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à plusieurs voix. ce que les entretiens collectifs in situ peuvent ...

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Document téléchargé depuis www.cairn.<strong>in</strong>fo - univ_montp1 - - 193.51.157.40 - 12/03/2012 10h32. © OphrysCél<strong>in</strong>e BRACONNIERgauche. Mais il ne le dira pas, tout d’abord, laissant croire, au contraire, en<strong>in</strong>sistant sur son identité politi<strong>que</strong>, qu’il lui serait resté fidèle. Une <strong>in</strong>terventionbeaucoup plus directe et tranchée de sa jeune belle-sœur, nouvellementarrivée dans la commune et qui, tout à coup, lui coupe la parole en manifestantune <strong>ce</strong>rta<strong>in</strong>e exaspération, fait basculer l’entretien. Elle y expli<strong>que</strong> avoirsollicité en va<strong>in</strong> une aide municipale pour un logement, précisant ne pasmême avoir été reçue par l’élu à <strong>ce</strong>tte occasion. Cette révélation emporte unchangement de registre chez l’homme, qui se met lui aussi à égra<strong>in</strong>er <strong>les</strong>griefs à l’égard du maire pour, f<strong>in</strong>alement, avouer, tout penaud, qu’il n’a eneffet pas voté pour lui. Il y a fort à parier qu’<strong>in</strong>terrogé seul <strong>ce</strong>t ouvrier dusecteur des transports n’aurait sans doute pas révélé le contenu de son vote.Dans une ancienne banlieue rouge encore gouvernée localement par des élusPC, et dans le milieu des héritiers du monde ouvrier ancien, il peut s’avérerdifficile de révéler le contenu d’un vote devenu non conforme (19).Les vertus libératoires de l’entretien collectif se mesurent aussi aux proposf<strong>in</strong>alement tenus par Fleur, gardienne dans la cité de Sa<strong>in</strong>t-Denis, <strong>que</strong> nousavons ma<strong>in</strong>tes fois cherché à faire parler de son rapport au politi<strong>que</strong> dans lecadre d’<strong>entretiens</strong> en fa<strong>ce</strong> à fa<strong>ce</strong> ou de discussions <strong>in</strong>formel<strong>les</strong> et qui a, àcha<strong>que</strong> fois, manifesté une capacité <strong>ce</strong>rta<strong>in</strong>e à esquiver nos <strong>que</strong>stions. Aubout de <strong>plusieurs</strong> années d’enquête, nous n’avions de réponse claire ni sur sonvote, qu’elle s’efforçait de conserver secret, ni sur <strong>ce</strong> <strong>que</strong> <strong>ce</strong>tte qu<strong>in</strong>quagénairepensait du quartier et de ses habitants. Et puis, un jour, nous l’avons vuearriver au pied d’un immeuble, alors <strong>que</strong> nous <strong>in</strong>terpellions une habitante qu<strong>in</strong>ous apprenait son procha<strong>in</strong> déménagement. Elle, d’habitude si réservée, aalors pris ple<strong>in</strong>ement part aux échanges, enrichis en cours de route par l’arrivéede deux autres qu<strong>in</strong>quagénaires, puis par le fils de l’une d’entre el<strong>les</strong>.Parmi eux, seul le jeune homme avait déjà ac<strong>ce</strong>pté de remplir notre <strong>que</strong>stionnairesortie d’urnes, systémati<strong>que</strong>ment proposé aux électeurs lors de cha<strong>que</strong>scrut<strong>in</strong> depuis 2002. Ce jour-là, toutes ont <strong>ce</strong>pendant dit d’une même <strong>voix</strong>leur envie partagée de partir de la cité et énoncé très librement <strong>les</strong> raisonsprofondes de <strong>ce</strong> désir, tout en ayant conscien<strong>ce</strong> de lever un tabou. El<strong>les</strong> ontéprouvé un <strong>ce</strong>rta<strong>in</strong> soulagement à dire tout haut <strong>ce</strong> <strong>que</strong>, d’habitude, el<strong>les</strong>cachent une fois sorties de leur <strong>in</strong>timité familiale. Et tout <strong>in</strong>di<strong>que</strong> <strong>que</strong> le cadrecollectif y est pour <strong>que</strong>l<strong>que</strong> chose :« Fleur : Il y a un gros problème sur Sa<strong>in</strong>t-Denis. Déjà, de mixité. Déjà, quand on a un logementvide, on le fait toujours visiter à un Arabe ou un Noir, c’est l’expression. […]Avant, quand je travaillais, j’en voyais même pas dix des petits Africa<strong>in</strong>s dehors, car yavait pas beaucoup de famil<strong>les</strong> africa<strong>in</strong>es. Il y en avait c<strong>in</strong>q, six… Ma<strong>in</strong>tenant, la moitié,c’est eux.Christiane : C’est vrai <strong>que</strong> c’est un peu beaucoup, ça, dans le bâtiment. Et j’ai fait le calcul: des Français purs, on n’est plus énorme.Fleur : Ah non ! Il y en a quasiment pas.Christiane : On doit être à peu près une diza<strong>in</strong>e. Et encore.Fleur : Là-bas, j’ai fait le re<strong>ce</strong>nsement des Français. J’en ai <strong>que</strong> deux et, dans le bâtiment(19) Enquête PAECE, Sa<strong>in</strong>t-Denis, entretien avec Christian, 45 ans, employé dans un stade,Isabelle, 42 ans, mère au foyer, et Lauren<strong>ce</strong>, environ 30 ans, le 9 mars 2008.71Document téléchargé depuis www.cairn.<strong>in</strong>fo - univ_montp1 - - 193.51.157.40 - 12/03/2012 10h32. © Ophrys

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