Revue 16 - Institut Alcor

L’humanité à la croisée des cheminsIII ème PARTIE - Agir pour demain[Martine Pottier / martinepottier78@gmail.com]LA VOIEPAR EDGAR MORIN 1Un livre porteur d’espoir« Changer de voie », telle est l’introduction d’Edgar Morin pour cet ouvragequi marque le début de l’année 2011. Après avoir longtemps réfléchilors de ses précédents écrits sur la difficulté à aborder la pensée complexe,l’auteur nous invite ici à une recherche appliquée où l’objet complexe àétudier est notre propre mode de vie, approche d’autant plus difficile quenous avons dans le même temps, le nez dans le guidon.Un constat :le progrès n’estpas la panacée1A force d’analyser, toujours plusprofondément dans une démarcherationnelle, la pensée humaine occidentalecompartimente les savoirs etdésintègre les problèmes fondamentauxet globaux de la vie, lesquels nécessitentune connaissance transdisciplinaire.L’occidentalo-centrisme quinous juche sur le trône de la rationaliténous donne l’illusion de posséderl’univers. Ainsi la période actuelle voitl’homo sapiens-sapiens confronté àune crise du savoir, en même tempsqu’une crise profonde de positionnement,lui qui croit avoir la maîtrise surtout. Dans le même temps, le progrèsn’est pas porteur des révolutions espéréeset ce vecteur de la constructiondu monde technologique des dernièresdécennies montre ses limites, sourcesde déconvenues profondes.Le rapport à l’espace géographiqueest également en recomposition : auxpremières circumnavigations qui ontpermis la découverte de la planète ontsuccédé la construction des nationscontemporaines et leurs rapports dedomination/soumission actuellementen pleine recomposition. La globalitédu x x e siècle a cédé le pas à un mondemulti-polaire qui gère ses propres1 La Voie, Edgar Morin Ed Fayard - 2011P. 42 - Le Son Bleu - N° 16 - Décembre 2011La régénération de la vie politiqueest donc un préalable à tout autrechangement, dans une navigation encrises.Dans ce contexte en mutation,les appétits de développement individuelset collectifs s’expriment à traversla soif de l’acquisition et de la possessionde bien matériels et de richessesarrachés à la nature. La notion de biencommun a perdu son sens au profit dela propriété privée défendue à forcede compétition. D’où les famines, lespauvretés, l’injustice, les guerres, lepéril nucléaire, ou encore la dégradationde la biosphère. « Ainsi la globalisation,l’occidentalisation, le développement,sont les trois aliments dela même dynamique qui produit unepluralité de crises interdépendantes,enchevêtrées, dont la crise cognitive,les crises politiques, les crises économiques,les crises sociales qui elles-mêmesproduisent la crise de la globalisation,celle de l’occidentalisation, celle dudéveloppement. La gigantesque criseplanétaire est celle de l’humanité quin’arrive pas à accéder à l’humanité »(p27).Les constats établis par Morin rejoignentceux que font à différentstitres, bien des auteurs. Ce qui fait laspécificité du sociologue, c’est le lienqu’il établit avec la démarche épistémologique,la façon de penser leschoses académiquement aujourd’hui,trouvant dans le mode de pensée occidental,une des causes principales desmaux de l’humanité. Donc, si le faitde penser ce que nous pensons nousrend collectivement malades au pointoù nous en sommes, sans doute nousfaut-il orienter autrement notre dé-marche de pensée. C’est à cet endroitque se situe la liberté de l’humanité etson libre-arbitre, avec des enjeux telsque l’humanité n’en a jamais connus :vers le pire ou vers le meilleur.Le changement :vers uneMétamorphoseCependant, au moment où nousfaisons nos tristes constats, remarqueMorin, il existe un bouillonnementcréatif, comme il y en eut un à la Renaissance.Les préliminaires qui se fontjour s’organisent autour de paradoxes :Mondialisation / démondialisation,croissance / décroissance, développement/ enveloppement, conservation /transformation ; il faut à la fois mondialiseret démondialiser, croître etdécroître, développer et envelopper,conserver et transformer. La Métamorphosedu monde est à ce prix.La Métamorphose du monde commencepar une métamorphose desrapports entre les personnes. Il s’agitlà du « vivre ensemble » que régule lavie politique.La politique