Un drame algérien - Alger de ma jeunesse

Un drame algérien - Alger de ma jeunesse Un drame algérien - Alger de ma jeunesse

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UN DRAME ALGERIENarrivent et réclament l'extermination des Français.A 21 heures, les troupes stationnées à Oued­Zenati arrivent àGounod. L'atmosphère se détend.A OUED ZENATILes troupes dont nous venons de parler avaient rétabli lasécurité. Des scènes fâcheuses avaient eu lieu. Attroupements,arrachage de drapeaux français ornant les immeubles pour fêter laVictoire. Tout le pays était en effervescence. Les routes étaientoccupées par de nombreux cavaliers armés.A BLED GAFFARLe téléphone a été coupé le 9, vers 11 h. 15.Des groupes défilaient sur la route, criant : « En avant ! AGuelma ! On reviendra ensuite ici ! » Beaucoup de cavaliers, dontun faisait la navette, pour encourager les gens.L'enthousiasme, général, faisait prévoir des événementssanglants et la certitude du succès.Chez Dominique Bezzina, la bonne de ce dernier n'a pas voulurester pour manger, disant qu'il allait y avoir du vilain. Bezzinaétait tué vers 12 h. 15.Le soir, vers 19 h. 45, trois indigènes, habillés en soldats,reviennent en disant n'avoir rien pu faire. Ils venaient se ravitaillerpour prendre Guelma le lendemain.Le jeudi 10, on constate que l'alimentation en galettes desémeutiers était assurée par la ferme Benyakhlef Ce dernier est vupassant au galop.222UN DRAME ALGERIENA MILLESIMOLe mercredi 9 mai, vers 14 h. 30, on constate la présence deplus de 1.000 hommes dans la vallée de la Seybouse et en haut dela gare.Vers 16 h. 30, on reçoit le corps de Missud, lardé de coups decouteau. Il se trouve dans sa voiture hippomobile, ramené par sabête. Ce crime a été commis dans la vallée de l'Oued Zimba. Unpeu après, la gendarmerie arrive, avec M. Gerbaulet et le gardechampêtre,qui apportent des armes. La population se défendpendant trois jours, ne bénéficiant que du passage depatrouilles (1).A HÉLIOPOLISLe 8 mai, à l'occasion de la fête de la Victoire, il avait étépréparé un couscous pour 1.000 indigènes. Il n'en vint que 18, dont10 devaient assurer le service. Les chefs des « Amis duManifeste » étaient absents.A noter que, dans tout le département, sur des points trèséloignés les uns des autres — nous pouvons citer Edgar­Quinet,par exemple — la même générale abstention a répondu à la mêmeinitiative. Il est donc difficile de ne pas conclure à un vastemouvement collectif.A Héliopolis, dès que l'on a eu connaissance des événements deGuelma, et de l'animation qui régnait dans le monde indigène, lapopulation française décida son repli sur le moulin Lavie, pouvantse prêter à une défense possible.(1) Le 20 décembre 1946, le nommé Labrèche Amor ben Ali, originaire de la Mechta Zimba,venait répondre devant le tribunal militaire de Constantine de la mort de Missud Joseph. Il invoquaitun alibi. L'affaire était renvoyée pour complément d'information. Nous ignorons la suite donnée à cedossier.223

UN DRAME ALGERIENUne première liaison est effectuée entre Héliopolis et Guelma.Des patrouilles rencontrent des gendarmes venant de la ville.Le lendemain matin, mercredi, une pointe est poussée de bonneheure, vers la vallée de la Seybouse. A 6 h. 45 on constate desrassemblements à 4 kilomètres de Guelma A 8 heures, cesrassemblements avaient doublé. Le danger s'affirmait.Vers 15 heures, on constate la présence de 200 indigènes vers lecimetière d'Héliopolis : gens armés et possédant de l'essence. Cegroupe dispose d'environ 150 grenades, 2 mitraillettes, des fusilsallemands tirant des cartouches anglaises. Un autre groupe d'unecentaine d'individus est à l'est du moulin, dans un ravin.Vers 10 heures, des avions passent. Les groupes ont tendance àse disperser.Vers 19 heures, les notables du village causent avec le maire,M. Guiraud. Ce dernier les prévient : si les Français sont menacés,toutes les maisons du village seront rasées. Comme les indigènessont propriétaires des trois quarts des immeubles, ils s'efforcent decalmer les groupes d'assaillants.La nuit se passe sans incidents.Jeudi 10. Toujours même situation. Vers 6 heures, MM.Guiraud et Lavie fils (M. Lavie Marcel, père, délégué financier, setrouvait à Alger, retenu par ses fonctions) sont entourés, devant lamairie, par un groupe d'indigènes. Ces derniers leur donnentl'assurance que le village ne sera pas touché, et demandent à lapopulation européenne de revenir dans ses habitations. Le nomméBouarrour Ahmed déclare qu'en se retirant, la population françaisea commis un acte de provocation !Des patrouilles et des liaisons avec Guelma sont effectuées avecune camionnette armée de miliciens locaux. En ce qui concerne lamine de soufre de la région, le personnel de l'exploitation avaitassuré sa sécurité par l'installation de mines, avec déclenchement224UN DRAME ALGERIENélectrique. Le personnel s'était retiré dans une galerie, avec desvivres et de l'eau pour un mois.Le vendredi 11, on constate une diminution de la tension, enraison de la tournure générale des événements.Valensi Baptiste, cantonnier, a été assassiné dans l'alléejoignant sa maison à la route, le jeudi soir.A GUELLAT BOU SBAHLe mercredi 9, le soir, à la cessation du travail, on constate uneagitation inaccoutumée parmi les indigènes. Un ouvrier deM. Bourger, maire du village, avertit confidentiellement l'épousede ce dernier que si, durant la nuit, on appelle le patron, il nefaudra pas répondre, même si la voix est connue.La population se replie sur la cave de M. Boivin.A GALLIÉNILe 8, à l'occasion des fêtes de la Victoire, invitation des kebarsau Méchoui. Ne sont venus que le président des « Amis duManifeste » et le caïd Kennet.Jeudi 10, un prisonnier est sollicité par deux indigènes àparticiper à une action. Le maire veut aviser le sous­préfet, mais laligne est occupée.A CLAUZELLe mercredi 9, à 9 h. 30, cessation du travail par les ouvriersindigènes dans toutes les fermes. On constate de leur part un va­etvient.A 23 heures, 3 à 400 hommes armés se trouvent au­dessousdu village. Ils sont contenus par un indigène. Il y a lieu de noter225

UN DRAME ALGERIENarrivent et réclament l'extermination <strong>de</strong>s Français.A 21 heures, les troupes stationnées à Oued­Zenati arrivent àGounod. L'atmosphère se détend.A OUED ZENATILes troupes dont nous venons <strong>de</strong> parler avaient rétabli lasécurité. Des scènes fâcheuses avaient eu lieu. Attroupements,arrachage <strong>de</strong> drapeaux français ornant les immeubles pour fêter laVictoire. Tout le pays était en effervescence. Les routes étaientoccupées par <strong>de</strong> nombreux cavaliers armés.A BLED GAFFARLe téléphone a été coupé le 9, vers 11 h. 15.Des groupes défilaient sur la route, criant : « En avant ! AGuel<strong>ma</strong> ! On reviendra ensuite ici ! » Beaucoup <strong>de</strong> cavaliers, dontun faisait la navette, pour encourager les gens.L'enthousiasme, général, faisait prévoir <strong>de</strong>s événementssanglants et la certitu<strong>de</strong> du succès.Chez Dominique Bezzina, la bonne <strong>de</strong> ce <strong>de</strong>rnier n'a pas voulurester pour <strong>ma</strong>nger, disant qu'il allait y avoir du vilain. Bezzinaétait tué vers 12 h. 15.Le soir, vers 19 h. 45, trois indigènes, habillés en soldats,reviennent en disant n'avoir rien pu faire. Ils venaient se ravitaillerpour prendre Guel<strong>ma</strong> le len<strong>de</strong><strong>ma</strong>in.Le jeudi 10, on constate que l'alimentation en galettes <strong>de</strong>sémeutiers était assurée par la ferme Benyakhlef Ce <strong>de</strong>rnier est vupassant au galop.222UN DRAME ALGERIENA MILLESIMOLe mercredi 9 <strong>ma</strong>i, vers 14 h. 30, on constate la présence <strong>de</strong>plus <strong>de</strong> 1.000 hommes dans la vallée <strong>de</strong> la Seybouse et en haut <strong>de</strong>la gare.Vers 16 h. 30, on reçoit le corps <strong>de</strong> Missud, lardé <strong>de</strong> coups <strong>de</strong>couteau. Il se trouve dans sa voiture hippomobile, ramené par sabête. Ce crime a été commis dans la vallée <strong>de</strong> l'Oued Zimba. <strong>Un</strong>peu après, la gendarmerie arrive, avec M. Gerbaulet et le gar<strong>de</strong>champêtre,qui apportent <strong>de</strong>s armes. La population se défendpendant trois jours, ne bénéficiant que du passage <strong>de</strong>patrouilles (1).A HÉLIOPOLISLe 8 <strong>ma</strong>i, à l'occasion <strong>de</strong> la fête <strong>de</strong> la Victoire, il avait étépréparé un couscous pour 1.000 indigènes. Il n'en vint que 18, dont10 <strong>de</strong>vaient assurer le service. Les chefs <strong>de</strong>s « Amis duManifeste » étaient absents.A noter que, dans tout le département, sur <strong>de</strong>s points trèséloignés les uns <strong>de</strong>s autres — nous pouvons citer Edgar­Quinet,par exemple — la même générale abstention a répondu à la mêmeinitiative. Il est donc difficile <strong>de</strong> ne pas conclure à un vastemouvement collectif.A Héliopolis, dès que l'on a eu connaissance <strong>de</strong>s événements <strong>de</strong>Guel<strong>ma</strong>, et <strong>de</strong> l'ani<strong>ma</strong>tion qui régnait dans le mon<strong>de</strong> indigène, lapopulation française décida son repli sur le moulin Lavie, pouvantse prêter à une défense possible.(1) Le 20 décembre 1946, le nommé Labrèche Amor ben Ali, originaire <strong>de</strong> la Mechta Zimba,venait répondre <strong>de</strong>vant le tribunal militaire <strong>de</strong> Constantine <strong>de</strong> la mort <strong>de</strong> Missud Joseph. Il invoquaitun alibi. L'affaire était renvoyée pour complément d'infor<strong>ma</strong>tion. Nous ignorons la suite donnée à cedossier.223

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