UN DRAME ALGERIENDANS LA COMMUNE MIXTEDE LA SÉFIAA VILLARSVillars est un joli village situé à 12 kilomètres du cheflieu <strong>de</strong> lacommune mixte <strong>de</strong> la Séfia : Laverdure. Le centre est doté d'unegendarmerie. Situé en pleine région forestière et d'altitu<strong>de</strong>, il estassez isolé <strong>de</strong> Guel<strong>ma</strong>. Ce qui explique que le 10 <strong>ma</strong>i, au <strong>ma</strong>tin,les habitants français <strong>de</strong> Villars ignoraient tout du <strong>drame</strong> quivenait, <strong>de</strong>ux jours durant, d'ensanglanter la cité et la banlieueguelmoises.Ce n'est qu'à Laverdure, où il s'était rendu pour affaire <strong>de</strong>service, que l'adjoint spécial <strong>de</strong> Villars, M. Degoul, apprit, enconfi<strong>de</strong>nce, que la situation <strong>de</strong> la région inspirait <strong>de</strong>s inquiétu<strong>de</strong>s.Ce colon se hâta <strong>de</strong> rentrer chez lui. Il était, du reste, chef adjoint<strong>de</strong> la défense passive <strong>de</strong> son village. A son arrivée, un Européen,se rendant au <strong>ma</strong>rché du Ham<strong>ma</strong>m, lui dit qu'il avait dû faire <strong>de</strong>mitour<strong>de</strong>vant un rassemblement d'indigènes paraissant excités.M. Degoul se rendit à la gendarmerie et obtint qu'une194UN DRAME ALGERIENdistribution d'armes soit faite aux civils français <strong>de</strong> Villars.L'opération terminée, l'adjoint spécial, accompagné d'un ami,rejoignit sa ferme en auto. Les 3 km. 500 qu'il avait à franchir lefurent rapi<strong>de</strong>ment. Il était midi, Mme Degoul avait préparé ledéjeuner. On se mit à table.M. Degoul était plutôt rassuré. On était bien inquiet, dans lepays, à la suite <strong>de</strong> petits inci<strong>de</strong>nts qui paraissaient significatifs,<strong>ma</strong>is, d'un état d'insécurité auquel on était habitué, à déduire unemenace <strong>de</strong> révolte collective brusquée, il y avait une <strong>ma</strong>rge quisoutenait <strong>ma</strong>l la discussion. Il convenait surtout <strong>de</strong> se méfier <strong>de</strong>stendances à l'exagération.Le déjeuner était à peine commencé qu'un ouvrier indigène <strong>de</strong>la ferme se présenta et, en termes pressants, avertissait le colonqu'une <strong>ma</strong>sse <strong>de</strong> gens agités et armés s'avançait dans l'exploitationpour donner l'assaut aux bâtiments. M. Degoul envoyaimmédiatement chercher la femme et la bellemère <strong>de</strong> son gérantmobilisé, qui habitaient une ferme voisine à 500 mètres. Les <strong>de</strong>uxfemmes, Mme Degoul, ses <strong>de</strong>ux filles et un tout petitfils dont lepère était aux armées, l'ami <strong>de</strong> M. Degoul et ce <strong>de</strong>rnier se tassaientdans l'auto, tant bien que <strong>ma</strong>l. Comme la voiture dé<strong>ma</strong>rrait, on vitles émeutiers se rapprochant <strong>de</strong>s bâtiments.A un croisement <strong>de</strong> routes, un peu avant l'arrivée à Villars, les5 femmes, le bébé et les 2 hommes furent l'objet d'une fusilla<strong>de</strong>nourrie. L'auto reçut 2 balles,4 chevrotines allèrent se loger dans un pneu qui fat rapi<strong>de</strong>menthors d'usage. Malgré cela on put atteindre le village. Tous leshabitants du bourg et les colons qui avaient pu rejoindre s'étaientréfugiés à la gendarmerie. Femmes et enfants mis en sécurité, aumoins provisoire, on organisait la défense.Sous la conduite <strong>de</strong>s gendarmes, les Français se postèrent en<strong>de</strong>micercle, couvrant le réduit défensif.195
UN DRAME ALGERIENLes émeutiers arrivaient rapi<strong>de</strong>ment. Ils se groupaient entre 300et 500 mètres <strong>de</strong> là, attendant d'être en nombre pour donnerl'assaut. Les plus hardis commencèrent à tirer. Les Français étaientbien armés. Ils ripostèrent ; quelques assaillants tombèrent.Le téléphone n'étant pas coupé, la gendarmerie envoya un appelpour obtenir du renfort. Le nombre <strong>de</strong>s assaillants paraissaitatteindre le chiffre <strong>de</strong> 3.000 révoltés. La situation <strong>de</strong>venaitangoissante lorsque, vers 18 heures, on vit arriver un escadronblindé qui, se rendant à Guel<strong>ma</strong>, avait fait un crochet sur Villars.Le village était sauvé. Il y avait là, en effet, <strong>de</strong>ux 75 et d'autresvoitures avec mitrailleuses. Aux premiers obus, les émeutiersdisparurent. Ces éléments blindés arrivaient <strong>de</strong> Tunisie.La place étant nettoyée, les civils et les militaires partirent avecles voitures pour débloquer une ferme appartenant à M. Luzet etdont on était sans nouvelles.Lorsque M. Degoul put rejoindre sa ferme, accompagné d'unbrave gendarme, une partie <strong>de</strong>s émeutiers finissait <strong>de</strong> piller lesbâtiments. Entendant le bruit d'une auto, ils crurent avoir affaireavec les blindés militaires. Ils prirent la fuite. M. Degoul étaitinquiet sur le sort <strong>de</strong> 4 prisonniers italiens travaillant surl'exploitation. Ils étaient in<strong>de</strong>mnes grâce à la protection <strong>de</strong>quelques ouvriers <strong>de</strong> la ferme. Du reste, en général, les prisonniersitaliens ont été respectés : ils n'étaient pas français.Dans les logements et les <strong>ma</strong>gasins, tout avait été dévasté. Il nerestait plus rien. L'immeuble luimême était inhabitable. Lesécuries étaient vi<strong>de</strong>s. Mulets et chevaux, qui étaient au travail aumoment <strong>de</strong> l'insurrection, avaient été pris pour emporter le butin.Les émeutiers avaient menacé certains ouvriers pour avoirprévenu leurs patrons et leur avoir ainsi permis d'échapper au<strong>ma</strong>ssacre projeté.UN DRAME ALGERIENLa population <strong>de</strong> Villars passa huit jours à l'abri <strong>de</strong>s murs <strong>de</strong> lagendarmerie. Des visites irrégulières <strong>de</strong> voitures blindéesassuraient la liaison avec le <strong>de</strong>hors. Puis les colons ont réintégréleurs <strong>de</strong>meures.M. Degoul essaie <strong>de</strong> réparer sa ferme. Mais il ne peut seprocurer <strong>de</strong>s <strong>ma</strong>tériaux, en particulier <strong>de</strong>s planches. <strong>Un</strong>e partie <strong>de</strong>sa récolte en fourrages et céréales a été piétinée par les révoltés.Devant les réactions <strong>de</strong> la troupe, ses bêtes, relâchées par lesvoleurs, ont repris le chemin <strong>de</strong> l'exploitation.<strong>Un</strong>e certaine partie du linge et <strong>de</strong>s vêtements volés a étéapportée par le fils d'un <strong>ma</strong>rabout qui, avant le <strong>drame</strong>, distribuait àses coreligionnaires <strong>de</strong>s cartes d'adhérents aux Amis du Manifesteet cherche <strong>de</strong>puis à se réhabiliter. M. Degoul ayant refusé d'assisterà un repas offert par le <strong>ma</strong>rabout, les restitutions ont brusquementcessé. <strong>Un</strong> caïd, cependant, a rapporté quelques effets. Quand àl'argenterie, aux ustensiles <strong>de</strong> cuisine, ils ne sont pas revenus.Des enquêteurs passent dans le pays pour se renseigner. Ilscherchent les relations qu'il pourrait bien y avoir entre les émeuteset la politique <strong>de</strong> Vichy. Le plus fort, c'est que parfois, ils entrouvent...A Villars, comme partout, on fait l'éloge du souspréfet,M. Achiary, dont les efforts ont réussi à réduire au minimum lesconséquences <strong>de</strong> la révolte dans la région.196197
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