Un drame algérien - Alger de ma jeunesse

Un drame algérien - Alger de ma jeunesse Un drame algérien - Alger de ma jeunesse

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UN DRAME ALGERIENPlus tard, vers 19 heures, un croiseur, le Triomphant, stoppe aularge de l'île. M. Clanet le rejoint et monte à bord accompagné, dugendarme Nicolau. L'adjoint spécial obtient 3 fusils ­ mitrailleurset 4.500 cartouches, des pansements et 20 boîtes de lait condensépour les enfants.Le navire tire plusieurs bordées sur des points indiqués.MM. Clanet et Nicolau regagnent l'île à la nuit. Vers 23 heures,des troupes arrivent au village, et la matinée du 12 mai estconsacrée à la rentrée des habitants dans leurs demeures.Le 13 mai des opérations de police ont lieu dans les environs.Vers 17 heures, le sous­préfet de Bougie, M. Byr, arrive, par mer, àMansouria et se rend compte de la situation. Il est accompagné parle commandant de la marine à Bougie.La marine a joué le rôle principal, par son intervention décisiveà Mansouria On a estimé le nombre des rebelles à 6 ou 700. Grâceaux mesures prises à temps — mais juste à temps —par l'adjointspécial du centre et la gendarmerie, aucune victime n'a étéenregistrée. Le danger couru par les Français de Mansouria n'en apas moins été grand.***Ce récit ne serait pas complet si nous ne consacrions une pageau couvent des Pères blancs, qui est installé, depuis de nombreusesannées, à la sortie des gorges de Kerrata, du côté de Souk ElTenine.Ces Pères blancs ont rendu de nombreux services aux indigènesde la région. Nombreux sont ceux qui ont été élevés par eux.Quatre religieux ont été surpris par les événements. Ils n'ont puse replier. Sans doute n'y ont­ils pas songé. Et constatationréconfortante, qui n'a malheureusement pas été faite partout, ils114UN DRAME ALGERIENont trouvé des défenseurs parmi ceux qu'ils avaient guidés dans lavie. Trente indigènes, armés, se sont institués leurs gardes du corpset leur ont déclaré qu'ils se feraient plutôt tuer que de laisser passerles émeutiers. Le chef de ces défenseurs a pour nom : Rahmouni ;ses camarades et lui ont montré que la reconnaissance n'est pas unvain mot, même au contact des propagandes les plus entraînantes.La violence de l'attaque dont la région de Cap Aokas­Kerrata­Mansouria a été l'objet, la durée de la résistance des émeutiers, lesdifficultés que présentaient pour les communications le relieftourmenté des massifs montagneux où se réfugiaient les rebelles,ont obligé les chefs de notre armée à prendre des mesuresénergiques, à envisager des opérations d'envergure qui rappelaientles périodes les plus dures de la conquête de l'Algérie.Disons à l'éloge de ces chefs et de nos soldats que l'affaire futmenée avec toute la précision et la célérité désirables.Le 22 mai 1945 fut pour la région d'Oued Marsa une journéehistorique. Une cérémonie imposante a eu lieu sur les lieux mêmesde la révolte, consacrée à la reddition de toutes les tribus mêléesau drame qui avait eu lieu quinze jours auparavant. Cérémoniemilitaire, cérémonie d'autorité, présidée par le général HenryMartin, commandant le 19e Corps d'Armée, ayant à ses côtés MM.Lestrade­Carbonnel, préfet de Constantine, le général Duval,commandant la Division, le général Weiss, commandantl'Aviation. L'amiral Amanrich, commandant la Marine. Le généralMoragla de l'aviation, MM Byr et Butterlin, sous­préfets deBougie et de Sétif, M. Galle, délégué financier, M. Bordj, maire deBougie, de nombreuses notabilités militaires et civiles.15.000 dissidents avaient été convoqués pour confirmer lademande « d'aman » qu'ils avaient, de guerre lasse, adressée auxreprésentants de la France M. Brives, Administrateur principal,115

UN DRAME ALGERIENson adjoint, M. Hosteins, tous ceux qui avaient su faire leur devoirau cours des journées tragiques, furent à l'honneur.Le colonel Bourdila, après avoir résumé les opérationsmilitaires ayant permis d'avoir raison des émeutiers, dicta auxfauteurs de troubles repentis les conditions exigées pour leurentière soumission.Le général Henry Martin, en termes élevés, dit les parolesfortes qui convenaient, du haut d'une tribune rustique, au pied delaquelle étaient rangés 16 caïds aux burnous écarlates brodés d'or.Le Préfet du département, au nom du Gouvernement de laRépublique, précisa le programme qui doit assurer, dans l'ordre etla paix, la mission civilisatrice de la France en Afrique du Nord.De longs et émouvants compte rendus de cette manifestationont été donnés par les journaux du département, en particulier parla Dépêche de Constantine et par l'Echo de Bougie, sous la plumede notre ami M. Charles Dubar.Soulignons avec plaisir la solennité de l'acte accompli. Quantaux voeux qui ont été émis, laissons au temps le soin de lesréaliser.Constatons qu'un gros travail de soudure reste encoreà assurer. Il sera long. Il sera voué à un échec si l'on continue àappliquer la politique d'abandon et de défaillance condamnée partous les Français d'Algérie.L'exemple, désormais historique, des scènes d'horreurauxquelles nous venons d'assister en Afrique du Nord est uneréplique dure et sans appel pour ceux qui poursuivent l'illusiond'une fusion possible en dehors des principes de justice etd'autorité. Nous le disons une fois de plus, avec une tristesseprofonde, aux professeurs de chimères qui, retardant les solutionspratiques les plus urgentes, ne font que précipiter de nouvellescatastrophes.116UN DRAME ALGERIENLE DRAME DE FEDJ M'ZALAFedj M'Zala est le chef­lieu d'une Commune mixte qui, située à100 kilomètres de Constantine, entre cette ville et Sétif, compteprès de 110.000 habitants indigènes et environ 750 Françaisd'origine, répartis en cinq villages : Fedj­M'Zala, Lucot,Tiberguent, Rouached, Richelieu et deux groupes de fermesfrançaises dans la plaine du Ferdjioua et sur le plateau du Merdj ElKébir, vers Chateaudun du Rhumel.Le territoire de cette unité administrative a, vers l'Ouest, unelimite commune avec les centres sétifiens atteints par l'émeute.Les douars Tachouda, Djemila, Ras Ferdjioua, Roussia,Tassadane et Menar, appartenant à Fedj M'Zala, confinent avec lesdouars Ouled Zerga (Saint­Arnaud) Medjounès (Eulmas),Dehemcha, Maouïa et Arbaoun (Takitount), enfin Béni Medjaled(Djidjelli), où se sont déroulées les scènes tragiques que nousvenons de rapporter.117

UN DRAME ALGERIENPlus tard, vers 19 heures, un croiseur, le Triomphant, stoppe aularge <strong>de</strong> l'île. M. Clanet le rejoint et monte à bord accompagné, dugendarme Nicolau. L'adjoint spécial obtient 3 fusils ­ mitrailleurset 4.500 cartouches, <strong>de</strong>s pansements et 20 boîtes <strong>de</strong> lait con<strong>de</strong>nsépour les enfants.Le navire tire plusieurs bordées sur <strong>de</strong>s points indiqués.MM. Clanet et Nicolau regagnent l'île à la nuit. Vers 23 heures,<strong>de</strong>s troupes arrivent au village, et la <strong>ma</strong>tinée du 12 <strong>ma</strong>i estconsacrée à la rentrée <strong>de</strong>s habitants dans leurs <strong>de</strong>meures.Le 13 <strong>ma</strong>i <strong>de</strong>s opérations <strong>de</strong> police ont lieu dans les environs.Vers 17 heures, le sous­préfet <strong>de</strong> Bougie, M. Byr, arrive, par mer, àMansouria et se rend compte <strong>de</strong> la situation. Il est accompagné parle com<strong>ma</strong>ndant <strong>de</strong> la <strong>ma</strong>rine à Bougie.La <strong>ma</strong>rine a joué le rôle principal, par son intervention décisiveà Mansouria On a estimé le nombre <strong>de</strong>s rebelles à 6 ou 700. Grâceaux mesures prises à temps — <strong>ma</strong>is juste à temps —par l'adjointspécial du centre et la gendarmerie, aucune victime n'a étéenregistrée. Le danger couru par les Français <strong>de</strong> Mansouria n'en apas moins été grand.***Ce récit ne serait pas complet si nous ne consacrions une pageau couvent <strong>de</strong>s Pères blancs, qui est installé, <strong>de</strong>puis <strong>de</strong> nombreusesannées, à la sortie <strong>de</strong>s gorges <strong>de</strong> Kerrata, du côté <strong>de</strong> Souk ElTenine.Ces Pères blancs ont rendu <strong>de</strong> nombreux services aux indigènes<strong>de</strong> la région. Nombreux sont ceux qui ont été élevés par eux.Quatre religieux ont été surpris par les événements. Ils n'ont puse replier. Sans doute n'y ont­ils pas songé. Et constatationréconfortante, qui n'a <strong>ma</strong>lheureusement pas été faite partout, ils114UN DRAME ALGERIENont trouvé <strong>de</strong>s défenseurs parmi ceux qu'ils avaient guidés dans lavie. Trente indigènes, armés, se sont institués leurs gar<strong>de</strong>s du corpset leur ont déclaré qu'ils se feraient plutôt tuer que <strong>de</strong> laisser passerles émeutiers. Le chef <strong>de</strong> ces défenseurs a pour nom : Rahmouni ;ses ca<strong>ma</strong>ra<strong>de</strong>s et lui ont montré que la reconnaissance n'est pas unvain mot, même au contact <strong>de</strong>s propagan<strong>de</strong>s les plus entraînantes.La violence <strong>de</strong> l'attaque dont la région <strong>de</strong> Cap Aokas­Kerrata­Mansouria a été l'objet, la durée <strong>de</strong> la résistance <strong>de</strong>s émeutiers, lesdifficultés que présentaient pour les communications le relieftourmenté <strong>de</strong>s <strong>ma</strong>ssifs montagneux où se réfugiaient les rebelles,ont obligé les chefs <strong>de</strong> notre armée à prendre <strong>de</strong>s mesuresénergiques, à envisager <strong>de</strong>s opérations d'envergure qui rappelaientles pério<strong>de</strong>s les plus dures <strong>de</strong> la conquête <strong>de</strong> l'Algérie.Disons à l'éloge <strong>de</strong> ces chefs et <strong>de</strong> nos soldats que l'affaire futmenée avec toute la précision et la célérité désirables.Le 22 <strong>ma</strong>i 1945 fut pour la région d'Oued Marsa une journéehistorique. <strong>Un</strong>e cérémonie imposante a eu lieu sur les lieux mêmes<strong>de</strong> la révolte, consacrée à la reddition <strong>de</strong> toutes les tribus mêléesau <strong>drame</strong> qui avait eu lieu quinze jours auparavant. Cérémoniemilitaire, cérémonie d'autorité, présidée par le général HenryMartin, com<strong>ma</strong>ndant le 19e Corps d'Armée, ayant à ses côtés MM.Lestra<strong>de</strong>­Carbonnel, préfet <strong>de</strong> Constantine, le général Duval,com<strong>ma</strong>ndant la Division, le général Weiss, com<strong>ma</strong>ndantl'Aviation. L'amiral A<strong>ma</strong>nrich, com<strong>ma</strong>ndant la Marine. Le généralMoragla <strong>de</strong> l'aviation, MM Byr et Butterlin, sous­préfets <strong>de</strong>Bougie et <strong>de</strong> Sétif, M. Galle, délégué financier, M. Bordj, <strong>ma</strong>ire <strong>de</strong>Bougie, <strong>de</strong> nombreuses notabilités militaires et civiles.15.000 dissi<strong>de</strong>nts avaient été convoqués pour confirmer la<strong>de</strong><strong>ma</strong>n<strong>de</strong> « d'a<strong>ma</strong>n » qu'ils avaient, <strong>de</strong> guerre lasse, adressée auxreprésentants <strong>de</strong> la France M. Brives, Administrateur principal,115

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