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Faire travailler les finances - Social Watch

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mariage, le divorce, la succession, la tutelle et la gardede l’enfant pour tous <strong>les</strong> Iraquiens, quelle que soit leursecte 2 . De fait, l’article 41 de la Constitution contreditla garantie fondamentale contenue dans l’article 14 dela loi, qui établit que « <strong>les</strong> Iraquiens sont égaux devantla loi sans discrimination aucune de sexe ou de race ».Une telle contradiction compromet l’unité de la législationapplicable de manière universelle.À l’heure d’offrir une protection à la femme etd’interdire la violence exercée contre elle, <strong>les</strong> stipulationsconstitutionnel<strong>les</strong> aussi bien que <strong>les</strong> juridiquespeuvent s’avérer insuffisantes. La Constitution, parexemple, ne se réfère pas de façon spécifique à lafemme quand elle aborde le thème de la violence dansle chapitre sur <strong>les</strong> droits. L’article 4 ne considère pas laviolence conjugale comme un délit spécifique. L’article44 établit que « <strong>les</strong> Iraquiens sont libres de se déplacer,de voyager et de résider en Iraq ou en dehors », maisdans la pratique la loi ne permet pas qu’une femme demoins de 40 ans obtienne un passeport sans l’autorisationd’un tuteur. Pour prendre un autre exemple,la femme a droit à l’égalité des salaires, mais la loi neprévoit pas <strong>les</strong> mesures associées nécessaires quigarantissent l’égalité en matière de promotions professionnel<strong>les</strong>.De sorte que même si la Constitutionprévoit la non discrimination de jure contre la femme,il existe des facteurs juridiques, sociaux et culturelsqui représentent souvent autant de barrières de factopour son application. Le climat juridique et législatifdans la région du Kurdistan semble être assez positif.Par exemple, là-bas on applique la Loi Nº 188 sur leStatut Personnel, rédigée en 1959, mais considéréeprogressiste pour l’époque, et la Commission de lacondition de la femme a réussi à introduire quelquesamendements. En 2007 des conditions supplémentairesont été imposées pour <strong>les</strong> cas de polygamie, lacirconcision féminine a été interdite et <strong>les</strong> règlementationsrelatives au divorce ont été changées afin defavoriser davantage la femme.En 1986 l’Iraq a ratifié la Convention sur l’Éliminationde toutes <strong>les</strong> Formes de Discrimination àl’égard des Femmes (CEDAW), sous réserve des artic<strong>les</strong>2, 9 et 29. De tel<strong>les</strong> réserves, en effet, annulent<strong>les</strong> dispositions de la Convention sur l’égalité desfemmes et des hommes. Depuis le début de la transitionen 2003, <strong>les</strong> organisations de femmes ont vainementessayé que ces réserves soient retirées. D’autrepart, la Constitution ne comprend aucun article quireconnaisse que la ratification des conventions internationa<strong>les</strong>est contraignante pour l’État. De toutesmanières, le nouveau régime a rejeté <strong>les</strong> compromisratifiés par son antécesseur vis-à-vis des conventionsinternationa<strong>les</strong>, particulièrement la CEDAW, sous prétextequ’el<strong>les</strong> sont en contradiction avec la sharia 3 .2 Cette loi – qui comprenait le droit de conserver le logementfamilial après le divorce pendant une période de trois ans, lamême limite d’âge de mariage pour l’homme ou la femme,l’équivalence lors du divorce de la dot de la femme au prixde l’or au moment du divorce et l’exigence pour le mari deprouver sa capacité financière pour subvenir aux besoinsd’une deuxième femme avant de conclure un mariagepolygame – a été sujette à différents amendements au coursdes années en détriment de la situation des femmes.3 Un même rejet s’applique à la Résolution 1325 du Conseil deSécurité des Nations Unies, à l’égard de la femme, de la paixet de la sécurité.Participation dans la prise de décisionEn 2003 un système de quotas à été introduit pourla participation de la femme dans la vie politique etla nouvelle Constitution prévoit aussi des mesuresfavorisant <strong>les</strong> minorités, en décrétant dans l’article49 un quota pour la femme non inférieur à 25 % dessièges du Parlement. La Loi Électorale Nº 6 de 2005stipule que <strong>les</strong> listes des candidats pour <strong>les</strong> électionsdoivent également respecter ce quota. Lors des électionsde 2005, <strong>les</strong> femmes ont obtenu 87 sur <strong>les</strong> 275sièges de l’Assemblée Nationale (31 %). Lors desélections aux Conseils régionaux, par listes électora<strong>les</strong>fermées, el<strong>les</strong> ont obtenu 28 % des postes.De plus, l’adhésion au système de quotas aconsidérablement augmenté le nombre de femmesélues dans <strong>les</strong> Conseils gouvernementaux. Depuis2003 la quantité de femmes occupant des postesadministratifs à responsabilité, où l’on doit prendredes décisions, est passée de 12,7 % à 22,4 %. Alorsque dans la magistrature el<strong>les</strong> ne représentaientque 2% en 2006, dans l’exécutif el<strong>les</strong> ont eu plusde chance. En 2006 il y avait quatre ministres d’Étatet 342 hauts-fonctionnaires ; parmi el<strong>les</strong>, 8 soussecrétaires,22 conseillères et inspectrices généra<strong>les</strong>,86 directrices généra<strong>les</strong> et 215 sous-directricesgénéra<strong>les</strong>. Cependant il convient de signaler que <strong>les</strong>obstac<strong>les</strong> à franchir pour atteindre et conserver detels postes sont plus grands et plus nombreux pour<strong>les</strong> femmes.Un héritage de restrictions culturel<strong>les</strong>Pour la femme, le patrimoine culturel – fondé sur latradition plus que sur des motifs religieux – est unedes références de base de son apprentissage desconduites acceptab<strong>les</strong>. L’image stéréotypée de lafemme s’est maintenue pendant des sièc<strong>les</strong> du faitque l’État a contribué, tout au long de son histoire,à la perpétuer afin d’éviter d’entrer en conflit avecla société et ses leaders religieux et culturels. Cetteimage est si bien enracinée que, comme le démontrentplusieurs études, la perception que certainesfemmes ont vis-à-vis de leur propre sexe ne s’éloigneguère de celle que <strong>les</strong> hommes soutiennent.L’acceptation par la femme de cette fausseimage d’elle-même offre à l’État une excuse pourrepousser la promulgation d’une législation qui amélioreraitla situation dans laquelle elle se trouve. Lasociété justifie également l’isolement de la femmecomme étant une façon de garantir sa protection. Dece fait, le plus fort bastion d’intolérance culturelle àl’égard de la femme continue à être la famille, au seinde laquelle la violence masculine est acceptée en tantque droit disciplinaire ou préventif. Par exemple, unrapport du ministère des Droits Humains de la régiondu Kurdistan signale que pendant <strong>les</strong> huit premiersmois de l’année 2006, 239 femmes furent pousséesà s’immoler par le feu. Cette situation ne change pasbeaucoup dans d’autres domaines et <strong>les</strong> assassinatsassociés à l’honneur sont habituels dans le centreet le sud de l’Iraq. Il est probable que le nombre deplaintes déposées pour de tel<strong>les</strong> pratiques soit inférieurau nombre réel d’incidents en raison de la faiblecapacité de contrôle des organisations de femmes,ainsi qu’aux préjugés des médias.ConclusionsL’autonomisation des Iraquiennes doit constituer un objectifglobal et non pas une simple cible secondaire, car lafemme a un rôle égalitaire à remplir dans le développementgénéral économique, politique et social. Des preuves existentpourtant, qui démontrent que <strong>les</strong> Iraquiennes subissentde façon exagérée <strong>les</strong> contrecoups de la rétraction dupouvoir de l’État, de l’insécurité découlant de l’instabilitépolitique, de l’effondrement des activités économiqueset de la détérioration des structures socia<strong>les</strong>, tout celacomme conséquence des conflits en cours. L’augmentationde la violence à l’encontre des femmes constitue,en ce moment, la répercussion la plus dangereuse de latransition et requiert l’intervention d’urgence de tous <strong>les</strong>acteurs de la société. La femme s’est réfugiée au sein desa communauté, de sa secte ou de sa tribu, en quête deprotection, faisant chavirer ainsi <strong>les</strong> progrès de près d’unsiècle de modernisation entrepris par l’État.Le manque de sécurité a entravé la progression dudéveloppement humain et a endommagé <strong>les</strong> mécanismespour l’autonomisation véritable. Ceci dit, il reste encoreune chance pour améliorer la situation. Parmi <strong>les</strong> responsabilitésspécifiques de l’État s’inscrivent <strong>les</strong> suivantes :• Amender <strong>les</strong> lois (et la Constitution) pour supprimer<strong>les</strong> dispositions, omissions et contradictionsqui perpétuent la discrimination.• Garantir la liberté d’opinion afin d’encourager ledébat et le dialogue publics ; amplifier <strong>les</strong> campagnesde sensibilisation publique qui produisentde profonds changements quant aux stéréotypesde la femme diffusés par <strong>les</strong> médias.• Créer un nouveau climat dans le domaine dutravail qui s’éloigne de la division actuelle baséesur <strong>les</strong> rô<strong>les</strong> limités de la femme et qui visent à lacantonner, en tant que travailleuse, aux secteursà faible productivité.• Combattre la culture de la domination et de la marginalisationet diffuser une culture de paix et detolérance pour éliminer sous toutes ses formesla violence à l’égard de la femme et mettre fin à saperpétuation comme partie de la culture acceptée.• Offrir de nouvel<strong>les</strong> chances par le biais de la réformedu système de prêts dans <strong>les</strong> banquespubliques, en éliminant la clause qui exige lapossession de biens immobiliers comme garantiesubsidiaire et en promouvant <strong>les</strong> servicesbancaires qui favorisent la femme.• Réformer <strong>les</strong> systèmes éducatifs et <strong>les</strong> programmesd’enseignement pour changer le regard dela société vis-à-vis de la violence à l’égard desfemmes et, dans le but d’y mettre fin, inculquerle sens de la responsabilité partagée.• Elargir l’accès aux projets de micro-crédit et autravail effectué depuis leur domicile aux femmesn’ayant reçu qu’une instruction et une formationprécaires, aux femmes du milieu rural, aux femmesâgées et aux veuves ayant famille à charge.Par l’adoption d’une attitude ferme en ce qui concerne laculture des droits humains, de l’égalité des chances et del’égalité entre <strong>les</strong> deux sexes, le Gouvernement pourraitmettre fin une fois pour toutes dans le pays à la culturecentenaire de la discrimination à l’égard des femmes. n<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 105 Iraq

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