s'appliquent non au présupposé [les électeurs sont tombés dans le piège <strong>du</strong> populisme <strong>et</strong> dela démagogie.] mais — cas de la négation dialogique — à l'énoncé assertif positif [lesélecteurs tomberont dans le piège <strong>du</strong> populisme <strong>et</strong> de la démagogie.], prêté à un autreénonciateur. Il faut, pour renvoyer au présupposé, ajouter la précision d'eux :(17b) […] les électeurs ne tomberont plus dans le piège <strong>du</strong> populisme <strong>et</strong> de ladémagogie, comme cela (contrairement à ce qui) a été dit d'eux 1 .Le présupposé, plus encore que la nominalisation ou l'apposition, apparaît plus comme unfait que comme un dit : l'énoncé enchâssé est bien effacé, transformé en un événement <strong>du</strong>monde.4. Attention, ralentir : dialogisme ; un énoncé peut en cacher un autreJe poserai pour conclure c<strong>et</strong>te brève déambulation en terres dialogiques, où la parole <strong>du</strong>même résonne <strong>des</strong> échos de la parole de l'autre, ne fait sens que de son rapport à elle, uncertain nombre d'interrogations.— Je viens de parler, par image, de terres dialogiques. Cela signifie-t-il qu'il y aurait <strong>des</strong>terres non dialogiques ? Je pense plutôt que le dialogisme est partout, qu'on ne saurait yéchapper. Nous faisons <strong>du</strong> dialogisme sans le savoir, un peu comme Monsieur Jourdain faisaitde la prose — ou plutôt : d'une manière plus nécessaire que lui, qui pouvait échapper à laprose par la poésie —. Les marqueurs étudiés ici (<strong>et</strong> dans Bres 1998) ne sont-ils pas seulementla partie émergée de l'iceberg dialogisme ? Je pense, entre autres outils de dialogisation, auxconnecteurs logiques qui, de façons différentes, présupposent un énoncé (parfois attribuable àl'autre) sur lequel ils enchaînent (ainsi, donc, pourtant, pour autant, en fait, toujours…) ; auxoutils de thématisation : quant à…, en ce qui concerne… ; aux tours véridictoires <strong>du</strong> type lavraie raison… qui présupposent la fausse raison de l'énoncé de l'autre ; aux tours comparatifs<strong>du</strong> type au lieu de…, plutôt que de… ; à l'intonation (à l'oral)… Plus profondément, n'est-cepas la pro<strong>du</strong>ction de sens par les praxèmes qui est elle-même éminemmentdialogique ? L'énonciateur trouve les mots toujours-déjà habités de sens avec lequel/lesquelsil se pro<strong>du</strong>it dans l'actualisation une interaction 2 . C<strong>et</strong>te interaction se résout le plus souventdans la non-conscience de l'à-dire ; elle se signifie parfois jusque sur le fil <strong>du</strong> dire sous formede ratages ou de modalisation autonymique 3 …— Les marqueurs de dialogisme étudiés posent comme e1 aussi bien l'énonciataire E2qu'un tiers : de ce point de vue, il ne semble pas y avoir de différence entre les dialogisationsinterlocutive <strong>et</strong> interdiscursive. Est-ce à dire pour autant que l'on puisse, comme le faitBakhtine, ré<strong>du</strong>ire les marques de l'énonciataire au <strong>discours</strong> que lui prête l'énonciateur ?— On peut s'appuyer sur la distinction parfois esquissée par Bakhtine entre linguistique <strong>et</strong>métalinguistique pour, à la façon de Todorov 1981, réserver la pertinence <strong>du</strong> concept dedialogisme à c<strong>et</strong>te dimension-ci 4 <strong>et</strong> continuer à concevoir la langue dans les cadres structurauxissus <strong>du</strong> saussurisme. Mais le dialogisme ne questionne-t-il pas aussi la langue ? Ne convient-1Encore c<strong>et</strong>te possibilité ne vaut-elle pas pour tous les présupposés : il ne me semble paspossible de renvoyer par modalisation autonymique à celui présent dans Pierre a cessé defumer.2Cf. ici-même les articles de C. Détrie, F. Madray, P. Siblot <strong>et</strong> A. Steuckardt.3 Pour une étude de cas, cf. Bres 1997.4Ce qu'autorise le texte bakhtinien : « Les rapports de dialogue, tout en se rapportant audomaine <strong>du</strong> mot, ne se rapportent pas au domaine de son étude purement linguistique. […](ils) sont l'obj<strong>et</strong> de la métalinguistique » (1963/1970 : 212).
il pas de concevoir que le dialogisme <strong>des</strong> tours étudiés n'est pas seulement un eff<strong>et</strong> discursifmais affecte, ou plutôt fait partie de leur « valeur en langue » ? Au delà, que nombre derelations logiques sont dialogiques ? Vastes questions qu'au stade actuel de ma réflexion, je nepeux que m<strong>et</strong>tre en débat…— Le <strong>discours</strong> est rationalisation ratiocinante : parler sert à se donner <strong>des</strong> images positivesde soi-même. Ce fonctionnement me semble correspondre au double mouvement par lequel lep<strong>et</strong>it d'homme devient suj<strong>et</strong> : introjection <strong>du</strong> bon obj<strong>et</strong>/extrajection <strong>du</strong> mauvais obj<strong>et</strong>. Laprésence <strong>des</strong> autres <strong>discours</strong> ne sert-elle pas aussi à cela : montrer que j'ai raison en montrantque les autres ont tort, en tout cas que j'ai plus raison qu'eux ?— De quel phénomène plus général, concernant le rapport <strong>du</strong> suj<strong>et</strong> au langage <strong>et</strong> par là lesuj<strong>et</strong> en tant qu'être de langage, ces marqueurs sont-ils la trace ? On sait qu'Authier-Revuzm<strong>et</strong> en relation <strong>discours</strong> rapporté <strong>et</strong> modalisation autonymique (qu'elle <strong>analyse</strong> comme <strong>des</strong>phénomènes d'hétérogénéité montrée) avec l'hétérogénéité constitutive : l'hétérogénéitéconstitutive, inconsciente, tient à ce qu'au principe <strong>du</strong> langage il y a l'autre qui construit lesuj<strong>et</strong> en radicale extériorité par rapport à lui-même (« l'autre dans l'un ») ; l'hétérogénéitémontrée consiste à désigner <strong>des</strong> lieux circonscrits de non-coïncidence (l'un en rapport avec sesautres), en dénégation de la non-coïncidence fondamentale. Puis-je étendre c<strong>et</strong>te puissantehypothèse aux marqueurs dialogiques étudiés ? Il faudrait pour cela que ceux-ci relèvent del'hétérogénéité montrée, ce qui n'a rien d'évident. Si <strong>discours</strong> rapporté <strong>et</strong> modalisationautonymique (partiellement) sont à la fois <strong>des</strong> signifiants d'hétérogénéité montrée <strong>et</strong> dedialogisme, peut-on dire de l'interrogation ou de l'extraction qu'elles servent à désigner le<strong>discours</strong> de l'autre ? Difficilement, semble-t-il. Authier-Revuz pose qu'« à travers [lesmarques explicites d'hétérogénéité], le suj<strong>et</strong> s'évertue, en désignant l'autre, localisé, àconforter le statut de l'un » (1982 : 145) (le soulignement est de moi). Plutôt que d'un souci,d'une volonté (s'évertuer pose un choix, fût-il inconscient) de montrer l'autre, la plupart <strong>des</strong>tours dialogiques ne témoignent-ils pas de la difficulté de ne pas le laisser apparaître, voire del'impossibilité de le cacher ? Voilà qui nous ramène à Bakhtine : l'obj<strong>et</strong> dont je veux parler esttoujours déjà médiatisé par d'autres <strong>discours</strong> <strong>et</strong> je ne peux le saisir discursivement qu'à traverseux. Je peux toujours m'évertuer à les dissimuler en ne les citant pas ouvertement, ilsréapparaîtront à mon insu au détour d'un de ces marqueurs qui n'ont de cesse de nous rappelernotre dialogique condition : <strong>et</strong> qui veut faire l'Adam mythique abordant un monde vierge de<strong>discours</strong>… fait le bête. Revenons cependant à l'hypothèse d'Authier-Revuz : <strong>et</strong> si lesmarqueurs dialogiques étaient pour le suj<strong>et</strong> à la fois — mais à <strong>des</strong> niveaux différents— façonsde ne pas pouvoir ne pas mentionner les autres <strong>discours</strong> <strong>et</strong> ce faisant, dans l'aveu de c<strong>et</strong>teimpossibilité, façons de dénier l'hétérogénéité constitutive ? Manières de ne pas pouvoircacher de p<strong>et</strong>its autres pour (se) cacher le grand Autre ? Il semble bien, <strong>et</strong> c'estparticulièrement n<strong>et</strong> dans les tours binaires par ex [… non x mais y], que signaler qu'e1 habitesa parole en x perm<strong>et</strong> d'autant mieux à l'énonciateur E1 de croire que c'est lui <strong>et</strong> lui seul quiasserte y…— le dialogisme n'est-il pas spécifique <strong>des</strong> langues naturelles ? Le chant <strong>du</strong> rossignol, ladanse de l'abeille, l'aboiement <strong>du</strong> chien, s'ils sont bien adressés à un autre (rossignol, abeille,chien), ne sont-ils pas incapables de rapporter la parole de c<strong>et</strong> autre ?Autant de questions, que sous-tend c<strong>et</strong>te certitude : (presque) tout énoncé résonne del'inflexion de voix, pas toujours chères, qui ne se sont jamais complètement tues…Bibliographie
- Page 1 and 2:
Jacques Bres Le 1er septembre 2008B
- Page 3 and 4:
1. Dialogisme syntaxique, clivage1.
- Page 5 and 6:
1.2.2. Clivage et rhématisationUne
- Page 7 and 8:
To na mnie tak warczal(/pronom/ce/p
- Page 9 and 10: équivalence. Qu’est-ce qui justi
- Page 11: occurrences de clivage peuvent-elle
- Page 14 and 15: sieste, ce n’est pas contre le so
- Page 17 and 18: 3. Dialogisme. On peut considérer
- Page 19 and 20: Authier-Revuz J., 1995, Ces mots qu
- Page 21 and 22: La notion de dialogisme a été tir
- Page 23 and 24: 105, « dialogicheskoe vzaimodestvo
- Page 25 and 26: l'Allemagne sont antagonistes] à u
- Page 27 and 28: clivage, conditionnel, hypothèse,
- Page 29 and 30: al. (1985, chap. 1), ou de Kerbrat-
- Page 31 and 32: (13) FM16 - +++ ah ! // "affaire Ha
- Page 33 and 34: Elles ne sauraient non plus nous ma
- Page 35 and 36: 1999, « Vous les entendez ? Analys
- Page 37 and 38: présenté comme ayant déjà statu
- Page 39 and 40: La négation pose la relation E1/e1
- Page 41 and 42: supérieure à celle du terme compa
- Page 43 and 44: contradiction argumentative de w, p
- Page 45 and 46: services à la subordination énonc
- Page 47 and 48: initiaux. Par exemple, au niveau te
- Page 49 and 50: Jacques BresPraxilingUPRES-A 5475 :
- Page 51 and 52: déterminé en même temps par la r
- Page 53 and 54: dans laquelle E1 met en scène un a
- Page 55 and 56: Que la saisie de l'interrogation so
- Page 57 and 58: Le détachement [z, non x, y] 1 se
- Page 59: tactiquement à E1 à masquer 1 l'a
- Page 63 and 64: La dialogisation intérieure du dis
- Page 65 and 66: Un énoncé est relié non seulemen
- Page 67 and 68: Cette approche nous a permis de dé
- Page 69 and 70: - du type de discours politique (no
- Page 71 and 72: Une première lecture permet de rel
- Page 73 and 74: L’énonciateur e1 n’est pas exp
- Page 75 and 76: sur l’argument x [la réaffirmati
- Page 77 and 78: l’avancée de son propre discours
- Page 79 and 80: non image, mais en efficacité » -
- Page 81 and 82: Plus généralement, le scripteur p
- Page 83 and 84: Bres (J.) et Verine (B.), 2003, «