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Philippe le Chancelier et son oeuvre : étude sur l'élaboration d'une ...

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« Praedicatio enim in se, non deb<strong>et</strong> habere verba scurrilia, vel puerilia, vel rhythmorummelodias <strong>et</strong> con<strong>son</strong>antias m<strong>et</strong>rorum, quae potius fiunt ad aures demulcendas, quam ad animuminstruendum, quae praedicatio theatralis est <strong>et</strong> mimica, <strong>et</strong> ideo omnifarie contemnenda, de talipradicatione dicitur a proph<strong>et</strong>a : Caupones vestri miscent aquam vino (Isa. I). 106 »Les rhythmorum melodias <strong>et</strong> <strong>le</strong>s con<strong>son</strong>antias m<strong>et</strong>rorum <strong>son</strong>t à bannir du discourschrétien. Il s’agit probab<strong>le</strong>ment de passages influencés par la prose rimée, ou encore lacitation de vers. Les réserves <strong>son</strong>t identiques pour la gestuel<strong>le</strong> <strong>et</strong> la théâtralité dont peutuser un prédicateur pour s’accorder <strong>le</strong>s faveurs <strong>et</strong> l’attention d’une fou<strong>le</strong>. Ici aussi, c’estla me<strong>sur</strong>e qui est recommandée. Tout excès théâtral est considéré comme efféminé oupuéril. Cela ne peut être que <strong>le</strong> fait de l’acteur ou du jong<strong>le</strong>ur <strong>et</strong> non celui d’un hommede Dieu.La mise en garde a beau être un héritage d’une tradition rhétorique qui exalte lame<strong>sur</strong>e, <strong>le</strong> propos n’en dénonce pas moins une tendance qui devait être réel<strong>le</strong>. Il suffitpour s’en convaincre de lire <strong>le</strong>s sermons qu’Alain de Lil<strong>le</strong> donne comme modè<strong>le</strong> danssa Summa de arte praedicatoria. Lui-même, après avoir dénoncé l’usage des colores,s’adonne au plaisir des mots <strong>et</strong> des <strong>son</strong>s 107 . Quel<strong>le</strong> est donc la part d’hypocrisie ou decliché dans ses recommandations préalab<strong>le</strong>s ? C<strong>et</strong>te attitude révè<strong>le</strong> une profondeinterrogation <strong>sur</strong> la nature du discours chrétien <strong>et</strong> <strong>son</strong> rapport à la rhétorique. La margede manœuvre du prédicateur entre <strong>le</strong> modè<strong>le</strong> christique <strong>et</strong> <strong>le</strong>s impératifs de la convictionest étroite <strong>et</strong> se fait sentir dans <strong>le</strong>s traités <strong>et</strong> <strong>le</strong>s sermons 108 . Il faut donc comprendrel’attitude des prédicateurs qui ne manquent pas de rappe<strong>le</strong>r la supériorité de <strong>le</strong>ur mission<strong>et</strong> la provenance divine de <strong>le</strong>ur inspiration. C<strong>et</strong>te tendance à l’autojustification tendd’ail<strong>le</strong>urs à s’effacer au cours du XIII e sièc<strong>le</strong>, preuve que <strong>le</strong>s aspects techniques <strong>et</strong> lanécessité de rendre <strong>le</strong>s sermons efficaces ont pris <strong>le</strong> pas <strong>sur</strong> la dimension métaphysique.C’est au début du sermon, au moment où <strong>le</strong> prédicateur annonce <strong>le</strong> plan de <strong>son</strong>discours en appliquant différents procédés de la divisio, que se concentrent volontiers<strong>le</strong>s techniques qui évoquent <strong>le</strong> rithmus. Pour annoncer <strong>le</strong>s parties qui constitueront <strong>le</strong>106 ALAIN de LILLE, PL 210, col 112. Traduction : « La prédication n’adm<strong>et</strong> pas <strong>le</strong>s mots bouffons ouenfantins, ni <strong>le</strong>s mélodies des rythmes, ni <strong>le</strong>s con<strong>son</strong>ances des mètres qui ont pour eff<strong>et</strong> de charmer <strong>le</strong>soreil<strong>le</strong>s bien plus que d’éclairer l’esprit ; une prédication comme cel<strong>le</strong>-là tient du théâtre <strong>et</strong> du mime, <strong>et</strong>conséquemment est digne de tout mépris. D’une tel<strong>le</strong> prédication, <strong>le</strong> prophète a dit : vos aubergistesmélangent <strong>le</strong> vin <strong>et</strong> l’eau (Isaïe). »107 Michel ZINK, « La rhétorique honteuse <strong>et</strong> la convention du sermon ad status à travers la Summa dearte praedicatoria d’Alain de Lil<strong>le</strong> », Alain de Lil<strong>le</strong>, Gautier de Châtillon, Jakemart Giélée <strong>et</strong> <strong>le</strong>urtemps. Actes du colloque de Lil<strong>le</strong>, octobre 1978, Lil<strong>le</strong>, 1980, p. 171-185.108 Franco MORENZONI, « Paro<strong>le</strong> du prédicateur <strong>et</strong> inspiration divine d’après <strong>le</strong>s Artes praedicandi », Laparo<strong>le</strong> du prédicateur…, op. cit., p. 271-290.393

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