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Un drame algérien - Alger de ma jeunesse

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UN DRAME ALGERIENaccourus se hâtaient d'appliquer un pansement sur la blessure,heureusement peu grave.Et le duel, impitoyable et tragique, commença entre les quatreFrançais enfermés dans leur <strong>ma</strong>ison, en plein bled, et plusieurscentaines d'assaillants accourus <strong>de</strong> toutes parts et s'augmentantrapi<strong>de</strong>ment d'unités nouvelles. Il <strong>de</strong>vait durer sept heures,..Sept longues heures pendant lesquelles les assiégés <strong>de</strong>vaientsurveiller toutes les issues <strong>de</strong> l'immeuble qui les abritait, <strong>de</strong>vaientse déplacer <strong>de</strong> la tour au grenier et aux diverges pièces <strong>de</strong>l'appartement. Ils ne disposaient que <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux fusils, <strong>ma</strong>niés par lepère et le fils, qui tiraient à travers les persiennes, les volets oumême la porte d'entrée lorsqu'ils se sentaient trop pressés par leflot <strong>de</strong>s assaillants, que M. Dubois esti<strong>ma</strong>it à plus <strong>de</strong> millecombattants.On sut plus tard, que, rendus furieux par une résistance qu'ilsn'avaient pas prévue, les émeutiers avaient arrêté sur la route uncamion conduit par un indigène et lui avaient enjoint <strong>de</strong> revenir àGuel<strong>ma</strong> et <strong>de</strong> leur apporter <strong>de</strong> l'essence en quantité, à n'importequel prix, pour en finir par le feu avec la ferme Saint­Clau<strong>de</strong>.Or, le conducteur était un Français, revêtu d'un burnous etparlant l'arabe couramment. Il se hâta d'obéir et <strong>de</strong> rebrousserchemin.— Achète même à 1.000 francs le litre !... lui criaient lesrévoltés comme il dé<strong>ma</strong>rrait pour le retour.C'est ainsi que Guel<strong>ma</strong> fut averti du danger couru par les bravescolons et que le sous­préfet, M. Achiary, se hâta d'organiser lessecours.Par <strong>de</strong>ux fois, <strong>de</strong>s volontaires français quittèrent Guel<strong>ma</strong> pouratteindre la propriété assiégée. Ils durent rebrousser chemin enconstatant l'importance <strong>de</strong>s effectifs <strong>de</strong>s rebelles. La nuit gagnant,il ne fallait plus songer à une nouvelle expédition. Du reste, le190UN DRAME ALGERIENchef­lieu <strong>de</strong> l'arrondissement avait fort à faire pour parer à lasituation. Vers 19 heures, M. Dubois père, du grenier dominant lepremier étage, aperçoit un indigène inspectant les ouverturesdonnant sur la faça<strong>de</strong> nord <strong>de</strong> la ferme. C'était le côté faible <strong>de</strong>l'habitation. Et le danger <strong>de</strong>vait s'accentuer si une attaque seproduisait par là.Posément, le colon envoya quelques chevrotines sur l'audacieuxémissaire qui, atteint à la face, s'écroula pour ne plus se relever (1).La situation était momentanément sauvée.A partir <strong>de</strong> ce moment, les agresseurs s'éloignèrentprogressivement <strong>de</strong>s bâtiments. Ils se contentèrent <strong>de</strong> guetter <strong>de</strong>loin et les coups <strong>de</strong> feu cessèrent peu à peu.La nuit vint. On <strong>de</strong>vine les conditions dans lesquelles elle sepassa pour les assiégés, s'attendant à chaque instant à une surprise.Dans l'obscurité, cherchant à expliquer le moindre bruit venantdu <strong>de</strong>hors, chacun d'eux se <strong>de</strong><strong>ma</strong>ndait comment allait se terminerla sanglante odyssée. Allait­on en arriver au corps à corps ? Lepère allait­il voir supplicier <strong>de</strong>vant lui ses enfants, suprêmeexpression <strong>de</strong> son affection <strong>de</strong> vieillard ? Ces enfants pourraientilsdéfendre jusqu'au bout le chef vénéré pour lequel ils étaientprêts à tous les sacrifices ? Des scènes d'horreur, contées autrefoispar <strong>de</strong>s parents disparus, hantaient l'esprit <strong>de</strong>s quatre Françaislivrés aux hasards d'une lutte sans merci.Seuls les hurlements <strong>de</strong> chiens kabyles se faisaient entendre.Leur écho, proche ou lointain, perçait le silence inquiétants'étendant sur toute la campagne.La nuit fut cependant relativement calme, et le jour fat saluéavec joie par la famille toujours aux aguets.(1) Ou a su plus tard que l'émeutier, blessé seulement, avait pu rejoindre, <strong>de</strong> nuit, la route, oùune camionnette le transporta à Sedrata. Là il osa porter plainte, affirme­t­on, comme victime d'uneagression. Fouillé, il fut trouvé porteur du texte du <strong>ma</strong>nifeste.191

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