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JOURNAL OFFICIEL - Débats parlementaires de la 4e République

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*4266 ASSEMBLEE NATIONALE — 1'" SEANCE DU 26 AOUT 1954U est évi<strong>de</strong>nt, par ailleurs, que <strong>la</strong> majorité <strong>de</strong> l'assemblée<strong>de</strong>vrait être à l'image du Maroc réel, c'est-à-dire celui surlequel s'appuie encore notre autorité.De sages réformes ont été instaurées l'an <strong>de</strong>rnier sur lesp<strong>la</strong>ns municipal et régional. On sait que le terrorisme en aempêché <strong>la</strong> mise en œuvre.Comment pourrait-on aller au <strong>de</strong>là tant que l'ordre n'aurapas été rétabli conformément, d'ailleurs, aux déc<strong>la</strong>rations <strong>de</strong>M. le prési<strong>de</strong>nt du conseil ? Il ne le sera pas dans <strong>la</strong> faiblesse.I.e rétablissement <strong>de</strong> l'ordre suppose notamment le maintien• entre les mains <strong>de</strong>s caïds et pachas <strong>de</strong> leur pouvoir réglementairesous notre contrôle.U n'y aurait qu'avantage à constituer celte assemblée consultativefranco-marocaine dont notre ministre actuel exposaitdans <strong>la</strong> revue Fédération d'avril 1954 ce que <strong>de</strong>vait en être <strong>la</strong>judicieuse composition.Mais, bien plus encore que <strong>de</strong>s mesures politiques, ce quele prolétariat que nous avons créé attend, ce sont <strong>de</strong>s mesures<strong>de</strong> justice sociale dont, en définitive, nous <strong>de</strong>vrions retirer toutle bénéfice.Au Maroc, plus encore qu'en Tunisie, en raison <strong>de</strong> son économieplus riche et plus avancée, lien ne sera bâti <strong>de</strong> soli<strong>de</strong> sansune communaulé franco-musulmane susceptible <strong>de</strong> donner àcette p<strong>la</strong>que tournante du bloc franco-africain le développementcorrespondant au rôle capital qu'elle doit jouer dans <strong>la</strong> défense<strong>de</strong> l'Occi<strong>de</strong>nt.Ce problème <strong>de</strong> l'évolution nécessaire (le nos protectorats, ilfaut le voir dans son ensemble, dans le cadre <strong>de</strong> l'intimeunion <strong>de</strong> <strong>la</strong> France et <strong>de</strong> l'Afrique du Nord. Cette question,vitale pour nous, conditionne étroitement notre p<strong>la</strong>ce dansl'Europe, ou plutôt dans le mon<strong>de</strong> occi<strong>de</strong>ntal, car, à l'échelled'aujourd'hui, tant du point <strong>de</strong> vue économique que du point<strong>de</strong> vue <strong>de</strong> <strong>la</strong> défense, l'Europe elle-même est trop petite. Maisle "rôle <strong>de</strong> <strong>la</strong> France y restera considérable si elle a réalisé lesEtats unis franco-africains.Notons en passant <strong>la</strong> vocation occi<strong>de</strong>ntale que l'Histoire aimposée aux envahisseurs du Moghreb, entés sur le vieux fondberbère. Elle a été matérialisée par <strong>la</strong> nécessité d'un calife auxlimites extrêmes du Couchant. Cette vocation, c'est à nous <strong>de</strong>lui donner sa pleine réalisation.Regardons par <strong>la</strong> pensée le triangle idéal <strong>de</strong> forces queforment, enserrant <strong>la</strong> Méditerranée, notre pays et le Moghreb.La France en est <strong>la</strong> tête et le cœur; l'Afrique du Nord en estl'assise, elle-même appuyée sur toute notre Afrique noire. Cetriangle doit former, au sein <strong>de</strong> l'Union française, une communautéà part et indissoluble. Nous pourrons alors nous présenterdans une organisation européenne ou autre.Cette vue permet <strong>de</strong> dégager les gran<strong>de</strong>s lignes <strong>de</strong> <strong>la</strong> politiquenécessaire à sa réalisation : unité <strong>de</strong> l'économie pour 1avie harmonieuse <strong>de</strong> tous; unité <strong>de</strong> <strong>la</strong> politique étrangère dans<strong>la</strong> marche vers l'avenir; unité <strong>de</strong> <strong>la</strong> sécurité qui prévient lestroubles fomentés par les forces <strong>de</strong> division internes ouexternes; unité <strong>de</strong> <strong>la</strong> défense, enfin, qui assure <strong>la</strong> cohésion et<strong>la</strong> force pour <strong>la</strong> sauvegar<strong>de</strong> <strong>de</strong> "l'ensemble.Il y a quelques jours, on a célébré le dixième anniversairedu débarquement sur les côtes <strong>de</strong> Provence, pour <strong>la</strong> libération<strong>de</strong> <strong>la</strong> patrie, <strong>de</strong> l'armée française renaissante dans son arméed'Afrique et rapportant <strong>de</strong> Tunisie, <strong>de</strong> Corse et d'Italie sesdrapeaux vainqueurs.. Cette image doit rester <strong>de</strong>vant nos yeux et déterminer notrerésolution: celle <strong>de</strong> ne pas <strong>la</strong>isser détruire notre œuvre africaine,qui s'est révélée si payante, ni son instrument et sonsymbole, l'armée d'Afrique. Y toucher dans son esprit, dans saforme même, où tous s'intègrent. Français et Africains, aur/lveau <strong>de</strong> l'homme, dans sa mobilisation, enfin, ce serait sonnerie g<strong>la</strong>s <strong>de</strong> notre œuvre et <strong>de</strong> <strong>la</strong> France.Et puisque j'ai parlé <strong>de</strong> mobilisation africaine, qu'il me soitpermis <strong>de</strong> dire qu'elle a été en 1914, en 1939 et en 1942 l'illustration<strong>la</strong> plus tangible <strong>de</strong> ce qu'est, envers et contre tout,cette communauté franco-musulmane, matérialisée par <strong>la</strong> fusion,dans les mêmes rangs, <strong>de</strong>s Français et <strong>de</strong>s musulmansd'Afrique, fusion dont <strong>la</strong> valeur se mesurait hier encore à <strong>la</strong>rupture <strong>de</strong>s lignes ennemies sur le Garigliano. (App<strong>la</strong>udissementsà l'extrême droite, à droite, au centre et à gauche )Si j'ai cru <strong>de</strong>voir évoquer ces souvenirs, c'est que je croisfermement que c'est autour <strong>de</strong> notre armée d'Afrique que nous<strong>de</strong>vons assurer <strong>la</strong> pérennité d'une œuvre qui est justement <strong>la</strong>sienne.Elle suppose le renforcement définitif <strong>de</strong> notre dispositif militaireen Afrique du Nord.Comment s'étonner du relâchement <strong>de</strong> notre aulorité quandon sait qu'au Maroc, par exemple, l'effectif <strong>de</strong> nos forces esttombé <strong>de</strong> 68.000 hommes, en 1938, à 34.000 hommes, exactement<strong>la</strong> moitié, aujourd'hui ?M. Marcel-Edmond Naegelen. A cause <strong>de</strong> l'Indochine,M. Joseph <strong>de</strong> Monsabert. Ce renforcement, il faut le réalisernotamment en Tunisie en recréant les unités dissoutes, par <strong>la</strong>pleine utilisation du service militaire tunisien obligatoire ; auMaroc, en reformant nos régiments <strong>de</strong> tirailleurs vidés <strong>de</strong> leursubstance par <strong>la</strong> campagne d'Indochine ; en Afrique, enfin, cetteterre d'élection où, seul pays au mon<strong>de</strong>, <strong>la</strong> France peut setarguer d'avoir réussi <strong>la</strong> plus belle œuvre d'assimi<strong>la</strong>tion quisoit, grâce à cet esprit d'amour prêché par <strong>de</strong>s hommes commele père <strong>de</strong> Foucauld et qui a élevé jusqu'à notre niveau unpeuple qui s'était donné <strong>de</strong> toute <strong>la</strong> générosité <strong>de</strong> sa race.La vraie politique à mener au Moghreb doit s'appuyer sur nosanciens militaires musulmans dont nous <strong>de</strong>vons faire <strong>de</strong>s êtresprivilégiés et <strong>de</strong>s propagateurs <strong>de</strong> <strong>la</strong> compréhension réciproque.(App<strong>la</strong>udissements à l'extrême droite et sur divers bancsà droite et à gauchc.)M. Marcel-Edmond Naegelen. Très bien!M. Joseph <strong>de</strong> Monsabert. Mais il faut pour ce<strong>la</strong> qu'ils restentdans l'orbite <strong>de</strong> leur ancien régiment. Un régiment indigènedoit être un foyer <strong>de</strong> rayonnement et <strong>de</strong> cordiale entente.J'ouvre ici une parenthèse pour poser une question au Gouvernement.A-t-on étendu aux militaires et anciens militaires tunisiens etmarocains les mesures financières prises il y a six ans à <strong>la</strong><strong>de</strong>man<strong>de</strong> instante <strong>de</strong> M. le gouverneur général Naegelen pournos Algériens ?Un homme, un maréchal <strong>de</strong> France, qui était un grand africain,le maréchal Franchet d'Esperey a voulu mettre cette idéedans les faits, par l'organisation <strong>de</strong>s « Amitiés africaines » dontil vou<strong>la</strong>it faire l'arche d'alliance franco-musumane.Cette œuvre est à poursuivre et à développer. Au <strong>de</strong>là <strong>de</strong>l'œuvre, nécessaire bien entendu, <strong>de</strong>s diar el Askri, il nousfaut créer <strong>de</strong>s cités, <strong>de</strong>s vil<strong>la</strong>ges, <strong>de</strong>s industries et, par <strong>la</strong>conjonction <strong>de</strong>s élites, faire triompher, enfin l'accord <strong>de</strong>sesprits et l'entente <strong>de</strong>s cœurs. (App<strong>la</strong>udissements à l'extrêmedroite, à droite et à gauche.)M. le prési<strong>de</strong>nt. La parole est à M. Conte. (App<strong>la</strong>udissementssur divers bancs.)M. Arthur Conte. Monsieur le prési<strong>de</strong>nt du conseil, mesdames,messieurs, les radios <strong>de</strong> plusieurs Etats étrangers ont joué,durant ces <strong>de</strong>rnières années, dans les événements <strong>de</strong> Tunisie etdu Maroc, un rôle considérable et trop souvent dédaigné, notamment<strong>la</strong> radio du Caire et <strong>la</strong> radio du gouvernement <strong>de</strong> Madrid.Jusqu'à présent, aucun effort sérieux n'a été entrepris contreleur action: leur influence est, <strong>de</strong> c? fait, <strong>de</strong>venue <strong>de</strong> plus enplus profon<strong>de</strong> et dangereuse et il est temps <strong>de</strong> s'en préoccuper.A l'origine, on ne voulut que mépriser ces voix qui, sur unton excessif, maniaient trop brutalement et sans pu<strong>de</strong>ur unfanatisme démesuré et utilisaient les procédés les plus vils <strong>de</strong><strong>la</strong> diffamation.Sans doute pensait-on qu'elles se décourageraient rapi<strong>de</strong>mentface au roc <strong>de</strong> l'amitié franco-musulmane qui venait d'êlreadmirablement illustrée par l'émouvante fidélité <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux protectoratsà <strong>la</strong> France, durant <strong>la</strong> longue épreuve <strong>de</strong> <strong>la</strong> guerre.Sans doute pensait-on aussi qu'il y avait, <strong>de</strong> Rabat à Bizerte,<strong>de</strong> Sfax à Tiznit, assez <strong>de</strong> routes, <strong>de</strong> ponts et <strong>de</strong> barrages construitspar nos ingénieurs, assez d'écoles et <strong>de</strong> facultés animéespar nos maîtres, assez d'hôpitaux imaginés par notre humanitépour répliquer à <strong>la</strong> haine et au mensonge sans qu'il fût besoin<strong>de</strong> parler ou <strong>de</strong> combattre.M. Pierre Montel. Très bien !M. Arthur Conte. Mais les voix excessives s'obstinèrent.Elles eurent bientôt beau jeu <strong>de</strong> passionner et d'envenimerles querelles et les malentendus survenus entre les gouvernementsprotecteurs et les peuples protégés, d'exploiter à fondtoutes les- raisons <strong>de</strong> discor<strong>de</strong> éc<strong>la</strong>tant entre les élites localesavi<strong>de</strong>s d'autonomie ét <strong>de</strong>s gouvernements qui, incapables <strong>de</strong>définir et <strong>de</strong> choisir une politique, ne pensaient qu'à reculerles échéances.M. Marcel-Edmond Naegelen. Très bien !M. Arthur Conte. En s'obstinant à ne pas accor<strong>de</strong>r les réformesnécessaires et inéluctables, en jouant <strong>la</strong> comédie <strong>de</strong> promessesque l'on fait et que l'on ne tient pas, vos prédécesseursimmédiats, monsieur le prési<strong>de</strong>nt du conseil, ont profondémentdécouragé <strong>de</strong>s milliers d'amis sincères...M. Marcel-Edmond Naegelen. Très bien!M. Arthur Conte. ...et n'ont fait que les inciter à écouteravec plus <strong>de</strong> comp<strong>la</strong>isance les menteurs et les diffamateurs <strong>de</strong>sradios étrangères. (App<strong>la</strong>udissements à gauche.)Depuis quelques mois, <strong>la</strong> radio du Caire et Radio-Ceutan'hésitent même plus à appeler Tunisiens et Marocains à <strong>la</strong>révolte ouverte, exhortent au terrorisme, excitent à l'assassinat.Elles savent qu'elles s'adressent à un auditoire déjà for-

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