FONCTION PUBLIQUETERRITORIALESous la responsabilité de Rachel MOURIERSecrétaire générale de la Rédaction<strong>La</strong>my Fonction publique territorialeTEMPS DE TRAVAIL, REPOSET CONGÉSRLCT1988Gestion <strong>des</strong> fonctionnaireset mesures d’ordre intérieur<strong>La</strong> décision par laquelle l’administration refused’accorder à l’un de ses agents, à titre discrétionnaire,une autorisation d’absence pour commoditépersonnelle sans retenue sur traitement revêtle caractère d’une mesure d’ordre intérieurinsusceptible de recours.CE, 11 mai 2011, n° 337280, Caisse <strong>des</strong> dépôts et consignations,à mentionner <strong>aux</strong> tables du Rec. CE<strong>La</strong> présente décision, rendue à propos d’un agent de la Caisse<strong>des</strong> dépôts et consignations (CDC), est, toutefois, de portéegénérale et intéresse, donc, notamment la fonction publiqueterritoriale. Elle est d’autant plus importante qu’elle revientsur la jurisprudence antérieure qui ouvrait plus largementle prétoire.M. Sevoz, agent de la CDC, ayant été la malheureuse victimed’un cambriolage de son domicile, avait pris, sans autorisationpréalable, compte tenu <strong>des</strong> circonstances, sa journée pouraccomplir les différentes démarches rendues nécessaires parcet événement. Il s’était efforcé de régulariser a posterioricette situation mais la Caisse avait refusé de lui accorder uneautorisation d’absence pour ce motif et, en l’absence de servicefait, avait opéré une retenue d’un trentième de son traitementmensuel et de ses primes.L’intéressé avait obtenu du tribunal administratif l’annulationdu refus de régulariser sa situation autrement que par une imputationsur ses congés lég<strong>aux</strong> et de la retenue sur traitement.Le Conseil d’État était saisi du pourvoi en cassation de la CDC.<strong>La</strong> jurisprudence refusait, traditionnellement de considérercomme pouvant faire l’objet d’un recours pour excès depouvoir les mesures relatives <strong>aux</strong> avantages non statutairesen matière de congés, lesquels ont un caractère purementgracieux (CE, 16 mai 1980, n° 12.670, Chevry, Rec. CE 1980, p. 227).Toutefois, avec le temps et la bienveillance traditionnelle dujuge administratif en matière d’intérêt pour agir, cette jurisprudenceavait été assouplie. Il avait, ainsi, été admis qu’étaitrecevable un recours pour excès de pouvoir dirigé contreun refus d’autorisation d’absence, même si l’intérêt d’un tellibéralisme était tempéré par le refus d’examiner les moyensd’erreur de droit, écartés comme inopérants en raison du caractèrepurement gracieux de la mesure (CE, 3 juin 1988, n° 67791,Mme Barsacq-Adde, Rec. CE 1988, p. 227). Puis, sur sa lancée, leConseil d’État avait appliqué un contrôle restreint à un refusd’autorisation d’absence (CE, 15 févr. 1991, n° 64686, Mont, Rec.CE tables 1991, p. 1104, ainsi que CE, 4 févr. 1994, n° 137644, Centrehospitalier spécialisé de Montbert, inédit au Rec. CE et CE, 12 févr.1997, n° 125893, Mlle Henny, Rec. CE tables 1997, p. 891).Un tel libéralisme, confinant au laxisme, s’agissant de mesurespurement gracieuses n’ayant aucune conséquencestatutaire ou fi nancière, pouvait paraître inadapté à la situationactuelle du juge administratif. Comme le soulignaitle Rapporteur public, Nicolas Boulouis, « il ne nous semblepas que la maxime “de minimis” ne soit plus actuelle et nouspensons que les tribun<strong>aux</strong> administratifs ont suffisammentde requêtes autrement plus importantes pour ne pas avoir àtrancher ce type de litiges ».Suivant son Rapporteur public, le Conseil d’État juge ainsi« que la décision par laquelle l’administration refuse d’accorderà l’un de ses agents, à titre discrétionnaire, une autorisationd’absence pour commodité personnelle sans retenue surtraitement revêt le caractère d’une mesure d’ordre intérieurinsusceptible de recours ».Il annule, en conséquence, le jugement du tribunal administratifpour erreur de droit, rejette les conclusions dirigéescontre le refus d’autorisation d’absence, mais statue, évidemment,sur la décision prononçant une retenue sur traitementd’un trentième indivisible, dès lors que cette mesure ayant<strong>des</strong> conséquences fi nancières pour l’agent est, bien-sûr,susceptible de recours.Emmanuel GLASERAvocat associé, cabinet Veil Jourde➤ <strong>La</strong>my Fonction publique territoriale, n° 505-152 et s.22 REVUE LAMY DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES • SEPTEMBRE 2011 • N° 71
Par OlivieriGUILLAUMONTConseiller juridiqueRégion Provence-Alpes-Côte d’AzurRLCT1989RESPONSABILITÉSRésiliation pour motif d’intérêtgénéral <strong>des</strong> contrats et claused’indemnisation limitéeLes stipulations contractuelles fi xant les droits à indemnité et les modalités d’indemnisationdu cocontractant en cas de résiliation pour motif d’intérêt général sont vali<strong>des</strong> sous réservequ’il n’en résulte pas, au détriment d’une personne publique, une disproportion manifesteentre l’indemnité ainsi fi xée et le montant du préjudice résultant, pour le concessionnaire,<strong>des</strong> dépenses qu’il a exposées et du gain dont il a été privé. Cette règle n’ayant néanmoinspas vocation à jouer pour <strong>des</strong> personnes privées, rien ne s’oppose à ce que ce que le contratprévoit une indemnisation inférieure au montant du préjudice subi par le cocontractantprivé de l’administration. En revanche, lorsque le prestataire de service cocontractant estune personne publique le contrat ne peut, en application de la jurisprudence « Mergui »,prévoir une indemnisation manifestement disproportionnée par rapport à son préjudice.CE, 4 mai 2011, n° 334280, CCI de Nîmes, à publier au Rec. CEACTUALITÉS ÉCLAIRAGEDans cette affaire, le conseil municipal dela commune de Grau-du-Roi avait décidéde résilier unilatéralement la conventiond’exploitation du port de plaisance laliant à la Chambre de Commerce et d’Industriede Nîmes-Bagnols-Uzès-Le Vigan, en faisant application<strong>des</strong> dispositions prévues au contrat. <strong>La</strong> Chambre de Commerceet d’Industrie (CCI) a alors entrepris d’obtenir réparation dupréjudice qu’elle estimait avoir subi du fait de la résiliationanticipée de la convention, à hauteur d’environ 9 millionsd’euros. Pour confirmer le rejet de cette demande indemnitaire,la Cour administrative d’appel de Marseille s’était notammentfondée sur les stipulations du cahier <strong>des</strong> charges de la concessionqui limitaient l’indemnisation du concessionnaire à lareprise <strong>des</strong> seules charges d’emprunt afférentes à l’outillageainsi que <strong>des</strong> dépenses de fonctionnement régulièrement engagéeset excluaient toute indemnité complémentaire. <strong>La</strong> coura déduit de ces dispositions contractuelles que la CCI n’avaitpas droit, sur le fondement du contrat, à l’indemnisation <strong>des</strong>investissements non amortis acquis sur fonds propres. <strong>La</strong> CCIsoutenait précisément que, si les stipulations contractuellesen cause devaient être regardées comme excluant tout autredroit à indemnisation, elles étaient alors entachées de nullitéet devaient être écartées. Face à ce moyen la Cour a formuléun considérant de principe <strong>aux</strong> termes duquel « dans le casoù, comme en l’espèce, il n’est pas contesté que la résiliation estintervenue pour un motif d’intérêt général justifiant que l’exploitationsoit établie sur <strong>des</strong> bases nouvelles, les modalités commel’étendue <strong>des</strong> droits à indemnisation reconnus au concessionnaireévincé peuvent être déterminées par les stipulationscontractuelles sans méconnaître un principe général du droitet sans porter atteinte au principe de sécurité juridique, sousla réserve qu’elles ne puissent être interprétées comme ayantpour effet soit d’exclure toute indemnisation soit de prévoir uneindemnisation manifestement disproportionnée au préjudicesubi ». Faisant application de ce principe et après avoir vérifiéque l’indemnisation accordée au concessionnaire n’avait pasété manifestement disproportionnée, la cour administratived’appel n’en avait pas moins rejeté les conclusions de la CCI.Saisi de l’affaire, le Conseil d’État casse l’arrêt de la Cour pourerreur de droit et apporte d’utiles précisions sur la validité <strong>des</strong>stipulations contractuelles limitatives d’indemnisation.I – LA VALIDITÉ DES STIPULATIONS CONTRACTUELLESLIMITATIVES D’INDEMNISATION ET L’INTERDICTIONFAITE AUX PERSONNES PUBLIQUES DE CONSENTIRDES LIBÉRALITÉSL’administration est toujours en mesure, afin de satisfaire à<strong>des</strong> exigences de service public, d’imposer à son contractantla réalisation de prestations supplémentaires, ou de réduirele périmètre contractuel. Ce pouvoir de modification unilatéraledu contrat par l’administration peut même débouchersur le pouvoir de résiliation unilatérale pour motif d’intérêtgénéral lorsque l’administration considère que le contrat necorrespond plus <strong>aux</strong> besoins du service public. Reprenant sajurisprudence « Distillerie Magnac-<strong>La</strong>val » (CE, ass. plén., 2 mai1958, Rec. CE 1958, p. 401), le Conseil d’État rappelle dans l’arrêt« CCI de Nîmes » que ce principe existe indépendamment ducontrat « en vertu <strong>des</strong> règles générales <strong>applicables</strong> <strong>aux</strong> contratsadministratifs ».Ce pouvoir existe pour tous les contrats administratifs y compris,comme en l’espèce, pour les concessions de service public(CE, ass., 2 févr. 1987, n° 81131, Sté TV 6, Rec. CE 1987, p. 29). <strong>La</strong>N° 71 • SEPTEMBRE 2011 • REVUE LAMY DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES 23