UN DRAME ALGERIENDans la nuit du 9 au 10, on amis en sécurité, dans la cita<strong>de</strong>lle,sous les ordres <strong>de</strong> M. Duga, capitaine <strong>de</strong> réserve, anciencombattant <strong>de</strong> Verdun, 60 femmes et enfants français.L'attitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s autochtones est très nette. Ils ont rompu touterelation avec les Français et ne les saluent plus dans la rue.Dans les fermes <strong>de</strong>s environs, les ouvriers indigènes avaientcomplètement disparu. Ils revenaient peu à peu, au bout <strong>de</strong> quinzejours. Et leur attitu<strong>de</strong> embarrassée était révélatrice <strong>de</strong> complicités.Cinq mois après les événements, <strong>de</strong>s témoignages, <strong>de</strong> lasincérité <strong>de</strong>squels on ne peut douter, affir<strong>ma</strong>ient que la situationrestait tendue dans toute la région. Les caïds déclarent qu'ils n'ontplus d'autorité sur leurs administrés : on leur fait grief <strong>de</strong>s ordresqu'ils ont exécutés dans la se<strong>ma</strong>ine dra<strong>ma</strong>tique. Ils en déduisent<strong>de</strong>s conséquences fâcheuses pour leur propre sécurité, et semontrent réticents dès qu'il s'agit <strong>de</strong> donner <strong>de</strong>s détails ou <strong>de</strong>désigner les agitateurs, car ils appréhen<strong>de</strong>nt avec quelque raisonles vengeances possibles, disons le mot : probables.Du reste, si Djidjelli a été sauvée, par <strong>de</strong>s mesures opportunes,appliquées à temps, dans une collaboration étroite entre l'autoritémilitaire et les <strong>de</strong>ux municipalités, <strong>de</strong> plein exercice et mixte, lagran<strong>de</strong> banlieue du Sud, au<strong>de</strong>là <strong>de</strong> la station estivale <strong>de</strong> Texenna,a, hélas ! enregistré, <strong>de</strong>s <strong>drame</strong>s dont l'horreur rappelle les scènesles plus tragiques <strong>de</strong> notre Histoire nordafricaine. Nous voulonsparler <strong>de</strong> la mort <strong>de</strong>s 3 Français <strong>de</strong> Djidjelli, Mme Bovo etMM. Coste et Bovo, ainsi que du <strong>ma</strong>ssacre <strong>de</strong>s gar<strong>de</strong>s forestiers <strong>de</strong>Tamentout et <strong>de</strong> leurs familles.Le premier <strong>drame</strong> a été évoqué par nous à propos <strong>de</strong>sévénements <strong>de</strong> Chevreul. Le second fait l'objet d'un chapitrespécial sur la forêt en <strong>de</strong>uil.UN DRAME ALGERIENGrâce au sangfroid, avonsnous dit, <strong>de</strong>s représentants <strong>de</strong>l'autorité, la petite ville <strong>de</strong> Djidjelli n'a pas eu à subir les atrocités<strong>de</strong> l'émeute et du pillage en pays berbère.Les enquêtes auxquelles il a été procédé, les constatations faitesavant même la pério<strong>de</strong> douloureuse enregistrée en <strong>ma</strong>i 1945, ontdémontré que, <strong>de</strong>puis longtemps, se préparait le mouvement qui<strong>de</strong>vait se traduire, — dans la pensée <strong>de</strong> ses organisateurs — par unraz <strong>de</strong> <strong>ma</strong>rée <strong>de</strong>stiné à balayer tout ce qui représentait la France enAfrique du Nord.Le 15 octobre 1945, à l'occasion <strong>de</strong> la comparution <strong>de</strong> 82indigènes <strong>de</strong> Djidjelli et <strong>de</strong>s environs <strong>de</strong>vant le Tribunal militaire<strong>de</strong> Constantine, une partie du voile officiel qui cachait au public lavérité sur le complot africain antifrançais s'est soulevé et a permis<strong>de</strong> constater jusqu'où s'étendaient les complicités dans le grand<strong>drame</strong> en préparation.C'est ainsi que l'on a appris qu'en novembre 1944, un officiercom<strong>ma</strong>ndant du C.L.I. <strong>de</strong> Djidjelli était informé <strong>de</strong>s propositionsparvenues à ses subordonnés, pour l'acquisition d'armes <strong>de</strong> guerredont il avait la gar<strong>de</strong> et la responsabilité.Cet officier, le com<strong>ma</strong>ndant Albert Dateau, arrivait <strong>de</strong> France,il avait un passé respectable entre tous. Il avait com<strong>ma</strong>ndé lesecteur Sud <strong>de</strong> Paris, comme chef F.F.I., en août 1944, au moment<strong>de</strong> la reprise <strong>de</strong> la capitale aux Alle<strong>ma</strong>nds.Au lieu <strong>de</strong> mettre fin aux négociations qu'il venait <strong>de</strong> découvrir,il les encouragea secrètement, dans le but <strong>de</strong> pénétrer au cœurmême du complot et <strong>de</strong> saisir les coupables flagrante <strong>de</strong>licto.L'opération réussit.Accueillant les offres qui étaient faites, les militaires pressentis,d'accord avec leur chef, promirent <strong>de</strong> livrer 42 fusils <strong>de</strong> guerre et 2caisses <strong>de</strong> cartouches.138139
UN DRAME ALGERIENLa date <strong>de</strong> livraison fut fixée : le 30 novembre 1944, un fourgonmilitaire, apparemment chargé <strong>de</strong> fûts, sortirait <strong>de</strong> la caserne, et serendrait à un endroit désigné, pour livrer les armes.« Avant <strong>de</strong> quitter Djidjelli, le chauffeur fit monter près <strong>de</strong> lui,ainsi qu'il était convenu, un individu qui servait d'agent <strong>de</strong> liaisonavec les réceptionnaires. Arrivé à proximité du pont <strong>de</strong> la route <strong>de</strong>Bougie, le camion stoppa. Des indigènes se trouvaient là. Deuxd'entre eux grimpèrent sur la plateforme arrière <strong>de</strong> la voiture.Apercevant <strong>de</strong>s policiers, cachés dans les fûtailles, ils donnèrentl'alarme. Tous les complices prirent la fuite. La poursuites'organisa et l'un <strong>de</strong>s fuyards fut arrêté. Ses aveux <strong>de</strong>vaientpermettre <strong>de</strong> nombreuses arrestations (1). »La poursuite <strong>de</strong>s coupables avait donné lieu à <strong>de</strong>s discussions<strong>de</strong> compétence. L'administration supérieure, mise au courant <strong>de</strong>sfaits, revendiqua le dossier. L'autorité militaire résista et la justicemilitaire obtint le droit déjuger les prévenus. Ceci est heureux pourla justice tout court parce que les bureaux d'<strong>Alger</strong> auraient eutendance à terminer la chose par un classement, sous le prétexte« qu'il ne faut pas alarmer l'opinion publique ».C'est ce prétexte, largement exploité, qui nous a valu la mort <strong>de</strong>près <strong>de</strong> cent Français, lâchement <strong>ma</strong>rtyrisés et assassinés dans lase<strong>ma</strong>ine tragique du 8 <strong>ma</strong>i (2). C'est cette politique qui a provoquéla grâce <strong>de</strong> presque tous les condamnés et leur renvoi dans leursfoyers. La nouvelle commençait à circuler le 18 octobre 1945.UN DRAME ALGERIENElle a eu la plus fâcheuse répercussion sur le peuplementfrançais <strong>de</strong> nos campagnes <strong>algérien</strong>nes.Revenons aux débats qui ont eu lieu <strong>de</strong>vant le Tribunal militaire<strong>de</strong> Constantine, le 15 octobre 1945 :— 82 indigènes, appartenant au territoire <strong>de</strong> Djidjelli,comparaissaient sous l'inculpation d'atteinte à la sûreté extérieure<strong>de</strong> l'État. 71 étaient accusés <strong>de</strong> reconstitution <strong>de</strong> ligue dissoute(P.P.A.), <strong>de</strong> provocations d'indigènes <strong>algérien</strong>s, <strong>de</strong> <strong>ma</strong>nifestationscontre la souveraineté française, d'essai <strong>de</strong> création d'ungroupement armé, avec <strong>de</strong>s insoumis et <strong>de</strong>s déserteurs, au moyend'une caisse autonome appelée « Caisse Noire », etc. Les 12<strong>de</strong>rniers sont impliqués dans l'affaire du pont <strong>de</strong> la route <strong>de</strong>Bougie, les armes <strong>de</strong>vant être remises à un groupement <strong>de</strong> choc.Le Tribunal militaire, après plusieurs jours <strong>de</strong> débats, a rendules jugements suivants (1) :« 72 inculpés, sur 82, ont été condamnés à <strong>de</strong>s peines variant <strong>de</strong>15 ans <strong>de</strong> travaux forcés, 15 ans d'interdiction <strong>de</strong> séjour,dégradation civique et confiscation <strong>de</strong>s biens, à un mois <strong>de</strong> prisonet mille francs d'amen<strong>de</strong>. »« Le tribunal a prononcé 10 acquittements. »Le journal précise les chefs d'accusation et ajoute, d'après letexte <strong>de</strong> la condamnation : « Actes sciemment accomplis, <strong>de</strong>nature à nuire à la défense nationale. »(1) Dépêche <strong>de</strong> Constantine, 16 octobre 1945.(2) Le chiffe <strong>de</strong>s morts français, officiellement proclamé, est 88. Mais combien <strong>de</strong> victimessouffrent encore, <strong>de</strong>puis <strong>de</strong> longs mois, <strong>de</strong>s coups reçus an cours du <strong>drame</strong> <strong>de</strong> <strong>ma</strong>i 1945140(1) Dépêche, <strong>de</strong> Constantine, du 19 octobre 1945.141
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