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Un drame algérien - Alger de ma jeunesse

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UN DRAME ALGERIENC'est à Roussia, Tassadane et Menar que se sont recrutés unenotable partie <strong>de</strong>s assassins <strong>de</strong>s <strong>ma</strong>lheureux forestiers <strong>de</strong>Tamentout et Aïn­Settah, dont nous allons parler, après lesévénements <strong>de</strong> Djidjelli.Ainsi que nous l'avons relaté, le 8 <strong>ma</strong>i 1945, avaient eu lieu les<strong>ma</strong>ssacres commis dans les rues <strong>de</strong> Sétif. Puis, les émeutierss'étaient répandus dans la banlieue nord <strong>de</strong> la ville, et leurs ban<strong>de</strong>sse grossissaient <strong>de</strong>s autochtones <strong>de</strong>s pays traversés. Des scèneshorribles s'étaient produites à Sillègue, à Périgotville, à ChevreulKerrata, Tamentout, etc. On comptait bientôt 60 ou 70 Françaisassassinés dans ces régions, parmi lesquels <strong>de</strong>s femmes<strong>ma</strong>rtyrisées, <strong>de</strong>s enfants couverts <strong>de</strong> blessures.Le mercredi 9 <strong>ma</strong>i, au début <strong>de</strong> l'après­midi, on voyait <strong>de</strong>sgroupements s'approcher, par la plaine du Ferdjioua, du centre <strong>de</strong>Fedj­M'Zala. Ces groupes se rejoignaient au pont situé à 800mètres du village sur l'oued Bouslah. Des émissaires envoyés duchef­lieu <strong>de</strong> la commune revenaient avec cette réponse : « Nous nevoulons pas <strong>de</strong> blé ; nous voulons du sang. » Et l'on annonçaitl'attaque pour la nuit.En présence <strong>de</strong> la carence <strong>de</strong> l'Administrateur en chef, sonadjoint, M. l'Administrateur Eschenbrenner et M. Charles Valletjuge <strong>de</strong> paix suppléant non rétribué, avisaient aux mesures àprendre. Ce <strong>de</strong>rnier alerte la gendarmerie <strong>de</strong> Redjas, à 19kilomètres, et obtient l'envoi <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux gendarmes. Puis il part àLucet, centre voisin, accompagner sa femme dans sa famille,prévient les colons <strong>de</strong> ce village, qui s'organisent, et revient à sonposte. La nuit tombait. Il a fallu trois dé<strong>ma</strong>rches auprès du chef <strong>de</strong>la Commune pour obtenir l'entrée <strong>de</strong> la population françaised'origine, dans le bordj administratif, converti en réduit <strong>de</strong> défense.M. Eschenbrenner prend le com<strong>ma</strong>n<strong>de</strong>ment <strong>de</strong> la défense du bordjqu'il conduira avec énergie et sang­froid.Le Juge apprend que M. Marchetti, Receveur <strong>de</strong>s Postes, ayant118UN DRAME ALGERIENaccompagné ses quatre enfants et leur mère au bordj, est revenu àson bureau, pour conserver, aussi longtemps que possible, sesappareils. Il faut aller l'ai<strong>de</strong>r, le défendre. Le Juge propose augendarme Bechouche, d'origine indigène, <strong>de</strong> venir avec lui, à laPoste, le gendarme accepte aussitôt.Les <strong>de</strong>ux hommes trouvent M. Marchetti à son bureau. Il avaitpris <strong>de</strong>s précautions, avait bloqué la porte du public avec une tablebranlante, fermé les fenêtres, heureusement barreaudées, donnantdans la rue, éteint les lumières, ne gardant qu'une petite lampe àpétrole camouflée, pour voir ses fiches. Il a un petit pistolet <strong>de</strong>quatre sous et six cartouches ! Ce pistolet s'enrayera, tout à l'heure,au premier coup tiré.A trois, on fait un inventaire plus réconfortant : on a <strong>de</strong>uxpistolets 6,35 et plus <strong>de</strong> cent cartouches. On a mieux encore : <strong>de</strong>uxpistolets 7,65 et une cinquantaine <strong>de</strong> cartouches, plus lemousqueton du brave gendarme indigène et une vingtaine <strong>de</strong> ballesblindées. Avec cela, on espère tenir. On tiendra. Mais dans quellesconditions !...Très calme, le Receveur parle avec Constantine. Il <strong>de</strong><strong>ma</strong>n<strong>de</strong> dusecours. La Poste est cernée, ainsi que le bordj. On entend <strong>de</strong>scoups <strong>de</strong> feu. Ils sont tirés, d'abord contre le réduit défensif Puis, àbout portant, <strong>de</strong>ux balles atteignent la gran<strong>de</strong> fenêtre du bureau <strong>de</strong>poste. L'action est engagée. On entend <strong>de</strong>s bruits <strong>de</strong> pasprécipités... Ils s'éloignent, puis reviennent...Le bordj dit qu'il est entouré, qu'on a tiré, <strong>ma</strong>is que lesdéfenseurs se sont abstenus <strong>de</strong> riposter. Il faut économiser lesmunitions pour l'assaut possible.A dix heures et <strong>de</strong>mie, le Général <strong>de</strong> Division téléphone <strong>de</strong>Constantine. M. le général Duval annonce que les troupes nepourront arriver que <strong>de</strong><strong>ma</strong>in (1). Il ajoute : « Vous avez <strong>de</strong> bons(1) Les troupes noires envoyées le 9 au soir, <strong>de</strong> Sétif, ont été arrêtées à Saint­Arnaud, parplusieurs milliers <strong>de</strong> <strong>ma</strong>nifestants auxquels elles ont dû faire face.119

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