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JOURNAL OFFICIEL - Débats parlementaires de la 4e République

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qu'on asphyxie, <strong>de</strong> propos marxiste délibéré. Notamment, on<strong>la</strong> prive <strong>de</strong> retrouver un accès indispensable au crédit dont ellese trouve étrangement privée, dans le même temps où <strong>la</strong> hausse<strong>de</strong>s sa<strong>la</strong>ires, <strong>de</strong>s matières premières, <strong>de</strong>s charges sociales, <strong>la</strong>succion épuisante <strong>de</strong> <strong>la</strong> fiscalité <strong>la</strong> contraignent, pour un mêmevolume d'affaires, à une augmentation cependant vitale <strong>de</strong>trésorerie. {App<strong>la</strong>udissements à droite et à l'extrême droite.)Certes, il <strong>de</strong>meure encore possible d'ouvrir, pour l'économiefrançaise, une pério<strong>de</strong> d'activité et <strong>de</strong> prospérité. Nous neméconnaissons pas que <strong>la</strong> tâche est complexe et qu'elle estconsidérable.Pour le Gouvernement qui se propose <strong>de</strong> <strong>la</strong> réaliser en partantd'une situation grave et, je vous l'accor<strong>de</strong>, en partantmême <strong>de</strong> zéro, <strong>de</strong>s étapes et <strong>de</strong>s accommo<strong>de</strong>ments sont nécessaires.Mais l'expérience démontr», qu'en gestion publique ouprivée, une entreprise qui est établie selon <strong>de</strong>s règles antiéconomiquesest appelée tôt ou tard à péricliter d'abord, à disparaîtreensuite.C'est aux pouvoirs publics qu'il appartient, solennellement,<strong>de</strong> rendre aux Français une confiance qu'ils ont perdue — carils l'ont perdue — dans <strong>la</strong> loyauté <strong>de</strong> l'Etat.C'est à l'Etat d'abord, <strong>de</strong> recréer les conditions <strong>de</strong> restaurationdu crédit public, en donnant lui-même l'exemple <strong>de</strong>srègles simples e! saines qui, dans l'avenir comme dans le passé,et sous tous les régimes, conditionnent <strong>la</strong> santé monétaire etpar conséquent l'équilibre économique et social du pays. Et cen'est pas le trompe-l'œil d'un quarante et unième ministère<strong>de</strong>s économies qui doit nous abuser.Je n'aurai pas Ja cruauté <strong>de</strong> donner ren<strong>de</strong>z-vous au témérairetitu<strong>la</strong>ire éventuel <strong>de</strong> ce maroquin pour apprécier, àPâques ou à <strong>la</strong> Trinité, les résultats obtenus.Aussi bien, ne suffirait-il pas, en ce domaine, d'appliquer les86 milliards d'économies prévus par <strong>la</strong> Commission nationale<strong>de</strong>s économies, établie en février 1950, précisément par l'actuelprési<strong>de</strong>nt du conseil, alors ministre du budget et qui ne tintpas moins <strong>de</strong> soixante-dix séances d'un travail assidu et positif?Qu'est-il advenu du rapport transmis en son temps au conseil<strong>de</strong>s ministres et qui, en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>s économies que je viens <strong>de</strong>mentionner, concluait k -l'adoption d'un certain nombre <strong>de</strong>réformes susceptibles d'entraîner quelque 200 milliards d'économies,soit <strong>la</strong>rgement le montant <strong>de</strong>s impôts supplémentairesqui nous sont proposés comme don <strong>de</strong> joyeux avènement pourl'année fiscale nouvelle.En vérité, ce peuple fait preuve d'une patience et d'une bonnevolonté méritoires, mais le moment est venu d'accor<strong>de</strong>r lesactes gouvernementaux aux discours électoraux et, vou<strong>la</strong>nt <strong>la</strong>stabilité <strong>de</strong> <strong>la</strong> monnaie, l'équilibre économique et social, <strong>de</strong> nepas commencer par le vote d'un projet qui, en l'état actuelou comportement et <strong>de</strong>s pratiques <strong>de</strong> l'Etat, consacre dansl'opinion le sentiment que les pouvoirs publics acceptent l'accélérationtôt ou tard mortelle <strong>de</strong> l'inf<strong>la</strong>tion.Le prési<strong>de</strong>nt Herriot, dans un discours d'une <strong>la</strong>ngue commeà l'acoutumée admirable, lors <strong>de</strong> sa réélection à <strong>la</strong> prési<strong>de</strong>nce <strong>de</strong>cette Assemblée, a condamné les <strong>parlementaires</strong> à vivre héroïquement.Me permettrez-vous <strong>de</strong> considérer que l'opinion n'en <strong>de</strong>man<strong>de</strong>pas tant à ses représentants ? L'héroïsme, nous le réserverons,si vous le voulez bien, aux Français <strong>de</strong> chez nous qui, <strong>de</strong>toutes c<strong>la</strong>sses et <strong>de</strong> toutes croyances, meurent anonymementen Indochine. (App<strong>la</strong>udissements à droite et à l'extrême droite.)Notre héroïsme à nous se ramène au respect <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux vertusmoins exaltantes, mais, pour l'avenir d'une nation tout aussiefficaces que le courage militaire, je veux dire: le bon sens etle civisme.Puissions-nous leur associer <strong>de</strong> surcroît cet esprit <strong>de</strong> fraternité,cette volonté loyale <strong>de</strong> créer entre tous les Français <strong>de</strong>nouvelles re<strong>la</strong>tions humaines, qui doivent nous permettre <strong>de</strong>contribuer à <strong>la</strong> solution <strong>de</strong>s problèmes économiques et techniquespar cette promotion <strong>de</strong> <strong>la</strong> confiance et du cœur qui, selon<strong>la</strong> pensée toujours actuelle <strong>de</strong> Pascal, « au <strong>de</strong>là, ay-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> <strong>la</strong>matière et <strong>de</strong> l'intelligence, <strong>de</strong>meure 1 ordre supérieur <strong>de</strong> <strong>la</strong>vie ». (App<strong>la</strong>udissements à droite et à l'extrême droite.)M. le prési<strong>de</strong>nt. La parole est à M. Paquet.M. Aimé Paquet. Mesdames, messieurs, je veux simplementet brièvement faire connaître <strong>la</strong> position du groupe paysan etd'union sociale sur le problème <strong>de</strong> l'échelle mobile.Il est tout <strong>de</strong> même curieux et décevant, c'est le moins quel'on puisse dire, que dans ce pays l'on^ne s'attaque jamaisaux causes du mai, mais toujours à ses effets.Qui oserait prétendre, en effet, que cette mesure n'est pasun mensonge <strong>de</strong> plus, et que cette Assemblée, en engageantce débat, ne <strong>de</strong>sservira pas le pays et ne va pas seulement lerendre un peu plus malheureux î Qui peut dire qu'en votantune telle mesure, on ne va pas signer l'arrêt <strong>de</strong> mort <strong>de</strong>notre monnaie, c'est-à-dire <strong>la</strong> misère pour tous ceux quipeinent durement ?Pour expliquer leur position, certains préten<strong>de</strong>nt vouloirseulement substituer l'échelle ordonnée <strong>de</strong>s sa<strong>la</strong>ires à l'échelledésordonnée que nous connaissons. Certains disent que noussommes déjà dans l'inf<strong>la</strong>tion.Il est facile <strong>de</strong> leur répondre qu'à une échelle désordonnée,mais sans automatisme, ils substituent une échelle, ordonnéepeut-être, mais automatique, d'un automatisme qui ne pourraque précipiter l'inf<strong>la</strong>tion. Car il faut se poser une question:Quelle est l'inci<strong>de</strong>nce <strong>de</strong>s sa<strong>la</strong>ires sur les coûts <strong>de</strong> production ?Vous savez, en effet, combien est important le facteur sa<strong>la</strong>iredans <strong>la</strong> production.Si l'on tient compte <strong>de</strong>s charges sociales, <strong>de</strong> <strong>la</strong> fiscalité soustoutes ses formes, <strong>de</strong>s marges bénéficiaires légales, normales,soit dans le secteur <strong>de</strong> <strong>la</strong> production, soit dans celui <strong>de</strong> <strong>la</strong>répartition, un sa<strong>la</strong>ire horaire <strong>de</strong> 100 francs est racheté plus<strong>de</strong> 250 francs.C'est là <strong>la</strong> condamnation sans phrase <strong>de</strong> l'échelle mobile.C'est une piqûre <strong>de</strong> morphine qui, sans doute, empêchera <strong>de</strong>souffrir pendant quelque temps, mais a-t-on jamais guéri unma<strong>la</strong><strong>de</strong> avec <strong>de</strong> <strong>la</strong> morphine ?Si elle n'est pas un remè<strong>de</strong> sérieux et durable, si l'échellemobile n'est qu'un palliatif, elle comporte <strong>de</strong> terribles dangers.Les exemples ne manquent pas. La Pologne, l'Allemagne, enont fait l'expérience et chacun sait ce qu'il est advenu <strong>de</strong> îeurmonnaie.On nous parle <strong>de</strong>s Etats-Unis, mais chacun sait qu'elle n'yest pas généralisée, officialisée, qu'elle y est incluse dans lesconventions collectives...M. André Pra<strong>de</strong>au. Ce n'est pas vrai !M. Aimé Paquet. ... et qu'elle y est basée, en gran<strong>de</strong> partie,sur <strong>la</strong> productivité, sur ia prospérité <strong>de</strong> l'entreprise, ce quin'est pas <strong>la</strong> même chose.Nous allons insérer dans <strong>la</strong> légis<strong>la</strong>tion française une loi quiconsacre <strong>la</strong> faiblesse et <strong>la</strong> chute du franc. Cette consécration,qu'on le veuille ou non, ne pourra qu'accélérer <strong>la</strong> hausse <strong>de</strong>sprix et provoquer une inf<strong>la</strong>tion que personne ne pourra plusarrêter.Voter cette loi, c'est faire le procès <strong>de</strong> tous les gouvernementsqui se sont succédé. C'est une utopie dangereuse quine peut qu'entretenir les illusions.Chacun sait, en effet, que ce système ne pourra pas garantirle pouvoir d'achat, bien au contraire. D'autre part, le secteurpublic ne sera-t-il pas frappé durement, lui aussi ? Sera-t-ilpossible dans l'avenir, comme le disait si bien tout à l'heureM. Gaborit, <strong>de</strong> présenter un budget sur les p<strong>la</strong>ns national,départemental et communal''?Telle qu'elle nous est proposée, l'échelle mobile ne risquet-ellepas <strong>de</strong> précipiter le chômage ? Il est en effet possiblequ'en raison d'une mévente générale ou partielle, l'on nopuisse aligner les sa<strong>la</strong>ires sur les taux exigés par l'échellemobile.Est-elle juste ? Il est ceitain que cette mesure se retourneraà terme contre <strong>la</strong> c<strong>la</strong>sse ouvrière, mais elle frappera immédiatementet à mort les retraités, les pensionnés, les rentiers viagers,ceux qui bénéficient d'in<strong>de</strong>mnités <strong>de</strong> ma<strong>la</strong>die, <strong>de</strong> rentesdu travail; elle condamnera 2.500.000 hommes el femmes à <strong>la</strong>misère, à savoir les économiquement faibles et les rentiers; lesrentiers qui ont fait <strong>la</strong> prospérité <strong>de</strong> <strong>la</strong> France, qui ne protestent-pas et qui, misérablement, vivent et meurent en maudissantl'ingratitu<strong>de</strong> et l'injustice <strong>de</strong>s hommes. (App<strong>la</strong>udissementsau centre.)Elle aggravera encore <strong>la</strong> disparité <strong>de</strong>s prix agricoles et <strong>de</strong>sprix industriels.On a dit, il est vrai, qu? le Gouvernement pourra, dans lemois suivant <strong>la</strong> constatation <strong>de</strong> <strong>la</strong> hausse, agir sur les prix.Mais comment le Gouvernement fera-t-il baisser les prix, puisquel'aggravation <strong>de</strong>s impôts, <strong>la</strong> hausse dans les secteurs dobase, les font nécessairement monter ?Comment pourra-t-il agir sur les prix du secteur privé, puisqu'ilne peut même pas agir sur ceux qu'il contrôle directement? (App<strong>la</strong>udissements à droite et à l'extrême droite.)Comment pourra-t-il prendre dans l'affolement, talonné parl'automatisme <strong>de</strong> l'échelle mobile, les mesures économiquesqu'il est incapable <strong>de</strong> prendre dans ies circonstances normales 1Cette hâte ne le contraindra-t-elle pas à prendre <strong>de</strong>s mesuresirréfléchies ? Ces mesures ne seront-elles pas prises à l'encontre<strong>de</strong>s secteurs les moins bien organisés, où l'on supposera que<strong>la</strong> résistance sera <strong>la</strong> moins vive et, bien souvent, ces secteursne sont-ils pas les moins coupables et les plus dignes d'intérêt?Ne sera-t-il pas tenté <strong>de</strong> faire baisser les prix <strong>de</strong>s produitsagricoles par <strong>de</strong>s importations <strong>de</strong> choc ?

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