LES DÉPARTEMENTS ET LA SOLIDARITÉ NATIONALE FACE AU DÉFI DE LA SIMPLIFICATION DES NORMES. À PROPOS DU RAPPORT DOLIGÉde l’article L. 232-12 du CASF, par lesconseils génér<strong>aux</strong> <strong>aux</strong> personnes âgéesdépendantes de soixante ans ou plus.Cette prestation permet de fi nancer enpartie les différentes ai<strong>des</strong> (humaines ettechniques) <strong>aux</strong>quelles ces personnesont recours pour compenser leurs difficultésdans la réalisation <strong>des</strong> actes de lavie quotidienne. Elle est accordée « dansles limites de tarifs fi xés par voie réglementaire» en fonction du degré de perted’autonomie. <strong>La</strong> participation du bénéficiairede l’APA au fi nancement du pland’aide (« ticket modérateur ») est calculéeen fonction de ses ressources, selon unbarème défini nationalement. Il s’agitdonc d’une prestation en nature (utiliséepour couvrir <strong>des</strong> dépenses prédéfinies),différente selon que le bénéficiaire esthébergé à domicile ou en établissement.Le rapport préconise en premier lieud’étudier – en lien avec l’Assemblée <strong>des</strong>départements de France – la possibilitéde verser l’allocation à terme échu etsur factures (prop. n° 215). Actuellement,suivant le dispositif de l’article R. 232-30du CASF, elle est mandatée « au plustard le 10 du mois au titre duquel elleest versée ». Il en résulte ainsi <strong>des</strong> indusqui ne sont pas toujours récupérableset alourdissent la charge de travail <strong>des</strong>conseils génér<strong>aux</strong>. L’auteur n’ignorepas que la solution qu’il recommandeopèrerait un transfert de cette gestion<strong>des</strong> collectivités vers les bénéficiaires quidevraient alors avancer les frais et transmettremensuellement leurs factures.On ajoutera qu’avec un tel système, lesagents territori<strong>aux</strong> devraient égalementvérifi er ces documents rapidement, aulieu d’effectuer <strong>des</strong> contrôles a posterioricomme aujourd’hui. En second lieu, lerapport adopte les conclusions formuléespar l’IGAS lors de son examen dela gestion de l’APA en 2009 et 2010 enfaveur d’une évolution du rôle de la commissionde proposition et de conciliationcompétente pour attribuer l’allocation(prop. n° 224). Dans ce travail, l’IGASsouhaitait :– supprimer l’examen systématique detoutes les propositions de décisions individuellespar la commission au profitde l’examen de certaines situations àl’initiative du PCG ;– conforter son rôle de commission deconciliation en cas de litige ;– élargir son rôle à l’orientation et à lasurveillance de l’APA.Quant à la PCH, le rapport attire l’attentionsur son maintien en cas d’hospitalisationdans un établissement de santéou d’hébergement dans un établissementsocial ou médico-social, donnant lieu àune prise en charge par l’assurance maladieou par l’aide sociale. Le dispositif actueltrès protecteur de l’article D. 245-74du CASF prévoit en effet, dans un tel cas,le versement intégral de la prestationpendant les 45 premiers jours d’hospitalisationalors même – puisque c’estl’hypothèse de base – que le bénéficiaireest pris en charge par l’établissement <strong>des</strong>anté. Aussi le rapport propose-t-il derevenir sur ce maintien systématique enretenant un nouveau délai de référence(prop. n° 216).2) L’aide à l’hébergementLe rapport aborde deux grands aspectsde cette épineuse question, l’aide socialeà l’hébergement d’une part, les <strong>normes</strong>régissant les établissements assurantl’hébergement <strong>des</strong> personnes âgées dépendantes(EHPAD) d’autre part.Sur le premier point, il entend simplifier la procédure d’admission à l’ai<strong>des</strong>ociale à l’hébergement pour les personneshandicapées (CASF, art. L. 241,242 et 314) en instaurant un lien directentre les établissements concernés etles conseils génér<strong>aux</strong> (prop. n° 223) etréviser la tarification de cette aide (prop.n° 217). Actuellement, et en vertu del’article R. 314-204 du CASF, le tarifjournalier afférent à l’hébergement<strong>des</strong> personnes âgées dans les établissementsde santé autorisés à dispenser<strong>des</strong> soins de longue durée est minoréen cas d’absence de plus de 72 heures.Il est ici proposé de raccourcir ce délaià 24 heures.Sur le second point – les EHPAD – lerapport formule un souhait, celui devoir reporter l’obligation d’installationde moyens d’alimentation autonomesen énergie avant le 14 septembre 2012pour les établissements hébergeant <strong>des</strong>personnes présentant <strong>des</strong> pathologies nécessitantl’usage de dispositifs m édic<strong>aux</strong>fonctionnant à l’électricité (prop. n° 218)et une demande d’éclaircissement quantau caractère obligatoire <strong>des</strong> dispositionsdéfinissant le cahier <strong>des</strong> charges <strong>des</strong>conventions pluriannuelles passées entreles EHPAD et les PCG (prop. n° 234).B.– Des précisions statutairesdemandéesPour fi nir, le rapport s’attaque <strong>aux</strong> incertitu<strong>des</strong>statutaires qui empoisonnentautant les personnels concernés que lescollectivités. Ainsi en est-il par exemple<strong>des</strong> assistantes maternelles dont le statutest dénoncé comme « opaque et complexe». Les règles régissant ces indispensables<strong>aux</strong>iliaires s’éparpillent en effetentre différents co<strong>des</strong> et leurs élémentsde rémunération demeurent fl ous. Qu’ilnous soit permis de rappeler ici que nousavons récemment évoqué le problèmeà l’occasion de la saisine du Conseilconstitutionnel (Cons. const., 1 er avr. 2011,n° 2011-119 QPC, Mme Denise R. et autres[licenciement <strong>des</strong> assistants maternels]) etde deux jugements rendus par le Tribunaladministratif de Nantes (TA Nantes,17 févr. 2011, n os 0904460 et 0904346) poursouligner précisément les incertitu<strong>des</strong>pratiques résultant de la loi n° 2005-706du 27 juin 2005 relative <strong>aux</strong> assistantsmaternels et <strong>aux</strong> assistants famili<strong>aux</strong>(Bouret S., Fleury B., Actualité <strong>des</strong> assistantsfamili<strong>aux</strong> et maternels : modalités de rémunérationet conditions de licenciement, JCP A2011, n° 2259). Le rapport préconise ici larédaction d’un code pilote comprenantl’ensemble <strong>des</strong> dispositions relatives à cestatut (prop. n° 230). De la même façon, ilsuggère de préciser les règles <strong>applicables</strong><strong>aux</strong> maisons d’assistants maternels issuesde la loi n° 2010-625 du 9 juin 2010(prop. n° 235. Sur cette loi, v. Baron A., <strong>La</strong>création <strong>des</strong> maisons d’assistants maternels,JCP A 2010, n° 482).Enfin, on notera que le rapport soulèveles difficultés de recrutement <strong>aux</strong>quellesles collectivités doivent faire face pourassurer la direction <strong>des</strong> services d’accueilde petite enfance et propose, en conséquence,d’assouplir les règles régissantces corps d’emplois en élargissant lesqualifications requises (prop. n° 229). Uneréflexion similaire pourrait par ailleursêtre menée pour d’autres postes. ◆58 REVUE LAMY DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES •SEPTEMBRE 2011 • N° 71
RLCT2005Questions à Claude BELOTSénateur de la Charente-MaritimeRevue <strong>La</strong>my <strong>des</strong> CollectivitésTerritoriales : Les conclusions durapport Doligé vous paraissentellesconformes <strong>aux</strong> préconisationsde votre rapport ? Quelssont les points d’accord et dedésaccord ?Claude Belot : Éric Doligé et moimêmefaisons une analyse identiquede la situation : sur l’inflation normative et l’extrêmeprécision <strong>des</strong> textes, sur le zèleexcessif parfois mis dans leurapplication, sur la prise en compte trèsinsuffisante <strong>des</strong> réalités de terrain, sur lesfaiblesses du processus de consultationen amont <strong>des</strong> collectivités territoriales,etc. Il n’est donc pas surprenant que nosconclusions convergent largement. Pourune comparaison claire, nous pouvonsdistinguer trois nive<strong>aux</strong>.D’abord, le niveau de l’identité : il s’agit<strong>des</strong> pistes que je mentionne dans monrapport et qui se retrouvent dans celuide M. Doligé, même si leur formulationest différente, sous la forme de propositionsou de principes à suivre. Je pensenotamment à l’idée de réfléchir à <strong>des</strong>adaptations <strong>des</strong> <strong>normes</strong> selon la taille <strong>des</strong>collectivités, à l’exclusion <strong>des</strong> emploissoumis à <strong>des</strong> conditions particulièrespour le décompte <strong>des</strong> obligations enmatière d’accessibilité ou à l’extensiondu champ d’intervention de la CCEN(commission consultative d’évaluation<strong>des</strong> <strong>normes</strong>).Ensuite, le niveau de la parenté : il s’agit<strong>des</strong> conclusions qui concordent dans leuresprit, mais pour lesquelles M. Doligéet moi-même évoquons <strong>des</strong> modalitésdifférentes. Il en va par exemple ainsià propos de ma suggestion d’instituerun « correspondant <strong>normes</strong> » au sein dechaque département, laquelle trouve àl’évidence un écho dans sa propositiond’un « médiateur <strong>des</strong> territoires », égalementpour chaque département. Luienvisage plutôt de confier cette missionà un ancien élu (ou à une commissionClaude BELOTSénateur de la Charente-Maritimed’anciens élus), alors que mon rapportévoque un « guichet » au sein de la préfecture.Mais, dans les deux cas, l’espritest le même : faire en sorte que les collectivitésaient un interlocuteur clairementidentifiable et que celui-ci soit legarant du bon sens. Les différences surles modalités sont secondaires et, selonmoi, n’ont rien de dirimant.Enfin, le troisième niveau est celui del’apparente différence : c’est celui <strong>des</strong>propositions que j’avais formulées etqui n’ont pas été reprises par M. Doligé.J’insiste sur l’épithète « apparente », caron ne saurait conclure de ce silence undésaveu implicite de mes propositions.N’oublions pas, en effet, que la missionde M. Doligé portait sur « la <strong>simplification</strong>» et non, contrairement à lamienne, sur la problématique générale<strong>des</strong> <strong>normes</strong> <strong>applicables</strong> <strong>aux</strong> collectivitésterritoriales. Il n’est donc pas surprenantque l’on ne retrouve pas sous sa plume<strong>des</strong> propositions de mon rapport tellesque l’instauration d’un fonds de compensation<strong>des</strong> conséquences fi nancières <strong>des</strong><strong>normes</strong> de l’État ou la fi xation de dates« traditionnelles » de principe pour l’entréeen vigueur de toute nouvelle norme :cela ne relève pas, à proprementparler, de la <strong>simplification</strong>.Pour ma part, en pour conclure,je dirai que je me reconnaistrès largement dans le travailde mon collègue : j’approuvepleinement les vingt principesde son rapport et aucune de ses268 proposition ne me heurte.RLCT : Il n’est fait que peu référenceà la mutualisation (<strong>des</strong>services…) dans le rapport. Nepensez-vous pas néanmoins que <strong>des</strong> <strong>simplification</strong>sseraient envisageables dansce domaine ?C.B. : Éric Doligé pointe tout de même dudoigt les difficultés résultant <strong>des</strong> diversesinstructions comptables. Un grand passerait déjà fait en faveur de la mutualisationsi l’on parvenait à une <strong>simplification</strong>sur ce sujet.Pour le reste, sachons faire la part <strong>des</strong>choses. J’ai parfaitement conscience,comme M. Doligé et comme la plupart denos collègues sénateurs, que la mutualisationn’est pas partout aussi pousséequ’il le faudrait au regard de l’objectifd’optimisation <strong>des</strong> dépenses publiques ;le Sénat a d’ailleurs été en pointe sur cesujet lors de la discussion de la réformede 2010 et c’est à son initiative, sur labase <strong>des</strong> trav<strong>aux</strong> de sa délégation <strong>aux</strong>Collectivités territoriales, que le texte estallé aussi loin que possible en la matière.Pour autant, une fois ce constat dressé,peut-on en accuser les <strong>normes</strong> françaiseset considérer que leur <strong>simplification</strong> résoudraitune large part du problème ? Jen’en suis pas persuadé, pour au moinsdeux séries de raisons.D’abord, parce que la mutualisation estune question de volonté avant d’êtreune question de droit. C’est une entreprisequi, souvent pour ne pas diretoujours, se heurte à <strong>des</strong> réticences : réticencespolitiques de la part d’élus quipeuvent y voir la perspective d’une dilutionde leurs pouvoirs dans <strong>des</strong> servicesPERSPECTIVES DOSSIER SPÉCIALN° 71 • SEPTEMBRE 2011 • REVUE LAMY DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES 59