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Soins palliatifs

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IntroductionIl importe de distinguer soins <strong>palliatifs</strong> et soins en fin de vie. Les soins <strong>palliatifs</strong> concernentles patients atteints d’une maladie potentiellement mortelle. En 2002, l’OMS a revu sadéfinition des soins <strong>palliatifs</strong>: « Les soins <strong>palliatifs</strong> cherchent à améliorer la qualité de vie despatients et de leur famille, face aux conséquences d’une maladie potentiellement mortelle,par la prévention et le soulagement de la souffrance, grâce à une identification précoce età une évaluation soigneuse de la douleur et d’autres problèmes physiques, psychologiqueset spirituels. » 1 . En Belgique, les « décisions en fin de vie » (comme l’arrêt ou la noninstauration de traitements jusqu’au décès du patient à un moment précis préalablementconvenu) font partie intégrante des soins <strong>palliatifs</strong> 2 (FPZV).Dans ce Formulaire MRS, nous ne traitons que d’une partie des soins <strong>palliatifs</strong> : l’aspectsomatique des soins <strong>palliatifs</strong>, particulièrement le traitement médicamenteux.La sélection des médicaments dans les traitements en soins <strong>palliatifs</strong> est, certainement enphase terminale, rarement basée sur des preuves irréfutables. Le contexte particulier dessoins <strong>palliatifs</strong> rend souvent plus difficile la réalisation d’études contrôlées pour chaquetraitement spécifique en raison de considérations éthiques et pratiques. Ainsi, un grandnombre d’options thérapeutiques, présentées dans la littérature et utilisées durant la dernièrephase de la vie, s’appuient sur des expériences pratiques, des opinions d’experts ou desconsensus. L’extrapolation de résultats issus de la recherche en dehors du cadre palliatif strictest courante.1. Contrôle de la douleur en soins <strong>palliatifs</strong>Environ la moitié de l’ensemble des personnes souffre de douleur dans le mois précédent ledécès 3 .En principe, l’échelle de la douleur mise au point par l’OMS est utilisée pour le contrôlemédicamenteux de la douleur:● Palier 1: non opioïdes avec ou sans adjuvants (c.-à-d. des substances n’ayant pas l’analgésiecomme indication première, mais pouvant exercer un effet antalgique)● Palier 2: opioïdes faibles (avec ou sans analgésiques du palier 1 - avec ou sans adjuvants)● Palier 3: opioïdes forts (avec ou sans analgésiques du palier 1 mais jamais avec le palier2 - avec ou sans adjuvants)Une espérance de vie prolongée et la complexité croissante du processus de maladie révèlentles limites de ces principes simples 4 . Il existe de bons arguments pour omettre le deuxièmepalier de cette échelle dans le cadre palliatif: les opioïdes faibles à des doses adéquates ontles mêmes effets indésirables que les opioïdes forts.L’intensité de la douleur peut être évaluée en écoutant le patient, en l’interrogeant directementet/ou en l’observant. Au mieux, la douleur doit être décrite selon sa nature (aiguë, rongeante,brûlante, …), selon sa localisation et ses irradiations en raison des répercussions de cescaractéristiques sur le type de traitement.Quand la communication devient plus difficile à propos de la douleur, il est indiqué d’utiliserune échelle d’évaluation de la douleur, mais il n’y a pas d’objection à l’utiliser plusprécocement. Une échelle visuelle analogique (EVA) est souvent utilisée, mais c’est la plus<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong>115


abstraite des échelles. Une échelle d’évaluation numérique (NRS – Numerical Rating Scale)est une échelle allant de 0 (absence de douleur) à 10 (douleur maximale imaginable) est laplus couramment utilisée 1 . Cette évaluation s’avère souvent difficile chez les personnesatteintes de troubles cognitifs bien que des études montrent que la plupart de ces personnespeuvent comprendre l’une ou l’autre des échelles de la douleur. Il existe notamment deséchelles verbales, visuelles horizontales, verticales et des échelles « douleur sur le visage ».Il existe également des échelles d’évaluation observationnelle pour les personnes âgées noncommunicantes ou atteintes de troubles sévères de la compréhension. Ces échelles utilisentdes signaux non-verbaux comme l’expression du visage, le langage, les sons, la posture, larelation à l’autre, les changements dans la répartition des activités et l’état d’esprit 5 .1.1. Principes généraux du contrôle de la douleur en soins <strong>palliatifs</strong> 61. La réflexion éthique centrée sur les attentes du patient est préalable à toute décision. Lepatient est le meilleur juge de sa douleur; ses plaintes douloureuses doivent donc êtreprises au sérieux 7 . La signification de la douleur pour le patient peut également jouer unrôle.2. Le traitement médicamenteux de la douleur n’est qu’un aspect de la prise en charge dela douleur. Il faut également prendre en considération les éléments psychosociaux etspirituels.3. Une anamnèse précise de la douleur et l’observation du patient sont importantes pourobtenir un contrôle adéquat de la douleur. Une information claire du patient et de sonentourage et un encadrement du soignant sont indispensables.4. Dans la mesure du possible, il faut choisir les médicaments qui au vu de leur compositionet de leur mode d’administration respecteront l’autonomie du patient.5. Il faut traiter une douleur d’origine spécifique avec un (ou des) médicament(s) approprié(s).Il faut aussi penser aux causes ‘mécaniques’ de la douleur (p. ex. rétention urinaire,constipation).6. Une réévaluation continue doit être faite de préférence, et si possible, au moyen d’uneéchelle de douleur, adaptée aux capacités de communication du patient. En phase aiguë,cette évaluation doit pouvoir être faite plusieurs fois par jour, si nécessaire. Il est essentiel,en soins <strong>palliatifs</strong> (terminaux), chez les patients incapables d’utiliser une échelle de douleur,d’observer attentivement les signes suggestifs de douleur. Il importe de convenir de lapersonne qui effectuera cette évaluation.7. Ne pas oublier la possibilité d’associer un traitement adjuvant à un traitement de fond.8. Il faut préférer des médicaments qui permettent un passage rapide à d’autres médicamentsplus forts. Il faut éviter les substances pouvant antagoniser l’effet d’un médicament pluspuissant, p. ex. l’association fixe de tilidine et de naloxone, combinée à de la morphineou l’association de buprénorphine et de morphine.9. Il faut anticiper la douleur par une administration des analgésiques à des moments fixes(en fonction de la durée d’action de la préparation administrée). Il faut veiller à ce quele patient reçoive son traitement contre la douleur 24h sur 24h.10. Il faut informer des effets indésirables et les anticiper.116<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong>


11. Il faut oser aborder les résistances du patient et celles du prescripteur quant à l’utilisationet la posologie des opioïdes forts (notamment la peur de la dépendance ou de précipiterla fin de vie).12. Garantir la continuité des soins en remplissant correctement le dossier médical du patient.1.2. Analgésiques en soins <strong>palliatifs</strong>Si un traitement étiologique est possible, il reste une priorité. Ceci nécessite souventl’intervention d’un spécialiste.Il faut éviter d’utiliser des analgésiques qui ont le même mécanisme d’action ou un mécanismed’action similaire: il est préférable d’administrer une seule substance à une dose plus élevéeplutôt que 2 substances similaires à dose réduite.Tous les patients en soins <strong>palliatifs</strong> qui présentent une douleur modérée à sévère, de quelqueorigine que ce soit, devraient bénéficier d’un essai thérapeutique avec de la morphine 8 .1.2.1. Palier 1: non-opioïdesParacétamolLe paracétamol reste la base de tout traitement visant à calmer la douleur chez les personnesâgées (voir aussi chapitre «Douleur et fièvre»). La potentielle toxicité hépatique constitueune objection relative. Il faut surtout surveiller les patients de très faible poids, chez qui ladose recommandée de 3 g/jour peut déjà causer des troubles hépatiques sévères 9 .Anti-inflammatoires non stéroïdiensLes anti-inflammatoires non stéroïdiens sont souvent utilisés en cas de douleur cancéreuse.S’il existe un risque élevé d’effets gastro-intestinaux indésirables, il convient d’associer unIPP 8 . Le Formulaire MRS opte pour l’ibuprofène 10 en raison de son bon profil efficacité/sécurité. Les doses recommandées chez les personnes âgées sont inférieures à la dosemaximale recommandée.1.2.2. Palier 2: opioïdes faiblesParacétamol + codéineLa codéine, une prodrogue ayant la morphine comme principal métabolite, potentialisel’effet du paracétamol et sera utilisée en association avec celui-ci. L’utilisation de codéineseule n’a pas de place ici 11 . L’équivalence analgésique de cette substance par rapport à lamorphine est estimée à un dixième (soit 10 mg de codéine = 1 mg de morphine). La codéineatteint son plafond analgésique à la dose de 360 mg. Cela signifie que des doses plusimportantes n’apportent pas d’effet antalgique supplémentaire tout en augmentant les effetsindésirables.AutresLe tramadol est approximativement cinq fois moins efficace que la morphine 12 (5 mg detramadol = 1 mg de morphine) et n’est pas plus actif que l’association de codéine etparacétamol 13 . Il peut néanmoins provoquer des interactions médicamenteuses 13 et des effets<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong>117


indésirables multiples 14 , comme les autres opioïdes. Sa place dans cette indication semblelimitée 6 . En outre, il existe une dose plafond (400 mg/jour) pour le tramadol. Il ne constituepas une alternative à la morphine en cas de douleur sévère 15 . Il n’existe pas suffisammentd’arguments pour recommander l’usage du tramadol 8,12 .La pentazocine et la tilidine sont à déconseiller.1.2.3. Palier 3: opioïdes fortsMorphineLa morphine par voie orale est le médicament de référence dans le traitement de la douleurcancéreuse modérée à sévère 12,15 . L’introduction de formes retard de morphine (la morphinemême est à courte durée d’action) a considérablement facilité l’utilisation de ce médicamentdans la pratique. Ces formes retard ne peuvent être prises en considération qu’après avoiratteint une sédation adéquate de la douleur grâce à des doses de morphine à libérationnormale, non prolongée (‘titration’ de la morphine).La dose initiale recommandée chez les personnes âgées est de 2 à 5 mg PO toutes les 4heures. Chez les personnes âgées très affaiblies, la dose initiale recommandée est encoreinférieure. En cas de contrôle insuffisant de la douleur (à évaluer après 24h) 10 , la dose debase peut être augmentée progressivement par palier de 25 à 50% de la dose quotidienne(= titration). Il importe d’observer de près les personnes âgées fragiles lors de l’instaurationd’un traitement par morphine. Elles sont alors exposées à un risque d’hypopnée. L’apparitionde nausées ou de vomissements après l’administration de la première dose peut indiquer unsurdosage.En cas d’accès douloureux paroxystique (c.-à-d. une exacerbation, à début rapide, transitoirede la douleur, d’intensité modérée à sévère, survenant sur une douleur de fond contrôléepar opioïdes) 12,16 , une dose supplémentaire de morphine à action directe peut êtreadministrée 17 . L’administration sous-cutanée est également une option à défendre. Sur baseempirique, il est possible d’administrer une dose équivalente à un sixième de la dosequotidienne totale 18 . Si des doses intercurrentes multiples doivent être administrées pour desaccès douloureux paroxystiques spontanés, les doses de morphine retard seront augmentéesen fonction de la dose quotidienne totale (traitement de fond + doses ajoutées) nécessairepour une sédation de la douleur.Autres médicaments (oraux)Le fentanyl sous forme sublinguale ou de spray nasal semble avoir une petite place dans letraitement d’accès douloureux paroxystiques. Il agit assez rapidement (après 10 minutes). Iln’y a pas d’étude comparative disponible versus morphine orale à libération immédiate 19 . Enfonction de la position de la tête, la solution de fentanyl peut en partie s’écouler vers la gorgeet peut être absorbée au niveau digestif. Le spray nasal implique un risque réel de surdosage(accidentel). Ces produits sont (très) chers et ne sont pas remboursés 20 .L’oxycodone est disponible sous la forme de comprimés à libération prolongée et n’estremboursé qu’après accord du médecin conseil, si d’autres opioïdes forts sont inefficaces oumal supportés. Une dose de 10 mg d’oxycodone oral équivaut à 20 mg de morphine orale.Ce médicament n'offre pas d'avantages particuliers par rapport à la morphine, ni en termes118<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong>


d’efficacité ni en termes d’effets indésirables 21 . Vu les conditions de remboursement, il estconseillé de n’utiliser ce médicament qu’après avis du spécialiste. L’oxycodone est disponiblesous forme de comprimés fondants instantanés. Cette forme, remboursée sans l’accord dumédecin conseil, n’a d’avantage ni par rapport à la morphine à libération immédiate, ni parrapport à l’oxycodone à libération prolongée 22 . La forme parentérale n’est pas remboursée.Une préparation associant l’oxycodone à la naloxone est également disponible. L’effet localde la naloxone permet de contrecarrer la constipation. En l’absence d’études, il n’est pasprouvé que cette association soit plus intéressante qu’un traitement laxatif optimal en casde traitement par opioïdes forts 23 .La méthadone peut être une alternative à la morphine en cas de douleur cancéreuse lorsquela morphine n’est pas suffisamment efficace ou si celle-ci provoque trop d’effets indésirables 12 .La prescription de méthadone doit se faire par ou en concertation avec des médecinsexpérimentés avec ce médicament 6 .L’hydromorphone est indiquée pour le soulagement de la douleur sévère et persistante. Ellen’a été évaluée que dans un nombre très limité d’études publiées dans cette indication 24-26 .L’hydromorphone pourrait faire l’objet d’un essai thérapeutique en cas d’effets indésirablesintolérables avec la morphine 27 .La rotation des opioïdes dans le traitement de la douleur par opioïdes (forts) est basée surl’observation scientifique d’une forte variation entre les individus en termes de réponse desrécepteurs aux opioïdes et dans les propriétés pharmacocinétiques et pharmacodynamiquesde plusieurs opioïdes puissants. Un patient qui répond mal à un opioïde en particulier peutmieux répondre à un autre. Cette observation peut être parfois faite dans la pratique. Lepassage (rotation) d'un médicament à un autre requiert l'utilisation de tables de conversion 28qui ne présentent toutefois pas toujours la même fiabilité. L'aide d'un spécialiste en algologieest à recommander 29 .Systèmes transdermiquesLe fentanyl est disponible sous forme de systèmes transdermiques (à libération prolongée).Il peut être une alternative à l’administration sous-cutanée ou orale de morphine, en cas dedouleur stable et si certains effets indésirables de la morphine ne peuvent être contrôlés(constipation, somnolence diurne) 30 . L’utilisation de systèmes transdermiques en cas detroubles de la déglutition est également justifiée si une administration sous-cutanée demorphine n’est pas appropriée, comme p. ex. quand l’espérance de vie est encore appréciable(de plusieurs semaines). Il est certain que l’administration orale d’un opioïde fort doit êtrepréférée à toutes les autres formes d’administration: la titration des doses peut être faite defaçon optimale et donc mieux répondre aux fluctuations de doses nécessaires. Notons aussique le risque d’intoxication est limité par rapport à une administration transdermique 31 .Le passage d’un traitement par morphine au fentanyl nécessite un respect strict del’équivalence des doses (voir fiche médicamenteuse) 32 : le rapport de conversion entre morphineet fentanyl est de 2,4 à 3,8; la quantité de morphine est exprimée en mg per os et celle dufentanyl en µg libérée par heure, c.-à-d. que 2,4 à 3,8 mg de morphine per os équivaut à 1µg de fentanyl libéré par heure. Si la douleur était soulagée sous traitement par morphineper os, il est préférable d’administrer une dose de fentanyl comprise entre 50 et 75% de la<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong>119


dose équivalente à la dose de morphine de départ. En cas de passage au fentanyltransdermique à cause d’un contrôle insuffisant de la douleur, une dose équivalente à 100%de la dose de morphine peut être utilisée.La concentration sérique efficace ne sera atteinte que 12 à 17 heures après la mise en placedu premier système transdermique, ce qui nécessite l’administration des doses habituellesde morphine pendant au moins 12 heures après la mise en place du système transdermique.Il faut environ appliquer successivement deux à trois systèmes transdermiques avant d’atteindreune concentration sérique stable. Il n’est pas souhaitable de démarrer un traitement parsystèmes transdermiques chez les personnes pour lesquelles il faut être en mesure de modifierrapidement les doses de l’opioïde (comme par exemple en phase terminale). En outre, initierun traitement par système transdermique sans utiliser auparavant d’autres opioïdes estdifficilement justifiable. Le coût des systèmes transdermiques de fentanyl est relativementélevé.La buprénorphine est un agoniste partiel des récepteurs aux opioïdes et peut (à fortes doses)interférer avec d’autres analgésiques opioïdes administrés ultérieurement, ce qui rendimpossible le recours à des entredoses de morphine, et contraint à l’utilisation de plus fortesdoses de morphine lors du passage à d’autres opioïdes forts tel que la morphine. La placeéventuelle de la buprénorphine transdermique dans le cadre palliatif reste à déterminer 33-34 .1.3. Les analgésiques adjuvantsLes analgésiques adjuvants (ou co-analgésiques) sont des substances n’ayant pas l’analgésiecomme indication première. Ils peuvent être utilisés en soins <strong>palliatifs</strong> pour la prise en chargede la douleur, mais, dans ce cas, en complément des « vrais » analgésiques, voire mêmecomme seul traitement en cas de douleurs très spécifiques et plus rares. Ils sont utilisés encas de douleurs nociceptives (somatiques et viscérales) et de douleurs neuropathiques. Dansle cadre du traitement antalgique en soins <strong>palliatifs</strong>, il est préférable de ne pas administrerd’adjuvant avant une optimalisation du traitement par opioïdes, qui constitue la base del’analgésie.1.3.1. Douleur neuropathiquePour le traitement de la douleur neuropathique chez les patients atteints p.ex. d’un cancer,des substances qui ont à peine été évaluées chez ces personnes très fragiles sont souventprescrites. Il n’est pas clair si l’efficacité et les effets indésirables de ces substances sont lesmêmes que chez les patients (cancéreux) non en phase terminale 35 . L'utilisation de cessubstances est donc souvent hors indication (off-label).OpioïdesLe traitement de la douleur neuropathique chronique (lancinante) n’est pas différent dutraitement de la douleur neuropathique paroxystique (fulgurante) dans le contexte palliatif.Les opioïdes restent un premier choix pour le traitement antalgique en soins <strong>palliatifs</strong>. Il n’ya aucun doute quant à leur efficacité dans la douleur neuropathique 36 . La douleurneuropathique est cependant souvent, réputée « résistante » du moins partiellement à untraitement par opioïdes. Les analgésiques adjuvants peuvent être utilisés dans ce cas.120<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong>


Antidépresseurs tricycliquesLes antidépresseurs tricycliques sont les médicaments qui ont montré la meilleure efficacitéen termes de soulagement de certaines douleurs neuropathiques 12 (douleur centrale post-AVC,neuropathie post-herpétique, polyneuropathie diabétique, syndrome post-mastectomie). Ily a très peu d’études sur l’efficacité des antidépresseurs en cas de douleur neuropathiqued’origine maligne 12 .L’action antalgique des antidépresseurs tricycliques est indépendante de leur effetantidépresseur. Elle peut déjà se manifester après quelques jours déjà, mais un résultat optimalpeut aussi n’être atteint qu’après plusieurs semaines.L’amitriptyline est le médicament pour lequel nous disposons des meilleures preuvesd’efficacité 37 . Elle est sélectionnée comme premier choix. L’efficacité antalgique des ISRS oud’autres antidépresseurs plus récents (comme la duloxétine) repose à ce jour sur des preuvestrop limitées 12,37 pour en justifier la sélection.AntiépileptiquesLes antiépileptiques constituent, selon certains guides de pratique, une alternative auxantidépresseurs tricycliques, sans différence montrée en termes d’efficacité ou de tolérance 10,12 .Il n’y a pas de comparaison directes entre les antiépileptiques 12 .La carbamazépine a une efficacité prouvée dans les neuropathies chroniques 38 et peut êtresélectionnée. La dose doit être augmentée progressivement.La gabapentine, un autre antiépileptique, est également prouvée efficace dans cetteindication 39 . Les effets indésirables liés à l’utilisation de carbamazépine ou de l’amitriptylinepeuvent faire pencher la balance en faveur de la gabapentine 40 . Si le choix se porte sur lagabapentine, il faut alors que la dose soit très lentement titrée. Cela peut durer plusieurssemaines 10 .Un effet antalgique a été montré pour la phénytoïne 41 , mais les données sont limitées.La prégabaline a prouvé son efficacité dans plusieurs types de douleurs neuropathiques, etelle est parfois utilisée comme premier choix dans le traitement de la douleur neuropathique,mais cette préférence ne repose pas sur des preuves scientifiques 42 . Aucune étude n’a évaluél’efficacité de la prégabaline chez des patients chez lesquels l’amitriptyline ou la gabapentinese sont avérés insuffisamment efficaces. La sécurité à long terme de la prégabaline n’est pasconnue 43 . Il n’y a pas d’interaction médicamenteuse connue à ce jour; mais on recommanded’utiliser la plus faible dose efficace chez les personnes âgées 44 .AutresLe traitement de la neuropathie réfractaire est peu documenté, notamment l’efficacité desmédicaments plus récents pour cette affection particulièrement difficile à traiter 45 .Sur base de preuves peu solides, la capsaïcine, en utilisation topique, a montré quelqueefficacité dans certaines neuropathies mais entraîne plusieurs désagréments (e.a. irritationcutanée) et n’est pas pratique à utiliser puisqu’elle doit être appliquée plusieurs fois par jour 46 .L’efficacité des emplâtres de lidocaïne à usage transdermique dans la neuropathiepost-herpétique a été montrée. Nous ne disposons pas de données quant à leur efficacitéen cas de douleur d’origine cancéreuse 12 .<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong>121


Il a été suggéré que les cannabinoïdes pouvaient être efficaces en cas de douleursneuropathiques 12 . Nous manquons cependant d’arguments pour leur attribuer une placedans le traitement de la douleur chez les patients atteints de cancer 12 .Douleurs par compressionLa douleur neuropathique causée par une compression tumorale et par un œdème répondaux corticostéroïdes. Il est recommandé d’instaurer le traitement avec une dose relativementélevée, d’en évaluer la réponse après une semaine et de diminuer la dose jusqu’à ce que lesplaintes réapparaissent. La dexaméthasone est sélectionnée dans cette indication et est àdoser en fonction de la réponse clinique. Le traitement doit être arrêté si aucune efficacitén’est constatée dans la semaine 6 .1.3.2. La douleur nociceptive somatique et viscérale 47L’efficacité des myorelaxants, comme les benzodiazépines, et celle des neuroleptiques en casde douleur nociceptive chronique n’ont pas été montrées. Ces deux classes de médicamentsne sont donc pas recommandées dans cette indication.Peu d’arguments convaincants attribuent aux antidépresseurs, et plus spécifiquement auxantidépresseurs tricycliques, un effet antalgique dans différents types de douleur chronique(la douleur neuropathique étant exclue). Ainsi, les guides de pratique n’attribuent pas deplace aux antidépresseurs en cas de douleur chronique maligne.Pour les douleurs osseuses d’origine métastatique, il existe des preuves limitées en faveur del’efficacité (modérée) des bisphosphonates (uniquement ceux administrés par voieintraveineuse). Ils pourraient temporairement soulager certains patients 48 . La complexité dela mesure de la douleur complique l’interprétation de la pertinence clinique de cette efficacité 49et leur rôle, comme traitement de première intention, n’est pas suffisamment prouvé. Cetraitement peut être envisagé en cas d’inefficacité des autres traitements. En outre, cetraitement n’est pas sans danger en termes d’effets indésirables, comme une éventuelleostéonécrose de la mâchoire 12 . La pertinence de cette remarque dans le cadre palliatif peutêtre remise en question. L’intervention d’un spécialiste est de toute façon requise.A ce jour, aucune étude de méthodologie correcte n’a apporté, tout comme pour les AINS,la preuve de l’utilité des corticostéroïdes dans les douleurs osseuses. Les corticostéroïdestrouvent toutefois une indication dans les douleurs provoquées par la pression de métastaseshépatiques au niveau de la capsule de Glisson et en cas de céphalées dues à une tumeurcérébrale primaire ou à des métastases cérébrales 6,50 .2. Contrôle des symptômes (autres que la douleur)Le traitement symptomatique doit se faire en concertation avec le patient. Si rien n’a étéconvenu préalablement, il est toujours possible de trouver un accord. Il est conseillé de faireappel aux équipes palliatives de seconde ligne en temps opportun. Leurs expertise et aidepratique semblent souvent d’une valeur inestimable (ceci est valable pour l’ensemble desaspects des soins <strong>palliatifs</strong>).122<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong>


2.1.Dépression, anxiété, agitation aigeü, confusion et délire, insomnieL’information et le soutien psychologique sont judicieux, non seulement pour le patient maisaussi pour son entourage.2.1.1. DépressionLa dépression est souvent sous-diagnostiquée en phase palliative. Pas mal de symptômesphysiques qui font partie des critères diagnostiques (DSM-IV) de la dépression (insomnie,anorexie, perte de poids, fatigue, apathie) peuvent être causés par le processus de maladieà risque vital elle-même 6 ou par les traitements de celle-ci.Les mesures préventives de la dépression reposent essentiellement sur un accompagnementadéquat médical, psychologique et social du patient. Dans ces circonstances, le patient aprincipalement besoin d’un environnement apaisant et confortable.Nous insistons très fortement sur la valeur très relative des médicaments dans cetteproblématique. En raison du manque de preuves concernant la dépression et son traitementmédicamenteux en soins <strong>palliatifs</strong>, nous renvoyons le lecteur au chapitre «Système nerveux».La nortriptyline et le citalopram peuvent, ici aussi, être pris en considération.2.1.2. Anxiété et agitation aigeüIl n’existe pas d’étude de méthodologie correcte qui évalue un traitement médicamenteuxde l’anxiété en fin de vie 51 . Une benzodiazépine peut être utilisée. En fonction de l’espérancede vie du patient et du moment d’introduction du traitement, elle sera utilisée de préférencesur une période courte ou de façon intermittente afin de prévenir une diminution progressivede son effet anxiolytique. Préconisé dans le chapitre «Système nerveux», le lorazépam peutconstituer un bon premier choix dans cette indication. Au besoin, il peut être administré parvoie parentérale. Le midazolam, par voie sous-cutanée (ou intramusculaire), peut être unealternative. Il faut savoir que des accès d’agitation (paradoxale) peuvent survenir suite àl’utilisation de ces médicaments.2.1.3. Confusion et délireLe délire est très courant chez les mourants 6,52 . L’utilisation de substances sédatives ouanticholinergiques, p.ex., augmente ce risque. L’arrêt soudain d’un traitement prolongé àbase de benzodiazépines est une cause importante de manifestations délirantes. Les opioïdespeuvent également déclencher un délire. Si ces symptômes de délire sont interprétés commeune réaction à l’augmentation des douleurs, une augmentation de la dose d’opioïdes peutentrainer une aggravation du délire.D’autres causes de confusion sont: réplétion vésicale, constipation, douleur insuffisammentsoulagée ou dyspnée, mais aussi les effets indésirables extrapyramidaux des neuroleptiqueset des antiémétiques 6 .Information et prise en charge non médicamenteuseIl faut veiller à rassurer le patient et à le laisser seul le moins possible. Lui garantir lacompréhension de chaque acteur de soins et un environnement sécurisant sont des étapesessentielles 6 . Il est important de bien informer les proches quant à l’origine et à l’évolutionprobable de cette situation, en principe réversible.<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong>123


Prise en charge médicamenteuseSi aucun traitement étiologique ne peut être mis en place (p.ex. à cause d’une interruptionou diminution d’un traitement particulier), il peut parfois être nécessaire de mettre en placeun traitement médicamenteux de très courte durée (p.ex. jusqu’au contrôle de causesréversibles comme une infection ou une déshydratation). Ce traitement peut en d’autres casparfois rester nécessaire jusqu’au décès.Sur base de consensus, les neuroleptiques, comme l’halopéridol, peuvent être indiqués encas de troubles du comportement psychotiques ou de confusion 53 . Les effets indésirables,surtout ceux survenant à long terme, sont non pertinents chez les patients dont l’espérancede vie est très réduite.Une association de doses élevées d’halopéridol (10 à 30 mg par jour) et de midazolam (15à 60 mg par jour), tous deux administrés en sous-cutané, peut être nécessaire en cas d’épisodegrave de confusion aiguë.L’utilisation de benzodiazépines seules au cours d’un épisode de délire n’est pas recommandéeà cause de la survenue de réactions paradoxales.2.1.4. Troubles du sommeilPour les troubles du sommeil, il ne s’agit pas toujours d’insomnies, il est aussi questiond’hypersomnies, de troubles circadiens et de parasomnies (comme la somniloquie, lescauchemars et les terreurs nocturnes). L’insomnie est cependant le trouble le plus courant.Prise en charge non médicamenteuseLa plupart des approches non médicamenteuses de l’insomnie deviennent inopportunes enphase palliative. Créer des circonstances favorables et un environnement optimal au sommeil(pièce suffisamment sombre, matelas adapté, température ambiante adéquate, éventuellementmassage relaxant,…) restent cependant une pierre angulaire de la prise en charge.Prise en charge médicamenteuseL’efficacité des benzodiazépines ou de médicaments apparentés, pour l’insomnie dans lecadre de traitements <strong>palliatifs</strong> ne repose pas sur des preuves solides 54 . Toute benzodiazépineentre, en principe, en ligne de compte. Une benzodiazépine de courte ou de moyenne duréed’action (p.ex. le lorazépam) pourrait être utilisée.2.2. Dyspnée, toux, stridor, râles terminaux2.2.1. DyspnéeVu les causes nombreuses, malignes ou non, et les facteurs intriqués, une prise en chargeindividualisée de la dyspnée est indispensable 55 . Une approche étiologique est indiquée, dansla mesure du possible, pour un traitement optimal (p.ex. bronchodilatateurs, transfusionsanguine,…). Le recours au spécialiste est souvent nécessaire.Mesures non médicamenteusesLe bon positionnement du patient, des traitements physiothérapeutiques, des techniques derelaxation et d’apaisement sont des mesures justifiées. Un degré suffisant d’humidité de l’airambiant et une température environnante pas trop élevée sont indiqués.124<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong>


L’utilité de l’oxygène est très limitée chez les patients dyspnéiques qui ne présentent pasd’hypoxémie 56-58 . L’administration (en continu ou intermittente) d’oxygène peut êtreconsidérée comme une prise en charge non spécifique de la dyspnée 55 .Prise en charge médicamenteuseL’administration systémique (p.ex. sous-cutanée) d’opioïdes, comme la morphine, (à faibledose, si pas d’administration en cours) a un effet favorable en cas de dyspnée 59-60 . Uneévaluation soigneuse de l’effet est essentielle 61 . En cas de dosage correct, le risque dedépression respiratoire est faible 62 . L’administration transdermique de fentanyl semble êtremoins adéquate étant donné le besoin variable en opioïdes 63 .Les benzodiazépines peuvent, par leur effet anxiolytique et sédatif, soulager la dyspnée encas d’échec des mesures non médicamenteuses et des opioïdes 64 . Dans ce cas, le lorazépamconstitue une bonne option 55 . Si une administration parentérale est nécessaire, le midazolampeut être pris en considération.L’association d’un anxiolytique avec de la morphine est également une option pour atténuerles dyspnées sévères. Ainsi, l’administration continue de morphine et de midazolam (5 mgtoutes les 4 heures) semble influencer positivement la sensation de dyspnée 65 .Les corticostéroïdes s’avèrent utile en cas d’obstruction prononcée des voies respiratoires.L’avis d’un spécialiste est souvent souhaitable 55 .2.2.2. TouxL’étiologie de la toux est très variée et plusieurs causes peuvent coexister chez le mêmepatient 66 . Lors du traitement, il importe en premier lieu de veiller à une humidité suffisantede l’air.Toux non productives gênantesEn cas de toux ‘sèche’ et rebelle, un sirop de codéine (voire même un simple sirop sanscodéine) 66 est un bon choix comme traitement symptomatique. L’efficacité n’est toutefoispas montrée.La morphine (p.ex. 2,5 mg jusqu’à 5 mg toutes les 4 heures) par voie orale peut être utileen cas de toux persistante. Si le patient utilise déjà de la morphine, la dose peut alors êtreaugmentée d’un tiers, voire de moitié 6 .Sécrétions respiratoiresSi l’abondance des sécrétions respiratoires devient problématique, la nébulisation d’unesolution physiologique peut apporter une solution. Le tapotage n’est d’aucune utilité 6 .HypersalivationEn cas d’hypersalivation exagérée, l’administration d’un anticholinergique comme lascopolamine (hyoscine) (prescription magistrale à la dose de 0,25 mg par ampoule) peuts’avérer utile. Le bromure de glycopyrronium est une alternative (coûteuse). Sa demi-vie estplus courte et l’absorption plus incertaine 67 .<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong>125


HémoptysieLe traitement de l’hémoptysie est entièrement dépendant de la sévérité du saignement, desa cause et du pronostic de l’affection déclenchante. Un traitement étiologique est bien sûrpréférable, s’il est possible et justifié. En cas d’hémorragie mineure, l’acide tranexamiquepeut être utile.2.2.3. Le stridorLe positionnement correct du patient, c.-à-d. le plus droit possible, peut le soulager.Les corticostéroïdes, comme la dexaméthasone (à une dose de 16 mg par jour), peuventaméliorer rapidement la situation. Certains experts y associent le midazolam pour réduirel’anxiété. L’intervention d’un spécialiste (p.ex. pour poser un stent) est souvent nécessaire.2.2.4. Les râles terminauxLes râles terminaux, dits «du mourant», peuvent être diminués par la réduction de l’apportde liquide, par un positionnement en coucher latéral, thorax relevé, et par une aspiration.L’utilisation d’un anticholinergique, comme la scopolamine (hyoscine) (250 à 400 µg, autotal 1,5 mg/jour) ou la butylhyoscine (20 mg, au total 60 mg/jour) tous deux en sous-cutané,est efficace 6,67 . L’atropine (0,5 mg, jusqu’à 3 mg/jour) en sous-cutané s’avère d’une efficacitééquivalente à celle des produits précités 68 .Le glycopyrronium (200 µg SC) est une alternative 69 . Il a une action plus lente que les autresproduits mais semble causer moins de troubles du système nerveux central et moins detachycardie 70 .Un traitement précoce (préventif) se révèle, dans la pratique, beaucoup plus efficace qu’untraitement tardif.2.3.Nausées et vomissements, hoquet, constipation et occlusion intestinale2.3.1. Nausées et vomissementsUne prise en charge étiologique est à préférer mais elle n’est pas toujours réalisable.La voie d’administration du traitement médicamenteux est choisie en fonction de l’état dupatient.Vomissements causés par les opioïdesLes nausées et les vomissements peuvent être un problème en cas d’introduction d’untraitement par morphinique (première semaine) ou en cas d’administration d’une dose (initiale)trop élevée ou d’une augmentation trop rapide des doses. Une constipation causée par lesopioïdes peut également en être responsable.Après une adaptation des doses de morphine ou éventuellement après un changementd’opioïdes, le métoclopramide (4dd, 10 à 20 mg PO; 40 à 100 mg SC) peut être utilisé 71 .Sur base d’une documentation casuistique, l’halopéridol (2dd, 1 à 2 mg PO ou SC) seraitune alternative 72-73 .126<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong>


Vomissements d’origine métabolique ou gastro-intestinaleL’halopéridol (2 dd 1 à 2 mg SC) est efficace en cas de nausées et vomissements d’originemétabolique, comme lors d’une insuffisance rénale ou d’une hypercalcémie (p.ex. chez despatients avec des métastases osseuses).En cas de parésie gastrique fonctionnelle, un procinétique (en parentéral) comme lemétoclopramide constitue un premier choix 6 .Vomissements d’autre origineEn cas d’hypertension intracrânienne, il faut préférer la dexaméthasone (commencer par 8à 16 mg/jour, pour ensuite redescendre à 4 à 6 mg/jour).L’antihistaminique cyclizine (uniquement disponible en préparation magistrale, 3 fois 25 à50 mg par jour) constitue une alternative.En cas de nausées et de vomissements induits par un trouble vestibulaire, la cyclizine ou lascopolamine (hyoscine) sont indiqués 6,72 .La prise en charge des nausées et vomissements induits par la chimiothérapie est du ressortdu spécialiste 71,74-75 .Les données actuelles ne permettent pas encore d’attribuer une place aux cannabinoïdesdans cette indication 71,76 .2.3.2. Le hoquetPlusieurs mesures non médicamenteuses sont possibles mais toutes ont des effets variableset, dépendant de l’état du patient, ne sont pas toujours faciles à réaliser ou à appliquer:retenir sa respiration avec le cou en extension, stimuler le nez ou le pharynx, pratiquer unemanœuvre de Valsalva,… 77-78 .Le métoclopramide (3 fois 10 mg/jour) constitue un bon choix de traitement du hoquet s’ilest causé par une stase gastrique (gastroparésie/plégie) ou une distension de l’estomac 77 .En cas d’échec du métoclopramide, ou si l’origine du hoquet n’est pas évidente ou encoresi un traitement étiologique est impossible, l’halopéridol est alors à prendre enconsidération 77 .L’utilisation d’autres médicaments (baclofène, chlorpromazine, gabapentine, midazolam)rentre dans le cadre des compétences des spécialistes 77 .2.3.3. ConstipationIl existe des possibilités de mesures médicamenteuses et non-médicamenteuses, tant dansla prévention que dans le traitement de la constipation.Mesures non médicamenteusesIl importe de créer un environnement « sanitaire » qui respecte la vie privée et les possibilitésdu patient. Il faut aussi veiller, dans la mesure du possible, aux prises de liquide et aux activitésphysiques suffisantes.Mesures médicamenteuses préventivesUn traitement préventif de la constipation doit être envisagé lors de l’instauration de plusieurstypes de médicaments (en particulier lors de l’initiation d’un traitement par opioïde, forts et<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong>127


faibles confondus). Un laxatif osmotique (sorbitol ou lactulose) sera de préférence choisidans cette indication.Les études concernant l’efficacité de la (méthyl)naltrexone en cas de constipation causée pardes opioïdes ont montré une efficacité légèrement supérieure à celle du placebo. Ce produitest qualifié d’«éventuellement utile» 79-81 . Il semble prématuré de tirer des conclusions fiablesquant à cette prise en charge, constatation également valable pour la naloxone 82 .Prise en charge médicamenteuseLa cause de la constipation peut être liée à la maladie (p.ex. hypercalcémie due à desmétastases osseuses), et/ou provoquée par la médication. D’autres affections peuventégalement en être responsables (diabète, hypothyroïdie, hypokaliémie, hémorroïdes, fissureanale,…) 6 . Une occlusion intestinale doit être exclue. En cas de doute, il est indiqué d’utiliseruniquement des laxatifs osmotiques (sorbitol ou lactulose).Rappelons qu’une fausse diarrhée (ou diarrhée paradoxale) peut indiquer la présence d’unfécalome. En cas de doute, il est conseillé d’effectuer un toucher rectal. Si le rectum estencombré par un fécalome fort compact, envisager un curage digital, éventuellement aprèsun ramollissement du fécalome par un (ou des) suppositoire(s) de glycérine, éventuellementen association avec du bisacodyl rectal. Un petit lavement avec p.ex. du docusate de sodiumou du citrate de sodium peut également être utile 83 .Si le rectum est rempli de selles molles, il est conseillé d’administrer un laxatif stimulant lepéristaltisme (bisacodyl) par voie orale et éventuellement, en plus, par voie rectale.En cas d’absence de selles dans le rectum, la préférence sera donnée à un laxatif stimulantle péristaltisme (bisacodyl) par voie orale associé à un laxatif osmotique (sorbitol).2.3.4. Occlusion intestinaleLa chirurgie est, en principe, le traitement de référence. Si elle est impossible ou nonsouhaitable, des mesures alternatives doivent être proposées (sonde gastrique par exemplepour les occlusions hautes).Une place est réservée aussi au traitement médicamenteux 84 (en sachant que l’obstructionne sera pas levée!). Ce dernier est toujours parentéral. L’association suivante est recommandée:morphine + butylhyoscine + halopéridol. Les deux premiers produits sont destinés àcombattre les douleurs de coliques associées à une constipation, l’halopéridol est utilisé pourson effet antiémétique. La dexaméthasone est souvent ajoutée pour son effet anti-œdémateux,mais cette attitude est controversée.2.4. Anorexie, cachexie et fatigue2.4.1. Anorexie, cachexieAvant d’instaurer un traitement chez un patient cachectique et/ou anorexique, il est importantde faire comprendre au patient, à son entourage et aux soignants ce que ce traitement peutapporter 85 . Ni une alimentation intensive, ni une prise en charge médicamenteuse de l’anorexien’influencent réellement la durée de survie en cas de stade avancé de la maladie. Des mesuressimples, comme une présentation attrayante des repas, sont parfois plus utiles que desapproches médicamenteuses ou techniques sophistiquées.128<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong>


Alimentation et hydratation médicalement assistéesIl y a trop peu d’études fiables pour se permettre de conclure quant à l’intérêt d’unealimentation médicalement assistée dans le cadre des soins <strong>palliatifs</strong> 86 , constatation égalementvalable pour l’hydratation médicalement assistée 87 . La décision de pratiquer ou non cesinterventions doit être cadrée dans les décisions de fin de vie. Il est essentiel que lacommunication avec le patient et/ou avec ses proches soit claire et en temps opportun, surles aspects médicaux, éthiques et médico-légaux 88 .La situation des personnes âgées présentant un état de démence évoluée qui ne parviennentplus à manger ou à déglutir est un problème particulier en soins <strong>palliatifs</strong>. Un passage à unealimentation par sonde, soit nasogastrique, soit par gastrostomie, est parfois effectué. Il n’apas été montré que cette approche prolonge la durée de vie, améliore la qualité ou l’état dedénutrition du patient 89 . De plus, aucun effet favorable n’a été montré dans la préventionde l’apparition d’escarres 90-91 .Pour ces raisons, nous recommandons de ne pas contraindre les patients à une alimentationet/ou à une hydratation forcée dans cette situation.Options médicamenteusesLes corticostéroïdes ont un effet favorable purement subjectif sur l’impression de ne pas avoirfaim et sur la fatigue du patient. Une dose quotidienne de ou équivalente à 5 mg dedexaméthasone (pouvant être administrée en injection sous-cutanée) est préconisée. L’effetne perdure souvent que quelques semaines 92 . En raison de ses effets indésirables à long termeet de la disparition de son efficacité en cas de traitement persistant, une telle mesure nes’avère applicable que chez les patients avec une courte espérance de vie ou comme traitementsymptomatique de durée brève (maximum 4 semaines) pour les patients qui ont une espérancede vie plus longue et chez lesquels il y a une raison de penser que l’état de fatigue est passager(par ex. pendant ou directement après une chimiothérapie) 85 .En cas d’anorexie, des doses très élevées de progestagènes (acétate de médroxyprogestérone,acétate de mégestrol) auraient une utilité restreinte. Leur efficacité en termes d’améliorationde qualité de vie n’est cependant pas prouvée 93 , ni leur efficacité pour stimuler l’appétit 94 .Ces produits ne sont également pas enregistrés en Belgique avec cette indication. La décisiond’utiliser quand même ces produits pourrait être envisagée lors d’une concertation avec lespécialiste. Une revue de la littérature 95montre que l’utilisation de mégestrol pourraitaugmenter l’appétit et la prise de poids mais incite à s’interroger sur son effet sur la qualitéde vie.L’administration de gastroprocinétiques (métoclopramide ou dompéridone) peut être justifiéechez des patients anorexiques qui, de plus, sont nauséeux ou se plaignent d’une sensationrapide de satiété.Il n’y a pas de données fiables disponibles au sujet des «stimulants d’appétit» (comme p.ex.l’antihistaminique cryptoheptadine).<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong>129


2.4.2. FatiguePrise en charge non médicamenteuseDes interventions psychosociales ont montré un effet modéré sur la fatigue chez des patientscancéreux 96 .Prise en charge médicamenteuseUne revue systématique de la littérature suggère l’efficacité clinique pertinente duméthylphénidate (et des produits hématopoïétiques) en cas de fatigue liée au cancer 97 . Lesmédicaments utilisés en cas de fatigue dans le contexte palliatif ne semblent quemoyennement efficaces 98 . Les données sont limitées et ne nous permettent pas de faire unesélection motivée parmi ces produits, mais leur utilisation peut être justifiée après un avisspécialisé.Une méta-analyse montre que les produits hématopoïétiques ont certes un effet bénéfiquesur la qualité de vie des patients cancéreux anémiques, mais d’autre part, ils augmentent demanière significative le risque de décès et la survenue d’effets indésirables graves 97,99 .Les corticostéroïdes ont un effet favorable purement subjectif sur la sensation de ne pas avoirfaim et sur l’état de fatigue du patient (voir plus haut).2.5. <strong>Soins</strong> de bouchePlusieurs types d’affections buccales peuvent survenir chez les patients en phase palliative:xérostomie, halitose, dysgueusie, inflammations, infections et douleurs de la cavitébuccale 6,100-101 .2.5.1. Principes générauxL’inspection régulière de la muqueuse buccale et le maintien d’une hydratation adéquatesont primordiaux. Le nettoyage prudent des dents, des gencives et de la face supérieure dela langue (au moins deux fois par jour) avec une brosse à dents douce est une mesure efficace.Un bain de bouche régulier avec de l’eau (tiède) ou avec du sérum physiologique,éventuellement avec de la chlorhexidine à 2%, est également utile. Ceci permet d’éliminerdes débris. Il faut toujours être attentif au risque de fausse déglutition.2.5.2. XérostomieLa xérostomie ou sécheresse de bouche peut être provoquée par une affection systémique,par une déshydratation, par le fait de respirer continuellement par la bouche, par inspirationd’oxygène non humidifié, par l’effet anticholinergique d’une médication, par unechimiothérapie ou par une radiothérapie locale. Il faut de toute évidence, si possible, avoirrecours à un traitement étiologique.Mesures non médicamenteusesSucer des glaçons (entourés d’une compresse) ou prendre régulièrement de petites gorgéesd’eau froide peut représenter un soulagement subjectif des symptômes. Les gommes àmâcher ou les bonbons (sans sucre) peuvent apporter un soulagement tout comme la saliveartificielle. L’utilisation de bâtonnets de glycérine et de citron est déconseillée 6 .130<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong>


Prise en charge médicamenteuseL’efficacité de la pilocarpine (préparation magistrale en gélules de 5 mg, 3 fois par jour) estdémontrée surtout si la xérostomie est induite par une médication ou par une affection desglandes salivaires 102-103 . Ce produit peut toutefois provoquer des effets indésirables gênants:transpiration profuse, plaintes urinaires et digestives.2.5.3. HalitoseL’halitose (ou foetor ex ore) n’est pas un problème spécifique des patients en soins <strong>palliatifs</strong>mais survient régulièrement chez ceux-ci et, dans la majorité des cas, est d’origine buccale.Le traitement sera de préférence étiologique. Une bonne hygiène bucco-dentaire est un must(voir plus haut) 104-106 . Les infections doivent être traitées.L’halitose liée à une tumeur au niveau de la bouche, de la gorge, de l’œsophage ou encorecausée par une infection par germes anaérobies peut être traitée par métronidazole (ouéventuellement par clindamycine) par voie orale. Une odeur fécale peut indiquer une occlusion(débutante).2.5.4. DysgueusieLa dysgueusie peut être causée par des problèmes d’hygiène bucco-dentaire, mais aussi parplusieurs affections sous-jacentes, des traitements médicamenteux, des infections buccales…Si un traitement étiologique n’est pas réalisable, les possibilités thérapeutiques se limitentau maintien d’une bonne hygiène bucco-dentaire.2.5.5. Infections buccalesLes infections buccales sont d’origine mycosique dans la plupart des cas en soins <strong>palliatifs</strong>;le Candida étant souvent l’agent responsable. Cette infection peut également avoir étéprovoquée par un traitement anticancéreux. La prévention est parfois possible en utilisantun médicament qui est absorbé par le tractus gastro-intestinal (p.ex. fluconazole, itraconazole,miconazole), mais pas avec des médicaments qui ne sont pas absorbés (p.ex. nystatine,chlorhexidine) 107 .En cas de candidose orale, le miconazole (en gel buccal) est généralement considéré commeun premier choix 108 en raison de son spectre plus large et d’une plus grande efficacité quela nystatine (usage local). La nystatine permet également de traiter avec succès la plupart descandidoses orales 108 . Ce traitement de candidose n’a pas prouvé son efficacité versus placebochez des patients sous chimiothérapie ou radiothérapie 109 . La nystatine est recommandée endeuxième choix, après le miconazole, en cas de risque d’interactions possibles avec lemiconazole. Nous sélectionnons donc le miconazole et la nystatine (voir aussi le chapitre«Infections»).Chez les patients immunodéprimés ou chez ceux présentant une infection à Candida et quine répondent pas suffisamment au traitement topique dans la semaine, il est recommandéd’administrer du fluconazole par voie orale (50 mg/jour pendant 1 semaine).2.5.6. Douleur buccaleDans les cas de douleurs des muqueuses buccales provoquées par une stomatite (avec ousans ulcère) ou par des aphtes, la cause est parfois évidente (p.ex. cytostatiques ou<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong>131


adiothérapie), mais il n’est pas toujours possible de prévenir ou de traiter étiologiquementces problèmes.Certaines mesures (le miel, des comprimés sublinguaux contenant des antibiotiques, lesglaçons,…) ont une efficacité limitée dans la prévention de la mucosite causée par untraitement anticancéreux 110 .Les guides de pratique 6,101 ne sont pas univoques. En cas d’ulcères ou d’aphtes, l’usage d’ungel contenant de la lidocaïne est préconisé. En cas d’aphtes « banals » ce traitement estsuffisant 111 .En cas de lésions plus diffuses et d’une sensation de brûlure dans la bouche et dans la gorge,il est recommandé, en plus d’une analgésie systémique, d’utiliser une suspension de sucralfateou éventuellement une préparation magistrale de morphine en bain de bouche (morphine0,2%) 6 . Un rinçage régulier (toutes les heures) au moyen de sérum physiologique stériles’avère aussi utile. L’avis d’un spécialiste est indiqué.2.6. <strong>Soins</strong> cutanés2.6.1. Ulcérations cutanéesDes soins infirmiers corrects sont primordiaux pour éviter les escarres 91 . Des moyens techniques(p.ex. matelas et coussins spéciaux) et les mesures (p.ex. positionnement) qui permettent dediminuer les pressions locales et les frottements sont les plus importants 112 .Les meilleurs soins ne peuvent cependant pas toujours empêcher l’apparition d’escarres.Le traitement des escarres a été largement discuté dans un numéro du Formul R/ info 113 .Les ulcères cutanés doivent bien évidemment être traités selon les règles de l’art: au besoin,nettoyer la surface de la plaie à l’aide de sérum physiologique ou d’eau du robinet tiède(p.ex. sous la douche) afin d’éliminer les tissus nécrosés et les sécrétions. Les pansementsdestinés à traiter les plaies fortement exsudatives (p.ex. les pansements hydrocolloïdes, …)peuvent être nécessaires.Les plaies malodorantes peuvent être traitées par des pansements absorbants d’odeurscontenant du charbon 114 .Le métronidazole par voie orale ou topique peut considérablement réduire la concentrationdes bactéries anaérobies qui sont souvent responsables de l’odeur gênante 114 . Le métronidazoletopique peut être préparé en gel carbomère à 1%.La prise en charge d’ulcérations cutanées malignes exige des soins particuliers, à réaliser depréférence par ou en accord avec le spécialiste.2.6.2. PruritLe prurit peut, en plus des causes générales (ictère, insuffisance rénale, lymphome, traitementsmédicamenteux…), être la conséquence d’une sécheresse cutanée. Dans ce cas, l’utilisationrégulière de lotions ou de crèmes hydratantes est indiquée. L’application locale de menthol(1% en crème ou dans de la pâte à l’eau) ou d’hydrocortisone (1% en crème) est efficace,tout comme l’administration d’un antihistaminique tel que la cétirizine (ou la loratadine).L'expérience nous apprend qu'un antihistaminique « ancien » (comme p.ex. la dimétindène)est parfois plus efficace.132<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong>


2.7. La fièvreLa fièvre tumorale est un phénomène paranéoplasique et survient chez 5% des patientscancéreux 6 . Bien évidemment, les infections ou une embolie pulmonaire par exemple sontaussi des causes possibles et plus fréquentes de la fièvre.Si le diagnostic de fièvre tumorale est finalement retenu, les anti-inflammatoires nonstéroïdiens à faible dose (p.ex. ibuprofène 200-400 mg 3 fois par jour; diclofénac 25 mg 3fois par jour) et les corticostéroïdes (p.ex. dexaméthasone 4-8 mg/jour, PO ou SC) sontefficaces si le paracétamol ne l’est pas 6 . La température du patient peut être abaissée enadaptant la température environnante, à l’aide d’une ventilation, etc. Les poches de glacesont inconfortables et donc peu indiquées.Les fièvres terminales ne sont généralement pas traitées sauf en cas de risque réel deconvulsions. Les effets indésirables liés au traitement peuvent être plus lourds à supporterpar le patient que la fièvre elle-même. L’expérience montre, par ailleurs, que la fièvre terminalene cède pas devant les fébrifuges et qu’elle est un signe de fin de vie proche.3. Décisions en fin de vie dans le cadre des MRSQuelles que soient les décisions qui seront prises concernant la fin de vie, elles doiventrespecter la volonté du patient qui sera, dans tous les cas, informé correctement au préalable.Dans de nombreux cas, des soins <strong>palliatifs</strong> de confort pourront être poursuivis sans problèmejusqu’au décès du patient. Certains patients souhaiteront néanmoins une prise en chargeplus interventionniste comme la sédation palliative ou l’euthanasie.Pour une discussion plus détaillée des décisions en fin de vie, nous vous référons au FormulR/ info qui traite de ce sujet 115 .3.1. Sédation palliative3.1.1. Définition et principes générauxNous définissons la sédation palliative comme une réduction intentionnelle de l’état deconscience d’une personne en phase terminale qui présente des plaintes impossibles à soulagerpar d’autres moyens (c.-à-d. des plaintes réfractaires) et causent une souffrance « nonsupportable ». Les symptômes réfractaires les plus fréquents sont la douleur, la dyspnée oule délire. Il faut s’assurer qu’il s’agisse bien de symptômes qui ne répondent plus à aucuntraitement traditionnel. L’administration de substances sédatives a pour objectif premierd’obtenir une réduction de l’état de vigilance du patient afin qu’il ne soit plus conscient dessymptômes et des plaintes responsables de sa souffrance insupportable 116 .Dans la sédation palliative, théoriquement réversible, nous partons du principe qu’une foisla sédation entreprise, elle sera maintenue jusqu’au décès. La décision d’entamer une sédationpalliative implique une estimation de la survenue du décès à court terme (max. 15 jours enfonction de l’arrêt de l’alimentation et de l’hydratation) 117 . Les prestataires de soins ont parfoisdes difficultés à estimer le pronostic de la date du décès. Toutes les personnes concernéesdoivent en être informées préalablement, laissant ainsi la possibilité aux proches de faire leursadieux.<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong>133


3.1.2. Réalisation pratiqueTout acte ou intervention doit impérativement être discuté préalablement avec le patient ou,s’il en est incapable, avec son représentant. Les modalités de la sédation en termes deprocédure à suivre, de dosage des médicaments et autres doivent être discutées de façonexplicite et convenue avec les autres soignants dans un cadre interdisciplinaire indispensable.Le médecin doit être présent dès le début et doit assurer sa présence, ou au moins sadisponibilité, jusqu’à ce que le patient soit serein. L’intervention d’une équipe spécialisée ensoins <strong>palliatifs</strong> avec un anesthésiste est indiquée en cas de problématique complexe.Toute alimentation ou hydratation (artificielle) et tout traitement médicamenteux oral doitêtre stoppé. Poursuivre l’hydratation peut altérer le confort du patient et ainsi être qualifiéd’acte médical inutile 118 . Toute analgésie est poursuivie et doit être administrée par voiesous-cutanée et plus par voie orale.Le midazolam sera utilisé en premier lieu. L’administration continue en sous-cutané à l’aided’une pompe est la méthode la plus adéquate. Des doses plus faibles, p.ex. 10 à 15 mg par24h, sont recommandées chez les patients plus âgés, affaiblis et amaigris (< 60 kg). Si unedose de midazolam, supérieure à 50 mg par 24h, est nécessaire pour atteindre le niveau desédation souhaité, il est indiqué de passer à l’étape suivante (c.-à-d. l’ajout d’un produit). Ilest dès lors recommandé de faire appel à une équipe de support palliatif. Par ailleurs, lanécessité d’avoir recours à des substances autres que le midazolam est plutôt limitée. L’ajoutde l’halopéridol à la dose de 5 à 10 mg SC par 24h est éventuellement possible en casd’agitation importante.Pour la majorité des patients résidant en MRS, fortement affaiblis par une affectionpréexistante, par des apports liquidiens et alimentaires réduits et compte tenu de leur âgeélevé, la sédation ne dépassera guère 2 jours avant que le décès ne survienne 119 . Il arrivecependant qu’elle dure plus longtemps que prévu; il faut alors veiller à prendre les mesuresnécessaires notamment afin de prévenir les escarres . Cet aspect de la sédation doit égalementêtre discuté au préalable avec le patient.Il est toujours possible que la sédation palliative échoue: il n’est parfois pas possible d’obtenirune sédation suffisamment profonde. Paradoxalement, une agitation peut survenir et serévèle souvent difficile à contrôler, même lors de l’utilisation de doses très élevées de sédatifs.La morphine n’occupe, en tant que sédatif, aucune place dans la sédation palliative. Desdoses élevées de morphine entraînent une certaine somnolence mais ne permettent pasnécessairement d’obtenir une réduction adéquate de l’état de conscience visée dans lasédation palliative. Par ailleurs, l’administration de morphine comme analgésique ou en casde dyspnée doit être poursuivie 117 .3.2. Euthanasie3.2.1. Définition et principes générauxLa législation en matière d’euthanasie définit l’euthanasie comme un acte pratiqué par untiers qui met intentionnellement fin à la vie d’une personne à la demande de celle-ci. Cetacte n’est pas considéré comme un délit si les conditions spécifiques, relatives à la loi, sontrespectées, et si le médecin suit la procédure bien définie. Le médecin qui pense disposerd’une expérience insuffisante pour pratiquer une euthanasie peut faire appel à des médecins134<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong>


qui disposent de cette expertise (p.ex. médecins EOL (« End Of Life ») ou aux médecinsréférents des équipes palliatives de seconde ligne. Dans le cadre des MRS (mais égalementau domicile), le médecin peut se faire assister par un infirmier référent en soins <strong>palliatifs</strong> etil est recommandé, et aussi imposé par le législateur qu’une concertation étroite entre lesdifférentes disciplines concernées par les soins (moyennant le consentement du patient) aitlieu.Les procédures à suivre diffèrent et dépendent de la situation dans laquelle le patient setrouve. Nous référons aux instructions et aux données provenant des autorités belges 1203.2.2. Réalisation pratiqueL’euthanasie est pratiquée par induction d'un coma médicamenteux, suivie d’un arrêtcardio-respiratoire d’origine médicamenteuse. Cette approche doit être exposée au patient(et à ses proches si le patient le souhaite). Il faut discuter avec le patient (et avec ses proches)du choix des produits euthanasiques et de leurs modes d’administration.Tout traitement médicamenteux et tout autre matériel nécessaire doivent être prescrits aunom du patient avec la mention qu’il s’agit d’une prescription dans le cadre d’une euthanasie.En principe, il revient au médecin d’aller chercher personnellement ces produits à l’officine.Le pharmacien est en droit de ne pas vouloir collaborer et de refuser ainsi la délivrance deces produits. Il doit alors référer le médecin à un confrère pharmacien. Toutes les dispositionsnécessaires doivent être prises en temps opportun. Les produits non utilisés seront par lasuite rapportés à la pharmacie par le médecin (cette dernière démarche étant unerecommandation et pas une obligation légale).Il est important de s’assurer préalablement (p. ex 1 jour à l’avance) que la voie intraveineuseest aisément accessible (prévoir éventuellement un cathéter ou une aiguille papillon pourperfusion, p.ex. via une chambre implantable portacatch s’il y en a une).Commencez par le thiopenthal: 20 mg/kg (1 g dilué dans 10 ml de sérum physiologique) etadministré en bolus IV. Ce barbiturique peut parfois induire un coma profond en quelquessecondes et souvent provoquer un arrêt respiratoire et cardiaque entrainant le décès dansles 5 minutes.(Prescription: R/ Pentothal DT. un flacon IV d’1 g - toujours prévoir des réserves suffisantes)La seule spécialité disponible à base de thiopental a été retirée définitivement du marchébelge en 2011. Pour palier l’indisponibilité de thiopental injectable en Belgique, unedérogation permettant l’importation et la distribution sur le marché belge d’un médicamentéquivalent provenant de l’étranger a été accordée 121 . Le propofol (Diprivan®) constitue unealternative au thiopental et ne peut en principe être délivré que par une officine hospitalière.L’administration de ce produit doit toujours être établie en concertation avec un anesthésiste(en raison de l'utilisation de doses assez élevées). Le propofol est administré en bolusintraveineux à la dose de 10 mg/kg (ampoule-seringue d’1 g/50 ml). Le Diprivan est irritantpour les veines, ainsi on recommande d’injecter préalablement et lentement 2ml deXylocaïne®. Le paralysant neuromusculaire (voir plus loin) est administré immédiatementaprès la dose de propofol.Le vécuronium (0,3 mg/kg) ou l’atracurium (0,5 mg/kg) sont des paralysants neuromusculairesqui peuvent être ajoutés au thiopental (uniquement si le patient est plongé dans un comaprofond mais qu’il respire encore), mais qui doivent toujours être administrés lors de l’utilisation<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong>135


de propofol. Ces substances provoquent un arrêt respiratoire dans les 2 minutes, entraînantà son tour un arrêt cardiaque 122 .(Prescription: R/ Norcuron DT. un emb. 10 x 4 mg + solv. ou R/ Tracrium DT. un emb. 10 x25 mg)L’administration d’un barbiturique en potion, que le patient peut éventuellement avaler luimême, est également une option. Le patient doit pouvoir ingérer cette préparation sur uncourt laps de temps. Le médecin doit être présent lors de l’ingestion. Du métoclopramidepeut être préalablement administré pour prévenir l’apparition de vomissements.Il s’agit d’une préparation magistrale sous forme de sirop (à conserver au réfrigérateur):R/PentobarbitalAlcool à 96%Aqua purificataPropylène glycolSaccharinum natricumSirupus simplexAnisi aetroleum9g16,2 g (20 ml)15 g10,4 g (10 ml)250 mg65 g1gLes opioïdes et les benzodiazépines n’ont pas de place comme produits euthanasiques. Ilspeuvent parfois être à l’origine d’effets indésirables imprévisibles (p.ex. vomissements,agitation) et causeront rarement le décès du patient.Date de recherche dans la littérature: fin juillet 2011.136<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong>

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