18pour que l’expérience soit effectivement transitionnelle est que la personne qui encadre lejeu (en l’occurrence, <strong>de</strong>ux comédiens) soit suffisamment bienveillante pour ne pas lever lesparadoxes <strong>de</strong> la situation <strong>et</strong> autorise vraiment les personnes à inventer-trouver <strong>de</strong> nouvellesrègles personnelles ou sociales. Concrètement, c’est seulement lorsque les personnes ontl’illusion qu’elles ont inventé <strong>de</strong>s nouvelles représentations qu’elles peuvent véritablementse les approprier <strong>et</strong> se percevoir comme <strong>de</strong>s auteurs plus autonomes qu’avant. Alors qu’enréalité, ces représentations ont été proposées dans le jeu <strong>et</strong> ont seulement été trouvées parles participants. L’art <strong>de</strong> l’animateur est <strong>de</strong> ne pas lever c<strong>et</strong>te illusion.Lorsque j’ai été confrontée à <strong>de</strong>s difficultés dans le démarrage <strong>de</strong>s équipes proj<strong>et</strong>sd’étudiants à l’Ecole Centrale <strong>de</strong> Lille, je me suis <strong>de</strong>mandée s’il était possible <strong>de</strong> remédier auxproblèmes <strong>de</strong> stress <strong>de</strong>s étudiants <strong>et</strong> <strong>de</strong> lassitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s enseignants par un dispositif <strong>de</strong> jeu. J’aidonc lancé une expérimentation pédagogique en utilisant un jeu que mes collègues <strong>de</strong>Louvain m’ont indiqué : le jeu <strong>de</strong>s spagh<strong>et</strong>tis, mis au point par <strong>de</strong>s enseignants-chercheurs <strong>de</strong>l’Université d’Aalborg. Plusieurs hypothèses ont été testées <strong>et</strong> évaluées notamment au suj<strong>et</strong><strong>de</strong> la capacité à former <strong>de</strong>s équipes, à réguler le travail en équipe <strong>et</strong> à faciliter l’autoévaluationdu travail en équipe par les étudiants. Elles sont rapportées dans <strong>de</strong>ux articles, lepremier à partir d’une série <strong>de</strong> mesures à court terme, le <strong>de</strong>uxième à partir d’entr<strong>et</strong>iensréalisés avec l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> Janice Byrne trois mois après l’expérience (voir les articles en annexe11 : Verzat, 2009, <strong>et</strong> annexe 12 : Verzat, Byrne <strong>et</strong> Fayolle, 2009). Les résultats sontétonnants : il y a sans conteste, apprentissage <strong>de</strong> capacités <strong>de</strong> management d’équipe <strong>et</strong>même <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s inattendus au niveau <strong>de</strong>s enseignants. Ces <strong>de</strong>rniers se sont pris au jeu <strong>et</strong> ontrepris confiance dans leur capacité collective à faire évoluer l’activité <strong>et</strong> plus globalementl’école, alors en plein processus <strong>de</strong> réforme. Les entr<strong>et</strong>iens confirment que l’eff<strong>et</strong> est lié auprocessus <strong>de</strong> jeu qui perm<strong>et</strong> à l’imaginaire <strong>de</strong> se m<strong>et</strong>tre en route <strong>et</strong> finalement d’accepter<strong>de</strong>s choses qu’on évitait <strong>de</strong> regar<strong>de</strong>r. Par exemple, pour un jeune ingénieur sorti <strong>de</strong> classespréparatoires à dominante technique, le fait d’accepter que son rôle professionnel consisterapour beaucoup à réguler <strong>de</strong>s relations d’équipe <strong>et</strong> qu’il peut être confiant dans sa capacité àl’apprendre.Il parait donc possible <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre en œuvre <strong>de</strong>s situations d’apprentissage qui perm<strong>et</strong>tent <strong>de</strong>dépasser <strong>de</strong>s blocages fréquents vis-à-vis <strong>de</strong>s savoir-être <strong>de</strong> l’esprit d’entreprendre : oseraffronter l’incertitu<strong>de</strong> sans paniquer, accepter d’affronter <strong>de</strong>s risques, apprendre grâce auxerreurs… Les questions qui restent posées concernent la durabilité <strong>de</strong>s transformations <strong>de</strong>sreprésentations <strong>et</strong> <strong>de</strong>s comportements, autrement dit le transfert systématique <strong>de</strong>scapacités nouvelles dans d’autres contextes. Nous pouvons faire l’hypothèse à la lumière <strong>de</strong>slimites <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux expérimentations, que les conditions <strong>de</strong> transfert sont intimement liées àla répétition <strong>de</strong>s expériences dans un ordre <strong>de</strong> difficulté croissant <strong>et</strong> à un feedbacksystématique encourageant. Ce qui renvoie aux conditions organisationnelles <strong>et</strong>institutionnelles <strong>de</strong> tels processus d’apprentissage dans les institutions éducatives actuelles.Sont questionnées ici les compétences <strong>de</strong>s enseignants <strong>et</strong> accompagnants, l’organisation <strong>de</strong>ssituations éducatives (en d’autres termes la programmation <strong>de</strong>s cours). In fine cela m<strong>et</strong> enquestion la capacité <strong>de</strong> transformation <strong>de</strong>s écoles <strong>et</strong> universités car elles sont loin <strong>de</strong>fonctionner actuellement comme <strong>de</strong>s organisations apprenantes. C’est le <strong>de</strong>rnier thème que
19j’ai été amenée à explorer au cours <strong>de</strong> mes travaux <strong>de</strong> recherche <strong>et</strong> qui constitue une clédéterminante pour ouvrir la « cuisine <strong>de</strong> l’esprit d’entreprendre ».Du changement dans les organisations apprenantes aux universitésentrepreneuriales.Lorsqu’on parle d’organisations, il est toujours question <strong>de</strong> règles plus ou moins formelles, <strong>de</strong>division <strong>de</strong>s tâches <strong>et</strong> <strong>de</strong> pouvoir, qui doivent s’articuler ensemble <strong>de</strong> manière à tenir <strong>de</strong>uxenjeux <strong>de</strong> survie contradictoires : d’un côté, innover pour s’adapter à <strong>de</strong>s contexteschangeants <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’autre, exploiter ses compétences <strong>de</strong> manière durable <strong>et</strong> rentable. Dans lecontexte social <strong>et</strong> économique actuel particulièrement incertain, c<strong>et</strong>te équation paradoxaleest idéalement assurée par la capacité <strong>de</strong> l’organisation à continuer d’apprendre. L’enjeu <strong>de</strong>ma thèse était justement <strong>de</strong> comprendre comment appréhen<strong>de</strong>r la complexité <strong>de</strong> ladynamique d’apprentissage collectif <strong>de</strong> manière à en favoriser le pilotage. Comme le montrele résumé <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te thèse (placé en annexe 13), c<strong>et</strong>te recherche-action a conduit à m<strong>et</strong>tre enévi<strong>de</strong>nce <strong>et</strong> formaliser trois logiques d’apprentissage collectif en concurrence : une logiqu<strong>et</strong>echnicienne, une logique gestionnaire <strong>et</strong> une logique humaniste. J’ai montré que chacune<strong>de</strong> ces logiques privilégie certaines formes <strong>et</strong> certains contenus <strong>de</strong> savoirs, certains groupesd’acteurs, certains types <strong>de</strong> rapports au savoir, certains rôles <strong>de</strong> production, <strong>de</strong> validation <strong>et</strong><strong>de</strong> diffusion <strong>de</strong>s connaissances. On peut repérer pour chaque logique trois situations idéaltypiques4 contribuant respectivement à l’émergence, la légitimation puis la transmission <strong>de</strong>sconnaissances. Chaque logique se concrétise au niveau local, par la construction progressived’un dispositif d’apprentissage particulier (obj<strong>et</strong> technique, proj<strong>et</strong>, démarche <strong>de</strong> changementouvert) par un acteur-clé, épaulé <strong>de</strong> médiateurs cognitifs, relationnels ou politiquesspécifiques. Au niveau global, chaque logique se caractérise par <strong>de</strong>s institutions spécifiques<strong>de</strong> gestion <strong>et</strong> <strong>de</strong> transmission <strong>de</strong>s connaissances. Il n’y a donc pas un mais <strong>de</strong>s pilotagesmultiples <strong>de</strong> l’apprentissage collectif, qui contribuent à entr<strong>et</strong>enir ou renouveler la culture <strong>de</strong>l’organisation, autour <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux processus fondamentaux : la légitimation (validation <strong>et</strong>transmission <strong>de</strong>s savoirs légitimes assurant la stabilité <strong>de</strong> l’organisation) <strong>et</strong> l’autonomisation(développement <strong>de</strong> la capacité à <strong>de</strong>venir auteurs <strong>de</strong>s acteurs, contribuant à l’émergence <strong>de</strong>nouveaux savoirs <strong>et</strong> <strong>de</strong> nouvelles formes d’organisation). Dans le cas <strong>de</strong> la direction <strong>de</strong> larecherche <strong>de</strong> PSA-Peugeot-Citroën <strong>de</strong> l’époque, la logique gestionnaire (voir annexe 14,Verzat, 2001) prenait une place <strong>de</strong> plus en plus prégnante, soutenue par le dispositif <strong>de</strong>gestion <strong>de</strong>s proj<strong>et</strong>s <strong>de</strong> recherche, les figures <strong>de</strong> quelques chefs <strong>de</strong> proj<strong>et</strong> charismatiques <strong>et</strong>tout un arsenal formel fait <strong>de</strong> plannings <strong>et</strong> <strong>de</strong> systèmes <strong>de</strong> gestion, au détriment <strong>de</strong> la logiqu<strong>et</strong>echnicienne qui s’appuyait sur les prototypes physiques <strong>et</strong> <strong>de</strong>s figures d’experts techniques.La logique humaniste, dans laquelle l’expérimentation théâtrale avait pris place, avait vécuquelques années à la faveur d’un proj<strong>et</strong> participatif porté par un directeur inspiré.4 La situation idéal-typique se réfère à la notion weberienne d’idéal-type . L’idéal-type définit un phénomène social par sescaractères les plus généraux observables dans tous les types <strong>de</strong> société. C’est un modèle, une construction intellectuelle, quiperm<strong>et</strong> d’extraire <strong>de</strong> la réalité empirique, certains traits caractéristiques. Chacune <strong>de</strong>s neuf situations idéal-typiques repéréesdans ma thèse était caractérisée par un contenu type, un support d’inscription type, <strong>de</strong>s catégories typiques d’acteurs avec <strong>de</strong>slogiques d’action caractéristiques, une finalité d’échange <strong>de</strong> connaissance, une norme <strong>de</strong> relation <strong>et</strong> <strong>de</strong>s répartitions <strong>de</strong> rôles entermes <strong>de</strong> production, validation <strong>et</strong> diffusion <strong>de</strong> la connaissance au sein d’une entité sociale <strong>de</strong> référence.
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