Un drame algérien - Alger de ma jeunesse
Un drame algérien - Alger de ma jeunesse Un drame algérien - Alger de ma jeunesse
UN DRAME ALGERIENLe 6 décembre 1945, on apprenait à Constantine que lesassassins du brigadier forestier Dupont et du garde Morellivenaient de comparaître devant le Tribunal militaire, grâce autémoignage d'un exploitant forestier indigène qui se trouvait avecles gardes au moment où ils furent, abattus à coups de fusils.L'arrestation des bandits fut opérée par la gendarmerie de FedjM'Zala, c'estàdire dans cette commune. Il en manquait trois, enfuite, qui ont été jugés par contumace. Ce sont les nommés MérichMBahmed, Mékilef et Kram Taieb. Ont été également condamnésà la peine de mort quatre des inculpés arrêtés : HabylèsAbdelmadjid, Djemaï Larbi, Teuma Mohamed et Hebache Khelifa.Deux autres accusés se sont vu infliger les travaux forcés àperpétuité. D'autres 20 à 5 ans de travaux forcés. Le tribunal aprononcé 5 acquittements.Au cours des débats il a été révélé que les effets d'habillementdes malheureuses victimes avaient été volés avec leurs armes. Lescadavres étaient nus...UN DRAME ALGERIENdes forestiers se serait augmenté de plusieurs unités.Ajoutons que le 11 mai, la troupe arrivée aux Béni Siar pourrétablir l'ordre a été reçue à coups de mitrailleuses par les insurgés.Il a fallu une opération de guerre pour avoir raison des révoltés.A TAMENDJAR M'CID ET BENI F''TAHOn verra plus loin, au chapitre ElMilia, que, prévenus à tempsdu danger qui les menaçait, trois gardes forestiers et leurs famillesont pu s'échapper, par miracle, de leur résidence, et gagner, àtravers la forêt, le centre d'ElHanser, où une résistance avait étéorganisée.AUX BENI SIARA 19 kilomètres de Djidjelli et 14 kilomètres de Taher, se trouvele douar des Béni Siar, dépendant de cette dernière communemixte (Taher). Le massif forestier des Béni Siar était confié à deuxgardes français habitant une maison forestière.Le 8 mai, ces gardes forestiers et leurs familles s'étaient rendusà Taher, pour participer aux réjouissances publiques et fêter lavictoire. Ils ne purent revenir, le lendemain, à leur domicile. Ilsapprenaient, en effet, que les Béni Siar s'étaient soulevés et avaientdétruit leur maison par le feu, après l'avoir pillée. Si lesmalheureux Français ne s'étaient pas absentés, le martyrologe154155
UN DRAME ALGERIENA ELMILIASituée, géographiquement, entre Djidjelli et Philippeville, ausudouest de Collo, la région d'ElMilia a ressenti, comme toutesles régions d'Algérie, le frisson collectif annonçant les gravesévénements de mai 1945.ElMilia est le siège d'une commune mixte, où la colonisation aété installée, il y a une trentaine d'années, et s'est manifestée, unpeu plus récemment, par la création de deux centres, Catinat etArago, en pleine brousse africaine.Les colons d'ElMilia ont été surtout des colons défricheurs. Ilspeuvent être fiers de l'œuvre qu'ils ont accomplie. Grâce à leurexemple, le génie français s'est affirmé sous son véritable caractère: tenace, patient, créateur. Mais le soleil d'Afrique fait fondre lesplus belles énergies, lorsque ces dernières ne sont pas épaulées parune autorité supérieure soucieuse de faire respecter l'ordre dansl'équité et la protection du travail. Les colons d'ElMilia s'en vont.Ils disparaissent au fur et à mesure que les garanties d'avenir sont156UN DRAME ALGERIENrefusées à leur labeur et à la sécurité de leurs enfants. Toutrécemment, l'un d'eux, habitant une ferme isolée, créée par lui,nous disait : « Je m'étais fixé un programme, dont je n'ai pas déviédepuis plusieurs années. Je défrichais, et je plantais tous les ans,150 oliviers ; j'arrête cet effort. A quoi bon continuer ? il nousfaudra partir demain. Vous aton dit que nous ne pouvons sortirqu'armés dans nos champs proches de nos fermes ? Que lorsquenous allons au marché du cheflieu de la commune, nousemmenons, par prudence, notre famille avec nous ? Nous voyonsprendre à l'autorité des mesures telles que nous devons nouspréparer à toutes les surprises. Nous ne sommes ni des héros, nides lâches. Mais nous ne voulons pas être des imprudents. Pensezvousque nous puissions accepter toujours une telle situation ?Nous garderons le plus longtemps possible les exploitations quenous avons créées, mais la patience humaine a une fin. Nouspartirons à notre tour. Nous doutons que l'on puisse nous trouverdes remplaçants qui accepteront de traverser les difficultésauxquelles nous avons eu à faire face, dans des régionsparticulièrement déshéritées. Et lorsque nos voisins indigènes, quenous défendions et protégions, à l'occasion, et qui n'ont reçu denous que des bienfaits, seront livrés, de nouveau, au libre jeu deleurs querelles intestines, la haute administration française pourraapprécier les résultats de l'œuvre accomplie par elle. Mais seratelleencore là pour en juger (1)? »De longues semaines avant le drame du 8 mai, on constatait àElMilia des organisations clandestines, qui tendaient ouvertementà prendre la place de l'autorité française dans le pays. Enparticulier une organisation judiciaire, renouvelant l'institution destribunaux berbères, fonctionnant en Kabylie, il y a quinze ans et(1) En octobre 1946, il ne restait plus qu'un colon habitant Arago.157
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UN DRAME ALGERIENLe 6 décembre 1945, on apprenait à Constantine que lesassassins du brigadier forestier Dupont et du gar<strong>de</strong> Morellivenaient <strong>de</strong> comparaître <strong>de</strong>vant le Tribunal militaire, grâce autémoignage d'un exploitant forestier indigène qui se trouvait avecles gar<strong>de</strong>s au moment où ils furent, abattus à coups <strong>de</strong> fusils.L'arrestation <strong>de</strong>s bandits fut opérée par la gendarmerie <strong>de</strong> FedjM'Zala, c'estàdire dans cette commune. Il en <strong>ma</strong>nquait trois, enfuite, qui ont été jugés par contu<strong>ma</strong>ce. Ce sont les nommés MérichMBahmed, Mékilef et Kram Taieb. Ont été également condamnésà la peine <strong>de</strong> mort quatre <strong>de</strong>s inculpés arrêtés : HabylèsAb<strong>de</strong>l<strong>ma</strong>djid, Dje<strong>ma</strong>ï Larbi, Teu<strong>ma</strong> Mohamed et Hebache Khelifa.Deux autres accusés se sont vu infliger les travaux forcés àperpétuité. D'autres 20 à 5 ans <strong>de</strong> travaux forcés. Le tribunal aprononcé 5 acquittements.Au cours <strong>de</strong>s débats il a été révélé que les effets d'habillement<strong>de</strong>s <strong>ma</strong>lheureuses victimes avaient été volés avec leurs armes. Lescadavres étaient nus...UN DRAME ALGERIEN<strong>de</strong>s forestiers se serait augmenté <strong>de</strong> plusieurs unités.Ajoutons que le 11 <strong>ma</strong>i, la troupe arrivée aux Béni Siar pourrétablir l'ordre a été reçue à coups <strong>de</strong> mitrailleuses par les insurgés.Il a fallu une opération <strong>de</strong> guerre pour avoir raison <strong>de</strong>s révoltés.A TAMENDJAR M'CID ET BENI F''TAHOn verra plus loin, au chapitre ElMilia, que, prévenus à tempsdu danger qui les menaçait, trois gar<strong>de</strong>s forestiers et leurs famillesont pu s'échapper, par miracle, <strong>de</strong> leur rési<strong>de</strong>nce, et gagner, àtravers la forêt, le centre d'ElHanser, où une résistance avait étéorganisée.AUX BENI SIARA 19 kilomètres <strong>de</strong> Djidjelli et 14 kilomètres <strong>de</strong> Taher, se trouvele douar <strong>de</strong>s Béni Siar, dépendant <strong>de</strong> cette <strong>de</strong>rnière communemixte (Taher). Le <strong>ma</strong>ssif forestier <strong>de</strong>s Béni Siar était confié à <strong>de</strong>uxgar<strong>de</strong>s français habitant une <strong>ma</strong>ison forestière.Le 8 <strong>ma</strong>i, ces gar<strong>de</strong>s forestiers et leurs familles s'étaient rendusà Taher, pour participer aux réjouissances publiques et fêter lavictoire. Ils ne purent revenir, le len<strong>de</strong><strong>ma</strong>in, à leur domicile. Ilsapprenaient, en effet, que les Béni Siar s'étaient soulevés et avaientdétruit leur <strong>ma</strong>ison par le feu, après l'avoir pillée. Si les<strong>ma</strong>lheureux Français ne s'étaient pas absentés, le <strong>ma</strong>rtyrologe154155