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Le livret - Délégation générale à la langue française et aux langues ...

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« On m’a imputé devouloir être original<strong>et</strong> faire autrementque les autres ».Jean-Jacques Rousseau, <strong>Le</strong>s ConfessionsSilvia Ricci <strong>Le</strong>mpenNée <strong>à</strong> Rome en 1951, vivant en Suisse romande depuis longtemps, elle estécrivaine, journaliste, enseignante universitaire, docteure en philosophie<strong>et</strong> féministe. Elle se consacre aujourd’hui principalement <strong>à</strong> son activité deromancière, qui lui a valu de nombreux prix : Prix Michel-Dentan, 1991, pourson premier roman Un homme tragique (l’Aire), Prix Schiller, 1996, pour <strong>Le</strong>Sentier des éléphants <strong>et</strong> Prix Paul Budry, 2001, pour son roman Avant (l’Aire).La traduction italienne de Un homme tragique a été choisie comme livre dumois de mars 2011 par les auditeurs de l’émission littéraire Fahrenheit (Unafamiglia perf<strong>et</strong>ta, 2010, Iacobelli). Après avoir longtemps écrit uniquement enfrançais, Silvia Ricci <strong>Le</strong>mpen se réapproprie actuellement sa <strong>la</strong>ngue maternellecomme <strong>la</strong>ngue littéraire <strong>et</strong> son premier roman écrit directement en italien vaparaître en 2012, en même temps qu’un prochain roman en français.AutrementAutrement adv. ÉTYM. 1080,altrement.1 D’une façon autre, d’une manièredifférente. p Différemment. Faisonsautrement […]Vx (suivi d’un nom propre). Qu’onappelle aussi. p Alias. Henri Beyle,autrement Stendhal.(Suivi d’un nom commun). End’autres termes (p C’est-<strong>à</strong>-dire).2 Dans un autre cas, dans le cascontraire. p Sans (sans ce<strong>la</strong>, sansquoi), sinon. Faites attention,autrement vous aurez affaire <strong>à</strong> moi […]p Faute (faute de ce<strong>la</strong>, faute de quoi).Pop. Autrement que ça.3 PAS AUTREMENT : pas beaucoup.p Guère, peu. Ce<strong>la</strong> n’est pasautrement utile. […]4 Comparatif de supériorité(portant sur un adjectif ou unadverbe). p Plus ; beaucoup. Elle estautrement jolie, autrement mieuxque sa sœur […] . — Absolt. Bienautrement, tout autrement : beaucoupplus, beaucoup mieux. […]« Puis-je autrementmarcher que ne fait mafamille ? Veut-on quej’aille droit quandon y va tortu ? »autrementJean de La Fontaine, Fables10 11


Silvia Ricci <strong>Le</strong>mpenPour LouiseautrementCe ne sera pas comme tu l’auras imaginé. Souvent ce sera piremais des fois mieux, si, si, je t’assure, tu vas être étonnée.Douze grains de riz brillent de joie dans ta bouche <strong>et</strong> tu me faisremarquer en rigo<strong>la</strong>nt (car ton vocabu<strong>la</strong>ire est encore limité)que j’ai en tout cas réussi ma bulle de savon : elle se détachebarbapapesque, translucide, irisée, du p<strong>et</strong>it anneau en p<strong>la</strong>stiqueoù j’ai soufflé, <strong>et</strong> vole vers toi en ondoyant majestueusement.Tes yeux stel<strong>la</strong>ires suivent son traj<strong>et</strong>. Tu ris encore plus fortquand elle éc<strong>la</strong>te dans ta main.Ce ne sera pas comme tu l’auras imaginé. Ton p<strong>et</strong>it cerveauest déj<strong>à</strong> très performant, <strong>et</strong> tu désignes sans hésiter, de tonminuscule index nacré, sur les albums que tu feuill<strong>et</strong>tesin<strong>la</strong>ssablement, tes dix ou douze personnages familiers ; mêmeplus jeunes de quinze ans ou en tenue de ski, tu les reconnaisavec satisfaction ; mais devant l’ancienne photo de c<strong>la</strong>sse turestes coite, <strong>la</strong> photo de c<strong>la</strong>sse de ta grand-mère l’année dubac. C’est <strong>la</strong> brun<strong>et</strong>te du dernier rang, perchée sur un mur<strong>et</strong>,inexplicablement souriante face <strong>à</strong> l’objectif.Tu auras c<strong>et</strong> âge-l<strong>à</strong>. Tu seras amoureuse ou tu voudras devenirastronaute. Ou peut-être rien de tout ce<strong>la</strong>, le monde que tuhabiteras, kaléidoscope de fragments de vies virtuelles, oraged’émotions électroniques, te suggérera des proj<strong>et</strong>s <strong>et</strong> des rêvesque ta grand-mère sera incapable même de concevoir. Mais peuimporte. Ce que j’essaie de te dire, c’est que, de toute façon,ça se passera autrement.La jeune Italienne (celle qui sourit sur <strong>la</strong> photo de c<strong>la</strong>sse)n’a pas fermé l’œil dans le wagon-couch<strong>et</strong>tes, mais elle n’estpas partie en Suisse toute seule pour dormir. Elle a écouté lesronflements, les toussotements, l’avide absorption de toutl’oxygène disponible par les cinq autres corps coincés dans lecompartiment, les annonces nocturnes, caverneuses des hautparleurs– Florence, Bologne, Mi<strong>la</strong>n – dans les gares désertes.<strong>Le</strong> frottement exaltant des roues de fer sur les rails lisses pointésvers le Nord. Maintenant le train file le long du Rhône vertde-gris– le soleil de juill<strong>et</strong> soulève déj<strong>à</strong> le ciel <strong>à</strong> une altitudevertigineuse au-dessus des montagnes, mais n’atteint pas encorele fond de <strong>la</strong> vallée. <strong>Le</strong> couple d’immigrés italiens fume dans lecouloir, mais le vieux monsieur suisse, membre du Club alpin,veut lui faire les honneurs de ce pays <strong>à</strong> deux étages : « Regardez,mademoiselle : les Dents du Midi ! ». Elle lève les yeux vers <strong>la</strong>cathédrale de roche, <strong>la</strong> vaste base enfouie dans l’ombre <strong>et</strong> lessept cimes miroitantes, frangées des taches b<strong>la</strong>nches des g<strong>la</strong>ciers.Tel sera le bonheur, vivre sur les somm<strong>et</strong>s.Tu connais <strong>la</strong> montre sous trois espèces : le son du mot,l’image sur le livre <strong>et</strong> l’obj<strong>et</strong> attaché <strong>à</strong> mon poign<strong>et</strong>. Tu neconnais pas encore le mot « montre » imprimé, <strong>et</strong> surtout tune sais pas <strong>à</strong> quoi ça sert. Ton futur ne va pas au-del<strong>à</strong> de <strong>la</strong>porte d’entrée, par <strong>la</strong>quelle tu espères, <strong>à</strong> chaque bruit demoteur, voir apparaître l’un de tes parents. Mais tu verras, lesimages sortent des livres <strong>et</strong> les parents rentrent par <strong>la</strong> fenêtre ;quant <strong>aux</strong> heures, il est rare qu’elles durent soixante minutes.Et les somm<strong>et</strong>s ? Ah, les somm<strong>et</strong>s. En principe, ils ne bougentpas – sauf qu’on annonce, pour les prochaines décennies,<strong>la</strong> fonte partielle des neiges éternelles.12 13


Caractère« J’appelle caractèred’un homme samanière habituelled’aller <strong>à</strong> <strong>la</strong> chasseau bonheur. »Stendhal, Vie de Henry Bru<strong>la</strong>rdcaractère« La manière de former les idéesest ce qui donne un caractère<strong>à</strong> l’esprit humain. »Jean-Jacques Rousseau, Émile ou de l’éducationCaractère n.m. ÉTYM. <strong>la</strong>t. character ;grec kharatêr « signe gravé, empreinte ».I. Marque, signe distinctif. 1 (xvi e ).Signe gravé ou écrit, élémentgraphique d’une écriture. p Chiffre,l<strong>et</strong>tre, signe, symbole, pictogramme ;idéogramme, l<strong>et</strong>tre. […]2 (1675). Techn. <strong>Le</strong>ttre utiliséepour l’impression typographique. pPlomb, type ; l<strong>et</strong>tre ; cadrat, cadratin,espace, matrice, poinçon. […] Forme<strong>et</strong> type des caractères p Casse. […]II (xvii e ). Signe ou ensemblede signes distinctifs. 1 Sc. <strong>et</strong>cour. Trait propre (<strong>à</strong> unepersonne, <strong>à</strong> une chose), quiperm<strong>et</strong> de distinguer. pAttribut, caractéristique,indice, marque, particu<strong>la</strong>rité,propriété, qualité, signe, trait. […]Avoir tel ou tel caractère. p Nature.Conférer, revêtir tel ou tel caractère. pQualité, titre. […] Un caractère desimplicité, de distinction, de beauté.p Air, allure, apparence, aspect,cach<strong>et</strong>, extérieur, figure. […]III. 1 (1665). « Ensemble des manièreshabituelles de sentir <strong>et</strong> de réagir quidistinguent un individu d’un autre »(La<strong>la</strong>nde). Étude des caractères. pCaractérologie, psychologie. Élémentde l’individualité. p Personnalité,15tempérament ; constitution. […]— Fam. Avoir un sale, un fichu, unfoutu caractère […]Littér. Manière d’être morale.|L’élévation, <strong>la</strong> bassesse du caractère.p Grandeur (d’âme). Un caractèrebas, abject, bestial. p Âme.2 (1736). Avoir du caractère, uncaractère déterminé, énergique. pCourage, détermination, énergie,ferm<strong>et</strong>é, résolution, ténacité, trempe,volonté. […] Littér. Individualité,originalité, qualités morales. pPersonnalité. Un homme de grandcaractère. 4 (xvii e ). Mœurs (d’unepersonne, d’un groupe). Peindre,décrire des caractères. […]Armel JobArmel Job est né en 1948 <strong>à</strong> Heyd(Durbuy) dans une famille modeste(son père était mate<strong>la</strong>ssier). Il estlicencié-agrégé en philologie c<strong>la</strong>ssiquede l’université de Liège. Il enseignele grec <strong>et</strong> le <strong>la</strong>tin pendant vingt ans,devient directeur de son école avant dequitter l’enseignement pour l’écriture.<strong>Le</strong>s récits puis les romans qu’il apubliés en France <strong>et</strong> en Belgique ontété couronnés de nombreux prix, dontle Prix Emmanuel-Roblès <strong>et</strong> le Prix dujury Giono.


Armel Jobcaractère<strong>Le</strong> caractère de gravitéÀ l’âge de septante-quatre ans, une semaine après sonanniversaire, mon père rentra de <strong>la</strong> pêche <strong>et</strong> déposa sur <strong>la</strong>table de <strong>la</strong> cuisine deux truites enveloppées dans une feuillede rhubarbe sauvage mais, au lieu de ranger <strong>la</strong> canne dans ledébarras comme il le faisait d’habitude, il ressortit, passa dansle garage <strong>et</strong> suspendit son attirail sous le p<strong>la</strong>fond <strong>aux</strong> croch<strong>et</strong>sprévus pour le rangement d’hiver. Or, on n’était que le 15 août<strong>et</strong>, depuis qu’il y avait des poissons dans l’Ourthe, qui cou<strong>la</strong>it<strong>à</strong> quelques enjambées derrière <strong>la</strong> maison, il avait sans exceptionpêché chaque soir jusqu’<strong>à</strong> <strong>la</strong> date de <strong>la</strong> ferm<strong>et</strong>ure. À ma mère,il déc<strong>la</strong>ra : « C’est fini, je n’irai plus. »Il toucha <strong>à</strong> peine <strong>à</strong> son souper, puis monta se coucher. <strong>Le</strong>lendemain matin, il prétendit qu’il était incapable de se lever.Il n’avait pas de fièvre, il ne se p<strong>la</strong>ignait de rien en particulier,sauf d’une grande <strong>la</strong>ssitude. Il resta au lit, mu<strong>et</strong>, somnolent oules yeux perdus dans le vague. Après quelques jours, le docteurvint l’examiner. Il l’ausculta, lui tapota l’épaule <strong>et</strong> lui conseil<strong>la</strong>de se reposer. Redescendu <strong>à</strong> <strong>la</strong> cuisine, il prescrivit un fortifiant<strong>et</strong>, pour tout diagnostic, prononça : « Ce<strong>la</strong> ne présente aucuncaractère de gravité. » Ce soir-l<strong>à</strong>, mon père sortit un instant dusilence pour dire <strong>à</strong> ma mère : « Je me demande qui sera <strong>à</strong> monenterrement. » La pauvre était effondrée. Je montai voir monpère pour le prier d’arrêter de dire des bêtises. « Ce que tu as neprésente aucun caractère de gravité », répétai-je fidèlement dansl’intention de lui faire <strong>la</strong> leçon.Mon père n’avait pas une longue pratique du français.C’était une <strong>la</strong>ngue dont il avait acquis <strong>la</strong> conversation courantesur le tard <strong>et</strong> devant <strong>la</strong>quelle il restait plein de curiosité. <strong>Le</strong>sexpressions inhabituelles, les tournures rares le fascinaient. Il lesrecueil<strong>la</strong>it comme un collectionneur constitue une collection.Dès qu’il en tenait une nouvelle, il s’ingéniait <strong>à</strong> <strong>la</strong> faire entrerde gré ou de force dans <strong>la</strong> conversation où elle détrônait <strong>la</strong>trouvaille précédente. L’énergie du désespoir, <strong>la</strong> cote d’amour,le barreau de chaise, les affaires cessantes, le gain de cause, <strong>la</strong>mode de Br<strong>et</strong>agne <strong>et</strong> une multitude d’autres locutions quej’ai oubliées s’étaient ainsi succédé dans sa bouche. Lorsquele caractère de gravité r<strong>et</strong>entit <strong>à</strong> ses oreilles, pour <strong>la</strong> premièrefois depuis des jours, il sourit. D’un air pensif <strong>et</strong> ravi, ilreprit plusieurs fois : « Aucun caractère de gravité… » Tout<strong>à</strong> coup, il semb<strong>la</strong>it même apaisé, comme si c<strong>et</strong> emploi de« caractère » dont il possédait l’usage ordinaire, m’ayant assezreproché d’en avoir un exécrable, lui révé<strong>la</strong>it enfin <strong>la</strong> natureprofonde du mal mystérieux dont il était accablé.Il demeura encore alité deux semaines, toujours plus faiblemalgré le fortifiant, mais assurant sereinement <strong>à</strong> ses amis quile visitaient que sa situation n’avait aucun caractère de gravité.<strong>Le</strong> matin de sa mort, il le répéta <strong>à</strong> ma mère puis, m’attirantprès de ses lèvres, il me fit ses ultimes recommandations.Il repose maintenant au cim<strong>et</strong>ière du Romain, au bordde <strong>la</strong> rivière qu’il aimait tant. Sur sa tombe, conformément<strong>à</strong> ses dernières volontés, j’ai fait graver : « La mort ne présenteaucun caractère de gravité. »16 17


ChezChez prép. ÉTYM. chiese « maison »,<strong>la</strong>t. casa.1 a Dans <strong>la</strong> demeure de, au logis de.Venez chez moi. […]b Dans le local professionnel de.Je vais chez le coiffeur. […]— Dans le service, l’émission de.Il passe demain chez Untel.c N. m. invar. (1690). |CHEZ-MOI, Chez-Soi : domicilepersonnel (avec valeur affective).Avoir un chez-soi.d CHEZ NOUS : dans le pays, <strong>la</strong>région du locuteur. — Loc. adj. (fam.).Bien de chez nous : typiquementfrançais. […]— Loc. fam. (surtout oral). Adj. ounom. DE CHEZ <strong>et</strong> adj. ou n. répété :intensif. | Il est nul de chez nul :complètement nul.2 Dans le pays de. p Parmi. Porter<strong>la</strong> guerre chez l’ennemi. Chez lesAng<strong>la</strong>is… — (Temporel). Au tempsde. Chez les Grecs, les Romains… —Fig. Parmi. L’instinct chez les bêtes,chez les anim<strong>aux</strong>. Il passe chez euxpour un lâche. p Auprès de.3 En <strong>la</strong> personne, dans l’esprit,dans le caractère de qqn. | C’est uneréaction courante chez lui. […]4 Dans les œuvres de. On trouve cecichez Molière, chez Balzac… p Dans.« Nous fûmes bientôtliés par notre goûtcommun pour <strong>la</strong>musique, qui chezl’un <strong>et</strong> chez l’autreétait une passiontrès vive. »chezJean-Jacques Rousseau,<strong>Le</strong>s ConfessionsHenri DorionNé <strong>à</strong> Québec de mère russe <strong>et</strong> de père québécois, il étudie le piano, le droit,<strong>la</strong> géographie <strong>et</strong> les <strong>la</strong>ngues. Un accident l’obligeant <strong>à</strong> renoncer <strong>à</strong> une carrièrede pianiste, il se concentre alors sur <strong>la</strong> géographie <strong>et</strong> rédige une thèse sur<strong>la</strong> frontière du Labrador. Il a été professeur <strong>à</strong> l’université Laval pendantplus de trente ans. De 1966 <strong>à</strong> 1972, il a présidé <strong>la</strong> Commission d’étude surl’intégrité du territoire du Québec. En 1978, il devient président de <strong>la</strong> nouvelleCommission de toponymie, poste qu’il occupera pendant trois mandatsnon consécutifs, le dernier ayant pris fin en 1996, <strong>à</strong> sa r<strong>et</strong>raite. Polyglotte,il conseille de multiples organismes <strong>et</strong> établissements, musées notamment,au Québec <strong>et</strong> <strong>à</strong> l’étranger. Auteur de nombreuses publications, c’est unconférencier recherché. Entre autres distinctions, il est chevalier de l’Ordrenational du Québec <strong>et</strong> <strong>la</strong>uréat du Prix du Québec Léon-Gérin <strong>et</strong> du PrixJacques-Rousseau d’interdisciplinarité.« Fais du feu dans <strong>la</strong> cheminéeJe reviens chez nousS'il fait du soleil <strong>à</strong> ParisIl en fait partout »Refrain de <strong>la</strong> chanson de Jean-Pierre Fer<strong>la</strong>nd,« Je reviens chez nous »18


Henri DorionUne histori<strong>et</strong>te bien de chez nous qui raconte toute une vie va comme ça :- Bonjour, l<strong>à</strong>, bonjour 1 . - Bonjour ! - Tu es belle.- Et toi, tu es élégant.- Tu es élégante aussi.- Et toi, tu es beau. - Viens-tu chez moi ? - Chez toi ?Plutôt chez moi. - Pour moi, c’est pareil. - Alors, ce sera chez nous.Ils se marièrent <strong>et</strong> eurent de nombreux enfants.Ça s’est un jour passé comme ça, quelque part en terre d’Amérique,sur les bords du grand Chemin qui marche 2 , <strong>à</strong> mi-chemin entre pôle <strong>et</strong>équateur, <strong>à</strong> mi-chemin aussi entre un temps où le pays n’était qu’eau<strong>et</strong> forêt, <strong>et</strong> un temps <strong>à</strong> l’orée duquel notre présent s’interroge. C’était unde ces p<strong>et</strong>its chez-soi <strong>à</strong> partir desquels le pays s’est construit, p<strong>et</strong>it <strong>à</strong> p<strong>et</strong>it,l’espace s’accumu<strong>la</strong>nt au rythme des saisons <strong>et</strong> des années, des espoirs<strong>et</strong> des proj<strong>et</strong>s. Au fil du temps, ces milliers de p<strong>et</strong>its chez-soi sont devenusun grand Chez-Nous. Et <strong>la</strong> maison est devenue territoire.N’est-ce pas ainsi que naissent tous les pays ? Mais qu’est-ce qu’un pays ?L’espace occupé, construit, fréquenté, vécu, assumé, chanté, rêvé ?Chez les Inuits, tout près du toit du Québec 3 , c’est le pays des temps longs,faits, comme sa géographie, de grands rayons de courbure. Un pays où lesjours <strong>et</strong> les nuits s’étirent au gré des saisons.Chez les Amérindiens, maîtres <strong>et</strong> gardiens d’une forêt qui résiste commeelle peut <strong>à</strong> l’usage qu’on en fait, le rythme des saisons est en résonanceavec celle du monde animal qui, comme celui de l’homme, appartient<strong>à</strong> <strong>la</strong> Terre-mère, <strong>et</strong> non l’inverse.Chez ceux qu’on appelle les B<strong>la</strong>ncs, les rythmes sont hebdomadaires,quotidiens, horaires même, tant l’aménagement du territoire s’est mutéen aménagement du temps.Chez les Inuits, chez les Amérindiens, chez les gens du Sud, comme chezceux qui plus tard les ont rejoints, il n’y a de frontières que de contact, nonde séparation, car, pour les uns comme pour les autres, nous sommes faits,comme l’a si bien chanté C<strong>la</strong>ude Gauthier, de <strong>la</strong>cs <strong>et</strong> de rivières, de sucrechez<strong>et</strong> d’eau d’érable, d’Amérique <strong>et</strong> de France, d’octobre <strong>et</strong> d’espérance.Il est grand, notre chez-nous, ouvert comme <strong>la</strong> p<strong>la</strong>ine, accueil<strong>la</strong>nt comme<strong>la</strong> forêt, en mouvement comme notre maître-fleuve. À chaque ami de <strong>la</strong>P<strong>la</strong>nète <strong>française</strong>, je dis :Chez moi, il y a désir de toi, de ton amitié, de ta culture, des sons <strong>et</strong> desodeurs de chez toi… Je t’invite chez nous. Ensemble, nous continuerons<strong>à</strong> construire un pays.Chez toi, il y a sans doute désir d’espace. Viens chez nous, il y a toutl’espace qu’il faut pour penser p<strong>la</strong>nète, car, entre mégapole <strong>et</strong> toundra,nos horizons sont vastes.Chez vous, il y a pour nous une source <strong>à</strong> <strong>la</strong>quelle nous abreuver. Commevous, nous savons ce que veut dire diversité culturelle.Chez nous, il y a un grand fleuve, un million de <strong>la</strong>cs, cent mille rivières,mille vil<strong>la</strong>ges <strong>et</strong> cent villes pour t’accueillir.Chez moi, tu te sentiras chez toi dès que tu sauras que, chez nous,t’attendent des lieux dont les noms t’interpelleront. Peut-être auras-tul’occasion de partir de <strong>la</strong> rue du Chez-Soi, pour visiter deux lieux-ditsde <strong>la</strong> Côte-Nord, Chez David <strong>et</strong> Chez Norbert, emprunter le cheminde <strong>la</strong> Pointe-chez-Son-Père <strong>et</strong> le chemin Mon-Chez-Nous, longer le rapidede Chez Yo<strong>la</strong>nde puis le <strong>la</strong>c du Ciel de Chez Nous <strong>et</strong> enfin arriver au <strong>la</strong>cChez-Nous 4 . Un itinéraire méandré comme nos rivières, balisé de lieuxintimes <strong>et</strong> de paysages grandioses.Nous t’attendons. Bonne route !1. Cf. Titre d’une pièce du dramaturge Michel Tremb<strong>la</strong>y.2. Nom que donnaient les Indiens au Saint-Laurent.3. <strong>Le</strong> somm<strong>et</strong> du Québec est le mont d’Iberville, dans l’extrême nord-est du Québec : 1 652 mètres.4. Ces noms de lieux du Québec sont tous des toponymes officiels.20 21


Confier« Il n’est pas permis des’emparer d’un secr<strong>et</strong> quine nous est pas confié. »Voltaire, Dict. philosophique, PosteconfierConfier v.tr. ÉTYM. du <strong>la</strong>t. confiderede con- (cum), <strong>et</strong> fidere d’après fier.confier (qqn, qqch.) <strong>à</strong> (qqn, qqch.)1/ (1601). Rem<strong>et</strong>tre (qqn, qqch. deprécieux) <strong>à</strong> (qqn) en se fiant(<strong>à</strong> lui). p Abandonner, <strong>la</strong>isser ;p Rem<strong>et</strong>tre <strong>à</strong> <strong>la</strong> garde ; <strong>aux</strong>mains. […] p Conférer. […]2/ (1753). Fig. Livrer <strong>à</strong> l’action,<strong>à</strong> l’influence de (quelque choseconsidérée comme dépositaire). […]3/ (1667). Communiquer (qqch. depersonnel) sous le sceau du secr<strong>et</strong><strong>à</strong> (qqn). p Part (prendre, tirer qqn<strong>à</strong> part pour lui parler). | Confier unecrainte, un souci. […]se confier <strong>à</strong> (qqn, qqch.) v. pron.1/ Se reposer sur, s’en rem<strong>et</strong>tre <strong>à</strong>(qqn, qqch.). p Fier (se) […]2/ Faire des confidences <strong>à</strong> (qqn).p Épancher (s’), livrer (se), ouvrir(s’). Absolt. Faire des confidences.Il n’aime pas se confier.3/ (Passif). Être confié <strong>à</strong> (qqn). |« Des papiers aussi importants nese confient pas au premier venu »(Littré).4/ (Récipr.). Se confier (qqch.) :se faire réciproquement <strong>la</strong>confidence de (qqch.). […]« Jamais l’instinct moral ne m’a trompé :il a gardé jusqu’ici sa pur<strong>et</strong>é dans mon cœurassez pour que je puisse m’y confier ».Jean-Jacques Rousseau, Rêveries du promeneur solitaire, 4 e promenadeLiliana LazarNée en 1972 en Moldavie roumaine, elle écrit en français. Après une jeunessepassée dans <strong>la</strong> grande forêt de Slobozia où son père était garde forestier, elle entre<strong>à</strong> l’université Alexandru Ioan Cuza de Iaşi où elle étudie <strong>la</strong> littérature <strong>française</strong>.Après <strong>la</strong> chute de Ceauşescu, elle quitte <strong>la</strong> Roumanie pour s’installer dans le sudde <strong>la</strong> France (Gap) où elle réside aujourd’hui. C’est l’inoubliable Slobozia, vil<strong>la</strong>geempreint de violence <strong>et</strong> de mystères, qui servira de décor <strong>à</strong> son roman Terre desaffranchis, paru en 2009 chez Gaïa, qui a reçu le Prix des Cinq continents de <strong>la</strong>Francophonie <strong>et</strong>, en 2001, le prix Marie-C<strong>la</strong>ire B<strong>la</strong>is de l'Association Québec-France.Son œuvre est marquée par <strong>la</strong> persistance des légendes popu<strong>la</strong>ires, le poids de <strong>la</strong>religion orthodoxe <strong>et</strong> surtout <strong>la</strong> présence obsédante d’une nature toujours sauvage.23


Liliana LazarconfierCe vil<strong>la</strong>ge est bien comme ma mère me l’a décrit. Desmaisonn<strong>et</strong>tes bâties près de <strong>la</strong> rue, bien entr<strong>et</strong>enues, sauf une.Je m’approche de <strong>la</strong> clôture pour mieux observer c<strong>et</strong>te bicoque<strong>aux</strong> murs chaulés où vit Dom Siméon. Cloîtré <strong>à</strong> longueur desemaine, il ne <strong>la</strong> quitte que le dimanche pour faire un tour.Vêtu d’un pardessus miteux, il marche toujours visage crispé,lorgnant les gens de biais, comme pour les saluer. En arrivantp<strong>la</strong>ce de l’église, il s’installe sur un banc <strong>à</strong> l’ombre d’unmarronnier. L<strong>à</strong>-bas, il reste assis des heures <strong>à</strong> regarder aller <strong>et</strong>venir, tout en gribouil<strong>la</strong>nt des feuill<strong>et</strong>s tirés de ses poches usées.L’homme est âgé. Chenu, chétif, le regard vague. Personne ne faitvraiment attention <strong>à</strong> lui comme s’il se confondait avec l’arbrequi l’abrite. Posé <strong>à</strong> côté de lui, un sach<strong>et</strong> rempli de bonbonscolorés attire les enfants. Et c’est toujours le même manège.Un premier gamin s’approche en sautil<strong>la</strong>nt <strong>et</strong> peu de tempsaprès, ils sont cinq ou six <strong>à</strong> goûter <strong>aux</strong> sucreries. Ça piaille sousle marronnier. <strong>Le</strong> vieux raconte des histoires de nains <strong>et</strong> dedragons, avec maintes grimaces qui font rire. « Méfiez-vousde lui ! » m<strong>et</strong>tent en garde les passants. <strong>Le</strong> sach<strong>et</strong> de bonbonsse vide, les rires s’éloignent. La démarche fatiguée, Dom Siméonr<strong>et</strong>ourne se c<strong>la</strong>quemurer pour une semaine de plus.Mais ce dimanche, il n’est pas sorti. Je me demande bien ce quilui est arrivé. Je risque un coup d’œil par-dessus <strong>la</strong> palissade.Une silhou<strong>et</strong>te glisse derrière les ride<strong>aux</strong> sales. Vous le connaissez,ce fou ? m’interpelle une voisine. Même pas le temps de luirépondre qu’elle me confie tout bas : Trois ans déj<strong>à</strong> que cesorcier habite ici. Il ne reçoit jamais personne. Allez savoir ce qu’ilfabrique l<strong>à</strong>-dedans ! Soudain, des cris <strong>et</strong> des bruits de pas mefont sursauter. <strong>Le</strong> p’tit rouquin a disparu ! Des vil<strong>la</strong>geois énervésgesticulent en décrivant l’enfant. Vous devriez chercher chezle vieux, leur suggère <strong>la</strong> voisine. Je suis sûre que c’est lui qu’afait l’coup !Trois hommes se précipitent vers <strong>la</strong> masure, frappent <strong>à</strong> <strong>la</strong> porte<strong>et</strong> <strong>la</strong> défoncent d’un coup de hache. Dans le vacarme qui s’ensuit,une liasse de papiers jaunis passe par <strong>la</strong> fenêtre. Je me faufile dansle jardin pour attraper ces papillons dorés quand j’aperçois ungarçonn<strong>et</strong> caché dans les buissons. Un sombre pressentiment meg<strong>la</strong>ce. C’est le rouquin qu’on recherchait. Faut pas que les grandsme voient ! Un doigt posé sur mes lèvres, je le rassure. Il serre uncahier entre ses bras. C’est pour le grand-père, m’avoue-t-il toutapeuré. C’est pour ça qu’il nous donne des bonbons.<strong>Le</strong> garçon s’est enfui. La hache ressort de <strong>la</strong> maison, <strong>la</strong> <strong>la</strong>mebien rouge. <strong>Le</strong>s éc<strong>la</strong>ts de voix se sont tus, les hommes sedispersent en silence. Il n’y a plus que moi dans ce jardin queseuls des mots ba<strong>la</strong>yés par le vent habitent <strong>à</strong> présent. <strong>Le</strong>s mainstremb<strong>la</strong>ntes, je ramasse les feuilles éparpillées, noircies d’uneécriture serrée : J’aime le rire des enfants, j’aurais tant voulu enavoir. Mais <strong>à</strong> mener des combats qui n’étaient pas les miens, je mer<strong>et</strong>rouve <strong>à</strong> contempler ma solitude… Je caresse de mes doigts cespages froissées qui racontent <strong>la</strong> vie d’un homme auquel j’avaistant de choses <strong>à</strong> confier. Dom Siméon était mon père.24 25


Histoirehistoire n.f. ÉTYM. 1361 ; estoire,1155, « récit d’événementsmémorables » ; historie, 1050 ; du <strong>la</strong>t.historia, mot grec.I. 1 Connaissance ou re<strong>la</strong>tion desévénements du passé, des faitsre<strong>la</strong>tifs <strong>à</strong> l’évolution de l’humanité,d’un groupe social, d’une activitéhumaine, <strong>et</strong>c., <strong>et</strong> qui sont dignesou jugés dignes de mémoire ;événements, faits ainsi re<strong>la</strong>tés. […]t Histoire d’une période, d’uneépoque […], d’un problème politique,d’une question internationale. […]d’un grand homme, d’un héros.p Biographie, vie. […]t Histoire intérieure, sociale ; del’aviation, de <strong>la</strong> littérature, de <strong>la</strong>philosophie, des religions, de <strong>la</strong>science, de l’art, de <strong>la</strong> <strong>la</strong>ngue. […]2 Absolt. L’histoire. a L’ensembledes connaissances re<strong>la</strong>tives <strong>à</strong>l’évolution, au passé de l’humanité ;<strong>la</strong> science <strong>et</strong> <strong>la</strong> méthode perm<strong>et</strong>tantde reconstituer c<strong>et</strong>te évolution<strong>et</strong> d’acquérir <strong>et</strong> de transm<strong>et</strong>treces connaissances ; par ext.,l’évolution humaine considéréecomme obj<strong>et</strong> d’étude. […] b Lamémoire des hommes, le jugementde <strong>la</strong> postérité. […] c La véritéhistorique. […]3 a La suite des événementshistoriques. p Passé. […].III. 1 Récit d’actions, d’événementsréels ou imaginaires. p Anecdote,épisode, récit, re<strong>la</strong>tion. […]Spécialt. Histoire inventée,invraisemb<strong>la</strong>ble ou destinée <strong>à</strong>tromper, <strong>à</strong> mystifier. p Conte,fable, mensonge. […]2 Chaîne, enchaînement,suite, succession d’événements.p Affaire, aventure. […]Loc. prov. […]. p Événement.Ne faites pas tant d’histoires. pEmbarras. Affectation, détour,difficulté, façon(s), manière(s)Loc. fam. HISTOIRE DE (suivi del’infinitif), marque le but, l’intention.3 Fam. Chose, obj<strong>et</strong> (qu’on neveut ou qu’on ne peut nommer).p Affaire, machin, truc. […]« L’histoire est un roman qui a été ;le roman est de l’histoire qui aurait pu être. »Edmond <strong>et</strong> Jules de Goncourt, JournalArl<strong>et</strong>te CoustureNée <strong>à</strong> Saint-Lambert, près de Montréal au Québec, elle possède un bacca<strong>la</strong>uréatès arts <strong>et</strong> une formation en animation culturelle <strong>et</strong> théâtrale. Sa carrièrede romancière a été <strong>la</strong>ncée avec <strong>la</strong> parution du roman <strong>Le</strong>s Filles de Caleb, <strong>Le</strong> chantdu coq (1985) <strong>et</strong> de son second tome, <strong>Le</strong> cri de l’oie b<strong>la</strong>nche. Elle a remportéde nombreux honneurs, dont le Prix du public du Salon du livre de Montréal,le 1 er prix de Communication-Jeunesse ainsi que le Prix des lecteurs Biblio.<strong>Le</strong>s téléséries <strong>Le</strong>s Filles de Caleb <strong>et</strong> B<strong>la</strong>nche, inspirées de ces deux best-sellers,se hissent encore aujourd’hui au somm<strong>et</strong> du palmarès québécois des émissionsles plus regardées. Enfin, <strong>la</strong> saga familiale <strong>Le</strong>s Filles de Caleb a séduit l’ensemblede <strong>la</strong> francophonie <strong>et</strong> est le thème d’un opéra folk présenté depuis 2011. Arl<strong>et</strong>teCousture a écrit de nombreux autres romans <strong>à</strong> vif succès dont Ces enfants d’ailleurs,publié en deux tomes : Même les oise<strong>aux</strong> se sont tus <strong>et</strong> L’envol des tourterelles.« ...voici ton histoir<strong>et</strong>elle que j’ai cru <strong>la</strong> lire,non dans les Livres de tessemb<strong>la</strong>bles qui sont menteurs,mais dans <strong>la</strong> Nature quine ment jamais »Jean-Jacques Rousseau,Émile ou de l’éducationhistoire26


Arl<strong>et</strong>te CousturehistoireIl était une fois une histoire,qui commençait dans les vieux pays où il y avait de grands navigateurs,rêvant de <strong>la</strong>rguer les amarres <strong>et</strong> de hisser les voiles pour se diriger versl’ouest, l<strong>à</strong> où l’océan pouvait, disait-on, se prendre pour <strong>la</strong> fin du monde<strong>et</strong> devenir une chute <strong>aux</strong> enfers. Ils avaient emporté avec eux leurshistoires de farfad<strong>et</strong>s, d’ogres, de fées <strong>et</strong> leurs autres histoires faussementvraies ou vraiment fausses.Un jour, des marins s’embarquèrent <strong>à</strong> partir d’autres pays <strong>aux</strong> nomsévocateurs d’autres histoires : l’Italie de Pinocchio <strong>et</strong> de <strong>la</strong> commediadell’arte, l’Espagne de don Quichotte, <strong>la</strong> France des corsaires <strong>et</strong>l’Angl<strong>et</strong>erre d’Othello <strong>et</strong> de ses pirates que pas un navigateur ne vou<strong>la</strong>itrencontrer. Au fur <strong>et</strong> <strong>à</strong> mesure de leurs voyages, ils rapportèrent d’autreshistoires <strong>aux</strong> musiques ou <strong>aux</strong> parfums exotiques qui venaient de Siam,de <strong>la</strong> chaleur qui couvait les temples du soleil, ou de <strong>la</strong> neige <strong>et</strong> de sesquelques arpents qui en vinrent <strong>à</strong> geler un pauvre peuple sans histoire.Un jour, les aventuriers venus du pays de France j<strong>et</strong>èrent l’ancre <strong>à</strong> tribord,esca<strong>la</strong>dèrent un cap <strong>et</strong> fondèrent une ville qu’ils baptisèrent Stadacone,Quebecq, Quebec, Kebec, Kepecke, Cabecke <strong>et</strong>, après moult tentatives,Québec. Ils arrivèrent nez <strong>à</strong> nez avec des corbe<strong>aux</strong> sur des arbresperchés, derrière lesquels se cachaient des « Indiens » qu’ils croyaientbelliqueux comme un de leurs propres chefs, le sieur Paul de Chomedeyde Maisonneuve, puisqu’il dira plus tard : « Même si tous les arbres del’île devaient se changer en autant d’Iroquois, c’est ici que j’installerai macolonie. » Ce sieur de Maisonneuve avait construit <strong>la</strong> sienne, de maison,<strong>à</strong> Hoche<strong>la</strong>ga, qu’il appe<strong>la</strong>it Ville-Marie tout comme ses quarante-troiscompagnons de fortune ou d’infortune, selon les caprices de l’histoire.On raconte qu’un matin, les chiens de garde entraînés <strong>à</strong> japper après queleur truffe eut reniflé de l’Iroquois réveillèrent les braves combattants <strong>à</strong>l’instar des oies dans les vieux pays <strong>et</strong> même avant, quand les vieux paysétaient encore jeunes. <strong>Le</strong> sieur Paul de Chomedey de Maisonneuve eutune attaque d’héroïsme <strong>et</strong> partit combattre quelque deux cents Iroquoisavec trente de ses hommes. L’histoire veut que ces derniers rentrèrent encourant dans le fort, <strong>la</strong>issant le sieur derrière eux. Qu’<strong>à</strong> ce<strong>la</strong> ne tienne, undes chefs iroquois <strong>et</strong> lui s’engagèrent dans un corps <strong>à</strong> corps qui n’avaitrien de cordial. Maisonneuve fut saisi <strong>à</strong> <strong>la</strong> gorge <strong>et</strong> al<strong>la</strong>it rendre l’âmelorsque, dans un ultime effort, il prit son arme <strong>et</strong> tira directement dans<strong>la</strong> poitrine de son assail<strong>la</strong>nt. <strong>Le</strong> chef rendit son âme, pas encore baptisée,<strong>et</strong> ses hommes le portèrent jusqu’<strong>à</strong> <strong>la</strong> maison longue, où il fut pleuré.Donc, Maisonneuve <strong>à</strong> lui seul mit fin <strong>aux</strong> attaques <strong>et</strong> ses colons vécurent enpaix re<strong>la</strong>tive. Son geste fut imité, sans succès, par un autre héros qui, seizeans plus tard, tenta de r<strong>et</strong>enir un groupe d’attaquants iroquois dans un fortbancal. On raconte qu’en fait, il était parti <strong>à</strong> leur rencontre pour leur dérobertoutes les belles pe<strong>aux</strong> de castor, fruit de leur chasse, puisqu’il aurait eu desd<strong>et</strong>tes en métropole. La pell<strong>et</strong>erie aurait été une monnaie d’échange contrede p<strong>et</strong>its miroirs. Mais Dol<strong>la</strong>rd des Orme<strong>aux</strong> mourut de sa propre main :en tentant de <strong>la</strong>ncer un baril de poudre par-dessus <strong>la</strong> palissade du fort où ils’était réfugié, une branche fit obstacle <strong>et</strong> le baril lui r<strong>et</strong>omba dessus. Fin oupresque de c<strong>et</strong>te histoire qui fit de Dol<strong>la</strong>rd un héros qui, quelques sièclesplus tard, devait tenir tête <strong>à</strong> <strong>la</strong> reine d’Angl<strong>et</strong>erre en se rappe<strong>la</strong>nt au bonsouvenir des Canadiens français le même jour férié. Où l’on fête maintenanttous les patriotes pour ne froisser aucune page d’histoire.Au fil du temps, les Français puis les Ang<strong>la</strong>is rencontrèrent tant <strong>et</strong> tantde personnages dans les bois que ces derniers ont prêté f<strong>la</strong>nc <strong>à</strong> toutes leshistoires, inventées ou non. Ils y ont vu le P<strong>et</strong>it Chaperon rouge, c’estcertain. <strong>Le</strong>s bois d’ici étaient habités par les loups, les renards, les castors,les grands-mères <strong>et</strong> leurs p<strong>et</strong>ites-filles <strong>aux</strong> chaperons. Ils ont croisé le P<strong>et</strong>itPouc<strong>et</strong> qui fuyait le méchant ogre, Hansel <strong>et</strong> Gr<strong>et</strong>el souhaitant échapper<strong>à</strong> <strong>la</strong> sorcière, <strong>et</strong> le Chat botté tentant de sauver <strong>la</strong> vie <strong>et</strong> l’honneur de sonmarquis de maître, pour ne nommer qu’eux.Mais une histoire demeure certaine : les personnages qui étaient dans lecanot envolé de <strong>la</strong> chasse-galerie ont croisé, au XX e siècle, ceux de MarcChagall. L’histoire veut qu’ils aient également aperçu le p<strong>et</strong>it bonhommequi scie sur <strong>la</strong> lune, le P<strong>et</strong>it Prince, les cosmonautes <strong>et</strong> les astronautes !Vrai de vrai, juré, craché !28 29


Naturel« <strong>Le</strong>s voyagespoussent le naturelvers sa pente,<strong>et</strong> achèvent derendre l’hommebon ou mauvais. »Jean-Jacques Rousseau,Émile ou de l’ÉducationNaturel, elle adj. <strong>et</strong> n. ÉTYM. du <strong>la</strong>t.naturalis, de natura.Re<strong>la</strong>tif <strong>à</strong> <strong>la</strong> naturedes choses ou <strong>à</strong> <strong>la</strong> Nature.I. 1 Qui appartient <strong>à</strong> <strong>la</strong> nature d’unêtre, d’une chose. Caractères naturels.p Authentique. Indigène. […]2 Re<strong>la</strong>tif <strong>à</strong> <strong>la</strong> Nature, principe actifou ensemble des choses présentantun ordre. […]4 Re<strong>la</strong>tif au monde physique,<strong>à</strong> l’exception de l’homme <strong>et</strong> deses œuvres (opposé <strong>à</strong> humain,artificiel…). […] Qui n’a pas étémodifié par l’homme. p Brut.Qui n’est pas altéré, fre<strong>la</strong>té. […]Gamme naturelle.5 Qui se trouve dans <strong>la</strong> nature, n’estpas le fruit de <strong>la</strong> pensée (par oppos.<strong>à</strong> idéal). […] Math. Nombres naturels ;n. m., les naturels : les nombres entiersnaturels. […]8 (xiv e ). Spécialt. (Opposé<strong>à</strong> légitime).p Illégitime. Enfant naturel. pBâtard. […]II. 1 Re<strong>la</strong>tif <strong>à</strong> <strong>la</strong> nature humaine <strong>et</strong>,par suite, commun <strong>à</strong> l’humanité toutentière. […]2 Qui est inné en l’homme (enpar<strong>la</strong>nt d’un individu p Nature. […]4 Naturel <strong>à</strong> qqn : habituel <strong>à</strong> qqn. Étatnaturel. p Normal. […]7 Spontané. […]8 Qui donne une impression devérité, d’aisance, de simplicité. […]III. […]. 3 (1671). Aisance, facilitéavec <strong>la</strong>quelle on agit, on se comporte,spontanéité sans apprêt, sansaffectation (cit. 5). p Abandon,aisance (II., 1.), facilité. […]4 Simplicité pleine de vérité. pAuthenticité (3.), fraîcheur, vie. […]« Il a chasséle naturel,le naturel n’estpas revenu. »Jules Renard, MémoiresnaturelDieudonné NiangounaNé en 1976 <strong>à</strong> Brazzaville, il commence le théâtre dans les années 90, périodede guerres civiles dans <strong>la</strong> République du Congo. Il est <strong>à</strong> <strong>la</strong> fois auteur, comédien<strong>et</strong> m<strong>et</strong>teur en scène. Il m<strong>et</strong> en scène nombre de ses textes qu’il interprète surde grandes scènes : Théâtre international de <strong>la</strong>ngue <strong>française</strong> (2001), Théâtredu Vieux-Colombier <strong>à</strong> Paris (2005), le TARMAC de <strong>la</strong> Vill<strong>et</strong>te (2006), Festivald’Avignon (2007 <strong>et</strong> 2009)... De nombreux m<strong>et</strong>teurs en scène portent égalementses textes <strong>à</strong> <strong>la</strong> scène, en France comme <strong>à</strong> l’étranger. Il est par ailleurs boursierde <strong>la</strong> Fondation Beaumarchais.31


Dieudonné NiangounanaturelUne misère anonyme, portant corps de m<strong>aux</strong>, <strong>et</strong> <strong>à</strong> travers les arbres <strong>et</strong>l’appel des murs qui crient quand ils fléchissent. Naître, c’est mourir <strong>à</strong>sens unique. La nativité tue le réel. Commence <strong>la</strong> fiction dans un songe,Hérémakono, en attendant le bonheur. Je veux naître dans un charnier,ma maison sera le fumier que lestent les touristes en longeant <strong>la</strong> <strong>la</strong>gune.Tu ne seras pas ma<strong>la</strong>de. <strong>Le</strong> monde est réel. C’est pas naturel que noussoyons masqués derrière des taure<strong>aux</strong> de saisons qui avancent pour <strong>la</strong>lutte finale. Déferle <strong>la</strong> barricade, toute l’eau emprisonnée depuis deslustres explose de <strong>la</strong> mer pour dévoyer le nucléaire. N’as-tu réellement étéqu’abîme pour nous déteindre <strong>aux</strong> sombres tons des maîtres ? <strong>Le</strong>s monstresd’Ousman, les scarifications des Ifés, les gothiques de Kota, les b<strong>la</strong>ncheursOgwés <strong>et</strong> <strong>la</strong> rage des milices privées. Tuteur des âges, ici est le berceau oùtoutes les civilisations ont pissé pour re<strong>la</strong>tiviser les pôles ; le nord/le sud,<strong>la</strong> ba<strong>la</strong>nçoire. N’as-tu rien semé <strong>à</strong> part les strapontins sur <strong>la</strong> guérite ?Non, les potes vont se naturaliser <strong>et</strong> c’est bon. Une fois <strong>la</strong> civilisationrejointe <strong>la</strong> nature crève. Et toutes nos <strong>la</strong>ngues, <strong>et</strong> les odeurs de <strong>la</strong> grandmère,<strong>et</strong> <strong>la</strong> technologie de <strong>la</strong> brousse <strong>et</strong> de <strong>la</strong> savane, <strong>et</strong> le plein payscrèvent <strong>à</strong> satiété.<strong>Le</strong>s tueurs de bières re<strong>la</strong>ncent <strong>la</strong> Belgique, l’Allemagne, <strong>la</strong> Suisse, l’Alsace,l’Ir<strong>la</strong>nde, <strong>et</strong> ça nappe dans tous les bars, <strong>et</strong> ça va <strong>à</strong> n’en plus finir, <strong>et</strong> <strong>la</strong> dallese rallonge. Normal, dit ma voisine, vous emportez tout de l’Alsace <strong>à</strong> vosventres, de <strong>la</strong> Belgique au pissoir, de l’Allemagne au coin de <strong>la</strong> rue, <strong>et</strong> voussortez tout ce que les multimédias vous ont end<strong>et</strong>té, buvez du bissap, dugingembre de Kinshasa, du Tchapalo de Ouaga, au moins, c’est naturel.Mais qu’est-ce qui ne l’est pas ?<strong>la</strong>ngues, les programmes biologiques, on installe un nouveau logiciel<strong>et</strong> on appuie sur le bouton. Il faut que l’Afrique marche, vous êtes rigolo !Et comment donc ? L’homme doit être dépassé, Ni<strong>et</strong>zsche n’a pas prêchépour enrichir les éditeurs. Et toute <strong>la</strong> nation Nègre <strong>et</strong> Culture doit êtredépassée, c’est trop naturel. Mais le rire ! Encore le rire ! J’aimerais savoirsi seulement on rit naturellement.On devrait interdire le tourisme, tiens ! Gros rire, <strong>et</strong> je ne sais s’il est naturelou s’il est fabriqué, le « Gros Rire ». Si c’est fabriqué, tout ce que je vousraconte depuis le début, alors le rire n’est pas naturel. <strong>Le</strong> théâtre, parexemple, comment peut-il être naturel avec tout ce que je peine <strong>à</strong> formuler ?Aujourd’hui encore, <strong>et</strong> paf ! On nous bombarde du contemporain arrivéen avion-cargo avec ordre de mission : « faites du théâtre contemporain ! »D’où c’est naturel ?Une misère a toujours le regard anonyme, <strong>et</strong> on <strong>la</strong> b<strong>la</strong>se de mots pouravilir le naturel, <strong>et</strong> ça fatigue pour mille ans encore. En attendant quepassent tous les bonheurs, tous les Godot, tous les proxénètes d’illusions,tous les p<strong>et</strong>its dealers de coopérations, tous les trafiquants de fraternitésnouvelles, <strong>la</strong> cruche se tend sur le fleuve, elle va, elle va, elle déboîte. Y a pasde quoi naturaliser sa peine, il faut <strong>la</strong> troquer. <strong>Le</strong> volcan contre le poignard,Darfour contre cent mille tonnes d’insolences. Y a pas de naturel dansl’agonie, y a <strong>la</strong> torture <strong>et</strong> <strong>la</strong> peur qu’on vend contre un océan d’ill<strong>et</strong>trés.Nous commençons une fiction l<strong>à</strong>, on vient <strong>à</strong> peine de p<strong>la</strong>cer <strong>la</strong> bobine.Maintenant il faut jouer !R<strong>et</strong>rouvez le texte intégral sur www.dismoidixmots.culture.frQuand quelqu’un se barre de chez soi on ne lui demande pas de senationaliser mais de se naturaliser. Nationaliser, est-ce que ça existe ? Maisdénaturer ça existe, non. Tu veux dire que les États demandent <strong>aux</strong> gensde se dénaturer ? On enlève <strong>la</strong> peau, les tics, les sens, les habitudes, les32 33


penchant« Je n’ai plusd’autre règle deconduite que desuivre en toutmon penchantsans contrainte. »Jean-Jacques Rousseau,Rêveries du promeneur solitairePenchantPenchant, ante adj. <strong>et</strong> n.m. ÉTYM.p. prés. de pencher.I. Adj. Vx ou littér. Qui penche. —Fig. Qui menace de s’effondrer, quidécline.II. N. m. 1 (1538). Vx ou littér.Versant, partie inclinée p Déclivité,inclinaison, obliquité, pente.Loc. fig. ou métaphorique. (Vx).Être sur le penchant de <strong>la</strong> vie : êtresur le déclin de <strong>la</strong> vie, aller vers<strong>la</strong> fin de sa vie. […]2 (1642). Mod., cour. Inclinationnaturelle vers un obj<strong>et</strong> ou une fin. pAmour, désir, faible, faiblesse, goût,habitude, impulsion, inclination,propension, tendance. — Penchantsnaturels. p Nature. […] Penchantsrépréhensibles, mauvais, vicieux…p Défaut, vice. Avoir un penchant<strong>à</strong>/pour <strong>la</strong> paresse. p Enclin(être enclin <strong>à</strong>) ; volontiers (êtrevolontiers…). — Avoir, manifester unpenchant <strong>à</strong>… (<strong>et</strong> inf.) p Habitude.Aptitude, disposition, facilité, génie,prédisposition, vocation.3 Spécialt. (Littér.). Mouvementqui porte <strong>à</strong> aimer qqn, <strong>à</strong> prendre partipour une personne… p Affection,sympathie. Amour, passion. […]« L’inclination est plus faible quele penchant (…) L’inclinationfait tendre vers un obj<strong>et</strong>,le penchant y entraîne. »Benjamin Lafaye, Dictionnaire des synonymes,Inclination, penchant…, propension.35


PenchantChristine Jordis« Penchant », un joli mot qui, <strong>à</strong> première vue, indique le goût,l’attirance, voire <strong>la</strong> passion. Pourtant, il vient de « pencher »,c’est ainsi. Et « pencher » signale un mouvement vers le bas. Enbotanique, par exemple, l’adjectif « penchant » s’emploie pourdésigner des organismes dont <strong>la</strong> direction, d’abord verticale, serapproche ensuite de <strong>la</strong> terre ; on dit des « feuilles penchantes »précise le grand Larousse illustré : dressées fièrement vers leciel, elles s’affaissent, en vieillissant, doucement vers <strong>la</strong> terre.Autant l’annoncer d’emblée, nous sommes tous, <strong>à</strong> plus oumoins brève échéance, des « rose<strong>aux</strong> penchants », c’est l<strong>à</strong>notre destin commun, notre définition même. Ce mouvementvers le bas est encore impliqué par le mot pris dans son sensfiguratif : suivre ses penchants, n’est-ce pas suivre sa « pentenaturelle » ? Une pente contre <strong>la</strong>quelle les éducations d’autrefoisnous m<strong>et</strong>taient en garde, car elle mène tout droit au précipice,perm<strong>et</strong>tant <strong>aux</strong> instincts – dont chacun sait qu’il faut se défier– de surgir des bas-fonds où on les tenait enfermés <strong>et</strong>, remontés<strong>à</strong> <strong>la</strong> surface, de mener leur sarabande, folle, <strong>la</strong>scive, enragée. Ilest d’ailleurs plus souvent question des « mauvais penchants »que des bons, pour lesquels aucune expression n’existe. Obéir<strong>à</strong> un penchant, c’est donc prendre un risque auquel on pourrapréférer <strong>la</strong> prudence, comme le faisaient sagement les héroïnesde Jane Austen. Elles savaient que « le cœur de l’homme estétrangement penchant <strong>à</strong> <strong>la</strong> légèr<strong>et</strong>é », Pascal l’a écrit.Mais tout n’est pas encore dit. Pourquoi, p<strong>la</strong>cé sur le penchantde <strong>la</strong> colline, regarderait-on vers le bas ? Pourquoi pas plutôt versle haut ? Oui, pourquoi ne suivrait-on pas sa pente naturelle,mais en <strong>la</strong> remontant, en se fixant pour but le faîte, ce somm<strong>et</strong>de pur bonheur <strong>et</strong> de vie où peut nous conduire le penchantamoureux ? Alors il n’est plus question de s’incliner vers <strong>la</strong> terre,mais au contraire de s’élever au-dessus d’elle, de p<strong>la</strong>ner, de voler,porté par l’allégresse, <strong>et</strong> <strong>la</strong> pente, loin de nous plonger dansl’abîme, va nous précipiter en plein ciel : il aura suffi d’écouterson « penchant » sans se <strong>la</strong>isser intimider ou arrêter parl’ambiguïté dont des siècles de moralité ont chargé ce mot.Christine JordisNée en Algérie, elle est <strong>à</strong> <strong>la</strong> fois critique littéraire, éditeur, essayiste <strong>et</strong>romancière. Elle a étudié <strong>la</strong> littérature ang<strong>la</strong>ise <strong>à</strong> <strong>la</strong> Sorbonne <strong>et</strong> <strong>à</strong> Harvard,<strong>et</strong> est l’auteur d’une thèse de doctorat sur l’humour noir ang<strong>la</strong>is. De r<strong>et</strong>ouren France, elle a été responsable des rencontres littéraires du British Council.Elle dirige actuellement le domaine anglo-saxon chez Gallimard, elle faitparti du jury Femina, elle col<strong>la</strong>bore au Monde des Livres <strong>et</strong> <strong>à</strong> <strong>la</strong> revuePage des libraires.Elle a écrit de nombreux essais au Seuil <strong>et</strong> a reçu de nombreux prix : le PrixMédicis essai, 1999 (Gens de <strong>la</strong> Tamise <strong>et</strong> d’autres rivages), le Prix Valéry-Larbaud, 2005 (Promenades ang<strong>la</strong>ises).36 37


SongeSonge n.m. ÉTYM. <strong>la</strong>t. somnium.1 Vx ou spécialt. Rêve. p Rêve(1., REM. ) — Faire un songe.<strong>Le</strong> pays des songes : le sommeil,l’inconscience. […] CLEF DESSONGES : système d’interprétationtraditionnel des rêves, de leursimages. EN SONGE.Voir qqn, qqch. en songe. […]2 Par compar. Fiction, illusion.La vie n’est qu’un songe. […]3 (V. 1220). Vieilli ou littér.Construction de l’imagination <strong>à</strong>l’état de veille. p Chimère, illusion,imagination, fantasme, rêve. […]« Je nesais pointapprendre<strong>à</strong> vivre <strong>à</strong> quine songe qu’<strong>à</strong>s’empêcher demourir ».Jean-Jacques Rousseau,Émile ou de l’ÉducationsongeBruno CoppensNé <strong>à</strong> Tournai en 1960, il se <strong>la</strong>nce dans le mondedu spectacle après des études en Langues <strong>et</strong>littératures romanes <strong>à</strong> l’UCL. Jongleur fou desmots, créateur de délires verb<strong>aux</strong> <strong>à</strong> couper lesouffle, il a réussi en une quinzaine d’années<strong>à</strong> tracer une voie unique dans le domaine del’humour belge. Il déploie tout son talent surscène, en radio (Jeu des Dictionnaires <strong>et</strong> Semaineinfernale – RTBF, <strong>Le</strong> Fou du roi – France Inter,Dicodeurs – Radio Suisse Romande, <strong>et</strong> 50°Nord – Arte Belgique) <strong>et</strong> en télévision où ilincarna plus de 10 ans « Mr Virgule » dansl’une des meilleures émissions européennespour <strong>la</strong> jeunesse, Ici-B<strong>la</strong>-B<strong>la</strong> (RTBF). Sansoublier ses col<strong>la</strong>borations avec divers journ<strong>aux</strong><strong>et</strong> revues (Écho, Soir, La Libre, Paris-Match...)qui prouvent <strong>la</strong> qualité de sa plume.Son talent a été moult fois récompensé dansdivers festivals en France <strong>et</strong> en Belgique.En octobre 2005, il a reçu <strong>la</strong> médaille de« Chevalier de l’ordre de Léopold » par <strong>la</strong>ministre belge de <strong>la</strong> Culture Fadi<strong>la</strong> Laanan.38 39


Bruno Coppenssonge« Rêve » est mon pire cauchemar. Il n’y en a plus que pourlui : tout le monde veut avoir « une vie de rêve », personne nedésire « une vie de songe » ! Bien sûr je pourrais me consoleren me rappe<strong>la</strong>nt que je trône dans le titre d’une des piècesde Shakespeare <strong>et</strong> de Caldéron ! En fait, ce passé prestigieuxme porte préjudice. Je me farcis c<strong>et</strong>te connotation poétiquesurannée qui m’empêche aujourd’hui d’être sur toutes les lèvres.Je suis obsolète <strong>et</strong> ringard. En 2012 je fais moins rêver que rêve.La faute <strong>à</strong> qui ? À Larousse ! Vous avez lu comment il medéfinit ? « Songe : combinaison souvent incohérente d’imagesapparaissant dans l’esprit pendant le sommeil ! » Incohérence ? ! ?Je ne serai qu’un vulgaire bidouilleur d’images sans talent ? Jene suis pas parano, mais ce<strong>la</strong> sent le complot puisqu’au motrêve, vous trouverez par contre « représentation plus ou moinsidéale de ce qu’on veut réaliser, de ce qu’on désire ! » Queltraitement de faveur ! Et croyez-vous que rêve aurait fait preuvede solidarité au sein de c<strong>et</strong>te profession que nous exerçonsconjointement ? Que nenni ! Rêve doit bien rire de me voirdépérir dans les pages du dictionnaire, p<strong>la</strong>cé juste en dessousdu mot « sonde » comme si j’étais déj<strong>à</strong> ma<strong>la</strong>de ! Mais ce sontles gens qui sont ma<strong>la</strong>des, ils m’utilisent le plus souvent poursignifier… mon contraire ! Ils disent : « Vous n’y songez pas ! »Ce qui signifie : « Vous n’y pensez pas ! » Moi, réduit <strong>à</strong> une penséeconcrète ? ! ? Mais je suis tout sauf ce<strong>la</strong> ! Je suis <strong>la</strong> détente absoluedu raisonnement, une di<strong>la</strong>tation de <strong>la</strong> conscience, une envoléesalvatrice vers un imaginaire auquel le songeur n’aurait jamais…pensé justement ! Si on me choisit pour désigner une penséematérialisée alors j’entends déj<strong>à</strong> ma condamnation : « Tu menssonge ! » Je ne suis pas parano, mais on cherche <strong>à</strong> m’anéantir !La preuve ? Mon nom désigne aussi une… p<strong>la</strong>nte <strong>à</strong> tubercule ! ? !C<strong>et</strong>te acception vise juste <strong>à</strong> diluer mon identité, étape précédantma disparition pure <strong>et</strong> simple. Et je redoute un enterrement depremière c<strong>la</strong>sse façon Bernard Pivot dans un livre « Sauvons lesmots oubliés ! » ou dans une revue fêtant <strong>la</strong> Langue <strong>française</strong>où je serai remis au goût du jour comme on le fit pour l<strong>et</strong>opinambour ou l’accordéon !Vous trouvez ridicule que je sois jaloux d’un synonyme ?Je ne suis pas parano, mais je sais que rêve veut ma mort,il ne songe qu’<strong>à</strong> ce<strong>la</strong> pour s’emparer de mon trésor unique :<strong>la</strong> clé ! Il en est vert de jalousie, rêve, de <strong>la</strong> clé des songes, caron ne dit pas « <strong>la</strong> clé des rêves », non, le rêve, on l’interprète,le dissèque, on se psychothérapeutise sans jamais découvrirvraiment ce qu’il contient. Alors que moi, songe, j’ai LA clé<strong>et</strong> ne <strong>la</strong> céderai jamais ! Ah ! Ah ! Mon trésor précieux. Et le jouroù l’Unesco c<strong>la</strong>ssera <strong>la</strong> clé des songes « patrimoine immatérielde l’humanité », je <strong>la</strong> tiendrai enfin ma revanche sur rêve <strong>et</strong>je pourrai alors reposer en paix…« Rien n’est vrai, rien n’estf<strong>aux</strong> ; tout est songe <strong>et</strong> mensonge.Illusion du cœur qu’un vainespoir prolonge. »Alphonse de Lamartine,Secondes harmonies poétiques <strong>et</strong> religieuses40 41


transports« Modérons lestransports d’uneivresse insensée ;<strong>Le</strong> passage est biencourt de <strong>la</strong> joie <strong>aux</strong>douleurs (…) »Victor Hugo, Odes <strong>et</strong> Bal<strong>la</strong>des« …les transportsimmodérésde toutes lespassions… ».Jean-Jacques Rousseau,Discours sur l’origine de l’inégalitéparmi les hommesTransportsTransport n.m. ÉTYM. déverbalde transporter.I. A. 1 (1538). <strong>Le</strong> fait de porter pourfaire parvenir en un autre lieu ;manière de dép<strong>la</strong>cer ou de faireparvenir par un procédé particulier(véhicule, récipient, <strong>et</strong>c.). p Coltinage,portage. Transfert. […]Spécialt.Dép<strong>la</strong>cement de choses ou depersonnes sur une assez longuedistance <strong>et</strong> par des moyens spéci<strong>aux</strong>(le plus souvent par un intermédiaire),ou <strong>à</strong> des fins commerciales,économiques. p Circu<strong>la</strong>tion,commerce (cit. 4), échange, exportation,importation, trafic, traite. […] Par ext.<strong>Le</strong>s transports : ensemble des moyensemployés pour transporter marchandises<strong>et</strong> personnes. p Communication(s).Transports publics. […]4 (V. 1560). <strong>Le</strong> fait de dép<strong>la</strong>cerou d’être dép<strong>la</strong>cé par une causenaturelle. p Mouvement. […]II. (1614). Fig. Littér. 1 Viveémotion, sentiment passionné(qui émeut, entraîne), état de celuiqui l’éprouve. p Agitation, bouillon,déchaînement, effusion, é<strong>la</strong>n,enthousiasme, exaltation, excitation,ivresse, mouvement. <strong>Le</strong>s transportsde l’âme, de l’esprit <strong>et</strong> des sensp Ardeur, emportement, fureur,rage. Transports d’admiration,de joie, de reconnaissance. […]Spécialt. Transport lyrique,poétique ; prophétique ; mystique.p Délire, enthousiasme.2 Vx ou littér. Manifestation depassion. p Délire, enivrement,extase. […]Marius Daniel PopescuNé en 1963 <strong>à</strong> Craiova (Roumanie), il étudie <strong>à</strong> <strong>la</strong> faculté de sylviculture <strong>à</strong> Brasov.Il participe <strong>à</strong> <strong>la</strong> chute de <strong>la</strong> dictature de Ceauşescu, fonde l’hebdomadaireLa Réplique puis s’exile <strong>à</strong> Lausanne (Suisse) où il apprend le français <strong>et</strong> gagne sa vieen travail<strong>la</strong>nt comme bûcheron <strong>et</strong> chauffeur de bus. En 1995, les éditions Antipodespublient son premier recueil de poèmes écrit en français sous le titre de 4x4Poèmes tout-terrains. Il col<strong>la</strong>bore au Passe-Muraille <strong>et</strong>, depuis 2004, publie sonpropre journal littéraire, <strong>Le</strong> persil. En 2005, il publie un autre livre de poésie :Arrêts dép<strong>la</strong>cés (Antipodes), couronné en 2006 du prix Rilke (Sierre). En 2007, ilest le premier auteur suisse romand <strong>à</strong> remporter le prestigieux Prix Robert Walser,grâce <strong>à</strong> son roman La symphonie du loup (José Corti, Paris). En janvier 2012, paraîtchez le même éditeur, son second roman <strong>Le</strong>s couleurs de l'hirondelle.43


transportsMarius Daniel PopescuTu n’as pas dormi depuis vingt-six heures, tu penses au mot« métaphore » (du gr. m<strong>et</strong>aphora, transport), tu es assis sur<strong>la</strong> banqu<strong>et</strong>te bleue, tu as sur tes genoux le p<strong>et</strong>it sac en papierrempli de croissants chauds ach<strong>et</strong>és il y a quelques minutesdans le kiosque de <strong>la</strong> gare, « Figure de rhétorique consistant <strong>à</strong>employer un mot concr<strong>et</strong> pour exprimer une notion abstraite »,tu es dans ce train depuis quelques secondes, tu as sommeil <strong>et</strong>tu as faim <strong>et</strong> tu attends le départ du convoi arrêté <strong>à</strong> Genève-Cornavin. Il est cinq heures <strong>et</strong> vingt minutes, le train se m<strong>et</strong>en marche, tu ouvres le sac qui contient les croissants, tu prendsune pâtisserie, tu commences <strong>à</strong> manger, tu sors le livre que tuas dans <strong>la</strong> poche gauche de ta veste noire, tu l’ouvres <strong>et</strong> tu lisen mangeant « 1. Action ou manière de transporter, de porterd’un lieu dans un autre. ». Tu vas <strong>à</strong> Lausanne, tu luttes contrele sommeil, tu ne vois pas bien les visages des voyageurs assisdevant toi, tu lis « 2. LITT. Emotion vive. », tu poses <strong>à</strong> côtéde toi le sac qui contient des croissants, tu enlèves tes lun<strong>et</strong>tes,tu ne sais pas où tu poses tes lun<strong>et</strong>tes, tu t’endors, tu ouvresles yeux, tu te réveilles, tu regardes par <strong>la</strong> fenêtre du train, l<strong>et</strong>rain est arrêté, tu lis « Fribourg » sur le panneau accroché <strong>à</strong> unpilier métallique, sur le quai. Tu te lèves, tu prends le sac avecles croissants <strong>et</strong> ton livre, tu fais quelques pas dans le couloir,tu ouvres <strong>la</strong> porte <strong>et</strong> tu descends du train, tu lis « fait de dép<strong>la</strong>cerquelqu’un ou quelque chose ». Tu marches sur le quai de <strong>la</strong> voiequatre, tu cherches <strong>la</strong> sortie vers le hall de <strong>la</strong> gare, tu regardesles panne<strong>aux</strong> électroniques, tu passes dans un tunnel, tu lis« elle dort <strong>à</strong> côté de toi, tu sens son corps contre le tien, tuentends sa respiration, elle rêve <strong>à</strong> toi » ; tu dois prendre un trainqui va <strong>à</strong> Lausanne, tu lis « Palezieux-Lausanne-Genève-GenèveAéroport », tu montes dans ce train, tu cherches une p<strong>la</strong>ce libre,tu es assis, tu t’endors, tu lis « acheminement, dép<strong>la</strong>cement,expédition, transfert », tu te réveilles, le train est arrêté en garede Genève, tu lis « elle a pris ton tee-shirt rouge », tu te lèves,tu sors dans le couloir, tu marches, tu descends du train, tucherches un train qui va <strong>à</strong> Lausanne. Tu lis « chaleur, effusion,é<strong>la</strong>n, emballement, exaltation, griserie, ivresse, ravissement,enivrement, transe, désenchantement, désillusion ». Elle dort<strong>et</strong> tu <strong>la</strong> caresses tu lui touches d’abord l’épaule droite puis sonbras, son coude, sa cuisse, son genou, tu lis « trouver un moyende transport », tu lis « croissants matin midi soir nuit matin »,elle bouge, elle dit quelque chose « améliorer le réseau destransports en commun », tu lis « IC Lausanne-Fribourg-Bern »,tu montes dans le train, tu trouves une p<strong>la</strong>ce libre, tu es assis,tu sors le livre de <strong>la</strong> poche gauche de ta veste noire, tu réalisesque tu n’as plus tes lun<strong>et</strong>tes <strong>et</strong> tu lis « elle se r<strong>et</strong>ourne <strong>et</strong> sa maingauche caresse ton visage, ta main droite lui caresse le dos,<strong>la</strong> girafe est partie boire de l’eau <strong>et</strong> le coupe-papier est tombésur <strong>la</strong> table, tes mains sont froides, les siennes sont chaudes,le chiffre inscrit sur le bout de papier, <strong>la</strong> femme qui va au travail,l’histoire du môme, ton corps qui s’endort, tu te réveilles, l<strong>et</strong>rain est arrêté, tu lis « Lausanne », tu te lèves, tu sors dans lecouloir, tu fais quelques pas, tu descends du train ». Genève-Cornavin. Lausanne. Fribourg. Palezieux. Lausanne. Genève-Cornavin. Nyon. Lausanne.44 45


1 2 3 4 5 6 7 8Niveau facileDésarméesPersonnelen jeanTissesa toileVoiealternativeSale endoublePinceou l<strong>et</strong>tre33Toujours enfin de soirée 3Il vaut unebonne trempePliPersonnelen criseVersantSerra fortCa suffit !6Passa<strong>la</strong> porteRevientau galopR<strong>et</strong>ientle trot2Changeade voixChocottes37IledeFranceUn marchéd’étrangersPrincipede vieOrganiseles JOJuré avecun nomnaturelle ou drôleKilly ouGrange ontdébutéavec luiiPratiquel’ouverture 3Entenduouacquit19 e x 5Remp<strong>la</strong>celes dans1ExistesPâmai (se)Avec tropd’eau, ilssont pourrisPartagés…en communA fleurd’iris5Parti enItalie<strong>Le</strong> débutdes pépinsArrivé bienmal <strong>à</strong> <strong>la</strong> finRêve5Têted’écrouFaisceaude chaînesPassepartoutOrientDonnefaim83C’est-<strong>à</strong>-direc’est-<strong>à</strong>direAppeléEtoffes dedeuil <strong>et</strong> dereligieuses4Réalisé par Yves Cunow.1234567891011121 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12Niveau difficileHorizontalement1. Inclinaison toute naturelle • Habitude bien ancrée 2. Article en or ? • Repaire de rapace •A une corde autour de <strong>la</strong> gorge 3. Exaltation collective 4. Chouchouté • Première l<strong>et</strong>tre <strong>aux</strong>Hébreux 5. Se sent bien dans les milieux incultes • Supprimés • Celle de Rousseau débuta<strong>à</strong> Genève 6. Rem<strong>et</strong>tre en de bonnes mains • Ordre des avocats ! 7. Fait l’article ou bande •Avec lui on rit jaune • Gracieux 8. De différente façon • Dieu qu’un vin rend dangereux9. Note de restaurant • Faire passer une tisane 10. On le forge en l’éduquant 11. Manquantcruellement d’amour • Possessif • Défilé du 14 Juill<strong>et</strong> 12. Rêverie d’un promeneur solitaire •Solution de remp<strong>la</strong>cement.Verticalement1. Tribu où le pouvoir passe de père en fils • Inutilisable 2. Rue montante • À vos souhaits •Aide du PC <strong>à</strong> l’é<strong>la</strong>boration des proj<strong>et</strong>s 3. On y travaille pour des prunes • C’est un rapide4. On y a bu du vin nouveau • Faire son trou 5. <strong>Le</strong>s grands hommes <strong>la</strong> construisent •Rousseau <strong>la</strong> rendit <strong>à</strong> Ermenonville 6. Cous<strong>et</strong>te • C’est un bon iso<strong>la</strong>nt 7. Annoncedu nouveau… en trois points • Vont <strong>à</strong> l’aventure 8. Court <strong>et</strong> dit que tout va bien • Enconséquence 9. La voix d’un grand-duché • On perd son temps <strong>à</strong> le chasser 10. Accessoirede l’œnologue • Elle monte <strong>aux</strong> arbres 11. Au-dessus du sol • Médiocre • Un rayon mal vu12. Parmi • Addition de divisions.Réalisé par Hervé Hardouin.46 47


Solutions jeuxR<strong>et</strong>rouvez plus de grilles sur www.a<strong>la</strong>croiseedesmots.comD E S T CJ E N A T U R E LN E T E V A S EA U T R E M E N TC R A E S DP L I R E P C IE E E X P O R TC A R A C T È R ER M U A T U ER I D E S S S S SS E C I O E CP E N C H A N T OE T R E I G N I TA S S E Z E T E SP E N C H A N T P L IA U A I R E R E AT R A N S P O R T S CR G A T E A L E P HI V E O T E S V I EC O N F I E R N I E ZL E O R R I A N TA U T R E M E N T R AN R E I N F U S E RC A R A C T E R E MH A I M A R E V U ES O N G E R E L E V ERemerciements<strong>Le</strong> ministère de <strong>la</strong> Culture <strong>et</strong> de <strong>la</strong>Communication (délégation <strong>générale</strong><strong>à</strong> <strong>la</strong> <strong>la</strong>ngue <strong>française</strong> <strong>et</strong> <strong>aux</strong> <strong>la</strong>nguesde France) remercie chaleureusement :Ses partenaires belges, québécois<strong>et</strong> suisses, ainsi que l’Organisationinternationale de <strong>la</strong> Francophoniepour leur participation active<strong>et</strong> enthousiaste <strong>à</strong> l’écriture de ce <strong>livr<strong>et</strong></strong>.<strong>Le</strong>s dictionnaires <strong>Le</strong> Robert pour leurprécieux concours <strong>à</strong> travers les définitionsdes dix mots <strong>et</strong> citations extraites duNouveau P<strong>et</strong>it Robertde <strong>la</strong> <strong>la</strong>ngue <strong>française</strong> 2011, du GrandRobert de <strong>la</strong> <strong>la</strong>ngue <strong>française</strong> 2011<strong>et</strong> du Dictionnaire historique de<strong>la</strong> <strong>la</strong>ngue <strong>française</strong>.Éliane Barac<strong>et</strong>ti, chargée de mission« Rousseau 2012 » de <strong>la</strong> régionRhône-Alpes pour son choix decitations de Jean-Jacques Rousseau.L’association de cruciverbistesÀ <strong>la</strong> croisée des motspour <strong>la</strong> réalisation des grillesdes mots croisés <strong>et</strong> fléchés.48 49


Ministère de <strong>la</strong> Culture<strong>et</strong> de <strong>la</strong> Communication<strong>Délégation</strong> <strong>générale</strong><strong>à</strong> <strong>la</strong> <strong>la</strong>ngue <strong>française</strong><strong>et</strong> <strong>aux</strong> <strong>la</strong>ngues de France6 rue des Pyramides75001 ParisDélégué généralXavier NorthDélégué général adjointJean-François Baldidis-moidix motsqui teracontentMission sensibilisation<strong>et</strong> développement des publicsStéphanie Guyard33 (0)1 40 15 36 81stephanie.guyard@culture.gouv.frCoordination des publicationsDominique Bard-CavelierGraphisme <strong>et</strong> illustrationsAgnès Dahan StudioDis-moi dix mots qui te racontentSemaine de <strong>la</strong> <strong>la</strong>ngue <strong>française</strong><strong>et</strong> de <strong>la</strong> Francophoniedu 17 au 25 mars 2012www.dismoidixmots.culture.frISSN imprimé : 1960-8632ISSN en ligne : 1958-5225Ministère des Affairesétrangères <strong>et</strong> européennesMinistèrede l'Éducation nationale,de <strong>la</strong> Jeunesse<strong>et</strong> de <strong>la</strong> Vie associativeMinistère de <strong>la</strong> Culture<strong>et</strong> de <strong>la</strong> Communication

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