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Un drame algérien - Alger de ma jeunesse

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UN DRAME ALGERIENcontinuateurs. Ils ont parachevé, élargi, amplifié l'œuvrepaternelle. En <strong>ma</strong>i 1945, c'était un petit­fils, Abel, qui dirigeait laferme <strong>de</strong> Tamentout, créée il y a soixante­treize ans, préparant,avec sa nombreuse famille une quatrième génération <strong>de</strong> terriensfidèles et obstinément fixés au sol.La ferme est aujourd'hui munie du téléphone. <strong>Un</strong>e route d'unequarantaine <strong>de</strong> kilomètres la relie à Djidjelli, où se trouve le pèredu colon actuel, M. Jules Lochard.Abel Lochard, appelé par ses parents pour fêter la victoire <strong>de</strong>sAlliés, avait consenti à venir à la ville, avec toute sa famille, sansse douter que cette invitation <strong>de</strong>vait tout simplement lui sauver lavie, celle <strong>de</strong> sa femme et <strong>de</strong> ses enfants. L'existence est, souvent,faite <strong>de</strong> ces imprévisions. Le 9 <strong>ma</strong>i au <strong>ma</strong>tin, <strong>de</strong>scendant vers lacôte, l'auto Lochard rencontrait et saluait au passage les occupants<strong>de</strong> l'auto Coste qui allaient, à bonne allure, vers le guet­apens et le<strong>ma</strong>ssacre...L'arrivée à Djidjelli s'effectua sans encombre. Les colons <strong>de</strong>Tamentout assistèrent au défilé, avec bannières et étendardsinsurrectionnels, <strong>de</strong> 3.000 indigènes dans les rues <strong>de</strong> la ville.Lajournée se passa dans une joie, mêlée d'étonnement etd'inquiétu<strong>de</strong> latente.Le 10, au <strong>ma</strong>tin, <strong>de</strong>s bruits d'inci<strong>de</strong>nts graves survenus àTamentout, où se trouvait à quelques centaines <strong>de</strong> mètres <strong>de</strong> laferme une <strong>ma</strong>ison forestière, circulaient à mots couverts.Dans l'après­midi, MM. Boissin, administrateur principal,Subrini, administrateur adjoint, Abel Lochard, le gar<strong>de</strong> général <strong>de</strong>sForêts Attard, et quatre gendarmes se rendaient à Tamentout, pourse renseigner. Après avoir dépassé le village <strong>de</strong> Texenna,M. Boissin et ses compagnons rencontrèrent <strong>de</strong>s indigènes quiparaissaient préparer <strong>de</strong>s barrages sur la route. Les groupess'éloignaient à l'approche <strong>de</strong> la voiture. Sur les crêtes on apercevait144UN DRAME ALGERIENun très grand nombre d'émeutiers. A un tournant du chemin, unouvrier <strong>de</strong> la ferme Lochard se présente et très ému adjure lesvoyageurs <strong>de</strong> ne pas aller plus loin, <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>mi­tour d'urgence.— Tous les Français sont morts à Tamentout, dit­il à sonpatron ; si vous arrivez jusqu'à la ferme, vous serez vous­mêmes<strong>ma</strong>ssacrés. Les révoltés sont si nombreux et si surexcités par lescrimes qu'ils ont commis, que rien ne pourra les empêcher <strong>de</strong> vousfaire subir le même sort qu'aux forestiers. Regar<strong>de</strong>z ! Ils arrivent !Retournez vite à Djidjelli !Le conseil était sage ; qu'auraient pu faire huit Français, mêmedécidés, contre une meute <strong>de</strong> milliers d'agresseurs ? La voiture fit<strong>de</strong>mi­tour. Seule, une force militaire suffisante pouvait avoir raisond'un pays en état <strong>de</strong> folie criminelle.C'est ainsi que la ferme Lochard est restée entre les <strong>ma</strong>ins <strong>de</strong>sémeutiers jusqu'au samedi 12 <strong>ma</strong>i, à midi, heure à laquelle lebataillon du com<strong>ma</strong>ndant Souriac, <strong>de</strong> l'infanterie coloniale,débouchait <strong>de</strong> la forêt, venant <strong>de</strong> Chevreul.Rien n'avait été touché aux abords et à l'intérieur <strong>de</strong>s bâtiments.Il ne <strong>ma</strong>nquait même pas une volaille.Mais un <strong>drame</strong> horrible s'était produit, non loin <strong>de</strong> là, et avaiteu pour cadres les cantonnements forestiers d'Ain­Settah, <strong>de</strong>Tamentout et <strong>de</strong> Biabel.145

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