UN DRAME ALGERIENDANS LA COMMUNE DE PETITLe village <strong>de</strong> Petit (1) fut un cheflieu <strong>de</strong> canton <strong>de</strong>l'arrondissement <strong>de</strong> Guel<strong>ma</strong>. Il offre la <strong>de</strong>uxième gare du chemin<strong>de</strong> fer partant <strong>de</strong> cette ville en direction <strong>de</strong> Bône. Pour s'y installer,la colonisation a dû, d'abord, dénicher la brousse qui envahissait larégion, Elle y a trouvé <strong>de</strong> nombreux oléastres qui, dégagés <strong>de</strong> lavégétation qui les étouffait, forment aujourd'hui <strong>de</strong> bellesoliveraies, dont la production est réputée. Création française quiapporte aux populations autochtones <strong>de</strong>s revenus appréciables, parune exploitation dont on aura une idée lorsqu'on aura constaté quela seule cueillette <strong>de</strong>s olives est rétribuée par le partage <strong>de</strong> larécolte, soit 50 % pour le cueilleur, en beaucoup d'endroits.Petit et les fermes qui l'entourent <strong>de</strong>vaient, par leur proximité <strong>de</strong>(1) Le centre <strong>de</strong> Petit doit son nom à un soldat au courage légendaire : le colonel Petit, tombéhéroïquement à la prise <strong>de</strong> Zaateha. le 9 octobre 1849. Le centre est aujourd'hui rattaché au cantond'Héliopolis.182UN DRAME ALGERIENGuel<strong>ma</strong>, recevoir les vagues d'insurgés refoulées <strong>de</strong> cette ville.Le refoulement n'avait, sans aucun doute, pas été prévu par lesorganisateurs <strong>de</strong> l'émeute, l'envahissement <strong>de</strong> la banlieue <strong>de</strong>vantsuivre, simplement, la <strong>de</strong>struction <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong> agglomérationprincipale. La campagne ne <strong>de</strong>vait recevoir l'assaut qu'après la<strong>de</strong>struction <strong>de</strong> la ville. L'échec <strong>de</strong> la <strong>ma</strong>nifestation du 8 <strong>ma</strong>i, à 17heures, dérangea le plan prévu, <strong>ma</strong>is le reflux obligé, <strong>de</strong>vant larésistance organisée grâce à l'énergie du souspréfet, jeta un peu <strong>de</strong>confusion parmi les rebelles. Il en résulta un retard dans l'actionconcertée, le programme arrêté.Les contigents mobilisés dans la banlieue <strong>de</strong> Sédrata nerecevant pas le signal <strong>de</strong> la <strong>de</strong>struction <strong>de</strong> Guel<strong>ma</strong>, un certainflottement se produisit. La victoire totale, rapi<strong>de</strong> et facile,annoncée par les promoteurs ne s'étant pas produite, <strong>de</strong>smécontentements se <strong>ma</strong>nifestèrent. Les groupes arrivant à Guel<strong>ma</strong>dans la <strong>ma</strong>tinée du 9 et trouvant la ville calme, conclurent à latrahison et rebroussèrent chemin. C'est surtout à ces groupes, nousaton dit, qu'il faut attribuer les assassinats <strong>de</strong> Français isolésrencontrés en chemin. Quand ils étaient en nombre, ils n'hésitaientpas à attaquer les fermes avec violence et continuité.On lira plus loin le récit du siège soutenu par le colon Dubois etsa famille.Avant d'arriver à Bled Gaffar, qui fait partie <strong>de</strong> la commune <strong>de</strong>Petit, se trouve la ferme Poggi. Elle fut abordée par une hor<strong>de</strong>menaçante. Le gar<strong>de</strong> indigène sauva le gérant en se mettant entravers <strong>de</strong> la porte et déclarant qu'on le tuerait avant d'entrer dansla <strong>ma</strong>ison. Il finit par se faire obéir ; le flot passa.Plus loin, était la ferme Bezzina Dominique. C'est à coups <strong>de</strong>hache que les émeutiers attaquèrent l'immeuble. La porte était près<strong>de</strong> cé<strong>de</strong>r. Le colon, grâce aux trous formés par les éclats <strong>de</strong> boisarrachés, reconnut plusieurs <strong>de</strong> ses agresseurs. Il les interpellait,183
UN DRAME ALGERIENles appelant par leurs noms :— Je ne vous ai fait que du bien, que me voulezvous ?Il venait <strong>de</strong> faire fuir sa femme, ses enfants, un vieux grandpère,par le jardin, dans les fourrés voisins et cherchait à gagner dutemps. Il ne <strong>de</strong>vait pas tar<strong>de</strong>r à succomber. <strong>Un</strong> coup <strong>de</strong> hachel'abattit lorsque la porte détruite put livrer passage auxassassins (1).Sa famille dut passer la nuit dans le <strong>ma</strong>quis et ne fut délivréeque dans la journée du 10.Le 9 au soir, on ignorait tout du <strong>drame</strong> <strong>de</strong> Guel<strong>ma</strong>, à quelqueskilomètres <strong>de</strong> la ville.C'est ainsi que le fermier Gaucci Antoine se promenait envoiture avec un Italien, prisonnier <strong>de</strong> guerre qui lui avait étéconfié. Les indigènes racontent qu'un groupe s'est approché ducabriolet, disant à Gaucci : « Descends ! on va te tuer. » Il aprotesté, il n'avait fait <strong>de</strong> <strong>ma</strong>l à personne, les Arabes étaient sesamis, etc. Quelquesuns répondirent : « C'est vrai, tu peux t'enaller. »Mais un vieux intervint : « Le Coran a dit que tous ceux quiportent un chapeau doivent disparaître <strong>de</strong> la terre. C'est la loi duprophète ! » Et les <strong>de</strong>ux hommes furent tués. Gaucci était lelocataire du do<strong>ma</strong>ine du Zemzouna, sis à 2 kilomètres <strong>de</strong> Petit. Il aété abattu sur la propriété, avec son employé, à coups <strong>de</strong> feu. Leprisonnier <strong>de</strong> guerre fut presque scalpé par un coup <strong>de</strong> serpe quelui fendit le crâne horizontalement d'arrière en avant. Les <strong>de</strong>uxhommes étaient sans armes et, par suite, sans défense (2).(1) Deux <strong>de</strong>s assassins du.colon Bozzina ont été condamnés à mort par le tribunal militaire <strong>de</strong>Constantine. Ils se nomment Amira Salah et Fedaha A<strong>ma</strong>r (7 décembre 1945). Il n'y a pas eud'exécutions.(2) Le 21 septembre 1946, les assassins <strong>de</strong> M. Gaucci Antoine et du prisonnier Baali Paolo ontcomparu <strong>de</strong>vant le tribunal militaire : douze inculpés <strong>de</strong> pillage et <strong>de</strong> meurtre. On a enregistré unecondamnation à mort par contu<strong>ma</strong>ce, cinq acquittements et <strong>de</strong>s peines <strong>de</strong> prison. Le 5 octobresuivant, quatre prévenus ont été acquittés.184UN DRAME ALGERIENPuis ce fut Vella, qui venait d'être démobilisé et qui était enpromena<strong>de</strong> sur la route avec <strong>de</strong>ux jeunes filles. Vella futbrusquement assailli et tué à coups <strong>de</strong> fusil. Il eut le ventre ouvertlittéralement. Les jeunes femmes, affolées, prirent la fuite. Ellesfurent rattrapées et violées par une dizaine <strong>de</strong> bandits.Sa<strong>ma</strong>ti était coiffeur à <strong>Alger</strong>. Il était arrivé au village <strong>de</strong>puishuit ou dix jours. Il était allé au bord <strong>de</strong> la rivière pour pêcher. Ilfut abordé et tué à coups <strong>de</strong> boussaadi.A la ferme <strong>de</strong> M. Prunetti, à 10 kilomètres <strong>de</strong> Guel<strong>ma</strong>, setrouvaient les époux Winschel en qualité <strong>de</strong> métayers. Le 9 <strong>ma</strong>i,vers 15 heures, ils étaient agressés et tués. Le personnel indigèneétait attaché à la ferme <strong>de</strong>puis plusieurs années. Certains ouvriers<strong>de</strong>puis vingt ans. Aucun d'eux n'a prévenu les gérants ou lepropriétaire <strong>de</strong> la menace qui pesait sur la région. 5 prisonniersitaliens, à la première alerte, ont abandonné les métayers. Ils ontpris la fuite vers Guel<strong>ma</strong> Ils disent qu'ils ont été arrêtés puisrelâchés sur cette observation d'un chef qu'ils n'étaient pasfrançais (2).Au village <strong>de</strong> Petit, huit <strong>ma</strong>isons ont été complètementdévalisées. Elles furent facilement ouvertes. On recherchait surtoutles étoffes et le linge. Tout fut enlevé, même les ri<strong>de</strong>aux <strong>de</strong>sfenêtres. Quelques bris <strong>de</strong> meubles. Mais les bestiaux et les grainsn'ont pas été touchés.« J'ai l'impression, nous écrit un ami, à la suite <strong>de</strong>s confi<strong>de</strong>ncesqui m'ont été faites, que les biens et le cheptel ont été respectés à lasuite d'un mot d'ordre donné dans la conviction que cela serviraitaux successeurs <strong>de</strong>s Français, dès que ceuxci seraientdéfinitivement chassés. »(2) Le 4 septembre 1946, 1e Tribunal militaire avait à connaître <strong>de</strong> l'assassinat <strong>de</strong>s épouxWinschel. Sept accusés pour meurtre, un inculpé pour vol comparaissaient <strong>de</strong>vant ce Tribunal.L'affaire a été renvoyée, l'un <strong>de</strong>s inculpés ayant été arrêté la veille et l'instruction <strong>de</strong>vant êtrecomplétée.185
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