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Syntaxe et analyse du discours - Atelier des Sciences du Langage ...

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105, « dialogicheskoe vzaimo<strong>des</strong>tvo s chuzymi slovami v predm<strong>et</strong>e ») se voit actuellementdésignée par l’appellation heureuse de dialogisme interdiscursif. On peut la m<strong>et</strong>tre en relationavec la notion d’intertextualité, mais elle ne s’y résume pas. A la différence de ce que l’on entendhabituellement par intertextualité – relation qu’un texte pose localement avec ou tel autre texte -,le dialogisme interdiscursif structure fondamentalement tout texte, en ce que celui-ci estobligatoirement réponse (Bakhtine 1952/1979/1984a : 298-299) à <strong>des</strong> textes antérieurs. Un peucomme un tour de parole est toujours à comprendre globalement comme une réponse auprécédent tour, tout <strong>discours</strong>, aussi monologal <strong>et</strong> long soit-il, interagit avec <strong>des</strong> <strong>discours</strong>antérieurs : Les Confessions de Rousseau p. ex « répondent » notamment à deux textes : l’acted’accusation <strong>du</strong> libelle Sentiment <strong>des</strong> citoyens publié anonymement (de fait l’auteur en étaitVoltaire) révélant que Rousseau avait abandonné ses enfants à l’hospice <strong>des</strong> Enfants-Trouvés ; <strong>et</strong>Les Confessions de Saint-Augustin.1.2.3. Dialogisme interlocutifL’orientation <strong>du</strong> <strong>discours</strong> vers <strong>des</strong> <strong>discours</strong> antérieurs va systématiquement de pair avec une autredimension dialogique, son « orientation vers le <strong>discours</strong>-réponse » prévu (1934/1975/1978 : 105)(« napravlenost’ slova na slovo-otv<strong>et</strong> »), soit le dialogisme interlocutif. Tout <strong>discours</strong>, qu’il soitmonologal ou dialogal, est déterminé par l’autre à qui il est adressé. La façon dont Bakhtine comprendc<strong>et</strong>te seconde dimension dialogique est plus riche qu’il n’y paraît. On peut penser qu’il vise par là lefait, abondamment décrit par la rhétorique, la sociolinguistique, la pragmatique ou l’<strong>analyse</strong>conversationnelle, selon lequel le locuteur mo<strong>du</strong>le son <strong>discours</strong> en fonction de son interlocuteur (ou del’image qu’il se fait de lui), <strong>des</strong> connaissances qu’il lui prête, <strong>du</strong> but qu’il poursuit, <strong>et</strong>c. (notion p. ex.d’audience <strong>des</strong>ign (Bell 1984)). Certes, mais ce serait considérablement restreindre c<strong>et</strong>te dimension. Cequ’ajoute le dialogisme interlocutif, c’est (i) que c<strong>et</strong>te prise en compte de l’interlocuteur vise àfaçonner la réponse de l’autre ; <strong>et</strong> surtout (ii) que le locuteur anticipe sans cesse sur c<strong>et</strong>te réponse qu’ilimagine, <strong>et</strong> que c<strong>et</strong>te réponse imaginée influence en r<strong>et</strong>our son <strong>discours</strong> (Bakhtine 1952/1979/1984a: 303). Illustrons ce fonctionnement d’un exemple particulièrement explicite :(1) La xénophobie <strong>et</strong> le racisme feront tâche d’huile. Le terreau sur lequel prospèrent le populisme <strong>et</strong> l’extrême droite serarenforcé de façon inimaginable. Est-ce de l’exagération ? Regardons autour de nous. Dans la plupart <strong>des</strong> pays de l’Union,<strong>des</strong> partis populistes <strong>et</strong> d’extrême droite prolifèrent (…). (J. Nikonoff, Le Monde, 24 mai 2005)L’interrogation « Est-ce de l’exagération ? » m<strong>et</strong> dialogiquement en débat l’énoncé que nousreconstruisons comme : « C’est de l’exagération », qui correspond à la réponse prêtée par le scripteurau <strong>des</strong>tinataire, à la lecture <strong>du</strong> tableau politique particulièrement noir qu’il est en train de brosser.Revenons sur les deux dimensions interdiscursive <strong>et</strong> interlocutive <strong>du</strong> <strong>discours</strong>. En accord avec la racinedialog-, Bakhtine pose le <strong>discours</strong> comme réponse, dans une double interaction qui le constitue en tantque tel : réponse à son amont (dialogisme interdiscursif), <strong>et</strong> à son aval (dialogisme interlocutif).C<strong>et</strong>te distinction, parfaitement pertinente pour les textes monologaux, devient parfois problématique,dans le dialogal. Soit l’enchaînement <strong>des</strong> deux tours suivants :(2) A1 – alors <strong>et</strong> ta fille ça va mieux ?B2 – ma fille, maintenant plus de problèmesLa reprise en B2 <strong>du</strong> SN « ma fille » est analysable en termes de dialogisme interdiscursif dans lamesure où B reprend un segment de l’énoncé de A ; mais également en termes de dialogismeinterlocutif dans la mesure où le <strong>discours</strong> repris est celui de l’interlocuteur. Le dialogal présente denombreux cas de neutralisation de la distinction de ces deux dimensions dialogiques (infra 2.1.).1.3. Les niveaux <strong>du</strong> dialogisme : <strong>du</strong> global au localC’est d’abord au niveau macrotextuel que le <strong>discours</strong> s’inscrit dans une formation discursive, estreprise de (dialogisme constitutif) <strong>et</strong> réponse à (dialogismes interdiscursif <strong>et</strong> interlocutif) d’autres<strong>discours</strong>. C’est donc, par homologie, par le niveau textuel global qu’il convient de commencer

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