Le lemme suivant est proche du résultat que l’on veut démontrer, à ceci près que l’onsuppose en plus la forme linéaire ω positive.Lemme 6. Soit ω une forme linéaire positive et complètement additive <strong>sur</strong> M. Alors ωest ultrafaiblement continue.Démonstration. Soit (F j ) j∈J une famille orthogonale <strong>de</strong> projections telle que, pour toutj, il existe x j ∈ H tel que |ω(R)| ≤ ||Rx j ||, pour tout R ∈ MF j et maximale pour cespropriétés. La maximalité <strong>de</strong> la famille (F j ) et le lemme 5 qui précè<strong>de</strong> entraînent qu’ona nécessairement : ∑ j F j = 1.On veut montrer : ω ∈ M ∗ . On sait que M ∗ est fermé pour la norme dans M ∗(corollaire 2). Il suffit donc <strong>de</strong> vérifier que pour tout ɛ > 0, il existe ω 1 ∈ M ∗ tel que||ω − ω 1 || < ɛ. Comme ω est complètement additive, on sait déjà que ∑ ω(F j ) convergevers ω(1). On peut donc choisir une partie finie K <strong>de</strong> J telle queω( ∑j∈J\KF j ) ≤ɛ2||ω|| .Notons E = ∑ j∈J\K F j. On a donc ω(E) ≤ ɛ 2 /||ω| | , et ω = ω 1 + ω 2 , où l’on a posé, pourtout R ∈ M, ω 1 (R) = ω(R ∑ j∈K F j) et ω 2 (R) = ω(RE). Alors, pour tout R ∈ M,|ω 1 (R)| = | ∑ j∈Kω(RF j )| ≤ ∑ j∈K||RF j x j ||.Ainsi, ω 1 est fortement continu, donc faiblement continu (cf. la fin <strong>de</strong> la section 1) etdonc ultrafaiblement continu (trivial). Donc ω 1 ∈ M ∗ .D’autre part, l’inegalité <strong>de</strong> Cauchy-Schwarz donne quant à elle∀R ∈ M|ω 2 (R)| 2 = |ω(RE)| 2 ≤ |ω((ER ∗ ) ∗ E)| 2 ≤ ω(ER ∗ RE)ω(E) ≤ ||ω||||R|| 2 ω(E).Par conséquent, pour tout R, |ω 2 (R)| 2 ≤ ɛ 2 ||R|| 2 , et donc ||ω 2 || ≤ ɛ, comme voulu.Théorème 1. Soit ω une forme linéaire <strong>sur</strong> M. Alors ω est ultrafaiblement continue siet seulement si elle est complètement additive.Idée <strong>de</strong> la démonstration. On a déjà traité le sens facile.Montrons la réciproque. Comme la preuve est longue et technique, je me contente <strong>de</strong>donner <strong>les</strong> gran<strong>de</strong>s lignes <strong>de</strong> l’argument. Soit ω une forme linéaire <strong>sur</strong> M complètementadditive. En décomposant ω en somme <strong>de</strong> sa partie hermitienne et <strong>de</strong> sa partie antihermitienne,on peut supposer que ω est hermitienne. Bien sûr, on peut aussi supposer que||ω|| ≤ 1. On pose alors :µ := sup{ω(A), A = A ∗ ∈ M, 0 ≤ A ≤ 1},<strong>de</strong> sorte que 0 ≤ µ ≤ ||ω|| ≤ 1. Soit 0 < ɛ < 1/2. Par le lemme 4 (et un petit argumentbasé <strong>sur</strong> le théorème spectral), on peut trouver une projection E 1 ∈ M telle que ω(E 1 ) ≥4
µ−ɛ et que ω|E 1 ME 1 est positive. Comme ω|E 1 ME 1 est encore complètement additive,on en déduit par le lemme 6 précé<strong>de</strong>nt que ω|E 1 ME 1 est ultrafaiblement continue. PosantE 2 = 1−E 1 , on a donc une décomposition <strong>de</strong> ω en somme <strong>de</strong> quatre formes linéaires ω j,k ,j, k ∈ {1, 2}, avec ω j,k (R) = ω(E j RE k ), pour tout R. En outre, si F est une projection<strong>de</strong> l’algèbre E 2 ME 2 , alors E 1 + F est une projection <strong>de</strong> M, et donc, par choix <strong>de</strong> E 1 ,ω(F ) < ɛ.L’étape suivante, que je passe sous silence, consiste à montrer que ||ω 1,2 || et ||ω 2,1 ||sont un O(ɛ). C’est assez astucieux. Attention cependant : on n’a pas encore terminé,car en ce qui concerne ω 2,2 , on ne dispose que d’une inégalité <strong>sur</strong> ω(F ), et non <strong>sur</strong> savaleur absolue, dans ce qui précè<strong>de</strong>. Donc on ne peut pas en conclure directement que||ω 2,2 || est un O(ɛ) et que ω est proche à ɛ près <strong>de</strong> ω 1,1 ∈ M ∗ . D’ailleurs ceci est faux engénéral.Qu’à cela ne tienne : on répète le raisonnement que l’on vient <strong>de</strong> faire en l’appliquantcette fois à ν = −ω|E 2 ME 2 . Cette forme linéaire est complètement additive, vérifie||ν|| ≤ 1 et ν(F ) > ɛ pour toute projection F <strong>de</strong> E 2 ME 2 . On en déduit comme ci<strong>de</strong>ssusl’existence <strong>de</strong> projections F 1 , F 2 dans E 2 ME 2 <strong>de</strong> somme E 2 , tel<strong>les</strong> que ν estproche à ɛ près <strong>de</strong> ν 1,1 + ν 2,2 (même notations qu’avant !), avec ν 1,1 ultrafaiblementcontinue, et ν(F ) < ɛ pour tout F projection dans F 2 MF 2 . Cette inégalité jointe à laprécé<strong>de</strong>nte donne que |ν(F )| < ɛ pour toute projection F ∈ F 2 MF 2 . On en déduit ( !)que ||ν|F 2 MF 2 || ≤ 4ɛ. Donc ||ν − ν 1,1 || = O(ɛ). Ainsi, ω est égal à ɛ près à un élément<strong>de</strong> M ∗ . On conclut en utilisant à nouveau le fait que M ∗ est fermé pour la norme dansM ∗ .Ce théorème nous donne une caractérisation agréable <strong>de</strong>s formes linéaires ultrafaiblementcontinues. En voici <strong>de</strong>ux corollaires : le premier est immédiat et ne nous servirapas dans la suite ; le second sera essentiel et mérite le nom <strong>de</strong> théorème.Corollaire 3. Soit ω une forme linéaire <strong>sur</strong> M. Si pour toute sous-∗-algèbre abéliennemaximale A <strong>de</strong> M, ω|A est ultrafaiblement continue, ω est ultrafaiblement continue.Démonstration. Soit (E α ) α ) une famille orthogonale <strong>de</strong> projections <strong>de</strong> M. Comme cesprojections commutent entre el<strong>les</strong>, on peut choisir A une sous-∗-algébre abélienne maximaleA <strong>de</strong> M <strong>les</strong> contenant toutes. Comme ω|A est ultrafaiblement continue donccomplètement additive, on en déduitω( ∑ αE α ) = ∑ αω(E α ).On conclut avec le théorème 1.Théorème 2. Soit K ⊂ M ∗ une partie bornée (pour la norme) <strong>de</strong> M ∗ . Alors, K est relativementcompact dans M ∗ pour la topologie σ(M ∗ , M) si et seulement si pour toute familleorthogonale (E n ) n∈N <strong>de</strong> projections <strong>de</strong> M, la suite ω(E n ) tend vers 0 uniformémenten ω ∈ K ( condition (∗) dans la suite <strong>de</strong> ce texte).5