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Claude Gueux - CNDP

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teledocle petit guide télé pour la classe20082009Au siècle de Maupassant<strong>Claude</strong> <strong>Gueux</strong>Un téléfilm d’Olivier Schatzky(2009),scénario de Pierre Leccia,d’après Victor Hugo,avec Samuel Le Bihan (<strong>Claude</strong><strong>Gueux</strong>), Thomas Chabrol(M. Delacelle), RobinsonStévenin (Antoine), SandrineLe Berre (Louise).1hPlaidoyer contre le désespoir des plus pauvres etcontre la peine de mort, le court roman de VictorHugo est ici adapté par Olivier Schatzky qui recréele décor dur d’un Paris miséreux et celui d’une prisoninhumaine où un individu au départ simple ethonnête va, sous le poids de l’injustice qui le frappe,commettre un crime auquel rien ne le prédisposait.FRANCE 2MARDI 31 MARS, 20 h35


Le poids de l’injusticeFrançais, troisième, secondeDans le Paris des années1820, <strong>Claude</strong> <strong>Gueux</strong>, unouvrier au chômage, estcontraint de voler pournourrir sa famille. Arrêté,il est condamné à cinq ansde détention dans uneprison soumise auxdécisions arbitraires etinjustes de son gardienchef,M. D. Très vite, <strong>Claude</strong><strong>Gueux</strong> s’attache à Antoine,un jeune homosexuelvictime d’autres prisonnierset à qui il va donner saprotection. Mais l’amitiéentre les deux détenus estde courte durée, M. D. ayantdécidé de transférer Antoinedans une autre prison.En perdant Antoine, <strong>Claude</strong><strong>Gueux</strong> perd tout. Et quand,à la question « Pourquoi meséparez-vous de lui ? »,M. D., dans sa jalousie etson obstination, répondsimplement « parce que »,<strong>Claude</strong> <strong>Gueux</strong> passe à l’acte.Il prémédite alors lemeurtre qui le conduira àl’échafaud.Rédaction Barbara Velasco, professeur delettres modernesCrédits photos France 2 / Jean PimentelÉdition Anne PeetersMaquette Annik GuéryCe dossier est en ligne sur le sitede Télédoc.www.cndp.fr/tice/teledoc/Écrire, décrire : les problèmes poséspar l’adaptation> Comparer l’incipit du livre et l’exposition dufilm et dire en quoi ce début est un bon exempledu travail d’adaptation.Ce qu’un récit écrit peut se permettre pose parfois,à l’heure de son adaptation audiovisuelle,des difficultés qu’il va falloir résoudre et des choixqui impliquent des partis pris.L’exemple le plus éclairant dans le texte de VictorHugo est l’incipit. Dans son récit, l’écrivain nouspropose un sommaire rétrospectif des circonstancesqui conduisent <strong>Claude</strong> <strong>Gueux</strong> à voler. Les conditionsde ce vol ne sont pas racontées par Hugo:«L’homme vola. Je ne sais ce qu’il vola, je ne saisoù il vola.» Le réalisateur avait la possibilité defaire entendre la voix off d’un narrateur extradiégétiquemais il a préféré mettre en scène le larcinque commet <strong>Claude</strong> <strong>Gueux</strong>. Il s’agissait donc d’inventerla scène passée sous silence par Hugo. Lacaméra va, ainsi, décrire le vol: un homme descendd’un fiacre, laisse tomber sa bourse devant <strong>Claude</strong><strong>Gueux</strong> ; celui-ci, tenté, va s’en saisir, partir encourant sous le regard de l’homme qui pourral’identifier et donc le faire condamner. Le scénaristea livré ainsi son interprétation et recréé ce quiaurait pu avoir lieu. Finalement, il a fait le mêmetravail de mise en fiction que Victor Hugo luimêmelorsqu’il transpose en récit l’histoire de<strong>Claude</strong> <strong>Gueux</strong> à partir de sa lecture de La Gazettedes tribunaux.L’autre problème posé par le récit de Victor Hugoest celui de l’intervention du narrateur et du regardqu’il pose sur <strong>Claude</strong> <strong>Gueux</strong>, fait de sympathie et decompassion. La caméra en choisissant ses angles deprises de vue, en privilégiant les gros plans, vainduire une subjectivité. De même, la directiond’acteur ou le recours à la musique orientera lepoint de vue du réalisateur sur le personnage.La seconde partie du récit d’Hugo est polémique.Il fait un vibrant plaidoyer contre la société quidélaisse les miséreux, pour une éducation meilleurepour tous les hommes, contre les dysfonctionnementsde la justice et, enfin, contre la peine demort. L’auteur de l’adaptation a dû trancher, nepouvant aborder tous ces sujets de polémique quiauraient prolongé de beaucoup la durée du film.L’accent a donc été porté sur le personnage de<strong>Claude</strong> <strong>Gueux</strong>, son amitié avec Antoine (Albindans le roman) et les raisons qui ont poussé <strong>Claude</strong><strong>Gueux</strong> au meurtre du directeur de la prison. Lefilm ne se finit pas là où se termine le récitd’Hugo.Le personnage d’Antoine/Albin> Relever ce qui dans le personnage d’Antoinen’apparaît pas dans l’œuvre de Victor Hugo etexpliquer ces différences.Dans le récit de Victor Hugo, Antoine s’appelle Albin.Pourquoi l’auteur du film a-t-il choisi de changer deprénom? Parce qu’il a créé un autre personnage avecune autre histoire, un autre parcours. La narrationralentit à partir du moment où <strong>Claude</strong> <strong>Gueux</strong> etAntoine se lient d’amitié. C’est le cœur du film quibat dans cette relation qu’entretiennent les deuxhommes. Victor Hugo décrit cette relation en lestermes suivants: «amitié de père à fils». Ils partagentles mêmes choses, le travail, la couche, lespromenades. Et surtout, Albin partage sa pitanceavec <strong>Claude</strong> <strong>Gueux</strong> qui est un «gros mangeur».L’auteur du film a construit autour d’Antoine unetoute autre histoire que celle que Victor Hugo décritbrièvement. Antoine devient un jeune homme qui avolé par amour pour un homme. De plus, dès sa rencontreavec <strong>Claude</strong> <strong>Gueux</strong>, on apprend qu’il est abusésexuellement par des détenus sous l’œil bienveillantet complice des geôliers et du directeur de la prison.Enfin, il doit payer son tribut, son morceau de pain,à ses agresseurs. <strong>Claude</strong> <strong>Gueux</strong> va alors devenir son«protecteur» et leur étreinte chaste peut, implicitement,évoquer un rapport amoureux: «Je suis tafamille maintenant», dit Antoine à <strong>Gueux</strong> en le serrantdans ses bras. Cette dimension homosexuelledes relations entre Antoine et <strong>Claude</strong> <strong>Gueux</strong> ainsique le statut des homosexuels dans les prisons estun sujet que l’auteur du film a souhaité aborder. Unrécit en appelle un autre, n’est-ce pas là égalementle travail de l’adaptation qui laisse une marge deliberté à celui qui s’empare d’une histoire?Néanmoins, dans les deux textes, la symboliquechrétienne du partage du pain évoque la fraternitéentre les hommes. Les deux hommes partagent leursavoir, la menuiserie pour l’un, «apprendre à lire lefil du bois», et l’écriture pour l’autre, apprendre à lirele mot «liberté» tracé sur les murs de la cellule.<strong>Claude</strong> <strong>Gueux</strong> «s’accomode» du froid et prête sonhabit à Antoine qui, en échange, lui donne sa rationde pain. Leur relation est donc fondée, tant dansl’œuvre de Victor Hugo que dans le film d’OlivierSchatzky, sur le don et non sur l’extorsion. Et cesdons variés sont toujours signifiés dans le film pardes gros plans ou des plans serrés sur les mains.•Pour en savoir plus• HUGO Victor, <strong>Claude</strong> <strong>Gueux</strong>, Hachette éducation,coll. « Bibliocollège», 2007.

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