Philippe le Chancelier et son oeuvre : étude sur l'élaboration d'une ...
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(aaabaaab) tandis que dans la strophe 6 la sonorité est nouvelle (aaabcccb). C’est lamusique qui différencie ces deux dernières strophes. Sur l’ensemble du conduit, larépartition des strophes mélodiques s’organise ainsi :Texte Strophe 1 Strophe 2 Strophe 3 Strophe 4 Strophe 5 Strophe 6Musique I I II II III IVContrairement à la plupart des conduits moraux, le texte ne prend pas à partiel’auditoire par des figures exclamatoires et oratoires. Le poète n’apostrophe nin’interpelle le public. Il commence par employer la première personne pour confier ledésarroi qu’il éprouve à l’observation du comportement du clergé. Le texte parle desprélats et des maîtres côtoyés à Paris. Ce sont eux qu’il désigne comme les patrimoderni au vers 5 de la première strophe. Les rares utilisations de la première personnepar Philippe le Chancelier dans les conduits sont les textes où le poète prête sa voix auChrist pour sermonner les Hommes 60 . Les désinences de la conjugaison à la premièrepersonne sont utilisées pour la rime, ce qui accroît l’importance de cette énonciationverbale originale et la met en valeur en la plaçant là où elle s’entend le mieux (nescio,circumfero, pondero). Cette introduction faite de jugement et de subjectivité est unemanière d’exorde et ne dépasse pas le cadre de cette première strophe. Dès la deuxièmestrophe, la troisième personne du singulier est introduite, replaçant le poète en positiond’observateur extérieur. Il faut attendre la cinquième strophe pour retrouverl’énonciation à la deuxième personne du singulier caractéristique des conduits moraux.Tous les verbes y sont au futur antérieur (evaseris, fueris, veneris, poteris), apportantainsi une nuance conditionnelle. Philippe le Chancelier joue avec les temps et les pointsde vue pour exprimer l’universalité du problème qu’il dénonce. Jamais son jugement nes’est fait aussi personnel et sévère que dans ce conduit.Ce texte particulièrement virulent figure dans le Roman de Fauvel. Ladeuxième strophe est sensiblement transformée pour critiquer avec plus de précision lavaine recherche des biens et le péché de simonie :In prelatos refluitQuod a Roma defluitVersum est in habitumQuod merces, non meritum,Rome dictat iura.Romanorum singulis60 Les conduits Homo vide que pro te patior (n°13, analysé p. 249) et Quid ultra tibi facere (n°4, analysép. 161).192
Animus in loculisEt in questu cura. 61Les strophes 5 et 6 sont omises dans BnF fr. 146, si bien que le conduit, réduit à deuxdoubles strophes, présente un aspect plus régulier mais aussi plus synthétique. L’œuvremorale du Chancelier, même si elle est l’objet de quelques aménagements dans Fauvel,est toujours considérée et utilisée pour sa justesse et sa causticité, plus de quatre-vingtsans après la mort du poète.Le conduit est en mode de sol, bien que les strophes 5 et 6 se terminent sur laquarte aiguë de la finale, do. Cette finale secondaire s’impose à la fin du conduit etdistingue les deux strophes simples. L’ensemble de la mélodie de ces deux dernièresstrophes se situe dans un registre plus aigu et la mélodie atteint le sol’ à de nombreusesreprises. La tendance générale du conduit est donc de se déporter vers l’aigu.L’écriture mélodique est mélismatique. De courtes caudae sont placées audébut des strophes 1, 2, 3 et 4 et à la fin de la strophe 6. Les passages cum littera sontrelativement fleuris. Les monnayages de 2 à 4 notes sont très fréquents. Les deux petitescaudae introductives jouent efficacement leur rôle structurel. Elles signalent le passaged’une strophe à l’autre et affirment les notes importantes du mode, agissant comme desrepères auditifs :Caudastrophe Iintroductive,Cauda introductive,strophe IISe reposant tous deux fermement sur la finale, ces deux mélismes permettentd’affirmer le sentiment modal. Leur dessin mélodique final, assez proche pour l’un etl’autre, impose le sol comme une ponctuation musicale qui servira de repère pour lesnombreuses phrases à venir. La cauda de la strophe I évolue dans une quarte (sol-do)qui limite l’ambitus au premier tétracorde du mode. Le registre s’élargit à la quinte si-fa61 Hans TISCHLER et Samuel ROSENBERG (éd.), The Monophonic Songs in the Roman de Fauvel, Lincoln-Londres, 1991, p. 33-35. Les passages indiqués en gras signalent les variantes du texte par rapport aumanuscrit de Florence.193
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(aaabaaab) tandis que dans la strophe 6 la <strong>son</strong>orité est nouvel<strong>le</strong> (aaabcccb). C’est lamusique qui différencie ces deux dernières strophes. Sur l’ensemb<strong>le</strong> du conduit, larépartition des strophes mélodiques s’organise ainsi :Texte Strophe 1 Strophe 2 Strophe 3 Strophe 4 Strophe 5 Strophe 6Musique I I II II III IVContrairement à la plupart des conduits moraux, <strong>le</strong> texte ne prend pas à partiel’auditoire par des figures exclamatoires <strong>et</strong> oratoires. Le poète n’apostrophe nin’interpel<strong>le</strong> <strong>le</strong> public. Il commence par employer la première per<strong>son</strong>ne pour confier <strong>le</strong>désarroi qu’il éprouve à l’observation du comportement du c<strong>le</strong>rgé. Le texte par<strong>le</strong> desprélats <strong>et</strong> des maîtres côtoyés à Paris. Ce <strong>son</strong>t eux qu’il désigne comme <strong>le</strong>s patrimoderni au vers 5 de la première strophe. Les rares utilisations de la première per<strong>son</strong>nepar <strong>Philippe</strong> <strong>le</strong> <strong>Chancelier</strong> dans <strong>le</strong>s conduits <strong>son</strong>t <strong>le</strong>s textes où <strong>le</strong> poète prête sa voix auChrist pour sermonner <strong>le</strong>s Hommes 60 . Les désinences de la conjugai<strong>son</strong> à la premièreper<strong>son</strong>ne <strong>son</strong>t utilisées pour la rime, ce qui accroît l’importance de c<strong>et</strong>te énonciationverba<strong>le</strong> origina<strong>le</strong> <strong>et</strong> la m<strong>et</strong> en va<strong>le</strong>ur en la plaçant là où el<strong>le</strong> s’entend <strong>le</strong> mieux (nescio,circumfero, pondero). C<strong>et</strong>te introduction faite de jugement <strong>et</strong> de subjectivité est unemanière d’exorde <strong>et</strong> ne dépasse pas <strong>le</strong> cadre de c<strong>et</strong>te première strophe. Dès la deuxièmestrophe, la troisième per<strong>son</strong>ne du singulier est introduite, replaçant <strong>le</strong> poète en positiond’observateur extérieur. Il faut attendre la cinquième strophe pour r<strong>et</strong>rouverl’énonciation à la deuxième per<strong>son</strong>ne du singulier caractéristique des conduits moraux.Tous <strong>le</strong>s verbes y <strong>son</strong>t au futur antérieur (evaseris, fueris, veneris, poteris), apportantainsi une nuance conditionnel<strong>le</strong>. <strong>Philippe</strong> <strong>le</strong> <strong>Chancelier</strong> joue avec <strong>le</strong>s temps <strong>et</strong> <strong>le</strong>s pointsde vue pour exprimer l’universalité du problème qu’il dénonce. Jamais <strong>son</strong> jugement nes’est fait aussi per<strong>son</strong>nel <strong>et</strong> sévère que dans ce conduit.Ce texte particulièrement viru<strong>le</strong>nt figure dans <strong>le</strong> Roman de Fauvel. Ladeuxième strophe est sensib<strong>le</strong>ment transformée pour critiquer avec plus de précision lavaine recherche des biens <strong>et</strong> <strong>le</strong> péché de simonie :In prelatos refluitQuod a Roma defluitVersum est in habitumQuod merces, non meritum,Rome dictat iura.Romanorum singulis60 Les conduits Homo vide que pro te patior (n°13, analysé p. 249) <strong>et</strong> Quid ultra tibi facere (n°4, analysép. 161).192