On pourrait concevoir des systèmes à étalon de métal, de papier ou de <strong>monnaie</strong>scriptura<strong>le</strong>. Mais cette dernière ne pourrait servir d’étalon <strong>que</strong> si tous <strong>le</strong>s habitants d’un paysavai<strong>en</strong>t <strong>le</strong>ur compte <strong>en</strong> ban<strong>que</strong> (comptabilisme) ; c’est <strong>en</strong>core à l’heure actuel<strong>le</strong> une utopie.Dans <strong>le</strong>s systèmes à étalon métalli<strong>que</strong>, l’unité monétaire est définie par un poids de métalfin. <strong>Ce</strong> métal jouit de la liberté de frappe, autrem<strong>en</strong>t dit la ban<strong>que</strong> c<strong>en</strong>tra<strong>le</strong> l’achète et <strong>le</strong>v<strong>en</strong>d <strong>en</strong> quantité <strong>que</strong>lcon<strong>que</strong>s à un prix fixe. L’État, après avoir choisi ce prix quicorrespond à la définition de l’unité, demeure passif. Il se borne à donner cours légal, c’està-direpouvoir libératoire illimité aux pièces frappées avec <strong>le</strong> métal étalon. Les bil<strong>le</strong>ts deban<strong>que</strong> sont convertib<strong>le</strong>s <strong>en</strong> métal, ce qui suppose une couverture. En outre, <strong>le</strong> droit defondre de tel<strong>le</strong>s pièces et celui d’exporter ou d’importer <strong>le</strong> métal sont assurés. <strong>La</strong> libertérégnant ainsi dans une large mesure permet <strong>le</strong> jeu de <strong>tout</strong>e une série d’automatismes <strong>que</strong>nous aurons à <strong>en</strong>visager.Il y a monométallisme quand <strong>le</strong> métal précieux choisi pour étalon est uni<strong>que</strong>,bimétallisme quand l’or et l’arg<strong>en</strong>t sont tous deux étalons et reliés <strong>en</strong>tre eux par un rapportfixe, étalons parallè<strong>le</strong>s lors<strong>que</strong>, dans <strong>le</strong>s mêmes conditions, ce rapport n’existe pas.Enfin, <strong>le</strong> système d’étalon de papier comporte la déclaration du cours forcé du bil<strong>le</strong>t deban<strong>que</strong>. Le bil<strong>le</strong>t est généra<strong>le</strong>m<strong>en</strong>t uni<strong>que</strong>, mais plusieurs papiers peuv<strong>en</strong>t servir d’étalonsavec ou sans rapport fixe <strong>en</strong>tre eux. <strong>La</strong> multiplicité des papiers ne se r<strong>en</strong>contre à l’épo<strong>que</strong>contemporaine <strong>que</strong> dans des régimes de transition ; el<strong>le</strong> donne lieu à de grandes difficultéset à d’incessantes spéculations. Tel a été <strong>le</strong> cas <strong>en</strong> Alsace Lorraine au <strong>le</strong>ndemain del’armistice de 1918 45 .Nous comm<strong>en</strong>cerons notre étude par <strong>le</strong> monométallisme-or <strong>que</strong> <strong>tout</strong>es <strong>le</strong>s grandesnations cherchai<strong>en</strong>t à adopter avant la guerre. Le <strong>monde</strong> t<strong>en</strong>dait ainsi vers un régimeuniforme favorab<strong>le</strong> aux relations internationa<strong>le</strong>s dont on ne saurait trop déplorer l’abandon.Du point de vue intérieur, la convertibilité des bil<strong>le</strong>ts <strong>en</strong> or était assurée à la ban<strong>que</strong>c<strong>en</strong>tra<strong>le</strong> par une rég<strong>le</strong>m<strong>en</strong>tation étroite de la couverture.Trois procédés principaux étai<strong>en</strong>t employés avant 1914 : <strong>le</strong> premier, simpliste et brutal,consistait à obliger l’établissem<strong>en</strong>t émetteur à conserver dans ses caisses une quantité demétal éga<strong>le</strong>, à peu de chose près, au montant des bil<strong>le</strong>ts émis ; il supprimait <strong>tout</strong>e élasticitéet était adopté par l’Ang<strong>le</strong>terre pour des motifs qui lui étai<strong>en</strong>t propres : la position dumarché de Londres, c<strong>en</strong>tre monétaire et financier international, obligeait <strong>le</strong>s dirigeants de laCité à une grande prud<strong>en</strong>ce. <strong>La</strong> Grande-Bretagne était alors à l’étalon d’or et <strong>tout</strong>e traite <strong>en</strong>livres sterling valait de l’or. Tout était sacrifié à la sécurité. En fait, l’élasticité nécessaire aété assurée indirectem<strong>en</strong>t grâce à l’emploi du chè<strong>que</strong>, <strong>en</strong> sorte <strong>que</strong> <strong>le</strong> volume monétairepouvait varier d’une manière-considérab<strong>le</strong> sous forme de <strong>monnaie</strong> scriptura<strong>le</strong> sans affecter<strong>le</strong> montant des émissions de papier.<strong>La</strong> deuxième formu<strong>le</strong>, admise <strong>en</strong> France, était empiri<strong>que</strong> : la loi fixait un chiffremaximum d’émission ou plafond, arbitraire, déplacé par <strong>le</strong> législateur lui-même cha<strong>que</strong> fois<strong>que</strong> <strong>le</strong>s circonstances l’exigeai<strong>en</strong>t : sorte de garde-fou mobi<strong>le</strong>, incapab<strong>le</strong> d’empêcher <strong>le</strong>sfolies.Le troisième système, plus logi<strong>que</strong> <strong>que</strong> <strong>le</strong>s précéd<strong>en</strong>ts, était mis <strong>en</strong> œuvre parl’Al<strong>le</strong>magne et t<strong>en</strong>dait à être adopté par la plupart des autres États. <strong>La</strong> circulation devait êtrecouverte pour un tiers par de l’or, <strong>le</strong>s deux autres tiers étant gagés par des effets decommerce, mais cette limite pouvait être dépassée par la ban<strong>que</strong> d’émission à la conditionde payer un impôt sur la partie excéd<strong>en</strong>taire.45 On trouvera une énumération des systèmes monétaires possib<strong>le</strong>s dans John Williams, The Adequacy ofExisting Curr<strong>en</strong>cy Mechanisms under varying Circumstances, American Economic Review, mars 1937,supplém<strong>en</strong>t, p. 151.
Les trois grandes puissances de l’Europe occid<strong>en</strong>ta<strong>le</strong> ont de la sorte apporté chacune auproblème de la couverture une solution conforme à son caractère national : rigide <strong>en</strong>Ang<strong>le</strong>terre, soup<strong>le</strong> <strong>en</strong> Al<strong>le</strong>magne, illusoire <strong>en</strong> France, destinée dans <strong>le</strong> premier de ces pays àformer une armature solide assouplie par la prati<strong>que</strong>, dans <strong>le</strong> deuxième à permettre un élanindustriel considérab<strong>le</strong> <strong>tout</strong> <strong>en</strong> évitant des abus trop criants, dans <strong>le</strong> troisième à respecter <strong>le</strong>sappar<strong>en</strong>ces <strong>tout</strong> <strong>en</strong> laissant p<strong>le</strong>ine liberté à un <strong>Institut</strong> qui a fait ses preuves et qui vaut par<strong>le</strong>s qualités personnel<strong>le</strong>s de ses chefs plus <strong>que</strong> par l’excel<strong>le</strong>nce de la rég<strong>le</strong>m<strong>en</strong>tation.Théori<strong>que</strong>m<strong>en</strong>t, la couverture sert de garantie contre des excès d’émission, mais el<strong>le</strong>nécessite des masses considérab<strong>le</strong>s de métal. Au temps où l’on a craint une disette d’or, deséconomies ont été préconisées de ce chef. <strong>La</strong> délégation de l’or du Conseil financier de laSociété des. Nations, <strong>en</strong> 1930, et la confér<strong>en</strong>ce économi<strong>que</strong> mondia<strong>le</strong> de Londres, <strong>en</strong>l933,ont recommandé la réduction des couvertures. Recommandation dangereuse : la garantieallant <strong>en</strong> s’am<strong>en</strong>uisant, <strong>le</strong> métal finit par disparaître et <strong>le</strong> régime du papier-<strong>monnaie</strong> pars’instal<strong>le</strong>r. <strong>La</strong> superstructure monétaire à la<strong>que</strong>l<strong>le</strong> nous avons fait allusion devi<strong>en</strong>t de plus<strong>en</strong> plus instab<strong>le</strong>.Prati<strong>que</strong>m<strong>en</strong>t une diminution léga<strong>le</strong> de la couverture n’a aucune importance pour <strong>le</strong>sban<strong>que</strong>s puissantes dont l’<strong>en</strong>caisse est maint<strong>en</strong>ue au chiffre <strong>que</strong> <strong>le</strong>s dirigeants jug<strong>en</strong>tconv<strong>en</strong>ab<strong>le</strong>, indép<strong>en</strong>damm<strong>en</strong>t des indications fournies par <strong>le</strong>s textes, mais el<strong>le</strong> peut-être trèsgrave pour <strong>le</strong>s instituts des petites nations. <strong>La</strong> couverture est un bouclier <strong>que</strong> <strong>le</strong>s chefs deces établissem<strong>en</strong>ts peuv<strong>en</strong>t opposer aux hommes politi<strong>que</strong>s désireux d’obt<strong>en</strong>ir des créditspour <strong>le</strong>urs é<strong>le</strong>cteurs. Successivem<strong>en</strong>t <strong>le</strong> Gouvernem<strong>en</strong>t roumain après 1918 a contraint laban<strong>que</strong> d’émission à s’intéresser à de grandes industries, lorsqu’il était aux mains deslibéraux, et à cons<strong>en</strong>tir des avances sur <strong>le</strong>s blés, lorsqu’il est dev<strong>en</strong>u national-paysan. Unelégislation fixant un pourc<strong>en</strong>tage conv<strong>en</strong>ab<strong>le</strong> d’<strong>en</strong>caisse est susceptib<strong>le</strong> d’offrir un moy<strong>en</strong>de résistance à ces pressions intéressées 46 .Le problème de la couverture continue à se poser, d’ail<strong>le</strong>urs, sous <strong>le</strong>s régimes actuels <strong>que</strong>nous aurons à définir ultérieurem<strong>en</strong>t. En raison de l’ext<strong>en</strong>sion de la <strong>monnaie</strong> scriptura<strong>le</strong>, ils’appli<strong>que</strong> au rapport <strong>en</strong>tre la réserve métalli<strong>que</strong> et <strong>le</strong> montant total des bil<strong>le</strong>ts <strong>en</strong> circulationet des dépôts.D’autre part, il conserve son importance <strong>en</strong> ce qui concerne <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> de l’étalon d’or dans<strong>le</strong> domaine international. Le métal jaune ne circu<strong>le</strong> dans aucun pays, mais il demeurel’instrum<strong>en</strong>t d’échange <strong>en</strong>tre <strong>le</strong>s nations, la commune mesure et <strong>le</strong> réservoir des va<strong>le</strong>urs, et<strong>le</strong> système de l’étalon d’or permettait jadis, dans ce domaine, <strong>le</strong> jeu d’un automatisme mis<strong>en</strong> lumière par Ricardo 47 , lumière trop crue, pour-rait-on croire, car cet auteur abstrait etrigoureux a oublié <strong>le</strong>s nuances au point de fournir un schéma <strong>que</strong> ses adversaires n’ont pasmanqué d’opposer à la réalité comp<strong>le</strong>xe, fuyante et embrumée. Pourtant <strong>le</strong> schéma, dans sesgrandes lignes, était exact ; <strong>le</strong> voici :Supposons qu’un pays A, pour une raison <strong>que</strong>lcon<strong>que</strong>, exporte plus qu’il n’importe,<strong>tout</strong>es choses étant éga<strong>le</strong>s par ail<strong>le</strong>urs, sa balance sera excéd<strong>en</strong>taire ou active, il recevradonc des pays étrangers un solde <strong>en</strong> or. <strong>Ce</strong>tte <strong>monnaie</strong> affluant dans la circulation t<strong>en</strong>dra àfaire monter <strong>le</strong>s prix à l’intérieur <strong>en</strong> vertu d’une règ<strong>le</strong> dont nous aurons à apprécier <strong>le</strong> bi<strong>en</strong>fondédans un prochain chapitre, par consé<strong>que</strong>nt <strong>le</strong>s étrangers seront moins incités à acheterdans <strong>le</strong> pays A et, au contraire, <strong>le</strong>s habitants de ce pays chercheront à acheter à l’étranger.De même, <strong>le</strong>s v<strong>en</strong>deurs étrangers, attirés par la cherté, multiplieront <strong>le</strong>urs <strong>en</strong>vois dans <strong>le</strong>pays A, alors <strong>que</strong> <strong>le</strong>s producteurs nationaux perdront <strong>le</strong>urs débouchés à l’extérieur. Il <strong>en</strong>résultera pour <strong>le</strong> pays A une augm<strong>en</strong>tation des importations et une diminution des46 Voyez Ch. Rist, Travaux du congrès des économistes de langue française, Paris, 1935, p. 45, et <strong>La</strong><strong>que</strong>stion de l’or, Revue d’économie politi<strong>que</strong>, novembre 1930, p. 1516.47 Ricardo, célèbre économiste de l’éco<strong>le</strong> classi<strong>que</strong> anglaise, du début du XIX e sièc<strong>le</strong>.
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