou se trouve un eveque-croisier, Cesar LeBlanc ; le frere Lefeuvre meurt le 20 avril 1768 dans la paroisse deBoursai, pres de Mondoubleau dans le Bas-Vendomois ; et du frereRobert Moulinet, le 20 aout 1736, alors que le prieur se trouvemaintenant en meme temps provincial.Gabriel Le Cceur s'absente desormais tres souvent de son prieure,occupe seulement en 1741 par Jean-Baptiste Bourbet, ancien prieur,Eustache Lefeuvre et quelques novices : Jean-Nicolas de Poucy, dela paroisse Saint-Paul de Paris, prend Thabit le 21 aout 1741, refoitune pension de 400 livres le 21 aout 1742 quelques jours avant saprofession, et s'enfuit du couvent en aout 1743 emportant en cachetteses meubles et vetements et jusqu'a la clef de sa porte. FrereCharles Peignier, acolyte du diocese de Chartres, originaire deFresnay-l'Eveque, prend Thabit le 4 septembre 1741, fait professionle 6 septembre 1742 et edifie tous ses confreres par son exactitude,sa bonne conduite et bonnes moeurs ; vers 1752, on le retrouveprovincial.Le provincial Gabriel Le Cceur se demet volontairement de sonmandat de prieur a Caen et y nomme a vie le 5 fevrier 1742 Charlesde Tourre, ancien vicaire general et prieur du Verger.46m* Prieur : CHARLES DE TOURRE, 1742-1751.Cest un vieillard qui arrive a Caen qu'il avait visite jadis; nousle rencontrons dans nombre de baux ; l'histoire du prieur6 presquevide devient des plus ternes. Le prieur se degoute tres vite des


120 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENquelques religieux et donne sa demission au bout de deux ans; sessubordonnes Timplorent pourtant de rester et de continuer a lesdiriger jusqu'a la fin de ses jours, lui qui a donne tant de preuves desa sagesse et intelligence dans VOrdre depuis plus de trente-cinq ansqu'il y est. Seules les injonctions du provincial et du maitre generalLambertus Fisen ont raison de lui:Tan mil sept cent cinquante et un le samedy vingt et un aoust sur les sept heuresdu soir mourut en cette maison le sieur Charles de Tourres, prieur de la maison,ancien provincial, profes de la maison Ste-Croix du Verger en Anjou et ensuiteassigne a la maison de Paris. II etoit age d'environ quatre-vingt ans, il est mort munides sacrements et fut enterre le lundy vingt-trois sur les onze heures au milieu ducoeur au bas des marches du sanctuaire.Devenu provincial, le frere Charles Peignier, ancien profes deCaen, et qui connait bien Tancien prieur essaie de mettre sa succession materielle au clair ; alors qu'il etait a Caen, le prieur possedaitla somme considerable de 4.000 livres qui n'avait fait qu'augmenteravec les annees avec sa pension annuelle de 1.000 a 1.200 livres etdevait laisser par ailleurs des pendules, montres, tabatieres, bouclesde souliers, boutons, le tout en or ; des chandeliers, cuillers a cafe,six couverts et autres objets en argent; des commodes, des glaces,deux lits complets dont Tun garni d'indienne, plusieurs ornementsd'eglise, plusieurs aubes dont Tune garnie d'une dentelle de grandprix, une bibliotheque de grande valeur... Les scelles avaient 6teposes, neanmoins la succession avait ete pillee et volee.Le provincial mene lui-meme l'enquete a partir du 24 Janvier1752, en compagnie de frere Huskin, prieur de Laine-aux-Bois etsyndic general de l'Ordre. Au moment de la mort du prieur, le frereMichel de la Porte se trouve deja cloue au lit de la maladie dont ildoit mourir en 1753 ; par contre le frere Robert Moulinet, le seulvalide de la maison, est tres longuement interroge et finit par admettrequ'il a vendu bon nombre de ces objets. Nous ne connaissonspas le verdict, mais il est facile de le supposer : suspense, interditet excommunication.47me Prieur : MATHIEU-LOUIS FLAMAND, 1751-1763.II est nomme le 13 septembre 1751 par le provincial Etiene-Simonde Gamaches et Faccompagnent les freres de Glatigny et Selliermentionnes uniquement au cours de ce mandat. Le prieur regoit le


MISERES ET DECADENCE 12115 octobre 1751 deux cents livres de Marie-Catherine-GermaineFeret, femme de Louis Ollivier marchand drapier de la paroisseNotre-Dame; la somme sert a la fondation d'un service a diacreet sous-diacre le 3 septembre, avec deux cierges allumes sur la tornhede leur tante Marie-Marguerite Renouf, decedee le 3 septembre1717 et inhumee dans Teglise ; cette fondation pour le moins tardives'accompagne de quatre messes basses chaque semaine.L'an 1754, le 6 novembre fut faite dans notre eglise la benediction de notre petitecloche qui fut benite par moi M. L. Flamand, prieur de cette maison et nominee parmessire Jacques Verdelhan, ecuyer, seigneur des Fouisnel, conseiller-secre'taire du Roy,maison et couronne de France et de ses finances, Tun des quarante fermiers ge"ne*rauxde sa Majeste en deputation en la province de Normandie, avec Dame Marie-Catherine-Claude-JanetteDouville, epouse de messire Louis-Philippe-Henry Foucques,ecuyer, sr de Rupierre15.Cest la quatrieme pensionnaire du clocher, elle pese 307 livreset demie15.En 1756 les Croisiers sont toujours aggreges a l'Universite, maisa quoi cela sert-il puisqu'il n'y a plus de novices ou d'etudiants ?II suffit de lire une lettre du 6 septembre du recteur Pierre Buquet,cure de Saint-Sauveur, docteur en theologie, principal du Collegedes Arts et bibliothecaire de l'Universite : notum facimus et testamur dtlectissimos nostros Religiosos Crucigeros esse ex aggregatisnostrae Universitatis... 16.Qu'est devenu le prieur apres 1763 ? Par une lettre que lui ecritsa soeur vers 1770 nous apprenons qu'il demeure au couvent deChauny et sa soeur lui rappelle que c'est M. Yvelin qui a essaye dele deplacer de Caen ou Ton se plaignait de sa fa$on de gouverner,et elle ajoute : La maison de Caen doit se repentir maintenant de cedeplacement car le sieur Yvelin a fait plus de 10.000 livres de dettes,sa gestion est tres mauvaise et V eveque de Bayeux s'en plaint tresamerement17.15 Arch. Nat. LL 1482.16 Arch, du Calvados, D 642.17 Arch. Nat., G 9, 514, n° 71.


122 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENVIII. - LA FIN D'UN PRIEURE (1760-1800)48me Prieur : JACQUES-ALEXANDRE YVELIN DU JONC-QUAY (1763-1772).Sainte-Croix de Caen se meurt lentement de sa belle mort; leprieure compte encore quelques conventuels du moins sur le papier,car certains vivent bien tranquillement dans leur famille ou end'autres maisons. Sur bon nombre de baux des annees 1763 a 1770nous avons lu ces mots: Jacques-Alexandre Yvelin du Joncquay,prieur des Croisiers, seul pretre et capitulant dans ycelle maison.Le 25 mai 1764 arrive cependant a Caen Michel-Pierre Paquot,25 ans, natif de Paris, paroisse Saint-Sulpice ; il a regu Vhabit blancde notre Ordre a Paris des mains de Jean-Dominique Testu deBalincourt, prieur, provincial et vicaire general, frere d'un marechalde France, puis fait profession devant le meme le 3 avril 1764.La toute derniere profession regue a Sainte-Croix de Caen seracelle de Claude-Charles de Ligny de la Quesnoy le 15 mars 1769 ;le profes dont la prise d'habit remonte au 4 mars 1768 est ne aParis, rue du Monceau-Saint-Gervais, le 6 avril 1746, baptise lelendemain paroisse Saint-Gervais, fils de Pierre-Charles de Ligny dela Quesnoy, procureur au Parlement de Paris, et de dame Marie-Emerentienne Masson; le 26 septembre 1762 il a ete tonsure parMgr Christophe de Beaumont, archeveque de Paris ; le jeune clercn'a alors que seize ans \Le 28 septembre 1764 a lieu la bannie d'une ferme du hameaude Lebizey, paroisse d'Herouville, a Jacques Deblez, marchand labour eur a Colombelles moyennant 912 livres de fermage annuel ;les Croisiers touchent sur cette terre 18 boisseaux de froment et unepoule a Noel, et 1'Hotel-Dieu 20 boisseaux mesure ancienne deCaen ; il est question d'un batiment neuf dans lequel sont incor-1 Arch. Nat. LL 1482.


Plan du couvent a l'6poque de la Revolution. 13 floreal an 6 = 2-5-1798.(Archives du Calvados, S6rie Q, Biens nationaux des Croisiers.)


Croisiers de Caen 1965.Vue generale de la Rue des Croisiers, a partir de la Rue Gemare.A gauche, vers le milieu, entree du couvent des Croisiers.


FIN DUN PRIEURE 125pores une chapelle domestique et un jeu de billard et occupe en1772 par la marquise de Querquesay; des reparations y sont effectuees.La ferme est certainement importante et bien plantee, puisle 12 mars 1778 sont adjuges plus de cinq cents pieds d'arbres tantchenes, frenes, ormes qu'autres croissant: 101 moyennant 1.035livres deviennent la propriete de Jacques Hamel et Francois Richerde Caen ; 100 pour 1.100 livres celle de Jacques le Gaigneur, bourgeois de la ville ; 306 sont adjuges 4.035 livres a Jean-JacquesRicard, de Troarn 2.En octobre et novembre 1764 le prieur Yvelin est en proces avecJean Le Creps, mercier, proprietaire des maisons appelees vulgairementle Croissant, rue Gemare : le prieur a fait exhausser un murmitoyen qui ne lui appartenait pas. En 1773 sur rapport de Gilletet Dros, respectivement ingenieur et architecte, l'avocat Guesdonest choisi pour arbitre3.Le prieur connait d'autres difficultes en juin 1768 avec l'intendantde Fontette, et surtout avec Jean-Jacques Prevost, adjudicatairedes fermes unies de France et Jean-Baptiste Adam de la Pommeraye,ecuyer, receveur au grenier a sel de Caen. En 1757 Marie Lunel aloue une maison de la rue Gemare, proche de la fontaine de memenom et y distribue normalement du sel a petite mesure sur la paroisseSaint-Pierre ; sans aucun motif le prieur la somme de deguerpir ;c'est alors que la regie des fermes de France s'empare de Taffaireet contraint meme Yvelin a passer nouveau bail de 50 livres 4.* # *Extinction de Sainte-Croix. Deja en 1652 le pape Innocent Xavait demande la suppression des trop petits couvents, mais sesordres avaient ete mal observes. Depuis, de nombreux religieuxs'etaient fort impregnes de Jansenisme et meme des idees de lafranc-magonnerie : Sainte-Croix n'a pas fait exception, si Ton songeen particulier aux interdictions reiterees des provinciaux au coursde leurs visites de faire communier les novices plus de deux foispar mois. En 1765 l'Assemblee du clerge de France songe a deprofondes reformes chez les conventuels du royaume notamment2 Arch, du Calvados, D 389.8 Arch, du Calvados, D 590.4 Arch, du Calvados, D 589-


126 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENa la suite de la suppression des Jesuites l'annee precedents Regulierementla commission de reforme doit etre nominee par le PapeClement XIII, mais c'est Louis XV qui s'empare de cette oeuvre :une commission royale, dite Commission des Reguliers est institueea Tinsu du Pape ; elle comprend une foule de laiques, pas un seulreligieux et quatre prelats seulement sous la presidence de Lomeniede Brienne, archeveque de Toulouse. Bientot l'influence de Lomenie, incredule secret, devient preponderate parmi les commissaires,et Ton procede sous pretexte de reforme a la destruction des couvents,prelude necessaire a la destruction de l'Eglise selon les desseinsdu parti philosophique. De la le funeste edit de 1768 deLouis XV : remaniement des constitutions primitives, defense a toutinstitut d'avoir plus de deux couvents a Paris et plus d'un dans lesautres villes, recul des voeux a vingt-et-un ans au lieu de seize, unminimum d'une dizaine de religieux par maison, et s'il n'est pasatteint, suppression de la maison et defense d'y recevoir des novices.C'est ainsi que disparaissent de France en 1'espace de quelquesannees neuf congregations entieres : les Grammontins, les Servites,les Celestins, la Congregation benedictine des Exempts, les Spiritinsde Montpellier, les congregations de Sainte-Brigitte, de Saint-Ruf,de Saint-Antoine, et aussi les Croisiers. C'est a Toulouse que lesCroisiers s'etaient introduits en France cinq siecles plus tot et c'est1'archeveque de la ville - curieuse coincidence - qui signe leur arretde mort.C'est dans le cadre de cette reforme que disparait en 1770 leprieure de Saint-Ursin, et pas seulement a la suite de la vocationforcee du marquis de Flers (dont Tune des descendantes, nee de laMotte-Ango de Flers, epouse du coureur automobile beige OllivierGendebien, s'est tuee sur une route du nord de la France le lundide Paques 1965).Le chapitre provincial de Sainte-Croix est convoque a Paris pourle 12 septembre 1769 et Lomenie de Brienne s'y rend en qualite deCommissaire du Roi.,,L'hypocrite y fit lire deux lettres de cachet, datees du 18 aout precedent, Tunepar laquelle ce prelat etait charge d'assister au chapitre pour veiller a ce que tout s'ypassat avec la decence et la regularite convenables, comme si les religieux avaientbesoin d'un prelat Stranger a leur ordre pour agir avec defence et regularity ; l'autre,adressee aux superieurs et religieux assembles, leur mandait qu'ils pouvaient tenirlibrement leur chapitre..."


FIN D'UN PRIEURE 127Le prieur de la maison de Paris dans un discours temoigne dudesk extreme des religieux d'etre maintenus dans la jouissance paisiblede leur etat et dans la liberte d'y vivre jusqu'a la fin de leursjours. L'archeveque de Toulouse fait connaitre que sur ordre du Roidoit etre mis a execution l'edit de 1768 : la conventualite ou bienla suppression et extinction par l'interdiction de recevoir de nouveauxnovices. L'astucieux prelat qui sait bien que le retablissementde la conventualite est impossible, sauf peut-etre a Paris, fait pencherle chapitre vers la seconde solution : extinction progressive dela Congregation. L'Ordre ne possede alors en France que quaranteseptchanoines pour une quinzaine de prieures, et encore ce chiffreest-il gonfle : dans notre histoire du prieure de Saint-Ursin nousavons remarque une declaration de neuf religieux alors qu'ils sontplus de moitie moins.Done le Roi par Lettres Patentes du 14 octobre 1769 defend lareception de nouveaux sujets et autorise les eveques a proceder al'extinction et union des monasteres apres le deces des prieurs etprofes, ou durant leur vie de leur consentement. La maison deParis arrive a vivre selon ses usages habituels jusqu'au mois de mai1778, alors que l'eveque de Rodez reussit a faire sequestrer les bienset a les faire regir par un econome, assignant une pension auxreligieux. Le prieure Saint-Georges de Bretagne attend le 10 decembre1777 pour connaitre son extinction et reunion au College deDinan ; des 1770 Saint-Ursin a connu sort semblable pour etre reuniau Seminaire de Domfront6.Un etat presente au chapitre provincial de Paris fait entre^oir lasituation materielle de Caen :,,I1 y a dans cette maison cinq profes, dont deux y sont actuellement residens, lestrois autres sont ou dans leur famille ou dans des maisons etrangeres a la leur : frereYvelin, prieur, a Caen ; Pouc^, a Paris ; Moulinet, a Bayeux ; Paquot, a Liege ; deLigny, a Caen".Les revenus sont de 3.670 livres : 2.22Q livres en loyers, rentes etfondations et 1.450 livres pour 489 boisseaux de ble; les dettesactives au recouvrement douteux, 4.000 livres et les dettes passives,9.200 livres ; les charges : 160 livres pour deux domestiques, 1405 Hermans, III, p. 582-587 ; Abbe Migne, Encyclopedie Theologique ou Dictionnairedes Ordres Religieux, 1850, Tome XXII, vol. 3 ; Arch. Nat. G 9, 514, n* 79 ;Arch, du Calvados, D 583 : copie du proces-verbal du chapitre national de Sainte-Croix de la Bretonnerie du 12 septembre 1769


128 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENpour deux chantres, 200 pour un chapelain, 100 pour Torganiste,350 de pension pour Moulinet et 300 pour Paquot. Les batimentstres vetustes coutent beaucoup depuis trois ans et sont cause denombreuses dettes;,,notre eglise dont le vaisseau est passable est une des plus frequences de la villede Caen, ce qui aide a en faire les reparations et a supporter les charges et depensesde la sacristie ; la situation de notre maison au centre de la ville sur la rivi&red'Odon la rend commode et le jardin qui est derriere buttant sur la Monnoye duRoy, la rend agre'able et en bon air" e.Le prieur de Caen est en faveur pres de l'archeveque de Toulouse,comme d'ailleurs Mgr Pierre-Jules-Cesar de Rochechouart, evequede Bayeux, ce qui va faciliter la suppression de la maison ; parcontre les freres Moulinet et de Ligny sont loin d'etre du memeavis. Une lettre de l'archeveque de Toulouse a son confrere deBayeux est tres eclairante sur la fagon dont va se produire progressivementTextinction de l'Ordre en France :,Je recois, Monseigneur, votre lettre du 21 fevrier et le memoire du frere Moulinet.Je vais vous faire sur Tun et sur l'autre quelques observations qui vous mettrontplus au fait de Sainte-Croix.Le fr. Moulinet n'a pas ete appele au chapitre provincial, et il n'a pas du l'etre.On n'y a appele que ceux que les Constitutions de l'Ordre y appelaient et il n'etaitpas du nombre.II peut sans doute se rendre opposant a l'enregistrement des Lettres Patentes, maisson opposition serait caduque, parce que le pouvoir de l'Ordre est dans la deliberationd'un chapitre regulier autorise" par le Prince. Si chaque particulier pouvait s'opposera ce que tous ont resolu, il n'y aurait pas moyen de terminer les contestations.Le chapitre provincial qui s'est tenu au mois de septembre dernier n'a pas de*libere"la suppression des maisons. II a mis a portee de la preparer; il a leve l'obstacle quele defaut de consentement de l'Ordre en general pouvait y mettre ; il a mis cetOrdre en general sans interet et sans qualite*, et c'etait la premiere demarche et laplus essentielle.En pre"parant ainsi la suppression des maisons, il e*tait en m&ne temps necessairede fixer un etat provisoire a ceux qui les composent; on ne pouvait les faire sortirde leurs maisons, jusqu'a des arrangements volontaires. II fallait les laisser au supe"-rieur, la liberte d'en changer etait abusive dans un ordre ou il n'y a pas de sujets,on a laisse les anciens ; quand on est pres de sa destruction, l'etat actuel est lemeilleur des etats qu'on puisse choisir. II ne change rien a la situation des personnes,et c'est un moyen sur, sinon de faire le mieux, au moins d'eviter de grandes injustices.En autorisant les deliberations par les Lettres Patentes, on ne determine pas davantagela suppression des maisons ; on ne fait qu'assurer par rautorite" les precautionsprises par le chapitre, et surtout Timpossibility de recevoir des sujets, les ChanoinesReguliers de l'Ordre de Sainte-Croix sont done les maitres de vivre et de mourir dans• Arch, du Calvados, D 584. La Monnaie du Roi est occupee maintenant par laCaisse d'Epargne, rue de la Monnaie, tout pres de l'eglise Saint-Sauveur.


FIN D'UN PRIEURE 129leurs maisons, ce qu'on ne pouvait leur refuser, ou de traiter des conditions auxquellesils voudront les abandonner.Soit qu'ils prennent Tun ou l'autre parti, les Eveques peuvent proceder a l'uniondans le premier cas, la jouissance n'est qu'apres la mort des religieux ; dans lesecond elle commence au moment de leur cession.En cessant de recevoir des sujets, les maisons sont restees sous la juridiction deleurs supe"rieurs, qui peuvent tant qu'elles ne sont pas detruites, les visiter et lesgouverner. Le seul pouvoir qu'ils aient perdu est celui de s'opposer a leur destruction.Les Eveques ne sont pas devenus superieurs immediats.Dans le cas ou un Eveque ne s'accorderait pas avec les religieux d'une maisonpour sa destruction, ceux-ci n'auraient qua demeurer en l'etat ou ils sont; ils finiraienttranquillement leur vie dans leur maison ; on n'aurait pas a la leur refuser et1'inspection de 1'Eveque se bornerait tout au plus,1° a faire un Inventaire,2° a se faire rendre compte.Mais le mobilier s'use, change et deperit; les fonds peuvent etre malgre toute lavigilance mal geres et administres. L'inte"ret des Eveques est done de conclure le plust6t qu'ils pourront avec les religieux des maisons. Les prieurs y ont droit comme lesprofes, 1° par la deliberation du Chapitre ; 2°, parce qu'il faut un Sup£rieur et quece Superieur fait partie toujours de la maison. Un Eveque serait sans qualite pours'opposer a l'enregistrement des Lettres Patentes ; elles ne contiennent que des dispositions favorables ; elles leur donnent droit d'unir les maisons, et ce droit est entierementa leur avantage ; s'opposer a ces Lettres Patentes, ce serait aneantir le titre d'ouce droit resulte.De ces differentes observations ainsi que du proces-verbal du Chapitre et desLettres Patentes qui ont ete donne*es pour les ressorts de Paris et de Toulouse, etdont j'ai l'honneur de vous envoyer copie, je conclus que le sieur Yvelin a qualite ettitre pour se meler de ce qui regarde la maison de Caen, et que s'il s'opposait a1'arrangement, on aurait plus de peine pour l'effectuer, que tous les religieux, memele sieur Moulinet, quoiqu'ils n'ayent pas du etre convoques pour le Chapitre, ontdroit lors qu'il s'agira de traiter pour leurs maisons, que neanmoins si le sieurMoulinet a pu vivre aussi longtemps hors de sa maison avec une pension de 350livres, il para!trait n'en devoir pas pretendre davantage que son arrangement et celuides autres doit etre fait relativement aux revenus ; que si vous voulez etre autorisea les constater, on vous donnera tous pouvoirs necessaires, mais que cette visite estpeut-etre plus capable d'eloigner les esprits que de les ramener ; qu'il semble enfinplus utile de traiter directement avec le prieur qui sera maitre du consentement deplusieurs, et qui surement a plus d'esprit et de capacite que les autres.C'est aussi ce que je me propose, Monseigneur, je vous ai promis que l'Universiteaurait la Maison de Sainte-Croix, et je vous tiendrai parole ; mais rappelez-voustoujours, je vous prie, qu'on ne peut forcer les religieux ; ainsi etes-vous decide aleur faire done dol ; j'ai dit au prieur de me donner ses propositions ; il faut le voirvenir, et je vous manderai le resultat. J'aurais meme ide*e d'attacher ce religieux a lamaison de Paris. Je ne sais si vous en avez bien bonne idee ; mais je puis vousassurer que c'est peut-etre tout ce qu'il y a de mieux dans tout l'Ordre. Je suis surau moins qu'il a de l'intelligence pour le temporel et assez d'honnetete dans lesprocedes ; j'espere en venir a bout; prenons un peu patience. Monseigneur, c'est untres grand pas que celui d'avoir desinteresse l'Ordre. Le reste viendra en son temps,et viendra surement. C'est ce dont je vous reponds de nouveau ; d'apres les conversations que j'aurai avec M. Yvelin, je verrai s'il faut envoyer les Lettres Patentes


130 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENge'ne'rales, ou si on pourra y comprendre tout de suite l'arrangement pour la maisonde Caen.Soyez sur, Monseigneur, que je n'oublierai rien pour terminer cette affaire et vousprouver en cette occasion comme en toute autre le sincere et respectueux attachementavec lequel j'ai 1'honneur d'etre votre tres humble et tres obeissant serviteur'.Paris, 8 mars 1770f L'archeveque de Toulouse."Le prieur de Caen et l'archeveque de Toulouse arrivent tres vitea s'arranger, et les religieux donnent les uns apres les autres leuraccord : Jean-Nicolas de Poucy, ancien prieur de Saint-Georges, malgreses vols a la maison de Caen, le 22 decembre 1770, par sonfonde de procuration Jacques Poucy des Cochets, ecuyer, son frere ;Robert Moulinet le 29 Janvier 1771 par son fonde de pouvoirs,Pierre-Nicolas Besnier, precedemment prieur de Saint-Ursin, a condition de recevoir une rente viagere de 250 livres a cause de songrand age et ses infirmites en plus de sa pension normale; MichelPaquot le 10 octobre suivant.L'eveque de Bayeux a desormais les mains libres, tres facilementet en cachette il s'accorde avec les freres Moulinet, de Ligny etPaquot pour une pension annuelle de 600 livres et le frere de Poucypour 400; l'archeveque de Toulouse a laisse esperer 1.000 livresau prieur, oblige bientot d'elever la parole et de choisir pour arbitrele procureur general au Parlement de Normandie; en definitivel'eveque de Bayeux ne lui abandonne que 800 livres, cherchantmeme a le faire ecarter de la maison.Apres 1774 il n'est plus question des freres de Poucy et Moulinet,ce dernier retire chez les Augustins de Bayeux ; de Ligny et Paquotregoivent encore leur pension en 1787 et meme en 1792 pour ledernier nomme, retire a Paris. Quant au prieur Yvelin du Joncquay,le protege de l'archeveque de Toulouse, il devient en 1771 prieurtriennal de la maison de Paris, prieur perpetuel de Sainte-Croix deCaen, prieur titulaire du prieure de Bel-Arbre, et vit encore dansles premieres annees de la Revolution. Mais en attendant Textinctiondefinitive de sa maison caennaise, le prieur gere les biens aunom de Feveque a dater du lr avril 1771, re^oit la visite de nombreuxcreanciers en avril et supplie Teveque de prendre ses responsabilitesface a eux.7 Arch, du Calvados, D 583.


FIN D'UN PRIEURE 131Le 8 novembre 1771 devant Charles-Frangois Ruffin, abbe commendatairede 1'abbaye Saint-Martin de Mondaye (au sud deBayeux), vicaire general de Bayeux, et M. Charles Bonnier, curede Teglise paroissiale Saint-Etienne, official de Caen, Dom Jacques-Alexandre Yvelin du Joncquay, en son nom et en celui des religieuxconsent a l'extinction de son prieure, avec rentes viageres et possibiliteau prieur perpetuel de se reserver une partie de la maisonjusqu'a son deces : une partie des batiments situes entre 1'eglise etla rue Gemare.Mais a qui va aller le couvent de Sainte-Croix ? Deux voisinsportent leurs yeux sur les depouilles du prieure. D'un cote, la paroisseSaint-Sauveur dont le cure, marguilliers, pretres, chapelainsfondeset clerge supplient humblement les eveques commissairespour la reformation des monasteres de leur accorder le transfertde toutes les foundations de Sainte-Croix dans leur eglise ou le clergeest en nombre suffisant et ou elles seraient acquittees avec plus desolennite. Cela augmenterait les revenus de Saint-Sauveur reduits a250 livres par pretre ; par ailleurs Teglise des Croisiers serait entierementlibre pour un autre usage, et reflexe bien ecclesiastique lecure regrette surtout la quete qu'il faisait tous les dimanches etfetes dans leur eglise pour ses pauvres.D'autre part l'Universite manque de locaux pour ses etudiants ;sa faculte de Theologie est d'une trop grande pauvrete par rapportaux autres, et puis TEveque de Bayeux la protege et ce derniern'a-t-il deja pas fait quelques avances a son confrere de Toulouse ?Une paroisse si puissante soit-elle ne saurait lutter contre un evequeou une universite8.Des le 21 mars 1771 l'Universite a ete avisee officiellement dela possibilite d'union de Sainte-Croix ; aux moyens d'y parvenir elledepute son vice-doyen Le Clerc de Beauberon, chanoine de Teglisemetropolitaine et primatiale de Rouen, professeur emerite, et lechanoine de Bayeux et docteur Pesnelle, ancien cure de Periers,vice-gerant de Tofficialite de Caen. Par ordonnance du 24 avril1'eveque du diocese nomme le sieur Suhard de Loucelle, son vicairegeneral, pour l'enquete de commodo et incommodo. Parmi les nom-8 Arch. Nat. G 9, 514.


132 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENbreux temoins interroges au cours de septembre, maitre FrancoisMery, 48 ans, cure de Notre-Dame de Froide-Rue: la faculte detheologie est plus a partie de jaire beaucoup plus de bien que laCommunaute des Croisiers; maitre Henri Quesnot, 50 ans, cure deSaint-Gilles : les docteurs en theologie feront beaucoup plus de bienqitune maison qui n'etait souvent composee que d'un seul religieux ;maitre Pierre Fauvel, 61 ans, cure de Saint-Michel de Vaucelles;Charles-Adrien d'Anisy, 56 ans, chevalier, seigneur-chatelain etpatron de Merville, de la paroisse Saint-Jean ; Gabriel Froger,ecuyer, sieur de Camigny, 67 ans, de la meme paroisse ; Adam dela Pommeraye, 36 ans, ecuyer ; Jacques Manoury, 60 ans, libraire dela paroisse Notre-Dame, etc...Et le 25 Janvier 1772 parait le decret episcopal d'extinction etunion :Le tout vu et considere, le Saint Nom de Dieu invoque, vu ce qui resulte desditespieces, procedures et confirmations, nous avons par ces presentes eteint et supprime*,eteignant et supprimant a perpetuite les prieure", maison et communaute des chanoinesreguliers de Sainte-Croix etablis en la ville de Caen, en notre diocese, et en consequence avons uni et unissons pareillement a perpetuite tous les biens, revenus, prerogatives et honneurs en dependant, ainsi que tous les effets mobiliers et immobiliers aelle appartenant, a la faculte de theologie de l'Universite de Caen pour par elle enjouir a l'avenir comme de son propre et vrai bien, aux charges neanmoins et conditions suivantes : (acquirement des messes, services et fondations de la communaute,paiement des dettes actuelles se montant a 15.353 livres 2 sols, pensions annuellesauxreligieux).Donne" en notre Palais episcopal de Bayeux le 25 Janvier 1772.Le 6 septembre 1772 et deux dimanches suivants, proclamationspubliques a la sortie des messes de Saint-Sauveur, Saint-Pierre,l'eglise des Croisiers, devant la porte de la faculte de Theologie,rue de la Chaine et devant la porte de l'auditoire de l'officialite deCaen, rue de la Poste, du decret episcopal du 25 Janvier, des lettrespatentes confirmatives de fevrier 1772 et de l'arret du Conseilsuperieur de Bayeux du 28 mars suivant.Le 25 juin la Faculte a ratifie les accords intervenus et s'est engageea payer les 11.522 livres 17 sols dues par les Croisiers a l'abbayedu Val, cette derniere accordant un pret a la Faculte le 21 aoutpour faciliter Tacquittement des dettes. Le 21 septembre, lendemainde la derniere proclamation publique, Pesnelle est remplace sur sademande comme commissaire par Mac-Parian, docteur et professeuren theologie, chanoine du Saint-Sepulchre, principal et proviseur du


FIN D'UN PRIEURE 133college du Bois ; le 22 septembre, dernier accord entre le prieur etla faculte au sujet de la reserve a vie de certains batiments ; le3 octobre est signe un marche avec le cure et les tresoriers de TegliseSaint-Nicolas, la vente de l'orgue pour 3.500 livres dont 2.000comptant.A la suite d'une telle donation l'eveque de Bayeux peut bienrecevoir de chaleureux remerciements : cela se produit a Toccasionde la Saint-Thomas d'Aquin le 7 mars 1773 par un discours enlatin de Le Clerc de Beauberon et une non moins genereuse reponseen latin de Teveque ; enfin le 23 avril Le Clerc et Duhomme sontcharges de dresser un plan de distribution des revenus des Croisiers.Conjointement avec M. Delaume, docteur de la faculte, le prieurYvelin continue a gerer et administrer les anciens biens des Croisiers ; les recettes de 1773 arrivent a 4.002 livres 6 sols : la ville deParis verse 9 livres le 31 decembre ; les Calvairiens, 24 le dimanchede la Passion ; les cordonniers 18 le 25 octobre, fete du patron deconfrerie; les corroyeurs, 17 le 16 septembre; les maitres tailleurs9 le 15 avril; les orfevres 4 livres 10 sols le lr decembre ; le cultecontinue normalement dans l'eglise ou l'arc-de-voute sur l'Odon aete retabli et les chaises ont rapporte 294 livres. Les chanoines deNotre-Dame du Val sont ainsi rembourses de plus de 3.000 livres,et l'emprunt termine en 1780 par un dernier versement de centpistoles (1.000 livres).A partir de 1782 Yvelin ne rend plus ses comptes et comme ilrefuse de le faire, l'Universite engage contre lui un proces en 1783 ;le 24 octobre, sur proposition de l'eveque de Bayeux, est nommeOnfroy, docteur a la faculte, immediatement contrecarre par JacquesLantaigne, cure de Saint-Sauveur, selon lequel une telle charge estnuisible aux docteurs a qui saint Paul recommande de ne pas s'immiscerdans la regie des affaires temporelles. Le prieur Yvelin estde nouveau en proces avec TUniversite en juin 1785 au sujet d'unmur mitoyen qu'il desire faire surelever ; excede, l'ancien prieur deCaen supplie alors le Roi de le reintegrer dans la maison Sainte-Croix de la Bretonnerie dont il etait profes.En bon docteur de faculte Pierre-Paul Onfroy s'en tire tres mal,€t proces au bailliage est entente contre lui en 1787 ; decede a


134 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENl'automne 1788, ses heritiers sont tres vite declares insolvables ; boanombre de fondations ne sont plus acquittees et TUniversite s'enplaint amerement le 4 decembre 1789, jugeant que l'eveque deBayeux s'est montre le complice de nombreux abus. Le 28 octobre1789 un plan de distribution des revenus des Croisiers est soumis al'eveque, c'est ainsi que le doyen recevra 1.000 livres par an ; lesous-doyen 800 et chacun des six docteurs veterans 600 livres;beaux projets conclus le 7 novembre en presence de Mery de Berthenonville,vicaire general, docteur en theologie de Sorbonne, doyendu Saint-Sepulchre; mais la Revolution commence deja9.* * *Sous la Revolution. En consequence des decrets de l'AssembleeNationale l'abbe Vittrel, docteur a la Faculte, declare le 27 fevrier1790 au greffe de la municipality de Caen les revenus et chargesde rancienne maison des Croisiers. II accomplit la formalite plutotde memoire, car la Faculte est privee de la plupart de ses titres, enpartie dans les mains du prieur Yvelin, en partie sous scelles audepot de la succession d'Onfroy.La Faculte touche des locations sur des maisons des rues desCroisiers, Gemare, Froide-Rue et de Bretagne, des fermages et rentes pour des terres a Carpiquet (140 boisseaux de ble, 4 chapons,15 poulets, 3 journees de harnois, 27 livres 10 sols de rentes), Rots(115 bx de ble, 2 poulardes, 141 livres), Norrey (91 bx de ble,,4 chapons, 3 poules), Basly, Bretteville-l'Orgueilleuse, Courseulles^Herouville-saint-Clair, Tailleville, Luc-sur-Mer, Mathieu, Saint-Contest, Cairon, Secqueville, Beny-sur-Mer, etc... soit 6.205 livres6 deniers pour 1789 ; le mobilier et les ornements de la sacristiesont estimes 1.500 livres et restes a la disposition du prieur pourla celebration de l'office10.Par la meme occasion nous connaissons les fondations encoreacquittees ; certains noms nouveaux demontrent la perte de titresprimitif s. En voici la nomenclature :9 Arch, du Calvados, D 529, 530, 531, 575, 576, 577, 583.10 Arch, du Calvados, D 576, 580.


FIN DUN PRIEURE 135Messes chantees: Un service par mois pour M. Pillois, pretreUne grand'messe mensuelle pour Vincent ThomasQuatre services par an pour Julien DanielService aux mercredis de Quatre-Temps, M. Delalonde24 mars, service pour Marie Mathieu, femme HebertPurification, haute messe pour M. de Calogne3 septembre, service pour Marguerite Renouf4 septembre, service pour M. de Haut-Loudel17 et 28 septembre, anniv. de Richard Renouf et sa femme3 mai et 14 septembre, grand'messe avec procession12124411112240Messes basses: 2 la semaine pour la reine Jeanne d'Evreux2 la semaine pour Pierre Edouard2 la semaine pour Jean de Malherbe2 de la semaine pour Marie BroucyUne la semaine pour Jeanne BeauvoirVendredi de chaque semaine pour MM. de Rollu et PoussySamedi de chaque semaine pour M. PilloisUne par mois pour Jean BridelUne par mois pour Gillette VaultierUne par mois pour M. YvonUne par mois pour Jacques Le PelleUne chaque jour de l'octave du St-Sacrement, Marie Callais4 au de*but de septembre pour Marguerite Renouf2 pour Richard Renouf et sa femme10410410410452525212121212842•- Le 4e dimanche du mois, Litanies de la Sainte-Vierge fondees par Marie Callais.- Le jour des Rameaux, Stabat et de Profundis pour Julien Daniel.- Aux fetes de la Sainte-Vierge, salut et benediction du Saint-Sacrement.Les six docteurs veterans se partagent ces messes avec 112 livresde moyenne de revenus ".Des 1789 l'eglise est occupee pour le service du Roi et les messescelebrees seulement a voix basse. Des premieres annees revolutionnairesaucune archive n'est parvenue et il faut attendre fin aout1796 pour retrouver une liasse d'une centaine de pieces non coteesde la serie Q (biens nationaux) en compagnie d'une liasse plusimportante sur le sort des biens des Cordeliers. La rue des Croisiersporte le nom de Rue de la Fripperie.Le 25 prairial an IV (13 juin 1796) les citoyens Doublet et Survilleentendent acquerir la totalite de 1'ancien domaine des Croisierssauf trois boutiques de la rue, avec offre de 50.000 livres ; fin aout11 Arch, du Calvados, D 530, 576, 581.634


136 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENle boulanger Pierre Picard surencherit et en septembre 1796 ne peutoccuper les batiments, toutes les issues ayant ete fermees par leprieur Yvelin disparu sans laisser d'adresse. Au printemps 1797,un nouveau proprietaire apparait, le citoyen Villaumey. Le 9 ventosean VI (27 fevrier 1798) le Ministre des Finances annule cettederniere vente et ordonne la remise des biens des Croisiers auxcitoyens Doublet et Surville ; un long proces s'engage que gagnele citoyen Villaumey, soutenu par les administrateurs du Departement;Villaumey possede definitivement le couvent et l'eglise le28 septembre 1802.Entre temps, du 23 au 25 septembre 1797, par le ministere deMichel Le Moine, huissier au tribunal civil du departement duCalvados, on procede a une vente de mobilier : chaise a porteurs,fontaine de cuivre, vieux fauteuils, vieilles tapisseries, benitier depierre, boisseau ferre, pots de terre et de faience, armoires a panneaux et corniches, etc... En decembre, la chambre de l'abbe Yvelinrapporte 145 livres 15 sols : buffet de service en bois de sape aquatre panneaux, armoire de chene a deux panneaux, trois fauteuilsgarnis de tapisserie, baton de chantre argente, vaisselle, literie, etc...Le mois precedent l'armoire contenant sa bibliotheque a ete misesous scelles. L'eglise sert de magasin national et de depot d'effetsmilitaires et caisses de balles. En 1800 et 1801 le prefet autorise uncertain nombre de reparations, pour la couverture de l'eglise 900tuiles en 1800 et 250 en 1801.Un inventaire du 18 aout 1802 nous apprend que sont encorevisibles dans l'eglise de vieux tableaux encadres de bois, un banequi servait a la confrerie des tailleurs d'habits, un autel de bois enplusieurs morceaux avec deux portraits de bois, des morceaux demarbre epars, des restes de banes et confessionnaux, un autre autelde bois dans l'aile de l'eglise avec tableau, vieux chandeliers debois, tabernacle et devant d'autel; le reste de l'eglise est occupe pardes fagots au compte de M. Le Cerf.L'eglise est estimee 300 francs.L'ancien lieu de culte sert parfois a la distraction de la jeunesse,,,L'edifice consiste en un portail dont l'entr^e est du cote de la rue des Croisiers,une tour au clocher, une nef et un collateral a droite en entrant et 1'emplacement ducy-devant autel faisant avant-corps au bout vers le midy ; le tout ainsi qu'il se comporteassis sur un terrain contenant en superficie cinq cent vingt cinq metres carres".


FIN D'UN PRIEURE 137temoin cette lettre du commissaire ordonnateur de la I4e Divisionmilitaire au citoyen Costy, prefet par interim du Calvados, 7 frimairean X (28 novembre 1801) :,,Par tout ce qu'on m'a dit hier qu'il se faisait dans le local (eglise des Croisiers),il faut le fermer et ne plus jamais permettre qu'il soit ecole de batons de danse etserve a la depravation de la jeunesse de cette ville; en consequence, j'ordonne cematin que tous les effets militaires qui y sont seront verses de suite au magasin de laci-devant abbaye-aux-Dames''.Quelques-mois plus tard l'inspecteur des domaines nationauxporte plainte pres du citoyen prefet:,,En ma qualite d'inspecteur des domaines nationaux, j'ai 1'honneur de vous informer que dans ce moment le citoyen Viaume* (Villaumey), acqu6reur d'un domaineattenant a la ci-devant eglise des Croisiers de cette ville, se permet de demolir etenlever les pierres des pillie*s de soutennement de laditte eglise. Cette entreprise, sielle £tait permise, entrainerait par la suite l'e'croulement de l'edifice national".Et de fait le 21 floreal an XI (11 mai 1803) le citoyen Villaumeyest autorise par la Prefecture a proceder a la demolition de Teglise.L'abbe de la Rue a assiste a la demolition du bas-cote de droiteou des pieces de l'occupation anglaise ont ete retrouvees, Vaultieraffirme que cela eut lieu en 1808.Ne reste plus debout que la nef et que Ton regarde soit a partirde la rue Gemare, soit de la cour d'entree rue des Croisiers, ondiscerne toujours les arcades de Tancien edifice. Du cote chateau lademolition a du se faire avant la moitie du 19me siecle, le bas-cotenord (rue Gemare) etant toujours absent des plans. Certains batimentsdu monastere ont ete dans la suite detruits ou transformes,et le cadastre de Caen ignore meme jusqu'a Texistence des Croisiersqui n'interessaient plus les geometres.Deja occupee a la fin du siecle dernier par la Maison Le Chevalier, la nef de l'eglise, cloisonnee par des planches et des refends,deux etages sur toute la longueur, sert d'exposition de meubles auxproprietaires actuels, Monsieur et Madame Desjours, rue des Croisiers, qui nous ont permis si aimablement de revoir et visiter cetancien haut-lieu de priere. Le porche d'entree est toujours la aunum&ro 7 de la rue, et de la cour, entourees de lierre, se remarquenttoujours quatre fenetres ogivales; du cote de la rue Gemare, presde rhotel du Croissant, Tun des plus anciens de Caen, les murs sontnus et les details architecturaux bien plus jolis, et a quelques metres


138 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENplus au nord un mur aux fenetres gothiques a ete classe par lesBeaux-Arts.Alors que le quartier a ete presque entierement sinistre et ravageau cours du debarquement de 1944, Sainte-Croix est reste ilot assezbien conserve au milieu des ruines fumantes de part et d'autre;cependant le plus beau joyau de ce qui restait des freres de Sainte-Croix a bien failli bruler : nous devons aux Canadiens d'avoir reussila performance en pleine bataille d'eteindre un debut d'incendieallume dans les combles, detruisant seulement la toiture.Le nettoiement et le degagement de la rue Gemare et de sesabords en 1955, en vue de leur reconstruction, a mis a jour d'importantsmorceaux de 1'ancien couvent des Croisiers ; une equipe deterrassiers occupes a creuser des tranchees en octobre, dans la courde THotel-Restaurant du Croissant, a mis a jour quelques ossementshumains : un bref examen du crane et des debris de femur et detibia a revele qu'il s'agissait de tres vieux ossements12. Rien d'etonnanta cela puisque nombre de genereux donateurs et de religieuxont voulu dans le passe leur sepulture soit dans la nef, soit dansles bas-cotes de l'eglise conventuelle, ou pour la premiere fois depuispres de deux siecles est venu se recueillir le 31 juillet 1964 ennotre compagnie un authentique Pere Croisier du couvent d'Amersfoort,Hollande.Voila resume ce que Ton sait de ces vieilles pierres et de ceuxqui les habiterent pour la plus grande gloire et louange de Dieu ence quartier pittoresque du vieux Caen. Puissent ces lignes avoir faitconnaitre un Ordre desormais florissant et qui vient de s'illustrerdans le Martyrologe de TEglise au Congo-Kinshasa par Tassassinatde deux de ses membres le 25 novembre 1964 et le massacre bestialde vingt-et-un autres de ses missionnaires le 30 mai 1965 par lecolonel rebelle Makondo13. Sanguis martyrum, semen christianorum.Saint-Berthevin-la-Tanniere (Mayenne) le 19 juin 1965.12 Cf. l'article intitule : L'Eglise des Croisiers, curieux morceau d'architecture monastique,revoit le jour rue Gemare, signe P. L. dans le quotidien Paris-Normandiedu 15 juillet 1955, et l'entrefilet du quotidien Ouest-France, edition de Caen, du21 octobre 1955 : Des ossements humains decouverts rue GSmare, avec photos al'appui.13 J. Verhoeven, Les Otages de Makondo. Journal de Vepoque des simbas 1964-1965, Louvain, 1967.


PIECES JUSTIFICATIVES 139PIECESJUSTIFICATIVESiJuillet 1290Lettres Patentes du Roi PHILIPPE LE BEL du mois de juillet 1290 par lesquelles€e prince confirme la donation a nous faite par Raoul de Sannerville, clerc bourgeoisde Caen de plusieurs heritages a lui appartenant a Beuville.(Archives Nationales, G 9, 514, N° 70 ; LL, 1480, Cartulaire de Ste-Croix de Caen,p. 13-14 ; APHOSC, 362 et 416). Copies.Philippus Dei gratia francorum rex, notum fecimus universis tarn presentibus quamfuturis quod cum Radulphus de Sannerville, clericus burgensis Cadomensis, domui etfratribus Sanctae Crucis Cadomensis in eleemosinam perpetuam contulerit quidquidipse percipiebat et consueverit percipere et habere in quarto parte Vavassoriae situmin territorio de Buivilla, quod ad summam seu valorem viginti quinque assium et


140 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENmensis ut nos eidem plenam in Ecdesia sua et ejus aedificationem ad ipsam fortificandam,retinendam et sustinendam a parte via Sancti Martini Cadomensis, juxta.quern vicum dicta Ecclesia scita est licentiam valemus concedere de gratia speciali;nos autem super hoc favere volentes si dicta pilaria sine nostro consensu possentfieri et ballivio Cadomensi vel ejus locum tenente, mandatum est ut se super hocdiligenter informavit et informationem inde factam nobis remitteret suo sigillafideliter inclusam visa igitur informatione hujus per Guillelmum Marie locum tenentemdicti Cadomensis Baillivi super praemissis facta et nobis sub suo clausa sigilloremissaqueper eum nobis constitit quod sic dicta pillaria in vico predicto SanctiMartini scilicet intra dictum vicum quolibet videlicet duobus pedibus manualibusconstruantur nullum propter hoc nobis vel alteri fiet praejudicium neque damnumnos primum opus praedictum in domino commendantes et ut nos et charissima consorsnostra Regina priorum operum divinique cultus ibidem celebrandum fiamus partidpesde regia solita dementia ac de speciali gratia auctoritate nostra regia ut dicta pillaria.intra dictum vicum quodlibet videlicet per duos pedes manuales dum taxat superterram construere valeant dicti fratres perpetuo remansura eisdem licentia praesentiumtenere duximus concedendum inhibentes omnibus justiciariis et subditis nostris quisunt et qui pro tempore erunt ne dictis fratres in constructione dictorum pillariorumimpedire vel ipsos occasione molestari seu quomodolibet inquietare praesumant, quodrut robur perpetuae firmitatis obtineant praesentes litteras sigilli nostri fecimus impressionemuniri actum apud Charpranum prope Lochias (Chambourg (?) pres de LochesrI. et L.) anno Domini millesimo tricentesimo vigesimo nono mensis...Collationne stir copie etant en un registre fait par autorite du Lieutenant gSneral awBailliage de Caen par nous soussigne a Caen le 22 9bre 1766.F. YVELIN, prieur de Ste-Croix~III13 Janvier 1359Lettres Patentes a nous accordees par Charles, aine fils du Roi de France, regentduede Normandie et dauphin de Viennois, par lesquelles ce prince a la requete £lui presentee nous donna a perpetuite la maison et chapelle que la Ville nous avaitpretees et ce en recompense de celle que nous occupions auparavant.(Archives Nationales, G 9, 514, N° 70 ; et LL, 1480, p. 23-25 ; APHOSC, 362 et:416). Copies.Charles, aine fils du Roy de France et regent due de Normandie et dauphin deVienne scavoir faisons presens et avenir que nous avons fait ouverture de certaine*lettres ce unzieme jour de Janvier et extrait une lettre de la teneur qui ensuit:Charles aine fils du Roy de France et due de Normandie et dauphin de Viennescavoir faisons a tous presens et avenir que nous avons vu les lettres de notre am£et feal chevalier Messire Robert de Varigue, bailly et capitaine de Caen contenantla forme qui ensuit.A tous ceux qui verront ces presentes lettres, Robert de Varigue, chevalier, baillyet capitaine de Caen, salut; scavoir faisons a tous que comme par vertu des Lettresdud. notre Sire il ait ete ordonne par noble homme et puissant Jean de Melun, lieutenant de M. de Comte de l'Anquerville, son pere, lieutenant du roy et dud. due parmessire Almory de Meulan, chevalier et par plusieurs autres chevaliers nobles et autrescomme toutes les maisons, arbres et mazures d'environ les murs et fosses de lad.ville soient du tout abatus et rase"s a terre entre lesquelles choses le moustier et


PIECES JUSTIFICATIVES 141hostel des freres de Ste Croix de lad. ville soient compris, par quoy il convient denecessite que pour la surete" et enforcement du pals ils soient mis a ruine et a destruction, pour laquelle chose lesd. freres demeurant en iceluy hostel sont venus par deversnous et nous ayant requis a grande justice que nous les voulissions heberger en lad.ville de Caen au regard qu'ils n'ont aucun de puissant par quoy ils puissent faireou acquester demeure ny residence en lad. ville ainsi commanderoit si pourvus n'yetoient qu'ils fussent deserts et fugitifs du pa'fs pour quoy nous inclinant a lad.requeste autant que faire le pouvons en advis et deliberation a plusieurs tant chevaliers, bourgeois et habitans de lad. Ville que autres avons iceux freres mis en ledicthostel ou il souloit avait beguines assis en la paroisse de St-Sauveur dedans la forteressede lad. ville et iceluy hostel preste jusqu'au terme de la St-Michel prochaintenant cependant que ils puissent estre pourvus par devant led. Monsr le Due del'hostel dessusdit ou d'autres. Lequel s'il plaisoit aud. Seigneur a conferme lesd.bourgeois, manans et habitans auroient agreables au regard a, ce que aud. hostel iln'y a aucune religieuse ny professe et si consentiront et sont consentans en tout commea eux en peut apartenir sans ce toutes fois que le terns pendant de laditte demeurepuisse estre prejudiciable aud. Seigneur, en aucune maniere auxd. bourgeois et habitans ny a une be"guine qui est encore de present, pour lesquelles choses les dessusd.nous requierent pour leur valoir en terns et lieu ces Lettres lesquelles nous leuroctroyons. Ce fut fait et donne au grand seel le dix° jour de juillet de l'an de grace1356. Lesquels religieux venus par devers nous suplions que en recompense de lamaison a eux baillee selon le contenu des lettres dessus ecrittes leur voultignonsd'octroyer de plain pied et nous en cause de telles choses dessus dittes et a ce qu'ilse peut mouvoir et doit en cette partie enclinant a lad. suplication ces lettres dessusecrites et le contenu d'icelles ferme et agreable icelles, avouons et aprouvons de notrecertaine science et de notre plaine grace lad. maison avec la chapelle et appartenanced'icelle maison a eux bailee en recompense de la leur comme dit est par nousoctroye, donnons et octroyons par ces presentes pour eux et leurs successeurs en lad.religion en terns present et advenir a toujours et pour que ce soit une chose etablieet stable a perpetuellement, nous avons fait mettre notre seel a ces presentes Lettressauf en autre chose notre droit et autruy.Donne a Breteuil l'an de grace 1356 au mois d'aoust. Aussi signe par Monseigneurle Due, presens Mess. Jacques La Vache et Sariguy en temoin duquel extrait nousavons fait mettre notre seel a ces presentes. Donne a Paris led. jour, l'an de grace1359, ainsi signe. Extrait de votre registre par votre commandement, R. Potiez. Collation faite, enregistree par moy R. Lotin. En temoin desquelles choses nous avons misa cette presente le seel des obligations de la Vicomte de Caen.CollationnS sur copie Stant au long sur un registre fait par autorite du Lieutenantgeneral au bailliage de Caen, par nous soussigne a Caen ce 22 9bre 1766.F. YVELIN, prieur de Ste-Croix.IV20 mai 1368Dicret de LOUIS, Evesque de Bayeux qui approuve et concern e notre Stablissementsur la paroisse de St-Sauveur et nous autorise h transiger avec le CurS de laditeparoisse au sujet des offrandes et enterrements, ce qui a fri execute depuis.(Archives Nationales, G 9, 514, N° 70 ; et LL, 1480, p. 27-29 ; APHOSC, 362et 416). Copies.Universis presentes litteras inspecturis, Ludovicus a permissione divina BajocensisEpiscopus, salutem in Dno et perpetuis temporibus presentibus dare fidem jampridum


142 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENguerris vigentibus in regno franciae et maxime in partibus istis fratribus SanctaeCrucis de Conventu Cadomensi nostrae diocesis Ecclesiola et habitationibus quashabebant prope Clausuram dictae Villae infra metas parochiae Sancti Martini destitutiseisque ecclesia et habitationibus fundatiis destructis et postmodo ex devotione deffucti(sic) Stephanis Davidis eisdem religiosis in pura eleemosina proviso de quibusdamloco et domo continentibus in longitudine, centum pedes et in latitudine quadragintavel circiter juxta Petrum Lormier, burgensem Cadomensem ex una parte et habitationemquae fuit Beguinarum ex altera et de petro supra ripam Odonis, galliced'Odon, et in anteriori parte in ruo franco, gallice franque-rue, dictaque habitationequa fuit Beguinarum seu locus habitationis eisdem se extendite in longum usque adoctoginta pedes et in largum usque ad sexaginta vel circa et est in vico memorato exanteriori parte et ex posteriori parte supra ripam predictam ex uno quoque latterejuxta heredes deffunti Johannes Quatranus et ex aliis juxta dictos religiosos proutsuperius est expressum videlicet infra metas parochiae Sancti Salvatoris de Cadamocum predicti Religiosi affectarent et affectent in dictis locis ad laudem Dei omnipotentiseiusque beatissima virginis Maria et omnium sanctorum adificare ecclesiam ethabitationem cum claustro et aliis edificiis ordini et conventui predictis congruentibusibique recipere eleemosinas offertorum ac etiam sepelire prout fidelium devotio ad hoceum dei auxilio moveretur ipsi religiosi qui predicta legitima facere non possunt nisiprimitus cum curato dicta Ecclesiae Sancti Salvatoris super suo interesse praemissusunanimiter componerent ac etiam concordarent quapropter nobis humiliter supplicantibusut eisdem religiosis et curato licenciam quoad compositionem et concordiamhujusmodi faciendam et auctoritatem ante omnia concedere nos vellemus et ad hocnostrum preberemus consenserim favorabiliter et assensu noveritis quod nos eorumsupplicationi benigne annuentes, habito tamen primitus super hoc concilio, cum fratribus nostris, capitulo nostrae Ecclesiae Bajocensis ad quos collatio, provisio et investituradictae Ecclesiae Sancti Salvatoris pertinet pleno jure eisdem religiosis et curatoin quantum possum auctoritatem et licentiam concedimus ante dictam specialiter etexpresse nostrumque ad hoc praebemus consensum praeterea et assensum in cujus reitestimonium sigillum nostrum litteris praesentibus duximus apponendum actum etdatum anno Dni millesimo trecentesimo sexagesimo octavo, die vigesima mensis maii.Collationne sur copie etant au long un registre fait par autorite du Lieutenantgeneral au bailliage de Caen, le 22 9bre 1766.YVELIN, prieur de Ste-Croix.V15 Janvier 1378Bref du Pape GKEGOIRE XI qui autorise notre maison de Caen a prendre dtoujours le titre de prieuri.(Archives Nationales, G 9, 514, N° 70 ; et LL, 1480, p. 19-20 ; APHOSC, 362et 416). Copies.GREGORIUS XI, Episcopus et servus servorum Dei, dilectis filiis priori et conventusPrioratus Sancte Crucis de Cadamo ordinis Sancti Augustini, Bajocensis dioecesis,salutem et apostolicam benedictionem ; cum a nobis petitur quod justum est ethonestum, tarn vigor aequitatis quam ordo exigit rationis ut id per sollicitudinemofficii ad debitum perducatur effectum qua propter dilecti in Domino filii vestrisjustis postulationibus grato convenientes assensu personas vestras et locum in quo-divino estis obsequio mancipati cum omnibus bonis quae in praesentiarum rationa-


PIECES JUSTIFICATIVES 143biliter possidetis et in futurorum justis modis praestante Domino possetis adipisci subbeati Petri et nostra protectione suscepimus, spedaliter autem terras, decimas, prata,pascua, nemora, possessiones et alia bona sicut eo omnia juste et pacifice possidetisnobis et per nos eidem PRIORATUI auctoritate apostolica confirmamus et presentesscripti patrocinio communimus, salva in praedictis decimis moderatione Concilii Generalisnulli paginam ergo omnino hominum liceat hanc nostrae confirmationis infringerevel ausus sit temerarie contraire si quis autem hoc attentare praesumpseritindignationem omnipotentis Dei et beatorum Petri et Pauli apostolorum se noveritincursurum. Datum Avinione (Avignon) idibus Januarii Pontificatus nostri annosecundo anno domini 1378.CollationnS sur copie etant au long sur un registre fait par autorite du Lieutenantgeneral au bailliage de Caen, par nous soussignS a Caen le 22 9bre 1766.F. YVELIN, prieur de Ste-Croix.VI26 Mai 1367Charte de Pierre DE GARDINIS, prieur de Caen, pour la fondation de deux messespar semaine pour la Reine Jeanne d'Evreux, femme de Charles IV, en reconnaissancede la donation du nouvel emplacement du Couvent.(Archives du Calvados, D 582 ; Original parchemin, seel perdu, et copie posterieure).Universis presentes litteras inspecturis, frater Petrus de Gardinis, prior prioratusfratrum Sanctae Crucis Cadomensis, Baiocensis diocesis, una cum ejusdem loci conventu,salutem in Christo sinceram. Cunctis notum sit et pateat evidenter quod nosprior et fratres supradicti cum fuerimus et simus debitores illustrissime et excellentissimedomine, metuendissime domine, domine regine Johanne, et sibi tenebamussolvere annuatim octo sextaria bledi, videlicet duo sextaria et octo bussellos frumenti,et quinque sextaria et quatuor bussellos ordei, ratione et causa cujusdam hereditatisvocate foedum de Mirovello, de quo non potuimus gaudere tempore guerrarum durantepropter quod nos tenemur nostre predicte domine in arreragiis duodecim annorumvel circa, pro quorum solutione jurata fuit quaedam domus cum ejusdem pertinentiisnominata domus Stephani dicti David sita in vico franco in parochia SanctiSalvatoris Cadomensis que fuit nobis data pro edificatione ecclesie nostre, rationecujus jurationis ac etiam magne paupertatis nos non potuimus nee ad hue possumuspredictam edificare ecclesiam, nee etiam metuendissime domine nostre predicta arreragiasolvere, propter quod eadem domine nostre supplicavimus humiliter et devotequod propter amorem Dei et in pura elemosina ac etiam ex sua benigna gratia velletnobis concedere et dare et penitus relaxare predicta arreragia ac etiam predictamdomum pro edificando ecclesiam nostram, hinc est quod nostra metuendissima dominasupra nominata, considerans nostram maximam paupertatem, mota compassione etpietate, visa per earn nostra humili supplicatione, aperiens ergo nos viscera suaeinfinite bonitatis et gratie, annuens nostra humili supplicatione misericorditer acintuitu pietatis et in pura elemosina, predictam domum nobis contulit et dedit, etadhuc dat et confert pro edificando dictam ecclesiam nostram ac etiam penitus etomnino contulit nobis et dedit, ymo de sua speciali gratia verius quittavit predictaarreragia de toto tempore retroacto ; nos vero qui nolumus esse ingrati super receptionetanti beneficii nobis facti per dominam nostram predictam, eidem domine nostreconcessimus et adhuc concedamus et quod benigne damus omni tempore et in perpe-


144 LE PRIEURE SAINTE-CROIX DE CAENtuum duas missas in qualibet ebdomada celebrandas in ecclesia nostra temporibusduraturis quarum una erit pro defunctis et celebrabitur feria secunda ob remediumanime illustrissimi ac nobilissimi principis Caroli regis francorum defunctisponsi quondam domine nostre praedicte et alia de Cruce feria sexta pro dictadomina nostra, quamdiu vitam duxerit in humanis, et post ipsius decessum, missa deCruce convertetur in missam de Requiem ob ipsos successoresque nostros presenteset futuros, super voto nostre religionis et periculo animarum nostrarum, et adhuc exabundanti promittimus bona fide quod omnia ista faciemus approbari ac confirmariper superiorem et generalem priorem ordinis nostri ut poterimus citius potissime infrafestum beate Marie Magdalene proxime venturum. In cujus rei testimonium sigillumprioratus nostri presentibus duximus apponendum. Datum Cadomi sub sigillo prioratuset conventus dicti loci, eodem anno millesimo tricentesimo sexagesimo septimovicesima sexta die mensis maii.VII14 Aout 1404 et 30 Janvier 1414Copie collationnee en forme executoire de deux Lettres Royaux (sic) a nous accordiespar le Rot Charles VI, I'une de I'annSe 1404 pour avoir et toucher 200 livressur les Aydes en recompense de la demolition de notre premiere matson et nous aideracquirir celle qui nous avait ete accord&e de nouveau; la deuxihme du 30 Janvier1414 confirme ladite donation de 200 livres et lui donne execution conjormhnenth la deliberation des habitants de la ville de Caen.(Archives Nationales, G 9, 514, N° 70 ; et LL 1480, p. 14-19. - APHOSC, 362et 416) Copies.A tous ceux qui ces Lettres verront Adam Roland, secretaire du roy, notre sire,garde du seel des obligations de la vicomte* de Caen, salut; scavoir faisons queaujourd'huy treizteme jour de de*cembre l'an de grace 1457 Raoul Le Couvreur,clerc tabellion jure* en la ville et banlieue de Caen nous a te*moigne avoir vu etdiligemment regarde deux lettres royaux dont I'une est scellee sur simple queue etcire jaulne et les autres non. Lesquelles Lettres est attache un mandement de nosseigneurs les generaux conseillers sur le fait des aydes ordonnees pour la guerre,somme de leurs replis, en la marge de bas un Dilecto uno sigula sur cire vermeil letout sain et entier en seel, signe et ecriture dont les teneurs ensuivent:Et premierement desd. Lettres royaux non scelle*s :30 Janvier 1414 - Charles par la grace de Dieu roy de France aux bailly et vicomtede Caen ou leur lieutenant, salut; ouye avons la suplication des Religieux, prieuret couvent de Ste Croix de Caen contenant comme pour la fortification d'ycelle villede Caen, l'Eglise, cloistre et habitation d'iceux religieux essant ft* ja pteca de*molieet abatue et les matieres prises et employees a lad. fortification sans que lesd. religieuxen ayent eu aucune recompense et leur eust e"te* ordonne certain lieu et place enladitte ville pour parfaire, redifier leur d. Eglise et habitation ainsi qu'ils avoientpar avant led. abattement au dehors lad. fortification et il soit ainsi que pour icellee*gliseet habitation ediffier et supporter les de"pens, frais et missions qu'il leur aconvenu et convient faire chaque jour. Nous, par nos Pre*sentes Lettres a eux donne"eset octroye*es de l'an 1404 pour les causes et declarations contenues et de*clare*es enicelles eussent voulu consentir et accorder et donne* conge* et licence aux bourgeois,manans et habitans de lad. ville et leur donner la somme de 200 francs pour unefois a prendre et avoir pour une fois dessus les aides par nous a eux octroye"s a lever


PIECES JUSTIFICATIVES 145sur eux-memes a la fortification et autres necessites de lad. ville des susd. Lettresn'avoient pas encore sorti leur effet comme entendu avons pour laquelle chose iceuxreligieux nous ont humblement requis sur ce notre signe et permission. Par quoy,nous qui voulons les oeuvres des Esglises augmenter et accroitre et aussi considere ledemolissement delad. Eglise et habitations d'iceux religieux faisant partie de lad.closture et fortifications de lad. Ville dont les matieres d'icelle Eglise et habitationfurent converties et mises au profit de lad. fortification et que aucune restitution neleur en a ete faite par lad. Ville neanmoins comme dit esty nous vous mandons et achacun de vous si comme a lui apartiendra et qui requis en sera que vous fassiezassembler les bourgeois-jures de lad. Ville et autres bourgeois au lieu accoutumed'assembler en tel cas en leur notifiant et montrant lesd. nos Lettres et brefs et aud.verifiees par nos aines et feaux conseillers les generaux sur le fait des aydes ordonneespour la guerre qui lors estoit dont il vous est apparu et apperra et autres nosofficiers de mettier est pour donner leur consentement sur le fait du pavement delad. somme de 200 livres tournois declares en nos dittes autres lettres et faire delivrericelle somme par celui ou ceux qu'il apartiendra aiixd. supliants ou a leur certaincommandement pour faire et consentir les edifications et reparations de leurs dittesEglise et habitation et non ailleurs cas ainsy nous plaist-il estre fait et auxd. supliantsl'avons octroye et octroyons de notre grace speciale par ces presentes nonobstant quelconqueordonnance, mandement, deffenses et Lettres sur ce prises, impetrees ou aimpetrer a ce contraire. Donne a Paris le trentieme jour de Janvier Tan de grace 1414et de notre regne le trente-cinquieme ; ainsi signe par le Roy a la relation du Conseil :J. CHARENTON, et sur le dos est ecrit ce qui ensuit:Le cinqme Jour d'avril Tan 1415 apres Pasques en la presence d'Abraham Aubert,lieutenant general de M. le Bally de Caen et de Gilles de l'Epee, vicomte de Caen,Jean Bernier, Guillaume Le Villain, Pierre de la Prel, Colas Chapel, Jehan Bochd,bourgeois, habitans de lad. ville de Caen, Jean Langloi Audray, Pierre Le Chevallier,Jean Charles, Jean-Simon Marot, le grand maistre Raoult Danjou, Jehan gros parmy,Andre de Foulogne, Guillaume le Gars, Richard Le Dray, Jehan Le Vidame, JehanDufey, Jehan Le Prevost, Robert de la Mouche, M° Jehan Allexandre, Jehan Anget,Michel des Cheux, Jehan de Caumont, Jean Le Verrier, Jehan Ozanne, Clement deHautmare, Colin de Beauvert, Louis Le Gaillard, Guillaume Hebert, Robin deCahagnolles, Thomas Gascoin et plusieurs autres des bourgeois et habitans de lad.ville s'ils consentoient que aux freres, prieur et couvent de Ste-Croix dud. lieu deCaen soit paye pour et en l'acquit de lad. ville de la somme de 200 livres contenueau blanc, la somme de six cent escus qui leur sera payee aux termes et par lamaniere qui sera regardee par lesd. Bourgeois jures et par ce moyen iceux freresreligieux quittent lad. Ville et habitans de laditte somme de 200 livres tournois etde tout ce que demander pourroient pour le demolissement de leur ditte ancienneeglise ainsy signe a l'Eprecy : MORANT.Apris ensuit la teneur desd. Lettres royaux scellees:10 aout 1404 - Charles par la grace de Dieu roy de France a nos aines et feauxles generaux conseillers par le fait des Aydes ordonnes pour la guerre, Salut etdillection, nous avons l'humble supplication des religieux, prieur et couvent de SteCroix contenant que comme au terns passe leur Eglise, toutes leurs maisons et habita-'tions eussent ete abatus pour le terns des guerres pour faire la fortification et clostured'icelle ville et apres la destruction d'icelle Eglise et maisons furent mis et ordonnesa demeurer en un petit hostel qui avait ete aux beguines scituees dedans lad. Villede Caen, lequel hostel n'etait pas ordonne deubment pour faire le service divin ainsyque a religieux appartient et memement auxd. supliants qui sont plusieurs personnes


146lesquels ont depuis continuellement l'aborne a faire une e*glise en lad. ville et habitation pour leur demeurance laquelle e*glise et habitation ils n'ont pu encore tout parfairepour leur grande pauvrete et indigence ny ne pourroient encore sans l'aide denous et des bonnes gens de lad. Ville, lesquels ont bonne devotion et volonte" deleur faire du bien s'il nous plaisoit a leur donner conge, licence et avons consent! quesur les Aydes par nous octroyes ausd. habitans pour faire et employer es fortificationset autres n£cessites pour lad. ville, ils puissent donner aucunnes choses auxd. suplians,Nous inclinant a leur suplication et voulant les ceuvres de Ste Eglise estre toujoursaugmente'es de mieux en mieux et certaines autres causes a ce nous mouvant, consentonsauxdits manans et habitans de lad. Ville, avons donne" et octroye*, donnons etoctroyons de grace speciale par ces presentes conge et licence que sur lesd. Aides parnous a eux octroyes pour lesd. fortifications et autres necessites de lad. Ville ilspuissent donner aux suplians pour eux ayder a parfaire lad. Eglise et habitationjusqu'a la somme de deux cent livres si nous mandons et expressement temoignonsque de notre present conge, licence et consentement vous les faiiez, souffriez et laissiezjouir et oyer plainement et loisiblement sans pour ce les travailler, inquietter ouempescher en maniere aucune, mais voulons que celui ou ceux que led. argent auraou auront bailie qu'il soit alloue en leur compte et rabatu de leur recette par toutle du, il conviendra sans aucun contredit nonobstant quelconque ordonnance, mandementou deffense a ce contraire. Donne a Paris, le dix aoust l'an de grace mil quatrecens et quatre et de notre regne le 24°. Ainsy signe par le Roy, Le Compte deMortain et... de Preaux et autres presens.Ensuit la teneur dudit mandement de nos seigneurs les gen&raux et conseillers surle fait des aides ordonnes pour la guerre, nous consentons que le contenu es lettresdu roy notre sire, attachee a ces presentes sous Tun de nos signes faisant mention desreligieux, prieur et couvent de Ste Croix de Caen soit ente*rine et accompli de pointen point pour les causes le tout en sa forme et maniere que le roy notre dit sire lemande par led. Lettres. Donne a Paris le 28° jour d'Aoust Tan 1404, ainsi sign©J. Gehan, en temoin desquelles choses nous a la relation dud. tabellion avons mis ace present vidimus en transcrit le seel desd. obligations en Ian et jour dessus premierdit. Signe : Le Couvreur.Collationne sur Voriginal Stant en nos mains par nous prieur et procureur de laMaison de Ste-Croix de Caen ce vingt-deux de novembre 1766.YVELIN, prieur de Ste-Croix.


147ILLUSTRATIONSB. Theodore de Celles, fondateur des Croisiers ... 6Armoiries de l'ordre 8Armoiries de Mgr. W. van Hees, maitre general . . 12Saint Louis, bienfaiteur de l'ordre en France . . . 16Sainte Odile, patronne des Croisiers .... 62Habit religieux des Croisiers (XVme siede)' ... 46Couvents des Croisiers 1211-1814 148Region de Caen 33Plan de la ville de Caen (1705) 51Plan du couvent (*) (1772) 105Plan du couvent (1798) 123Rue Gemare : entree du prieure (1965) .... 69Chapelle du prieure (1965) 70Details des fenetres du transept (1965) .... 87Details des arcades (1965) 88Rue des Croisiers (1965) 106Rue des Croisiers : entree du prieure (1965) . . . 124(*) ERRATA: p. 105 ...couvant = couvent.


Cum perrntssu Supeti&rum et Or&incifiiDraft N.V. Vonksteen, Langemark


<strong>CLAIRLIEU</strong>ruisberetiner ; ojwelin ehimaal op ■ndetitiini:GESCHIEDKUNDIGEKRING<strong>CLAIRLIEU</strong>- voor BiH. Verst'appenplPoslrekening 1226.79Nederland :Ko\ 18, Nl/Mi 't.n.v.ADRHS van di mi ■ i; 'M. I'Abht- A. DUKANH, Ardhiviste dioc6i ti i I.AVALB.P. 718 (France).

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