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Philippe le Chancelier et son oeuvre : étude sur l'élaboration d'une ...

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étroitement liée à une conception musica<strong>le</strong> de la langue 2 . Les théoriciens médiévauxexpriment déjà c<strong>et</strong>te aptitude musica<strong>le</strong> des vers rythmiques. Bernard de Bologneexplique dans sa Summa dictaminum que <strong>le</strong>s trois parties de l’art du discours c’est-àdire<strong>le</strong> mètre, la prose <strong>et</strong> <strong>le</strong> rythme, <strong>son</strong>t aptes à la musique. Cependant, c’est <strong>le</strong> rythmequi porte la mélodie de la manière la plus agréab<strong>le</strong> :Rithmicus ordo tamen gratior esse so<strong>le</strong>t.Nam species cantus rithmis adiuncta decoris.Hoc <strong>son</strong>us est melior qui duo pulchra micant. 3Le poète qui compose un rithmus manipu<strong>le</strong> effectivement des paramètres qui <strong>son</strong>tidentiques à ceux de la musique. Il est attentif au rythme puisqu’il construit unagencement de syllabes <strong>et</strong> de mots selon un nombre ou une proportion, à une forme demélodie, puisque l’accent se traduit par une variation de l’intensité voca<strong>le</strong> <strong>et</strong> enfin autimbre puisque l’introduction progressive de la rime tient compte de la cou<strong>le</strong>ur <strong>son</strong>oredes phonèmes. Il s’agit de plaire à l’oreil<strong>le</strong> par un cliqu<strong>et</strong>is <strong>son</strong>ore enchâssé dans unestructure plus ou moins régulière mais toujours perceptib<strong>le</strong>. C<strong>et</strong>te construction <strong>son</strong>oresavante n’existe pas pour <strong>le</strong> seul plaisir de l’audition. El<strong>le</strong> est une mise en forme du sens,d’un message adressé à la rai<strong>son</strong>. L’objectif de la poésie est toujours éthique, quel quesoit <strong>le</strong> suj<strong>et</strong> abordé. El<strong>le</strong> vise à éduquer <strong>et</strong> é<strong>le</strong>ver. La langue <strong>et</strong> ses ornements virtuoses<strong>son</strong>t un véhicu<strong>le</strong>, un support utilisé à des fins supérieures. Ils <strong>son</strong>t <strong>le</strong> vecteur de ladémarche didactique du poète que Pasca<strong>le</strong> Bourgain décrit ainsi :« L’auteur qui décide de faire œuvre de poète fait délibérément <strong>le</strong> choix d’une forme parsoi-même expressive, où il transpose sa propre émotion pour la pérenniser <strong>et</strong> la communiquer. Cequ’il recherche est toujours la densité de l’expression, par laquel<strong>le</strong> il r<strong>et</strong>rouve <strong>le</strong> caractère précieux,presque sacré, de la paro<strong>le</strong> incantatoire du carmen antique. Mais c<strong>et</strong>te densité, porteuse de sens, illa recherche de différentes façons : densité par saturation rhétorique, par saturation exégétique, oupar concentration dans <strong>le</strong> cadre d’une forme structurante. 4 »La poésie est densité, c’est-à-dire qu’el<strong>le</strong> résulte de la saturation (ou de l’évitement) d<strong>et</strong>rois fac<strong>et</strong>tes de la création littéraire : <strong>le</strong>s figures rhétoriques, l’exégèse <strong>et</strong> la forme. Les2 Pasca<strong>le</strong> BOURGAIN, « Le vocabulaire de la poésie rythmique », Archivum latinitatis mediiaevi (Bul<strong>le</strong>tinDu Cange), LI (1992-1993), p. 139-193 ; Richard L. CROCKER, « Musica Rhythmica and MusicaM<strong>et</strong>rica in Antique and Medieval Theory », Journal of Music Theory, II/1 (1958), p. 2-23.3 Cité par Christopher PAGE, Latin Po<strong>et</strong>ry and Conductus Rhythm in Medieval France, Londres, 1997,p. 30. Traduction : « L’organisation rythmique est toutefois habituel<strong>le</strong>ment plus agréab<strong>le</strong> ; ainsi, l’éclatdu chant associé au charme du rithmus, <strong>le</strong> <strong>son</strong> dans <strong>le</strong>quel <strong>le</strong>s deux resp<strong>le</strong>ndissent est meil<strong>le</strong>ur ». Àl’inverse de c<strong>et</strong>te position, <strong>le</strong> théoricien de la musique Gui d’Arezzo ne par<strong>le</strong> que de poésie métriquelorsqu’il évoque <strong>le</strong>s liens entre <strong>le</strong>s mots <strong>et</strong> la formation de la mélodie, au chapitre XV du Micrologus.4 Pasca<strong>le</strong> BOURGAIN, « Formes <strong>et</strong> figures de l’esthétique poétique au XII e sièc<strong>le</strong> », Rhétorique <strong>et</strong> poétiqueau Moyen Âge. Actes du colloque organisé à l'Institut de France <strong>le</strong>s 3 mai <strong>et</strong> 11 décembre 2001, éd.Alain MICHEL, 2002, p. 106.324

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