Livret secondaire (histoire) - Siaap, la cité de l'eau et de l ...
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Le temps des hygiénistesLa naissance de l’hygiénisme est sans aucun doute liée à l’apparition de la chimie moderneet aux travaux révolutionnaires de Lavoisier, qui introduit toute une conception nouvelle desdiverses transformations de la matière, comme la combustion ou la rouille.L’hygiénisme, système de pensée pour l’étude et l’actionL’hygiénisme tient sa base d’une attention portée au sol, à l’air ou plus généralement au milieuet à ces effets sur les personnes. L’évaluation de la “santé des populations considérées enmasse” amène alors à placer la ville, siège des épidémies, au cœur des réflexions. L’hygiénismese développe ainsi comme une police qui défend le peuple contre les épidémies en dépassantle champ de la médecine. Il s’agit de développer une forme urbaine compatible avec la santéde la population et d’utiliser pour cela tous les leviers disponibles.L’hygiénisme, en assimilant de façon délibérée le corps humain et le corps social, en vient àinvoquer dans le même temps la lutte contre les miasmes et autres “souillures” et la lutte contreles “impuretés sociales”, mendicité ou prostitution condamnées par une morale très influente.Ancêtre de l’hygiène publique, l’hygiénisme se caractérise par un certain extrémisme sécuritairevoué au bien-être.Les hygiénistes du XIX e siècleLes hygiénistes, qui œuvrent pour une hygiène publique, évoluent dans des disciplines allant dela médecine et la pharmacie au génie civil ou l’administration publique. Au XIX e siècle, ils vonts’engager dans une croisade pour l’assainissement des villes aux populations grandissantes,intégrant au passage la révolution pasteurienne. Avec la certitude qu’en supprimant la cause d’unmal, on en supprime les effets (contrairement à la médecine classique qui traite les symptômes),les hygiénistes vont enfermer les déchets dans les poubelles, évacuer les eaux usées en sous-solou encore organiser des campagnes de vaccination.B. Les premiers pas de l’assainissement1/ Les latrinesLes latrines se multiplient de manière notable à partir à la Renaissance. Dès le début du XVI e siècle,Louis XII oblige les propriétaires à avoir des latrines dans leurs maisons. Puis, après la terribleépidémie de peste de 1530, François I er impose la mise en place de fosses d’aisance sous lesimmeubles. Mais cela occasionne deux difficultés : la contamination des nappes phréatiques etdes puits d’une part, et la vidange d’autre part. Afin de réduire les terribles nuisances, les vidangessont interdites durant l’été. La corporation des maîtres Fy-Fy (ou fifi) a pour tâche de vider ces fosseset de transporter leur contenu vers les fossés d’enceinte. On nomme voiries les lieux de dépôtdes ordures ramassées dans les rues et des matières fécales issues des fosses d’aisance. Mais lesvidangeurs ne respectent pas toujours les lieux prévus et déversent leurs chargements n’importeoù dans la ville. En 1678, les voiries sont classées en deux catégories : celle des boues et celle desmatières fécales. Dans les voiries de la seconde catégorie, on expérimente et commercialise lafabrication d’engrais à partir d’excréments (notamment la poudrette).32histoire, arts et littérature / COLLÈGE et lycée
L’avancée que représentent ces fosses d’aisance n’estpas perçue par les classes aisées qui les délaissent. Lesgentilshommes continuent plus volontiers d’utiliser un vaseou une chaise percée, dont ils sont les uniques usagers.Leur contenu continue d’être jeté dans la rue. Finalement,les Parisiens ne cessent pas de déféquer et d’uriner dansla rue (figure 24), et la nuit venue, le contenu des pots dechambre est jeté par les fenêtres… Les jardins des Tuileries,par exemple, se transforment en cloaque à ciel ouvert.Paris ne connaît pas l’assainissement, même Versailles nepossède pas de latrines. Le Nôtre a-t-il sciemment intégrédes haies épaisses dans les jardins pour dissimuler cespectacle ? On note que les grands du royaume ont lesmêmes comportements que les classes populaires.© Musée Carnavalet / Roger-ViolletFigure 24 : À beau cacherGravure de Louis-Marin Bonnet (1743-1793). Paris, Musée Carnavalet.2/ Les égoutsJusqu’à la fin de la Renaissance, le système d’égout ne se développe pas. Sous Henri II, des ouvrierschargés d’établir le plan des égouts sont contraints de renoncer devant l’occlusion des canalisations.Quelques égouts sont construits durant le XVII e siècle. Obstrués par des boues épaisses etencombrés d’immondices, ils empestent le voisinage. Sur la rive gauche, les eaux usées sontcanalisées et jetées dans la rivière de la Bièvre qui joue ainsi le rôle d’égout. Le règne de Louis XIVest marqué par la mise en place du grand égout de ceinture. À la fin de son règne en 1715, leségouts parisiens mesurent 26 km. Le réseau ne cesse de s’étendre, mais toutes les eaux usées sejettent en Seine, en plein Paris, où est puisée l’eau consommée…Les quelques égouts qui parcourent la capitale souffrent d’engorgements dus en particulier aux tropfaibles quantités d’eau y circulant. En 1670, un curage du réseau d’égouts est décidé sous l’impulsionde Colbert. Des galériens sont alors envoyés dans les conduits. L’opération sera abandonnée aprèsl’évasion et la mort de nombreux prisonniers.Au XVIII e siècle, le prévôt des marchands de Paris, Étienne Turgot, mène une grande opération afinde décongestionner le “grand égout” installé dans le lit du ru de Ménilmontant. Turgot prend encharge la réfection du grand égout de ceinture. À sa tête, un réservoir permet de lâcher de grandesquantités d’eau, des “chasses” pour nettoyer l’égout qui reste à ciel ouvert. Cet ouvrage est citédans l’Encyclopédie de Diderot, dans laquelle il est souligné que bien qu’ “estimable et très utile”,sa pente n’est pas “tout-à-fait” suffisante. La ville autorise les riverains en 1760 à couvrir le grandégout qui verra son système de chasse détruit, empêchant tout lavage du conduit couvert.33histoire, arts et littérature / COLLÈGE et lycée
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Le temps <strong>de</strong>s hygiénistesLa naissance <strong>de</strong> l’hygiénisme est sans aucun doute liée à l’apparition <strong>de</strong> <strong>la</strong> chimie mo<strong>de</strong>rne<strong>et</strong> aux travaux révolutionnaires <strong>de</strong> Lavoisier, qui introduit toute une conception nouvelle <strong>de</strong>sdiverses transformations <strong>de</strong> <strong>la</strong> matière, comme <strong>la</strong> combustion ou <strong>la</strong> rouille.L’hygiénisme, système <strong>de</strong> pensée pour l’étu<strong>de</strong> <strong>et</strong> l’actionL’hygiénisme tient sa base d’une attention portée au sol, à l’air ou plus généralement au milieu<strong>et</strong> à ces eff<strong>et</strong>s sur les personnes. L’évaluation <strong>de</strong> <strong>la</strong> “santé <strong>de</strong>s popu<strong>la</strong>tions considérées enmasse” amène alors à p<strong>la</strong>cer <strong>la</strong> ville, siège <strong>de</strong>s épidémies, au cœur <strong>de</strong>s réflexions. L’hygiénismese développe ainsi comme une police qui défend le peuple contre les épidémies en dépassantle champ <strong>de</strong> <strong>la</strong> mé<strong>de</strong>cine. Il s’agit <strong>de</strong> développer une forme urbaine compatible avec <strong>la</strong> santé<strong>de</strong> <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion <strong>et</strong> d’utiliser pour ce<strong>la</strong> tous les leviers disponibles.L’hygiénisme, en assimi<strong>la</strong>nt <strong>de</strong> façon délibérée le corps humain <strong>et</strong> le corps social, en vient àinvoquer dans le même temps <strong>la</strong> lutte contre les miasmes <strong>et</strong> autres “souillures” <strong>et</strong> <strong>la</strong> lutte contreles “impur<strong>et</strong>és sociales”, mendicité ou prostitution condamnées par une morale très influente.Ancêtre <strong>de</strong> l’hygiène publique, l’hygiénisme se caractérise par un certain extrémisme sécuritairevoué au bien-être.Les hygiénistes du XIX e siècleLes hygiénistes, qui œuvrent pour une hygiène publique, évoluent dans <strong>de</strong>s disciplines al<strong>la</strong>nt <strong>de</strong><strong>la</strong> mé<strong>de</strong>cine <strong>et</strong> <strong>la</strong> pharmacie au génie civil ou l’administration publique. Au XIX e siècle, ils vonts’engager dans une croisa<strong>de</strong> pour l’assainissement <strong>de</strong>s villes aux popu<strong>la</strong>tions grandissantes,intégrant au passage <strong>la</strong> révolution pasteurienne. Avec <strong>la</strong> certitu<strong>de</strong> qu’en supprimant <strong>la</strong> cause d’unmal, on en supprime les eff<strong>et</strong>s (contrairement à <strong>la</strong> mé<strong>de</strong>cine c<strong>la</strong>ssique qui traite les symptômes),les hygiénistes vont enfermer les déch<strong>et</strong>s dans les poubelles, évacuer les eaux usées en sous-solou encore organiser <strong>de</strong>s campagnes <strong>de</strong> vaccination.B. Les premiers pas <strong>de</strong> l’assainissement1/ Les <strong>la</strong>trinesLes <strong>la</strong>trines se multiplient <strong>de</strong> manière notable à partir à <strong>la</strong> Renaissance. Dès le début du XVI e siècle,Louis XII oblige les propriétaires à avoir <strong>de</strong>s <strong>la</strong>trines dans leurs maisons. Puis, après <strong>la</strong> terribleépidémie <strong>de</strong> peste <strong>de</strong> 1530, François I er impose <strong>la</strong> mise en p<strong>la</strong>ce <strong>de</strong> fosses d’aisance sous lesimmeubles. Mais ce<strong>la</strong> occasionne <strong>de</strong>ux difficultés : <strong>la</strong> contamination <strong>de</strong>s nappes phréatiques <strong>et</strong><strong>de</strong>s puits d’une part, <strong>et</strong> <strong>la</strong> vidange d’autre part. Afin <strong>de</strong> réduire les terribles nuisances, les vidangessont interdites durant l’été. La corporation <strong>de</strong>s maîtres Fy-Fy (ou fifi) a pour tâche <strong>de</strong> vi<strong>de</strong>r ces fosses<strong>et</strong> <strong>de</strong> transporter leur contenu vers les fossés d’enceinte. On nomme voiries les lieux <strong>de</strong> dépôt<strong>de</strong>s ordures ramassées dans les rues <strong>et</strong> <strong>de</strong>s matières fécales issues <strong>de</strong>s fosses d’aisance. Mais lesvidangeurs ne respectent pas toujours les lieux prévus <strong>et</strong> déversent leurs chargements n’importeoù dans <strong>la</strong> ville. En 1678, les voiries sont c<strong>la</strong>ssées en <strong>de</strong>ux catégories : celle <strong>de</strong>s boues <strong>et</strong> celle <strong>de</strong>smatières fécales. Dans les voiries <strong>de</strong> <strong>la</strong> secon<strong>de</strong> catégorie, on expérimente <strong>et</strong> commercialise <strong>la</strong>fabrication d’engrais à partir d’excréments (notamment <strong>la</strong> poudr<strong>et</strong>te).32<strong>histoire</strong>, arts <strong>et</strong> littérature / COLLÈGE <strong>et</strong> lycée