11.07.2015 Views

Sentiment de violation du contrat psychologique et stress ... - cergam

Sentiment de violation du contrat psychologique et stress ... - cergam

Sentiment de violation du contrat psychologique et stress ... - cergam

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

UNIVERSITE DE DROIT, D'ECONOMIE ET DES SCIENCES D'AIX MARSEILLEUNIVERSITE PAUL CEZANNEINSTITUT D'ADMINISTRATION DES ENTREPRISESCENTRE D’ETUDES ET DE RECHERCHESUR LES ORGANISATIONS ET LA GESTIONSENTIMENT DE VIOLATION DU CONTRATPSYCHOLOGIQUE ET STRESS PERCU :EXPLORATION EMPIRIQUE SUR UNE POPULATIONDE COMMERCIAUX SUITE A LA MISE EN PLACED’UN DISPOSITIF DE SURVEILLANCEDANS LEURS VEHICULESVirginie MOISSON*W.P. n° 781 Janvier 2007* Etudiante en Doctorat en Sciences <strong>de</strong> Gestion, rattachée au CEROG-IAE d’Aix-en-Provence, Université PaulCézanne Aix Marseille III, Clos Guiot, Puyricard, CS 30063, 13089 Aix-en-Provence Ce<strong>de</strong>x 2Toute repro<strong>du</strong>ction interditeL'institut n'entend donner aucune approbation, ni improbation aux opinions émises dans cespublications : ces opinions doivent être considérées comme propres à leurs auteurs.Institut d’Administration <strong>de</strong>s Entreprises, Clos Guiot, Puyricard, CS 3006313089 Aix-en-Provence Ce<strong>de</strong>x 2, FranceTel. : 04 42 28 08 08.- Fax : 04 42 28 08 00


SENTIMENT DE VIOLATION DU CONTRAT PSYCHOLOGIQUE ET STRESSPERCU : EXPLORATION EMPIRIQUE SUR UNE POPULATION DECOMMERCIAUX SUITE A LA MISE EN PLACE D’UN DISPOSITIF DESURVEILLANCE DANS LEURS VEHICULESRésuméDe part leurs activités : le contact avec la clientèle, les négociations, le tempspassé sur la route, les objectifs à atteindre, les commerciaux subissent une fortepression dans leur travail qui peut se tra<strong>du</strong>ire par une plus forte tension perçueou subie que dans d’autres métiers. Le concept <strong>de</strong> <strong>contrat</strong> <strong>psychologique</strong> créépour préciser les obligations <strong>et</strong> les promesses qui sont perçues par l’employeur<strong>et</strong> l’employé joue un rôle déterminant dans la relation d’emploi ; notammentlorsque le salarié juge que les promesses ne sont pas honorées, con<strong>du</strong>isant alorsà un sentiment d’injustice, <strong>de</strong> déception <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>stress</strong>. En eff<strong>et</strong>, la <strong>violation</strong> <strong>du</strong><strong>contrat</strong> <strong>psychologique</strong> peut perm<strong>et</strong>tre d’expliquer les attitu<strong>de</strong>s <strong>et</strong> lescomportements suite à <strong>de</strong>s changements dans le travail. Ainsi, l’obj<strong>et</strong> <strong>de</strong> c<strong>et</strong>terecherche est d’i<strong>de</strong>ntifier quelles sont les différentes réactions d’une population<strong>de</strong> commerciaux suite à un changement dans leurs habitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> travail <strong>et</strong>l’importance <strong>de</strong> clarifier le <strong>contrat</strong> <strong>psychologique</strong> en vue <strong>de</strong> ré<strong>du</strong>ire le <strong>stress</strong>professionnel nuisible au bien-être <strong>et</strong> à la performance <strong>de</strong>s salariés.Mots-clésStress, soutien social, stratégie d’ajustement, commerciaux.FEELING OF VIOLATION ABOUT THE PSYCHOLOGICAL CONTRACT ANDSTRESS: THE CASE OF SALESPEOPLEAbstractKey wordsBecause of the following : contact with the customers, negotiations, time spenton the road, objectives to be reached, sales representatives un<strong>de</strong>rgo a strongpressure in their work which can result in a stronger tension.The concept of psychological contract; created to specify obligations andpromises b<strong>et</strong>ween employer and employee, plays a <strong>de</strong>termining part in thecontract. In particular, when the employee judges that the promises are notkept, leading then to a feeling of injustice, disappointment and <strong>stress</strong>. In<strong>de</strong>ed,the <strong>violation</strong> of the psychological contract can make it possible to explain theattitu<strong>de</strong>s and the behaviours following changes at work.Thus, the object of this research is to i<strong>de</strong>ntify what the various reactions ofsalespeople following a change in their practice of work are. It’s also importantto clarify the psychological contract in or<strong>de</strong>r to re<strong>du</strong>ce the harmful professional<strong>stress</strong> to the well-being and the performance of the employees.Stress, social support, salespeople.2


INTRODUCTIONDepuis le début <strong>de</strong>s années 70, l’intérêt pour le phénomène <strong>de</strong> <strong>stress</strong> organisationnel n’a cessé<strong>de</strong> croître. En pratique tous les secteurs d’activité sont concernés, <strong>et</strong> la considération <strong>du</strong> <strong>stress</strong><strong>de</strong>s employés a stimulé la recherche. Dans la plupart <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s, le phénomène <strong>du</strong> <strong>stress</strong> a étéabordé comme la conséquence <strong>de</strong> changements dans la vie <strong>de</strong> l’indivi<strong>du</strong> (Dohrenwend <strong>et</strong>Pearlin 1982), <strong>de</strong> perceptions/contradictions <strong>de</strong> rôles (Khan <strong>et</strong> al. 1982 ; Koch <strong>et</strong> al. 1982).Les employés développent <strong>de</strong>s croyances sur leurs rôles <strong>et</strong> attachent une importanceconsidérable aux activités <strong>de</strong> leurs rôles. Lorsque <strong>de</strong>s événements organisationnelssurviennent <strong>et</strong>/ou lorsque l’employé perçoit <strong>de</strong>s contradictions entre son rôle actuel <strong>et</strong> celuiassigné, le <strong>stress</strong> est invariablement expérimenté (Kaplan 1983). Parce que les commerciauxont une position frontalière au sein <strong>de</strong> l’organisation, <strong>de</strong> nombreux chercheurs se sontintéressés aux interactions sociales à l’intérieur <strong>et</strong> à l’extérieur <strong>de</strong> l’organisation. La manièredont les commerciaux interagissent avec les différents membres à l’intérieur <strong>et</strong> à l’extérieur <strong>de</strong>l’organisation est un antécé<strong>de</strong>nt clé dans la prédiction <strong>de</strong> variables telles que la performance,la satisfaction, ou les intentions <strong>de</strong> quitter l’organisation (Churchill <strong>et</strong> al., 1985). Biensouvent, c<strong>et</strong>te population souffre d’un niveau <strong>de</strong> <strong>stress</strong> très élevé, dû principalement auxconflits entre les <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s <strong>de</strong>s clients <strong>et</strong> l’accomplissement <strong>de</strong>s attentes <strong>de</strong> l’organisation(Boles, Johnston & Hair, 1997 ; Berhman <strong>et</strong> Perrault, 1984). A cela s’ajoute le fait que <strong>de</strong>nombreux salariés ont le sentiment que quelque chose s'est brisé dans nos milieux <strong>de</strong> travail <strong>et</strong>que le lien qui existe entre un employé <strong>et</strong> son employeur n'est plus comme avant.Dans ce contexte, les travaux sur le <strong>contrat</strong> <strong>psychologique</strong>, défini comme la croyance d’unindivi<strong>du</strong> en l’existence d’obligations mutuelles entre lui-même <strong>et</strong> une autre partie ; employé <strong>et</strong>employeur, (Rousseau <strong>et</strong> Tijoriwala, 1998), peuvent ai<strong>de</strong>r à mieux appréhen<strong>de</strong>r le phénomène<strong>du</strong> <strong>stress</strong> professionnel <strong>et</strong> ainsi con<strong>du</strong>ire à adopter <strong>de</strong>s stratégies d’ajustement visant à ré<strong>du</strong>ireles conséquences négatives au plan <strong>de</strong>s attitu<strong>de</strong>s <strong>et</strong> <strong>de</strong>s comportements d'un sentiment <strong>de</strong> bris<strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>violation</strong> <strong>du</strong> <strong>contrat</strong> <strong>psychologique</strong>.Après avoir rappelé les principaux concepts mobilisés, nous établirons le lien qui peut existerentre les métiers <strong>de</strong> la vente <strong>et</strong> le <strong>stress</strong> professionnel, enfin nous nous pencherons sur lesrésultats obtenus lors d’une étu<strong>de</strong> empirique auprès <strong>de</strong> commerciaux suite à la mise en placed’un dispositif <strong>de</strong> surveillance dans leurs véhicules.3


I/ CADRE THEORIQUELe <strong>stress</strong>Durant ces <strong>de</strong>rnières décennies, <strong>de</strong>ux principales approches se sont développées au suj<strong>et</strong> <strong>du</strong><strong>stress</strong>. La première que l’on définit comme une approche biologique est reliée à Hans Selye(1975) qui est considéré comme le père fondateur <strong>du</strong> mot <strong>stress</strong> <strong>et</strong> qui le définit comme « lasomme <strong>de</strong> tous les eff<strong>et</strong>s non spécifiques <strong>de</strong> facteurs (activités normales, facteurs <strong>de</strong> maladie,remè<strong>de</strong>s, <strong>et</strong>c..) pouvant agir sur l’organisme, ces agents sont nommés <strong>stress</strong>eurs lorsqu’onfait allusion à leur capacité <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ire le <strong>stress</strong> ». Selon lui, l’indivi<strong>du</strong> réagit à un <strong>stress</strong>eur(ex : un changement dans les tâches) d’une façon non spécifique, c'est-à-dire la mêmeréaction pour une situation agréable ou désagréable. Puis l’organisme s’adapte. S’il est exposé<strong>de</strong> nombreuses fois à <strong>de</strong>s facteurs <strong>de</strong> <strong>stress</strong>, le même ou d’autres, il s’épuise. Le <strong>stress</strong> négatifentraîne alors <strong>de</strong>s problèmes <strong>de</strong> santé divers. C<strong>et</strong>te approche médicale qui prend la forme« d’un syndrome général d’adaptation à divers agents nocifs » <strong>de</strong>meure incomplète car ellene tient pas compte <strong>de</strong>s différences indivi<strong>du</strong>elles face à l’expérience <strong>du</strong> <strong>stress</strong>.La secon<strong>de</strong> approche repose sur les travaux <strong>de</strong> Lazarus <strong>et</strong> Folkman (1984) qui donnent ladéfinition suivante : « le <strong>stress</strong> <strong>psychologique</strong> est une relation particulière entre la personne<strong>et</strong> l’environnement qui est évalué par la personne comme m<strong>et</strong>tant à l’épreuve ou dépassantses ressources <strong>et</strong> m<strong>et</strong>tant en péril son bien-être ». C<strong>et</strong>te définition est axée sur <strong>de</strong>sperceptions, il s’agit <strong>de</strong> prendre en considération l’évaluation que ce fait l’indivi<strong>du</strong> <strong>de</strong> lasituation <strong>et</strong> <strong>de</strong>s ressources dont il dispose pour y faire face. C’est donc la mise encorrespondance d’un environnement <strong>et</strong> d’un indivi<strong>du</strong> qui perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> parler <strong>de</strong> <strong>stress</strong>.L'approche transactionnelle s'intéresse avant tout aux dimensions <strong>psychologique</strong>s <strong>et</strong>cognitives <strong>du</strong> <strong>stress</strong>. Le processus <strong>et</strong> le résultat <strong>de</strong> ces évaluations dépen<strong>de</strong>nt non seulement<strong>de</strong> la réalité <strong>de</strong>s choses (contraintes présentes dans la situation, ressources dont disposentl’indivi<strong>du</strong>) mais aussi <strong>de</strong>s caractéristiques particulières <strong>de</strong> l’indivi<strong>du</strong> qui procè<strong>de</strong> à sesévaluations <strong>et</strong> influencent son jugement. C<strong>et</strong>te définition s’inscrivant davantage dans notrechamp d’investigation qui est la gestion, donne une bonne grille d’analyse <strong>du</strong> comportement<strong>de</strong>s hommes dans l’entreprise.4


C’est pourquoi nous r<strong>et</strong>iendrons pour notre recherche la définition donnée par Roques (1999),voisine <strong>de</strong> celle <strong>de</strong> Lazarus <strong>et</strong> Folkman (1984) mais qui abor<strong>de</strong> les stratégies d’ajustement <strong>et</strong>qui consiste à dire que « le <strong>stress</strong> est une relation entre un environnement donné <strong>et</strong> unesituation donnée dans laquelle l’indivi<strong>du</strong> considère que les sollicitations <strong>de</strong>l’environnement m<strong>et</strong>tent à l’épreuve ou dépassent ses capacités d’ajustement. Elle s<strong>et</strong>ra<strong>du</strong>it par une altération <strong>du</strong> bien-être <strong>et</strong> peut con<strong>du</strong>ire à <strong>de</strong>s stratégies d’ajustement ».On peut aussi traiter <strong>du</strong> <strong>stress</strong> lorsque <strong>de</strong>s manifestations physiques, <strong>psychologique</strong>s <strong>et</strong>comportementales apparaissent : fatigue, difficultés à se lever le matin, maux <strong>de</strong> tête oud’estomac, allergies <strong>et</strong> problèmes cutanés accompagnent <strong>de</strong>s sentiments <strong>de</strong> frustration,d’abandon ou d’anxiété. Les comportements évoquent le repli sur soi ou l’agressivité. Pourfaire face à ce type <strong>de</strong> situation <strong>et</strong> r<strong>et</strong>rouver un état apaisé, l’indivi<strong>du</strong> peut avoir recours à <strong>de</strong>sstratégies d’ajustement.Les stratégies d’ajustementLes stratégies cognitives <strong>et</strong> comportementales que l'indivi<strong>du</strong> interposent entre lui <strong>et</strong> unévénement perçu comme menaçant a été défini sous le terme <strong>de</strong> « coping » par Lazarus <strong>et</strong>Folkman (1984), <strong>et</strong> a été tra<strong>du</strong>it en français par « stratégies d'ajustement ». Il s'agit <strong>de</strong>l'ensemble <strong>de</strong>s efforts cognitifs <strong>et</strong> comportementaux <strong>de</strong>stinés à gérer <strong>et</strong> maîtriser, ré<strong>du</strong>ire outolérer les exigences internes <strong>et</strong> externes qui menacent ou dépassent les ressources d'unindivi<strong>du</strong>. Selon ces auteurs, les stratégies d’ajustement ont <strong>de</strong>ux fonctions principales :• maîtriser ou modifier le problème qui entraîne <strong>du</strong> <strong>stress</strong> dans l'environnement, onparlera alors <strong>de</strong> stratégie d’ajustement centrée sur la situation ;• ou réguler la réponse émotionnelle <strong>du</strong> problème, on parlera alors <strong>de</strong> moyen <strong>de</strong> faireface centré sur l'émotion.Ces <strong>de</strong>ux types <strong>de</strong> stratégies d’ajustement s'influencent d'ailleurs mutuellement pour unesituation donnée. A partir <strong>de</strong> ce modèle, l'auteur a pu construire <strong>de</strong>s questionnaires (tels leWay of Coping Questionnaire ou WCQ) qui perm<strong>et</strong>tent <strong>de</strong> quantifier les différents styles <strong>de</strong>stratégie d’ajustement en fonction <strong>de</strong> situations données. Par exemple, dans ce questionnaire,il est <strong>de</strong>mandé aux répondants <strong>de</strong> souligner parmi une liste d'items les efforts conscients qu'ilsont fourni pour faire face à un événement <strong>stress</strong>ant qu'ils doivent nommer.5


Nous ne considérons pas que certaines stratégies soient plus performantes que d’autres. Pournous, la mise en œuvre d’une stratégie d’ajustement doit con<strong>du</strong>ire à une diminution <strong>du</strong> facteur<strong>de</strong> <strong>stress</strong>. En eff<strong>et</strong>, la situation <strong>de</strong> travail qui était évaluée comme <strong>stress</strong>ante doit, après ledéveloppement d’un moyen <strong>de</strong> faire face, apparaître comme moins, ou plus <strong>du</strong> tout,<strong>stress</strong>ante.Le <strong>contrat</strong> <strong>psychologique</strong>Le <strong>contrat</strong> <strong>psychologique</strong> qui est un <strong>contrat</strong> informel, non écrit, repose sur <strong>de</strong>s croyancesindivi<strong>du</strong>elles explicites <strong>et</strong> implicites sur les obligations mutuelles qui existent entreemployeurs <strong>et</strong> employés <strong>et</strong> l’eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> leur transgression sur le comportement <strong>de</strong>s employés. Onattribue sa paternité à Argyris (1960) qui avait créé le terme pour décrire la relationqu’entr<strong>et</strong>enaient <strong>de</strong>s ouvriers avec leur contremaître « le <strong>contrat</strong> <strong>psychologique</strong> simplifie larelation salarié-chef d’équipe. Dans la mesure où ce <strong>de</strong>rnier a conscience que les salariéspro<strong>du</strong>iront <strong>de</strong> façon optimale en cas <strong>de</strong> lea<strong>de</strong>rship passif, <strong>et</strong> dans la mesure où les salariésacceptent c<strong>et</strong>te situation, on peut faire l’hypothèse qu’une relation va évoluer entre salariés <strong>et</strong>chef d’équipe, relation que l’on pourrait désigner sous le nom <strong>de</strong> <strong>contrat</strong> <strong>psychologique</strong> ».Le terme a été repris par Levinson (1962) <strong>et</strong> Schein (1965) qui ont développé <strong>et</strong> précisé leconcept. On passe d’une relation interindivi<strong>du</strong>elle salarié / supérieur à une relation au niveauorganisationnel. Ainsi selon Schein (1965), le <strong>contrat</strong> <strong>psychologique</strong> est défini comme unesérie d’attentes réciproques non écrites entre un salarié <strong>et</strong> une organisation. Autrement dit, ils’inscrit au sein d’un processus d’échange <strong>de</strong> contributions <strong>et</strong> <strong>de</strong> rétributions : le salarié m<strong>et</strong>sa force <strong>de</strong> travail au service <strong>de</strong> l’organisation, laquelle le récompense (Mullenbah, 2002).Plusieurs approches se sont succédé pour con<strong>du</strong>ire, finalement, à l’approche la pluscouramment admise aujourd’hui qui est celle <strong>de</strong> Rousseau (1989). Dans c<strong>et</strong>te lignée nousr<strong>et</strong>iendrons la définition <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière qui stipule que « le <strong>contrat</strong> <strong>psychologique</strong> désignela croyance d’un indivi<strong>du</strong> concernant les termes <strong>et</strong> les conditions d’un accord d’échangeréciproque entre lui-même <strong>et</strong> une autre partie. Un <strong>contrat</strong> <strong>psychologique</strong> émerge lorsquel’une <strong>de</strong>s parties croit qu’une promesse en r<strong>et</strong>our a été faite, qu’une contribution a été faite <strong>et</strong>qu’ainsi, une obligation <strong>de</strong> réciprocité a été créée. »Ces <strong>de</strong>rnières années, nous assistons à une évolution considérable <strong>du</strong> <strong>contrat</strong> <strong>psychologique</strong> <strong>et</strong>force est <strong>de</strong> constater que la <strong>violation</strong> <strong>du</strong> <strong>contrat</strong> <strong>psychologique</strong> apparaît plus souvent commela norme que l’exception (Campoy <strong>et</strong> Neveu, 2005).6


Dans l’ancien <strong>contrat</strong> <strong>psychologique</strong>, en échange <strong>de</strong> sa pleine <strong>et</strong> entière participation aumeilleur fonctionnement <strong>de</strong> l’organisation, c<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière offrait à l’indivi<strong>du</strong> la possibilitéd’évolution <strong>de</strong> carrière, le travail satisfaisant ou supérieur entraînant ponctuellement <strong>de</strong>spromotions auxquelles se conjuguent <strong>de</strong> nouveaux défis <strong>et</strong> <strong>de</strong> nouvelles responsabilités.Aujourd’hui les conditions <strong>de</strong> travail ont évolué <strong>et</strong> les organisations ne peuvent plus offrir lesmêmes conditions : la charge <strong>de</strong> travail augmente, on exige le développement <strong>de</strong> compétencesmultiples…ainsi, nous assistons à un processus <strong>de</strong> transformation en profon<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> la relationd’emploi qui con<strong>du</strong>it à une <strong>violation</strong> ou rupture <strong>du</strong> <strong>contrat</strong> <strong>psychologique</strong> (Lemire <strong>et</strong> Saba,2005). Il y a rupture ou <strong>violation</strong> <strong>du</strong> <strong>contrat</strong> <strong>psychologique</strong> lorsque les salariés considèrentque l’organisation n’a pas respecté un (ou plusieurs) <strong>de</strong> ses engagements, qu’ils soientexplicites ou implicites (Turnley <strong>et</strong> Feldman, 1998).La complexité <strong>de</strong> la <strong>violation</strong> <strong>du</strong> <strong>contrat</strong> <strong>psychologique</strong> tient à ce qu’elle est d’abord avanttout perceptuelle, c'est-à-dire qu’elle peut se développer non seulement lorsque l’organisationn’a pas respecté un <strong>de</strong> ses engagements, d’une manière délibérée ou à la suite <strong>de</strong>circonstances indépendantes <strong>de</strong> sa volonté, mais encore lorsqu’il y a <strong>de</strong>s interprétationsconflictuelles touchant un ou plusieurs éléments <strong>du</strong> <strong>contrat</strong> <strong>psychologique</strong>. Dans un tel cas,l’organisation prétend avoir respecté l’ensemble <strong>de</strong> ses engagements envers les salariés alorsque ces <strong>de</strong>rniers concluent, au contraire, à la <strong>violation</strong> <strong>du</strong> <strong>contrat</strong> <strong>psychologique</strong> (Rousseau,1995 ; Morrisson <strong>et</strong> Robinson, 1997). Lorsque les <strong>contrat</strong>s ne sont pas honorés, ils peuventgénérer chez les salariés <strong>de</strong> la méfiance, <strong>de</strong> l’insatisfaction, voire peut-être une dissolution <strong>de</strong>la relation (Argyris, 1960 ; Rousseau, 1989).Après avoir précisé quels étaient les principaux concepts mobilisés dans c<strong>et</strong>te communication,nous allons maintenant nous pencher sur le <strong>stress</strong> professionnel pour une populationspécifique à savoir les professionnels <strong>de</strong> la vente.7


II/ LE STRESS CHEZ LES COMMERCIAUX : ETAT DES LIEUXParce que les commerciaux ont une position frontalière au sein <strong>de</strong> l’organisation, <strong>de</strong>nombreux chercheurs se sont intéressés aux interactions sociales à l’intérieur <strong>et</strong> à l’extérieur<strong>de</strong> l’organisation. En eff<strong>et</strong>, ces <strong>de</strong>rniers sont au cœur <strong>de</strong> la relation entre le client <strong>et</strong>l’organisation <strong>et</strong> doivent satisfaire les attentes <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parties, c<strong>et</strong>te position pro<strong>du</strong>it <strong>du</strong> <strong>stress</strong>(Michaels <strong>et</strong> al, 1988). La manière dont les commerciaux interagissent avec les différentsmembres à l’intérieur <strong>et</strong> à l’extérieur <strong>de</strong> l’organisation est un antécé<strong>de</strong>nt clé dans la prédiction<strong>de</strong> variables telles que la performance, la satisfaction, ou les intentions <strong>de</strong> quitterl’organisation (Churchill <strong>et</strong> al., 1985). Bien souvent, c<strong>et</strong>te population souffre d’un niveau <strong>de</strong><strong>stress</strong> très élevé, dû principalement aux conflits entre les <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s <strong>de</strong>s clients <strong>et</strong>l’accomplissement <strong>de</strong>s attentes <strong>de</strong> l’organisation (Boles, Johnston & Hair, 1997 ; Berhman <strong>et</strong>Perrault, 1984, cité par Holl<strong>et</strong>, 2001). Les commerciaux sont exposés continuellement à <strong>de</strong>ssituations qui affectent la perception <strong>de</strong> leur rôle dans l’organisation. Ces situations résultent<strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s conflictuelles <strong>et</strong> <strong>du</strong> peu <strong>de</strong> ressources ou <strong>de</strong> temps qui ne perm<strong>et</strong>tent pas <strong>de</strong> lessatisfaire. La perception <strong>du</strong> rôle peut également être altérée par le manque <strong>de</strong> clarté dans laspécification ou la communication <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s. Ainsi, les étu<strong>de</strong>s consacrées à la force <strong>de</strong>vente sont dominées par trois agents <strong>stress</strong>eurs que sont :Le conflit <strong>de</strong> rôle : il est défini comme la contradiction provoquée par les <strong>de</strong>man<strong>de</strong>sdifférentes à un indivi<strong>du</strong> qui, soit ne désire pas répondre vraiment à c<strong>et</strong>te <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, soitpense que c<strong>et</strong>te démarche ne répond pas à la définition <strong>de</strong> ses tâches. Les étu<strong>de</strong>s montrentque les personnes souffrant <strong>de</strong> conflits <strong>de</strong> rôle tirent peu <strong>de</strong> satisfaction dans leur travail <strong>et</strong>peut être un élément <strong>de</strong> <strong>stress</strong>. La surcharge <strong>de</strong> travail : French <strong>et</strong> Caplan 1 dans leurs recherches établissent quel’excès <strong>de</strong> travail est un agent <strong>stress</strong>ant. La surcharge <strong>de</strong> travail peut être <strong>de</strong> naturequalitative (considérer le travail comme trop difficile) ou associé à <strong>de</strong>s comportementsdysfonctionnels.L’ambiguïté <strong>de</strong> rôle : l'ambiguïté <strong>de</strong> rôle, c'est l'incertitu<strong>de</strong>: "quoi faire ?", "quand lefaire ?", "comment agir ?"<strong>et</strong>c. C<strong>et</strong>te ambiguïté peut survenir dans le champ <strong>de</strong>sresponsabilités, dans les normes <strong>et</strong> les règles, dans les sources d'autorité, dans l'évaluation<strong>du</strong> supérieur, dans les changements organisationnels <strong>et</strong> dans la sécurité d'emploi.1 French J.R.P, Caplan R.D, « organisational <strong>stress</strong> and indivi<strong>du</strong>al strain », the failure of success, p30-66 (1973)8


Toutefois, nous r<strong>et</strong>rouvons dans la littérature d’autres facteurs <strong>de</strong> <strong>stress</strong> qui sont d’une part larémunération <strong>et</strong> d’autre part, la répartition équitable <strong>de</strong>s objectifs <strong>de</strong> vente.La rémunérationUn plan <strong>de</strong> rémunération d’une force <strong>de</strong> vente peut perm<strong>et</strong>tre <strong>de</strong> fournir une rémunérationjuste aux ven<strong>de</strong>urs, <strong>et</strong> les motiver ainsi à obtenir les performances les plus élevées possibles,<strong>et</strong> leur perm<strong>et</strong>tre <strong>de</strong> canaliser leur énergie pour qu’ils la consacrent aux activités les plusprofitables. Si les managers choisissent un plan <strong>de</strong> rémunération adapté, ils peuvent contrôlerles activités <strong>de</strong> la force <strong>de</strong> vente <strong>et</strong> donc contrôler les revenus <strong>et</strong> les coûts qui sont les <strong>de</strong>uxéléments à l’origine <strong>de</strong>s bénéfices <strong>de</strong> la compagnie.Le contrôle <strong>de</strong> la force <strong>de</strong> vente ne peut pas être assuré sans une connaissance <strong>de</strong>s préférences<strong>et</strong> <strong>de</strong>s comportements <strong>de</strong> la force <strong>de</strong> vente. Cependant, l’hypothèse selon laquelle les ven<strong>de</strong>ursréagissent <strong>de</strong> la même façon à un plan <strong>de</strong> rémunération n’est pas validée. Les ven<strong>de</strong>urspoursuivent leurs propres objectifs, tout comme les firmes, <strong>et</strong> réalisent donc en priorité lesactivités qui contribuent le plus à l’aboutissent <strong>de</strong> leurs objectifs. Ils prennent en compte lessouhaits <strong>du</strong> management, mais ces souhaits <strong>et</strong> instructions sont généralement <strong>de</strong>s contraintes àl'aboutissement <strong>de</strong> leurs objectifs ; ils obtiennent <strong>de</strong>s résultats (rémunération) qui sontgénéralement en accord avec les objectifs qu’ils poursuivent ; ils utilisent <strong>de</strong>s contrôles pourl’évaluation <strong>de</strong> ces résultats en comparaison avec leurs objectifs, <strong>et</strong> ils ajustent éventuellementleurs évaluations ou leurs actions. Ainsi, quand les ventes <strong>et</strong> la rémunération sont en accordavec les objectifs qu’ils s’étaient fixés, les ven<strong>de</strong>urs développent un niveau <strong>de</strong> satisfaction quipeut affecter leur évaluation antérieure <strong>du</strong> plan <strong>de</strong> rémunération. Par contre, le fait que larémunération soit variable est souvent perçue comme une source <strong>de</strong> <strong>stress</strong> pour les ven<strong>de</strong>urs àla différence avec d’autres métiers où le salarié sait ce qu’il va toucher à la fin <strong>du</strong> mois, <strong>et</strong> cela<strong>de</strong> façon régulière.La répartition équitable <strong>de</strong>s objectifs <strong>de</strong> venteL’allocation <strong>de</strong>s quotas <strong>de</strong> vente entre commerciaux pose le problème <strong>de</strong> la répartitionéquitable <strong>de</strong>s objectifs. Selon Douthit (1976), Dubinsky <strong>et</strong> Barry (1982) les quotas <strong>de</strong> venteperm<strong>et</strong>tent <strong>de</strong> contrôler les activités <strong>de</strong>s ven<strong>de</strong>urs. Pour que ces quotas soient efficaces(Wotruba, 1989), les commerciaux doivent les considérer comme : réalisables, désirables,9


équitables. De nombreuses étu<strong>de</strong>s ont été menées pour savoir si les quotas les plus efficacessont ceux qui perm<strong>et</strong>tent le plus <strong>de</strong> défis ou au contraire, sont ceux qui sont facilementréalisables. En fait, tous les théoriciens sont d’accords pour dire que les quotas doivent êtreperçus comme <strong>de</strong>s objectifs à la portée <strong>de</strong>s ven<strong>de</strong>urs (Chowdhury, 1993).Enfin, à laréalisation <strong>de</strong> quota est associé les récompenses <strong>et</strong>/ou sanctions.Dans le domaine <strong>du</strong> management <strong>de</strong> la force <strong>de</strong> vente, la nécessité d’établir <strong>de</strong>s quotaséquitables a beaucoup moins été traitée que d’autres aspects tels que la motivation <strong>du</strong>ven<strong>de</strong>ur, la rémunération…Pourtant, les managers doivent tenter <strong>de</strong> répartir les objectifs <strong>de</strong>vente d’une entreprise entre les divers territoires <strong>de</strong> vente <strong>et</strong> entre les commerciaux, afind’obtenir une répartition équitable <strong>de</strong>s objectifs <strong>de</strong> vente. En eff<strong>et</strong>, le sentiment <strong>de</strong> non-équitépeut <strong>de</strong>venir une source <strong>de</strong> <strong>stress</strong> <strong>et</strong> par conséquent peut con<strong>du</strong>ire à développer une stratégied’adaptation afin <strong>de</strong> rétablir le quota contribution/rétribution.10


III/ CHANGEMENT DANS LES HABITUDES DE TRAVAIL :RESULTATS D’UNE ETUDE EMPIRIQUEMéthodologieAfin <strong>de</strong> mieux comprendre les eff<strong>et</strong>s <strong>de</strong> la mise en place d’un dispositif <strong>de</strong> surveillance sur lesattitu<strong>de</strong>s <strong>et</strong> comportements d’une population <strong>de</strong> commerciaux, nous avons réalisé une étu<strong>de</strong><strong>de</strong> cas d’entreprise. Le recours à <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> cas est une métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> recherche largementutilisée en gestion (Van Maanen, 1983 ; Yin, 1994). C<strong>et</strong>te métho<strong>de</strong> perm<strong>et</strong> d’étudier enprofon<strong>de</strong>ur une ou plusieurs situations dans une ou plusieurs organisations (Evrard <strong>et</strong> al.,2000, cité par Colle 2005).Dans le cadre <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te étu<strong>de</strong> exploratoire, nous nous sommes intéressés à une entreprise <strong>de</strong>taille moyenne <strong>du</strong> nord-est <strong>de</strong> la France ayant pour activité la pro<strong>du</strong>ction <strong>et</strong> lacommercialisation <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>its <strong>de</strong> lubrification <strong>et</strong> <strong>de</strong> graissage. Fabricant Lea<strong>de</strong>r dans sondomaine, l’entreprise est présente dans plus <strong>de</strong> 120 pays <strong>et</strong> propose une gamme <strong>de</strong> plus <strong>de</strong>2500 pro<strong>du</strong>its. L’équipe commerciale pour la France est composée d’un directeur <strong>de</strong>s ventes,<strong>de</strong> neuf commerciaux, d’une personne responsable <strong>du</strong> service après-vente, <strong>et</strong> <strong>de</strong> troissecrétaires. Nous avons pu observer les réactions suscitées par une situation <strong>de</strong> changementlors <strong>de</strong> la réunion annuelle qui se déroule en janvier à son siège. La direction a <strong>de</strong>mandé àl’ensemble <strong>de</strong> son équipe commerciale <strong>de</strong> venir avec son véhicule, ce qui constitue unenouveauté car habituellement ces <strong>de</strong>rniers prennent l’avion. La société a pris <strong>de</strong>ux décisionsprincipales pour sa force <strong>de</strong> vente, à savoir : La mise en place d’un dispositif <strong>de</strong> surveillance dans les véhicules <strong>et</strong> la révision <strong>du</strong> calcul <strong>de</strong>s commissions ; dorénavant le calcul se fera sur les marges <strong>et</strong>non plus sur le chiffre d’affaires comme c’était le cas jusqu’alors.Nous avons con<strong>du</strong>it 6 entr<strong>et</strong>iens semi-directifs auprès <strong>de</strong> commerciaux qui ont bien voulurépondre à nos questions. Ils ont eu lieu 15 jours après la réunion <strong>et</strong> l’annonce <strong>de</strong> ceschangements. La taille <strong>de</strong> l’échantillon n’a pas été fixée à priori, le principe <strong>de</strong> saturation a étéappliqué. Ces entr<strong>et</strong>iens <strong>de</strong> 60-70 minutes ont été enregistrés <strong>et</strong> ont fait l’obj<strong>et</strong> d’uner<strong>et</strong>ranscription intégrale (voir en annexes). Par la suite, ils ont été communiqués auxpersonnes interrogées pour validation, afin <strong>de</strong> s’assurer <strong>du</strong> respect <strong>du</strong> sens <strong>de</strong>s propos tenus.11


L’objectif était <strong>de</strong> vérifier si le changement <strong>de</strong>s règles <strong>de</strong> la relation d’emploi avait un impactsur le <strong>contrat</strong> <strong>psychologique</strong> <strong>et</strong> si oui, <strong>de</strong> quelle manière se manifestait le <strong>stress</strong> perçu <strong>et</strong> lesstratégies d’ajustement. Les thèmes abordés ont donc été les mêmes pour tous.Principaux résultatsCATEGORIES THEMES MOTS CLEFS<strong>Sentiment</strong> <strong>de</strong> <strong>violation</strong> <strong>du</strong><strong>contrat</strong> <strong>psychologique</strong>Stress perçuComportements déviantsConfianceAncien <strong>contrat</strong>Nouvelles règles <strong>du</strong> jeuManifestations physiquesManifestations<strong>psychologique</strong>sManifestationscomportementalesContourner le problèmeDéçuTrahiSurprisPerte <strong>de</strong> la confianceS’organiser librementPacteIndépendanceObjectifs font parti <strong>du</strong> jobPerte <strong>de</strong> la libertéImpossibleFliquerPerte <strong>du</strong> respectFatigueMaux <strong>de</strong> têteinsomniesTen<strong>du</strong>eColèrePerte <strong>de</strong> concentrationanxiétéIntention <strong>de</strong> départBaisse <strong>de</strong> l’activitéPrise médicamenteuseDébrancher le « mouchard »FeinterTricherieFaire croire queTableau 1 : Catégorisation obtenue suite à l’analyse <strong>du</strong> corpus12


Dans le tableau ci-<strong>de</strong>ssus, on s’aperçoit qu’en ayant décidé d’utiliser un systèmed’information informatisé, l’organisation a établi <strong>de</strong> nouvelles règles <strong>du</strong> jeu. La communauté<strong>de</strong>s commerciaux s’en trouve donc affectée <strong>et</strong> perçoit c<strong>et</strong>te nouvelle pratique comme« stupi<strong>de</strong> » <strong>et</strong> comme un manque <strong>de</strong> confiance <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> la firme. De plus, la manière <strong>de</strong>procé<strong>de</strong>r ne fait que renforcer l’idée d’un manque <strong>de</strong> considération « mais vraiment ce qui estdéplaisant c’est la manière dont cela a été amené, la façon <strong>de</strong> faire n’est pas correcte ». Aces sentiments <strong>de</strong> déception <strong>et</strong> <strong>de</strong> colère s’ajoute l’incompréhension « mon boulot je l’aitoujours fait, mes clients n’ont jamais fait <strong>de</strong> reproches, ils ne se plaignent pas, je fais <strong>du</strong>chiffre. Alors qu’est-ce qu’ils ont, pourquoi ils déci<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> nous fliquer ?! ». Ici, les salariésperçoivent une incohérence entre les propos tenus par l’employeur <strong>et</strong> les actions <strong>de</strong> celui-ci.La <strong>violation</strong> <strong>du</strong> <strong>contrat</strong> <strong>psychologique</strong> perçue par les salariés reposerait sur la mise en place <strong>de</strong>« mauvaises » décisions <strong>et</strong> notamment la façon <strong>de</strong> les m<strong>et</strong>tre en œuvre. Le processus vécu parles commerciaux peut se résumer dans le schéma ci-<strong>de</strong>ssous :Changement <strong>de</strong>s règles <strong>de</strong> la relation d’emploi<strong>Sentiment</strong> <strong>de</strong> <strong>violation</strong> <strong>du</strong> <strong>contrat</strong> <strong>psychologique</strong>Stress perçuComportements déviantsNous assistons donc à une perception <strong>de</strong> rupture <strong>du</strong> <strong>contrat</strong> <strong>psychologique</strong> <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>ssalariés. Le pacte conclut lors <strong>de</strong> l’embauche qui consistait à atteindre ses objectifs <strong>de</strong> venteen contrepartie <strong>de</strong> quoi, les commerciaux s’organisaient librement <strong>et</strong> indépendamment dansleur travail a considérablement évolué. En eff<strong>et</strong>, jusque là, les activités <strong>de</strong>s commerciauxétaient très peu contrôlées (siège social loin, pas d’ordinateur portable), le contact se faisantpar téléphone portable <strong>et</strong> fax. Le plus souvent, le contact est établi en début <strong>de</strong> semaine où lecommercial donne son planning d’activité pour la semaine à la direction. Or, avec la mise enplace d’un « mouchard » sur l’ensemble <strong>du</strong> parc automobile <strong>de</strong>s commerciaux, c’est sur labase même <strong>du</strong> <strong>contrat</strong> que l’on change les règles, ce qui constituait l’essence même <strong>du</strong> pacteest aboli.Ainsi, on passe d’une prédominance <strong>de</strong>s régulations autonomes à <strong>de</strong>s régulations <strong>de</strong>13


contrôles. Dès lors, la volonté <strong>de</strong> la direction <strong>de</strong> X peut être comprise comme une intention <strong>de</strong>renforcer les régulations <strong>de</strong> contrôle <strong>de</strong> sa population commerciale mais aussi <strong>de</strong> diminuer lescoûts liés à l’utilisation <strong>de</strong>s véhicules. C’est ce qui expliquerait la <strong>de</strong>uxième mesure prise parl’organisation qui revoit son calcul <strong>de</strong>s commissions. Dorénavant, les commissions porterontsur les marges <strong>et</strong> ceci <strong>de</strong>puis la réunion <strong>de</strong> janvier 2005, <strong>et</strong> non plus sur le chiffe d’affaires.Les salariés sont affectés par c<strong>et</strong>te décision mais dans une moindre mesure que pourl’utilisation <strong>du</strong> mouchard. Selon eux, c<strong>et</strong>te pratique est injuste <strong>et</strong> cela va avoir <strong>de</strong>srépercussions conséquentes sur leur salaire. Ici encore, les professionnels <strong>de</strong> la vente estimentque l’entreprise X a un comportement malhonnête <strong>et</strong> que c’est démotivant, « mais ce n’est pastout !! Ils ont également revu le calcul <strong>de</strong> nos commissions avant ça marchait sur le chiffred’affaires <strong>et</strong> maintenant c’est sur les marges. Ce qui veut dire qu’on perd <strong>de</strong> l’argent. Etaprès on te <strong>de</strong>man<strong>de</strong> d’être motivé !! ».Les règles <strong>du</strong> jeu ayant changé, <strong>et</strong> notamment la façon <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre en œuvre le changement, acon<strong>du</strong>it à <strong>de</strong>s sentiments d’injustice <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>stress</strong>, nous assistons aussi à <strong>de</strong>s comportementsdéviants <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s salariés. Puisque c<strong>et</strong>te nouvelle pratique n’est pas perçue commelégitime, les salariés trouvent « normal » <strong>de</strong> réagir en contournant le problème. C’estpourquoi, certains (4 sur les 6 professionnels <strong>de</strong> la vente) ont développé la tricherie, « je garema voiture <strong>de</strong>vant chez un client, j’ai laissé mon vélo dans le coffre <strong>et</strong> je pars faire ce que jeveux en vélo. ». D’autres ont opté pour <strong>de</strong>s moyens plus radicaux « je suis allé voir un ami quim’a débranché le mouchard ! ». On peut donc s’interroger sur la pratique organisationnelle <strong>de</strong>c<strong>et</strong>te entreprise <strong>et</strong> plus particulièrement sur ses procé<strong>du</strong>res lorsque c<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière souhaitechanger ses habitu<strong>de</strong>s. En eff<strong>et</strong>, on sait l’importance <strong>de</strong> la justice organisationnelle <strong>et</strong> ici forceest <strong>de</strong> constater qu’il n’y a pas eu une évaluation <strong>de</strong>s règles <strong>et</strong> <strong>de</strong>s procé<strong>du</strong>res formelles. C’estpourquoi, les salariés <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te entreprise voient en ce nouveau <strong>contrat</strong> un « diktat ».Limites <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong>La première limite a trait au nombre restreint d’entr<strong>et</strong>ien réalisé qui nous perm<strong>et</strong> simplement<strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre en évi<strong>de</strong>nce <strong>de</strong>s tendances qui nécessiteraient un approfondissement auprès d’unéchantillon plus important <strong>et</strong> portant sur différentes organisations. La <strong>de</strong>uxième limite est liéeau fait que nous ne connaissons pas les motivations <strong>de</strong> la direction <strong>et</strong> que celle-ci n’a pas étéinterrogée.14


CONCLUSIONL’obj<strong>et</strong> <strong>de</strong> notre communication était d’appréhen<strong>de</strong>r le <strong>stress</strong> professionnel lié à un sentiment<strong>de</strong> <strong>violation</strong> <strong>du</strong> <strong>contrat</strong> <strong>psychologique</strong>. Nous avons pu m<strong>et</strong>tre en lumière ; au travers <strong>du</strong> cas<strong>de</strong>s commerciaux, la diversité <strong>de</strong>s manifestations <strong>de</strong> <strong>stress</strong> ; les diverses brèches que peuventpercevoir les salariés <strong>et</strong> enfin les stratégies d’ajustement déployées. Ainsi, à travers notr<strong>et</strong>ravail empirique nous constatons que la <strong>violation</strong> <strong>du</strong> <strong>contrat</strong> <strong>psychologique</strong> est accompagnée<strong>de</strong>s sentiments d’injustice <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>stress</strong>, con<strong>du</strong>isant à leur tour à ce que nous considérons icicomme <strong>de</strong>s stratégies d’ajustement : <strong>de</strong>s comportements déviants. Ces manifestations <strong>de</strong><strong>stress</strong> justifient selon nous une clarification <strong>du</strong> <strong>contrat</strong> <strong>psychologique</strong> tout au long <strong>de</strong> larelation d’emploi. Les <strong>contrat</strong>s <strong>psychologique</strong>s se caractérisent par leur nature dynamique.Lorsque le salarié considère que l’employeur a failli à ses promesses (tacites ou explicites), lesalarié assimile cela à une rupture <strong>du</strong> <strong>contrat</strong> qui le lie à l’organisation (Neveu, 2000).En eff<strong>et</strong>, nous avons pu relever que lorsque les règles définies entre l’employeur <strong>et</strong> l’employéchangent ou évoluent à la seule initiative <strong>de</strong> la direction, inévitablement cela con<strong>du</strong>it à unebaisse <strong>de</strong> la motivation voire à une intention <strong>de</strong> quitter l’organisation. Il serait intéressant dansun travail futur <strong>de</strong> vérifier si les salariés qui ont manifesté une gran<strong>de</strong> déception sont toujoursen emploi aujourd’hui. On pourrait alors établir un lien entre rupture <strong>du</strong> <strong>contrat</strong> <strong>psychologique</strong><strong>et</strong> départ volontaire <strong>de</strong> l’organisation.15


BIBLIOGRAPHIEArgyris C. (1960), Un<strong>de</strong>rstanding organisational behavior, Howewood: Dorsey Press.Boles J.S., Johnston M.W. <strong>et</strong> Hair J.F (1997), Role <strong>stress</strong>, Work Family conflict andEmotional Exhaustion : Inter-relationships and Effects on some Work-related Consequences,Journal of Personal Selling and Sales Management, 17, 17-28Berhman D. <strong>et</strong> Perreault W. (1984), Role Stress Mo<strong>de</strong>l of the Performance and Satisfactionof In<strong>du</strong>strial Salesperson, Journal of Mark<strong>et</strong>ing, 48, 9-21Campoy E. <strong>et</strong> Neveu V. (2005), Perceptions <strong>de</strong> justice <strong>et</strong> confiance <strong>du</strong> salarié commefacteurs explicatifs <strong>de</strong>s réactions indivi<strong>du</strong>elles à une <strong>violation</strong> <strong>du</strong> <strong>contrat</strong> <strong>psychologique</strong>, Actes<strong>de</strong> la journée recherche CEROG-AGRH “<strong>stress</strong>, burnout <strong>et</strong> conflits <strong>de</strong> rôles », Mai 2005, Aixen-Provence.Churchill A., J.R. Ford and Walker O.C, J.R (1990), Sales Force Management, thir<strong>de</strong>dition. The Irwin Series in Mark<strong>et</strong>ing..Churchill G. and al. (1985), The D<strong>et</strong>erminants of Salesperson Performance : A M<strong>et</strong>a-Analysis, Journal of Mark<strong>et</strong>ing Research, 22 (Mai), 103-118Colle R. (2005), L’amélioration <strong>du</strong> bien-être <strong>de</strong>s salariés par les temps <strong>de</strong> travail à la carte,Actes <strong>de</strong> la 1 ère journée <strong>de</strong> recherche IREGE/AGRH « management <strong>de</strong> la santé <strong>et</strong> <strong>de</strong> lasécurité au travail », 7 <strong>et</strong> 8 avril 2005, AnnecyDubinsky A.J. <strong>et</strong> Barry T.E (1982), A survey of sales management practises, In<strong>du</strong>strialMark<strong>et</strong>ing Management, 11, 136.Dohrenwend B. <strong>et</strong> Pearlin L. (1982), Report on Stress and Life Events, in Elliot, GR <strong>et</strong>Eisdorfer C. (1982), Stress and Human Health, New York : SpringerEvrard Y., Pras B.<strong>et</strong> Roux E. (2003), Mark<strong>et</strong>, Etu<strong>de</strong>s <strong>et</strong> recherches en mark<strong>et</strong>ing, Paris,Dunod.French J.R.P, Caplan R.D, (1973) « Organisational <strong>stress</strong> and indivi<strong>du</strong>al strain », Thefailure of success, p30-66Holl<strong>et</strong> S. (2001), Une remise en cause <strong>de</strong>s agents <strong>stress</strong>eurs <strong>du</strong> commercial : la notion <strong>de</strong>burnout, Actes <strong>du</strong> 17ème congrès international <strong>de</strong> l’AFM.Kaplan H.B (1983), Psychological Di<strong>stress</strong> in Sociological Context: Toward a GeneralTheory of Psychological Stress, dans Kaplan H.B (ed.), Psychological Stress: Trends inTheory and Research. New York : Aca<strong>de</strong>mic Press16


Khan R., Hein K., House J., Kasl S. <strong>et</strong> Mac Lean A. (1982), Report on Stress inOrganizational S<strong>et</strong>tings, dans Elliott, G.R <strong>et</strong> Eisdorfer (ed.), Stress and Human Health. NewYork : SpringerLazarus R. S. <strong>et</strong> Folkman S. (1984), Stress, appraisal and coping, Springer publishingcompany, New York.Mullenbach A. (2002), La responsabilité sociétale <strong>de</strong>s entreprises, Cahiers <strong>du</strong> Cergors.Neveu V. (2000), Les eff<strong>et</strong>s <strong>de</strong> l'actionnariat salarié sur les attitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong>s salariés, implicationorganisationnelle <strong>et</strong> influence perçue, Cahiers <strong>du</strong> Cergors, Numéro 00/01.Rivolier J. (1989), l’homme <strong>stress</strong>é, Paris, PUFRoques O. (1999), Les réactions <strong>de</strong>s salariés en transition <strong>de</strong> carrière : une approche entermes <strong>de</strong> <strong>stress</strong> au travail, thèse <strong>de</strong> doctorat, IAE d’Aix-en-Provence, Université d’Aix-Marseille III.Rousseau D.M. (1989), Psychological and implied contracts in organizations, EmployeeResponsibilities and Rights Journal, Vol.2, No.2.Rousseau D.M <strong>et</strong> Mc Lean Parks J. (1993), The contracts of indivi<strong>du</strong>als and organizations,Research in Organizational Behavior, Volume 15, pages 1-43.Rousseau D.M (1995), Psychological contracts in organizations, un<strong>de</strong>rstanding written an<strong>du</strong>nwritten agreements, Thousand Oaks, CA: Sage.Robinson S. <strong>et</strong> Morrison E. (2000), The <strong>de</strong>velopment of psychological contract breach and<strong>violation</strong>: a longitudinal study, Journal of Organizational Behavior, 525-546.Schein (1965), Organizational psychology, Englewood Cliffs, N.J : Prentice-HallSelye H. (1975), le <strong>stress</strong> <strong>de</strong> la vie-le problème <strong>de</strong> l’adaptation, nouvelle édition, NRF,Gallimard.17


ANNEXES18


Annexe 1R<strong>et</strong>ranscription entr<strong>et</strong>ien N°: 1 Date : 12/01/06Poste : commercialeAge : 32 ansAncienn<strong>et</strong>é : 2 ansSexe : F VALERIEBonjour, J’aimerai que vous me parliez <strong>de</strong> votre relation d’emploi <strong>et</strong> plus particulièrement <strong>de</strong>l’évolution <strong>de</strong> celle-ciEuh…<strong>et</strong> bien je suis commerciale dans c<strong>et</strong>te société <strong>de</strong>puis 2 ans, avant cela j’étais dans unefirme concurrente où je suis restée 5 ans <strong>et</strong> où j’ai finalement décidé <strong>de</strong> démissionner car jefaisais trop <strong>de</strong> kilomètres, j’avais un très grand secteur <strong>et</strong> j’ai choisi <strong>de</strong> changer pour pouvoirrentrer tous les soirs chez moi. Les hôtels ça va un moment mais avec les années on a envie <strong>de</strong>se poser, <strong>de</strong> rentrer à sa maisonJe suis donc maintenant dans la société X <strong>et</strong> tout se déroulait très bien malgré <strong>de</strong>s objectifsélevés, notamment l’an passé où j’ai atteint mes objectifs mais où mon patron les aconsidérablement augmenté, environ 30% (grimace), mais bon ce sont les règles, ça fait partie<strong>du</strong> job <strong>et</strong> on le sait. Mais où je ne suis plus d’accord c’est <strong>de</strong>puis début janvier.Toute l’équipe <strong>de</strong> commerciaux a été convoquée au siège mais contrairement à d’habitu<strong>de</strong> onnous a <strong>de</strong>mandé <strong>de</strong> monter avec nos véhicules. J’ai trouvé ça étrange, mais bon. Lors <strong>de</strong> laréunion on nous a dit qu’on allait nous installer un mouchard sur nos véhicules, <strong>et</strong> là j’aicomplètement halluciné, je ne m’attendais pas à ça, j’ai trop les boules !!Pouvez-vous nous en dire davantage sur les émotions que vous avez ressenties à ce moment ?J’étais <strong>et</strong> je reste très déçue, franchement je suis amère. Moi, je leur faisais confiance <strong>et</strong> <strong>de</strong>leur côté ils nous installent un mouchard. Super ! Non si j’ai choisi <strong>de</strong> faire ce métier c’estpour être indépendante, m’organiser librement : c’est le pacte quand on signe. Et là ils nerespectent plus ça, ils nous fliquent, je me sens comme violée. A tout moment ils savent ceque je fais, combien <strong>de</strong> temps je reste chez les clients, si je suis au resto. D’ailleurs l’autrejour je mangeais avec un collègue lui aussi commercial dans une autre boîte, <strong>et</strong> il voyait queje m’agitais sur ma chaise. Il m’a dit : « mais qu’est-ce que tu as, tu es bien nerveuse ? ». Tu19


vois avant j’aurai pu rester tranquille <strong>et</strong> ma tournée aurait tout <strong>de</strong> même était faîtes, c’est çaqui m’énerve, mon boulot je l’ai toujours fait, mes clients n’ont jamais fait <strong>de</strong> reproches, ilsne se plaignent pas, je fais <strong>du</strong> chiffre. Alors qu’est-ce qu’ils ont, pourquoi ils déci<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> nousfliquer ?! Et moi dans ces conditions je ne resterai pas, je suis déprimée, complètementdégoûtée !! Et après mon patron veut que je sois motivée, que je parte le matin remontée. Nonlà ce n’est pas possible. Moi si j’ai choisit ce métier c’est pour l’autonomie, sinon je travailledans un bureau je fais mes heures <strong>et</strong> puis basta. Je ne supporterai pas qu’on me surveille,qu’on sache à tout moment ce que je fais, où je suis <strong>et</strong>c. Par exemple, tu vois ce matin ilsm’ont vu partir <strong>de</strong> la maison eh bien après ils savaient que je suis allée chez mes parentsdéposer Raja (sa chienne), que le soir à 17h30 je vais à la gym, je ne suis plus libre <strong>de</strong> rien.Avant tu vois si j’avais fini ma tournée <strong>et</strong> bien je rentrais chez moi, dès fois c’était 4h <strong>de</strong>l’après-midi mais maintenant c’est impossible. Alors tu vois c’est débile, je vais rouler pourrouler. D’ailleurs chez <strong>de</strong>s collègues qui ont commencé à feinter. Y’en a un, il gare sa voiture<strong>de</strong>vant chez un client, il a laissé son vélo dans le coffre <strong>et</strong> il part faire ce qu’il veut en vélo.Non mais c’est hallucinant. J’en ai un autre qui dépose sa voiture <strong>et</strong> c’est sa femme qui vientle récupérer. Je les comprends trop, ils ont tout à fait raison, c’est eux qui te poussent ! Avantj’avais confiance maintenant c’est finit j’ai le sentiment d’avoir été trahi. Mais ce n’est pastout !! Ils ont également revu le calcul <strong>de</strong> nos commissions avant ça marchait sur le chiffred’affaires <strong>et</strong> maintenant c’est sur les marges. Ce qui veut dire qu’on perd <strong>de</strong> l’argent. Et aprèson te <strong>de</strong>man<strong>de</strong> d’être motivé !!Vous pouvez préciser ?Ben en fait jusqu’à janvier nos commissions étaient un pourcentage <strong>du</strong> chiffre d’affairesréalisé maintenant c’est par rapport aux marges, c'est-à-dire qu’il faut vendre <strong>de</strong>s pro<strong>du</strong>its oùla marge est la plus élevée <strong>et</strong> c’est très <strong>du</strong>r parce que ce sont les pro<strong>du</strong>its que mes clientsachètent le moins.20


Annexe 2R<strong>et</strong>ranscription entr<strong>et</strong>ien N°: 2 Date : 20/01/06Poste : commercial+ chef <strong>de</strong> secteurAge : 40 ansAncienn<strong>et</strong>é : 2 ansSexe : M FABRICEBonjour, J’aimerai que vous me parliez <strong>de</strong> votre relation d’emploi <strong>et</strong> plus particulièrement <strong>de</strong>l’évolution <strong>de</strong> celle-ciDepuis le début <strong>de</strong> l’année je suis passé responsable, cela n’a pas été évi<strong>de</strong>nt <strong>du</strong> tout car nousavons assisté à une véritable bataille interne, la décision est tombée <strong>et</strong> j’ai eu la chance d’êtresélectionné. Je suis là pour ai<strong>de</strong>r les collègues, avant je manageais 2 commerciaux mais il y ena un qui a démissionné après ma promotion. Je faisais la nav<strong>et</strong>te entre les <strong>de</strong>ux, c'est-à-direentre la direction <strong>et</strong> le commercial, mais ils se sont fâchés. Je ne vous dis pas l’ambiance,c’était très ten<strong>du</strong> <strong>et</strong> cela a <strong>du</strong>ré bien 3, 4 mois. Il y avait beaucoup <strong>de</strong> <strong>stress</strong>, pério<strong>de</strong> pas facile.Je comprenais les sentiments <strong>du</strong> commercial, la direction avait promis aux trois protagonistesle poste, cela a <strong>du</strong>ré pas mal <strong>de</strong> temps, ils nous ont laissé mariner pendant 3 mois <strong>et</strong> puis ilsont fait leur choix. J’ai donc été promu responsable région. J’ai pu réaliser <strong>de</strong> grosses ventes,notamment par le biais d’un gros client, il a passé une grosse comman<strong>de</strong> <strong>de</strong> 50 000 euros, jepense que c’est ce qui a fait pencher la balance. Quelque part ce n’est pas correct, ils nous ontbien pris pour <strong>de</strong>s imbéciles, ils nous ont fait croire à chacun d’entre nous qu’on allait obtenirla promotion, je n’ai pas bien compris pourquoi ils ont agit comme ça. Forcément après,l’ambiance était ten<strong>du</strong>e. Pendant un mois, il y a eu <strong>de</strong> la suspicion, pourquoi est-ce que c’esttoi qui a été pris <strong>et</strong> pas moi, je suis rentré avant toi me disait le commercial qui a ensuitedémissionné. J’ai donc préféré m<strong>et</strong>tre les choses à plat, nous sommes <strong>de</strong>s a<strong>du</strong>ltes. Après avoireu <strong>de</strong> bonnes discussions on s’est ren<strong>du</strong> compte que la direction nous manoeuvrait les uns lesautres, on a chacun était manipulait par elle. Tout le mon<strong>de</strong> voulait c<strong>et</strong>te promotion car elles’accompagnait d’une augmentation <strong>de</strong> salaire, toujours la même chose : la carotte (rires) !Après, j’ai travaillé avec A. en binôme, <strong>et</strong> B. s’est mis en arrêt maladie. Avec A., il y a unvéritable esprit d’équipe, je l’accompagne à ses ren<strong>de</strong>z-vous mais aujourd’hui, il a toujoursune <strong>de</strong>nt contre la direction, il y a encore <strong>de</strong> la rancœur. A. n’est pas toujours d’humeur égale,21


il est facilement démotivable. Moi, je n’ai pas trop le choix, il est comme ça, ce n’est pastoujours facile car nous avons le même âge, donc pour les directives j’ai <strong>du</strong> mal. J’essaie <strong>de</strong>faire différemment aujourd’hui, plus <strong>de</strong> complicité que <strong>de</strong> l’autorité. Nous avons le même âge<strong>et</strong> en plus il a plus d’ancienn<strong>et</strong>é que moi, il est rentré un an avant moi dans la société. Aussi, ilpensait être prioritaire sur moi. Il ne parlait plus <strong>du</strong> tout au PDG, plus <strong>de</strong> dialogue,communication que par mon intermédiaire. J’en avais marre <strong>de</strong> faire le tampon, franchementj’étais fatigué <strong>de</strong> faire cela, on n’avance pas. De plus, ma charge <strong>de</strong> travail augmente, ce quin’est pas prévu. En fait, on s’est fait avoir, tout était calculé <strong>de</strong>puis le début par la direction.D’ailleurs c’est la même chose que pour les <strong>contrat</strong>s <strong>de</strong> travail. Ils ont <strong>de</strong> la chance qu’onaime notre métier, le poste nous plaît, on trouve notre compte <strong>et</strong> puis nous avons un métier, àmon sens, passionnant.Pouvez-vous nous en dire davantage sur les <strong>contrat</strong>s <strong>de</strong> travail ?Là aussi le discours tenu n’est plus le même. Lorsque nous avons été embauchés le discourstenu était <strong>de</strong> nous faire progresser, notamment financièrement. La 1 ère année s’est très bienpassée, la 2 ème année on nous a dit que la société ne gagnait pas d’argent, qu’elle rencontrait<strong>de</strong>s difficultés financières. Je pense que les actionnaires y sont pour quelque chose dans cediscours. On nous a alors annoncé que maintenant les rémunérations se feraient sur lesmarges. En fait, ils nous ont fait signer un nouveau <strong>contrat</strong> <strong>de</strong> travail car en fait le premierétait prévu pour un an. Dans nos <strong>contrat</strong>s <strong>de</strong> travail, il y a une partie fixe <strong>et</strong> une partievariable, il s’agit <strong>de</strong> l’avenant au <strong>contrat</strong> renouvelable tous les ans. Au début, quand on vientd’être embauché on fait confiance, il n’y a pas <strong>de</strong> suspicion. On s’est alors r<strong>et</strong>rouvé pris enotage au niveau juridique. Avant nous étions payés en fonction <strong>du</strong> chiffre d’affaires, partievariable <strong>de</strong> notre <strong>contrat</strong>, maintenant le calcul se fait sur les marges, cela changecomplètement la donne. Et puis ce n’est pas fini, ils nous ont aussi fait monter au siège avecnos voitures pour nous installer un GPS ! Là aussi, encore une fois, nous n’étions pas aucourant.Quelles sont les émotions que vous avez ressenties à ce moment ?De la colère, je n’étais pas décidé à donner mes clés. C’est la manière dont cela a été fait, ilsnous prennent pour <strong>de</strong>s imbéciles. Il n’y a vraiment aucune considération pour leurscommerciaux. C’est la métho<strong>de</strong> alleman<strong>de</strong>, on est <strong>de</strong>s sous-hommes. Je peux vous assurer que22


les propos <strong>du</strong> PDG sont (silence) un jour, il a fait référence à Napoléon <strong>et</strong> à Hitler, c’est pourdire, <strong>de</strong>ux grands dictateurs. La situation n’est pas équitable au vu <strong>de</strong>s efforts déployés <strong>et</strong> <strong>du</strong>peu <strong>de</strong> considération en r<strong>et</strong>our pour l’ensemble <strong>de</strong> la force <strong>de</strong> vente. Mais vraiment ce qui estdéplaisant c’est la manière dont cela a été amené, la façon <strong>de</strong> faire n’est pas correcte. Tout lemon<strong>de</strong> est démotivé, il y en a déjà 2 qui sont partis. Aujourd’hui il y a la rétribution mais onn’est pas soutenu par la direction. L’autre jour le PDG a eu un entr<strong>et</strong>ien ave un grand groupepour <strong>de</strong>s problèmes <strong>de</strong> qualité sur <strong>de</strong>s pièces, on lui en avait parlé <strong>et</strong> bien <strong>de</strong>vant son client il afeint ne pas être au courant, il a r<strong>et</strong>ourné la situation en disant qu’il allait voir avec son équipecommerciale. De mon côté, je suis <strong>de</strong> nature optimiste donc même si je trouve qu’il y a <strong>de</strong>l’abus, que c’est une honte, je relativise beaucoup, cela ne m’atteint pas. J’ai eu un grosproblème <strong>de</strong> santé, un grand problème cardiaque il y a 4 ans, j’ai failli y rester doncaujourd’hui je prends beaucoup <strong>de</strong> recul par rapport à ma situation professionnelle. Et puis,ma femme gagne bien sa vie, ce n’est pas comme certains commerciaux qui sont les seulsdans leur famille à travailler.Par rapport aux mouchards, A. est très <strong>stress</strong>é, V. aussi est miné, ils se sentent surveillés. Pourmoi, malgré le mouchard, je rentre quand même à la maison <strong>et</strong> puis mon activité justifie queje sois au bureau, j’ai un bureau à la maison avec l’ordinateur, le fax, le téléphone. Je fais les<strong>de</strong>vis. Certains <strong>de</strong> mes collègues dont je ne dirai pas les noms, ont arraché les fils <strong>de</strong> leurmouchard, ils sont très déçus, c’est la manière dont cela a été fait <strong>et</strong> puis c’est <strong>de</strong> lasurveillance, cela signifie qu’ils ne nous font pas confiance. Je ne comprends pas.Si j’étais à la direction <strong>et</strong> que je me rendais compte qu’il y a un manque <strong>de</strong> travail, je ferai lamême chose mais là, le gars il fait son boulot, il fait <strong>du</strong> chiffre, on ne va pas l’embêter. Selonmoi, les motifs <strong>de</strong> ces changements viennent <strong>de</strong> l’actionnariat. Il y a quelque chose qui s<strong>et</strong>rame, je crains la ferm<strong>et</strong>ure <strong>de</strong>s sites <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ction pour aller en république tchèque.Si je fais le calcul entre le chiffre d’affaires <strong>et</strong> les marges, j’ai per<strong>du</strong> environ 30 000 euros. Jene vais pas me plaindre non plus, j’atteins tout <strong>de</strong> même mes objectifs, on verra l’annéeprochaine…pour moi, il y a <strong>violation</strong> <strong>du</strong> droit <strong>du</strong> travail, c’est <strong>du</strong> chantage. Ensuite il y a unautre problème, c’est l’installation <strong>du</strong> mouchard dans nos véhicules. Le GPS c’est aussi lasurprise <strong>de</strong> janvier, comme le changement <strong>de</strong> calcul <strong>de</strong>s commissions, soit disant c’était pourfaire une réunion, ils ne nous ont pas <strong>de</strong>mandé notre accord : « on va vous m<strong>et</strong>tre un GPS »,soit disant pour faire <strong>de</strong>s économies sur l’ensemble <strong>de</strong> la force <strong>de</strong> vente. La société jouit d’un<strong>et</strong>rès bonne réputation mais aujourd’hui on est en train <strong>de</strong> tout casser, il y a <strong>de</strong>s problèmes surles pro<strong>du</strong>its, <strong>et</strong> là on véhicule une image négative. Le dirigeant n’est pas toujours compétent.Mais bon, il faut éviter les pensées négatives <strong>et</strong> compter sur son environnement familial.23


Annexe 3Tableau 2 : principales caractéristiques <strong>de</strong> l’échantillonI<strong>de</strong>ntité Secteur Age Situation Nombrefamiliale d’enfantsFabrice Br<strong>et</strong>agne + Sud-Ouest 40 Marié 3Vincent Rhône-Alpes 34 Marié 2Vincent Est + Paris 37 Marié 2Antoine Sud-Ouest 40 Concubinage 2Valérie Sud-Est 33 Mariée 0Sébastien Nord + Paris 32 Marié 224

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!