La négation en non (ou ne… pas) réfute l'argument x [(l'Europe est) le bloc économiquepuissant qui pourrait aspirer à la primauté dans le monde.] ; la négation en non seulement nienon pas x mais l'assertion exceptive de x ; la réfutation porte uniquement sur seulement. Desorte que E1 s'accorde avec e1 sur x, le désaccord portant sur le fait que le thème (L'Europe)puisse avoir pour rhème le seul x, E1 affirmant que x doit être complété par y 1 .L'attribution de x à e1 se vérifie dans les tours où l'autre est explicité :(17) Les migrants ne sont pas seulement différents, comme on voudrait le revendiquerpour eux, ils sont également différents, universellement égaux aux autres…, aux hôtes.Comme la comparaison <strong>et</strong> à la différence de la négation, le renchérissement prend enconsidération la parole de l'autre pour lui faire une place ; mais alors que la comparaisonévalue la pertinence de deux arguments sans les relier l'un à l'autre (l'argument de e1 apparaîtsimplement dans sa moindre pertinence), le renchérissement pose que x tire toute sapertinence d'être complété de y (l'argument de e1 apparaît comme partiel). Façon d'intégrer laparole de l'autre pour mieux la dépasser, d'apparaître comme quelqu'un qui loin de s'opposerinfantilement à elle, la dote d'un prolongement qui lui donne toute sa valeur. E1 ne reste pasau niveau de la structure argument-contre argument : il se m<strong>et</strong> en une position haute endépassant l'apparente contrariété <strong>des</strong> arguments pour les poser en une unité dialectiquesupérieure 2 .5. ConfirmationE1 peut rej<strong>et</strong>er (négation), m<strong>et</strong>tre en débat (interrogation), une assertion de e1 : il peutaussi la confirmer, notamment par <strong>des</strong> adverbes modaux comme bien, évidemment,décidément, effectivement, sûrement, <strong>et</strong>c…(18) les difficultés qu'il [Juppé] a rencontrées dans la mise en œuvre de son plan […]ont bien suscité <strong>des</strong> interrogations sur sa crédibilité.(19) la coopération internationale est sûrement souhaitable, à condition qu'elle ne servepas d'alibi pour excuser nos faiblesses.Sans entrer dans le détail <strong>du</strong> fonctionnement spécifique de chaque adverbe, je dirai que,dans ces occurrences, E1 vient ratifier l'assertion correspondante de e1, par ex. pour (18) : [lesdifficultés qu'il a rencontrées dans la mise en œuvre de son plan […] ont suscité <strong>des</strong>interrogations sur sa crédibilité.]. Et ce, de différentes façons : dans (19) par ex., lemouvement de confirmation réalisé par sûrement se prolonge d'une réserve sous forme d'unecondition posée [à condition qu'elle ne serve pas d'alibi pour excuser nos faiblesses]. Nousvoilà tout prêts <strong>du</strong> marqueur dialogique à l'étude <strong>du</strong>quel nous allons maintenant procéder : laconcession.6. ConcessionSoit la structure prototypique [w, bien sûr x mais y]. Argumentativement, E1 asserte w,s'accorde temporairement avec l'assertion de x imputée à e1 qui pourrait venir en1Il serait également intéressant de comparer, notamment <strong>du</strong> point de vue <strong>des</strong> eff<strong>et</strong>s de sens, lerenchérissement <strong>et</strong> la comparaison d'égalité.2N'est-il pas significatif que ce tour soit l'outil de prédilection <strong>du</strong> « penseur de la complexité »E. Morin, dans l'article sélectionné pour le corpus ?
contradiction argumentative de w, pour neutraliser par avance la conclusion qui pourrait êtr<strong>et</strong>irée de x en lui opposant y. L'énoncé x est dialogique. E1 en le concédant à e1 le luiattribue :(20) Le XXème siècle n'est décidément pas un siècle humain. Bien sûr, la démocratie atendance à se généraliser […]. Bien sûr, il y a eu <strong>des</strong> progrès. Mais voilà que […] lespays développés s'acheminent vers une guerilla contre ceux qu'ils appellent <strong>des</strong>« envahisseurs ».La concession se réalise de multiples façons (notamment par la subordination de l'élémenténonciativement hétérogène : [bien que x] 1 ) — pas toujours aussi clairement dialogiques quecelle proposée — dans le détail de l'<strong>analyse</strong> <strong>des</strong>quelles je n'entre pas. Je ferai seulement deuxremarques complémentaires :— le marqueur dialogique peut prendre la forme de l'adverbe oui, intro<strong>du</strong>isant par là un<strong>et</strong>race de dialogalité dans un texte monologal :(21) La réforme économique a bien évidemment échoué. Oui, le pays évolue vers lemarché, mais les conséquences en sont terribles.E1 se montre dialoguant avec un interlocuteur fictif (ici l'énonciataire E2) dont il reprendl'énoncé.— le marqueur dialogique, au lieu de confirmer temporairement l'assertion de e1(mouvement de thèse), peut la poser comme seulement possible, en un mouvementd'hypothèse porté par peut-être :(22) Les manifestants posent peut-être <strong>des</strong> questions sans apporter de réponses, aumoins eux n'attendent pas les "bonnes questions" <strong>du</strong> Front national.7 OppositionNous avons rencontré la conjonction mais — dans le tour négatif [non x mais y], dans lerenchérissement [non seulement x mais y] ainsi que dans la concession [bien sûr x mais y] —accompagnant un marqueur dialogique. Dans quelle mesure mais pose-il lui-même l'altéritéénonciative ? Rappelons la distinction traditionnelle entre mais d'opposition rectificative(correspondant à sino en espagnol, sondern en allemand) <strong>et</strong> le mais d'opposition concessive(correspondant à pero en espagnol, aber en allemand). Seul le second est ici concerné. Onconnaît la <strong>des</strong>cription que Ducrot 1984 en donne :[dans] les énoncés <strong>du</strong> type « p mais q » […] le premier segment (p) est présenté commeun argument pour une certaine conclusion (r), <strong>et</strong> le second pour la conclusion inverse(1984, p. 229).Ducrot pose que lorque (p) est précédé de certes [certes p mais q] (tour que j'ai analysécomme concession), (p) est attribué à un autre « énonciateur », correspondant àl'« allocutaire », mais laisse entendre (j'interprète peut-être ici un texte que je trouve flou : p.230) que le dialogisme — Ducrot dirait la polyphonie — disparaît en l'absence de certes, soitdans [p mais q]. Il illustre son <strong>analyse</strong> de l'exemple suivant : « Je vous demande de me décrire1 Je renvoie à l'article de Danon-Boileau, Meunier, Morel <strong>et</strong> Tournadre (1991, p. 113)pour l'<strong>analyse</strong> de la différence <strong>des</strong> fonctionnements dialogiques dans la coordination <strong>et</strong> lasubordination.
- Page 1 and 2: Jacques Bres Le 1er septembre 2008B
- Page 3 and 4: 1. Dialogisme syntaxique, clivage1.
- Page 5 and 6: 1.2.2. Clivage et rhématisationUne
- Page 7 and 8: To na mnie tak warczal(/pronom/ce/p
- Page 9 and 10: équivalence. Qu’est-ce qui justi
- Page 11: occurrences de clivage peuvent-elle
- Page 14 and 15: sieste, ce n’est pas contre le so
- Page 17 and 18: 3. Dialogisme. On peut considérer
- Page 19 and 20: Authier-Revuz J., 1995, Ces mots qu
- Page 21 and 22: La notion de dialogisme a été tir
- Page 23 and 24: 105, « dialogicheskoe vzaimodestvo
- Page 25 and 26: l'Allemagne sont antagonistes] à u
- Page 27 and 28: clivage, conditionnel, hypothèse,
- Page 29 and 30: al. (1985, chap. 1), ou de Kerbrat-
- Page 31 and 32: (13) FM16 - +++ ah ! // "affaire Ha
- Page 33 and 34: Elles ne sauraient non plus nous ma
- Page 35 and 36: 1999, « Vous les entendez ? Analys
- Page 37 and 38: présenté comme ayant déjà statu
- Page 39 and 40: La négation pose la relation E1/e1
- Page 41: supérieure à celle du terme compa
- Page 45 and 46: services à la subordination énonc
- Page 47 and 48: initiaux. Par exemple, au niveau te
- Page 49 and 50: Jacques BresPraxilingUPRES-A 5475 :
- Page 51 and 52: déterminé en même temps par la r
- Page 53 and 54: dans laquelle E1 met en scène un a
- Page 55 and 56: Que la saisie de l'interrogation so
- Page 57 and 58: Le détachement [z, non x, y] 1 se
- Page 59 and 60: tactiquement à E1 à masquer 1 l'a
- Page 61 and 62: il pas de concevoir que le dialogis
- Page 63 and 64: La dialogisation intérieure du dis
- Page 65 and 66: Un énoncé est relié non seulemen
- Page 67 and 68: Cette approche nous a permis de dé
- Page 69 and 70: - du type de discours politique (no
- Page 71 and 72: Une première lecture permet de rel
- Page 73 and 74: L’énonciateur e1 n’est pas exp
- Page 75 and 76: sur l’argument x [la réaffirmati
- Page 77 and 78: l’avancée de son propre discours
- Page 79 and 80: non image, mais en efficacité » -
- Page 81 and 82: Plus généralement, le scripteur p
- Page 83 and 84: Bres (J.) et Verine (B.), 2003, «