Un drame algérien - Alger de ma jeunesse

Un drame algérien - Alger de ma jeunesse Un drame algérien - Alger de ma jeunesse

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UN DRAME ALGERIENPOST­SCRIPTUMVERS L'IRRÉPARABLELes lignes qui précèdent et que nous avions données « enmanière de conclusion » datent de neuf mois. Elles ont été écritesen décembre 1945. Nous ne sommes, du reste, pour rien dans leretard apporté à leur publicité, car nous n'ignorons pas qu'il estgrand temps de faire entendre les vérités nécessaires.Depuis cette époque, des faits nouveaux se sont produits, quiaccentuent encore la gravité de la situation créée à la France enAfrique du Nord.A Paris, on légifère en hâte. On est plus pressé de faire, pourl'Algérie, du définitif que du raisonnable. On fait œuvre dedémolition, sans souci du lendemain — à part celui de faire placenette, pour installer on ne sait quel régime de désordre etd'anarchie, dont les indigènes seront les victimes, au même titreque les Français d'origine.Apparemment, on vise à donner des satisfactions aux « Amisdu Manifeste », de ce « Manifeste » signé par tous les élus262UN DRAME ALGERIENmusulmans siégeant actuellement à la Constituante, au titrealgérien, et qui réclamait, en termes autoritaires et agressifs, enfévrier 1943 :— La libération totale de l'Algérie, par le départ del'Administration et de l'influence françaises ;— Le remplacement du drapeau tricolore par le drapeau del'Islam dans les cantonnements et les manifestations militaires ;— La constitution de l'Algérie en État algérien, dès la fin deshostilités, Constitution élaborée par une assemblée algérienne,élue au suffrage universel, par tous les habitants de l'Algérie.Le 7 mars 1944, un an après, une Ordonnance, sous laquelle onétait étonné de trouver un nom respecté, celui du général deGaulle, avait fait entrer le pays dans la voie ainsi tracée : les listesélectorales françaises étaient largement ouvertes aux indigènes,admis à conserver leur statut personnel.Cette dernière stipulation était la reconnaissance officielle parnotre pays, la légalisation de l'état de servage de la femmemusulmane...Depuis décembre 1945, d'autres décisions sont venues encorerenforcer l'Ordonnance de 1944, en faisant litière des principes quiavaient le plus honoré, jusqu'à ce jour, les traditions françaises,nous voulons parler du respect de la Justice.Par une série de mesures, l'Autorité supérieure est arrivée : àfaire classer de nombreuses affaires criminelles, intéressant lesémeutes de mai 1945, avant jugement, à vider les camps deconcentration, où avaient été relégués, en attendant des sanctions,de nombreux inculpés, à relâcher des condamnés de droit communavant l'expiration de leurs peines ; à annuler l'exécution dedécisions des tribunaux militaires ayant prononcé des peinescapitales contre les principaux auteurs des scènes atroces dontnous vous avons cité quelques exemples. On affirme que sur 120263

UN DRAME ALGERIENcondamnations environ, prononcées à ce titre, 25 à peine ont étésuivies d'exécution.Enfin est arrivée l'amnistie générale, qui couvre à peu près tousles coupables et leur permet de revenir, libérés et insolents, parmileurs victimes et leurs complices.Et comme si de tels défis au bon sens et à l'équité n'étaient passuffisants, on intensifie à plaisir les campagnes de calomniescontre les martyrs de l'hécatombe des 8 et 9 mai 1945. La presse etla T.S.F. propagent les mensonges les plus odieux sur des faitsdont l'Administration a empêché la libre divulgation.Les partis extrémistes — qui ont une grande part dans lesévénements de mai, et les élus indigènes — continuent à crier auscandale depuis que, le calme relatif étant revenu, l'émeute ayantété circonscrite d'abord, puis jugulée — l'ordre public allait, enfin,être restauré dans le pays.Le scandale, ce n'est pas le massacre des Français isolés etsurpris, sans défense, des femmes martyrisées et des petits enfantslacérés de coups de couteaux. Le scandale, c'est la répression tropbrutale de l'émeute. Nos soldats ont été des bourreaux...Ce renversement, au moins audacieux, des rôles, a évidemmentpour but de tromper l'opinion publique dans la Métropole. Mais ilcrée une situation intolérable en Algérie, où tout le monde est fixé,même la masse indigène, qui est étonnée, aujourd'hui encore, quele châtiment n'ait pas été plus exemplaire.Notre armée — qui reste toujours la « grande muette » — nepeut, évidemment, répondre aux diffamations dont elle est l'objet.Aucun communiqué officiel n'est venu rétablir la vérité. Une miseau point s'est esquissée dans la presse indépendante de la Colonie.Elle a été insuffisante, à notre sens, et n'a pas atteint les milieux264UN DRAME ALGERIENinfluencés par les mensonges répandus à profusion. Pourquoi nepas dire toute la vérité ?Nous ne voudrions pas que l'on puisse, ici, se méprendre sur laportée de nos affirmations, lorsque nous dirons que nous ne nionspas la répression qui a eu lieu en certains endroits.Nous savons qu'à Sétif, il y a eu peu d'exécutions de criminelsau cours des émeutes. L'usage des armes à feu avait été interdit à latroupe. Nous avons dit que les hommes n'avaient pas decartouches. Mais ailleurs en rase campagne, partout où nossoldats, allant délivrer les fermes ou les villages, ont été reçus àcoups de mitrailleuses ou de mitraillettes — comme cela s'estproduit, par exemple, le 8 au soir et le 9 au matin, près dePérigotville, le lendemain 10 mai, à Chevreul, où des barrages, surla route, étaient défendus à coups de fusils, plus tard à Taher, oùles maisons forestières, incendiées, ne furent dégagées qu'après descombats contre les émeutiers, plus tard enfin au douar Menar, deFedj­M'Zala —partout où la résistance armée, ouverte, a succédé àl'émeute, il y a eu riposte vigoureuse de nos formations militaires,il y a eu assaut, répression, châtiment.Quel esprit sensé, raisonnable, oserait s'élever contre l'attitudede nos soldats se trouvant en état de légitime défense ? N'était­cepas le seul moyen, du reste, de limiter les dégâts, de mettre fin à unmouvement qui avait la prétention de s'étendre sur toute l'Algérie,pour gagner, ensuite, la Tunisie et le Maroc ?Nous l'avons dit déjà, c'est à l'énergie de notre armée et de seschefs, à leur sens profond du Devoir et de l'Honneur français quenous devons d'avoir échappé à un drame généralisé et savammentpréparé.Les Pouvoirs publics, pour des raisons que nous ne saurionsapprouver, ne le disent pas, mais les dispositions militairesauxquelles nous assistons en ce moment, sont la démonstration265

UN DRAME ALGERIENcondamnations environ, prononcées à ce titre, 25 à peine ont étésuivies d'exécution.Enfin est arrivée l'amnistie générale, qui couvre à peu près tousles coupables et leur permet <strong>de</strong> revenir, libérés et insolents, parmileurs victimes et leurs complices.Et comme si <strong>de</strong> tels défis au bon sens et à l'équité n'étaient passuffisants, on intensifie à plaisir les campagnes <strong>de</strong> calomniescontre les <strong>ma</strong>rtyrs <strong>de</strong> l'hécatombe <strong>de</strong>s 8 et 9 <strong>ma</strong>i 1945. La presse etla T.S.F. propagent les mensonges les plus odieux sur <strong>de</strong>s faitsdont l'Administration a empêché la libre divulgation.Les partis extrémistes — qui ont une gran<strong>de</strong> part dans lesévénements <strong>de</strong> <strong>ma</strong>i, et les élus indigènes — continuent à crier auscandale <strong>de</strong>puis que, le calme relatif étant revenu, l'émeute ayantété circonscrite d'abord, puis jugulée — l'ordre public allait, enfin,être restauré dans le pays.Le scandale, ce n'est pas le <strong>ma</strong>ssacre <strong>de</strong>s Français isolés etsurpris, sans défense, <strong>de</strong>s femmes <strong>ma</strong>rtyrisées et <strong>de</strong>s petits enfantslacérés <strong>de</strong> coups <strong>de</strong> couteaux. Le scandale, c'est la répression tropbrutale <strong>de</strong> l'émeute. Nos soldats ont été <strong>de</strong>s bourreaux...Ce renversement, au moins audacieux, <strong>de</strong>s rôles, a évi<strong>de</strong>mmentpour but <strong>de</strong> tromper l'opinion publique dans la Métropole. Mais ilcrée une situation intolérable en Algérie, où tout le mon<strong>de</strong> est fixé,même la <strong>ma</strong>sse indigène, qui est étonnée, aujourd'hui encore, quele châtiment n'ait pas été plus exemplaire.Notre armée — qui reste toujours la « gran<strong>de</strong> muette » — nepeut, évi<strong>de</strong>mment, répondre aux diffa<strong>ma</strong>tions dont elle est l'objet.Aucun communiqué officiel n'est venu rétablir la vérité. <strong>Un</strong>e miseau point s'est esquissée dans la presse indépendante <strong>de</strong> la Colonie.Elle a été insuffisante, à notre sens, et n'a pas atteint les milieux264UN DRAME ALGERIENinfluencés par les mensonges répandus à profusion. Pourquoi nepas dire toute la vérité ?Nous ne voudrions pas que l'on puisse, ici, se méprendre sur laportée <strong>de</strong> nos affir<strong>ma</strong>tions, lorsque nous dirons que nous ne nionspas la répression qui a eu lieu en certains endroits.Nous savons qu'à Sétif, il y a eu peu d'exécutions <strong>de</strong> criminelsau cours <strong>de</strong>s émeutes. L'usage <strong>de</strong>s armes à feu avait été interdit à latroupe. Nous avons dit que les hommes n'avaient pas <strong>de</strong>cartouches. Mais ailleurs en rase campagne, partout où nossoldats, allant délivrer les fermes ou les villages, ont été reçus àcoups <strong>de</strong> mitrailleuses ou <strong>de</strong> mitraillettes — comme cela s'estproduit, par exemple, le 8 au soir et le 9 au <strong>ma</strong>tin, près <strong>de</strong>Périgotville, le len<strong>de</strong><strong>ma</strong>in 10 <strong>ma</strong>i, à Chevreul, où <strong>de</strong>s barrages, surla route, étaient défendus à coups <strong>de</strong> fusils, plus tard à Taher, oùles <strong>ma</strong>isons forestières, incendiées, ne furent dégagées qu'après <strong>de</strong>scombats contre les émeutiers, plus tard enfin au douar Menar, <strong>de</strong>Fedj­M'Zala —partout où la résistance armée, ouverte, a succédé àl'émeute, il y a eu riposte vigoureuse <strong>de</strong> nos for<strong>ma</strong>tions militaires,il y a eu assaut, répression, châtiment.Quel esprit sensé, raisonnable, oserait s'élever contre l'attitu<strong>de</strong><strong>de</strong> nos soldats se trouvant en état <strong>de</strong> légitime défense ? N'était­cepas le seul moyen, du reste, <strong>de</strong> limiter les dégâts, <strong>de</strong> mettre fin à unmouvement qui avait la prétention <strong>de</strong> s'étendre sur toute l'Algérie,pour gagner, ensuite, la Tunisie et le Maroc ?Nous l'avons dit déjà, c'est à l'énergie <strong>de</strong> notre armée et <strong>de</strong> seschefs, à leur sens profond du Devoir et <strong>de</strong> l'Honneur français quenous <strong>de</strong>vons d'avoir échappé à un <strong>drame</strong> généralisé et savammentpréparé.Les Pouvoirs publics, pour <strong>de</strong>s raisons que nous ne saurionsapprouver, ne le disent pas, <strong>ma</strong>is les dispositions militairesauxquelles nous assistons en ce moment, sont la démonstration265

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