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La monnaie. Ce que tout le monde devrait en savoir - Institut Coppet

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Chapitre VIII – L’or est toujours roiL’or est doub<strong>le</strong>m<strong>en</strong>t favorisé par la chance : non seu<strong>le</strong>m<strong>en</strong>t la nature ne lui a pas permisde se mê<strong>le</strong>r à la masse des métaux communs destructrice de <strong>tout</strong>e autonomie, mais <strong>en</strong>corel’histoire lui a été particulièrem<strong>en</strong>t favorab<strong>le</strong>. C’est par hasard <strong>que</strong> la loi de Gresham a joué<strong>en</strong> Ang<strong>le</strong>terre au XVIII e sièc<strong>le</strong> de manière à l’attirer dans ce pays et à l’y instal<strong>le</strong>r. Le faitest dev<strong>en</strong>u droit <strong>en</strong> 1816 et, à partir de cette date, <strong>le</strong> destin de l’or s’est trouvé lié à celui dela Grande-Bretagne. <strong>La</strong> domination du métal s’est ét<strong>en</strong>due <strong>en</strong> même temps <strong>que</strong> s’établissaitla suprématie commercia<strong>le</strong> et financière de l’Ang<strong>le</strong>terre.Mais il n’est pas sans péril pour un moy<strong>en</strong> d’échange qui aspire à garder un caractèreinternational de se fier à un peup<strong>le</strong> opportuniste <strong>en</strong> matière économi<strong>que</strong> et soucieux avant<strong>tout</strong> de sauvegarder ses intérêts nationaux. En 1931, l’Ang<strong>le</strong>terre a abandonné l’or etbeaucoup ont cru <strong>que</strong> c’<strong>en</strong> était fait de la souveraineté du métal jaune. Les théorici<strong>en</strong>sanglo-saxons ne manquèr<strong>en</strong>t pas d’accab<strong>le</strong>r alors <strong>le</strong> bon serviteur d’antan : « <strong>La</strong> véritab<strong>le</strong><strong>monnaie</strong> internationa<strong>le</strong>, dir<strong>en</strong>t-il, ce n’est pas l’or, c’est la livre sterling, puis<strong>que</strong> <strong>le</strong> pô<strong>le</strong>monétaire du <strong>monde</strong> est Londres. L’or ti<strong>en</strong>t sa va<strong>le</strong>ur de la livre et non la livre de l’or. Lefait histori<strong>que</strong> est dépassé. Nous ne sommes plus au temps de la <strong>monnaie</strong>-marchandise. <strong>La</strong>livre n’a pas besoin d’un support métalli<strong>que</strong>. <strong>La</strong>issons ce fétiche devant <strong>le</strong><strong>que</strong>l nous noussommes courbés trop longtemps. <strong>Ce</strong> <strong>que</strong> nous voulons, c’est une <strong>monnaie</strong> dirigée. Au lieud’être livrés aux caprices de la nature, nous serons soumis à la volonté d’hommesraisonnab<strong>le</strong>s qui mainti<strong>en</strong>dront la stabilité monétaire conformém<strong>en</strong>t aux intérêtsbritanni<strong>que</strong>s. »Ainsi s’exprimai<strong>en</strong>t M. Keynes et ses discip<strong>le</strong>s. Les Anglais allai<strong>en</strong>t s’émanciper <strong>en</strong>fin etpr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> main <strong>le</strong>s <strong>le</strong>viers de commande monétaires de l’économie mondia<strong>le</strong>. Un grandnombre de Français applaudissai<strong>en</strong>t à ces paro<strong>le</strong>s : « L’homme esclave de l’or », beauthème de discours pour faire p<strong>en</strong>dant à « l’homme esclave de la machine ».Donc l’or semblait détrôné. Les hommes d’État se s<strong>en</strong>tai<strong>en</strong>t flattés d’ouvrir une èr<strong>en</strong>ouvel<strong>le</strong>. Un hymne d’orgueil s’é<strong>le</strong>vait de <strong>tout</strong>es parts.Bi<strong>en</strong>tôt cep<strong>en</strong>dant on constata <strong>que</strong> plus <strong>le</strong>s Gouvernem<strong>en</strong>ts s’éloignai<strong>en</strong>t de l’or, plus <strong>le</strong>speup<strong>le</strong>s rev<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t à lui. Les iconoclastes n’étai<strong>en</strong>t pas suivis. Les pouvoirs publicsbritanni<strong>que</strong>s ayant, au <strong>le</strong>ndemain de l’abandon de l’or, rétabli l’équilibre budgétaire grâce àdes mesures orthodoxes fort louab<strong>le</strong>s, <strong>le</strong> métal condamné, fuyant l’Europe troublée, a affluésur la place de Londres, là même où sa puissance avait été mise <strong>en</strong> échec. Les Anglais ontbi<strong>en</strong> été contraints de cesser <strong>le</strong>urs atta<strong>que</strong>s contre un métal qui <strong>le</strong>ur était si fidè<strong>le</strong>m<strong>en</strong>tattaché.N’est-ce point là une nouvel<strong>le</strong> et éclatante preuve de l’impuissance de l’État et de laforce de la tradition ? L’or ne doit pas son prestige à la loi. Au contraire, lors<strong>que</strong> <strong>le</strong>spouvoirs publics <strong>le</strong> rejett<strong>en</strong>t, adopt<strong>en</strong>t <strong>le</strong> papier-<strong>monnaie</strong> pour étalon et clam<strong>en</strong>t <strong>le</strong>ur méprisdes vieil<strong>le</strong>s ido<strong>le</strong>s, <strong>le</strong>s épargnants s’inquièt<strong>en</strong>t, thésauris<strong>en</strong>t ou export<strong>en</strong>t l’or. On l’a vu <strong>en</strong>France p<strong>en</strong>dant <strong>le</strong>s années qui ont précédé 1939. Dès <strong>que</strong> <strong>le</strong>ur épargne est <strong>en</strong> jeu, <strong>le</strong>sindividus <strong>le</strong>s plus révolutionnaires devi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t traditionalistes et timorés. Ri<strong>en</strong>.de pluslégitime : ils ne livr<strong>en</strong>t pas de gaieté de cœur <strong>le</strong> fruit de <strong>le</strong>ur travail et de <strong>le</strong>urs sacrifices àdes dirigeants qui non seu<strong>le</strong>m<strong>en</strong>t ne <strong>le</strong>ur manifesteront pas la moindre reconnaissance, mais<strong>en</strong>core continueront de <strong>le</strong>s regarder comme des exploiteurs. L’or, c’est la nature et <strong>le</strong> passé ;<strong>le</strong> papier, c’est la volonté d’un gouvernem<strong>en</strong>t. Si nous examinons <strong>le</strong>s deux termes de cettealternative, nous serons obligés de conclure <strong>que</strong> l’hésitation n’est pas possib<strong>le</strong>.

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