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Un drame algérien - Alger de ma jeunesse

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UN DRAME ALGERIENmurs, abritez­vous ! Courage ! A <strong>de</strong><strong>ma</strong>in ! »Vers minuit, les carreaux <strong>de</strong> l'imposte <strong>de</strong> la salle du publicvolent en éclats, puis <strong>de</strong>s blocs sont jetés sur la porte qui résiste.Mais brusquement, elle s'enflamme et brûle, comme une torche :<strong>de</strong> l'extérieur, on l'a arrosée d'essence...Les défenseurs font feu <strong>de</strong> toutes leurs armes. M. Marchettijette <strong>de</strong> l'eau sur le brasier. <strong>Un</strong>e fumée acre, suffocante, envahit la<strong>ma</strong>ison. Dans le bruit et les détonations, dans le fracas <strong>de</strong>s pavésqui s'abattent, la porte éclate. Tout le panneau s'effondre. Le cadreà <strong>de</strong>mi carbonisé tient encore, par ses paumelles et ses ferrures. Lanuit s'ouvre, béante. Puis c'est l'illumination, à travers l'embrasure,d'un bidon américain plein d'essence qui a pris feu, sur la terrassed'entrée et qui éclaire tout, y compris l'intérieur. Les défenseursessaient <strong>de</strong> se mettre à l'abri. Ils tiraillent éperdument.Le courageux Receveur, toujours calme, est à ses appareils,répondant aux appels qui arrivent <strong>de</strong> tous côtés. Le téléphonefonctionne inlassablement. Les centres voisins s'inquiètent, euxaussi. Le bordj a fait connaître que les jardins qui l'entourent sontremplis <strong>de</strong> tireurs bien dissimulés et qu'aucun secours n'estpossible <strong>de</strong> ce côté. La situation <strong>de</strong>vient très grave, dans la <strong>ma</strong>isonouverte.Brusquement — il est un peu moins d'une heure du <strong>ma</strong>tin —une partie du plafond s'effondre, en flammes, dans la chambre <strong>de</strong>travail, sous un gros bloc qui, jeté <strong>de</strong> la toiture découverte, a faitbélier. On a versé <strong>de</strong> l'essence par le toit. Le plafond brûle et sur lesol du bureau, le liqui<strong>de</strong> enflammé se répand. La pièce est commeilluminée. Ce n'est plus tenable, sous la fumée qui prend à la gorgeet donne <strong>de</strong>s angoisses d'asphyxie... Pourtant il faut tenir.M. Marchetti branche les appareils sur le bordj et prend congé...UN DRAME ALGERIENLes trois hommes se replient d'abord dans une pièce, en faisant<strong>de</strong> brusques sorties pour tirer, puis dans une autre, où la fuméeopaque les poursuit et les étouffe.Le plafond brûle toujours et tombe, par petits fragments. Avecla porte ouverte, il y a un appel d'air, car le toit est largementdécouvert. La <strong>ma</strong>ison flambe par le haut.A <strong>de</strong>ux heures et quart, la situation est intenable. Lesdéfenseurs n'y voient plus. Ils se concertent : il faut partir...« Nous nous serions jetés, volontiers, dans la rue, même d'untroisième étage », dira plus tard, l'un d'eux. Et le brave gendarmeajoutera : « Je songeais à conserver une cartouche, pour ne pasmourir brûlé ou <strong>ma</strong>rtyrisé. »Les trois hommes se glissent dans une pièce donnant sur la rueinférieure et for<strong>ma</strong>nt premier étage, avec fenêtre non barricadée.M. Marchetti prend <strong>de</strong>s draps et les noue, tordus en cor<strong>de</strong>, pourai<strong>de</strong>r à la <strong>de</strong>scente. Mais il faut renoncer à ce projet. La croisée,entr'ouverte avec pru<strong>de</strong>nce, permet <strong>de</strong> voir la rue occupée par <strong>de</strong>shommes armés. Il faut retourner au centre <strong>de</strong> l'immeuble et faireface, coûte que coûte... jouer la <strong>de</strong>rnière carte... Sur la proposition<strong>de</strong> M. Marchetti, ses compagnons et lui se barrica<strong>de</strong>nt dans unepetite pièce for<strong>ma</strong>nt couloir et qui est éclairée par une impostedonnant sur la salle <strong>de</strong>s appareils. <strong>Un</strong>e table sert d'échafaudage etles assiégés tirent <strong>de</strong> là, surveillant à la fois la porte ouverte, que lebidon, qui brûle toujours, illumine, les vastes fenêtres barreaudéesqui résonnent sous les coups <strong>de</strong> feu et les pierres, ainsi qu'uneporte secondaire, donnant sur le couloir central et qui débouchedans la rue.Enfin, après une longue attente, la fumée s'éclaircit peu à peu.Et les défenseurs s'aperçoivent que le plafond s'est éteint toutseul... Ils sont un peu plus à l'aise. Ils se relaient par <strong>de</strong>ux, à120121

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