à plusieurs voix. ce que les entretiens collectifs in situ peuvent ...

Document téléchargé depuis www.cairn.info - univ_montp1 - - 193.51.157.40 - 12/03/2012 10h32. © Ophrysqu’il adopte lors des discussions politiques qu’il a avec lui prolonge indéniablementdes inégalités de position professionnelle qui se révèlent donc fortementstructurantes. Elles prolongent d’ailleurs sans doute elles-mêmes desdifférences de milieux, Stéphane étant issu d’une famille moins bien dotée encapitaux économique et culturel que son ami.** *Céline BRACONNIERLes entretiens collectifs in situ ne sont pas des focus groups, dans lesquelsdes enquêtés qui ne se connaissent pas sont invités par des chercheurs àdiscuter sur un thème en laboratoire (39). S’ils sont assurément proches desentretiens de type ethnographique en ce qu’ils consistent à interroger, dans lecadre d’enquêtes de longue durée, des individus dans leur environnementquotidien (chez eux, au bureau, au café, au jardin) sur leur parcours familial,professionnel, résidentiel, politique, ils s’en distinguent toutefois du fait deleur nature collective. D’une part, en neutralisant les effets de censure exercéspar les normes socialement dominantes, ils favorisent l’expression d’uneparole à l’échelle où les conversations se produisent dans la vie sociale ordinaire.D’autre part, ils ménagent une place pour ceux qui sont le moins prédisposésà prendre la parole et qui puisent dans la présence de l’autre la forced’affronter cette épreuve. S’adressant à la fois à un enquêteur et à un prochesusceptible de réagir à ses propos, l’enquêté flanqué d’un double ne coconstruitpas non plus sa relation au chercheur de la même façon que lorsqu’il esten face à face avec lui. Les paroles proférées comme les attitudes adoptéesdans ce cadre sont d’une nature particulière, plus proches de celles entendueset observées par l’ethnographe dans le cadre de conversations informellesqu’il peut avoir avec des groupes de pairs que de celles recueillies dans lecadre d’une relation individuelle avec un enquêteur. En outre, les donnéesproduites ménagent une mise en abyme particulièrement propice à l’analysedu rôle des interactions dans la production des comportements puisque l’enquêteurest en mesure d’observer des relations entre des individus à proposdesquelles il peut aussi les questionner. Le contexte « conversationnel »ménagé par la situation d’enquête est donc susceptible, dans ce cas, d’éclairerles modalités de fonctionnement du contexte microenvironnemental danslequel les enquêtés évoluent au quotidien et dans lequel ils produisent, entreautres, leurs votes (ou leur abstention).Si l’entretien collectif in situ permet donc de produire des données susceptiblesd’enrichir, en le diversifiant, le corpus qui alimente une enquête deterrain, il ne permet toutefois pas plus qu’aucune autre méthode, à lui seul,d’épuiser la complexité du monde social. Ce plaidoyer en faveur de l’usage(39) Nous souscrivons aux observations de Lefébure (2011) concernant la confusion induite parl’usage multiforme du terme focus group dans la littérature anglo-saxonne. Lefébure propose declarifier les choses en faisant du focus group un cas particulier d’entretien collectif, cette dernièredésignation devenant donc générique. En ajoutant un qualificatif (in situ ou ethnographique) à ceterme, nous avons essayé de mettre en lumière les caractéristiques d’un type particulier d’entretiencollectif auquel on s’était jusque-là peu intéressé même si on le pratique depuis longtemps.89Document téléchargé depuis www.cairn.info - univ_montp1 - - 193.51.157.40 - 12/03/2012 10h32. © Ophrys