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Un drame algérien - Alger de ma jeunesse

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UN DRAME ALGERIENTout à coup, on entend <strong>de</strong>s coups <strong>de</strong> hache portés par lesémeutiers sur la <strong>de</strong>uxième porte <strong>de</strong> la <strong>ma</strong>ison, celle qui donne surun vestibule accédant à l'escalier du premier étage. La hache estl'instrument <strong>de</strong> travail <strong>de</strong>s indigènes <strong>de</strong> la région, tous plus oumoins bûcherons. On entend la porte craquer et tomber enmorceaux. Les agresseurs sont dans l'immeuble, il faut se hâter.Rapi<strong>de</strong>ment Halbe<strong>de</strong>l charge les carabines et en tend <strong>de</strong>ux auxprisonniers, qui se sauvent sans prendre les armes. Le colon sebattra seul. La salle à <strong>ma</strong>nger est envahie. Le père, décidé à tenirtête, crie à sa femme <strong>de</strong> se sauver et d'aller se cacher avec la petiteJosée dans le « roncier ». On appelle ainsi une petite étendue <strong>de</strong>terrain non défriché qui sépare le jardin <strong>de</strong> la forêt. Il y a là <strong>de</strong>sbuissons épais, envahis par <strong>de</strong>s ronces, où <strong>de</strong>s passages étroitspermettent <strong>de</strong> pénétrer et <strong>de</strong> se cacher.Toute à son enfant, n'ayant plus aucun réflexe d'initiativepersonnelle, la mère obéit. En <strong>de</strong>scendant les escaliers qui, <strong>de</strong> laterrasse, font accé<strong>de</strong>r au jardin, elle entend le crépitement d'unemitrailleuse. Elle ne s'y trompe pas. C'est son père qui arrive. Il vales sauver. Elle reprend courage et remercie la Provi<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> cesecours attendu et qui vient à temps. Mais le crépitement a cessé.Que s'est­il passé ?La <strong>ma</strong>lheureuse femme a su, plus tard, les circonstances qui ontempêché son père, M. Luzet, <strong>de</strong> venir jusqu'à elle...Elle se réfugie dans le roncier. Elle entend les coups portés parla carabine <strong>de</strong> son <strong>ma</strong>ri. Elle voit ce <strong>de</strong>rnier, fuyant à son tour la<strong>ma</strong>ison envahie, arriver en hâte près d'elle. Il va se cacher àquelques mètres <strong>de</strong> sa femme. On le poursuit. <strong>Un</strong> indigènedécouvre Mme Halbe<strong>de</strong>l, il l'oblige à sortir du fourré. Elle tient safille dans ses bras. Celui qui la menace est bien connu d'elle : c'estle fils et le frère <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux khamès <strong>de</strong> l'exploitation. Il est réputécomme <strong>ma</strong>uvais sujet.200UN DRAME ALGERIENLa femme du colon subit un rapi<strong>de</strong> interrogatoire :— Où est ton <strong>ma</strong>ri ?— Je ne sais pas.— Dis­moi où il est ou je te tue !Et le bandit présente son fusil, prêt à tirer.Devant cette menace, André se découvre. — Me voilà, dit­ilsimplement.L'émeutier l'ajuste, à 7 ou 8 mètres à peine. Il tire. Le Françaisreste <strong>de</strong>bout ; il semble ne pas avoir été touché. Cependant, il neréagit pas. Sa femme re<strong>ma</strong>rque que sa carabine tourne <strong>de</strong> façonétrange dans sa <strong>ma</strong>in droite. Il doit avoir le poignet brisé. L'armene tombe pourtant pas. André s'avance, sans trébucher. Il reçoit<strong>de</strong>s coups <strong>de</strong> cailloux. Il est ensanglanté, <strong>ma</strong>is il est calme. Ondirait qu'il se recueille. S'adressant à sa femme, il lui ditsimplement :— Chérie, rentrons à la <strong>ma</strong>ison.Mme Halbe<strong>de</strong>l, obéissant, se hâte. Sa fille Josée, la figureapeurée, se crispe contre elle. La mère se retourne à temps pourvoir son cher André s'effondrer sans un cri, sans un mot. Elle sejette vers lui, l'appelle avec <strong>de</strong>s expressions <strong>de</strong> tendresse. Il nerépond pas... Il ne répondra plus.Tout à coup, une hache s'abat, le coup porte <strong>de</strong>rrière la tête <strong>de</strong>la victime inanimée. La tête est presque séparée du corps. <strong>Un</strong><strong>de</strong>uxième coup <strong>de</strong> hache, porté par le même bandit, ouvre uneénorme blessure à la cuisse droite, qui est cassée.La pauvre femme pousse <strong>de</strong>s cris <strong>de</strong> détresse : « Pitié pour unmort ! Mon pauvre chéri ! » C'est alors contre elle que s'exercentles agresseurs. Ils la frappent avec le côté non tranchant <strong>de</strong> lahache et avec <strong>de</strong>s bâtons. Ils ne veulent pas la tuer, ce serait sifacile ! Ils la réservent pour une autre fonction. La sauvage tuerie aun programme, prévu d'avance.Les coups continuent à pleuvoir sur le cadavre pantelant et201

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