Allez-vous appliquer l'échelle mobile aux prix agricoles'garantis ?M. le prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> l'association <strong>de</strong>s producteurs <strong>de</strong> blé, dansle discours qu'il a prononcé au congrès national <strong>de</strong>s exploitantsagricoles, a formellement déc<strong>la</strong>ré que, s'il y avait échellepiobile, elle <strong>de</strong>vait également s'appliquer aux prix agricoles.M. Maurice Vioîiette. Evi<strong>de</strong>mment!M, Roger Gaborit. Le Parlement est déjà saisi d'une propositiondans ce sens. Il n'y a là rien d'étonnant, mes chers collègues,car le prix du <strong>la</strong>it, qui varie annuellement et qui estSanction <strong>de</strong>s produits <strong>de</strong> transformation et <strong>de</strong> <strong>la</strong> main-d'œuvre,
mentations que les sa<strong>la</strong>ires. C'est dans ce sens que nous déposeronsd'ailleurs une proposition <strong>de</strong> loi.On ne saurait admettre que les prestations familiales, qui necouvrent qu'une partie <strong>de</strong>s besoins essentiels, connaissent unenouvelle régression. Ce serait contraire à <strong>la</strong> plus élémentairejustice, d'autant, mes chers collègues, que je vous rends attentifsà ce fait que le procédé utilisé <strong>de</strong>puis juillet 1950, quiconsiste à augmenter les allocations familiales proportionnellementà l'augmentation <strong>de</strong>s sa<strong>la</strong>ires, a comme résultat d'affaiblir,chaque fois un peu plus, le pouvoir d'achat <strong>de</strong>s familles comparativementà celui <strong>de</strong>s travailleurs non chargés d'enfants.En effet, une augmentation <strong>de</strong> 15 p. 100, par exemple, <strong>de</strong>sallocations familiales, zeprésentant 50 p. 100 <strong>de</strong>s besoins, ne peutavoir le même effet qu'une augmentation <strong>de</strong> 15 p. 100 d'unsa<strong>la</strong>ire tendant à couvrir le mininrirm vital individuel.Continuer dans cette voie constituerait une régression toujoursplus grave <strong>de</strong> <strong>la</strong> politique familiale, qui aurait comme conséquence<strong>de</strong>s difficultés <strong>de</strong> plus en plus lour<strong>de</strong>s pour les sa<strong>la</strong>riéschargés <strong>de</strong> famille.C'est pourquoi <strong>la</strong> mesure exceptionnelle et transitoire quenous proposons est indispensable. Elle empêchera une aggravation<strong>de</strong> <strong>la</strong> situation déjà difficile, mais je dois ajouter qu'ellene saurait donner entièrement satisfaction aux familles.Nous répétons que les familles françaises, que leur chef soitsa<strong>la</strong>rié, employeur, exploitant agricole ou travailleur indépendant,celui-ci étant particulièrement défavorisé, ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ntrien d'autre que l'application <strong>de</strong> <strong>la</strong> loi du 22 août 1946.M. le prési<strong>de</strong>nt du conseil, dans sa déc<strong>la</strong>ration ministérielle,disait :« L'échelle mobile répond à un souci <strong>de</strong> loyauté envers lessa<strong>la</strong>riés dont <strong>la</strong> situation, dans le passé, périodiquement compromisepar les hausses du coût <strong>de</strong> <strong>la</strong> vie, a dû faire l'objet<strong>de</strong> fréquents rajustements ».C'est aussi une question <strong>de</strong> loyauté pour le Gouvernement<strong>de</strong> prendre en considération le problème crucial du pouvoird'achat <strong>de</strong>s familles.On a pu dire avec raison qu'une catégorie sociale dé<strong>la</strong>isséeest appeleé à disparaître. Quand il s'agit <strong>de</strong>s familles et <strong>de</strong>senfants, c'est <strong>la</strong> survie <strong>de</strong> <strong>la</strong> France qui-est en jeu. Allons-nousprendre une telle responsabilité, surtout à un moment où, vousne l'ignorez pas, <strong>la</strong> courbe démographique est à nouveau menaçante,en ce sens qu'elle fait apparaître une diminution notable<strong>de</strong> <strong>la</strong> natalité ?Allons-nous également rester indifférents <strong>de</strong>vant l'angoisse<strong>de</strong>s rentiers, <strong>de</strong>s pensionnés, <strong>de</strong>s retraités, <strong>de</strong>s vieux ? Poureux, l'échelle mobile peut <strong>de</strong>venir une mesure les conduisantvers une misère toujours plus profon<strong>de</strong>. Allons-nous resterindifférents à leur sort, sous prétexte que ces malheureux n'ontpour se défendre ni <strong>la</strong> grève ni <strong>la</strong> menace ?En fait, mesdames, messieurs, les travailleurs, les rentiers,les vieux, les pensionnés, tous les Français n'atten<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>l'échelle mobile qu'une seule chose : c'est qu'elle ne s'appliqueiamaisl Le fait qu'elle ne serait pas appliquée signifierait que<strong>la</strong> montée <strong>de</strong>s prix est stoppée, que l'inf<strong>la</strong>tion est jugulée.L'échelle mobile ne répond pas à une politique d'efficacité etd'augmentation du pouvoir d'achat. Elle est utile en ce sensqu'elle représente une menace. Cette menace s'adresse à ceuxque <strong>la</strong> hausse du coût <strong>de</strong> <strong>la</strong> vie n'atteint pas et qui en sontparfois responsables ; il faut qu'ils redoutent ies contraintes quele Gouvernement pourrait leur imposer.Cette menace s adresse aussi au Gouvernement, à lui surtout.Nous lui rappelons les termes <strong>de</strong> <strong>la</strong> déc<strong>la</strong>ration d'investiture:« Le programme <strong>de</strong> stabilisation économique et financière duGouvernement <strong>de</strong>vrait avoir pour conséquence d'éviter <strong>la</strong> miseen train <strong>de</strong> ce mécanisme » — l'échelle mobile — « et jerépète que <strong>la</strong> réalisation <strong>de</strong> ce programme constitue le centremême <strong>de</strong> <strong>la</strong> politique du Gouvernement. »Je conclus: Voter l'échelle mobile, c'est bien. Pratiquer <strong>la</strong>politique qui <strong>la</strong> rendrait inutile, c'est mieux; et il faut souhaiterque le Gouvernement puisse, avec l'appui <strong>de</strong> sa majorité,pratiquer cette politique qui fera reculer l'inf<strong>la</strong>tion etnous donnera <strong>la</strong> stabilité. C'est, en fait, encore <strong>la</strong> plus sûregarantie pour les travailleurs, pour les familles, pour les rentiers,pour leur pouvoir d'achat. (App<strong>la</strong>udissements au centre.)M. Marius Patinaud. Il en prend bien le chemin, le Gouvernement!M. le prési<strong>de</strong>nt. L'Assemblée voudra sans doute renvoyer <strong>la</strong>suite du débat à ia prochaine séance. (Assentiment.)— 3 —ORDRE DU JOURM. le prési<strong>de</strong>nt. Ce soir, à vingt et une heures, suite <strong>de</strong> <strong>la</strong>discussion du projet <strong>de</strong> loi re<strong>la</strong>tif à <strong>la</strong> variation du sa<strong>la</strong>ireminimum national interprofessionnel garanti, en fonction ducoût <strong>de</strong> <strong>la</strong> vie (n" 2490.)La séance est levée.(La séance est levée à dix-neuf heures cinquante-cinqminutes.)Le Chef du service <strong>de</strong> <strong>la</strong> sténographie<strong>de</strong> l'Assemblée nationale,PAUL LAISSY.