ACCES AU FINANCEMENT DU LOGEMENT POUR LES MENAGES ...

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26.06.2015 Views

TABLE DE MATIERE Méthodologie I- ACCES AU FINANCEMENT DU LOGEMENT POUR LES MENAGES LES PLUS DEMUNIS Préambule Quelques expériences internationales de référence en matière de financement du logement 1 - L'expérience chilienne 2 - L'Indonésie 3 - Les Philippines 4 - La Thaïlande 5 - La Tunisie 6 - Programme de financement de logements de la Grameen Bank Etude d'expériences pilotes de financement réalisées auprès de groupes communautaires cibles 1 - Le fonds communautaire pour l'amélioration de l'habitat à Fortaleza au Brésil 2 - Densification de l'habitat à Villa Salvador au Pérou 3 - Le Plan d'aide mutuelle au Mexique (1er cas) 4 - Projet CNVI au Mexique (2ème cas) 5 - Projet d'amélioration d'un quartier à Ho Chi Minh Ville au Viêt-nam 6- Opération de crédits logement en Indonésie (1er cas) 7 - Programme d'amélioration des quartiers populaires - Kampung Improvement Program (KIP) - Indonésie (2ème cas) 8 - Programme de développement du logement au Pakistan (1er cas à Hyderabad) 9 - Programme de développement du logement au Pakistan (2ème cas à Karachi) 10 - Programme de prêts communautaires hypothécaires aux Philippines 11 - Restructuration - régularisation du quartier d'habitat irrégulier Médina Fass M'Bao de la commune de Pikine au Sénégal Tableaux synoptiques Conclusions relatives au financement du logement pour les ménages les plus démunis et la résorption de l'habitat précaire 3 5 5 6 6 8 9 10 10 11 13 13 14 15 16 17 17 18 19 20 21 22 24 28 II - LA REGULARISATION DU PROCESSUS DE DEVELOPPEMENT FONCIER DANS L'HABITAT INFORMEL Présentation générale: 1 - Le processus de développement informel du foncier 2 - La régularisation du développement foncier informel 31 31 31 32 3 - Le cadre légal de la régularisation foncière 4 - Le cadre institutionnel de la régularisation foncière Les études de cas illustratifs: 1 - La Thaïlande 2 - Le Venezuela 3 - La Jordanie 4 - L'Egypte 5 - L'Algérie 33 34 34 34 35 36 37 38 1

TABLE DE MATIERE<br />

Méthodologie<br />

I- <strong>ACCES</strong> <strong>AU</strong> <strong>FINANCEMENT</strong> <strong>DU</strong> <strong>LOGEMENT</strong> <strong>POUR</strong> <strong>LES</strong> <strong>MENAGES</strong> <strong>LES</strong> PLUS DEMUNIS<br />

Préambule<br />

Quelques expériences internationales de référence en matière de financement du logement<br />

1 - L'expérience chilienne<br />

2 - L'Indonésie<br />

3 - Les Philippines<br />

4 - La Thaïlande<br />

5 - La Tunisie<br />

6 - Programme de financement de logements de la Grameen Bank<br />

Etude d'expériences pilotes de financement réalisées auprès de groupes communautaires<br />

cibles<br />

1 - Le fonds communautaire pour l'amélioration de l'habitat à Fortaleza au Brésil<br />

2 - Densification de l'habitat à Villa Salvador au Pérou<br />

3 - Le Plan d'aide mutuelle au Mexique (1er cas)<br />

4 - Projet CNVI au Mexique (2ème cas)<br />

5 - Projet d'amélioration d'un quartier à Ho Chi Minh Ville au Viêt-nam<br />

6- Opération de crédits logement en Indonésie (1er cas)<br />

7 - Programme d'amélioration des quartiers populaires - Kampung Improvement Program<br />

(KIP) - Indonésie (2ème cas)<br />

8 - Programme de développement du logement au Pakistan (1er cas à Hyderabad)<br />

9 - Programme de développement du logement au Pakistan (2ème cas à Karachi)<br />

10 - Programme de prêts communautaires hypothécaires aux Philippines<br />

11 - Restructuration - régularisation du quartier d'habitat irrégulier Médina Fass M'Bao de la<br />

commune de Pikine au Sénégal<br />

Tableaux synoptiques<br />

Conclusions relatives au financement du logement pour les ménages les plus démunis et la<br />

résorption de l'habitat précaire<br />

3<br />

5<br />

5<br />

6<br />

6<br />

8<br />

9<br />

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II - LA REGULARISATION <strong>DU</strong> PROCESSUS DE DEVELOPPEMENT FONCIER<br />

DANS L'HABITAT INFORMEL<br />

Présentation générale:<br />

1 - Le processus de développement informel du foncier<br />

2 - La régularisation du développement foncier informel<br />

31<br />

31<br />

31<br />

32<br />

3 - Le cadre légal de la régularisation foncière<br />

4 - Le cadre institutionnel de la régularisation foncière<br />

Les études de cas illustratifs:<br />

1 - La Thaïlande<br />

2 - Le Venezuela<br />

3 - La Jordanie<br />

4 - L'Egypte<br />

5 - L'Algérie<br />

33<br />

34<br />

34<br />

34<br />

35<br />

36<br />

37<br />

38<br />

1


6 - La Côte d'Ivoire<br />

7 - La Guinée<br />

8 - Le Congo Démocratique (ex-Zaïre)<br />

9 - La Zambie<br />

III - ACTIONS DE S<strong>AU</strong>VEGARDE DES MEDINAS ET DE L’HABITAT ANCIEN<br />

1. La médina de Tunis<br />

2. La Casbah d'Alger<br />

3. La vieille ville d'Alep<br />

4. Projet de réhabilitation des quartiers de Balat et de Fener<br />

(centre historique d'Istanbul)<br />

IV - EXPÉRIENCE TUNISIENNE DE LUTTE CONTRE L’HABITAT INSALUBRE<br />

0- Introduction<br />

1- Quantification de l'habitat vétuste et insalubre<br />

2- Problématiques de l’habitat insalubre<br />

3- Les principaux instruments de maîtrise foncière<br />

4- Les opérateurs d’aménagement<br />

5- Instruments spécifiques à la réhabilitation des tissus anciens<br />

ANNEXES<br />

Le problème du logement dans le monde<br />

La déclaration d’Istanbul et le programme pour l’habitat. Conférences des Nations Unies sur<br />

les établissements humains (Habitat II), Istanbul, Turquie 3-14 juin 1996<br />

La situation du logement en France : du logement insalubre aux exclus du logement<br />

Fiches de projets<br />

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39<br />

40<br />

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42<br />

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56<br />

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80<br />

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L'EXPERIENCE INTERNATIONALE<br />

Méthodologie<br />

"Les enseignements que l'on peut tirer des expériences menées par d'autres, dans<br />

d'autres contextes, nécessitent la compréhension préalable des différences, plus que des<br />

similarités, en se méfiant des analogies, très séduisantes mais le plus souvent<br />

trompeuses" 1<br />

En prenant en compte cette observation l'étude s'attachera à explorer les expériences et<br />

pratiques des pays qui ont engagé des opérations de résorption de l'habitat précaire en<br />

portant toutefois un intérêt particulier à ceux de ces pays qui présentent, au moins pour<br />

certains aspects socio-économiques et/ou culturels donnés, des communautés avec la<br />

problématique du Maroc. Cependant les pays observés n'ayant pas toujours engagés des<br />

opérations couvrant tous les aspects de l'habitat insalubre tels que compris dans cette<br />

étude, une sélection assez nombreuse de cas sera faite pour réunir le plus large éventail<br />

de solutions et de pratiques.<br />

Les expériences seront étudiées selon les thèmes suivants :<br />

- en premier lieu la question du financement du logement pour les ménages a faibles<br />

revenus afin de décrire les différentes options et solutions dégagées soit par les<br />

pouvoirs publics, soit par les intéressés eux-mêmes, en vue de dégager des<br />

conclusions sur les pratiques en vigueurs dans certains pays (notamment les pays en<br />

développement) dont les stratégies en matière de financement ont connu des succès<br />

intéressants ou, à contrario, s'interroger sur les limites d'autres démarches moins<br />

performantes. Ce chapitre fera appel à des analyses générales ainsi qu'à des études<br />

de cas en vue de proposer des synthèses globales et comparatives,<br />

- puis la question du foncier qui représente souvent la pierre d'achoppement,<br />

notamment dans les pays en développement, pour la mise en place d'une politique<br />

permettant une réponse massive aux besoins en logements des ménages à faibles<br />

revenus. Cette question sera également abordée à travers les pratiques des vingt<br />

dernières années dans des pays d'Amérique Latine, d'Asie, du Monde Arabe et<br />

d'Afrique afin d'aboutir à des conclusions et des analyses comparatives des différentes<br />

pratiques,<br />

- les expériences en matière de traitement de l'habitat ancien seront étudiées à travers<br />

un certain nombre de pays dont la structure sociale, culturelle et historique de ce type<br />

d'habitat peut avoir une valeur significative pour la réflexion marocaine au regard du<br />

traitement des médinas,<br />

- les montages institutionnels et les questions d'ordre réglementaires et juridiques seront<br />

généralement décrites à la faveur de discussions des différentes questions ci-dessus,<br />

en incluant les questions relatives au rôle de l'Etat, au ciblage des populations<br />

bénéficiaires, au partenariat, etc.<br />

- enfin, l’expérience tunisienne et les différents instruments mis au point en matière de<br />

lutte contre l’habitat insalubre seront décrits dans la partie finale du rapport.<br />

1 In GRET (Groupe de recherche et d'échanges technologiques) Accès au financement du logement<br />

pour les ménages à faibles revenus - mai 1995<br />

3


Des tableaux synoptiques seront proposés afin d'offrir une vision synthétique de ces<br />

expériences et de permettre des analyses comparatives rapides.<br />

La majeure partie des informations et données de ce chapitre a été puisée dans la<br />

documentation indiquée dans la base de données documentaires fournie par la présente<br />

étude, et tout particulièrement les documents et travaux suivants :<br />

- l'étude de la Banque Mondiale relative aux aspects financiers et fiscaux du logement<br />

au Maroc, et plus particulièrement le rapport sur l'expérience étrangère en matière de<br />

financement du logement,<br />

- L'étude sur les systèmes innovants de crédit et accès au financement du logement<br />

pour les ménages à faible revenu en Asie (ACT, SCIC- AMO),<br />

- Les actes de la troisième conférence internationale sur le logement (Washington<br />

1990),<br />

- Regularizing the informal land development process (USAID)<br />

- Les rapports du GRET, de l'IFU et du Programme Solidarité Habitat sur les<br />

expériences de coopération française,<br />

- Les actes de la conférence de Tunis sur la réhabilitation de l'habitat ancien,<br />

- La nota conjointe de la ville d'Alep et de GTZ sur la réhabilitation de la vieille ville<br />

d'Alep,<br />

- Rapport de l'Office d'intervention et de régulation des opérations d'aménagement de la<br />

Casbah (OFIRAC) - Décembre 1989<br />

4


I- <strong>ACCES</strong> <strong>AU</strong> <strong>FINANCEMENT</strong> <strong>DU</strong> <strong>LOGEMENT</strong> <strong>POUR</strong> <strong>LES</strong> <strong>MENAGES</strong> <strong>LES</strong> PLUS<br />

DEMUNIS<br />

Préambule:<br />

Les politiques de financement, un segment des politiques globales de l'habitat<br />

La poussée démographique de ce siècle et l’exode du monde rural vers les villes, qui en<br />

est résulté, s’est traduit, notamment dans les pays en développement, par une occupation<br />

non organisée de l’espace périurbain, et un habitat généralement en deçà des normes<br />

établies et souvent dans des conditions d’insalubrité prononcée. Plus du tiers de la<br />

population vit aujourd’hui dans des bidonvilles et des quartiers insalubres et la situation<br />

s’aggrave, de façon générale, notamment dans les pays en développement.<br />

Malgré certains progrès économiques globaux dans ces pays (tels que ceux d’Asie), les<br />

succès en matière de croissance ne se sont pas toujours traduits par une réduction des<br />

inégalités économiques et sociales. Sous les contraintes de l’ouverture sur l’économie<br />

mondiale et la mise en place de règles de gestion rigoureuses en application des mesures<br />

d’ajustements structurels les réponses aux besoins sociaux ont souvent été différées ou<br />

annulées. Parmi ceux-là les besoins en logements et en équipements d’infrastructures<br />

urbaines, surtout en direction des plus faibles et des plus démunis, ont été aggravés.<br />

Dès les années 70 la nécessité de mettre en place des politiques de logement et<br />

d’engager des actions spécifiques aux ménages à faible revenu, s’est progressivement<br />

imposée. Ces politiques reposaient généralement sur l’initiative publique et l’action quasi<br />

exclusive de l’Etat et étaient, le plus souvent, orientées vers la prise en charge des<br />

besoins des couches les plus démunies de la population. Pour cela ces politiques ont<br />

cherché à encourager l’offre en augmentant la production de logements économiques.<br />

Toutefois cette politique a très vite connu ses limites en raison de l’incapacité des pays à<br />

continuer à subventionner cette production et du glissement progressif du dispositif qui a<br />

finalement vu les ménages disposant de revenu occuper les logements destinés aux plus<br />

démunis, sans toutefois en être satisfaits, en raison des normes qui ont présidé à leur<br />

construction.<br />

Progressivement, et dans la recherche de la réduction de leurs déficits budgétaires, les<br />

Etats vont se désengager de l’intervention directe en redéfinissant le rôle du secteur public<br />

qui se limite de plus en plus à des fonctions d’aménagement foncier et de moins en moins<br />

à celle de la production du logement. La troisième conférence internationale à Washington<br />

sur le logement («third international shelter conference ») de 1990 a traduit cette nouvelle<br />

pensée en proposant une redéfinition des rôles respectifs des secteurs publics et privés.<br />

Elle consacre notamment le fait que les politiques de logement doivent consister à aider<br />

les ménages à se loger plutôt que de tenter de leur fournir directement un logement. Cette<br />

approche a conduit de nombreux pays à repenser leur politique de logement en la<br />

réorientant vers la maîtrise du développement foncier, la réalisation d’infrastructures et<br />

d’équipements urbains en tentant d’en rendre l’accès plus équitable aux différentes<br />

catégories sociales et en rendant plus disponibles les facteurs de production du logement<br />

à tous les segments de la société.<br />

5


Il est, dès lors, devenu évident que la priorité devra être donnée, dans le cadre de la mise<br />

en place de cette politique au rôle de plus en plus important qu’aura à jouer le secteur<br />

privé et surtout donner au financement du logement une place stratégique dans les<br />

politiques économiques des pays. Les décennies 80 et 90 ont été, dans ce cadre, riches<br />

en expériences dans les pays en développement, notamment pour la recherche de<br />

solutions durables adaptées aux ressources des pays, innovantes et ajustées aux besoins<br />

et aux capacités financières des ménages à faible revenu et à leurs conditions de vie<br />

Quelques expériences internationales de référence en matière de financement du<br />

logement<br />

Un certain nombre de politiques de financement du logement ont été reconnues comme<br />

ayant contribué de façon décisive à la relance, voire au succès des politiques de l'habitat<br />

dans certains pays en développement. Il est en effet admis, de plus en plus clairement<br />

aujourd'hui, que le financement occupe une place stratégique dans le succès ou l'échec<br />

des politiques de logement des pays, une place au moins aussi importante que les<br />

questions du foncier, des infrastructures, des matériaux de construction et de la gestion<br />

urbaine.<br />

Dans les exemples suivants que nous avons choisis de présenter, et dont les résultats en<br />

matière de développement du secteur du logement pour les ménages à faible revenu sont<br />

variables, ont observera que l'accent a été souvent mis sur la recherche de solutions<br />

destinées à accroître les ressources financières destinées au logement et le drainage de<br />

l'épargne vers les circuits formels de crédit.<br />

1 - L'expérience chilienne<br />

Le Chili est souvent cité en exemple pour ses réalisations en matière de logement en<br />

direction des ménages à faible revenu par la mise en place, notamment, d'une politique de<br />

financement faisant appel à des mécanismes de production formels impliquant fortement<br />

le secteur privé, incitant l'épargne des ménages et permettant des performances<br />

remarquables en matière de coûts et de niveau de production. Durant la décennie 1990 le<br />

Chili a pu, en effet, atteindre le rythme de 100.000 logements par an, ce qui a permis à ce<br />

pays de 13,5 millions d'habitants de porter sa production de logements à un niveau<br />

supérieur à celui de la formation des ménages.<br />

Le succès de l'expérience chilienne tient à l'adhésion des promoteurs privés et des<br />

coopératives au système mis en place par le Ministère de l'habitat et de l'urbanisme du<br />

Chili (MINVU) qui a permis le lancement de programmes destinés aux ménages à revenu<br />

moyen et faible. Ce système est basé sur une aide apportée aux ménages qui ont<br />

épargné en moyenne 12,5% de la valeur d'un logement à faible coût et qui sont éligibles à<br />

cette aide selon un système de pointage. Cette aide est inversement proportionnelle à la<br />

valeur du logement et représente 75% de ce coût quand il n'excède pas 5.000 $ à 13% si<br />

le logement coûte 18.000 $.<br />

Le MINVU annonce périodiquement une émission publique de certificats de subvention<br />

destinés aux ménages cibles et sollicite, par ce biais, des appels d'offres de la part de<br />

promoteurs privés pour la construction de logements destinés à cette population. Les<br />

6


promoteurs se sont vite intéressés à ce marché et ont souvent pris les devants en offrant<br />

des programmes qui répondent aux normes du Ministère. De nombreux promoteurs se<br />

sont également rapprochés des organisateurs de la demande (tels que les coopératives)<br />

afin d'identifier les ménages éligibles au programme et de s'assurer d'un nombre suffisant<br />

d'acheteurs pour la rentabilité des opérations réalisées.<br />

Les coopératives sont un instrument très important du succès de ce programme dans la<br />

mesure où elles possèdent une capacité importante d'organisation des futurs bénéficiaires<br />

en organisant leur effort d'épargne et en se rapprochant des promoteurs pour le montage<br />

des opérations. Ces coopératives peuvent être soit "ouvertes" quand elles fonctionnent de<br />

façon non limitée dans le temps en recrutant des membres qu'elles font épargner et en<br />

utilisant leur épargne pour acquérir des terrains et organiser des opérations de<br />

construction de logements selon les besoins et capacités financières des membres de la<br />

coopérative, ou. "fermées" c'est à dire qu'elles s'éteignent dès la satisfaction des besoins<br />

en logement de leurs membres originaux.<br />

La politique du logement au Chili<br />

Si le succès de ce programme est, bien sûr, à rechercher dans l'attrait que représente la<br />

formule de subvention personnalisée et de la garantie qui est donnée aux promoteurs de<br />

trouver un marché solvable, il n'en demeure pas moins vrai que la politique du logement<br />

du Chili a, dans sa globalité, contribué grandement à ce succès.<br />

Les éléments essentiels de cette politique sont les suivants :<br />

- la politique du logement s'insère dans l'orientation générale de la politique<br />

gouvernementale qui prône le développement d'une économie de marché à orientation<br />

sociale,<br />

- dans une perspective de promotion de la propriété privée, les acteurs privés (à partir<br />

des ménages, jusqu'aux promoteurs et entreprises de construction) sont chargés de<br />

toute l'animation du programme,<br />

- les subventions sont explicites, directes et transparentes et accordées selon l'effort<br />

d'épargne et inversement proportionnelle au revenu.<br />

- un marché du logement diversifié et fluide a été développé afin de permettre aux<br />

ménages de faire correspondre leur mode de logement avec l'évolution de leurs<br />

besoins et de leurs revenus.<br />

Cette politique est essentiellement articulée autour de deux objectifs :<br />

- constituer un stock de logements suffisants pour donner un logement a tout ménage<br />

chilien dans des conditions de prix et de qualité adéquates,<br />

- créer les conditions nécessaires pour que le logement soit perçu comme un placement<br />

rentable et favoriser l'épargne des ménages.<br />

L'épargne<br />

Le principe de l'épargne représente la clé de voûte du système. L'épargne constitue un<br />

apport financier qui prend en charge une partie du prix d'acquisition du logement qui<br />

représente lui-même le risque économique assumé par l'acheteur. Cet apport réduit le<br />

montant de prêt nécessaire et améliore la garantie du prêteur. L'obligation faite aux<br />

ménages de réaliser une épargne préalable traduit un principe qui veut que l'acquisition du<br />

logement soit considérée "comme une conquête et non comme un don". De la sorte l'Etat<br />

7


entend responsabiliser les ménages non seulement dans la participation à l'économie<br />

nationale, mais également à mieux "contrôler leur destin".<br />

Ce système d'épargne logement est fondé sur les principes de rentabilité (l'épargne<br />

accumulée ne doit pas perdre de sa valeur), de sécurité (l'épargnant ne doit courir aucun<br />

risque de voir son épargne disparaître en cas de défaillance de l'institution financière où<br />

elle est déposée et elle est garantie à 90% par l'Etat) et de liquidité (l'épargnant doit<br />

pouvoir disposer de son épargne à tout moment, sous réserve de pénalités quant au<br />

rendement et aux bénéfices des primes recherchées).<br />

Les institutions agréées pour la collecte de l'épargne et à émettre les certificats<br />

d'épargne préalable sont :<br />

- les banques et les sociétés de crédit qui offrent des comptes d'épargne logement,<br />

- les associations d'employés, groupements, etc.<br />

- les coopératives ouvertes de logement qui collectent les apports en capital de leurs<br />

membres.<br />

L'épargne préalable est totalement intégrée aux normes des différents programmes<br />

d'aides du Ministère et les soldes d'épargne accumulés dans les comptes sont ajustés à<br />

l'inflation. Enfin l'apport d'un terrain peut remplacer l'épargne préalable comme condition<br />

pour poser sa candidature à une subvention.<br />

Perspectives d'évolution et du système<br />

En début de décennie 90 et afin de renforcer d'intégrer plus efficacement le segment du<br />

logement social dans le marché financier, un certain nombre de mesures ont été prises qui<br />

visent à :<br />

- renforcer le marché primaire par la réduction du taux d'effort par rapport au revenu<br />

admissible, par la mise en place d'un plan d'assurance chômage et de techniques de<br />

réduction du taux d'impayés des versements hypothécaires (incitatifs et coercitifs),<br />

- la mise en place d'un système de garantie ou d'assurance hypothécaire,<br />

- la mise en place d'un système de titrisation des prêts hypothécaires afin de permettre<br />

le réinvestissement des ressources à long terme des fonds de pension et sociétés<br />

d'assurances dans ces titres hypothécaires. Il est à noter, toutefois, qu'à la fin 1996,<br />

ce système de titrisation n'était toujours pas opérationnel.<br />

2 - L'Indonésie<br />

Avant les bouleversements politiques, économiques et sociaux consécutifs à la crise<br />

financière de 1998, l'Indonésie avait connu une croissance économique rapide de l'ordre<br />

de 7% par an et une inflation modérée (7%) accompagnée d'une urbanisation rapide en<br />

raison d'un déficit important de logements, déficit couvert à moins de 15% par le marché<br />

formel. En milieu urbain 85 % du financement de la construction de logements est assurée<br />

par le marché informel.<br />

Le financement hypothécaire officiel est accordé par la Banque de l'Habitat Public qui<br />

accorde des crédits bonifiés aux ménages à faible revenu et aux employés du secteur<br />

public sur ressources fournies par la Banque Centrale, les subventions représentant entre<br />

8


le tiers et la moitié de la valeur du logement. Quant aux crédits hypothécaires des<br />

banques commerciales ils sont réservés aux ménages à revenu supérieur.<br />

Afin d'accroître la disponibilité de ressources et de pouvoir les répartir à travers les<br />

différentes catégories de revenus, le gouvernement a entamé en 1994 l'étude de la mise<br />

en place d'un marché hypothécaire secondaire. De plus, et afin de toucher les ménages à<br />

faible revenu la politique de l'habitat mise en place par le gouvernement indonésien vise à<br />

utiliser des mécanismes de financement adaptés à cette catégorie sociale. Deux mesures<br />

sont à signaler dans ce cadre :<br />

- Une banque commerciale publique qui octroie des crédits à ces ménages à des taux<br />

de 32%, très supérieurs à ceux accordés aux clients solvables mais aussi très<br />

inférieurs à ceux du marché informel. Le montant élevé de ces taux est expliqué par le<br />

coût administratif élevé des petits prêts,<br />

- un programme de crédits communautaires a été mis en place par le gouvernement en<br />

direction des ces catégories de ménages, qui doivent se regrouper afin de pouvoir<br />

assurer collectivement la responsabilité de remboursement des crédits. Les crédits<br />

peuvent être non seulement utilisés pour l'achat du terrain et pour la construction mais<br />

ils sont destinés également au développement d'activités génératrices de revenus.<br />

Deux opérations pilotes visant à améliorer les conditions de vie dans des quartiers<br />

d'habitat insalubre sont décrits plus bas qui indiquent les performances, les succès, mais<br />

aussi les limites de cette politique de financement, notamment sa dimension relative aux<br />

crédits communautaires.<br />

3 - Les Philippines<br />

Afin de répondre à une situation d'insuffisance chronique de logements (déficit théorique<br />

de près de quatre millions), et d'une urbanisation rapide (à l'instar du Maroc, les<br />

Philippines ont un taux d'urbanisation de 50% et donc appelé encore à croître de façon<br />

importante) marquée par une augmentation également rapide de l'habitat précaire en<br />

milieu urbain, les Philippines se sont dotées d'un dispositif qui repose encore d'une façon<br />

importante sur le secteur public tant au plan du financement que de la production du<br />

logement. Le dispositif institutionnel s'articule autour d'un certain nombre d'organismes<br />

publics tels que :<br />

- une Caisse de refinancement hypothécaire qui utilise les ressources de la sécurité<br />

sociale et des fonds de retraite pour acheter les prêts hypothécaires souscrits par les<br />

institutions financières. Cette caisse gère le Programme unifié de prêts au logement<br />

indiqué ci-dessous ;<br />

- une Société d'assurance hypothécaire qui assure des prêts, considérés comme des<br />

actifs sans risque ;<br />

- un Fonds de pension mutuel a pour mandat d'utiliser ses ressources pour le<br />

financement de prêts hypothécaires pour ses affiliés et de développer des plans<br />

d'épargne logement. Il peut également offrir des garanties de prêts aux promoteurs.<br />

- un Programme unifié de prêts au logement qui fonctionne en autofinancement grâce à<br />

un système de péréquation, les ménages à revenu élevé payant 3% de taux d'intérêt<br />

de plus et les ménages à faible revenu 3% de moins ;<br />

- enfin un Programme d'hypothèque communautaire permet aux groupements<br />

communautaires et aux coopératives de mettre des terrains en garantie de prêts<br />

hypothécaires.<br />

9


4 - La Thaïlande<br />

La Thaïlande est l'un des pays d'Asie qui a réalisé le plus de progrès dans le<br />

développement d'un secteur du logement dynamique et ouvert. La production annuelle de<br />

logements est, en effet, passée entre 1985 et 1994 de 30.000 à 170.000 unités. Ce<br />

succès s'explique par la mise en place d'une batterie de solutions imaginatives et<br />

innovantes qui s'adressent à toutes les catégories sociales (on se rapportera, à ce sujet,<br />

utilement au chapitre relatif à la régularisation foncière et aux études de cas thaïlandaises<br />

qui y sont décrites) mais également par la part du secteur de l'habitat dans l'économie<br />

thaïlandaise, ce qui a permis un développement spectaculaire des systèmes de<br />

financement du logement.<br />

Ainsi, dans un pays qui a connu une forte croissance économique, l'habitat a compté<br />

jusqu'à près de 30% de l'effort d'investissement global du pays. La construction de<br />

logements a représenté, pendant cette période, près de 10% du PIB !<br />

La clé de coûte du développement du système de financement du logement réside dans<br />

une offre de crédit élargie et qui a permis d'augmenter le nombre de demandeurs<br />

potentiels, en faisant appel à une formule d'hypothèque à taux renouvelable. Toutefois, et<br />

afin de rassurer les emprunteurs qui hésitent à supporter une charge d'intérêts trop lourde<br />

pendant les premières années, une formule fixant le taux pour une période initiale de 3 à 5<br />

ans a été mise en place avec succès. Dès la fin de la décennie 80, les taux d'intérêt<br />

hypothécaires sont passés sous le taux de base des banques commerciales.<br />

Le financement du crédit hypothécaire en Thaïlande est assuré par les dépôts et a<br />

bénéficié de la grande liquidité du secteur financier. Ce marché du crédit hypothécaire est<br />

détenu aux deux tiers par les banques commerciales et au quart par les banques<br />

spécialisées publiques. Il est à noter que ce n'est que très récemment (1995) que le<br />

gouvernement a lancé la mise en place d'un marché hypothécaire secondaire.<br />

5 - La Tunisie<br />

Parmi les pays du Maghreb, la Tunisie est le pays qui est en voie de règlement de son<br />

problème de logement. depuis le début de la décennie la production de logements<br />

s'accroît à un rythme supérieur à celui de la formation des ménages et, en 1993 la<br />

production formelle s'est élevée à 41.000 logements (pour une population inférieure à 10<br />

millions d'habitants) et ce, malgré une hausse importante des prix attribuée aux<br />

dysfonctionnements du système foncier.<br />

La banque de l'Habitat assure la majeure partie du financement formel (75%), le reste<br />

étant pris en charge par les banques commerciales et la Caisse de Sécurité Sociale. Le<br />

financement s'appuie sur un système d'épargne logement qui offre des prêts sur une<br />

durée s'étalant de 13 à 20 ans avec des taux d'intérêt représentant une marge supérieure<br />

de près deux points par rapports aux taux de rémunération de l'épargne.<br />

Toutefois les niveaux des montants de crédit offerts ont commencé à s'avérer insuffisants<br />

par rapport aux besoins des ménages, en raison notamment du renchérissement des<br />

coûts de la construction, ce qui a conduit la Banque de l'Habitat à consentir des<br />

compléments de prêts sur ses propres liquidités en s'exposant à vivre un risque de<br />

liquidité en cas de défection des épargnants qui pourraient souhaiter retirer leur épargne.<br />

10


Enfin, pour les ménages à faible revenu un Fonds de Promotion du Logement Social,<br />

alimenté par prélèvement de 1% du salaire, finance des prêts pour les salariés dont le<br />

revenu se situe entre une à deux fois le SMIG. Ce prêt peut couvrir jusqu'à 90% du coût<br />

du logement à un taux de 5% et pour une échéance pouvant aller jusqu'à 25 ans.<br />

6 - Programme de financement de logements de la Grameen Bank<br />

L'expérience de la Grameen Bank est née en 1976, au Bangladesh pour venir en aide à<br />

une population particulièrement démunie (le PNB par habitant est de l'ordre de 200 $),<br />

exposée aux aléas naturels et généralement dépourvue de ressources stables. L'aspect<br />

révolutionnaire de ce programme est qu'il n'exige aucune garantie de la part de ses clients<br />

déshérités. 25 % du capital de la banque appartient aux emprunteurs eux-mêmes.<br />

Les conditions posées sont que les personnes s'organisent en petits groupes qui agissent<br />

ensemble et de façon disciplinée et veillent collectivement au paiement ponctuel des<br />

échéances de remboursement. Ces groupes sont constitués de cinq personnes et<br />

peuvent, à leur tour, se constituer en centres formés de deux à dix groupes. Les crédits<br />

sont accordés à une personne ou au groupe, pour une période d'un an, et sont<br />

remboursés de façon hebdomadaire, soit à raison de 2% du crédit total. Chaque membre<br />

du groupe dépose, en outre, chaque semaine, une somme équivalent à un trentième de<br />

dollar dans un Fonds du groupe. Sur chaque crédit une déduction obligatoire de 5 % du<br />

montant du crédit, appelée Taxe de groupe, déposée, elle aussi, dans le Fonds, et qui<br />

peut faire l'objet d'un emprunt par les membres du groupe. Enfin une somme est payée<br />

chaque semaine également par les bénéficiaires pour alimenter un fonds d'urgence<br />

destiné à couvrir les risques de maladie ou de décès.<br />

Un employé de la banque apporte son soutient à dix centres en identifiant les besoins,<br />

distribuant les prêts et aidant les membres à tenir leur comptabilité. L'organisation de la<br />

banque est verticale avec une forte décentralisation à la base.<br />

Le programme de crédits à l'habitat de la Grameen Bank a été lancé en 1984, sur les<br />

mêmes principes mais permet des crédits plus élevés (de 300 à 600 $) remboursables sur<br />

une période pouvant s'étaler sur 15 ans. Ils sont essentiellement destinés aux populations<br />

du monde rural. En six ans plus de 10 millions de dollars ont été distribués à 45.000<br />

ménages et a permis à des populations périodiquement sinistrées par les inondations de<br />

construire des maisons plus résistantes en remplaçant les matériaux de pauvre qualité et<br />

non résistants (bambou, jute et adobe) par des structures et des matériaux plus résistants,<br />

en béton.<br />

Le taux de remboursement avoisine les 100 %. Le financement du projet lui-même<br />

provient de la banque Centrale du Bangladesh, et de donneurs étrangers tels que<br />

NORAID, USAID, ACDI, et GTZ.<br />

Plusieurs autres organisations financières 2 pourraient être citées, mais celles qui ont été<br />

présentées plus haut ainsi que les études de cas qui suivent nous semble être une bonne<br />

synthèse de la gamme des expériences et des pratiques intéressantes. Pour le lecteur<br />

2 Tels que le mécanisme T'WIZE d'appui à l'habitat testé en Mauritanie et qui repose également sur un<br />

principe de solidarité communautaire et une double participation financière et en main d'œuvre, ou les<br />

innombrables expériences de tontines organisées autour de la construction de logements.<br />

11


désireux d'approfondir ce balayage des expériences, nous le renvoyons à banque des<br />

données qui indique tous les ouvrages, revues et textes qui pourront être consultés dans<br />

ce sens.<br />

12


Etude d'expériences pilotes de financement réalisées<br />

auprès de groupes communautaires cibles<br />

Un certain nombre de pays, en plus de ceux dont les politiques de financement du<br />

logement ont été décrites plus haut, ont réalisé des expériences pilotes portant sur des<br />

groupes communautaires ciblés, souvent avec l'aide d'organisations internationales. Ces<br />

opérations ont fait l'objet d'évaluation afin de tirer les enseignements utiles pour en<br />

améliorer les pratiques et de garantir leur pérennisation. Les fiches portées en annexe<br />

décrivent de façon détaillée onze études de cas, mais il nous est paru utile de les<br />

présenter, de façon synthétique, dans le corps du texte afin de mettre en exergue les<br />

différentes approches et d'en étudier la réplicabilité dans le contexte marocain.<br />

Chacune de ces expériences est donc brièvement décrite ci-dessous. Après une<br />

description succincte de la politique locale du logement de chacun de ces pays, les projets<br />

sont décrits de façon séquentielle. Pour chacune des opérations étudiées la description en<br />

est faite à travers l'examen des questions relatives :<br />

- au montage du crédit,<br />

- aux conditions de mobilisation des ressources, de la collecte de l'épargne et de leur<br />

gestion,<br />

- à la gestion et au recouvrement du crédit et, enfin<br />

- au bilan de l'opération, de ses conditions de pérennité et, le cas échéant, du caractère<br />

innovant de la pratique.<br />

Des tableaux synthétiques, qui permettront une lecture pratique de ces études de cas,<br />

sont présentés à la fin de ce chapitre.<br />

1- Le fonds communautaire pour l'amélioration de l'habitat à Fortaleza au Brésil :<br />

Cinquième ville du Brésil, la ville de Fortaleza est également l’une des plus pauvres et<br />

connaît une forte poussée de l'habitat précaire. En 1992, un fonds communautaire<br />

spécifique s’appuyant sur le principe de l’épargne-logement a été crée en soutien aux<br />

opérations communautaires d'auto-construction et d'amélioration de l'habitat, permettant<br />

d’offrir aux habitants, organisés en associations de quartier, des prêts limités sur une<br />

courte durée.<br />

Le fonds communautaire est alimenté à parts égales par :<br />

1 - l’épargne des familles gérée par la banque de l’Etat du Ceara où un compte a été<br />

ouvert pour le projet ;<br />

2 - une dotation de la coopération internationale permettant la constitution d’un fonds de<br />

roulement ;<br />

3 - une subvention annuelle de la municipalité de Fortaleza qui n’est pas remboursée par<br />

les populations.<br />

Les familles peuvent emprunter une somme égale au double de leur épargne. Le montant<br />

prêté à chaque famille ne peut excéder 3 salaires minimums. Le prêt octroyé est sans<br />

intérêt et remboursable en 12 mois maximum.<br />

Le projet s’adresse à des familles propriétaires de leur logement ou disposant d'un titre de<br />

droit d’usage. Les travaux à réaliser concernent l’agrandissement de la maison,<br />

13


l’amélioration technique (enduit, revêtement de sol, etc.) ou parfois la construction de murs<br />

de clôture.<br />

L’accès au crédit pour des familles traditionnellement exclues du système bancaire<br />

s’effectue sous certaines conditions (gagner entre 1,5 et 3 SMIG, disposer d’un garant,<br />

constituer des groupes d’épargne de 10 à 30 personnes). Toute famille intéressée doit<br />

s’inscrire au programme par l’intermédiaire d’une association communautaire. Une fois sa<br />

fiche analysée, elle reçoit la visite des techniciens qui effectuent le relevé de la maison et<br />

élaborent le projet des travaux souhaités en fonction du budget familial.<br />

Une fois le budget approuvé, la famille effectue le dépôt de l’épargne et s’engage à<br />

rembourser la part du financement qui lui est prêtée.<br />

L’ensemble de ce système présente trois avantages majeurs :<br />

- les familles sont encouragées à faire l’effort de constituer une épargne préalable ;<br />

- les crédits peuvent êtres accordés aux personnes ayant un emploi dans le secteur<br />

informel,<br />

- les crédits peuvent être obtenus sans titre de propriété, un simple titre de droit d’usage<br />

étant suffisant,<br />

- le système implique un rôle actif des associations d'habitants.<br />

Enseignements:<br />

Le système a prouvé son efficacité puisque les taux de remboursement avoisinent les<br />

100%. La réticence des habitants à déposer leurs économies sur un compte ouvert pour le<br />

projet à la banque de l’Etat a constitué la principale difficulté du programme, de même qu'il<br />

a été constaté qu’il était nécessaire d’assouplir les conditions du prêt accordé initialement<br />

pour l’achat des matériaux.<br />

2 - Densification de l'habitat à Villa Salvador au Pérou :<br />

Au Pérou, les grandes vagues migratoires des années 1970 se sont traduites par<br />

l’occupation de terrains désertiques aux alentours de Lima. C’est ainsi que sont nées les<br />

barriadas qui constituent la principale modalité de croissance urbaine de Lima où les<br />

familles de la seconde génération cohabitent avec leurs parents. Villa El Salvador est une<br />

barriada située à 20 km au sud de Lima de 300 000 habitants. Pour parer à la taudification<br />

et pour permettre aux enfants des premiers occupants de se loger, une expérience d’appui<br />

à l’auto-construction pour une densification des logements adaptée à un usage<br />

multifamilial est lancée en 1988.<br />

Le projet vise les familles les plus démunies, en démontrant les possibilités d’une<br />

densification verticale de l’habitat à partir d’expériences populaires d’auto-construction. Il<br />

s’articule autour de trois objectifs principaux :<br />

- rationaliser le processus de densification en éliminant les effets pernicieux de<br />

taudification ;<br />

- créer de nouveaux mécanismes techniques, légaux, financiers et administratifs<br />

permettant le développement et la généralisation du processus de densification ;<br />

- rétrocéder l’ensemble des mécanismes aux autorités municipales afin qu’elles puissent<br />

assurer la maîtrise du processus à l’échelle du district.<br />

14


Les prêts pour l’achat des matériaux de construction sont octroyés par un organisme<br />

financier privé. Pour convaincre un tel organisme de la rentabilité des prêts à l’habitat en<br />

faveur d’habitants défavorisés, un système de garantie original a été mis en place. La<br />

coopération étrangère a déposé à la banque un fonds de garantie en échange duquel la<br />

banque double le capital qu’elle prête aux habitants sous forme de crédits à un taux<br />

d’intérêt bonifié par rapport au marché et 10% de chaque prêt sont conservés à la banque<br />

au titre de garantie. D’autre part, les bénéficiaires des crédits devant se regrouper par 5 ou<br />

6, la pression sociale que doivent exercer les bénéficiaires sur un mauvais payeur qui<br />

profiterait d’un bien commun, constituait une garantie supplémentaire.<br />

Les prêts doivent être remboursés sur un maximum de trois ans selon le montant, avec un<br />

délai de grâce de deux mois.<br />

Le projet de densification concerne la construction «brute » : structures, canalisations<br />

intérieures d’eau et d’électricité et évacuation.<br />

L’aspect financier du projet est le plus innovant et le plus riche d’enseignement. Il<br />

démontre la possibilité d’intégrer des populations démunies dans un système de crédit<br />

formel. Par cette opération, la banque a découvert une nouvelle clientèle. Outre le projet,<br />

la banque a crée une ligne spécifique de crédits pour la création de micro-activités<br />

économiques par des populations non salariées.<br />

Enseignements:<br />

La sous-estimation de la mobilisation nécessaire des ONG locales tant pour<br />

l’accompagnement social des bénéficiaires n’ayant jamais eu de contact avec le milieu<br />

bancaire, que pour l’appui technique auprès la banque manquant d’expérience en matière<br />

de montages financiers non traditionnels, a constitué la majeure difficulté du projet. La<br />

rétrocession des mécanismes à la municipalité a également posé problème en raison du<br />

climat politique qui prévalait à l'époque de l'expérience.<br />

3 - Le Plan d'aide mutuelle au Mexique (1 er cas) :<br />

La ville de Mexico, devant la poussée unique de son urbanisation, tente de freiner la<br />

croissance urbaine, sous prétexte, notamment, de protection de l'environnement périurbain<br />

et de réduction des coûts d'urbanisation. La densification du tissu urbain existant<br />

reste la seule alternative pour les plus démunis, sachant, en outre, qu'il n'existe aucune<br />

politique destinée à promouvoir une offre de terrains dont le prix serait accessible aux<br />

ménages à faible revenu.<br />

Devant le besoin d'apporter des alternatives pour la production des logements populaires,<br />

l'ONG "Taller de Architectura Popular" (TAP) a mis en place le programme pilote "Plan<br />

d'aide mutuelle de Jalisco". Les ménages pressentis possèdent une unité de logement qui<br />

ne satisfait pas leurs besoins minimums et qui devront être agrandies et améliorées. Le<br />

programme est fondé sur des formes de financement informel dénommées "tombolas",<br />

mis en place par les ménages à faible revenu. Comme soutien à la production du<br />

logement, un centre de matériaux pour la construction a été mis en place ainsi qu'un fonds<br />

liquide, se composant de l'épargne des premières semaines durant lesquelles on<br />

n'amorce pas de travaux, décalant ainsi le calendrier entre recettes de cotisation et<br />

15


amorce des travaux. Une subvention représentant les frais de gestion et d'organisation est<br />

octroyée par le TAP et équivaut à 10-15% des coûts de fonctionnement.<br />

Le système d'épargne fonctionne par l'intermédiaire de la collecte des cotisations<br />

hebdomadaires de tous les participants. Les ressources sont dirigées vers le centre de<br />

matériaux qui fonctionne par vente à la communauté en général. Un crédit par semaine<br />

est octroyé à chacun des participants du programme au cours d'une durée d'environ un<br />

an. L'ordre d'assignation est déterminé moyennant tirage au sort.<br />

Enseignements:<br />

La réplicabilité de ce schéma est limitée dans la mesure où il dépend de la capacité du<br />

financement du groupe d'appui c'est à dire du TAP. C'est pourquoi le système doit donner<br />

lieu à une épargne collective qui, en plus de permettre la reconnaissance du groupe<br />

comme sujet de crédit, doit aussi favoriser la création d'un système d'épargnefinancement.<br />

L'institutionnalisation du TAP doit être envisagée.<br />

la souplesse de l'épargne, qui permet une redistribution des ressources, et la mise en<br />

place d'un centre de matériaux qui permet de faire des économies d'échelles sont deux<br />

aspects innovants qui méritent d'être signalés.<br />

4 - Projet CNVI au Mexique (2 ème cas) :<br />

En 1998 l'ONG mexicaine CENVI, association de professionnels qui travaillent avec des<br />

organisations locales de la ville de Mexico, élabore une expérience pilote de captation et<br />

de gestion de l'épargne populaire destinée à l'acquisition de terrains à bâtir dans un<br />

quartier de Mexico. Le projet "caisse mutuelle d'épargne et de crédit pour l'achat de<br />

terrains" a pour objectif de soutenir la coopérative de logements Guerrero en vue<br />

d'acquérir un terrain pour construire une cinquantaine de logements sociaux. Le projet a<br />

reçu le soutien financier de la coopération étrangère afin de constituer un Fonds de<br />

roulement.<br />

La coopérative dispose d'une épargne constituée par les membres avant la mise en place<br />

du Fonds. Le Fonds a encouragé la mobilisation des ressources des familles en<br />

complément de l'épargne préalable. L'apport initial extérieur permet donc de démarrer un<br />

fonds de roulement qui devra fonctionner de manière indépendante après remboursement<br />

: la coopérative paye le terrain avec le Fonds et les ressources mobilisées par les familles<br />

bénéficiaires, et ces dernières remboursent à la coopérative le montant du Fonds.<br />

Pour avoir accès au crédit, le bénéficiaire doit avoir mobilisé des ressources propres (y<br />

compris son épargne préalable), d'un montant égal au montant du crédit. Les familles<br />

remboursent le Fonds à la coopérative moins d'un an après l'achat du terrain et selon<br />

différentes formules choisies par les bénéficiaires, indexées sur le montant du salaire<br />

minimum.<br />

Enseignements:<br />

La capacité de mobiliser des ressources, à un moment précis, pour saisir une opportunité<br />

d'achat, a permis le succès de l'action. La pérennisation est liée à la capacité de garantie<br />

16


des remboursements offerte par l'organisation populaire qui joue le rôle d'interface avec<br />

les bénéficiaires. Son élargissement suppose une ingénierie financière complexe<br />

difficilement pensable sans l'implication d'une structure bancaire et la définition d'accords<br />

institutionnels.<br />

5 - Projet d'amélioration d'un quartier à Ho Chi Minh Ville au Viêt-nam :<br />

Au Viêt-nam, le déficit en infrastructures et en logements est considérable. Les loyers sont<br />

symboliques et ne permettent pas aux organismes chargés de la gestion du parc<br />

immobilier d'en assurer l'entretien et qui connaît, par conséquent, un état de dégradation<br />

avancé, même pour les immeubles de construction récente. La plupart des quartiers<br />

d'habitat insalubre à Ho Chi Minh Ville sont installés au bord de l'eau et sur les<br />

marécages, les infrastructures étant inexistantes.<br />

Dans le cadre d'une action de coopération internationale, un projet a été engagé en vue<br />

de mettre en place un système qui permette une amélioration des infrastructures et une<br />

formation des jeunes d'un quartier particulièrement insalubre au bord d'un marécage. Le<br />

volet le plus important du projet était l'installation d'égouts pour drainer les eaux<br />

stagnantes, l'assèchement des mares et la construction de petites places en solide. il était<br />

accompagné de volets complémentaires visant l'amélioration du logement dans le cadre<br />

d'un système de crédits. Les travaux ont été réalisés par des apprentis, dans le cadre d'un<br />

stage de "qualification professionnelle".<br />

Le système repose sur une organisation autogérée. Le groupe (4 à 12 personnes en<br />

moyenne), choisit librement ses membres et ses responsables. Les bénéficiaires des<br />

crédits sont essentiellement des femmes. Les crédits sont octroyés à ces groupes<br />

solidaires, chaque membre se portant garant de l'autre. Une épargne préalable<br />

quotidienne ou hebdomadaire, quatre semaines avant l'obtention du premier crédit est<br />

requise des postulants. Tous les crédits sont collectés puis redistribués individuellement.<br />

Les bénéficiaires doivent rembourser leur crédit-logement en moins de 6 mois, mais le<br />

délai exact est fixé selon le montant du remboursement.<br />

Enseignements:<br />

Un premier groupe de 70 personnes environ avait bénéficié de la première phase de<br />

l'opération entre décembre 1993 et février 1994. Les premiers résultats sont très positifs :<br />

en effet, le quartier a totalement changé de visage grâce à l'aménagement des égouts<br />

dans les ruelles et la réhabilitation des maisons et seuls deux ou trois bénéficiaires<br />

n'avaient pas remboursé leur crédit. L'ONG souhaite élargir l'expérience à l'aide de fonds<br />

européens.<br />

L'idée d'un urbanisme alternatif avec la participation des gens, leur consentement et leur<br />

travail, constitue l'un des ressorts de l'opération mais le système proposé demande un<br />

travail d'enquête préalable, un suivi et la formation des responsables. L'organisation<br />

collective du système permet une prise en charge et une responsabilisation plus fortes.<br />

6- Opération de crédits logement en Indonésie (1 er cas) :<br />

En Indonésie, plus de 50% des logements sont dégradés. Moins du tiers de la population<br />

a accès au réseau d'eau potable et le nombre de personnes bénéficiaires d'un système<br />

17


d'assainissement ou de collecte d'ordures ménagères est encore plus restreint. Des<br />

programmes pour l'amélioration des bidonvilles ont tenté de résoudre les déficits.<br />

Parmi ceux-là, le Crédit Union Kartini (CUK) a pour objectif de favoriser le développement<br />

de l'esprit coopératif et d'une conscience économique, dans le but d'améliorer le niveau de<br />

vie des ménages dont les revenus sont instables. Les principales activités de la<br />

coopérative consistent à récolter, auprès de ses membres, des fonds qui seront<br />

redistribués sous forme de crédit à ceux qui sont dans le besoin, en particulier (mais pas<br />

exclusivement) dans le domaine du logement et de l'achat de parcelles. Pour cela un<br />

conseil d'administration composé des membres de la coopérative a été constitué et a reçu<br />

une formation de base en matière de gestion des opérations de crédit.<br />

Pour devenir membre du CUK, il faut démontrer sa capacité et sa volonté de procéder à<br />

une épargne initiale obligatoire. Le montant du prêt ne peut pas dépasser plus de trois fois<br />

la somme épargnée par l'emprunteur. L'échéance du remboursement varie en fonction du<br />

montant du prêt mais plus le délai de grâce est grand, plus les versements sont élevés.<br />

La coopérative est quasiment autosuffisante et ne bénéficie que d'une assistance<br />

technique (aide à la tenue des livres de compte et à la gestion) accordée par le Planning<br />

Familial et d'une subvention initiale octroyée par le département d'Etat au Logement.<br />

Enseignements:<br />

La formation administrative conduite par la coordination régionale des coopératives de<br />

crédits a grandement contribué au progrès de CUK. La réussite de CUK a attiré d'autres<br />

membres, faisant concurrence aux autres coopératives de crédits présentes dans les<br />

environs.<br />

La réplicabilité du projet dépend de l'existence d'une dynamique locale permettant la<br />

création de ressources. La création d'une organisation communautaire à la base de ce<br />

programme, fondée sur les femmes, dont la structure et la légitimité favorise le succès a<br />

été un aspect innovant remarquable.<br />

7 - Programme d'amélioration des quartiers populaires - Kampung Improvement<br />

Program (KIP) - Indonésie (2 ème cas) :<br />

Dans les quartiers populaires (Kampungs), 40% des habitants sont locataires, les autres<br />

ne sont pas à proprement dit des squatters. Ce système n'est pas légal. mais il est<br />

officiellement reconnu et soumis à l'impôt. Suite à une série d'études menées par le<br />

gouvernement avec l'aide de la Banque Mondiale et de l'USAID, un programme sans<br />

précédent a été lancé dans les années 70 : le programme d'amélioration des Kampungs<br />

(KIP).<br />

S'appuyant sur les formes prédominantes d'organisations populaires, le KIP vise à<br />

l'amélioration des conditions de vie dans les Kampungs. Il met notamment l'accent sur les<br />

travaux d'infrastructures (construction de routes, de systèmes de drainage et d'égouts,<br />

accès à l'eau, services de ramassage des ordures, etc.), sur l'emploi (aide à la création de<br />

ressources), et sur l'assistance aux ménages en matière de logements, directement ou par<br />

l'intermédiaire de coopératives.<br />

18


Pour accéder au programme, une proposition doit être faite par les organisations de<br />

quartier au groupe de travail qui en estimera la validité. Si la proposition est acceptée, elle<br />

sera soumise au gouvernement local pour approbation.<br />

L'épargne des organisations de quartier est récoltée par les ONG associées au projet. Elle<br />

est complétée par des fonds étatiques et des aides internationales (prêts ou dons). Les<br />

mécanismes de remboursements sont variés. Les organisations de quartier remboursent<br />

au gouvernement local les crédits octroyés pour les travaux d'infrastructures et de<br />

logements. Le gouvernement local rembourse à l'Etat les prêts destinés aux réalisations<br />

hors de portée des habitants des Kampungs. Les recouvrements au niveau des<br />

organisations de quartier sont relativement faibles (50%).<br />

Enseignements:<br />

Les 10 plus grandes villes, 40 villes de taille moyenne et 150 petites villes ont bénéficié du<br />

KIP. D'un point de vue technique l'aménagement de l'espace a posé nombre de difficultés<br />

et n'a pas donné les résultats escomptés. La prise de conscience par les bénéficiaires de<br />

la nécessité des infrastructures a été lente et la densité de population et la dispersion des<br />

unités de logement a entravé l'aménagement de routes, d'égouts, de systèmes de<br />

drainage, et l'organisation de l'espace de manière rationnelle.<br />

Les résultats varient d'un Kampung à l'autre, mais ils sont globalement négatifs.<br />

Les aspects innovants remarquables résident dans le mixage entre fonds publics et<br />

ressources des ménages à faibles revenus permettant de démultiplier les moyens<br />

d'intervention et l'ampleur du projet.<br />

la réplicabilité quant à elle dépend d'une contractualisation entre l'Etat et les organisations<br />

de quartier garantissant aux bénéficiaires la jouissance des logements après<br />

aménagement des zones d'intervention et réhabilitation des habitations.<br />

8 - Programme de développement du logement au Pakistan (1 er cas à Hyderabad) :<br />

Le secteur du logement au Pakistan est caractérisé par un manque considérable de<br />

logements, et cela en raison d'une augmentation vertigineuse des prix de la terre et de<br />

l'absence de ressources pour la réalisation des infrastructures. Les programmes de<br />

logements urbains ont certes bénéficiés de certains crédits institutionnels mais ils ont<br />

surtout bénéficié aux ménages à revenu moyen. Pour les ménages à faible revenu, 66%<br />

des besoins financiers en logements sont couverts par le secteur informel.<br />

En 1986, une collectivité locale, la HDA (Development Authority), a lancé un programme<br />

de développement de l'habitat pour résoudre le problème du logement des couches les<br />

plus démunies de la population. Le projet a pour objectif de procurer aux sans abris des<br />

titres de propriété pour des parcelles résidentielles immédiatement constructibles, avec un<br />

paiement comptant minimum accessible à des familles à faibles revenus. Le programme<br />

est fondé sur la participation communautaire organisée en îlots (200maisons). La HDA<br />

ouvre un dialogue direct avec la communauté, identifie les leaders potentiels qui seront<br />

chargés de motiver et mobiliser les résidents.<br />

19


Les bénéficiaires sont des familles gagnant environ 50 US$ par mois et ayant un besoin<br />

urgent de logement. Les candidats sélectionnés sont hébergés dans 2 types de zones<br />

d'accueil soit un terrain libre où la famille peut installer un logement de fortune, soit une<br />

maison en béton de deux pièces avec latrines et robinet d'eau intérieur. Par la suite, une<br />

parcelle de 80 m 2 , qui comprend un accès à l'eau potable et des latrines, est attribuée aux<br />

familles éligibles.<br />

Les ménages bénéficiaires doivent faire un premier versement fixé à 50 US$ destiné à<br />

couvrir les premières installations (eau et latrines). Ils doivent également mobiliser une<br />

épargne préalable sous forme d'un versement mensuel régulier, fixé en fonction des<br />

possibilités des bénéficiaires (de 2,50 à 5 US$), jusqu’à couvrir le coût total de la parcelle,<br />

c'est-à-dire 450 US$.<br />

La promotion de l'auto-emploi et la création de revenus font partie de l'approche du projet.<br />

Un Programme d'Entreprises Familiales a été lancé qui prévoit des prêts allant de 50 à<br />

500 USS mais peuvent être augmentés si les remboursements se font correctement.<br />

Le versement des mensualités est effectué de préférence sur un compte en banque, géré<br />

conjointement par des représentants désignés par les résidents et le personnel de la HDA.<br />

Le taux de recouvrement des crédits-logement dépasse les 95%.<br />

Enseignements:<br />

Deux ans après le lancement du projet, 3.826 parcelles avaient été attribuées, dont 2.094<br />

étaient déjà construites. Quant au Programme d'Entreprises Familiales, il avait généré 117<br />

emplois. Réplicabilité de cette opération suppose un travail d'approche et une<br />

connaissance excellente des populations. Le programme représente une approche<br />

innovante du financement du logement pour les plus démunis, dans la mesure où le poids<br />

de la prise en charge financière est quasiment nul pour l'Etat. Selon HDA le Plan est<br />

même complètement autofinancé.<br />

9 - Programme de développement du logement au Pakistan (2 ème cas à Karachi) :<br />

Malgré une tentative du gouvernement qui a promu dans les années 80 la notion de Katchi<br />

Abadi (zones de squattage) à travers un programme d'amélioration et de régularisation de<br />

l'habitat, les Katchi Abadi restent extrêmement vulnérables et peu développés : à peine<br />

15% de leurs résidents sont reliés à des réseaux d'égouts. Orangi est le plus grand Katchi<br />

Abadi de Karachi. Il compte environ 800.000 personnes et 95.000 logements que les<br />

résidents ont eux-mêmes construit, avec l'aide du secteur informel. l’Etat et le secteur<br />

privé n'étant pas en mesure de répondre aux besoins de développement des Katchi Abadi<br />

(infrastructures, logements, etc.), un programme visant à améliorer les conditions de vie a<br />

été initié à Orangi.<br />

Le programme pilote d'Orangi (OPP) a été mis en place durant les années 80 et vise à<br />

promouvoir l'organisation communautaire et couvre de nombreux volets (santé, planning<br />

familial, éducation, création de centre de travail) en complément aux volets relatifs au<br />

logement pour les démunis et l'assainissement :<br />

Le projet s'appuie sur des organisations communautaires qui ne doivent pas dépasser 40<br />

ménages et implique et soutient le secteur informel dans le processus grâce à une aide<br />

20


technique et de petits crédits à court terme. Le travail, aidé par OPP, est financé par les<br />

résidents avec leur propre épargne et sous leur responsabilité, les fonds étant gérés par la<br />

société OPP.<br />

Enseignements:<br />

Entre 1982 et 1989, le programme a concerné la moitié du quartier d'Orangi. Grâce à la<br />

formation de maçons et de leaders de quartier les habitants sont moins dépendants d'aide<br />

technique et sociale. La différence avec les autres quartiers populaires de Karachi est à<br />

présent très nette.<br />

En 1988, le programme a été répliqué par des agences publiques. des organisations<br />

internationales (UNICEF - Banque Mondiale) et par des ONG dans d'autres quartiers de<br />

Karachi.<br />

10 - Programme de prêts communautaires hypothécaires aux Philippines :<br />

La situation globale du logement aux philippines est marquée par la faiblesse extrême des<br />

niveaux de ressources monétaires et de la capacité d'épargne des citadins (seuls 10% de<br />

la population ont accès au crédit bancaire) et par le manque d'infrastructures urbaines. 10<br />

à 20 % des logements seulement sont produits par le secteur formel, la ville de Manille<br />

comptant pour 40% de la demande nationale.<br />

L'accès au foncier est un facteur de blocage important car la terre est détenue par un tout<br />

petit nombre de personnes et reste le plus souvent inoccupée.<br />

Le financement du logement est virtuellement un monopole gouvernemental puisque seul<br />

l’Etat pratique des crédits subventionnés sur 25 ans permettant des taux d'intérêt situé<br />

entre 6 et 16%, alors que les banques privées en proposent sur 5 ans à des taux compris<br />

entre 18 et 30%. Pour soutenir un rythme conséquent de production de logements l'Etat a<br />

affecté des ressources financières importantes par le biais de l'agence gouvernementale<br />

"National Home Mortgage Finance Corporation" (NHMFC).<br />

En 1988, un programme de prêts communautaires hypothécaires (Community Mortgage<br />

Program -CNIP) en faveur des squatters des cités est lancé par la NHMFC. Le programme<br />

vise à permettre aux squatters de devenir propriétaires fonciers dans un premier temps, et<br />

propriétaires de logements décents dans un deuxième temps. Les bénéficiaires doivent<br />

s'organiser en associations, et cela grâce à l'appui d’institutions locales (municipalités,<br />

agences gouvernementales ou ONG) qui impulsent le projet. Une fois constituées, ces<br />

associations achètent les terrains aux propriétaires des terrains squattés, avec un prêt<br />

hypothécaire proposé par la NHMFC.<br />

L’acquisition foncière est collective, et la construction de routes, l'installation de systèmes<br />

de drainage et la division du terrain en parcelles individuelles sont effectués dans un<br />

deuxième temps. La division des parcelles doit être faite dans les deux ans après l'octroi<br />

du crédit.<br />

Pour pouvoir accéder au crédit, les bénéficiaires doivent faire un dépôt préalable<br />

équivalent à deux mensualités du crédit. Par la suite, le CNIP établit une lettre de garantie<br />

au propriétaire qui permet le transfert de propriété au nom de la communauté, avec une<br />

hypothèque en faveur de la NHMFC.<br />

21


Le crédit est octroyé en trois étapes : 1) acquisition foncière collective, 2) opérations<br />

d'aménagement foncier (voiries, tout-à-l'égout, électricité, sanitaires, etc.) et 3)<br />

construction du logement.<br />

L'association des habitants est chargée de récolter les mensualités de ses membres<br />

jusqu'à ce que le prêt collectif ait été individualisé. La communauté doit remplacer les<br />

membres qui ne paient pas pendant plus de trois mois. Pour parer à ces éventualités, les<br />

communautés ont été autorisées à collecter une petite commission supplémentaire,<br />

destinée à créer et alimenter des fonds communautaires.<br />

Enseignements:<br />

En 1993, le CNIP avait permis à 208 communautés d'accéder au crédit. 99% des prêts ont<br />

servi à accéder à la propriété. Le CNIP a rencontré plusieurs problèmes : tels que le refus<br />

des bénéficiaires de s'accommoder d'un terrain de 50 m 2 par exemple, l'augmentation très<br />

vive des prix fonciers etc. Ces difficultés donnent lieu à des remboursements peu<br />

satisfaisants c'est pourquoi il est prévu d'individualiser les hypothèques communautaires.<br />

La réplicabilité est remise en cause par l'individualisation des hypothèques<br />

communautaires et les difficultés de la maîtrise d'ouvrage collective.<br />

11 - Restructuration - régularisation du quartier d'habitat irrégulier Médina Fass<br />

M'Bao de la commune de Pikine au Sénégal :<br />

Le contexte du projet<br />

La construction informelle demeure à Dakar le mode principal de logement des familles<br />

défavorisées. Pour améliorer les conditions de vie des populations, le gouvernement<br />

sénégalais a fait de la restructuration des quartiers irréguliers, un des axes majeurs de sa<br />

politique de l’habitat. Une cellule opérationnelle de la Direction de l’urbanisme et de<br />

l’architecture (<strong>DU</strong>A), mise en place en 1987, a progressivement élaboré avec l’appui de la<br />

coopération allemande, une démarche de restructuration de l’habitat spontané basée sur<br />

une participation aussi large que possible des populations, et sur la mobilisation de leurs<br />

ressources financières et humaines. Cette démarche, expérimentée puis ajustée à<br />

l’occasion de la restructuration d’un quartier de Dakar (Dalifort), a été élargie à d’autres<br />

quartiers de l’agglomération dakaroise et à des villes de provinces. Elle constitue<br />

aujourd’hui une approche d’envergure nationale dotée d’instruments et de moyens<br />

spécifiques.<br />

C’est dans le cadre de cette politique qu'a été engagée la restructuration du quartier Fass<br />

M’Bao qui vise :<br />

- la régularisation de la situation foncière des occupants ;<br />

- la viabilisation du quartier (eau, électricité et voiries) ;<br />

- l'alimentation d'un fonds d’investissement selon un mode de recouvrement des coûts.<br />

Le processus de restructuration se déroule en cinq étapes :<br />

22


- l’information de la population, le dénombrement officiel et exhaustif des ménages<br />

résidant dans la zone d’aménagement, et l’étude foncière.<br />

- la mise en place du cadre institutionnel de la participation communautaire et la<br />

vérification des ayants droit,<br />

- la réalisation du plan d’urbanisme et d’aménagement ainsi que du plan de restructuration<br />

du quartier. - la phase de réalisation proprement dite qui recouvre non seulement la mise<br />

en place des infrastructures ou des équipements mais aussi la restructuration foncière.<br />

- enfin le projet est terminé lorsque les ayants droit ont tous acquitté le montant de leur<br />

droit de superficie et qu’ils ont obtenu ceux-ci en retour.<br />

L’Etat sénégalais participe à la trame primaire. Pour la viabilisation tertiaire, le volume des<br />

travaux est exécuté à hauteur du montant atteint par le recouvrement des coûts.<br />

En juillet 1995, le projet arrivait aux deux tiers de sa durée.<br />

Enseignements:<br />

Un des points les plus originaux de la méthode employée tient à ce que la population des<br />

quartiers irréguliers n’est pas passive. Elle est au contraire un partenaire à part entière du<br />

projet de restructuration - régularisation, grâce à l’émergence d’une structure sociale<br />

locale capable de légitimer les choix techniques et politiques auxquels se trouvent<br />

confrontés les institutions publiques.<br />

La principale difficulté du projet provient du remboursement d’une partie des coûts de la<br />

restructuration par les bénéficiaires.<br />

Les onze études de cas présentées ci-dessus offrent une panoplie très large<br />

d'expériences, de pratiques et de solutions qui reflètent parfois des réponses à des<br />

spécificités locales mais qui indiquent souvent que des tendances universelles se<br />

dessinent pour assurer la pérennité de ces pratiques telles que le recours à l'action<br />

communautaire, la participation des bénéficiaires et l'effort des intéressés à la résolution<br />

de leur propre problème. Les pratiques décrites dans ces études de cas ainsi que les<br />

politiques de financement de certains pays cibles seront analysées dans une conclusion<br />

générale que nous avons précédée de tableaux synoptiques qui faciliteront la lecture<br />

comparative.<br />

23


TABLE<strong>AU</strong> SYNOPTIQUE<br />

Pays et projet Population<br />

urbaine<br />

Densit<br />

é<br />

urbain<br />

e<br />

PNB/<br />

hab.<br />

($ US)<br />

Description du projet<br />

Aspects généraux Crédits Collecte des ressources pour<br />

les crédits<br />

Gestion et<br />

recouvrement des<br />

crédits<br />

Bilan et enseignements<br />

BRESIL:<br />

L'amélioration<br />

de l'habitat à<br />

Fortaleza<br />

programme<br />

"Casa Melhor"<br />

PEROU:<br />

Densification<br />

de l'habitat à<br />

Salvador<br />

77% de<br />

la pop.<br />

totale<br />

71% de<br />

la pop.<br />

totale<br />

18<br />

ha/km 2 2.920 création d’un fonds<br />

communautaire pour<br />

l’amélioration de l’habitat<br />

permettant d’offrir aux<br />

habitants, organisés en<br />

associations de quartier,<br />

des prêts limités sur une<br />

courte durée.<br />

17 1.070 - répondre au déficit<br />

ha/km 2 quantitatif et qualitatif<br />

d’habitat pour les plus<br />

démunis, par la<br />

densification verticale de<br />

l’habitat à partir<br />

d’expériences populaires<br />

d’auto-construction<br />

- familles propriétaires de leur<br />

logement<br />

- 1,5 à 3 salaires minimums<br />

- constituer des groupes<br />

d’épargne de 10 à 30<br />

personnes<br />

- Les familles peuvent<br />

emprunter une somme égale<br />

au double de leur épargne<br />

- prêts pour l’achat des<br />

matériaux de construction<br />

octroyés par un organisme<br />

financier privé<br />

Une fois le budget des travaux<br />

approuvé, la famille effectue<br />

le dépôt de l’épargne sur un<br />

compte ouvert pour le projet à<br />

la banque de l’Etat<br />

un système de garantie<br />

original a été mis en place<br />

(apport financier sous forme<br />

d'aide internationale)<br />

l'association suit la<br />

collecte des fonds<br />

et<br />

les<br />

recouvrements<br />

d’échéance.<br />

- 10% de chaque<br />

prêt sont conservés<br />

à la banque au titre<br />

de garantie<br />

- recouvrements<br />

mensuels.<br />

- un comité de suivi<br />

des<br />

remboursements a<br />

été constitué.<br />

- taux de<br />

recouvrement de<br />

78%.<br />

la principale difficulté du programme a été<br />

la réticence des habitants à déposer leurs<br />

économies sur un compte ouvert pour le<br />

projet à la banque de l’Etat<br />

- possibilité d’intégrer des populations<br />

démunies dans un système de crédit<br />

formel<br />

- appui technique à la construction<br />

souhaité par la population<br />

- sous estimation de la mobilisation<br />

nécessaire des ONG locales pour<br />

l’accompagnement social des<br />

bénéficiaires n’ayant jamais eu de contact<br />

avec le milieu bancaire, et l’appui<br />

technique auprès la banque manquant<br />

d’expérience en matière de montages<br />

financiers non traditionnels, a constitué la<br />

majeure difficulté du projet.<br />

MEXIQUE:<br />

Le Plan d'Aide<br />

Mutuelle<br />

(PAM)<br />

cas de SAN<br />

ANDRES<br />

IXTLAN<br />

74% de<br />

la pop.<br />

totale<br />

45<br />

ha/km 2 3.080 - encourager des actions<br />

d'agrandissement et<br />

d'amélioration de<br />

logements.<br />

- mise en place d'un centre<br />

de matériaux pour la<br />

construction<br />

- programme fondé sur des<br />

formes de financement<br />

informel dénommées<br />

"tombolas".<br />

- octroi d'un crédit par<br />

semaine à chacun des<br />

participants du PAM (tirage au<br />

sort) au cours d'une durée<br />

d'environ un an.<br />

- création d'un fonds liquide,<br />

se composant de l'épargne<br />

des premières semaines<br />

durant lesquelles on n'amorce<br />

pas de travaux.<br />

- système d'épargne<br />

fonctionne par l'intermédiaire<br />

de la collecte des cotisations<br />

hebdomadaires.<br />

- plus une subvention<br />

représentant les frais de<br />

gestion et d'organisation<br />

aucun dispositif<br />

spécifique<br />

- le programme accusait un déficit de<br />

7.000 $ en juin 1993.<br />

- les possibilités de fonctionnement de ce<br />

schéma sont limitées dans la mesure où<br />

elles dépendent de la capacité du<br />

financement du groupe d'appui ( TAP).<br />

- le système doit donner lieu à une<br />

épargne collective qui doit favoriser la<br />

création d'un système d'épargnefinancement<br />

24


Pays et projet Population<br />

urbaine<br />

Densité<br />

urbaine<br />

PNB/<br />

hab.<br />

($ US)<br />

Description du projet<br />

Aspects généraux Crédits Collecte des ressources<br />

pour les crédits<br />

Gestion et<br />

recouvrement des<br />

crédits<br />

Bilan et enseignements<br />

MEXIQUE:<br />

Barrio de Los<br />

Angeles à<br />

Mexico<br />

74% de la<br />

pop.<br />

totale<br />

45<br />

ha/km 2 3.080 le projet a pour objectif de<br />

soutenir la Coopérative de<br />

logements Guerrero en vue<br />

d'acquérir un terrain pour<br />

construire une cinquantaine<br />

de logements sociaux<br />

VIET-NAM: 20% 209 200 projet global d'amélioration<br />

Ho Chi Minh-<br />

hab/km 2 du cadre de vie dans une<br />

Ville<br />

partie du quatrième<br />

arrondissement de la ville.<br />

L'objectif est de mettre en<br />

place un système qui<br />

permette une amélioration<br />

des infrastructures et une<br />

formation des jeunes du<br />

quartier.<br />

soutien financier de la<br />

coopération française<br />

complété d'un montant<br />

équivalent réuni par les<br />

familles bénéficiaires, à<br />

titre d'apport personnel.<br />

les crédits sont collectifs<br />

puis redistribués<br />

individuellement. Les<br />

crédits-logements ont un<br />

montant très variable (de<br />

5O à 200 $), sachant que<br />

l'inflation est d'environ<br />

12% par an.<br />

épargne constituée par<br />

les membres avant la<br />

mise en place du Fonds<br />

complété par la<br />

mobilisation des<br />

ressources des<br />

familles.<br />

- fonds de roulement<br />

financé par la CEE<br />

- organisation autogérée<br />

- les bénéficiaires sont<br />

essentiellement des<br />

femmes chaque<br />

membre se portant<br />

garant de l'autre<br />

- épargne préalable<br />

quotidienne ou<br />

hebdomadaire, quatre<br />

semaines avant<br />

l'obtention du premier<br />

crédit.<br />

les familles<br />

remboursent le Fonds<br />

à la coopérative<br />

moins d'un an après<br />

l'achat du terrain ;<br />

- retard de paiement :<br />

trois mois maximum.<br />

- les bénéficiaires<br />

doivent rembourser<br />

leur crédit-logement<br />

en moins de 6 mois,<br />

- les recouvrements<br />

sont collectifs et les<br />

remboursements<br />

quotidiens<br />

-le taux de<br />

recouvrement s'élève<br />

à 80%.<br />

- La majorité des remboursements était<br />

irrégulière mais L'intégralité du Fonds a<br />

été récupérée.<br />

- La pérennisation est liée à la capacité<br />

de garantie des remboursements offerte<br />

par l'organisation populaire qui joue le<br />

rôle d'interface avec les bénéficiaires.<br />

- Son élargissement suppose une<br />

ingénierie financière complexe.<br />

- premiers résultats très positifs : Seuls<br />

deux ou trois bénéficiaires n'avaient<br />

pas remboursé leur crédit,<br />

- le quartier a totalement changé de<br />

visage grâce à l'aménagement des<br />

égouts dans les ruelles et la<br />

réhabilitation des maisons.<br />

- travail d'enquête préalable, un suivi et<br />

la formation des responsables sont<br />

nécessaires. Repose sur des bases<br />

simples de gestion économiques.<br />

25


Pays et projet Population<br />

urbaine<br />

Densité<br />

urbaine<br />

PNB/<br />

hab.<br />

($ US)<br />

Description du projet<br />

Aspects généraux Crédits Collecte des ressources<br />

pour les crédits<br />

Gestion et<br />

recouvrement des<br />

crédits<br />

Bilan et enseignements<br />

PAKISTAN:<br />

programme de<br />

développemen<br />

t du logement<br />

Khuda Ki Basti<br />

PAKISTAN<br />

Orangi Pilot<br />

Project (OPP)<br />

PHILIPPINES:<br />

programme de<br />

prêts<br />

communautair<br />

es<br />

hypothécaires<br />

(CNIP)<br />

400 Khuda Basti (KKB) est un<br />

33% 162<br />

hab/km 2 programme de<br />

développement de l'habitat<br />

mis en place en 1986 pour<br />

résoudre le problème du<br />

logement des couches les<br />

plus démunies.<br />

400 programme visant à améliorer<br />

33% 162<br />

hab/km 2 les conditions de vie<br />

(construction d'infrastructures<br />

et réhabilitation du logement)<br />

plus volets santé, éducation,<br />

etc. à travers des<br />

organisations<br />

communautaires<br />

740 En 1988, un programme de<br />

44% 217<br />

hab/km 2 prêts communautaires<br />

hypothécaires en faveur des<br />

squatters des cités est lancé.<br />

Le programme vise à<br />

permettre aux squatters de<br />

devenir propriétaires fonciers<br />

dans un premier temps, et<br />

propriétaires de logements<br />

décents dans un deuxième<br />

temps.<br />

Les bénéficiaires sont des<br />

familles gagnant environ<br />

50 US$. Une parcelle de<br />

80 m 2 , qui comprend à la<br />

base un accès à l'eau<br />

potable et des latrines, est<br />

attribuée aux familles<br />

éligibles.<br />

Les organisations<br />

communautaire ne<br />

doivent pas dépasser 40<br />

ménages.<br />

Le projet implique et<br />

soutient le secteur<br />

informel dans le<br />

processus grâce à une<br />

aide technique et de petits<br />

crédits à court terme<br />

- Le CNIP permet l'achat<br />

d'une parcelle non<br />

équipée,<br />

- Le prêt est octroyé sur la<br />

base des ressources des<br />

bénéficiaires<br />

- Les bénéficiaires doivent<br />

faire un dépôt préalable<br />

équivalent à deux<br />

mensualités du crédit<br />

Les bénéficiaires<br />

doivent mobiliser une<br />

épargne préalable sous<br />

forme d'un versement<br />

mensuel régulier, fixé<br />

en fonction des<br />

possibilités des<br />

bénéficiaires (de 2,50 à<br />

5 US$, soit 50 à 100<br />

roupies), jusqu’à couvrir<br />

le coût total de la<br />

parcelle, c'est-à-dire<br />

450 US$ (9.000<br />

roupies).<br />

Le travail, aidé par<br />

OPP, est financé par les<br />

résidents avec leur<br />

propre épargne et sous<br />

leur responsabilité.<br />

Les fonds sont gérés<br />

par la société OPP.<br />

- le système financé par<br />

plusieurs fonds publics,<br />

- Le CNIP prend en<br />

considération la nature<br />

spécifique du revenu de<br />

chaque bénéficiaire et<br />

de sa capacité de<br />

remboursement. Les<br />

taux sont fonction du<br />

revenu et de la durée du<br />

prêt.<br />

- la comptabilité, la<br />

responsabilité de<br />

l'entretien des<br />

services, l'action<br />

contre les mauvais<br />

payeurs et<br />

l'absentéisme sont<br />

gérés au niveau de<br />

chaque îlot.<br />

- le taux de<br />

recouvrement des<br />

crédits-logement<br />

dépasse les 95%.<br />

L'association des<br />

habitants est chargée<br />

de récolter les<br />

mensualités de ses<br />

membres jusqu'à ce<br />

que le prêt collectif ait<br />

été individualisé. les<br />

communautés ont été<br />

autorisées à collecter<br />

une<br />

commission<br />

supplémentaire.<br />

petite<br />

- la réplicabilité suppose un travail<br />

d'approche et une connaissance<br />

excellente des populations ainsi<br />

qu'une grande mobilisation et<br />

organisation des bénéficiaires.<br />

- KKB représente une approche<br />

innovante du financement du logement<br />

pour les plus démunis, dans la mesure<br />

où le poids de la prise en charge<br />

financière est quasiment nul pour<br />

l'Etat.<br />

amélioration de la qualification des<br />

populations pour la réalisation des<br />

Réplicabilité: le programme a été répliqué p<br />

internationales (UNICEF - Banque Mondiale<br />

des ONG dans d'autres quartiers de Karachi<br />

Impact économique et social :<br />

travaux.<br />

agences publiques. des organi<br />

Le CNIP a rencontré plusieurs<br />

problèmes :<br />

- bénéficiaire récalcitrant ;<br />

- augmentation très rapide des prix<br />

fonciers ;<br />

- accroissement des prix des matériaux<br />

de construction,<br />

Ces difficultés donnent lieu à des<br />

remboursements peu satisfaisants, dus<br />

également à la mauvaise sélection des<br />

communautés.<br />

Réplicabilité remise en cause.<br />

26


Pays et projet<br />

Population<br />

urbaine<br />

Densité<br />

urbaine<br />

PNB/<br />

hab.<br />

($ US)<br />

Description du projet<br />

Aspects généraux Crédits Collecte des ressources<br />

pour les crédits<br />

Gestion et<br />

recouvrement des<br />

crédits<br />

Bilan et enseignements<br />

INDONESIE:<br />

programme<br />

d'amélioration<br />

des<br />

Kampungs<br />

(KIP)<br />

INDONESIE:<br />

Créditslogements<br />

à<br />

Kaliurang<br />

(CUK)<br />

SENEGAL:<br />

restructuration<br />

et<br />

régularisation<br />

de quartier<br />

d'habitat<br />

irrégulier<br />

610 le KIP vise à l'amélioration<br />

30% 690<br />

hab/km 2 des conditions de vie dans les<br />

Kampungs. Il met l'accent sur<br />

les travaux d'infrastructures<br />

(routes, systèmes de drainage<br />

et d'égouts, accès à l'eau,<br />

ramassage des ordures, etc.),<br />

sur l'emploi et sur l'assistance<br />

aux ménages en matière de<br />

logements.<br />

610 - favoriser le développement<br />

30% 690<br />

hab/km 2 de l'esprit coopératif, dans le<br />

but d'améliorer le niveau de<br />

vie des ménages à revenus<br />

instables ;<br />

- les crédits concernent le<br />

logement, l'entreprise,<br />

l'éducation et le social.<br />

780 - régulariser la situation<br />

41% 39<br />

hab/km 2 foncière des occupants et<br />

établir un nouveau parcellaire<br />

;<br />

- viabiliser et équiper le<br />

quartier, (eau, électricité et<br />

voiries), plus activités socioéconomiques<br />

;<br />

- alimenter un fonds<br />

d’investissement selon un<br />

mode de recouvrement des<br />

coûts.<br />

- proposition faite par les<br />

organisations de quartier au<br />

groupe de travail. Une fois le<br />

projet accepté, l'accord final<br />

appartient aux organisations<br />

de quartier.<br />

- Le processus intègre une<br />

étude des financements. La<br />

décision peut être aidée par<br />

des ONG et/ou des<br />

universités. Les budgets KIP<br />

sont accordés par la<br />

province.<br />

- Pour devenir membre de<br />

CUK, il faut cotiser au<br />

préalable 250 roupies, puis<br />

faire un dépôt de 2.000<br />

roupies, enfin épargner 500<br />

roupies par mois.<br />

- Le montant du prêt ne peut<br />

pas dépasser plus de trois fois<br />

la somme épargnée par<br />

l'emprunteur.<br />

En échange d’un effort<br />

financier de la part des<br />

habitants, l’Etat accorde un<br />

droit de superficie<br />

transformable en un titre de<br />

propriété après une période<br />

de mise en valeur<br />

L'épargne des<br />

organisations de quartier<br />

est récoltée par les ONG<br />

associées au projet. Elle<br />

est complétée par des<br />

fonds étatiques et des<br />

aides internationales<br />

(prêts ou dons).<br />

Les budgets KIP sont<br />

accordés à travers les<br />

gouvernements de<br />

province<br />

- fournir une épargne<br />

préalable obligatoire,<br />

- taux de rémunération<br />

des dépôts s'élève à 10%<br />

par an,<br />

- l'assistance technique<br />

accordée par le Planning<br />

Familial, et subvention de<br />

1.500.000 roupies<br />

Le groupement<br />

d'habitants doit déposer<br />

auprès de Banque de<br />

l’habitat du Sénégal un<br />

fonds de garantie des<br />

emprunts contractés par<br />

les particuliers. Le<br />

compte est bloqué<br />

jusqu’au moment du<br />

paiement des travaux.<br />

Les crédits vont de<br />

20.000 à 200.000<br />

roupies à taux<br />

d'intérêt réel nul. Les<br />

organisations de<br />

quartier remboursent<br />

les crédits octroyés<br />

pour les travaux<br />

d'infrastructures et de<br />

logements. Les<br />

recouvrements au<br />

niveau des<br />

organisations de<br />

quartier sont<br />

relativement faibles<br />

(50%).<br />

- l'échéance du<br />

remboursement varie<br />

en fonction du<br />

montant du prêt,<br />

- remboursements<br />

indexés à 4%. Le taux<br />

d'impayé reste très<br />

bas.<br />

Le projet est terminé<br />

lorsque les ayants<br />

droit ont tous<br />

acquitté le montant<br />

de leur droit de<br />

superficie et qu’ils<br />

ont obtenu ceux-ci<br />

en retour<br />

- l'aménagement de l'espace a posé<br />

nombre de difficultés et n'a pas donné<br />

résultats escomptés.<br />

- la prise de conscience par les<br />

bénéficiaires de la nécessité des<br />

infrastructures a été lente.<br />

- les ressources publiques étaient parfo<br />

si restreintes que certains programmes<br />

ont dû être repoussés voire annulés.<br />

Les résultats varient d'un Kampung<br />

l'autre, mais ils sont globalement négat<br />

Dans beaucoup de cas la réhabilitat<br />

des logements a entraîné des hausses<br />

loyers que la plupart des ménages<br />

faibles revenus n'ont pas pu honorer.<br />

La formation administrative conduite pa<br />

coordination régionale des coopérative<br />

de crédits (BK3D) a grandement contri<br />

au progrès de CUK<br />

La population des quartiers irrégulie<br />

est un partenaire à part entière du pro<br />

de restructuration - régularisation.<br />

La principale difficulté du projet provie<br />

du remboursement d’une partie d<br />

coûts de la restructuration jugée tr<br />

élevée par les bénéficiaires.<br />

27


Conclusions relatives au financement du logement pour les ménages les plus<br />

démunis<br />

et la résorption de l'habitat précaire<br />

Les analyses des politiques de financement présentées ci-dessus et les différentes études<br />

de cas indiquent que dans presque tous les pays la préoccupation est de trouver la<br />

manière d'accroître les ressources destinées au logement et de drainer l'épargne vers le<br />

circuit de crédit formel. C'est ainsi que de nombreux pays ont institutionnalisé des fonds de<br />

l'habitat auprès de banques souvent spécialisées afin de mieux gérer l'adéquation<br />

besoins/ressources. Ces fonds proviennent de ressources affectées (taxes sur les<br />

salaires, souscriptions obligatoires à des émissions de bons publics etc. ) et sont<br />

généralement rémunérés à des taux inférieurs à ceux du marché (Indes, Philippines, etc.).<br />

Une des voies de plus en plus explorée est l’unification du marché financier en vue<br />

d’élargir l’offre de crédit et d’augmenter le nombre d’opérateurs financiers intéressés dans<br />

le financement du logement, en recourant, par exemple, à la création de marchés<br />

hypothécaires secondaires (Thaïlande, Jordanie, etc.). Si cette solution a permis parfois<br />

d’élargir effectivement l’offre de crédit pour les ménages plus ou moins aisés, elle n’a pas<br />

répondu de façon satisfaisante au problème d’accès au crédit pour les ménages à faible<br />

revenu. Quel que soit le pays considéré, plus de la moitié des ménages n’a pas accès au<br />

système formel de crédit, ce taux étant souvent voisin de 90 % pour les pays d’Afrique et<br />

d’Amérique Latine. Devant les contraintes liées à la concurrence et à la réduction des<br />

déficits budgétaires, la politique de financement du logement a été subordonnée à ces<br />

objectifs ce qui a, à nouveau, laissé les plus démunis hors du champ du crédit formel.<br />

Des formes nouvelles de financement ont alors été explorées qui se sont également<br />

intéressé aux mécanismes du financement informel. Les différentes expériences et études<br />

de cas étudiés confirment bien qu’il existe une forme réelle et parfois importante de<br />

l’épargne populaire, dont il s’est agit de trouver les voies et moyens de mobilisation (et de<br />

démultiplication pour pouvoir offrir des crédits significatifs) les plus appropriées. Pour cela<br />

on constate qu’un certain nombre de conditions, quand elles sont réunies, ont permis le<br />

succès des opérations pilotes, telles que :<br />

1- la proximité des structures de collecte de l’épargne et l’affinité culturelle des<br />

populations avec ceux en charge de cette collecte. Plusieurs de ces expériences ont<br />

privilégié les dimensions socioculturelles dans les mécanismes mis en place et<br />

notamment la valeur morale de l'engagement mutuel au sein du groupe.<br />

2- l’adaptation des modalités de collecte de l’épargne aux revenus des populations et la<br />

participation des intéressés à la recherche et à la mise au point de ces modalités. On a<br />

effectivement pu constater que les programmes de crédit ont atteint des familles dont<br />

le revenu était parfois inférieur à 2 SMIG (à l'instar du programme "Casa Melhor"),<br />

alors que dans les systèmes financiers conventionnels ceux-là ne s'adressent que très<br />

rarement à des ménages ayant un revenu inférieur à 4, voire 5 SMIG.<br />

3- l’instauration de rapports de confiances entre les populations et l’environnement<br />

«formel » facilitée par l’organisation communautaire des familles et des candidats au<br />

crédit. Les organisations sociales ont toujours joué un rôle d'intermédiation financière<br />

très important à l'origine des succès des expériences. Une autre condition du succès<br />

est la présence de professionnels apportant un appui au groupe en les aidant à<br />

négocier les crédits et à remplir, après les avoir comprises, les formalités et dossiers<br />

28


de demande de crédit. Les taux de remboursement ont été proportionnels à la force et<br />

à la cohésion du groupe communautaire;<br />

4- la certitude des ménages de pouvoir mobiliser l’épargne dans des conditions<br />

transparentes et quand elles ont en besoin, et l'adaptation des crédits aux besoins<br />

réels. On remarquera que le financement du logement n'est plus l'exclusive et que de<br />

nombreux programmes ont financé une somme d'activités connexes telles que<br />

l'amélioration de l'environnement urbain (Viêt-nam), la création d'activité, l'éducation et<br />

la santé (Pakistan), les infrastructures, l'acquisition de matériaux (Chili, Brésil), etc.<br />

Ce constat confirme bien que les solutions les plus innovantes et qui ont connu un succès<br />

réel sont celles qui se sont appuyé sur des «coopératives de crédit ». En effet elles sont<br />

bien adaptées aux conditions culturelles, économiques et sociales des groupes concernés<br />

et permettent aux bénéficiaires de participer de façon directe non seulement dans la<br />

construction ou l’amélioration de leur logement, mais, au-delà, dans l’amélioration de leur<br />

environnement urbain et même de sa gestion.<br />

Une de plus grands attraits de ces formules et qu’elles ont permis à la solidarité de la<br />

collectivité de remplacer ou de compléter la garantie personnelle par celle du groupe. Les<br />

taux de recouvrement se sont généralement améliorés au point de dépasser ceux<br />

enregistrés par le système bancaire car les prêts sont étudiés de façon personnalisée et<br />

donc plus adaptés au besoin et aux capacités de remboursement des bénéficiaires. Ces<br />

expériences ont d’autant mieux réussi qu’elles ont bénéficié de la part des pouvoirs<br />

publics d’un encouragement dans la mesure où elles ont facilité la création de ces<br />

associations et en évitant de les soumettre à une réglementation trop contraignante.<br />

Ce qui peut être adopté pour le financement du logement des plus démunis au<br />

Maroc :<br />

Devant les limites du financement bancaire conventionnel qui se heurte non seulement au<br />

niveau des revenus mais à aussi à la difficulté de leur justification, les expériences<br />

d'autres pays en développement peuvent s'avérer d'un examen fort utile et riches<br />

d'enseignements qui pourraient être adaptés et adoptés au Maroc. On pourra considérer<br />

les opérations décrites ci-dessus comme des pistes et des idées à explorer en vue de faire<br />

progresser et probablement accélérer certaines réflexions déjà engagées dans ce pays.<br />

- dans le domaine de l'ingénierie financière: on pourrait s'intéresser de près aux<br />

fonctionnement des groupes solidaires d'épargne (programme Casa Melhor au Brésil,<br />

programme d'amélioration des Kampungs en Indonésie, Coopérative de logements<br />

Guerrero au Mexique, etc.) qui surmontent les obstacles de l'accès au crédit en<br />

situation d'économie informelle. On pourra également étudier, en vue de les adapter,<br />

les mécanismes de gestion des crédits courts (inférieurs à un an) et des crédits relais,<br />

et les mécanismes qui ont permis d'atteindre les forts taux de remboursements.<br />

- dans le domaine de la participation communautaire : il sera intéressant de mettre à<br />

profit des formes d'organisations communautaires qui existent au Maroc et de les<br />

appuyer d'une intermédiation technique pour faciliter l'accès des groupes aux<br />

organismes de crédit en recherchant les formes d'organisation appropriée.<br />

- dans le domaine de l'administration par les communautés : des prêts et des banques<br />

de matériaux. Des ressources et des projets souvent de taille considérable ont été<br />

gérés avec un professionnalisme dont il serait utile d'envisager la transposition auprès<br />

de groupes sociaux marocains convenablement encadrés.<br />

29


Le programme de relogement des habitants de Haoumat N'sara à Tanger, entre autres,<br />

récemment engagé, pourrait offrir un terrain d'application de certaines de ces pratiques,<br />

sachant que la clé de leur réussite, ailleurs, a été la discussion avec les bénéficiaires et<br />

leur libre adhésion aux formules proposées.<br />

30


II - LA REGULARISATION <strong>DU</strong> PROCESSUS<br />

DE DEVELOPPEMENT FONCIER DANS L'HABITAT INFORMEL<br />

Présentation générale<br />

1- Le processus du développement informel du foncier<br />

L'augmentation rapide de liquidités dues aux croissances économiques rapides des<br />

années 70 et 80 a rendu disponible d'importantes ressources en capital pour la promotion<br />

immobilière. Les zones urbaines ont doublé, voire triplé de taille. Partout, à l'exception<br />

toutefois de l'Amérique Latine, on a assisté à un ralentissement du développement des<br />

bidonvilles au profit de zones d'habitat informel plus "confortables".<br />

Les promoteurs du secteur formel produisent une offre destinée à une gamme étroite de<br />

revenus du fait du prix du foncier et du coût des infrastructures réalisées aux normes<br />

requises par la réglementation formelle. Stimulé par une demande formulée par certains<br />

segments récemment "enrichis" de la classe moyenne un marché foncier informel<br />

dynamique s'est développé dans plusieurs pays. Ce marché a été organisé par de petits<br />

promoteurs, d'agents immobiliers, d'entrepreneurs avec la participation d'agents<br />

d'enregistrement officiels ou officieux. Ces formes de développement ont entraîné un<br />

certain nombre d'infractions :<br />

- occupation illégale des sols,<br />

- transferts illégaux de titres de propriété,<br />

- non-conformité avec les schémas de développement urbain,<br />

- construction sans permis,<br />

- non-respect des règles de construction,<br />

- location informelle et non autorisée.<br />

L'augmentation des prix du terrain a forcé un nombre croissant de ménages à recourir au<br />

marché locatif proposé par les quartiers d'habitat spontané, ce qui a également agit sur les<br />

formes de développement informel en créant des formes nouvelles de participation au<br />

financement de l'habitat, propice à un brassage des différentes catégories sociales et en<br />

créant des formes de copropriétés favorisant une coopération financière entre groupes<br />

sociaux.<br />

La force légale des règles de développement urbain a été sérieusement altérée par<br />

l'élargissement du fossé entre un marché formel sur-réglementé et un marché informel<br />

libéré de tout contrôle, entraînant parfois l'effondrement de ces réglementations dans<br />

certains pays. Le rythme de croissance de l'habitat informel a dépassé les capacités de<br />

gestion et les capacités financières des autorités locales qui n'ont pu les doter<br />

d'infrastructures aggravé par le débordement des périmètres urbains sur plusieurs entités<br />

administratives. En Afrique sub-saharienne l'habitat informel s'étend sur des terrains<br />

publiques, des réserves naturelles et des terrains privés à statut traditionnel. En Amérique<br />

Latine il se développe sur de larges propriétés privées et en Afrique du Nord et au<br />

Moyen Orient l'urbanisation s'étend sur des terres privées de haute valeur agricole ou sur<br />

des terres publiques à l'abandon. Enfin en Asie l'urbanisation incontrôlée se fait sur des<br />

réserves foncières publiques ou appartenant à des institutions religieuses.<br />

31


Le dérapage des prix du foncier (en 20 ans la part du prix du terrain dans la construction<br />

est passée de 15 à 50%) et une spéculation effrénée ont réduit à néant les efforts de<br />

planification et les perspectives de rendre le logement plus accessible en diminuant les<br />

exigences réglementaires, en adoptant des technologies de construction à faible coût et<br />

en améliorant le recouvrement des coûts.<br />

L'habitat informel s'installe comme un processus lourd et une activité organisée et très<br />

rentable prise en charge par des opérateurs organisés et qui ne laisse pas insensibles les<br />

hommes politiques. C'est un fait d'autant plus important qu'il coïncide avec une situation<br />

économique très généralement en récession. Il a fallu, afin d'assurer la protection de<br />

l'intérêt général, formuler des procédures de régularisation, de restructuration et les<br />

institutionnaliser en tant qu'instruments d'une politique foncière.<br />

2- La régularisation du développement foncier informel<br />

La question de la régularisation du foncier n'a commencé à prendre consistance qu'au<br />

début de la décennie 80 quand la production d'un foncier et d'un habitat informels sont<br />

devenus la forme dominante de développement urbain. La couronne urbaine est devenue<br />

le lieu où ont coexisté la loi officielle de promotion foncière et le droit foncier traditionnel,<br />

entre les règles formelles et les pratiques informelles. Les projets publics ont souvent<br />

déclenché des vagues spéculatives dans leur voisinage, les spéculateurs empochant<br />

d'énormes profits en laissant aux pouvoirs publics le soin de prendre en charge les coûts<br />

sociaux et environnementaux de l'habitat informel.<br />

Les mesures de lutte contre ce phénomène se sont avérés décevants et peu dissuasives.<br />

En Inde la loi sur les prix fonciers plafonds visant à permettre l'achat des terrains destinés<br />

aux programmes sociaux à des prix inférieurs au marché a connu des difficultés lors de sa<br />

mise en œuvre. Aux Philippines, également, une loi réformant le foncier urbain a bloqué<br />

les prix exorbitant du foncier mais a été à l'origines de contentieux sans fin. En Algérie, la<br />

loi versant le foncier urbain aux municipalités a, paradoxalement stimulé les excroissances<br />

urbaines informelles et a accéléré la consommation des meilleures terres agricoles. En<br />

Malaisie, les fortes taxes frappant les terrains revendus dans un délai inférieur à deux<br />

ans ont été contournées très facilement. D'une façon générale, alors que le foncier est le<br />

bien qui prend le plus de valeur dans les pays en développement, il n'est fait recours à sa<br />

taxation qu'avec beaucoup de réticences. La fiscalisation du foncier a été décevante en<br />

raison, notamment, des sous-déclarations systématiques ce qui réduit le rendement de<br />

ces mesures.<br />

N'étant plus en mesure d'éradiquer les bidonvilles et de lutter contre l'apparition d'habitat<br />

informel, les interventions publiques se sont intéressées à leur régularisation et leur<br />

viabilisation. Cependant, les municipalités, auxquelles ces fonctions ont été décentralisées<br />

se sont retrouvées dans l'incapacité technique, managériale et financière de répondre à ce<br />

mandat, ce qui a permis au phénomène de s'étendre. Les programmes d'amélioration des<br />

tissus informels qui ont pu être engagés ont contribué à faire émerger une législation<br />

permettant la mise en œuvre de procédures pour la régularisation des terrains. En<br />

reconnaissant le rôle important que l'habitat informel peut jouer dans la création d'activités<br />

et sa contribution à l'économie urbaine, le défit qu'ont tenté de relever les législateurs a<br />

consister à concevoir un cadre capable de guider plutôt que de contrôler le<br />

développement urbain afin de minimiser les effets négatifs sur l'environnement ou le<br />

gaspillage de ressources naturelles rares, dont les terres agricoles.<br />

32


3- Le cadre légal de la régularisation foncière<br />

Dans la plupart des pays en développement les lois qui gouvernent les droits de propriété,<br />

l'acquisition du foncier, son enregistrement et son transfert ainsi que les règles de<br />

promotion foncière ont souvent été introduites pendant la période coloniale afin d'adapter<br />

les modèles européens aux exigences de la colonisation, entraînant parfois des<br />

changements profonds et irréversibles dans les systèmes fonciers traditionnels qui ont été<br />

souvent marginalisés. Si en Afrique sub-saharienne, l'usage de la loi coutumière a été<br />

limitée aux périmètres des villages, par contre en Afrique du Nord et au Moyen Orient<br />

les lois traditionnelles ont continué à gérer l'héritage. Dans la plupart des pays d'Asie<br />

également les pratiques coutumières ont résisté et s'appliquent encore aux transactions.<br />

Même dans les pays qui n'ont pas été directement colonisés comme en Thaïlande, les<br />

instruments législatifs occidentaux ont été adaptés pour répondre aux exigences de<br />

modernité et de développement socio-économique.<br />

Les Etats ont rencontré beaucoup de difficultés à intégrer les deux régimes qui, en<br />

général, coexistent de façon parallèle, le régime traditionnel offrant souvent une base<br />

légale plus appropriée pour la régularisation du foncier informel. Il s'est donc avéré<br />

essentiel de s'accorder sur les méthodes à retenir pour juger de la légalité d'une<br />

occupation foncière avant d'envisager des procédures de régularisation. Les occupations<br />

illégales de foncier se sont faites autant au détriment du propriétaire public (ce qui<br />

représente la majorité des cas) que privé. Dans le cas de terrains publics ou appartenant à<br />

des agences publiques, la régularisation passe d'abord par la reconnaissance des droits<br />

de toute la communauté concernée suivi par la délimitation et l'enregistrement des<br />

parcelles individuelles. Le processus de régularisation est beaucoup plus difficile quand il<br />

s'agit d'occupation de propriété privé (ce qui a souvent été le cas en Amérique Latine ou<br />

en Asie) et les processus n'ont pu être institutionnalisés car il est difficile d'envisager<br />

d'accorder des droits aux uns en violant ceux des autres.<br />

Dans la plupart des cas d'occupation informelle sur du foncier privé le problème essentiel<br />

n'a pas été celui de la propriété dans la mesure où les occupants avaient acheté leur<br />

parcelle sans procéder à son enregistrement officiel en raison de la complexité des<br />

procédures d'enregistrement, d'autant que les bénéficiaires potentiels de ces opérations<br />

(au demeurant coûteuses) n'en percevaient pas vraiment l'intérêt ni l'urgence. La<br />

régularisation des lotissements informels a conduit les autorités publiques à procéder<br />

d'abord à l'intégration de ces lotissements dans le périmètre urbain officiel, puis à<br />

procéder à leur régularisation implicite en leur étendant les infrastructures nécessaires sur<br />

les budgets publics. Toutefois cette démarche a vite connu ses limites en raison des<br />

insuffisances budgétaires et dès les années 70 la crise de gestion urbaine s'est traduite<br />

par un retard dans la viabilisation des lotissements deux à trois fois plus rapide que le<br />

rythme général d'extension urbaine.<br />

Les éléments de base pour monter des processus de régularisation existent dans<br />

plusieurs pays mais demandent à être restructurés afin de bâtir un cadre institutionnel<br />

mieux adapté aux contextes socioculturels de chaque pays.<br />

33


4-Le cadre institutionnel de la régularisation foncière<br />

A quelques exceptions près, les gouvernements centraux ont gardé à leur niveau<br />

l'administration de la question foncière en ne déléguant au niveau local que certains<br />

aspects de sa gestion, ce qui s'est souvent traduit par des mesures à caractères trop<br />

généraux pour pouvoir traduire les spécificités locales. Les tentatives de régulariser les<br />

promotions foncières informelles allaient des mesures de régularisation systématiques et<br />

générales aux procédures les plus complexes examinant les situations au cas par cas. En<br />

Amérique Latine les lois de régularisation des occupations illicites se sont limitées aux<br />

terrains publics donnant instructions que les titres ne soient délivrés qu'une fois les travaux<br />

d'infrastructures réalisés. Ailleurs se sont des agences nationales qui ont été investies de<br />

la tâche de viabiliser ces quartiers. Mais l'augmentation des coûts et la réduction des<br />

budgets ont laissé de nombreux sites non régularisés. Au Moyen Orient, et à l'instar de<br />

l'Egypte et de l'Algérie, des légalisations systématiques ont eu lieu périodiquement en<br />

1966, en 1981 et en 1984. Chaque loi régularisait les occupations illicites qui avaient eu<br />

lieu avant une date donnée en interdisant toute infraction à venir, laquelle infraction sera à<br />

son tour régularisée plus tard. Ces démarches systématiques se sont avéré des réponses<br />

statiques par les gouvernements à des situations extrêmement dynamiques mais perçues<br />

comme des anomalies momentanées, conséquences d'une faiblesse conjoncturelle du<br />

contrôle, que des déclarations officielles allaient pouvoir contenir.<br />

L'institutionnalisation de nouveaux processus qui donnent plus de place au rôle des<br />

pouvoirs locaux va s'avérer une approche beaucoup plus constructive. Cette<br />

décentralisation donnera aux autorités locales la possibilité de répondre à l'hétérogénéité<br />

des schémas de croissance urbaine au niveau communautaire. La participation<br />

communautaire active a été l'ingrédient de base des expériences positives de<br />

régularisation. Les municipalités, enfin, auront toute latitude pour adapter les procédures<br />

de régularisation aux formes de développement urbain au sein de leurs circonscriptions en<br />

ayant la possibilité de faire preuve de la flexibilité nécessaire. De plus en plus les autorités<br />

publiques se limitent à un rôle de catalyseur en favorisant la négociation entre les parties<br />

intéressées, le défit majeur étant de créer un cadre institutionnel qui permet de<br />

restructurer et de coordonner les activités au niveau local pour le besoin d'une politique<br />

cohérente de gestion foncière.<br />

1 - la Thaïlande :<br />

Les études de cas illustratifs<br />

Le programme de partage des terres développé à Bangkok dans les années 80 a évolué<br />

en fonction de l'évolution des schémas locaux d'habitat informel. Un recensement en 1985<br />

a indiqué que plus des trois quart de la population était locataire soit du terrain (50% des<br />

ménages) soit du logement (27% des ménages). 13% se disaient propriétaires du foncier,<br />

quant au reste ils ne possèdent aucun titre d'occupation.<br />

A Bangkok, les bidonvilles sont généralement situés sur des terrains propriété de l'Etat,<br />

d'institutions religieuses ou d'organisations mixtes. Les conflits apparaissent lorsque les<br />

propriétaires décident de vendre ou de lotir les parcelles, ce à quoi s'opposent les<br />

occupants. Le concept du programme de partage des terres suppose la redistribution de<br />

34


la terre entre ses occupants informels et les propriétaires qui ne sont plus en mesure de<br />

récupérer leur bien, au travers d'un processus de négociation qui implique le propriétaire,<br />

les occupants et l'autorité publique, en vue d'aboutir à un accord qui s'inscrit dans un<br />

cadre légal et réglementaire. Les occupants s'organisent au préalable en associations<br />

fortes à même de défendre les intérêts de ses membres et qui peut se faire entendre par<br />

l'autorité publique. L'Agence nationale de l'Habitat est chargée de préparer un plan de<br />

lotissement en vue de la régularisation du site. Les bénéficiaires reçoivent des lots<br />

viabilisés plus petits que leur emprise initiale avec un bail de location sur 20 ans. Il a alors<br />

été constaté que la sécurisation de l'occupation a encouragé l'investissent dans la<br />

construction et l'amélioration du bâti en favorisant la densification de l'habitat. en même<br />

temps le propriétaire récupère une portion très réduite de son terrain mais qui représente<br />

une valeur commerciale nettement plus élevée que son prix initial et qui plus est se trouve<br />

immédiatement disponible pour être développée. Deux cas illustrent cette démarche :<br />

Cas de Klong Toey : Il s'agit d'un grand terrain appartenant à l'Agence Portuaire qui a été<br />

squatté par les dockers que l'Agence n'a pu ni évincer ni déplacer dans des logements<br />

avoisinants. En 1983 l'Agence Nationale à l'Habitat a proposé un vaste projet de partage<br />

des terres portant sur plus de 11 hectares sur lequel ont été réalisés 1300 lots viabilisés<br />

d'une superficie de 60 m 2. Ces lots ont été proposés aux résidents sous un contrat de bail<br />

de 20 ans. En 1985 les bénéficiaires ont pris possession de leurs lots et démarré la<br />

construction de leurs logements.<br />

Cas de la zone de Ban Manangkasila : propriété du Trésor Public, ce terrain a été<br />

occupé dans les années 20. En 1978 le Trésor Public a décider de céder ce terrain à un<br />

promoteur qui a proposé des compensations aux occupants. Ceux-ci ont refusé et se sont<br />

organisé pour défendre leurs "acquis". Il a fallu trois ans pour que le Trésor Public, le<br />

promoteur et les occupants puissent arriver à un accord qui a abouti en 1982 à un partage<br />

du terrain accordant aux occupants la moitié arrière du site pour leurs besoins de<br />

logement. Le promoteur a récupéré la moitié frontale pour son opération commerciale. Les<br />

bénéficiaires ont obtenu chacun un lot viabilisé de 40 m 2 assorti d'un contrat de bail sur 20<br />

ans avec le Trésor Public.<br />

Le succès du programme de partage de terrain à Bangkok est attribué au fait qu'un seul<br />

promoteur est impliqué dans les négociations et que l'autorité publique peut agir sur le<br />

résultat.<br />

2 - Le Venezuela :<br />

Les quartiers illicites d'habitat spontané, les barrios, de El Milagro, El Hormiguero, et de<br />

Tum Tum, sont installés sur les terres de la compagnie sucrière qui avait autorisé certains<br />

de ses travailleurs à s'installer sur le site. En 1969, près de 200 familles y vivaient déjà,<br />

quoique étant, pour la plupart, des nouveaux venus qui n'avaient aucun lien avec l'usine,<br />

et qui se sont organisés en comités de défense pour s'opposer à toute éviction. Le<br />

gouverneur a organisé une rencontre entre la compagnie et le comité afin de trouver un<br />

accord. Au termes de cet accord, la compagnie accepte de vendre les lots de terrains à un<br />

prix donné mais ne s'engage pas à les viabiliser. La taille des lots varie de 200 à 700 m 2 et<br />

les paiements sont étalés sur 7 ans sans intérêts. La municipalité et l'Etat ont procédé aux<br />

levés topographiques, ont réalisé le plan de lotissement et assisté les intéressés dans les<br />

démarches administratives. Il est à signaler que cette opération n'a pas intéressé les<br />

politiciens en raison du faible nombre de ménages concernés.<br />

35


Il est intéressant de constater que cette formule a séduit la quasi-totalité des occupants<br />

illicites qui se sont porté acquéreurs à 97% même si la compagnie s'était engagée à ne<br />

pas évincer ceux qui n'achèteraient pas leur lots, ce qui traduit un fort désir de la part des<br />

intéressés à sécuriser leur situation. Par la suite les habitants ont réalisé les voiries et ont<br />

obtenu de la municipalité qu'elle fournisse l'eau et l'assainissement. La compagnie<br />

d'électricité a également régularisé les branchements pirates.<br />

Quand, en 1981 ont eu lieu des glissements de terrains, le gouverneur a forcé la<br />

compagnie a vendre 48 nouveaux lots aux familles affectées. Mais quand, en 1983, le<br />

comité a failli à ses obligations en matière de paiement du terrain, le gouverneur est<br />

intervenu pour enjoindre au comité de procéder au paiement. Aujourd'hui les bidonvilles<br />

ont été remplacés par des maisons en dur.<br />

L'enseignement le plus important que l'on peut tirer de cette expérience est qu'il est<br />

nécessaire d'entamer la régularisation a un stade plus avancé possible de l'occupation<br />

illicite et d'empêcher que les politiques ne s'en emparent, afin de maximiser les chances<br />

d'obtenir un accord négocié.<br />

3 - La Jordanie :<br />

Par comparaison à d'autres pays d'Afrique du Nord et du Moyen Orient, l'expérience de la<br />

Jordanie avec l'habitat illicite est relativement récente. Dans la région d'Amman, les<br />

bidonvilles apparaissent le long du couloir Amman-Zarqa et l'habitat informel s'installe<br />

dans le nord-est de la zone.<br />

Le cadre réglementaire et le processus de développement de l'habitat informel :<br />

Pour éviter la fragmentation excessive des lots, la réglementation fixe à 150 m 2 la taille<br />

minimale d'un lot. La majorité des terrains libres à Amman sont concernés par cette<br />

disposition. Afin de développer ces terrains, la municipalité de Amman a procédé à leur<br />

"réajustement" en prélevant jusqu'au tiers de la superficie des terrains pour les besoins<br />

des infrastructures et des équipements publics. Cette procédure s'est avérée compliquée<br />

et lente et était surtout destinée à traiter le problème de la fragmentation des lots et de la<br />

propriété multiple et non pas pour régulariser l'habitat informel qui s'est, pendant ce temps,<br />

développé à une grande échelle sur 2.300 ha de terrains de pastoralisme de droit tribal.<br />

Le processus de développement de cet habitat informel a été le suivant : des<br />

"entrepreneurs" font appel à des courtiers locaux qui négocient l'achat des terrains sous<br />

seings privés assurant de ce fait un transfert informel des droits tribaux aux promoteurs,<br />

sans les enregistrer auprès des domaines. Les promoteurs, à leur tour, subdivisent les<br />

terrains en lots qu'ils cèdent de façon similaire, en se conformant plus ou moins aux<br />

normes d'urbanisme, de même que le bâtit qui y est érigé répond aux règles de<br />

construction et présente une qualité tout à fait convenable. Les autoconstructeurs doivent<br />

cependant observer certaines "règles", à savoir, s'installer rapidement sur leur lot, éviter<br />

d'attirer l'attention des services domaniaux et, surtout, construire vite et en dehors des<br />

horaires de travail une structure d'une pièce, car une construction couverte est considérée<br />

comme habitable et donc protégée de la démolition par la sharia.<br />

Dans la zone de Ruseifa, une fois qu'ils ont jugé que leur nombre a atteint un nombre<br />

critique, les squatters ont exercé des pressions sur les autorités pour que leur situation<br />

36


soit régularisée. En effet le coût élevé des infrastructures (eau potable et électricité), si<br />

elles devaient être réalisées par les propriétaires, était suffisamment rédhibitoire pour les<br />

convaincre de régulariser leur situation et, par conséquent, payer les taxes foncières et<br />

immobilières requises.<br />

4 - L'Egypte :<br />

Hormis quelques opérations ponctuelles, l'Egypte ne disposait pas avant 1980 d'une<br />

politique officielle de régularisation du foncier informel. Les projets lancés par la Banque<br />

Mondiale et l'USAID en 1978 visant la restructuration d'habitat insalubre au Caire, se sont<br />

d'ailleurs heurtées à la question des terrains squattés à la limite du désert. Ces projets ont<br />

donc nécessité l'institutionnalisation de procédures légales pour la régularisation de<br />

l'occupation foncière dans les sites à restructurer.<br />

Un transfert progressif des prérogatives vers les autorités locales en matière de<br />

programmation, de construction et de maintenance s'est accompagné de révisions<br />

progressives des lois, en maintenant au niveau central la responsabilité des orientations<br />

de politique générale, les normes et standards et les budgets. Dès 1984, une loi donnait<br />

pouvoir aux gouvernorats pour transiger avec les occupants à condition que les<br />

bénéficiaires s'engagent à utiliser les terrains conformément aux termes du contrat de<br />

vente. Une loi subséquente aggravait les sanctions (fortes amendes et peines<br />

d'emprisonnement) pour toute agression des terres agricoles ou publiques. Cependant les<br />

textes réglementaires d'application n'ont été pris qu'à partir de 1985, un décret ministériel<br />

ayant tracé le cadre général pour la régularisation des terrains occupés avant la loi de<br />

1984 et déléguant aux gouvernorats la définition de procédures opérationnelles adaptées<br />

au contexte local.<br />

Pour le cas du Caire, le conseil local a adopté un décret qui stipule notamment :<br />

- le bâti en infraction avec les alignements de voirie tels que projetés ne seront pas<br />

régularisés, les occupants ne bénéficiant que d'une autorisation de location temporaire,<br />

- les terrains qui ne sont pas situés sur des assiettes destinées à des projets déjà<br />

approuvés sont régularisables,<br />

- un bureau spécial sera installé auprès des services des Domaines du gouvernorat pour<br />

traiter les demandes de régularisation,<br />

- un comité présidé par le secrétaire général du gouvernorat supervise la mise en œuvre<br />

de l'opération.<br />

A fin 1987 moins de 5% des cas avaient été régularisés et une proportion infime avait<br />

procédé au payement de l'acompte, ce qui a conduit les autorités locales à réviser les<br />

procédures en 1988. Dix ans après les enseignements tirés ont été les suivants :<br />

- la décentralisation des responsabilités a entraîné une séquence d'ajustements des<br />

rapports entre le centre et le niveau local, le centre promulguant de plus en plus de loi<br />

à caractère de cadre "facilitateur", le niveau local ayant plus de latitude à proposer des<br />

politiques foncières et des procédures adaptées à la régularisation des terres<br />

conformément au contexte local,<br />

- le droit à la régularisation semble n'avoir jamais été mis en doute par les occupants,<br />

que les élus ont tenu, du reste, à régulariser selon les règles de la sharia en ne les<br />

astreignant qu'au paiement des frais de la procédure de régularisation.<br />

37


- l'incapacité des autorités à faire appliquer les sanctions a fait perdre à la procédure de<br />

légalisation son caractère incitatif en vue de permettre la mise en conformité avec la<br />

réglementation,<br />

- de très sérieux problèmes d'équité sociale ont été rencontrés dans la détermination<br />

des prix et le désir des collectivités de ne pas dissuader des promoteurs formels en<br />

"bradant" les terrains régularisés.<br />

5 - L'Algérie :<br />

Le développement urbain a été durablement marqué dans ce pays par la politique foncière<br />

dictée par la législation de 1974 (ordonnance de février 1974 portant sur la constitution<br />

des réserves foncières communales) qui accordait un monopole à la commune sur les<br />

terrains urbains nus, par incorporation de ces terrains dans son patrimoine, avec<br />

indemnisation des propriétaires ou ayants-droit.<br />

Ces dispositions faisaient obligation aux communes de constituer leurs réserves foncières<br />

sans que les moyens nécessaires de cette prérogative, notamment techniques et<br />

financiers, n’aient été mis en place. Les premières attributions au profit des particuliers<br />

n’ont eu lieu qu’à partir de 1977 ce qui a conduit, entre-temps et sous la poussée des<br />

besoins, aux premiers comportements spéculatifs de la part des propriétaires fonciers<br />

privés, en pénalisant les acquéreurs à la quête d’un logement. En effet, à côté des<br />

programmes fonciers officiels, s'est développé à l'extérieur des périmètres urbains, une<br />

spéculation foncière parallèle (les ventes étaient réalisées sous seing privé en présence<br />

de deux témoins) stimulée par la crainte qu'avaient les propriétaires fonciers d'être<br />

nationalisés, à terme, ce qui a donné lieu à la création d'ensembles d'habitat informel (dit<br />

illicite) de taille souvent considérable.<br />

Les limites devenues criantes de cette réglementation et les options de libéralisation de la<br />

vie économique du pays ont conduit à la révision du dispositif législatif relatif au foncier en<br />

1990 en supprimant définitivement le monopole des communes, les terrains non bâtis<br />

inclus dans les périmètres d’urbanisation et non intégrés régulièrement dans les réserves<br />

foncières communales à la date de la promulgation de la loi demeurant à la disposition de<br />

leurs propriétaires qui peuvent en faire un usage selon les dispositions de la loi. Un<br />

assouplissement de la fiscalité foncière permet également d'entrevoir l'installation d'un<br />

marché foncier libre et d'éviter les pratiques spéculatives par la mise en place d'une<br />

fiscalité dégressive dans le temps.<br />

Entre temps, et de façon périodique, les autorités ont alterné les mesures coercitives et les<br />

opérations de régularisations chaque fois annoncées comme étant les dernières mais<br />

toujours renouvelées.<br />

Quand les terrains squattés étaient des terrains publics (souvent des terrains agricoles<br />

donnés en exploitation à des coopératives) les mesures étaient d'abord coercitives et<br />

allaient de la démolition pure et simple (destinée à servir d'exemple et à dissuader de<br />

nouveaux contrevenants ) de quelques bâtisses érigées en dehors du cadre réglementaire<br />

en début de la décennie 80, à des formes extrêmes se traduisant par la démolition en<br />

1984 des bidonvilles de la couronne d'Alger et le déplacement forcé des populations vers<br />

leurs communes d'origines. Ces dernières mesures ont été aussi spectaculaires par<br />

l'éradication rapide des grands bidonvilles que dangereuses au plan politiques, en créant<br />

une grande frustration de populations qui vivaient dans ces ensembles depuis souvent<br />

plus d'une génération.<br />

38


S'agissant de terrains privés qui ont été vendus et occupés en dehors des règles<br />

d'urbanisme, les pressions exercées par les habitants ont systématiquement contraint les<br />

élus et les administrations concernées (services de l'enregistrement, cadastre, etc.) à<br />

procéder à la régularisation des actes de vente et à la desserte des sites en infrastructures<br />

et viabilisation.<br />

Depuis 1996 et en association avec la Banque Mondiale puis la Banque Africaine, les<br />

autorités ont engagé un vaste programme de restructuration de l'habitat informel, visant<br />

tout particulièrement le traitement des bidonvilles par la création de lots de préventions<br />

pour l'accueil des populations des bidonvilles avoisinants et des populations migrantes<br />

vers les centres urbains. Sur des terrains domaniaux proches des bidonvilles, des<br />

lotissements sont viabilisés sur concours mixte (Etat, communes, population) et vendus à<br />

des conditions financières modulées en fonction du revenu des ménages. Un noyau de<br />

base évolutif de 40m2 environ est réalisé dans le cadre du programme et vendu aux<br />

ménages qui bénéficient pour cela également d'une aide financière (subvention partielle<br />

de l'Etat), les ménages terminant le reste de la construction par accès à un prêt public.<br />

6 - La Côte d'Ivoire :<br />

La régularisation des lotissements informels réalisés notamment ceux réalisés sur les<br />

terrains de droit coutumier (terres situées dans les villages), a fait l'objet d'une loi en 1977<br />

fixant les procédures. Cette nouvelle législation a tout particulièrement touché les<br />

nouveaux arrivants sur ces sites et a permis la réalisation des branchements en eau et<br />

électricité par les compagnies concernées, qui ont également servi les sites non<br />

régularisés en anticipant sur leur régularisation.<br />

Le processus de régularisation a permis le transfert du droit de propriété coutumier à<br />

l'Etat, suivi par une affectation des terrains aux propriétaires des lots sous forme de<br />

concession provisoire. Les terrains deviennent la propriété définitive des bénéficiaires une<br />

fois les procédures de régularisation achevées. Dès lors, le terrain devenant une propriété<br />

privée il est assujetti aux taxes foncières courantes. Si un lot tarde à être construit, il est<br />

astreint à une surtaxe après une période de grâce, et le bénéficiaire peut être, en fin de<br />

compte, dépossédé du terrain sans dédommagement.<br />

Les procédures de régularisation doivent être initiées par les villageois et le maire de la<br />

commune concernée. Le Ministère de l'urbanisme et la Direction et Contrôle des Grands<br />

Travaux sont chargés des nouveaux plans et des travaux de viabilisation.<br />

La question financière a, bien entendu, été déterminante dans le rythme de régularisation<br />

des sites informels et il n'est pas étonnant que les opérations de régularisation aient<br />

coïncidé avec les grands projets publics.<br />

7 - La Guinée :<br />

En Guinée l'Etat est le seul propriétaire foncier. L'extension urbaine légale est du ressort<br />

des assemblées territoriales et du Ministère du Plan et de l'Urbanisme. Toutefois des sites<br />

d'habitat informel se sont développés sur les périmètres des villages dont le foncier est<br />

soumis aux lois coutumières. La terre ne pouvant faire l'objet de vente, les transactions<br />

sont inscrites sous seing privé en tant que donation. Les projets de restructuration et<br />

39


d'amélioration des sites ont été les seuls mécanismes à la faveur desquels ont été<br />

régularisées les conditions d'occupation des terrains.<br />

L'intervention des pouvoirs publics a essentiellement visé à doter ces zones<br />

d'infrastructures minimales, telles que les voiries publiques, l'assainissement et les<br />

emprises de futurs équipements, afin de les intégrer dans le tissu urbain. En fait la<br />

régularisation foncière a été un sous-produit du processus de restructuration.<br />

Toutefois, depuis 1986, une réorganisation administrative a décentralisé les prérogatives<br />

en matière de foncier ce qui a permis à des conseils élus de reconnaître les ventes sous<br />

seing privé et de régulariser les terrains de droit coutumier situés en zones périphériques.<br />

Ces régularisations ont précédé les opérations de restructuration et peuvent être<br />

considérées comme la mise en place de procédures institutionnelles de régularisation de<br />

l'habitat informel.<br />

Pour terminer ce tour d'horizon des pratiques de régularisation du foncier informel, il est<br />

bon de citer deux cas qui se présentent l'un comme une anomalie institutionnelle, celui du<br />

Zaïre, et l'autre comme un demi-échec du fait de la rigidité réglementaire, celui de la<br />

Zambie.<br />

8 - Le Congo Démocratique (ex-Zaïre) :<br />

Le cas du Zaïre illustre une forme très particulière de régularisation para-légale, non<br />

contrôlée par les pouvoir publics et qui a été prise en charge par des intermédiaires<br />

informels. La ville de Kinshasa, comme la plupart des capitales africaines a connu une<br />

croissance extrêmement rapide favorisée par une hyperinflation qui a fait du foncier le seul<br />

refuge en mesure de protéger les capitaux d'une dépréciation rapide.<br />

Les transactions foncières sont sanctionnées par des documents établis par les services<br />

officiels locaux mais des pratiques frauduleuses se sont généralisées permettant des<br />

ventes multiples du même lot et l'apparition de documents falsifiés. Pour se protéger des<br />

risques de contestation de la propriété, l'achat de plusieurs lots adjacents est devenu<br />

pratique courante ce qui a aggravé la pression sur le foncier et rétréci le foncier coutumier.<br />

Des agents immobiliers privés, les commissaires, forts de leurs liens avec les chefs<br />

tribaux, les autorités locales, les entrepreneurs et les fabricants de matériaux de<br />

constructions se sont accaparé les transactions en prélevant une "taxe" de 10% de la<br />

valeur du terrain. Les acquéreurs s'emploient à ériger rapidement une clôture et une<br />

cellule de base pour sécuriser leur propriété sur le terrain.<br />

Cette procédure s'est étendue à tout développement urbain au Zaïre et fournissait, en<br />

début de décennie, l'habitat de près de 70%de la population, en concernant également la<br />

même proportion de foncier.<br />

9 - La Zambie :<br />

De 1963 à 1974, soit près d'une décennie, la population de Lusaka a été multipliée par<br />

plus de trois. La population vivant dans un habitat informel est passée de 15 à 45% de la<br />

population totale, occupant notamment le quartier George, près de la zone industrielle.<br />

40


Un projet de restructuration de cet habitat insalubre a été engagé en 1974 par la Banque<br />

Mondiale, mais s'est heurté à la lenteur du processus de régularisation foncière. En effet la<br />

législation foncière existante ne permet pas de répondre aux questions posées par la<br />

restructuration notamment en ce qui concerne l'usage des sols tels que prévus par les<br />

plans de restructuration.<br />

Les principaux obstacles rencontrés concernent notamment :<br />

- la subdivision des terrains en de nombreuses petites parcelles qui devaient être<br />

acquises séparément, et par conséquent faire l'objet d'un levé et d'une évaluation<br />

séparés,<br />

- la procédure d'acquisition était complexe et impliquait plusieurs administrations,<br />

- la faiblesse des services d'enregistrement foncier,<br />

- les propriétaires fonciers étaient réticents à céder leurs terrains du fait de la faiblesse<br />

des compensations offertes,<br />

- la participation communautaire s'est avérée être un frein à la prise de décision.<br />

De ce fait, alors que l'opération avait fait de la production des titres de propriété l'épine<br />

dorsale de la procédure de recouvrement des coûts, le premier titre n'a été délivré que 5<br />

ans après le début de l'opération. Entre temps plusieurs familles avaient profité des<br />

avantages de la restructuration et ne voyaient plus la nécessité d'obtenir un permis<br />

d'occupation.<br />

41


III - ACTIONS DE S<strong>AU</strong>VEGARDE DES MEDINAS<br />

ET DE L’HABITAT ANCIEN<br />

1 - La Médina de Tunis : L’action d’une Association de Sauvegarde de la Médina<br />

Fondée au IX ème siècle, la Médina de Tunis s’étale sur une superficie de 270 ha et abrite<br />

une population de 100.000 habitants environs. Site historique classé en 1981 sur la liste<br />

du patrimoine mondial par l’UNESCO, la Médina renferme près de 700 édifices considérés<br />

comme monuments historiques.<br />

Contexte institutionnel et réglementaire :<br />

Créée en 1967 l’Association Sauvegarde de la Médina (ASM) a pris en charge un<br />

certain nombre d’actions, dès 1969, avec l’UNESCO, se traduisant par des travaux<br />

d’étude et des opérations de réhabilitation. A ce titre, l’Atelier d’Architecture et d’urbanisme<br />

de l’ASM a établi un relevé d’architecture de la Médina, des activités artisanales et<br />

commerciales et procédé à un inventaire des monuments. Cela a permis d’élaborer en<br />

1973 un plan d’aménagement de la Médina qui a notamment abouti à la rénovation de la<br />

première tranche du quartier de Hafsia en 1976.<br />

En 1980, l’ASM élabore dans le cadre du Plan d’Aménagement de la Commune de Tunis,<br />

un Plan d’Aménagement et un règlement d’urbanisme spécifique pour la Médina qui a<br />

permis de gérer ce patrimoine au cas par cas.<br />

La création de l’Agence de Réhabilitation et de Rénovation Urbaine (ARRU) en 1981,<br />

dotée des prérogatives de puissance publique en matière d’expropriation, d’acquisition,<br />

d’aménagement, de réalisation et de commercialisation, et l’adoption du programme de<br />

réhabilitation des zones d’habitat spontané et l’entretient de l’habitat ancien, ont permis<br />

d’élaborer les études de programmes opérationnels et de lancer la réalisation concrète de<br />

projets intégrés.<br />

Les projets intégrés<br />

1) Le Quartier de Hafsia : cofinancé par la Banque Mondiale et l’Etat tunisien, ce projet<br />

concerne la restructuration d’une zone de 13 ha et concerne la réfection des voiries et<br />

réseaux divers, la rénovation de l’habitat et la réhabilitation des bâtiments anciens. Ce<br />

quartier, qui avait déjà connu des opérations de démolition remontant aux années 30, a<br />

été occupé par des familles pauvres d’origine rurale et a vu sa dégradation s’accélérer.<br />

Le projet a donc visé un objectif de double intégration :<br />

- intégration socio-économique en permettant un brassage social, et<br />

- intégration spatiale en assurant une continuité urbaine.<br />

2) La réhabilitation du patrimoine immobilier : constitué de logements essentiellement<br />

locatifs, ce patrimoine connaissait une situation de dégradation accélérée du fait du<br />

faible intérêt des propriétaires à la rénovation d’un bien peu rentable. En effet, le droit<br />

au maintien sur les lieux et le blocage des loyers par la loi, a incité les propriétaires à<br />

laisser leur bien se dégrader dans l’espoir de pouvoir expulser les locataires dans<br />

42


l’éventualité ou l’immeuble est décrété menaçant ruine. L’opération de Hafsia a permis,<br />

en testant différents mécanismes, de montrer que la mise en place d’outils ad-hoc (une<br />

cellule de réhabilitation ASM/ARRU créée pour les besoins de l’opération) autorise le<br />

montage d’opérations concluantes. Il reste que la question de la pérennité du<br />

processus reste posée notamment en vue de la mise en place d’une politique nationale<br />

de réhabilitation.<br />

3) Le projet «Oukalas » : Les Oukalas sont des maisons dont l’entretien a été<br />

totalement abandonné par les propriétaires et qui sont loués à la pièce. Très<br />

insalubres, elles sont suroccupées et sont le lieu de graves problèmes sociaux générés<br />

par l’entassement des populations. 3000 ménages environ vivent dans 600 de ces<br />

Oukalas. En 1990 un programme opérationnel a été engagé, classant les Oukalas en<br />

deux catégories :<br />

- ceux qui menaçaient ruine et qui devaient être démolies ou restaurées, et<br />

- ceux qui devaient être réhabilitées.<br />

Pour les ouvrages de la première catégorie trois types d’interventions seront<br />

retenues :<br />

- relogement d’urgence des ménages en dehors de la Médina par la municipalité<br />

dans le cadre du Programme National de Résorption des Logements<br />

Rudimentaires, les ressources étant prélevées sur les crédits budgétaires<br />

alloués à ce programme. 800 familles environ ont ainsi accédé à des logements<br />

évolutifs (2 pièces plus cuisine, extensibles) acquis sous forme de location<br />

vente.<br />

- expropriation des Oukalas et démolition ou (pour les monuments) restauration,<br />

- reconstruction sur les terrains libérés conformément à un cahier de charge.<br />

Pour les ouvrages de la deuxième catégorie (les Oukalas ne présentant pas de<br />

danger immédiat), ils ont fait l’objet d’une réhabilitation selon l’état de vétusté. Cette<br />

opération a concerné près de 500 bâtisses. Le mode de financement envisagé était,<br />

notamment pour les actions de réhabilitation lourdes, un système de crédits et une<br />

aide financière tirée des plus-values dégagées de la vente des terrains pour<br />

rénovation. Cette option réhabilitation permet d’éviter le transfert massif des<br />

populations et présente un bilan économique, social et culturel très positif.<br />

Les enseignements :<br />

L’expérience tunisienne est intéressante par le rôle qu’a jouée l’ASM dans ses différentes<br />

actions de sensibilisation, d’étude approfondie de la réalité du tissu bâti ainsi que des<br />

contextes social, économique et culturel, et ses propositions d’intervention visant la<br />

sauvegarde de l’existant dans la plus large mesure possible. Les limites de l’action de<br />

l’ASM sont celles d’une association qui ne détient pas les prérogatives d’une<br />

administration et dont les avis sont, en principe, strictement consultatifs. Sa connaissance<br />

parfaite de la Médina en a, toutefois, fait un interlocuteur spécialisé incontournable et<br />

écouté.<br />

L’expérience d’une intervention sur le tissu ancien a permis également de tirer un certain<br />

nombre d’enseignements et de suggérer des propositions d’amélioration des dispositifs<br />

généraux existants afin de les adapter au contexte spécifique des tissus anciens :<br />

43


1-L’obstacle à la réhabilitation, avant d’être d’ordre financier, est d’abord juridique du fait<br />

de la réglementation régissant le régime locatif et l’obligation de maintien sur les lieux et le<br />

blocage des loyers. De plus des solutions restent à trouver à la liquidation rapide de la<br />

propriété en indivision et des réponses appropriées devront être imaginées pour les<br />

question de permis de bâtir dans un conteste spécifique.<br />

2- Le financement sur des ressources budgétaires des programmes de relogement des<br />

ménages occupant les Oukalas a pu être une solution utile ponctuellement, mais il est<br />

nécessaire trouver des solutions plus durables par le biais, par exemple, de l’affectation<br />

d’une partie des plus-values procurées aux terrains libérés au programme de recasement.<br />

La mise en place de prêts à taux bonifiés pour les programmes de réhabilitation a été<br />

également suggérée.<br />

3- La réservation d’un programme de logements (opération tiroir) a été avancée mais elle<br />

suppose une gestion rigoureuse afin de ne pas amorcer un cycle de relogement sans fin,<br />

la Médina servant de zone de transition pour des nouveaux arrivants permanents.<br />

2- La Casbah d'Alger 3 :<br />

La Casbah ou médina d'Alger est entourée par une muraille défensive et s'étend sur<br />

environ 60 ha, dont 45 de domaine bâti ; le site est globalement incliné vers la mer, avec<br />

une pente moyenne de 15%. La partie haute de la ville a conservé son caractère<br />

traditionnel, contrairement à la partie basse qui n'a préservé que très peu de l'habitat<br />

ancien. La basse Casbah a connu les percements de la période coloniale. C'est là que se<br />

trouvent de nombreux palais.<br />

la Casbah abrite une population de 60.000 habitants 4 dans 1.700 maisons dont 1.200 de<br />

type traditionnel et subit aujourd'hui une dégradation de ses structures urbaines et<br />

architecturales. Quelques maisons traditionnelles seulement gardent leurs éléments<br />

d'origine, beaucoup plus nombreuses étant celles qui ont été remaniées, conservant leur<br />

structure verticale, mais connaissant un important remaniement de la structure spatiale<br />

interne.<br />

Les remaniements (transformations et réparations depuis 1830, date de la colonisation),<br />

les mutations sociales et la surdensification sont à la base du déclin de la Casbah d'Alger,<br />

aggravés d'autres facteurs tels que :<br />

- surélévation,<br />

- construction avec des matériaux nouveaux inadaptés,<br />

- dégradation des réseaux d'assainissement,<br />

- vétusté des puits et infiltration provoquant des remontées capillaires...<br />

Près de 500 bâtisses étaient évacuées en 1990 jugées dangereuses et parmi les bâtisses<br />

non évacuées près de 40% étaient considérées de vétusté critique ou très avancée. Il y a<br />

lieu de noter que 90% de l'habitat est de statut privé.<br />

3 cette note se réfère en particulier au Rapport de l'Office d'intervention et de régulation des<br />

opérations d'aménagement de la Casbah (OFIRAC) - Décembre 1989, ainsi qu'à une communication<br />

de Djaffar Lesbet.<br />

4 ce chiffre peut varier dans des proportions assez importantes selon les actions de recasement<br />

entreprises par les autorités ou le flux de nouvelles vagues d'arrivants.<br />

44


Les outils d'action :<br />

Alors que les premières actions engagées dans les années 60 visaient la remise en état<br />

de quelques bâtisses délabrées, les actions plus récentes de sauvegarde de la Médina<br />

son envisagée pou une prise en charge globale de son paysage urbain et de l'ensemble<br />

du site.<br />

Dès 1970-1972 l'Atelier Casbah pose les bases d'une recherche et d'une étude<br />

d'aménagement de l'ensemble du site. En fait le programme d'activité de cet Atelier et le<br />

contenu de ses actions était, pendant cette période, défini par la représentation locale de<br />

l'administration de l'urbanisme (la Subdivision de l'Urbanisme, de la Construction et de<br />

l'habitat, la SUCH). La gestion du dossier de la Casbah est marquée par la nature<br />

administrative de la SUCH et la réhabilitation ne connaît pas de progrès réel.<br />

En 1979, une convention de coopération est signée avec l'UNESCO qui a permis de<br />

dégager une vision globale de l'ensemble de la Casbah. Les zones prioritaires sont<br />

identifiées, des propositions d'aménagement pour l'ensemble du site et pour les zones<br />

prioritaires sont élaborées. En 1985 deux organismes publiques destinés à assurer la<br />

maîtrise des actions sont crées :<br />

- l'OFIRAC, sous tutelle du ministère de l'habitat, qui est chargé "d'exécuter ou de faire<br />

exécuter toutes actions requises par les tâches nécessaires à la concrétisation du<br />

programme de réhabilitation de la Casbah". En outre l'OFIRAC a été chargé de donner<br />

son avis préalable à toute intervention dans le périmètre de la Casbah, et<br />

- l'ANAPSMH ; Agence nationale d'archéologie et de protection des sites et monuments<br />

historiques, "chargée de l'ensemble des actions d'inventaire, d'étude, de conservation,<br />

de restauration et de mise en valeur du patrimoine national", de façon générale.<br />

Toutefois le rôle de cette institution a été relativement modeste dans la prise des<br />

grandes décisions concernant la réhabilitation de la Casbah.<br />

La multiplication des intervenants n'a finalement pas toujours eu des conséquences<br />

positives sur les programmes. En fait les changements successifs de l'autorité en charge<br />

du projet (l'OFIRAC est d'ailleurs passé dès l'année suivante sous l'autorité du Wali<br />

d'Alger) et les changements à la tête de l'institution elle-même, ont dilué les<br />

responsabilités et n'ont pas permis de mettre sur pied un programme cohérent doté des<br />

moyens nécessaires, tant au plan humain, que financiers et juridiques.<br />

Moyens législatifs et juridiques :<br />

Dès 1967, la loi relative aux fouilles avait inclus des dispositions juridiques assurant une<br />

protection efficace d'une vingtaine d'édifices sur les 1700 maisons existantes dans le<br />

périmètre de la Casbah.<br />

Le texte de loi du 28 mars 1975, approuvant le Plan d'Orientation de l'Agglomération<br />

d'Alger, consacre la revalorisation de la Casbah en déclarant que "le site entier doit être<br />

considéré comme site historique" et que "la Casbah a un caractère prédominant de zone<br />

d'habitat et doit le conserver". De fait, le Plan d'Orientation Générale a prévu la<br />

sauvegarde systématique de toutes les constructions anciennes.<br />

45


Les actions entreprises :<br />

C'est notamment sur la base de cette dernière loi que l'OFIRAC a tracé son programme<br />

de réhabilitation. Par la suite, et en réponse aux orientations gouvernementales, l'OFIRAC<br />

identifie les zones prioritaires, et formule des propositions d'aménagement pour toute la<br />

Casbah ainsi que pour les zones dites prioritaires. Dans ce cadre les opérations lancées<br />

en 1985 concernaient :<br />

- la dedensification progressive des bâtisses selon leur état de dégradation et leur intérêt<br />

architectural : 498 maisons sont ainsi évacuées,<br />

- la préservation du site à travers : 1) la rénovation des bâtisses évacuées, 2) la<br />

reconstruction des sites vacants résultants des démolitions (209 parcelles), 3)<br />

l'engagement de recherches archéologiques en vue d'interventions globales sur les<br />

îlots.<br />

Plus récemment, et suite au séisme de 1989, 1500 maisons ont été recensées et<br />

expertisées, ce qui a permis de déterminé que 204 bâtisses nécessitaient des<br />

interventions lourdes de confortement.<br />

Les rénovations sont entreprises à un rythme extrêmement lent du fait de la difficulté de<br />

mobiliser les ressources suffisantes ou, plus précisément, faute d'avoir mis en place des<br />

mécanismes financiers de nature à permettre une prise en charge du programme avec la<br />

participation des propriétaires. Cette situation est aggravée par les conditions d'habitat<br />

dans la Casbah.<br />

En effet, et à l'instar de plusieurs médinas (dont celle de Fès) les occupants actuels sont<br />

des sous-locataires souvent de la deuxième, voire de la troisième génération et<br />

appartenant généralement à une population nouvellement installée dans la capitale. Cette<br />

population se considère, du reste, comme étant en transit à la Casbah et dans l'attente<br />

d'un logement social "extra-muros", ce que l'administration a fourni généreusement en<br />

"recasant" les habitants des bâtisses menaçant ruine, sans régler le problème au<br />

demeurant, vu l'afflux permanent de nouveaux arrivants.<br />

A cela s'ajoutent les problèmes complexes d'héritage qui explique les réticences des<br />

propriétaires à intervenir sur un bien difficilement récupérable. Les tentatives de l'Etat de<br />

subventionner fortement les propriétaires désireux de réhabiliter leurs bâtisses (prêt<br />

accordé à un taux bonifié symbolique de 1%) ont tourné court avec les difficultés<br />

économiques consécutives à la chute des prix des hydrocarbures de 1986.<br />

Certaines réalisations sont toutefois à signaler à cette époque comme la réhabilitation sur<br />

fonds publics de certains îlots tels que l'îlot Lallahoum ou de certains palais, dont le palais<br />

des Raïs (chefs militaires turcs) appelé Bastion 23.<br />

Signalons enfin que la Casbah d'Alger a été classé monument national puis Patrimoine<br />

Mondiale par l'UNESCO a en début de cette décennie.<br />

Enseignements:<br />

Plus qu'un bilan chiffré, il est intéressant de s'interroger sur les performances d'un<br />

dispositif qui a été pendant longtemps dépendant de l'action des pouvoirs publics. La<br />

raréfaction des ressources budgétaires publiques, si elle est une des explication des<br />

46


difficultés à procéder de façon résolue à la réhabilitation de la Casbah, n'en est pas la<br />

seule raison. Outre l'apathie des propriétaires qui espèrent toujours une prise en charge<br />

par l'Etat, les mesures de relogement systématiques par l'Etat des habitants des bâtisses<br />

à risque ont, en quelque sorte, amorcé une pompe : n'a-t-on pas vu, lors du séisme 1989<br />

des locataires procéder à la mise en danger de ces demeures par la démolition partielle<br />

des piliers afin de bénéficier d'un relogement d'urgence ?<br />

La création d'une association des habitants de la Casbah a quelque peu redynamisé le<br />

dialogue entre la population et les pouvoirs publics. Ceci est de bonne augure si la<br />

concertation abouti à créer un véritable esprit de participation communautaire et constituer<br />

une force de proposition en vue d'aborder la question de réhabilitation sur des bases<br />

réalistes et dans la perspective de mise en place de mécanismes durables adaptés aux<br />

conditions économiques des populations et au contexte culturel de la société que la<br />

Casbah héberge.<br />

3 - La Vieille Ville d'Alep<br />

Avec Damas, Alep est la plus vielle ville au monde qui a été habitée de façon continue.<br />

Ces deux villes contiennent, au sein de leur tissu urbain, des centres historiques de<br />

grande importance. Celui de la ville d'Alep couvre une superficie de 400 hectares et abrite<br />

une population de 110.000 habitants.<br />

Les altérations du centre ancien :<br />

Dès la fin du 19 ème siècle, la population disposant d'un revenu moyen ou élevé a<br />

commencé à abandonner la vieille ville pour les nouveaux quartiers érigés selon une<br />

trame urbaine occidentale. De nouvelles normes de développement urbain furent<br />

imposées à la vieille ville qui ne tenaient pas compte de son caractère spécifique. Dans<br />

les années 50 un nouveau plan d'urbanisme imposa l'ouverture de voies principales dans<br />

la ville historique, endommageant la structure ancienne de la cité en isolant les quartiers,<br />

favorisant l'apparition d'immeubles de plusieurs étages le long de ces voies et en<br />

compromettant l'environnement urbain et la cohérence sociale, ce qui a accéléré l'exode<br />

des populations aisées à l'extérieur de la médina.<br />

La prise de conscience :<br />

Les effets négatifs du nouveau plan d'urbanisme devinrent très rapidement criants,<br />

suscitant une prise de conscience tant au niveau des pouvoirs publics que de la société<br />

civile. A l'instar de Tunis, un Comité pour la Défense de la Vieille Ville a été crée pour<br />

donner ses avis et conseils en matière de préservation. Classée monument nationale, la<br />

vieille ville a bénéficié du concours de l'UNESCO. Le plan d'urbanisme a été abandonné<br />

pour ce qui concerne sa partie relative à la vieille ville et un nouveau code de construction<br />

visant à orienter les interventions sur ce tissu a été adopté. L'UNESCO a, alors, inscrit la<br />

vieille ville d'Alep en tant que Patrimoine Mondial.<br />

Si ces mesures ont permis de freiner les destructions du fait des projets publics ou privés,<br />

elles n'étaient pas suffisantes pour inverser le processus de dégradation. Si les résidents<br />

avaient pu, durant des siècles, entretenir leurs habitations, les conditions économiques<br />

actuelles ont constitué un obstacle aux actions individuelles et il est devenu évident qu'il<br />

47


fallait agir selon de nouvelles méthodes. Une stratégie globale pour la réhabilitation de la<br />

vieille ville a été conçue et mise en œuvre avec l'assistance d'une coopération<br />

internationale (FADES et le Gouvernement allemand - GTZ).<br />

Les objectifs du projet :<br />

Le projet vise à préserver le tissu unique de la vieille ville, et de ralentir sa détérioration en<br />

y améliorant les conditions de vie et lui restaurant son rôle économique et social. Pour<br />

cela les objectifs intermédiaires suivants ont été tracés :<br />

- prendre les mesures immédiates en vue de répondre aux situations d'urgence telles<br />

que la réparation des demeures menaçant ruine des ménages à faible revenu ainsi<br />

que des infrastructures publiques,<br />

- engager une étude de réhabilitation sur la base d'une enquête physique, économique<br />

et sociale en vue de proposer un schéma de développement, en tenant compte, pour<br />

l'échéancier, des ressources publiques et privées disponibles,<br />

- mettre en place un dispositif institutionnel doté d'une relative indépendance et engager<br />

les actions de formation nécessaires au niveau des services concernés des personnels<br />

chargé d'assurer la pérennité du projet après son achèvement,<br />

- rechercher des sources de financement nouvelles au niveau national et international,<br />

- entamer la mise en œuvre du projet et procéder à son évaluation périodique afin<br />

d'apporter les correctifs nécessaires.<br />

Le projet a été divisé en trois phases :<br />

- la première phase se déroulant de 1993 à 1997, est consacrée à la mise en place de la<br />

structure de gestion du projet, l'étude et la détermination des zones d'intervention et<br />

l'initiation des premières opérations en testant un système de crédits qui a déjà touché<br />

170 ménages. Pendant cette phase la formation sur le tas, mais également à<br />

l'extérieur, des cadres municipaux et des experts locaux, a été engagée en même<br />

temps que les actions de concertation avec les populations.<br />

- la deuxième phase qui doit se terminer en l'an 2000, permettra d'approfondir les<br />

actions engagées pendant la première phase en les corrigeant, notamment<br />

l'engagement d'opérations de réhabilitation des infrastructures et le développement du<br />

système de crédit. La concertation avec les résidents sera institutionnalisée en vue<br />

d'accélérer l'engagement des populations et du secteur privé.<br />

- La troisième phase qui commencera après l'an 2000 verra le programme prendre son<br />

régime de croisière. La structure institutionnelle chargée de la gestion du projet sera<br />

totalement opérationnelle et pilotera seule le projet.<br />

L'organisation financière et institutionnelle :<br />

Le projet a été initié en 1992 par la municipalité d'Alep avec l'aide du gouvernement<br />

allemand, et le sponsoring financier de GTZ et du FADES. Le maire de la ville d'Alep a<br />

autorité directe sur le projet auquel la ville d'Alep fournit le personnel, les structures de<br />

travail et une part des fonds nécessaires notamment à la réhabilitation des infrastructures.<br />

GTZ est responsable de la gestion de la participation financière du gouvernement<br />

allemand qui fournit la majeur partie des ressources financières pour le financement des<br />

crédits, de l'équipement technique et de la formation des personnels et des experts. La<br />

contribution du FADES concerne le financement de la formation du personnel, des<br />

équipements techniques et de la mise à disposition d'experts.<br />

48


La structure chargée de la gestion du projet est organisée en sections sous l'autorité d'un<br />

niveau de commandement assisté par un chef de groupe affecté par GTZ. Sur un effectif<br />

total de 40 personnes, 70% sont des employés municipaux, 25% étant des experts locaux<br />

et 5% des experts étrangers.<br />

Conclusions:<br />

Le projet étant relativement jeune, il n'est pas encore possible d'en mesurer l'impact sur la<br />

ville ni de percevoir de façon très nette les changements. Les initiateurs savent que le<br />

processus mettra plus de la décennie, comme le prouvent du reste les expériences<br />

similaires conduites ailleurs, pour prendre forme au travers d'une série de changements<br />

progressifs. L'objectif essentiel est de mettre en place un dispositif institutionnel et<br />

organisationnel durable en mesure de prendre en charge avec professionnalisme la<br />

conservation des sites et bâtisses qui peuvent l'être et de susciter des changements en<br />

harmonie avec l'architecture et l'urbanisme de la vieille ville quand cela est nécessaire.<br />

Deux facteurs ont été mis en place qui semble être de nature à assurer à cette opération<br />

la durabilité souhaitée:<br />

- une organisation institutionnelle qui associe les pouvoirs publics et la société civile<br />

notamment les universitaires,<br />

- le recours à des compétences internationales et à un financement extérieur qui<br />

n'excluent pas la participation locale, mais, au contraire l'impliquent de façon directe.<br />

49


Projet de réhabilitation des quartiers de Balat et de Fener (centre historique<br />

d'Istanbul)<br />

Pays :<br />

Secteur :<br />

Durée :<br />

Turquie<br />

développement social et urbain<br />

4 ans<br />

Contexte<br />

Le projet de réhabilitation des quartiers de Balat et Fener est né d'une demande<br />

d'assistance technique effectuée par la municipalité de Fatih auprès de la<br />

Commission européenne. Situés en plein centre-ville, ces 2 quartiers périclitent et<br />

tendent de plus en plus à attirer des populations marginalisées, attirées par les<br />

faibles loyers dans une conjoncture de marché foncier très peu dynamique,<br />

principalement à cause de la diminution d'attractivité du secteur. L'appauvrissement<br />

de la population résidente, la dégradation du cadre bâti (en grange partie classé) et<br />

le manque d'infrastructures et d'équipements de proximité ont motivé la participation<br />

de la CE à la mise en place d'une opération d'aménagement et de réhabilitation du<br />

quartier.<br />

Plan de financement (voir détail en annexe)<br />

Etude de faisabilité : 116 000 ECU/ effectuée par le centre du patrimoine mondiale<br />

de l'UNESCO (sept. 97 à fév. 99)<br />

Coût total du projet : 17 293 000 ECU<br />

Contribution de la CE : 7 000 000 ECU<br />

Contribution du Gouvernement turc : 10 293 000 ECU<br />

La municipalité de Fatih aura la charge de mobiliser les fonds de la partie turque.<br />

Répartition des contribution en %<br />

Contribution CEE Contribution turque Tot ligne<br />

Equipements de proximité 26 41 26 59 100<br />

Réhabilitation 45 65 17 35 100<br />

Outils de gestion 21 75 5 25 100<br />

Infrastructure 4 8,5 32 91,5 100<br />

Traitement urbain 4 10 21 90 100<br />

Tot colonne 100 100<br />

Données urbaines<br />

Périmètre de l'étude : 16,2 ha , 1401 parcelles, 1267 bâtiments<br />

Population : 12000 habitants, 4,5 habitants/ménage, 750 habitants/ha<br />

Statut d'occupation : 60% de locataires, 40% propriétaires<br />

Analphabétisme : 11% d'analphabètes (5% des hommes, 19% des femmes)<br />

50


Patrimoine classé : 12 monuments classés, 508 bâtiments classés, 693 bâtiments<br />

antérieurs à 1930<br />

Etat du bâti : 21 ruines, 13% des bâtiments nécessitant une réhabilitation lourde,<br />

30% une réhabilitation moyenne, 31% une réhabilitation légère, 26% en bon état.<br />

4 Objectifs principaux<br />

1°) Améliorer le logement par des actions incitatives de réhabilitation du patrimoine<br />

menées auprès des propriétaires (outil financier attractif associant crédits,<br />

subvention et petite épargne personnelle) ;<br />

2°) fournir un certain nombre d'équipements de proximité en mettant l'accent sur<br />

l'activité périscolaire des jeunes (cours d'alphabétisation et soutien scolaire) et sur<br />

les équipements sanitaires (dispensaire, centres de soins) particulièrement pour la<br />

formation des femmes (planification familiale, centre de protection infantile,<br />

organisation de leur production domestique) ;<br />

3°) assurer une activité d'encadrement et de formation pour les jeunes à travers des<br />

centres d'éducation et de formation professionnelle, en partie liés aux activités de la<br />

réhabilitation du quartier ;<br />

4°) rendre le quartier habitable par l'amélioration des infrastructures et des services<br />

publics, le traitement de son environnement urbain, et par une redynamisation du<br />

commerce et de l'artisanat.<br />

Actions proposées<br />

La réhabilitation<br />

225 bâtiments remis aux normes en 4 ans ( soit 25% des bâtiments du périmètre<br />

concernant 3000 habitants)<br />

La formation professionnelle<br />

- création de la maison de l'artisanat et de l'institut technique du textile (visant à<br />

former les étudiants aux métiers du textile)<br />

Les équipements de proximité<br />

- 2 centres d'études périscolaire<br />

- maison des femmes intégrant un centre de protection maternelle et infantile, un<br />

centre socio-éducatif et de formation, une crèche et une maternelle<br />

un centre de réinsertion des anciens drogués<br />

L'amélioration des infrastructures et des équipements publics<br />

- travaux de voirie et d'infrastructure équipements sportifs de plein aire pour enfants<br />

(complément du réseau de gaz de ville, réfection du réseau d'eau potable,<br />

renforcement du réseau d'évacuation des eaux pluviales).<br />

Participation des habitants et modalités d'expression des usagers<br />

maison de l'habitant ainsi que de nombreuses réunions publiques<br />

Les résultats attendus<br />

- réhabilitation du bâti et des logements en maintenant autant que possible les<br />

habitants actuels sur place<br />

- amélioration des conditions sanitaires<br />

- augmentation du revenu des femmes et amélioration de leur statut<br />

- création d'espaces publics, pavage des rues, remise aux normes des réseaux<br />

51


La structure opérationnelle proposée<br />

Une unité de gestion : opérateur du projet chargé de mettre en oeuvre les quatre<br />

priorités d'action dans le cadre de son programme opérationnel annuel. Il est désigné<br />

au moyen d'un appel d'offre suivant les règles en vigueur des projets MEDA.<br />

L'atelier de quartier : équipe opérationnelle et structure technique dont le rôle sera<br />

d'assurer une animation sociale et de conseil auprès des habitants.<br />

La coopérative de réhabilitation : intermédiaire entre les habitants et la structure<br />

opérationnelle, chargée de préparée les dossiers de réhabilitation des logements.<br />

Institution par laquelle passeront tous les bénéficiaires des travaux de réhabilitation.<br />

La maison de l'artisan : centre de formation à la réhabilitation dont la finalité est de<br />

préparer une main d'oeuvre qualifiée pour répondre aux besoins d'interventions sur<br />

la quartier et constituer ainsi une boucle sociale générant de l'emploi pour les<br />

habitants.<br />

Principe de financement aidé de la réhabilitation<br />

Un système alternatif de financement de la réhabilitation a été imaginé. Il combine 3<br />

étapes indissociables :<br />

- une épargne préalable<br />

- un crédit émanant de la direction de l'habitat collectif<br />

- une subvention (aide à la pierre) accordée par l'UE<br />

L'épargne préalable<br />

Il s'agit d'articuler l'épargne populaire avec les systèmes institutionnels et extérieurs.<br />

L'existence de la coopérative en tant que sujet de crédits et garante des opérations<br />

est essentielle. L'épargne sera calculée en fonction de la capacité contributive des<br />

ménages (établissement d'un seuil préalable et montant variant selon l'étendue des<br />

travaux). Elle constituera un fonds de garantie sur le remboursement en cas de non<br />

paiement.<br />

Le crédit à la réhabilitation<br />

La condition préalable de ce crédit repose sur la bonne foi et la capacité d'épargne<br />

des bénéficiaires. Passée la période d'épargne, les bénéficiaires obtiennent par<br />

l'intermédiaire de la coopérative, un crédit en fonction de l'importance des travaux à<br />

réaliser et sous certaines conditions de ressources (après devis technique gratuit).<br />

Comptabilité, suivi et actions contre les mauvais payeurs seront gérés par la<br />

coopérative en étroite coordination avec un établissement bancaire. En cas de<br />

problème de recouvrement, la coopérative pourra puiser dans le fonds.<br />

La subvention<br />

Elle porte sur les éléments de confort prioritaires à la finalité sociale visant<br />

directement l'amélioration du niveau de vie des habitants : chauffage, changement<br />

des tuyau d'eau potable, rénovation du réseau électrique dans les immeubles et<br />

amélioration des sanitaires. Les faibles ressources des habitants ne leur permettant<br />

pas d'assumer ces dépenses dans leur intégralité, une subvention de l'UE est la<br />

seule solution rendant possible cette intervention. L'équilibre entre la subvention et le<br />

crédit dans l'aide apportée à la pierre devrait être fonction de la solvabilité de<br />

52


l'intéressé et de l'importance des travaux. La subvention maximale ne pourra excéder<br />

50% du coût total de la réhabilitation.<br />

Le programme dispose d'un fonds de 4 890 000 ECU permettant à priori la<br />

réhabilitation des 225 bâtiments prévus, sur la base moyenne par bâtiment de 21<br />

000 ECU. Une banque locale sera sélectionnée par l'administration financière des<br />

fonds, sans paiement de frais de gestion bancaires.<br />

Pérennité de l'intervention<br />

Les propositions doivent être pérennes et reproductibles au-delà du financement de<br />

la CE avec à terme, un fonctionnement autonome sans apports internationaux.<br />

La prise en charge des équipements de proximité sera difficile pour la municipalité.<br />

Le relais en personnel devra être assuré soit par les ministère concernés, soit par les<br />

ONG ou associations de bénévoles. Le problème se posera avec encore plus<br />

d'acuité pour la réhabilitation. Il reviendra aux autorités locales de reprendre à leur<br />

compte ce type d'opérations, et fort de son succès, d'insuffler une politique de<br />

logement social dans les centres anciens en trouvant les financements publics<br />

adéquats.<br />

BUDGET ET FINANCES<br />

Postes de dépenses Contribution UE Contribution turque Total<br />

en écu en % en écu en % en écu en<br />

%<br />

Outils de gestion 1 450 000 21 480 000 5 1 930 000 11<br />

Unité de gestion et Atelier de quartier 1 250 000 340 000 1 590 000<br />

Coopérative et maison de l'habitant 200 000 140 000 340 000<br />

Logement 3 170 000 45 1 720 000 17 4 890 000 28<br />

Réhabilitation légère 570 000 360 000<br />

Réhabilitation moyenne 800 000 500 000<br />

Réhabilitation lourde 1 400 000 860 000<br />

Fonds d'urgence sociale 400 000 -<br />

Infrastructures 300 000 4 3 250 000 32 3 550 000 21<br />

Canalisation - 400 000 400 000<br />

Réseau électrique - 2 100 000 2 100 00<br />

Gaz naturel (chauffage) 300 000 750 000 1 050 000<br />

Equipement de proximité 1 830 000 26 2 643 000 26 4 473 000 26<br />

Maison de l'artisan 450 000 200 000 650 000<br />

Maison des femmes 450 000 625 000 1 075 000<br />

2 centres d'études périscolaires 400 000 290 000 690 000<br />

Centre de réinsertion des drogués 200 000 280 000 480 000<br />

Institut technique du textile 330 000 770 000 1 100 000<br />

Dispensaire - 213 000 213 000<br />

Squares pour enfants - 200 000 200 000<br />

Terrains de sport en plein air - 65 000 65 000<br />

Traitement urbain 250 000 4 2 200 000 21 2 450 000 14<br />

Pavement des rues - 2 000 000 2 000 000<br />

Entretien des rues - 200 000 200 000<br />

Fonds d'appui à la gestion des déchets 100 000 - 100 000<br />

Fonds d'appui pour l'amélioration du 150 000 - 150 000<br />

souk de Balat<br />

TOTAL 7 000 000 100 10 293 000 100 17 293 000 100<br />

53


4 - Conclusion et enseignements généraux sur la réhabilitation des médinas<br />

Les expériences de réhabilitation des centres anciens sont nombreuses. Toutefois pour<br />

être réellement significatives de la problématique des médinas du Maroc et fournir des<br />

enseignements enrichissants elles doivent réunir un certain nombre de critères,<br />

notamment :<br />

- une communauté culturelle et sociale avec la structure de la société des médinas,<br />

- une relative analogie des sites quant à la condition et à la structure physique du bâti et<br />

de l'effort de réhabilitation nécessaire,<br />

- les conditions économiques des pays considérés doivent être suffisamment proches de<br />

celles du Maroc,<br />

- et, enfin, avoir l'opération doit avoir une durée suffisamment longue pour permettre de<br />

tirer des enseignements.<br />

Très peu d'expériences parmi celles décrites dans la littérature réunissent ces conditions. A<br />

ce titre il était tout à fait exclu de retenir les expériences de restructuration des villes<br />

anciennes européennes ou des villes asiatiques. Pour des raisons historiques évidentes les<br />

Amériques ne présentent pas de cas ayant, dans cette perspective, un intérêt marquant.<br />

Les seules expériences qui nous ont paru se rapprocher véritablement des préoccupations<br />

actuelles du Maroc sont celles de certaines villes arabes, notamment Tunis, Alger et Alep.<br />

Il est tout à fait intéressant de noter que, même si le nombre de cas présentés est modeste,<br />

les pratiques ont mis en relief un certain nombre de constantes :<br />

- au plan institutionnel il est clair que la participation communautaire est un élément<br />

fondamental du succès des programmes de réhabilitation. Cette participation peu<br />

revêtir deux aspects qui ne sont pas exclusifs : 1) une ONG professionnellement<br />

compétente à l'instar de l’Association Sauvegarde de la Médina de Tunis, apporte<br />

un soutien technique et un intérêt averti aux actions des pouvoirs publics et, 2) une ou<br />

des associations de quartier avec lesquels se discutent les objectifs, les programmes<br />

et les voies de leur mise en œuvre. Cette façon de faire a beaucoup contribué au<br />

succès du programme de réhabilitation de la médina de Tunis et a permis de reposer<br />

la problématique de la sauvegarde de la Casbah d'Alger sur des bases plus<br />

rationnelles que celles qui avaient sous-tendu les démarches précédentes. A contrario<br />

les déboires et les échecs des pouvoirs publics dans le cadre de la Casbah d'Alger ont<br />

été la traduction de la volonté des pouvoirs publics a faire pendant longtemps cavalier<br />

seul ce qui a non seulement entraîné la passivité de la population à l'égard d'un<br />

problème qui n'était plus le sien, mais a, de surcroît, crée une attente démesurée pour<br />

l'acquisition d'un logement de recasement à l'extérieur de la Casbah.<br />

- au plan du financement il ne semble pas possible, en raison des faibles revenus de la<br />

nouvelle population des médinas, de pratiquer une politique rigoureuse de<br />

recouvrement des coûts. La contribution des pouvoirs publics reste nécessaire mais<br />

elle doit revêtir des formes adaptées au contexte socio-économique des populations<br />

cibles (crédits bonifiés et, quand cela est possible péréquation entre les différents<br />

produits et catégories sociales). Les formules de financement doivent être<br />

suffisamment incitatives sans verser dans l'assistanat et supposer une contribution<br />

54


volontaire des bénéficiaires. L'apport des institutions étrangères peut avoir un effet de<br />

levier et contribuer notamment à la mise en place de fonds initiaux nécessaires aux<br />

montages financiers. Ces fonds peuvent également contribuer à résoudre la question<br />

de la prise en charge de la formation des responsables et techniciens locaux.<br />

- au plan juridique : comme signalé précédemment, l’obstacle à la réhabilitation, avant<br />

d’être d’ordre financier, est souvent d'ordre juridique du fait de la réglementation<br />

régissant le régime locatif et l’obligation de maintien sur les lieux (cas de la médina de<br />

Tunis et de la Casbah d'Alger). La complexité et le nombre des situations relatives à<br />

l'héritage supposent la recherche de solutions hardies pour la liquidation rapide de la<br />

propriété en indivision. Celle-ci se heurte souvent aux pratiques de droit coutumier et<br />

aux lourdeurs des pratiques administratives classiques. A ce jour peu de réponses<br />

appropriées semblent avoir été trouvées. Par ailleurs des solutions appropriées aux<br />

questions de permis de bâtir dans le contexte spécifique de la médina, doivent<br />

accompagner (voire précéder) le projet comme cela est le cas à Alep.<br />

- au plan technique, enfin, il est indispensable que les programmes soient engagés de<br />

façon réaliste en évitant d'ouvrir tous les chantiers à la fois. Il est clair que la priorité<br />

doit être donnée aux bâtisses très endommagées, mais il est important qu'un plan<br />

d'action (minutieusement discuté avec la population et approuvé par celle-ci) détermine<br />

les parties de la ville à réhabiliter. Cette étape est très sensible et renvoie à la question<br />

de la mise en confiance des populations ainsi que du rôle et de la crédibilité de leurs<br />

représentants. L'appuie sur des organismes internationaux compétents semble<br />

incontournable à ce stade de savoir-faire des opérateurs locaux.<br />

55


EXPÉRIENCE TUNISIENNE DE LUTTE<br />

CONTRE L’HABITAT INSALUBRE<br />

0. INTRO<strong>DU</strong>CTION<br />

L’objet du présent chapitre est de présenter l’expérience tunisienne en matière<br />

de lutte contre l’habitat insalubre .<br />

Deux types d’habitat pouvant être qualifiés d’insalubres, nous ont paru<br />

particulièrement pertinents et ont pu être examinés :<br />

- l’habitat dit “spontané” correspondant à de l’habitat anarchique ;<br />

- et l’habitat dit “ancien” et qui correspond aux tissus historiques .<br />

Il est évident que pour ces deux types d’habitat, les problématiques sont<br />

différentes, du fait notamment de certaines spécificités des tissus urbains à valeur<br />

patrimoniale, et impliquent donc des réponses différentes, tant au niveau de l’action<br />

curative qu’à celui des politiques .<br />

C’est pourquoi, nous présenterons successivement :<br />

- tout d’abord, et de façon succincte, ces différentes problématiques et les<br />

orientations des politiques correspondantes ,<br />

- ensuite, les instruments mis en place, tout en procédant à leur évaluation,<br />

- enfin, les instruments spécifiques à l’habitat ancien .<br />

1- QUANTIFICATION DE L'HABITAT VETUSTE ET INSALUBRE<br />

Les résultats d'une première enquête menée auprès des responsables régionaux de<br />

l'Equipement et de l'Habitat ont permis d'estimer le parc de logements nécessitant<br />

une intervention immédiate, à environ 72 000 unités. Ce parc regroupe 65% de<br />

logements très insalubres et 35% de logements très vétustes, parmi lesquels<br />

certains menacent ruine. Selon les régions du pays, l'habitat très dégradé reste<br />

important, dans le Centre du pays et, en particulier, dans la région du Centre Ouest.<br />

Le parc très dégradé, estimé 72 000 logements, représente 6% du parc total des<br />

logements urbains en 1994.<br />

Les résultats du recensement général de la population et de l’habitat de 1994<br />

permettent, quant à eux, une évaluation approximative du parc existant, considéré<br />

comme insalubre et/ou vétuste. A cet effet, les hypothèses et conclusions suivantes<br />

sont retenues :<br />

1. Les logements composés d’une seule pièce, sont a priori insalubres (83 142<br />

unités, soit 6,8% du parc en milieu communal).<br />

2. Quand on compare le nombre de logements selon la taille avec le nombre de<br />

ménages selon le nombre de pièces occupées, l’on se rend compte que :<br />

56


- pour les logements de petite taille (1 ou 2 pièces), le nombre de ménages<br />

dépasse largement le nombre de logements,<br />

- alors que pour les logements de plus grande taille (3 pièces et plus), c’est<br />

l’inverse qui se produit.<br />

Ceci signifie principalement deux choses :<br />

• que la cohabitation des ménages s’effectue principalement dans les petits<br />

logements et elle en est d’autant plus pénible et génératrice d’insalubrité;<br />

• que les logements vacants sont le plus souvent de grande taille.<br />

Ce constat devient encore plus pertinent quand on le corrobore avec le croisement<br />

de la typologie des logements avec leur taille. Car, 44,1% des logements de la<br />

typologie «maison arabe, borj et houchs» ont 1 à 2 pièces, de même que 93,3% de<br />

la typologie «rudimentaire», 15,7% de la typologie «villas et étage de villas» et 25,8%<br />

de la typologie des appartements. Les logements de petite taille se retrouvent donc<br />

principalement dans les typologies, a priori propices à l’insalubrité.<br />

3. Les logements âgés de plus de 56 ans (seuil retenu par le RGPH) sont a priori<br />

touchés par la vétusté (119 643 unités, soit 9,9% du parc en milieu communal).<br />

4. Les logements dont la couverture n’est constituée ni d’une dalle, ni d’une voûte en<br />

brique et dont les murs ne sont pas construits en pierres ou en briques sont a<br />

priori vétustes et insalubres (188 830 unités, soit 15,5% du parc en milieu<br />

communal).<br />

5. Les logements dont les murs ne sont pas construits en pierre ou en briques sont<br />

considérés a priori comme insalubres et représentent 13,7% du parc communal<br />

soit 166 937 unités.<br />

6. Les logements non branchés au réseau d’eau potable sont a priori insalubres<br />

(14,09% du parc en milieu communal, soit 170 882 unités).<br />

7. Le RGPH introduit, sans le définir avec précision, le concept de logements viables,<br />

évalués à 96,9% du parc en milieu communal. Le reste soit 3,05% peut être<br />

considéré comme irrémédiablement insalubres (37 000 unités).<br />

8. Tous les logements non raccordés au réseau d’assainissement ne peuvent pas<br />

être considérés comme totalement insalubres, bien que représentant 43,05% des<br />

logements en milieu communal. Seuls seront comptabilisés comme insalubres<br />

ceux qui évacuent par rigoles et les non-déclarés qui représentent 168 429<br />

unités, soit 13,9% du total en milieu communal.<br />

9. Bon nombre de ménages occupent des logements sans salle de bains, ni salle<br />

d’eau (62% du total), mais seuls 5,8% des ménages vivent dans des logements<br />

sans W-C et 49,5% des ménages disposent de toilettes sans chasse d’eau.<br />

10 . En milieu communal, 10,7% des ménages n’ont pas de cuisine et 28,2% d’entre<br />

eux disposent d’une cuisine sans évier.<br />

11. 5,5% des logements sont occupés par plus d'un ménage en milieu communal. Ce<br />

phénomène touche particulièrement la typologie "maison arabe, borj, houch" où<br />

8% des logements sont touchés par la cohabitation des ménages.<br />

12. En milieu communal, il existe à travers le pays 108 615 logements en oukala, 5<br />

977 gourbis, 3 116 baraques, 1 025 tentes, 249 grottes et 7 114 logements non<br />

destinés à l'habitat. Cela représente un total de 126 096 logements<br />

structurellement insalubres, correspondant à 10,4% du parc total en milieu<br />

communal.<br />

13. Les résultats de l'enquête nationale, menée à l'occasion de cette étude, montrent<br />

qu'il existe une simultanéité des facteurs de vétusté et d'insalubrité. Il y a en effet<br />

57


de fortes chances pour ce soit les mêmes logements insalubres qui présentent à<br />

la fois :<br />

- une taille réduite,<br />

- un sous-équipement en réseaux,<br />

- un sous-équipement en locaux techniques (salles d’eau, cuisines à usage<br />

exclusif, W-C).<br />

D’un autre côté, il y a probablement un chevauchement entre les logements ayant :<br />

- des matériaux précaires (toits et murs),<br />

- un âge avancé,<br />

- une cohabitation importante des ménages.<br />

L'on doit se contenter de formuler à ce sujet des hypothèses plausibles car le<br />

recensement ne fournit pas ce type de croisement de données. Aussi, est-il réaliste<br />

d'assimiler le parc des logements insalubres à la somme de :<br />

logements en oukala + gourbi + kib + baraque + tente + grotte + local non destiné à<br />

l'habitation = 126 096 unités, soit 10,4% du parc en milieu communal. Il est<br />

manifeste que ces types ne regroupent pas les logements en quartiers spontanés qui<br />

font l'objet d'une comptabilité à part. Par ailleurs, les logements vétustes peuvent être<br />

assimilés, sans grand risque de biais, à ceux construits avant 1940, soit 119 643<br />

unités en milieu communal, correspondant à 9,8% du parc.<br />

Il est certain en outre que les deux segments (les insalubres et les vétustes) ont un<br />

large tronçon commun représenté par une partie des logements en oukala.<br />

D'un autre côté, les résultats de l'enquête menée auprès des DREH en 1994, font<br />

état à cette date d'un volume de l'ordre de 72 000 logements très dégradés. Les<br />

critères définis ainsi que le mode de passation de l'enquête permettent de conclure<br />

que ce volume concerne les cas les plus critiques. Parmi eux, on compte 5000<br />

logements en milieu médinal, 1 400 logements en tissu européen et le reste en tissu<br />

anarchique ou isolés au milieu de tissus mal définis.<br />

Une enquête menée par les services de l’ARRU auprès des Municipalités en 1995 a<br />

permis de recenser les quartiers résidentiels populaires peu ou pas équipés en<br />

réseaux d’infrastructures. 863 quartiers ont été ainsi dénombrés, abritant quelques<br />

264 000 logements et environ 1 372 000 habitants. Ce chiffre correspond à près de<br />

21,7% du parc logements en milieu communal. La taille moyenne du quartier est de<br />

306 logements. Compte tenu du taux d’accroissement moyen du parc logement<br />

(5,3% par an) et de ce que 25 à 30% des nouvelles réalisations correspondent à des<br />

quartiers spontanés, cela signifie que :<br />

- d’ici l’an 2000, le parc urbain croîtra au rythme moyen de 73 000 logements<br />

par an,<br />

- les quartiers spontanés connaîtront une croissance de 15 000 logements par<br />

an,<br />

- annuellement, 60 à 70 quartiers spontanés nouveaux apparaîtront,<br />

- compte tenu du rythme de réhabilitation proposé par les services de l’ARRU<br />

(58 quartiers par an), pour deux quartiers réhabilités, il y en aura 3 nouveaux<br />

qui se créeront,<br />

58


- à l’horizon 2000, avec près de 314 quartiers qui seront réhabilités au titre du<br />

2ème PNRQP, il restera : 863 - 314 = 549 quartiers identifiés en 1995 et non<br />

traités + 420 nouveaux quartiers apparus dans l’intervalle, soit près de 1000<br />

quartiers et 300 000 logements.<br />

59


2. PROBLÉMATIQUES DE L’HABITAT INSALUBRE :<br />

2.1 Caractéristiques de l’habitat spontané<br />

Le terme “habitat spontané” désigne la forme de développement de l'habitat<br />

qu'ont connu, certains quartiers qui se sont développés au cours des dernières<br />

décennies dans les zones périphériques des agglomérations urbaines .<br />

Parmi les traits marquants de l'habitat spontané, vient le fait qu’il se manifeste<br />

par l’existence d'un marché foncier parallèle au marché formel, contribuant à<br />

générer les lotissements clandestins, forme de production de l’habitat qui semble<br />

répondre aux besoins fonciers de populations à faible revenu, et qui met en évidence<br />

l’incapacité du système de production du logement à répondre aux besoins de<br />

ces dites populations à faible revenu, et plus particulièrement :<br />

- l'inadéquation entre l'offre et la demande de logements autour des principales<br />

agglomérations ,<br />

- l'inadéquation du marché foncier, c’est-à-dire entre l'offre et la demande de<br />

terrains à bâtir et surtout l'insuffisance des lots de petite taille;<br />

- l'absence de financements adaptés à l'autoconstruction .<br />

2.2 Politique en matière de lutte contre l’habitat spontané<br />

La lutte contre l’habitat spontané est appréhendée et menée par les autorités<br />

par des actions complémentaires à trois niveaux distincts :<br />

• l’action au niveau local, menée essentiellement par les collectivités locales<br />

par le biais du contrôle de la construction. Il s’agit là bien évidemment d’une action à<br />

court terme qui ne résout pas le problème, et qui de ce fait, quoique nécessaire,<br />

demeure relativement inefficace et incapable de résorber le phénomène ni de faire<br />

face à la pression de développement de l’habitat<br />

• l’action au niveau national, constituée principalement par la mise en oeuvre<br />

de la stratégie d’aménagement du territoire national, visant à optimiser et à<br />

rationaliser la répartition spatiale des investissements (en particulier d'équipement)<br />

qui conditionnent l'équilibre régional et sont, pour une part importante, à la base de la<br />

génération des migrations massives constatées, et donc à l'origine des problèmes<br />

posés par la construction anarchique. Cette action a, bien évidemment, une portée<br />

globale, et ne peut commencer à donner des résultats tangibles qu’à long terme<br />

• l’action au niveau des principales agglomérations, qui vise à assurer un<br />

développement équilibré de ces agglomérations, et à canaliser la pression de<br />

l’urbanisation.<br />

Cette dernière action, extrêmement importante, constitue la partie la plus<br />

pesante du discours et des préoccupations des autorités politiques et s’exprime sous<br />

trois principales formes :<br />

* la planification urbaine visant à mieux organiser le développement de ces<br />

agglomérations notamment par l’élaboration, la révision et la mise en oeuvre des<br />

schémas directeurs d’aménagement et d’urbanisme correspondants ;<br />

60


* la gestion foncière centrée sur un double souci :<br />

- d’une part, prévoir et maîtriser les espaces nécessaires à l’expansion<br />

des agglomérations ;<br />

- et d’autre part, assurer une régulation efficace du marché foncier et<br />

d’adapter l’offre de terrains à bâtir à la demande, et en particulier de prévoir une offre<br />

répondant aux besoins des populations à faible revenu ;<br />

* la production de l’habitat, tant par les structures publiques que privées, qui a<br />

été fermement orientée vers le logement social :<br />

- par l'incitation du secteur privé, à la production du logement social;<br />

- par la modulation dans ce sens de la production publique par<br />

l'intermédiaire des opérateurs publics, notamment l'Agence foncière d’habitation<br />

(AFH) et la Société nationale immobilière (SNIT) ;<br />

- et par la restructuration du système de financement de façon à<br />

satisfaire la demande de financement des différentes opérations relatives à<br />

l'obtention d'un logement (allant de la construction, à l'acquisition d’un terrain ou d’un<br />

logement existant) .<br />

2.3 Problématique de l’habitat ancien<br />

L’habitat ancien connaît un peu partout dans le monde certains symptômes<br />

communs :<br />

• Inadaptation aux besoins et aspirations de modernité des habitants (tant pour<br />

ce qui est du confort interne des logements que ce qui est des commodités offertes<br />

par le tissu urbain) ;<br />

• Redistribution des populations originelles vers de nouvelles zones urbaines et<br />

installation de populations à revenus généralement moindres ;<br />

• Dégradation du bâti avec croissance des charges d’entretien engendrant :<br />

- la paupérisation corrélative du tissu urbain, les problèmes de copropriété<br />

aidant ;<br />

- et la transformation de la vocation des constructions, avec substitution des<br />

bureaux aux logements, surtout lorsque les charges d’entretien ne sont plus à la<br />

portée des ménages ;<br />

• Agressions consécutives, au patrimoine culturel, pour le cas des tissus ayant<br />

une valeur historique .<br />

Les autorités politiques ont toujours posé ces différentes questions et essayé<br />

d’y répondre par de nombreuses mesures plus ou moins heureuses quant à leur<br />

résultat réel, et ce, surtout compte tenu du contexte économique et social, tel que :<br />

• Institution du Fonds national d’amélioration de l’habitat (FNAH) pour soutenir<br />

financièrement la réhabilitation et les opérations collectives d’équipement des<br />

logements,<br />

• Mesures de réglementation des loyers à des fins sociales, afin notamment de<br />

protéger les populations à faible revenu, contre les augmentations effrénées des<br />

61


loyers, avec ce que cela comporte comme effet pervers, les anciens loyers ne<br />

permettant plus de couvrir les charges d’entretien en croissance exponentielle ;<br />

• Mesures en faveur du logement locatif, pas toujours bien accueillies par les<br />

citoyens, dont les préférences vont plutôt vers l’accession à la propriété ;<br />

• Extension du système de financement de façon à répondre à la demande de<br />

financement des différentes opérations relatives à l'obtention d'un logement (y<br />

compris l’achat et la réfection d'un logement ancien) ;<br />

• Institution des structures para-communautaires telles que les associations de<br />

sauvegarde des médinas (dont l’une des plus actives est l’Association de<br />

sauvegarde de la médina de Tunis) qui ont comme but de sensibiliser les occupants<br />

des médinas quant à leur valeur patrimoniale, et les assister dans l’action de<br />

maintenance de leurs logements :<br />

- tant sur le plan technique (par le recours des techniques traditionnelles de<br />

construction appropriées),<br />

- que sur celui des formalités administratives (notamment pour constituer des<br />

dossiers leur permettant d’accéder aux aides accordées par le FNAH) .<br />

Aujourd’hui, ces questions sont reposées avec une vision caractérisée par<br />

l’affirmation de deux dimensions nouvelles :<br />

* une première dimension culturelle, axée sur le souci de préserver et de<br />

protéger le patrimoine historique et culturel, sur les différents plans :<br />

- de la protection juridique ;<br />

- de la sensibilisation à la fois des occupants, des responsables du patrimoine<br />

et des aménageurs et urbanistes .<br />

* et une deuxième dimension, axée sur le souci placer la gestion du patrimoine<br />

dans une approche intégrée de développement, essayant de réaliser les conditions<br />

d’un développement durable .<br />

C’est cette vision qui a été à la base de la promulgation (en Février 1994), du<br />

nouveau code du patrimoine et qui a permis :<br />

* de repenser les instruments d’intervention dans les tissus anciens ;<br />

* et de jeter de nouvelles bases pour revitaliser et restructurer le recours aux<br />

ressources du FNAH .<br />

3. <strong>LES</strong> PRINCIP<strong>AU</strong>X INSTRUMENTS DE MAÎTRISE FONCIÈRE<br />

Comme on l’a défini avant, la maîtrise foncière inclut deux notions :<br />

* la première liée à la réalisation des ouvrages et des équipements d'intérêt<br />

général, ainsi que des programmes d’aménagement ,<br />

* et la deuxième à la prévision des espaces nécessaires au développement<br />

rationnel des villes .<br />

Bien entendu, l’instrument traditionnel de maîtrise foncière est l’expropriation<br />

pour cause d'utilité publique qui permet l’appropriation des terrains nécessaires à<br />

la réalisation des ouvrages et des équipements d'intérêt général, avec<br />

62


Le contexte social a engendré une difficulté croissante de recourir à<br />

l’expropriation et a amené à concevoir d’autres instruments, tels que les périmètres<br />

de préemption, puis les périmètres d’intervention foncière et les périmètres de<br />

réserves foncières .<br />

3.1 Les périmètres de préemption<br />

Pendant près d'une vingtaine d'années après l'indépendance, et en dépit des<br />

opérations d'envergure qui ont été réalisées dans le but de combler le déficit en<br />

logements viables, la disponibilité de terrains n'a guère constitué un obstacle eu<br />

égard l’abondance des terres domaniales provenant essentiellement de la<br />

nationalisation des terres agricoles détenues par les colons d'une part, et à<br />

l'instauration d'un système de contrôle de toutes les transactions immobilières dès<br />

1957 d'autre part .<br />

Mais avec l'accélération qu'a connu le rythme de l'urbanisation d'une part, et la<br />

raréfaction des réserves foncières étatiques d'autre part, le besoin de maîtriser le<br />

foncier s'est fait sentir dès le début des années soixante-dix. A cette époque, et afin<br />

de relancer l'effort de l'Etat en matière de production de terrains aménagés, trois<br />

agences foncières (touristique, industrielle et d'habitation) ont été créées en Avril<br />

1973 relative à l'aménagement des zones touristiques, industrielles et d'habitation.<br />

La loi de création de ces agences a prévu l’instauration de périmètres de<br />

préemption délimités par décret à leur profit, et valables pendant une durée de<br />

quatre ans (prorogeable une fois pour une période de deux ans) .<br />

En plus du droit de préemption que cela implique à leur profit, et en vue de permettre<br />

à ces agences une maîtrise foncière totale à l'intérieur de ces périmètres, la<br />

législation permet le recours à l'expropriation dans les mêmes conditions que le<br />

recours à l'expropriation pour cause d'utilité publique .<br />

Bien que l’instauration des périmètres de préemption a permis aux agences<br />

foncières d’engager la réalisation de nombreuses opérations d’aménagement, et<br />

qu’on ne lui attribue pas d’insuffisance notoire, la promulgation en 1979 du nouveau<br />

code de l’urbanisme a constitué une opportunité pour parfaire et rationaliser le<br />

système d’intervention .<br />

3.2 Pratique des périmètres d'intervention foncière (P.I.F.)<br />

Répondant au besoin de dynamiser davantage les opérations d’aménagement<br />

urbain, le code de l'urbanisme promulgué en Août 1979 a institué les périmètres<br />

d'intervention foncière (PIF), correspondant à peu de chose près aux périmètres<br />

de Z.A.C. en usage en France .<br />

Les PIF sont définis comme étant “des périmètres à l'intérieur desquels l'Etat,<br />

les collectivités publiques régionales et locales, les agences foncières sont appelés à<br />

intervenir pour réaliser un programme d'aménagement et d'équipement ou de<br />

rénovation ou de réhabilitation” .<br />

63


La délimitation d’un PIF est ainsi liée à la réalisation d’un programme<br />

d’aménagement. Il se fait par décret qui précise le ou les opérateurs appelés à<br />

réaliser le dit programme (Etat, collectivités publiques locales, et agences foncières).<br />

En outre, et dans un souci de faciliter la tâche à ces opérateurs, le code prévoit deux<br />

dispositions importantes :<br />

- Tout d’abord, l’établissement d’un PIF implique un droit de préemption au<br />

profit de ces opérateurs, ainsi que la possibilité de recourir à l'expropriation, et ce en<br />

vue de permettre une maîtrise foncière efficace à l’intérieur du dit périmètre .<br />

- Ensuite, le code définit un instrument d’aménagement (correspondant à peu<br />

près au PAZ français), le plan d’aménagement de détail (PAD), qui “fixe la nature<br />

et la destination des constructions et autres modes d’occupation du sol, les voies et<br />

les réseaux divers, ainsi que les servitudes d’aspect, ainsi que le programme<br />

d’ensemble des constructions et des installations ou équipements” .<br />

Le recours aux PIF, lié à la réalisation des opérations d’aménagement,<br />

s’effectue schématiquement selon les étapes successives suivantes :<br />

- Établissement du PIF avec désignation de l’opérateur appelé à réaliser le<br />

programme d’aménagement<br />

- Passation d’une convention entre l’opérateur et l’autorité concernée (souvent<br />

l’État ou une commune).<br />

- Élaboration des études préparatoires et du PAD ainsi que du montage<br />

institutionnel et financier de l’opération<br />

- Appropriation des sols par voie d’acquisition directe, par l’exercice du droit de<br />

préemption ou par voie d’expriation, l’État (ou la commune intéressée) pouvant sur<br />

sa demande, exproprier pour son compte tous autres terrains situés dans la zone<br />

- Réalisation des aménagements (études d’exécution et travaux)<br />

- Cession des terrains aménagés aux différents bénéficiaires, promoteurs et<br />

constructeurs .<br />

L’instauration des PIF a permis aux agences foncières de réaliser plusieurs<br />

opérations et de fournir pendant plus de vint années, l'essentiel des terrains<br />

aménagés pour les trois secteurs (tourisme, industrie et habitat) .<br />

L'A.F.H, à titre d'exemple, a bénéficié durant la décennie 1989-1998 de 25 PIF<br />

couvrant près de 4000 ha dont environ 3000 ha de terrains nus, lui permettant d’en<br />

aménager 1900 ha durant la même période .<br />

On constate actuellement (et plus précisement pendant les 4 ou 5 dernières<br />

années) que le rythme d'acquisition, et par voie de conséquence, celui<br />

d'aménagement, commencent à connaître un certain fléchissement s’expliquant par<br />

l’opposition grandissante des propriétaires terriens, amenant à repenser les<br />

mécanismes d’aménagement, dans le cadre de la refonte de la législation en mtière<br />

d’urbanisme (en 1994) à évoluer dans le sens d’associer davantage les propriétaires<br />

à la réalisation des opérations d’aménagement .<br />

3.3 Les périmètres de réserves foncières ( PRF ) :<br />

Les périmètres des réserves foncières sont délimités par décret sur<br />

proposition du Ministre chargé de l'urbanisme, et ce, au profit de l'Etat, des<br />

64


collectivités publiques locales, des agences foncières touristique, industrielle, ou<br />

d'habitation ou l'Agence de réhabilitation ou de rénovation urbaine .<br />

Le but essentiel recherché par l'institution d’un tel outil est de permettre aux<br />

collectivités locales et aux agences foncières de constituer en vue d'une urbanisation<br />

future des réservés foncières en dehors des zones vouées à l’urbanisation par les<br />

plans d'aménagement urbain (équivalent des POS), et ce, par l’exercice d'un droit de<br />

préemption pendant une durée de 4 ans (prorogeable de 4 autres années) .<br />

La délimitation des PRF doit ainsi théoriquement constituer un outil précieux<br />

au service du développement des principales agglomérations urbaines et anticiper<br />

leurs besoins d’expansion .<br />

Dans la pratique, ces PRF n’ont pas du tout fonctionné. On pourrait expliquer<br />

ceci par trois raisons principales :<br />

- La première est d’ordre juridique, compte tenu de la durée d’exercice du droit<br />

de préemption (4 ans prorogeables de 4 ans supplémentaires), ce qui en fait un<br />

instrument proche des PIF (avec un droit de préemption valide pendant 4 ans<br />

prorogeables de 2 ans supplémentaires), alors que pour les zones d’aménagement<br />

différé français (ZAD), le droit de préemption peut être exercé pendant 14 ans<br />

(prorogeables de 2 ans supplémentaires) ;<br />

- La deuxième raison, est d’ordre institutionnel, paraissant à priori inefficace<br />

d’impliquer des opérateurs sectoriels d’aménagement, et en l’absence d’une autorité<br />

unique responsable de la planification du développement urbain<br />

- La troisième enfin est d’ordre pratique et serait due au fait que la définition des<br />

PRF est intimement liée de par son objet aux orientations des schémas directeurs<br />

d'aménagement, dont l’usage ne connait pas des traditions suffisantes .<br />

4. <strong>LES</strong> OPÉRATEURS D’AMÉNAGEMENT<br />

Comme nous l’avons vu ci-avant, on ne peut parler d’instrument de maîtrise<br />

foncière sans parler des opérateurs d’aménagement qui sont les éléments actifs de<br />

la lutte directe ou indirecte contre l’habitat insalubre, et jouent un rôle déterminant<br />

pour la réussite de la réalisation des opérations d’aménagement .<br />

Nous examinerons successivement, dans le présent paragraphe, les<br />

principales expériences connues d’opérateurs d’aménagement, en particulier :<br />

- les lotisseurs publics (soit les agences foncières AFH, AFI et AFT) ;<br />

- l’agence de réhabilitation et de rénovation urbaine (ARRU) ;<br />

- les opérateurs d’aménagement d’économie mixte ;<br />

- et le mécanisme spécial du recours aux associations syndicales de<br />

propriétaires .<br />

4.1 Les lotisseurs publics<br />

La création en avril 1973 des trois agences foncières industrielle (AFI),<br />

touristique (AFT), et d’habitation (AFH), chargées de l’aménagement des zones<br />

respectivement industrielles, touristiques et d’habitation, est venue, au début des<br />

années 1970, traduire la volonté de l’Etat de mettre en place l’infrastructure de base<br />

65


nécessaire au développement économique du pays, et de lutter contre la rétention et<br />

la spéculation foncières .<br />

Ces agences foncières avaient pour mission essentielle d’acquérir, aménager<br />

et céder les terrains dans les zones destinées à la construction à usage<br />

respectivement industriel, touristique, ou d’habitation.<br />

Comme on l’a déja vu, et pour permettre à ces agences de jouer pleinement<br />

leur rôle, le législateur les a dotées de prérogatives et d’instruments juridiques<br />

importants, notamment le droit de préemption, et la possibilité de recourir à<br />

l’expropriation pour cause d’utilité publique des terrains situés dans leurs zones<br />

d’intervention (initialement les périmètres de préemption, et plus tard les périmètres<br />

d’intervention foncière) .<br />

Sur le plan de leur fonctionnement, ces trois agences étaient des<br />

établissements à caractère industriel et commercial, qui ont pu intervenir de façon<br />

très efficace, réalisant depuis leur création, l’aménagement d’importants quartiers<br />

avec une excellente qualité. C’est ainsi que l’AFH, par exemple, a pu aménager<br />

environ 5.000 hectares pour 120.000 logements .<br />

Malgré cette contribution remarquable au développement de l’infrastructure du<br />

pays, l’expérience des agences a montré quelques côtés négatifs :<br />

• Tout d’abord, ces agences avaient une vocation nationale, et se plaçaient à<br />

contre-courant par rapport à la volonté de décentralisation de plus en plus affirmée<br />

par le gouvernement<br />

• Ensuite, ces agences ont, dès le début, pris une vocation sectorielle, et ont<br />

même été placées sous la tutelle des trois ministères (respectivement de l’industrie,<br />

du tourisme, et de l’habitat), chose ayant engendré certaines insuffisances au niveau<br />

de la coordination de leurs interventions qui ne s’inscrivaient pas dans des<br />

stratégies communes de développement des agglomérations urbaines<br />

La conclusion qu’on pourrait en tirer est que la formule de la création<br />

d’opérateurs d’aménagement à vocation sectorielle a montré ses limites, et qu’il<br />

pourrait paraître plus efficace de constituer plutôt des opérateurs d’aménagement<br />

urbain régionaux et polyvalents .<br />

Abordant la question de l’efficacité d’intervention, nous nous limiterons à<br />

appréhender celle de l’agence foncière d’habitation (AFH) qui constitue un acteur<br />

important dans la mise en oeuvre de la stratégie de l’habitat. Le constat suivant a pu<br />

être fait dans le cadre de l’élaboration de la nouvelle stratégie de l’habitat :<br />

• Tout d’abord, il a été constaté que l’agence avait des ressources financières<br />

propres limitées, chose qui ne leur permet pas de constituer des réserves foncières<br />

consistantes, compromettant ainsi leur efficacité dans la régulation du marché foncier<br />

;<br />

• Quant à la production, elle s’adressait plutôt aux besoins des couches<br />

moyennes solvables (compte tenu de la taille des lots mis en vente, et des conditions<br />

de paiement pratiquées).<br />

Ainsi, de 1975 à 1980, 61,5 % des ventes de l’AFH ont bénéficié aux cadres<br />

supérieurs, aux membres des professions libérales et aux commerçants.<br />

66


Les prix de vente du mètre carré viabilisé ont varié de 5 dinars en 1978 à 15<br />

dinars au début des années 80 pour atteindre 30 dinars en 1987, puis 60 dinars en<br />

1998.<br />

Elle se trouvait de ce fait, totalement inadaptée aux conditions des populations<br />

à faibles revenus ;<br />

• De plus, cette production se fesait dans des conditions de plus en plus<br />

difficiles, engendrant quelques contre-performances dont un cycle de production de<br />

plus de 7 ans, des difficultés inhérentes de trésorerie, et un défaut d’études de<br />

marché corrélatif à un mauvais ciblage de la production aux besoins de la demande;<br />

• Ceci pourrait s’expliquer en partie par les difficultés grandissantes<br />

d’appropriation des terrains, ayant été constaté que les interventions de l’AFH<br />

engendraient une rétention de plus en plus accentuée des terrains malgré des prix<br />

d’acquisition proposés jugés relativement acceptables (allant de 4,700 D/m2 en 1989<br />

à 20 D/m2 en 1998), à un moment où que le gouvernement venait de décider de<br />

limiter le recours à l'expropriation désormais considérée comme une mesure<br />

exceptionnelle .<br />

C’est pour répondre à toutes ces interrogations que la nouvelle stratégie de<br />

l’habitat mise en place au début des années 90, a redéfini, dans le cadre d’un<br />

nouveau contrat-programme, le rôle et les objectifs à atteindre par l’AFH :<br />

- Adapter la production en faveur des couches sociales défavorisées (vente de<br />

petites parcelles aménagées dites “trames assainies”), chose qui n’est pas sans<br />

inconvénient sur le plan de l’équilibre financier ;<br />

- Limiter son rôle à celui de lotisseur “grossiste” et se faire relayer par les<br />

promoteurs immobiliers dans la production de terrains à bâtir ;<br />

- Améliorer ses performances, notamment en se réorganisant par projets ;<br />

- Recourir systématiquent aux études de marché en vue de cibler sa stratégie<br />

de production aux besoins réels .<br />

4.2 Action de l’Agence de Réhabilitation et de rénovation urbaine<br />

L’Agence de réhabilitation et de rénovation urbaine (ARRU) est un<br />

établissement public à caractère industriel et commercial placé sous la tutelle du<br />

Ministère de l’équipement et de l’habitat, créé en août 1981, pour “procéder aux<br />

opérations de réhabilitation et de rénovation urbaine”.<br />

La création de l’ARRU vient comme suite logique à une série d’opérations<br />

d’amélioration de l’habitat qui a commencé en 1978 par la mise en œuvre de la<br />

réhabilitation des quartiers de “Mellassine”, de “Saïda Manoubia” et de “Jebel<br />

Lahmar” à Tunis pour un coût global de près de 30 millions de dinars, avec le<br />

concours de l’USAID et de la Banque mondiale, ainsi que la réhabilitation du quartier<br />

des “Rbat” à Sfax .<br />

Les municipalités de Tunis et de Sfax avaient assuré directement la maîtrise<br />

d’ouvrage de ces opérations avec tout ce que cela comporte comme difficultés liées<br />

aux conditions de gestion dans l’administration publique .<br />

67


La création de l’ARRU visait alors la mise en place d’une structure capable de<br />

d’intervenir à l’échelle nationale, et assister les communes à résoudre leurs<br />

problèmes d’habitat spontané .<br />

Depuis sa création, l’ARRU a pris en charge la réalisation de nombreux<br />

projets d’amélioration de l’habitat dans quelques deux cent quartiers (200) répartis à<br />

travers l’ensemble du pays, et ce dans le cadre de conventions de Maîtrise<br />

d’ouvrage déléguée passées avec les municipalités concernées. Le coût global<br />

d’intervention est estimé à près de 200 millions de dinars.<br />

Aujourd’hui l’ARRU a des budgets annuels de fonctionnement de près de<br />

1500 milliers de dinars, et d’investissement de près de 25 millions de dinars .<br />

Malgré des réalisations concrètes importantes, et une meilleure dynamique<br />

dans la gestion des opérations pour le compte des communes, l’expérience de<br />

l’ARRU a montré quelques points négatifs :<br />

• Au niveau du montage institutionnel de certains projets, le mécanisme mis<br />

en place pour le déblocage des fonds s’était avéré extrêmement lourd et complexe,<br />

parce que mettant en jeu à la fois l’ARRU, les communes intéressées, la Caisse des<br />

prêts et de soutien aux collectivités publiques locales (CPSCL) et le contrôle des<br />

dépenses des dépenses publiques, et il pouvait se passer parfois un délai important<br />

avant de voir le règlement d’une facture présentée par un entrepreneur .<br />

• Au niveau du montage financier, l’ARRU était appelée dans certains projets<br />

à recouvrer auprès des bénéficiaires la part du coût des parcelles aménagées<br />

correspondant au terrain nu, laissant les communes prendre à leur charge le<br />

recouvrement de la part correspondant aux infrastructures tertiaires, en mettant en<br />

œuvre le mécanisme de la participation des riverains aux frais de viabilité, réputé<br />

être lourd et inefficace.<br />

Bien entendu, une telle mesure est importante pour l’ARRU qui devrait<br />

intervenir uniquement pendant la durée de vie des projets en vue de garder son<br />

efficacité dans son rôle d’opérateur intermédiaire. Elle comporte néanmoins<br />

l’inconvénient d'endetter les communes à long terme, et par voie de conséquence<br />

d’affecter leur trésorerie .<br />

4.3 Expérience des opérateurs d’aménagement d’économie mixte<br />

Trois principales expériences d’opérateurs d’aménagement d’économie mixte<br />

peuvent être citées :<br />

a. Expérience de la Société d’économie mixte d’aménagement de Tunis<br />

La Société d’économie mixte d’aménagement de Tunis (SEMAT), société<br />

anonyme au capital de 100 000 Dinars, a été constituée en 1975 à l’initiative du<br />

Ministère de l’Équipement et de la Commune de Tunis, en vue de réaliser les<br />

opérations de rénovation dans le centre de la capitale .<br />

L’idée était alors de créer une société d'économie mixte (à l’instar des SEM<br />

françaises), qui constituerait un moyen de réalisation propre à la Municipalité de<br />

Tunis, et qui allierait la puissance d'intervention de l’administration publique et la<br />

souplesse de gestion des opérateurs privés .<br />

68


Pour cela, la mission confiée à la SEMAT, était assez large et couvrait :<br />

• l’acquisition des terrains et immeubles situés dans les zones urbaines dont<br />

l’aménagement lui est confié<br />

• l’exécution des divers travaux de viabilité nécessaires<br />

• le contrôle de la réalisation du programme de construction immobilière<br />

compris dans ces zones<br />

• la gestion, à titre provisoire, et l’exploitation de certains ouvrages à caractère<br />

collectif jusqu’à leur prise en charge par la Commune .<br />

La première opération dont la SEMAT a été chargée par la Municipalité de<br />

Tunis concerne la rénovation du quartier “Mohamed V”, objet d’une convention de<br />

concession approuvée en décembre 1976 .<br />

Toutefois, l’action de la SEMAT n’avait pu être efficace, principalement à<br />

cause de l'absence de moyens juridiques appropriés de maîtrise foncière (droit de<br />

préemption), lui permettant l'assainissement foncier de la zone .<br />

C’est d’ailleurs cette même raison qui avait poussé les autorités à essayer<br />

dans un premier temps de transformer les statuts de la SEMAT à l'instar de ceux des<br />

agences foncières, avant d’aboutir dans un deuxième temps à la création de l'ARRU,<br />

qui était appelée à la remplacer .<br />

b. Expérience de la Société d’aménagement de Sfax El Jadida<br />

La Société d’aménagement de Sfax El Jadida a été constituée en novembre<br />

1983 à l’initiative de la Municipalité de Sfax, avec un capital de 5 millions de Dinars<br />

avec pour actionnaires la Municipalité de Sfax, l’Agence foncière d’habitation (AFH)<br />

et diverses banques de développement .<br />

Elle avait pour mission de réaliser le programme d’aménagement et<br />

d’équipement de la zone des “Martyrs”, zone d’une superficie de 66 ha, qui fit plus<br />

tard l’objet d’un périmètre d’intervention foncière (PIF) et d’un Plan d’aménagement<br />

de détail (PAD) .<br />

La Société n’a pas connu de difficultés sur les plans foncier et financier. Deux<br />

facteurs principaux semblent y avoir contribué :<br />

- Tout d’abord, la Municipalité de Sfax, ayant tiré profit de l’expérience de la<br />

SEMAT, a pris en charge directement l’expropriation de la totalité des terrains privés<br />

situés dans la zone du projet ;<br />

- Ensuite, elle avait fait participer plusieurs banques de développement au<br />

capital social avec l’intention de les impliquer, dès le départ, dans la réalisation des<br />

programmes immobiliers prévus .<br />

Toutefois, le rythme insuffisant de commercialisation a engendré des<br />

charges financières trop fortes qui ont amené la Société à demander la révision du<br />

programme d’aménagement (donc du PAD) dans le sens d’augmenter la surface<br />

commercialisable, faisant passer le coefficient d’utilisation foncière (équivalent du<br />

COS français) de 1,7 à 2,7 .<br />

69


c. Expérience de la Société de promotion du lac de Tunis<br />

La Société de promotion du lac de Tunis (SPLT) est une société anonyme<br />

tuniso-séoudienne avec les attributions sont essentiellement :<br />

- assainir le plan d’eau du lac de Tunis ,<br />

- restaurer les berges du lac afin de dégager des terrains à l’urbanisation .<br />

Placée sous tutelle du Ministère de l’Équipement et de l’habitat, la SPLT est<br />

régie par une convention passée en octobre 1983 entre l’Etat tunisien et un<br />

partenaire séoudien, et ratifiée par loi .<br />

Son capital est de 44 Millions de Dinars (initialement de 34 Millions de Dinars),<br />

détenu à 50 % par l’État, soit 22 MD dont 14 MD correspondent à un apport en<br />

nature (valeur des terrains des berges expropriés) .<br />

Le projet d’aménagement du lac de Tunis porte sur une superficie de 1600<br />

hectares dont 500 ont été gagnés sur le lac.<br />

L’intérêt démontré d’un tel montage est qu’il a pu permettre de réaliser un<br />

tissu urbain d’une excellente qualité grâce au statut de société privée mais<br />

également grâce au recours à des financements externes .<br />

Le principal inconvénient est qu’il s’agissait d’un programme d’urbanisme<br />

ambitieux touchant une zone géographique très étendue, et impliquant un certain<br />

décalage entre l’aménagement foncier et le programme de construction .<br />

4.4 Les associations syndicales de propriétaires<br />

Le code de l’urbanisme et de l’aménagement du territoire, prévoit la possibilité<br />

de constituer des associations syndicales de propriétaires ‘“sur l'initiative de<br />

l'administration ou des intéressés, en vue de réaliser les plans d'aménagement dans<br />

une zone déterminée et d'assurer la reconstruction, le remembrement ou le<br />

lotissement des propriétés, ainsi que la mise en état des voies privées, de leurs<br />

dépendances, et des ouvrages d'édilité.”<br />

Ces associations (ASP) sont constituées par arrêtés conjoints des ministres<br />

de l'intérieur et de l'urbanisme, après adhésion de la majorité simple des personnes<br />

intéressées .<br />

Une commission syndicale est constituée, et se charge, sous le contrôle du<br />

Président de la Municipalité ou du gouverneur suivant le cas, de :<br />

- faire préparer, par les agents techniques de l'administration intéressés, des<br />

projets d'aménagement, et statue sur la manière de les exécuter ;<br />

- administrer les biens appartenant à l'association ;<br />

- délibérer sur les emprunts qui peuvent être nécessaires et dispose des<br />

ressources de l'association .<br />

Dans la pratique, aucun cas de constitution d’ASP n’a été enregistré, bien<br />

qu’on puisse penser que cette forme de prise en charge d’une population par elle-<br />

70


même soit à encourager fortement et que la législation avait fixé depuis 1929, le<br />

cadre de leur intervention.<br />

Les raisons en sont vraisemblablement<br />

- Tout d’abord, le manque de textes d'application en la matière et par voie de<br />

conséquence de précisions sur les modalités de fonctionnement ;<br />

- Ensuite, l’absence de traditions, et éventuellement d’une opération pilote, qui<br />

pourrait servir d’exemple, et qui ne peut être de l’initiative des particuliers, et ne<br />

pourrait même avoir lieu que sur initiative de l’administration publique ;<br />

- Enfin, la dominance et l'efficacité qu'a connues la maîtrise foncière publique à<br />

travers l'usage des périmètres de préemption puis des périmètres d'intervention<br />

foncière.<br />

4.5 La contribution des promoteurs immobiliers<br />

La loi de février 1990, portant refonte de la législation relative à la promotion<br />

immobilière, voulant donner au secteur privé une part plus active dans<br />

l’amènagement urbain, a voulu “professionnaliser” le rôle de lotisseur et étendu les<br />

avantages accordés à la promotion immobilière, en en faisant bénéficier la réalisation<br />

des lotissements .<br />

Toutefois, les promoteurs immobiliers semblent considérer que dans la<br />

pratique, de nombreuses difficultés subsistent, et en particulier :<br />

• Que les formalités administratives d’approbation des lotissements devraient<br />

être allégées .<br />

• Qu’il existe un certain manque de traditions de partenariat entre l’Etat et le<br />

secteur privé, et que l’État, bien que minoritaire (moins de 33 %) dans le capital de<br />

certaines sociétés (à titre d’exemple: la Banque de l’Habitat), garde un droit de<br />

regard sur les nominations des PDG et sur la gestion même, et qu’il serait opportun<br />

de repenser la répartition des rôles et la définition des règles du jeu entre les parties .<br />

• Que la disponibilité de terrains à lotir (à un prix modéré) constituait un<br />

véritable goulot d’étranglement, que l’action de l’AFH ne parvient pas à résoudre, ne<br />

réussissant pas sa nouvelle vocation de “lotisseur grossiste”, et de plus, du fait de<br />

l’importance de sa production, constitue un concurrent plutôt qu’un régulateur du<br />

marché foncier .<br />

• Qu’il y a lieu de revoir le système des taxes, compte tenu de la concurrence<br />

avec les lotisseurs à titre habituel (qui réalisent 38 % des lotissements) qui ne payent<br />

pas la TVA alors que les promoteurs agréés y sont assujettis (17 %) .<br />

5. INSTRUMENTS SPÉCIFIQUES À LA RÉHABILITATION DES TISSUS<br />

ANCIENS<br />

5.1 Le concours du Fonds national d’amélioration de l’habitat333<br />

Le Fonds national d’amélioration de l’habitat (FNAH), dont la création remonte<br />

à 1956, avait pour objectif l’entretien des bâtiments anciens .<br />

Le Fonds est principalement alimenté par une levée de 4% sur la valeur<br />

locative des immeubles, recouvrée par les municipalités en même temps que la taxe<br />

71


sur la valeur locative des immeubles. Depuis 1986, le FNAH est alimenté par une<br />

dotation annuelle du budget de l’Etat .<br />

Les ressources du FNAH ont été utilisées surtout dans le cadre d’opérations<br />

d’ensemble (amélioration des conditions de vie dans les villes) ou dans le cadre de<br />

crédits et de subventions pour des personnes physiques (souvent des ménages à<br />

faible revenu) .<br />

Au cours des dernières années, ses activités se sont orientées de façon<br />

croissante vers les opérations d’ensemble, notamment vers les travaux<br />

d’assainissement et ceux d’amélioration des entrées des villes .<br />

Plusieurs programmes du FNAH visent actuellement à améliorer les tissus des<br />

centres anciens, particulièrement pour les médinas de Sousse, Tunis, Gabès,<br />

Zaghouan et Kairouan .<br />

Peu de particuliers arrivent à bénéficier du concours du FNAH, d’ailleurs<br />

pratiquement lorsqu’il s’agit de constructions ayant un certain cachet traditionnel, et<br />

souvent grâce au soutien (très variable d’une commune à l’autre) apporté par les<br />

associations de sauvegarde des médinas .<br />

5.2 Nouveaux instruments pour la réhabilitation des tissus anciens<br />

Répondant au souci de mieux protéger le patrimoine, le nouveau code du<br />

patrimoine prévoit deux nouvents instruments devant permettre d’intervenir pour tout<br />

site culturel ou historique:<br />

• les Plans de Sauvegarde et de Mise en Valeur (PSMV)<br />

• et les Plans de Protection et de Mise en Valeur (PPMV)<br />

Ces instruments visent la protection des ensembles historiques et<br />

traditionnels intégrant les tissus et quartiers qui, en raison de leur spécificité<br />

(notamment architecturale), ont une valeur nationale ou universelle, dû à leur aspect<br />

historique, esthétique, artistique ou traditionnel .<br />

Les documents établis à ce titre, sont appelést à se substituer<br />

automatiquement aux Plans d’Aménagement Urbain (P<strong>AU</strong>).<br />

Ces instruments sont malheureusement encore inopérants,<br />

vraisemblablement pour les raisons suivantes :<br />

• Tout d’abord, l’absence de textes d’application du code, précisant notamment<br />

:<br />

- les pièces constitutives d’un P.P.M.V<br />

- les pièces constitutives d’un P.S.M.V<br />

- les liens avec le code de l’urbanisme (P<strong>AU</strong>, travaux...).<br />

• Mais également la nouveauté de ces instruments et le manque de tradition en<br />

la matière, qui suppose un effort particulier de l’Institut du patrimoine et des services<br />

de l’urbanisme, éventuellement pour :<br />

- lancer, à titre d’exemple à suivre, la réalisation d’opérations pilotes de<br />

protection<br />

72


- engager une action de formation des services concernés du patrimoine<br />

et de l’urbanisme, et des professionnels (urbanistes, architectes et ingénieurs) pour<br />

un usage adéquat de ces instruments .<br />

73


ANNEXES<br />

74


Le problème du logement dans le monde<br />

Le monde s'urbanise toujours davantage. Les gens quittent les zones rurales, qui ne<br />

leur offrent plus désormais de quoi vivre, pour les villes, espérant y trouver un emploi<br />

et bénéficier d'un accès plus facile à l'éducation et d'un niveau de vie plus élevé.<br />

Aujourd'hui, presque la moitié de l'humanité vit dans les zones urbaines, et le nombre<br />

de citadins augmente deux fois et demie plus vite que celui des ruraux. En 2025, les<br />

habitants de la ville représenteront les deux tiers de la population mondiale.<br />

Mais, cette urbanisation rapide s'accompagne souvent d'un cortège de maux<br />

accablants, la pauvreté touchant jusqu'à 60% de la population.<br />

Le manque de logements convenables est l'un des problèmes les plus pressants qui<br />

se posent à l'humanité. Selon, le Centre des Nations Unies pour les établissements<br />

humains, il y aurait actuellement dans le monde environ 500 millions de citadins sans<br />

abri ou mal logés, dont près de 50% d'enfants, vivant d'ores et déjà dans des villes et<br />

villages dans des conditions qui nuisent gravement à leur santé et mettent leur vie en<br />

péril. Ce problème est mondial, mais la situation est bien plus grave dans les pays en<br />

développement où l'on estime actuellement que 50% de la population urbaine ne<br />

dispose pas d'un logement convenable.<br />

L'Organisation Mondiale de la Santé a montré que de tous les facteurs<br />

environnementaux, le logement était le plus fortement associé à la maladie et à<br />

l'espérance de vie. La mauvaise qualité des logements, l'eau non potable, le manque<br />

d'hygiène public des villes à population dense, sont responsables, chaque année, de<br />

10 millions de décès dans le monde. Les maladies d'origine hydrique à elles seules<br />

tuent 4 millions de nourrissons et d'enfants par an.<br />

Malgré ce constat alarmant, le niveau des dépenses publiques mondiales<br />

consacrées au logement reste étonnamment bas par rapport aux autres postes de<br />

dépenses. Selon le programme des Nations Unies pour le développement, 3,32% du<br />

total des fonds publics disponibles ont été affectés au logement en 1990, contre 15%<br />

à l'éducation et 6,4% aux soins de santé.<br />

75


La déclaration d’Istanbul et le programme pour l’habitat. Conférences des<br />

Nations Unies sur les établissements humains (Habitat II), Istanbul, Turquie 3-<br />

14 juin 1996<br />

Cet ouvrage a été réalisé à la suite de la deuxième conférence sur les<br />

établissements humains organisée en 1996, à Istanbul, sous l’égide des Nations<br />

Unies. Il formalise les engagements pris et les actions retenues en matière d’habitat<br />

lors de cet événement.<br />

Ce document est composé de deux parties. Tout d’abord, il rappelle la Déclaration<br />

d’Istanbul sur les établissements humains, puis, il expose le programme pour<br />

l’habitat défini lors de ce rassemblement. Ce dernier est organisé autour de deux<br />

thèmes principaux : « un logement convenable pour tous » et « le développement<br />

durable des établissements humains dans un monde de plus en plus urbanisé ». Ce<br />

programme est présenté en trois parties : tout d’abord l’exposé des buts et des<br />

principes, ensuite l’énoncé des engagements, et enfin la présentation des stratégies<br />

de mises en œuvre du plan d’action mondial pour l’habitat.<br />

Dans l’exposé des buts, des principes et des engagements, le programme propose<br />

une conception positive des établissements humains viables, où chacun serait logé<br />

convenablement, vivrait en sécurité dans un environnement sain et sûr, et aurait<br />

accès à un travail productif choisi librement.<br />

Le programme pour l’Habitat doit permettre de transformer ces idées en réalité. Le<br />

plan d’action repose sur deux principes : la facilitation et la participation. Les<br />

gouvernements doivent s’efforcer de mettre en place des mécanismes législatifs,<br />

institutionnels et financiers permettant à l’ensemble des acteurs de participer<br />

pleinement aux efforts visant à assurer un logement convenable pour tous, et un<br />

développement durable des établissements humains.<br />

Concernant le logement, le programme d’action vise à créer une situation permettant<br />

de mobiliser le potentiel et les ressources des processus de production et<br />

d’amélioration de l’habitat. Il s’articule autour de trois types de mesures :<br />

- celles qui concernent la satisfaction de la demande en logement et en<br />

infrastructures ;<br />

- celles qui visent l’exploitation et l’entretien du parc existant ;<br />

- et enfin, les actions spécifiques à mener en faveur des « groupes sociaux<br />

vulnérables et défavorisés » afin qu’ils accèdent au logement.<br />

Concernant le développement durable des établissements humains, le programme<br />

d’action vise à créer les conditions adéquates pour que tous, hommes et femmes,<br />

puissent exercer, de la même façon, leurs droits et responsabilités individuels, et<br />

participer aux mieux de leurs capacités à des activités de nature à améliorer et à<br />

préserver leur cadre de vie. Aussi, les actions préconisées sur ce point recouvrent à<br />

la fois, le développement économique, le progrès social et culturel, et la protection de<br />

l’environnement.<br />

Ensuite, le programme d’action s’attache plus brièvement à deux autres thèmes : le<br />

développement et le renforcement des capacités des institutions, puis de celles de la<br />

76


coopération internationale. Enfin, Il s’achève par l’énoncé d’un ensemble d’actions à<br />

mettre en place pour assurer la mise en œuvre et le suivi du programme.<br />

77


La situation du logement en France : du logement insalubre<br />

aux exclus du logement<br />

Malgré une politique du logement social qui remonte à la fin du XIXème siècle, des<br />

politiques successives de résorption de l'habitat insalubre lancées dès les années<br />

1950, et la mise en place quelques temps après d'aide à l'accès au logement, les<br />

conditions de logement en France demeurent très inégales.<br />

En plus de vingt ans, les résultats des recensements de la population montrent<br />

néanmoins une amélioration substantielle du confort des résidences principales en<br />

France.<br />

Entre 1962 et 1990, la proportion de logements équipés d'une baignoire ou d'une<br />

douche est passée de 28,9% à 93,5% 5 . Sur la même période, le taux de logements<br />

pourvus de W-C intérieurs a augmenté de 40,5% à 93,5% 6 .<br />

On constate par ailleurs une amélioration sensible des conditions d'occupation des<br />

logements. Entre 1962 et 1990, le nombre moyen de personne par logement a<br />

diminué de 3,10 à 2,57, et le nombre moyen de personnes par pièces de 1,01 à 0,68<br />

(2,0 en 1994 au Maroc).<br />

Cette amélioration des conditions de logement résulte de longues années de<br />

politiques très coûteuses remontant pour certaines d'entre elles au début du siècle.<br />

Mais, malgré les efforts entrepris, la quatrième puissance économique mondiale,<br />

comptait encore en 1990, un peu plus de 2 millions de logements inconfortables 7<br />

(soit 9% des résidences principales) et près de 11% de logements surpeuplés.<br />

En outre, cette même année, le BIPE (Bureau d'Informations et de Prévisions<br />

Economiques) dénombrait 98 000 sans domicile fixe, 45 000 personnes vivant en<br />

abris de fortune, et 59 000 en centres d'urgence. A ces exclus, il faut ajouter 470 000<br />

occupants de logements dits de "substitution" (meublés et chambres d'hôtel) et 1 576<br />

000 mal-logés dont 147 000 vivant dans des habitations mobiles et 1 429 000 dans<br />

des logements hors normes. En additionnant l'ensemble de ces catégories, on arrive<br />

à un total de 2 248 000 personnes "exclues du logement" représentant près de<br />

4% de la popualtion nationale et 1 315 000 équivalents logements.<br />

La politique de résorption de l'habitat insalubre a fait ses preuves en France : en<br />

1975, près de 40% des résidences principales étaient inconfortables, ce pourcentage<br />

a chuté à 20,3% en 1982, et à 9,3% en 1990. La France s'est dotée de moyens<br />

efficaces pour lutter contre l'insalubrité, et elle n'est plus qu'une forme résiduelle de<br />

mauvais logement en France. Le problème du logement n'est donc aujourd'hui plus<br />

celui de la production d'un habitat répondant à certaines normes de confort, mais<br />

celui de l'accès des populations les plus défavorisées à ce parc de logements<br />

normalisés.<br />

5 En 1994, 18,5% des ménages marocains disposaient d'un bain moderne ou d'une douche dans leur<br />

logement (RGPH 1994).<br />

6 En 1994, 59,3% des ménages marocains disposaient d'un W-C privé (RGPH 1994).<br />

7 Logement où il manque au moins un des deux éléments de confort : W-C et/ou installation sanitaire<br />

intérieurs<br />

78


Certains analysent ce phénomène comme une conséquence de la politique de<br />

résorption de l'habitat insalubre qui a contribué à l'élimination d'un parc social de fait<br />

accueillant une population qui ne pouvait accéder au parc de logements sociaux.<br />

Pour répondre à cette récente problématique, de nouvelles politiques ont été définies<br />

dans les années 1990. Elles visent à favoriser l'accès au logement aux personnes<br />

défavorisées, notamment en produisant des logements locatifs "très sociaux" ou<br />

"d'insertion" pour lesquels les subventions de l'Etat ont été augmentées... Ces<br />

logements permettent aussi la mise en place de dispositifs d'accompagnement social<br />

qui vise à aider les bénéficiaires de ces logements à gérer leur nouvelle situation<br />

locative.<br />

79


FICHES SIGNALETIQUES<br />

DES EXPERIENCES INTERNATIONA<strong>LES</strong><br />

80


I - FONDS COMMUN<strong>AU</strong>TAIRE <strong>POUR</strong> L’AMELIORATION DE L’HABITAT A<br />

FORTALEZA <strong>AU</strong> BRESIL<br />

PROGRAMME «CASA MELHOR »<br />

Pays<br />

Lieu<br />

Champ d’action<br />

Maître d’ouvrage<br />

Assistance à maîtrise<br />

d’ouvrage<br />

Partenaires locaux<br />

Brésil<br />

Fortaleza<br />

Financement de l’habitat<br />

Mairie de Fortaleza<br />

Groupe de recherche et d’échanges technologiques (GRET)<br />

CEARAH Periferia (ONG), Banque de l’Etat du Ceara,<br />

associations d’habitants<br />

Partenaires financiers Mairie de Fortaleza, associations d’habitants, Caisse des<br />

Dépôts et Consignations, PSH<br />

Durée 1992-...<br />

I/ DONNES DE BASE SUR LE PAYS<br />

Population urbaine 77% de la population totale en 1992<br />

Densité urbaine<br />

18 hab/km²<br />

Population économiquement 44% (primaire 26%, secondaire 27%, tertiaire<br />

active<br />

47%)<br />

PIB (US$)<br />

414,1 milliards<br />

PNB / habitant (US$) 2.920<br />

La population urbaine du Brésil est passée de 45% en 1960 à 77% en 1992. La<br />

population au-dessous du seuil de pauvreté est de 72,4%.<br />

Le contexte du projet<br />

Située dans l’Etat du Ceara, la ville de Fortaleza (2,5 millions d’habitants) est la<br />

cinquième ville du Brésil. C’est aussi l’une des plus pauvres. L’immigration rurale y a<br />

favorisé la multiplication de l’habitat précaire et des logements de fortune.<br />

La commune de Fortaleza reste une des rares villes du Brésil qui ait maintenu son<br />

soutien aux mutirões (aide mutuelle) c’est à dire aux opérations communautaires<br />

d’auto-construction et d’amélioration de l’habitat menées par des associations<br />

d’habitants avec l’appui de la municipalité. Malgré le dynamisme des associations<br />

communautaires, un besoin énorme d’extension et d’amélioration persiste.<br />

Un des groupes de travail du PSH animé par le GRET s’est intéressé à cette<br />

question et proposa à la ville brésilienne, en 1992, de créer un fonds spécifique<br />

s’appuyant sur le principe de l’épargne-logement. Ce projet repose sur le<br />

fonctionnement des mutirões : maîtrise d’ouvrage associative, participation des<br />

habitants aux réalisations, et autofinancement partiel.<br />

81


Objet et enjeux du projet<br />

Le projet intitulé «casa Melhor » concerne donc la création d’un fonds<br />

communautaire pour l’amélioration de l’habitat permettant d’offrir aux habitants,<br />

organisés en associations de quartier, des prêts limités sur une courte durée.<br />

Il poursuit trois enjeux majeurs :<br />

- faire reconnaître l’importance de l’amélioration de l’habitat existant aux partenaires<br />

institutionnels, souvent tournés vers la production de logements neufs ;<br />

- définir de nouvelles relations contractuelles entre associations et municipalité ;<br />

- développer de nouveaux outils dans les quartiers les plus défavorisés et faciliter<br />

leur insertion progressive dans le développement urbain ;<br />

II/ LE PROJET<br />

Le fonds communautaire est alimenté à parts égales par :<br />

l’épargne des familles gérée par la banque de l’Etat du Ceara où un compte a été<br />

ouvert pour le projet ;<br />

une dotation de la coopération française permettant la constitution d’un fonds de<br />

roulement, et qui est en principe non renouvelable car le fonds doit être alimenté par<br />

les remboursements ;<br />

une subvention annuelle de la municipalité de Fortaleza qui n’est pas remboursée<br />

par les populations.<br />

Les prêts doivent être employés à l’achat des matériaux nécessaires à l’amélioration<br />

des logements. Les chantiers sont réalisés par auto-construction.<br />

Les familles peuvent emprunter une somme égale au double de leur épargne : 100F<br />

d’épargne donnent donc accès à 300F (100F d’épargne constituée, 100F de prêt, et<br />

100F de subvention municipale). Le montant maximum des travaux équivaut ainsi à<br />

la somme de la valeur de l’épargne additionnée, au subside de la mairie, et du prêt<br />

de la coopération internationale.<br />

Le montant prêté à chaque famille ne peut excéder 3 salaires minimum. Le prêt<br />

octroyé est sans intérêt et remboursable en 12 mois maximum. Les paiements sont<br />

effectués par semaine, par quinzaine, ou par mois. Le premier remboursement a lieu<br />

un mois après la remise du chèque. Les valeurs du remboursement sont basées sur<br />

le salaire minimum officiel constituant ainsi un mode d’indexation sur l’inflation.<br />

Une équipe technique composée de membres de l’ONG locale (CEARAH Periferia)<br />

et de techniciens municipaux accompagne les bénéficiaires. Elle est chargée de<br />

l’identification des familles, de l’appui à la constitution de groupes, des enquêtes<br />

socio-économiques individuelles, des évaluations des travaux souhaités et<br />

réalisables en fonction des moyens financiers des familles, et du suivi des<br />

remboursements.<br />

Le GRET assure une assistance à la maîtrise d’ouvrage et la Caisse des Dépôts et<br />

Consignations assure le suivi et l’expertise du projet.<br />

82


Mode de réalisation des travaux<br />

Les logements concernés sont issus du programme fédéral d’accession à la<br />

propriété, d’habitat spontané ou d’autres d’opérations publiques de logements<br />

sociaux. Ils sont pour la plupart exigus (environ 25m²), comportent un minimum<br />

sanitaire, et sont plus ou moins bien reliés à un système d’assainissement collectif.<br />

Les travaux à réaliser concernent l’agrandissement de la maison, l’amélioration<br />

technique (enduit, revêtement de sol, etc.) ou parfois la construction de murs de<br />

clôture.<br />

Modalités d’octroi des prêts<br />

- Le projet s’adresse à des familles propriétaires de leur logement ou disposant d’un<br />

titre d’usage de la maison.<br />

- L’accès au crédit pour des familles traditionnellement exclues du système bancaire<br />

s’effectue sous certaines conditions.<br />

Les familles doivent gagner entre 1,5 et 3 salaires minimum, condition s’étant avérée<br />

stimulante pour les populations à bas revenus qui se sont mobilisées pour prouver<br />

aux enquêteurs qu’elles avaient bien 1,5 salaires minimum. Elles doivent en outre<br />

disposer d’un garant qui ne pourra faire partie des bénéficiaires du programme avant<br />

la fin du remboursement.<br />

Les familles doivent constituer des groupes d’épargne de 10 à 30 personnes dans le<br />

cadre d’associations légalement reconnues. Une même association peut ainsi avoir<br />

plusieurs groupes d’épargne et de prêts fonctionnant en temps.<br />

L’association communautaire doit être légalisée et avoir son siège et ses activités<br />

dans les quartiers sélectionnés par le programme. Elle a pour tâche d’assurer auprès<br />

des familles la diffusion des règles de fonctionnement du programme. Elle est<br />

également responsable des informations concernant les familles présentées au<br />

programme. Elle suit la collecte des fonds et les recouvrements d’échéance.<br />

Toute famille intéressée doit s’inscrire au programme par l’intermédiaire d’une<br />

association communautaire. Une fois sa fiche analysée, elle reçoit la visite des<br />

techniciens qui effectuent le relevé de la maison et élaborent le projet des travaux<br />

souhaités en fonction du budget familial.<br />

Une fois le budget approuvé, la famille effectue le dépôt de l’épargne et s’engage à<br />

rembourser la part du financement qui lui est prêtée. Les remboursements sont<br />

effectués directement ou à travers l’association. Lorsque tous les membres du<br />

groupe ont constitué leur épargne, les prêts sont accordés individuellement.<br />

En cas d’infraction relative au début du chantier ou à un défaut de remboursement<br />

l’association ne peut plus recevoir d’autres ressources du programme, même si les<br />

familles de l’association ont déjà leur fiche approuvée.<br />

L’ensemble de ce système présente trois avantages majeurs :<br />

- les familles sont encouragées à faire l’effort de constituer une épargne préalable ;<br />

83


- les crédits peuvent êtres accordés aux personnes ayant un emploi dans le<br />

secteur informel,<br />

- les crédits peuvent être obtenus sans titre de propriété, un simple titre de droit<br />

d’usage étant suffisant,<br />

- le système implique un rôle actif des associations d'habitants.<br />

Impacts du projet<br />

Le fonds fut créé en 1993 et l’équipe technique du projet constituée en 1994. En<br />

septembre 1995, 100 premiers crédit furent octroyés. La valeur des travaux réalisés<br />

excédait rarement 2000FF.<br />

En 1996, une multiplication par quatre des activités du programme fut constatée. Fin<br />

1996, plus de 120 groupes d’épargne appartenant à 63 associations de quartiers<br />

s’étaient constitués, et 83 de ces groupes représentant 1000 familles avaient reçu<br />

des crédits. Pour pallier la demande d’extension du programme, la municipalité de<br />

Fortaleza décida alors de doubler le montant de sa subvention annuelle pour<br />

accorder un nombre plus important de crédits.<br />

Par ailleurs, le système a prouvé son efficacité puisque les taux de remboursement<br />

avoisinaient les 100%. A raison de 400 prêts par an, le projet a permis une action<br />

significative et visible dans le commune de Fortaleza.<br />

Evaluation<br />

La réticence des habitants à déposer leur économies sur un compte ouvert pour le<br />

projet à la banque de l’Etat du Ceara a constitué la principale difficulté du<br />

programme. Aussi l’opération nécessita un lourd travail de médiation et d’explication.<br />

Par ailleurs, la mise en œuvre du projet a conduit à constater qu’il était nécessaire<br />

d’assouplir les conditions du prêt accordé initialement pour l’achat des matériaux. En<br />

effet, si les habitants peuvent construire seuls leurs murs, la réalisation des travaux<br />

sanitaires demande de faire appel à une main d'œuvre spécialisée et rémunérée.<br />

Dans la poursuite du programme, de nouvelles modalités de prêts plus flexibles ont<br />

été envisagées. Dans le projet Casa Melhor, quel que soit le montant des prêts<br />

demandé, la part de l’épargne est la même (1/3 du total). En réduisant la part de<br />

l’apport personnel pour des travaux légers, il est possible de toucher des ménages<br />

pour qui la constitution de l’épargne est difficile. Pour un montant d’épargne donné,<br />

les familles reçoivent une subvention d’un montant double et ont accès à un prêt d’un<br />

montant équivalant à trois fois leur apport 8 . L’épargne représente donc 1/4 du<br />

montant total des travaux, et celle-ci peut être utilisée pour payer une main d'œuvre<br />

spécialisée.<br />

8 100F d’épargne donnent accès à 400F, soit 100F d’épargne constituée, 100F de prêts et 200F de<br />

subvention.<br />

84


II - DENSIFICATION DE L’HABITAT A VILLA SALVADOR <strong>AU</strong> PEROU<br />

Pays<br />

Lieu<br />

Champ d’action<br />

Maître d’ouvrage<br />

Assistance à maîtrise<br />

d’ouvrage<br />

Partenaires locaux<br />

Pérou<br />

Villa El Salvador<br />

Amélioration de l’habitat<br />

Municipalité de Villa El Salvador<br />

Municipalité de Rezé (France)<br />

CIUDAD (ONG), DESCO (ONG), banque Wiese, association<br />

de bénéficiaires<br />

Partenaires financiers Ville de Rezé, Ministère des Affaires étrangères, Caisse des<br />

dépôts et Consignations<br />

Durée 1988-....<br />

Coût<br />

3 millions de FF<br />

I/ DONNES DE BASE SUR LE PAYS<br />

Population urbaine<br />

71% de la population totale<br />

Densité de population 17 hab./km²<br />

Population économiquement 40% (primaire 35%, secondaire 12%, tertiaire<br />

active<br />

53%)<br />

PIB (US$)<br />

48,4 milliards<br />

PNB / habitant (US$) 1,070<br />

Le contexte du projet<br />

Au Pérou, les grandes vagues migratoires des années 1970 se sont traduites<br />

spatialement par l’occupation de terrains désertiques aux alentours de Lima. L'Etat<br />

péruvien a entériné, par une série de lois à posteriori, l’occupation de ces sols et leur<br />

jouissance. C’est ainsi que sont nées les barriadas qui constituent la principale<br />

modalité de croissance urbaine de Lima.<br />

Le schéma une famille - une parcelle et l’épuisement des terrains disponibles ont<br />

ensuite entraîné un surpeuplement et une dégradation des barriadas, obligeant les<br />

familles de la seconde génération à habiter avec leur parents.<br />

Villa El Salvador est une barriada située à 20 km au sud de Lima. Créée en 1971 par<br />

l’Etat, en plein désert, elle a été promue au rang de municipalité en 1983 et compte à<br />

présent près de 300 000 habitants. La demande en logements de la seconde<br />

génération (35% de la population) n’est satisfaite ni par le marché, ni par l’invasion<br />

de nouveaux terrains arides et éloignés des équipements urbains, terrains qui de<br />

toute façon sont de plus en plus rares.<br />

Pour parer à la taudification et pour permettre aux enfants des premiers occupants<br />

de se loger, une expérience d’appui à l’auto-construction pour une densification des<br />

85


logements adaptée à un usage multifamilial est lancée en 1988 à Villa El Salvador,<br />

en coopération avec la ville de Rezé 9 .<br />

Enjeux et objectifs<br />

Le projet vise à répondre au déficit quantitatif et qualitatif d’habitat pour les plus<br />

démunis, en démontrant les possibilités d’une densification verticale de l’habitat à<br />

partir d’expériences populaires d’auto-construction. Il s’articule autour de trois<br />

objectifs principaux :<br />

- rationaliser le processus de densification en éliminant les effets pernicieux de<br />

taudification;<br />

- créer de nouveaux mécanismes techniques, légaux, financiers et administratifs<br />

permettant le développement et la généralisation du processus de densification ;<br />

- rétrocéder l’ensemble des mécanismes aux autorités municipales afin qu’elles<br />

puissent assurer la maîtrise du processus à l’échelle du district.<br />

II/ LE PROJET<br />

Le projet de densification repose sur une articulation de plusieurs volets :<br />

un volet juridique concernant la régularisation de la situation foncière des<br />

populations concernées comme préalable aux travaux de densification ;<br />

un volet financier imaginant un système de crédit de faible montant et de courte<br />

durée fondé sur la valorisation de l’épargne populaire, la constitution d’un fonds de<br />

garantie et l’implication d’un opérateur bancaire privé ;<br />

un volet social visant l’accompagnement des habitants pour la construction en<br />

hauteur, les règles d’accès au crédit, et la gestion des prêts.<br />

L’appui technique est assuré par deux ONG péruviennes, une ONG française<br />

(AITEC), et trois coopérants français.<br />

Dans un premier temps, la coopération française prend en charge totalement la main<br />

d'œuvre spécialisée et l’encadrement technique, la main d'œuvre non spécialisée<br />

restant à la charge des bénéficiaires.<br />

Les prêts pour l’achat des matériaux de construction sont octroyés par un organisme<br />

financier privé (la banque Wiese). Pour convaincre un tel organisme de la rentabilité<br />

des prêts à l’habitat en faveur d’habitants défavorisés, un système de garantie<br />

original a été mis en place. La coopération française a déposé à la banque un fonds<br />

de garantie (Fogade) de 21,750 US$ en échange duquel la banque double le capital<br />

qu’elle prête aux habitants sous forme de crédits à un taux d’intérêt bonifié par<br />

rapport au marché. De plus, 10% de chaque prêt sont conservés à la banque au titre<br />

de garantie. Le total est mis en commun, et la banque y prélève les retards de<br />

remboursement.<br />

9 La coopération entre Rezé et Villa El Salvador date de 1984. Dans un premier temps, elle a permis<br />

le développement des réseaux d’adduction d’eau et d’assainissement. Un jumelage entre les deux<br />

villes a ensuite été signé en 1991.<br />

86


D’autre part, les bénéficiaires des crédits devant se regrouper par 5 ou 6, la pression<br />

sociale que doivent exercer les bénéficiaires sur un mauvais payeur qui profiterait<br />

d’un bien commun, constituait une garantie supplémentaire.<br />

Le Fogade devait être remplacé à terme par un système traditionnel de garanties<br />

mobilière et hypothécaire.<br />

Les bénéficiaires des prêts doivent être des familles de la seconde génération de<br />

Villa El Salvador à la recherche d’un logement indépendant et doivent être intégrés à<br />

l’organisation de voisinage du projet et de sa promotion.<br />

Les prêts doivent être remboursés sur un maximum de trois ans selon le montant,<br />

avec un délai de grâce de deux mois. Les recouvrements sont mensuels. Devant la<br />

difficulté de remboursement des crédits, un comité de suivi a été constitué en cours<br />

du projet. Son efficacité a été démontré avec un taux de recouvrement de 78%.<br />

Mode de réalisation des travaux<br />

Le projet de densification concerne la construction «brute » : structures, canalisations<br />

intérieures d’eau et d’électricité et évacuation.<br />

Trois modalités de densification ont été définies :<br />

- construction d’un étage,<br />

- division horizontale de la parcelle,<br />

- réunions de terrains et redécoupage du parcellaire.<br />

Des innovations techniques ont également été proposées pour la construction<br />

(matériaux).<br />

Impacts du projets<br />

Suite à la signature de l’accord entre la municipalité de Villa El Salvador, la banque<br />

Wiese et les opérateurs du projet en 1991, une première phase expérimentale<br />

portant sur 41 logements a été réalisée. Cette phase s’est achevée en 1995.<br />

Les prêts ont permis aux habitants de répondre rapidement aux besoins d’extension.<br />

Auparavant ceux-ci stockaient les matériaux au fur et à mesure des rentrées<br />

financières, étalant dans le temps les extensions. L’accès à l’habitat était l’affaire de<br />

toute une vie.<br />

Evaluation<br />

L’aspect financier du projet est le plus innovant et le plus riche d’enseignement. Il<br />

démontre la possibilité d’intégrer des populations démunies dans un système de<br />

crédit formel. Par cette opération, la banque a découvert une nouvelle clientèle.<br />

Outre le projet, la banque a crée une ligne spécifique de crédits pour la création de<br />

micro-activités économiques par des populations non salariées.<br />

Par ailleurs, la mise en œuvre du projet a permis de révéler que les populations<br />

préfèrent bénéficier d’un appui technique à la construction, même si elles doivent<br />

participer à son financement, plutôt que d’une bonification de quelques points sur le<br />

87


taux d’intérêt. Les prêts sont en effet à trop court terme pour que cette bonification ait<br />

un réel impact sur le coût de leurs travaux. Aussi, une microentreprise de services a<br />

été créée pour prendre en charge le suivi technique, administratif et financier des<br />

bénéficiaires. Les services rendus sont facturés à hauteur de 8% du crédit octroyé.<br />

La sous estimation de la mobilisation nécessaire des ONG locales tant pour<br />

l’accompagnement social des bénéficiaires n’ayant jamais eu de contact avec le<br />

milieu bancaire, que pour l’appui technique auprès la banque manquant d’expérience<br />

en matière de montages financiers non traditionnels, a constitué la majeure difficulté<br />

du projet.<br />

De plus, à l’échéance de la phase expérimentale de ce projet deux problèmes<br />

subsistaient :<br />

- l’impossibilité de trouver un organisme qui puisse se substituer à la coopération<br />

française pour mobiliser une part de subvention ;<br />

- l’échec de la rétrocession de l’ensemble du mécanisme à la municipalité imputable<br />

à la délicate situation politique péruvienne.<br />

88


III - LE PLAN D'AIDE MUTUELLE (PAM)<br />

MEXIQUE<br />

Pays:<br />

Lieu:<br />

Champ d’action:<br />

Maître d’ouvrage:<br />

Mexique<br />

San Andrés de Ixtlan, Etat de Jalisco<br />

agrandissement et amélioration de logements<br />

ONG "Taller de Architectura Popular" (TAP)<br />

I/ DONNES DE BASE SUR LE PAYS<br />

Population urbaine : 74% de la population totale<br />

Densité urbaine : 45 hab/km 2<br />

Population économiquement active : 38%<br />

PIB: US $ 282,5 milliards<br />

PNB/hab : 3.080 $<br />

Contexte du projet<br />

- Situation globale du logement : pendant les dernières décennies, la multiplication des<br />

établissements humains irréguliers à la périphérie de la ville fut la solution pour les<br />

populations défavorisées. Aujourd'hui cette pratique est en crise puisque la ville de<br />

Mexico tente de freiner la croissance urbaine, en invoquant la protection de<br />

l'environnement péri-urbain et la réduction des coûts d'urbanisation. La densification du<br />

tissu urbain existant reste à présent la seule alternative pour les plus démunis.<br />

- Accès des secteurs sociaux à l'habitat : dans ce contexte, l'accès au logement pour les<br />

secteurs populaires passe d'abord par le droit d'accès au sol. Ce problème est passé<br />

relativement inaperçu dans les années 80, les autorités fermant les yeux devant les<br />

invasions permanentes dans la grande périphérie de la ville. Le problème devient<br />

maintenant crucial. Il n'existe aucune politique destinée à promouvoir une offre de<br />

terrains dont le prix serait accessible aux familles en quête de logements. Les<br />

organisations sociales sont donc obligées de chercher des terrains sur un marché<br />

spéculatif, sans disposer d'une information suffisante sur le marché immobilier, sur le<br />

plan de l'occupation des sols, ni sur la nature du sous-sol des terrains.<br />

- Politique de financement du logement : Parmi les principaux dispositifs publics ou<br />

parapublics ou parapublics de production de logements, signalons :<br />

- le système de collecte de cotisation salariale des travailleurs des secteurs public et<br />

privé, dont les fonds sont administrés par INFONAVIT qui produit 29% des<br />

logements du secteur public,<br />

- le système commercial bancaire FOVI-BANCA QUI PRO<strong>DU</strong>IT 33% des logements<br />

publics,<br />

- le système FONHAPO. C'est une banque de logement populaire qui produit 15%<br />

des logements publics. Elle a pour objectif d'octroyer des crédits-logements<br />

collectifs aux secteurs sociaux organisés afin de renforcer la participation populaire.<br />

- Production globale de logements :<br />

Les trois dispositifs contribuent pour un peu plus de 20% du total des logements<br />

mexicains. Le secteur privé réalise 28% du total des logements et les systèmes dits<br />

informels plus de 50%. Les déficiences structurelles des interventions formelles sur les<br />

mécanismes de production et la faiblesse des mécanismes d'accès au logement pour les<br />

89


plus démunis donne lieu à l'émergence de diverses pratiques sociales supplétives<br />

(quelquefois complémentaires) à l'action de l'Etat. C'est le cas du PAM.<br />

II/ LE PROJET<br />

1- Aspects généraux<br />

- historique: devant le besoin d'apporter des alternatives pour la production des<br />

logements populaires, l'ONG "Taller de Architectura Popular" (TAP) a mis en place le<br />

"Plan de ayuda mutual en El Sur del Estado de Jalisco" en tant que programme pilote.<br />

Il a été proposé de commencer à partir d'un groupe de quarante ménages avec<br />

lesquels le TAP avait travaillé à la reconstruction de leur logements à la suite des<br />

tremblements de terre de 1985.<br />

- caractéristiques du projet : les ménages pressentis possèdent une unité de logement<br />

qui ne satisfait pas leurs besoins minimum. Il s'agit alors d'encourager des actions<br />

d'agrandissement et d'amélioration. Le programme est introduit en février 1991 à San<br />

Andrés de Ixtlan et concerne 223 personnes. La durée du programme est déterminée<br />

par le nombre de participants et la quantité d'épargne, en définissant un délai<br />

d'épargne de 52 semaines.<br />

2- crédits:<br />

- Ingénierie financière : le programme est fondé sur des formes de financement<br />

informels dénommés "tombolas", mis en place par les ménages à faible revenu.<br />

Comme soutien à la production du logement, un centre de matériaux pour la<br />

construction a été mis en place. Par le biais d'achats en gros, il obtient de meilleurs<br />

pris et des conditions avantageuses pour les participants au programme et permet de<br />

lutter contre l'inflation. D'autre part, afin d'avoir un soutien financier qui rende possible<br />

les adaptations au processus, un fonds liquide a été crée, se composant de l'épargne<br />

des premières semaines durant lesquelles on n'amorce pas de travaux, décalant ainsi<br />

le calendrier entre recettes de cotisation et amorce des travaux.<br />

- Subventions: la subvention représente les frais de gestion et d'organisation. Elle est<br />

octroyée par l'organisation TAP et équivaut à 10-15% des coûts de fonctionnement.<br />

3- collecte des ressources :<br />

- épargne et mobilisation des ressources : l'épargne fait partie du système lui-même<br />

étant donné qu'elle est en espèce (matériaux de construction). Elle se potentialise donc<br />

d'avantage en annulant les effets de l'inflation. Le système d'épargne fonctionne par<br />

l'intermédiaire de la collecte des cotisations hebdomadaires de tous les participants. La<br />

moyenne de ces cotisations hebdomadaires a été fixée à 20.000 pesos, chaque<br />

participant déterminant librement sa part. L'argent déposé par l'épargnant n'est pas<br />

rémunéré.<br />

- gestion des ressources : les ressources sont dirigées vers un centre de matériaux qui<br />

fonctionne par vente à la communauté en général, ce qui produit des excédents qui<br />

sont applicables au fonctionnement du programme. Les épargnants perçoivent des<br />

bénéfices qui vont de 9 à 19 % en ce qui concerne les prix des matériaux de<br />

construction en plus de l'assistance technique qu'on leur donne en échange de frais<br />

symboliques.<br />

90


4- gestion et recouvrement du crédit :<br />

- octroi et suivi de l'emprunt : octroi d'un crédit par semaine à chacun des participants du<br />

PAM au cours d'une durée d'environ un an. L'ordre d'assignation est déterminé<br />

moyennant tirage au sort. Au moment de gagner le tirage au sort, celui qui a épargné<br />

10.000 reçoit environ 530.000 ; celui qui a épargné 20.000 environ 1,6 millions. Celui<br />

qui a deux chiffres participe au tirage avec deux chances ; au cas ou il gagne, il reçoit<br />

seulement la partie correspondante à un chiffre et l'autre numéro continue à être tiré au<br />

sort. L'épargne des ménages est livrée en matériaux de construction, prenant en<br />

compte les objectifs du programme et l'évolution des prix des matériaux.<br />

- réinvestissements: les ventes de matériaux produisent des excédents qui sont<br />

réinvestis dans le programme.<br />

5) Evaluation du projet<br />

- évaluation: le programme accuse un déficit de 7.000 $ en juin 1993. Face à<br />

l'impossibilité de puiser ces ressources à l'extérieur du système d'épargne-logement<br />

(refinancement), le programme survit parce que les retards et les impayés sont<br />

couverts par les nouvelles ressources de nouveaux projets d'épargne et de crédit. En<br />

tous les cas, pour ne pas tomber dans le piège de délais d'épargne supérieurs à un an<br />

qui décourageraient les épargnants, il a été décidé que le programme doit être<br />

cyclique. De plus, il doit être mis en place un centre de production de matériaux de<br />

construction, conçu comme un groupe d'entreprises produisant les matériaux<br />

nécessaires à l'ensemble des membres du plan, à moindre prix et de meilleur qualité,<br />

ce qui contribue à la création de revenus en plus d'offrir des sources d'emploi et de<br />

formation.<br />

- réplicabilité: les possibilités de fonctionnement de ce schéma sont limitées dans la<br />

mesure où elles dépendent de la capacité du financement du groupe d'appui c'est à<br />

dire du TAP. C'est pourquoi le système doit donner lieu à une épargne collective qui,<br />

en plus de permettre la reconnaissance du groupe comme sujet de crédit, doit aussi<br />

favoriser la création d'un système d'épargne-financement. Pour cela il faudrait<br />

institutionnaliser le TAP et chercher les articulations possibles avec le FONHAPO.<br />

- Aspects innovants remarquables du projet : passage d'une modalité de tanda à une<br />

modalité d'épargne ; souplesse de l'épargne qui permet une redistribution des<br />

ressources et mise en place d'un centre de matériaux qui permet de faire des<br />

économies d'échelles.<br />

- commentaires: il y a une ambiguïté du crédit tournant retenu dans le montage : on ne<br />

calcule pas la dépréciation de l'argent par l'inflation et on ne comptabilise pas les<br />

intérêts à payer ou a gagner.<br />

91


IV - PROJET CNVI - MEXIQUE<br />

Pays:<br />

Lieu:<br />

Champ d’action<br />

Maître d’ouvrage<br />

Assistance à maîtrise d’ouvrage<br />

Partenaires locaux<br />

Partenaires financiers<br />

Mexique<br />

Barrio de Los Angeles(colonia Guerrero), Mexico.<br />

captation et gestion de l'épargne populaire destinée<br />

à l'acquisition de terrains à bâtir<br />

coopérative Guerrero<br />

l'ONG mexicaine CENVI<br />

soutien financier de la coopération française (PSH-<br />

Programme solidarité habitat - et CIMADE)<br />

I/ DONNES DE BASE SUR LE PAYS<br />

Population urbaine : 74% de la population totale<br />

Densité urbaine : 45 hab/km 2<br />

Population économiquement active : 38%<br />

PIB: US $ 282,5 milliards<br />

PNB/hab : 3.080 $<br />

Contexte du projet<br />

- Situation globale du logement : pendant les dernières décennies, la multiplication des<br />

établissements humains irréguliers à la périphérie de la ville fut la solution pour les<br />

populations défavorisées. Aujourd'hui cette pratique est en crise puisque la ville de<br />

Mexico tente de freiner la croissance urbaine, en invoquant la protection de<br />

l'environnement péri-urbain et la réduction des coûts d'urbanisation. La densification du<br />

tissu urbain existant reste à présent la seule alternative pour les plus démunis.<br />

- Accès des secteurs sociaux à l'habitat : dans ce contexte, l'accès au logement pour les<br />

secteurs populaires passe d'abord par le droit d'accès au sol. Ce problème est passé<br />

relativement inaperçu dans les années 80, les autorités fermant les yeux devant les<br />

invasions permanentes dans la grande périphérie de la ville. Le problème devient<br />

maintenant crucial. Il n'existe aucune politique destinée à promouvoir une offre de<br />

terrains dont le prix serait accessible aux familles en quête de logements. Les<br />

organisations sociales sont donc obligées de chercher des terrains sur un marché<br />

spéculatif, sans disposer d'une information suffisante sur le marché immobilier, sur le<br />

plan de l'occupation des sols, ni sur la nature du sous-sol des terrains.<br />

- Politique de financement du logement : Parmi les principaux dispositifs publics ou<br />

parapublics ou parapublics de production de logements, signalons :<br />

- le système de collecte de cotisation salariale des travailleurs des secteurs public et<br />

privé, dont les fonds sont administrés par INFONAVIT qui produit 29% des<br />

logements du secteur public,<br />

- le système commercial bancaire FOVI-BANCA QUI PRO<strong>DU</strong>IT 33% des logements<br />

publics,<br />

- le système FONHAPO. C'est une banque de logement populaire qui produit 15%<br />

des logements publics. Elle a pour objectif d'octroyer des crédits-logements<br />

collectifs aux secteurs sociaux organisés afin de renforcer la participation populaire.<br />

- Production globale de logements :<br />

Les trois dispositifs contribuent pour un peu plus de 20% du total des logements<br />

mexicains. Le secteur privé réalise 28% du total des logements et les systèmes dits<br />

92


informels plus de 50%. Les déficiences structurelles des interventions formelles sur les<br />

mécanismes de production et la faiblesse des mécanismes d'accès au logement pour les<br />

plus démunis donne lieu à l'émergence de diverses pratiques sociales supplétives<br />

(quelquefois complémentaires) à l'action de l'Etat. C'est le cas du PAM.<br />

II/ LE PROJET<br />

1) Aspects généraux<br />

- Historique: en 1998 l'ONG mexicaine CENVI, association de professionnels qui<br />

travaillent avec des organisations locales de la ville de Mexico, élabore une expérience<br />

pilote de captation et de gestion de l'épargne populaire destinée à l'acquisition de<br />

terrains à bâtir à Barrio de Los Angeles(colonia Guerrero), quartier de Mexico.<br />

- Caractéristiques du projet : le projet "caisse mutuelle d'épargne et de crédit pour l'achat<br />

de terrains" a pour objectif de soutenir la Coopérative de logements Guerrero (qui,<br />

depuis sa création en 1976, a déjà mené un certain nombre d'opérations de promotion<br />

immobilière) en vue d'acquérir un terrain pour construire une cinquantaine de<br />

logements sociaux. Le projet a reçu le soutien financier de la coopération française<br />

(PSH- Programme solidarité habitat - et CIMADE), à travers le GRET (opérateur<br />

français), afin de constituer un fonds de roulement. Ce soutien financier s'est doublé<br />

d'un appui administratif, technologique, juridique et de gestion de la caisse mutuelle<br />

par CENVI. Les membres de la coopérative se sont regroupés en commissions pour<br />

rechercher des terrains, connaître les formalités légales et techniques et fixer le<br />

montant de l'apport nécessaire à l'achat.<br />

2) Crédits:<br />

- Conditions préalables : 70% des bénéficiaires sont des membres de la coopérative<br />

Guerrero, les autres sont des amis ou des parents des membres. La plupart d'entre<br />

eux ont vécu à la colonia Guerrero mais ont dû partir (expulsions, loyers de plus en<br />

plus chers, tremblement de terre de 1985). Les trois quarts des 106 ménages<br />

concernés par l'achat des deux premiers terrains disposent de 1.400 francs de revenus<br />

moyens mensuels.<br />

- Garanties: la coopérative est la garantie du crédit.<br />

- Ingénierie: le montant initial du fonds de roulement (300.000 francs) a été canalisé par<br />

la CIMADE. Ce fonds, mis en place par la coopération française, est complété d'un<br />

montant équivalent apporté par les familles bénéficiaires, à titre d'apport personnel.<br />

3) Collecte des ressources<br />

- Epargne préalable : la coopérative dispose d'une épargne constituée par les membres<br />

avant la mise en place du Fonds.<br />

- Mobilisation des ressources : le Fonds a encouragé la mobilisation des ressources des<br />

familles en complément de l'épargne préalable. L'apport initial extérieur permet donc<br />

de démarrer un fonds de roulement qui devra fonctionner de manière indépendante<br />

après remboursement : la coopérative paye le terrain avec le Fonds et les ressources<br />

mobilisées par les familles bénéficiaires, et ces dernières remboursent à la coopérative<br />

le montant du Fonds.<br />

- gestion des ressources : Un membre qui désire quitter la coopérative doit attendre<br />

qu'un autre membre prenne sa place sur les mêmes bases économiques que lui, pour<br />

qu'il puisse récupérer son argent.<br />

93


4) Gestion et recouvrement du crédit :<br />

- octroi et suivi de l'emprunt : pour avoir accès au crédit, le bénéficiaire doit avoir<br />

mobilisé des ressources propres (y compris son épargne préalable), d'un montant égal<br />

au montant du crédit. Ce crédit correspondait à 176 salaires minimums quotidiens au<br />

moment de la première étape. Le bénéficiaire signe un contrat avec la coopérative<br />

dans lequel il accepte les conditions du crédit et décide de la manière dont il le<br />

remboursera.<br />

- réglementation éventuelle : la coopérative a fixé trois mois comme maximum de retard<br />

de paiement. Passé ce délai, le membre est expulsé et un autre prend sa place.<br />

- recouvrements: les familles remboursent le Fonds à la coopérative moins d'un an<br />

après l'achat du terrain et selon différentes formules choisies par les bénéficiaires,<br />

indexées sur le montant du salaire minimum.<br />

• Première option : paiement mensuel de la totalité du crédit dans les trois mois<br />

suivant l'achat du terrain, sur la base du salaire minimum en vigueur à l'achat du<br />

terrain. Si le bénéficiaire change d'option, le versement est calculé en fonction du<br />

salaire minimum en vigueur au moment du paiement.<br />

• Deuxième option : paiement dans les 10 mois suivant l'achat du terrain, soit 17,6<br />

salaires minimum quotidiens par mois, sur la base du salaire minimum quotidien en<br />

vigueur au moment de chaque versement.<br />

• Troisième option : Le bénéficiaire fait un premier versement (maximum de ses<br />

capacités financières) dans le mois suivant l'achat du terrain. Le reste du crédit est<br />

payé les neuf mois suivants, sur la base du salaire minimum en vigueur au moment<br />

du premier versement. Les membres payent en dernier lieu 66$ chacun pour<br />

couvrir différentes taxes (impôts, notaire) et frais de documentation.<br />

- Réinvestissement: les remboursements doivent permettre de reconstituer le Fonds de<br />

roulement et de répéter l'opération d'achat de terrains au profit de nouveaux<br />

bénéficiaires.<br />

5) Bilan<br />

- Evaluation: Plus de la moitié des bénéficiaires ont changé de mode de remboursement<br />

durant la période. La majorité des remboursements était irrégulière, à la fois dans la<br />

forme de remboursement et dans la quantité. 19 membres ont rencontré des difficultés<br />

de remboursement qui ont été résolues de manière interne. La première étape (1989-<br />

1990) de fonctionnement du fonds de roulement a été malgré tout un succès car elle a<br />

permis à la coopérative Guerrero d'acheter deux terrains totalisant 3.500 m 2 et d'en<br />

faire bénéficier plus de 100 familles, et non pas 50 comme prévu initialement.<br />

L'intégralité du Fonds a été récupérée. Une possible décapitalisation du Fonds relative<br />

à l'inflation devrait être comprise comme le coût de l'innovation.<br />

- Réplicabilité: La capacité de mobiliser des ressources, à un moment précis, pour saisir<br />

une opportunité d'achat, a permis le succès de l'action. La pérennisation est liée à la<br />

capacité de garantie des remboursements offerte par l'organisation populaire qui joue<br />

le rôle d'interface avec les bénéficiaires. Son élargissement suppose une ingénierie<br />

financière complexe difficilement pensable sans l'implication d'une structure bancaire<br />

et la définition d'accords institutionnels, ce qui, à l'heure actuelle, semble achopper, et<br />

notamment en raison d'une absence de volonté politique.<br />

94


- Aspects innovants remarquables : collectivisation du crédit donnant lieu à une<br />

interdépendance des bénéficiaires.<br />

- Commentaires: Les systèmes publics de financement du logement permettent<br />

d'accéder à des crédits pour la promotion immobilière et non pas pour la promotion<br />

foncière. D'où l'intérêt du projet.<br />

95


V - PROJET D'AMELIORATION D'UN QUARTIER A<br />

HO CHI MINH VILLE (ARCI-CEE)<br />

Pays:<br />

Lieu<br />

Champ d’action<br />

Maître d’ouvrage<br />

Assistance à maîtrise d’ouvrage<br />

Partenaires locaux<br />

Partenaires financiers<br />

Viêt-nam<br />

Ho Chi Minh-Ville<br />

amélioration des infrastructures et formation des<br />

jeunes<br />

ARCI, ONG française<br />

municipalité de Ho Chi Minh-Ville<br />

CEE<br />

I/ DONNES DE BASE SUR LE PAYS<br />

Population urbaine : 20%<br />

Densité urbaine : 209 hab/km 2<br />

Population économiquement active : 49% (dont 67% dans l'agriculture, 12% dans<br />

l'industrie, et 21% dans le tertiaire)<br />

PNB/hab. : 200$<br />

Contexte du projet<br />

- Situation globale du logement : le déficit en infrastructures et en logements est<br />

considérable. Les loyers sont fixés sur la base d'un pourcentage du revenu (1 à 3%) ou<br />

en fonction de la surface mais ils restent symboliques. Ils ne permettent donc pas aux<br />

organismes chargés de la gestion du parc immobilier d'en assurer l'entretien minimal.<br />

On peut ainsi constater un état de dégradation avancé des immeubles construits<br />

depuis 5 ans.<br />

- Production globale du logement : L'Etat reste encore le maître d'ouvrage le plus<br />

important (il produit 80% des logements), mais il ne construit que dans les grandes<br />

villes. Le secteur privé contribue officiellement pour 20% environ des logements, mais<br />

sa contribution est en réalité beaucoup plus élevée, compte tenu des constructions<br />

illégales (les 2/3 des constructions neuves privées n'auraient fait l'objet d'aucune<br />

autorisation). On estime qu'il faudra construire 1,5 millions de logement au cours des<br />

10 prochaines années pour pallier la croissance urbaine et absorber le déficit.<br />

- Politiques de financement du logement : le gouvernent a reconnu la nécessité d'une<br />

réforme du logement. La priorité accordée au financement du logement a été mise en<br />

exergue dans le cadre de la réforme économique impulsée en 1986. Il s'agit<br />

maintenant d'accroître l'investissement public dans le domaine du logement, de<br />

favoriser l'investissement privé et la production de matériaux à des prix abordables, de<br />

développer la propriété et le salariat.<br />

- Accès des secteurs sociaux à l'habitat : Les logements sont occupés le plus souvent<br />

par deux, voire trois ou quatre générations. L'attribution d'un logement dépend de<br />

critères variés (ancien combattant, militant d'organisations politiques, etc.). L'attente<br />

peut durer de deux à dix ans. E outre, l'accès au crédit institutionnel ou bancaire pour<br />

investir dans la construction ou l'acquisition d'un logement est rare. Les crédits sont le<br />

plus souvent informels et chers (10 à 15% d'intérêt par mois).<br />

96


II/ LE PROJET<br />

1) Aspects généraux :<br />

Historique: la plupart des taudis à Ho Chi Minh-Ville sont installés au bord de l'eau et sur<br />

les marécages, avec tous les problèmes (d'insalubrité notamment) que cela engendre<br />

quand les infrastructures sont inexistantes. L'action de la municipalité en direction de ces<br />

quartiers ne résout pas le problème des pauvres, dans la mesure où les opérations de<br />

réhabilitation donnent le plus souvent lieu à des expulsions sans solutions, les plus<br />

démunis n'ayant pas les moyens de se reloger. Après avoir négocié avec les autorités<br />

locales, l'ARCI, ONG française, a mis en place un projet global d'amélioration du cadre de<br />

vie dans une partie du quatrième arrondissement de la ville, qui compte environ 800<br />

habitants. L'objectif est de mettre en place un système qui permette une amélioration des<br />

infrastructures et une formation des jeunes du quartier.<br />

- Caractéristiques du projet : Il comporte quatre volets :<br />

• un volet "amélioration des infrastructures" qui était le volet le plus important<br />

(installation d'égouts pour drainer les eaux stagnantes, assèchement des mares et<br />

construction de petites places en solide). Les travaux ont été réalisés par des apprentis,<br />

dans le cadre d'un stage de "qualification professionnelle".<br />

• un volet "crédits" alimenté par un fonds de roulement de 29.000 Ecus (180.000 F)<br />

: par exemple crédits pour lancer une activité productive ; crédits pour améliorer<br />

l'habitat (comme il n'y a pas de terrains à construire, ils servent essentiellement à<br />

l'achat de matériaux pour rénover les maisons. Les ménages bénéficiaires travaillent le<br />

plus souvent eux-mêmes ou peuvent employer quelqu'un pour effectuer cette<br />

rénovation).<br />

• un volet "formation" : cours de couture, de maçonnerie, de menuiserie; "cours de<br />

tendresse", c'est à dire des cours du soir pour enfants non scolarisés.<br />

• un fonds pour construire un petit local pour le quartier.<br />

1) Crédits<br />

- Conditions préalables: Le système repose sur une organisation autogérée. Le groupe<br />

(4 à 12 personnes en moyenne), choisit librement ses membres et ses responsables.<br />

Les bénéficiaires des crédits sont essentiellement des femmes. Elles doivent proposer<br />

individuellement une demande argumentée. Les crédits sont octroyés à ces groupes<br />

solidaires, chaque membre se portant garant de l'autre.<br />

- Garanties: Avant d'emprunter, les bénéficiaires doivent faire la preuve de leur bonne foi<br />

et leur capacité de remboursement par une épargne préalable quotidienne ou<br />

hebdomadaire, quatre semaines avant l'obtention du premier crédit. Le montant de<br />

cette épargne varie entre les différents groupes, en fonction de leur nombre, de leur<br />

composition et des objectifs de chacun des membres.<br />

- Ingénierie financière: Tous les crédits sont collectés puis redistribués individuellement.<br />

Comme les crédits-logements sont improductifs, l'intérêt est plus bas (1% par mois)<br />

que les autres crédits (2% par mois). Les crédits-logements ont un montant très<br />

variable (de 5O à 200 $), sachant que l'inflation est d'environ 12% par an.<br />

2) Collecte des ressources pour les crédits<br />

- Mobilisation des ressources : Un fonds de roulement financé par la CEE, a été mis en<br />

place par l'ARCI.<br />

- Gestion des ressources : La première année, le fonds de roulement a été géré par<br />

l'équipe ARCI, en relation avec un comptable local, en attendant que la population<br />

s'organise.<br />

97


3) Gestion et recouvrement des crédits<br />

- Octroi et suivi de l'emprunt : l'ARCI a embauché quatre travailleurs sociaux durant<br />

l'opération, recommandés par l'université. L'une d'entre elles s'occupe uniquement du<br />

volet "crédits". C'est elle qui, aidée du comptable, décide si les groupes sont viables et<br />

les individus fiables, et cela en relation avec un membre, influent dans le quartier, de<br />

l'Union des Femmes.<br />

- Réglementations éventuelles : les bénéficiaires doivent rembourser leur créditlogement<br />

en moins de 6 mois, mais le délai exact est fixé selon le montant du<br />

remboursement.<br />

- Recouvrements: les recouvrements sont collectifs et les remboursements quotidiens.<br />

L'argent est conservé par un responsable du groupe avec tenue dans un livre de<br />

compte. Le taux de recouvrement s'élève à 80%.<br />

- Réinvestissements: le remboursement des intérêts sert pour un tiers à couvrir les frais<br />

financiers, pour un autre tiers à donner une rétribution aux responsables, et pour le<br />

dernier tiers à alimenter un fonds de solidarité, disponible en cas de grosses difficultés<br />

d'un bénéficiaire.<br />

4) Bilan<br />

- Impact social et économique : la première phase de l'opération a commencé en<br />

décembre 1993 et s'est achevée en février 1994, environ 70 personnes avaient reçu un<br />

crédit. Les premiers résultats sont très positifs : Seules deux ou trois bénéficiaires<br />

n'avaient pas remboursé leur crédit. L'ARCI souhaite élargir l'expérience à l'aide de<br />

fonds européens. En effet, le quartier a totalement changé de visage grâce à<br />

l'aménagement des égouts dans les ruelles et la réhabilitation des maisons.<br />

- Réplicabilité: l'idée d'une autonomisation du projet est encore impossible. Les<br />

subventions externes sont encore indispensables.<br />

- Aspects innovants remarquables : L'idée d'un urbanisme alternatif avec la participation<br />

des gens, leur consentement et leur travail, constitue l'un des ressorts de l'opération.<br />

- Commentaires: Le système proposé demande un travail d'enquête préalable, un suivi<br />

et la formation des responsables, mais il repose sur des bases simples de gestion<br />

économiques. L'organisation collective du système permet une prise en charge et une<br />

responsabilisation plus fortes.<br />

98


VI - CREDIT UNION KARTINI (CUK)<br />

INDONESIE<br />

Pays<br />

Lieu<br />

Champ d’action<br />

Maître d’ouvrage<br />

Assistance à maîtrise d’ouvrage<br />

Partenaires locaux<br />

Partenaires financiers<br />

Indonésie<br />

Kaliurang<br />

Crédits-logements<br />

Association "Crédit Union Kartini"<br />

Planning Familial<br />

Coordination Nationale des coopératives de Crédits<br />

I/ DONNES DE BASE SUR LE PAYS<br />

1) Indicateurs<br />

- Population urbaine : 30%<br />

- Densité de population: 690 hab/km 2 .<br />

- Population économiquement active 43% (dont 56% dans l'agriculture, 14% dans<br />

l'industrie et 30% dans le<br />

tertiaire).<br />

- Rapport des 20% les plus riches aux 20% les plus pauvres : 4,9<br />

- PIB (US$) :116,5 milliards<br />

- PNB par habitant (US$) : 610<br />

2) Secteur habitat<br />

- Situation globale du logement : En Indonésie, plus de 50% des logements sont<br />

dégradés. Moins du tiers de la population a accès au réseau d'eau potable et le<br />

nombre de personnes bénéficiaires d'un système d'assainissement ou de collecte<br />

d'ordures ménagères est encore plus restreint. D'ici l'an 2000, il sera nécessaire de<br />

construire 1,6 million de nouveaux logements par an pour absorber les déficits.<br />

- Production globale de logements Le secteur privé construit des logements de haut<br />

standing. Le secteur public et quelques entrepreneurs privés produisent des<br />

logements à coût moyen qui reste néanmoins inaccessibles à plus de 60% de la<br />

population. Plus de 90% des logements urbains sont construits par les familles ellesmêmes<br />

qui louent ponctuellement les services d'ouvriers.<br />

- Accès des secteurs sociaux à l'habitat : Il existe de nombreux obstacles dus au<br />

système de propriété relativement complexes et à la spéculation foncière. En effet,<br />

les lois foncières sont confuses dans la mesure où différents droits coexistent (la<br />

propriété, les droits d'usage et d'exploitation). De fait, les ménages à bas revenus<br />

hésitent à investir dans le logement en raison d'un certain manque de clarté de leurs<br />

droits en tant que propriétaires. La propriété de 80% des logements urbains serait<br />

revendiquée par le biais des droits d'usage et non pas des actes de propriété ou<br />

autres enregistrements officiels.<br />

- Politiques de financement du logement : Des programmes pour l'amélioration des<br />

bidonvilles (KIP et KSP) ont tenté de résoudre les déficits. Mais le secteur informel<br />

99


épond à 80% de la demande de densification des logements des ménages à bas<br />

revenus.<br />

II/ LE PROJET<br />

1) Aspects généraux<br />

- Historique : le Crédit Union Kartini (CUK) a été mis en place en 1982 à Kaliurang.<br />

zone de montagnes touristique, par d'anciens membres d'une association de femmes<br />

qui pratiquait l'épargne rotative ("arisan"). Conscients de l'importance de l'épargne,<br />

les membres de cette association ont mis en place le Crédit Union Kartini avec l'aide<br />

du Planning Familial et de la Coordination Nationale des coopératives de Crédits<br />

(BK3I). 90% des membres de CUK sont des femmes de Kaliurang et de ses<br />

environs, issues de milieux défavorisés et dont le niveau éducatif est bas.<br />

- Caractéristiques du projet : CUK a pour objectif de favoriser le développement de<br />

l'esprit coopératif et d'une conscience économique, dans le but d'améliorer le niveau<br />

de vie des ménages dont les revenus sont instables. Les principales activités de la<br />

coopérative consistent à récolter, auprès de ses membres, des fonds qui seront<br />

redistribués sous forme de crédit à ceux qui sont dans le besoin. Pour mener à bien<br />

cette mission, trois conditions préalables ont été remplies :<br />

* L'organisation de CUK est très stricte : un Conseil d'Administration composé d'un<br />

Conseil Exécutif. d'un Comité de Crédit et d'un Comité Educatif. Tout représentant de<br />

ces organes qui manque plus de trois fois les réunions, sans raison acceptable, est<br />

immédiatement remplacé. Quant aux membre de CUK, ils se rencontrent<br />

annuellement. Les décisions prises lors de cette rencontre tentent de faire l'unanimité<br />

ou sont votées à la majorité.<br />

* 40 membres du Conseil d'Administration ont été formés aux notions de base des<br />

coopératives de crédits, telles la gestion, la direction des affaires, l'audit, l'analyse<br />

financière, le plan, la formation d'instructeurs.<br />

* L'action est globale et systémique : les crédits concernent le logement, l'entreprise,<br />

l'éducation et le social.<br />

2) Crédits-logements<br />

- Conditions préalables : Pour devenir membre de CUK, il faut cotiser au préalable<br />

250 roupies, puis faire un dépôt de 2.000 roupies, enfin épargner 500 roupies par<br />

mois.<br />

- Ingénierie financière : "Foster Parent Plan" et BK3I offrent une assistance<br />

technique pour la tenue des comptes et la gestion. Il existe 2 types de Créditslogements<br />

:<br />

* crédits pour la réparation ou l'amélioration des logements : il représentait 24% du<br />

total du crédit en 1988,<br />

* crédits pour la construction et l'achat de parcelles. Ils ont augmenté en 1987, après<br />

que CUK a reçu une subvention du Département d'Etat au Logement.<br />

Le montant du prêt ne peut pas dépasser plus de trois fois la somme épargnée par<br />

l'emprunteur. En 1988, le total des crédits s'élevait à 27 millions de roupies pour 124<br />

membres, le crédit moyen étant de 220.000 roupies.<br />

3) Collecte des ressources<br />

- Epargne : L'opération ayant lieu dans une zone touristique, les bénéficiaires ont la<br />

possibilité d'accroître leurs ressources et donc d'épargner. Les membres de CUK<br />

100


doivent fournir une épargne préalable obligatoire qui est la condition de l'obtention<br />

des crédits. Toute épargne supérieure au montant imposé par CUK est considérée<br />

comme volontaire. Néanmoins, l'épargne personnelle ne doit pas dépasser 20% de<br />

l'épargne totale de tous les membres. La rémunération de ces dépôts s'élève à 10%<br />

par an. Ce taux est relativement bas mais les membres ont la possibilité de se<br />

partager les bénéfices. En 1988, le montant total de l'épargne générée par les<br />

membres de CUK s'élevait à 20 millions de roupies.<br />

- Mobilisation des ressources : A l'exception de l'assistance technique (aide à la<br />

tenue des livres de compte et à la gestion) accordée par le Planning Familial et le<br />

BK3I, et d'une subvention de 1.500.000 roupies pour la réparation des maisons des<br />

membres de CUK octroyée en 1985 par le département d'Etat au Logement, CUK n'a<br />

pas reçu d'autres aides financières. Le capital initial en 1982 était de 259.000 roupies<br />

et à la fin 1988, il s’élevait à environ 40 millions de roupies.<br />

4) Gestion et recouvrement du crédit<br />

- Octroi et suivi de l'emprunt : l'échéance du remboursement varie en fonction du<br />

montant du prêt mais plus le délai de grâce est grand, plus les versements sont<br />

élevés<br />

* crédits entre 5.000 et 50.000 roupies cinq versements mensuels maximum<br />

* crédits entre 60.000 et 150.000 roupies dix versements mensuels maximum<br />

* crédits entre 200.000 et 750.000 roupies 15 versements mensuels maximum.<br />

- Recouvrements : remboursements mensuels indexés à 4% (dont 1% pour les<br />

coûts de gestion). Ce taux est élevé que celui d'une banque (24% par an), mais le<br />

même que celui pratiqué par les coopératives de crédit. Le taux d'impayé reste très<br />

bas car les sanctions en cas de retard sont sévères (1% de l'encours du prêt pour<br />

chaque mois de retard).<br />

- Réinvestissements : la politique de prêts de CUK a changé après 1986, puisque<br />

les demandes de crédits n’augmentaient pas, et ce malgré l'existence de fonds<br />

disponibles. CUK a donc étendu ses crédits, à des taux plus élevés, à des<br />

fonctionnaires non membres de la coopérative. A partir de là, la demande de crédits<br />

s'est accrue de 75%<br />

5) Bilan<br />

- lmpact social et économique : entre 1982 et 1988, le capital de CUK est passé de<br />

259.000 roupies à 40 millions de roupies. La formation administrative conduite par la<br />

coordination régionale des coopératives de crédits (BK3D) a grandement contribué<br />

au progrès de CUK. La réussite de CUK a attiré d'autres membres, faisant<br />

concurrence aux autres coopératives de crédits présentes dans les environs. Mais il<br />

est prévu de faire fusionner trois coopératives de crédits en une seule.<br />

- Réplicabilité : elle dépend de l'existence d'une dynamique locale permettant la<br />

création de ressources.<br />

- Aspects innovants remarquables : Création d'une organisation communautaire à la<br />

base, fondée sur les femmes. dont la structure et la légitimité favorise le succès.<br />

101


VII - PROGRAMME DE DEVELOPPEMENT <strong>DU</strong> <strong>LOGEMENT</strong><br />

KHUDA KI BASTI<br />

PAKISTAN<br />

Pays<br />

Lieu<br />

Champ d’action<br />

Maître d’ouvrage<br />

Pakistan<br />

Hyderabad<br />

accès au foncier<br />

Hyderabad Development Authority<br />

I/ DONNEES SUR LE PAYS<br />

1) Indicateurs<br />

- Population urbaine : 33%<br />

- Densité de population :162 hab/km 2 .<br />

- Main d’œuvre : 28% (dont 47% dans l’agriculture, 20% dans l'industrie et 33% dans le<br />

tertiaire).<br />

- Part du revenu : rapport des 20% les plus riches aux 20% les plus pauvres entre 1980 et<br />

1991 : 4,7<br />

- PIB (US$) 49,9 milliards.<br />

- PNB/hab. (US$) : 400<br />

2) Secteur habitat<br />

- Situation globale du logements : Le secteur du logement est caractérisé par un manque<br />

considérable de logements, et cela en raison d'une augmentation vertigineuse des prix de la<br />

terre, de l'absence de ressources pour les infrastructures et la production de nouveaux<br />

logements, du manque d'entretien et de réhabilitation du parc existant, notamment celui des<br />

ménages à bas revenus. Il semblerait que le déficit s'élève à 3 millions d'unités de<br />

logements.<br />

- Production globale de logements : La construction de logements en zones urbaines a reçu<br />

des crédits institutionnels et a fait l'objet de projets de développement. Mais non seulement<br />

ces interventions sont toujours restées à une échelle très modeste, mais ce sont<br />

essentiellement les ménages à revenus moyens qui en ont le plus bénéficié.<br />

- Accès des secteurs sociaux à l'habitat : L'absence d'accès au crédit, les tendances<br />

inflationnistes. le manque d'encouragement à l'épargne, les matériaux de constructions<br />

archaïques. le poids administratif, etc., sont autant de goulots d'étranglement pour l'accès<br />

des ménages à faibles revenus au logement.<br />

- Politiques de financement du logement : 66% des besoins financiers en logements sont<br />

couverts par le secteur informel et le reste par différents types d'institutions. Celles qui<br />

fournissent le plus souvent des crédits-logement sont les banques commerciales, la HBFC<br />

(House Building Finance Corporation), des coopératives et certains services ministériels à<br />

leurs fonctionnaires. Dans le cadre de la politique nationale en faveur du logement, il a été<br />

décidé d'encourager les investissements publics et privés dans ce secteur, mais les<br />

performances accomplies n'ont pas été à la hauteurs des espérances. Les difficultés<br />

d'acquisition de terrains, les limitations de crédits et les rigidités administratives ont en effet<br />

accru le fossé entre l'offre et la demande.<br />

102


II/ LE PROJET<br />

1) Aspects généraux<br />

- Historique : Khuda Basti (KKB), c’est à dire la colonie de Dieu, est un programme de<br />

développement de l'habitat mis en place en 1986. C'est une tentative pionnière d'une<br />

collectivité locale, la HDA (Hyderabad Development Authority), pour résoudre le problème du<br />

logement des couches les plus démunies de la population. Ce programme est développé sur<br />

un emplacement de plus de 2.500 hectares, soit 70.000 parcelles d'environ 80 m2 , Situé<br />

près de Hyderabad Tall Plaza à Kotri.<br />

- Caractéristiques du projet : Le projet a pour objectif de procurer aux sans abris des titres<br />

de propriété pour des parcelles résidentielles immédiatement constructibles, avec un<br />

paiement comptant minimum accessible à des familles à faibles revenus. Le programme est<br />

fondé sur la participation communautaire organisée en îlots (200maisons). La HDA ouvre un<br />

dialogue direct avec la communauté, identifie les leaders potentiels qui seront chargés de<br />

motiver et mobiliser les résidents.<br />

La construction des maison est plus flexible. Elle doit commencer immédiatement après<br />

l'octroi de la parcelle. HDA fournit différents types de plans de maisons et laisse aux<br />

ménages la possibilité de concevoir eux-mêmes leur plan et de choisir leurs matériaux. Les<br />

structures peuvent être améliorées, modifiées ou agrandies Si les capacités financières de la<br />

famille s'améliorent.<br />

2) Crédits<br />

- Conditions préalables: Les bénéficiaires sont des familles gagnant environ 50 US$ par<br />

mois (1.000 roupies) et ayant un besoin urgent de logement. Les candidats sélectionnés sont<br />

hébergés dans 2 types de zones d'accueil soit un terrain libre où la famille peut installer un<br />

logement de fortune, soit une maison en béton de deux pièces avec latrines et robinet d'eau<br />

intérieur. Les familles doivent rester au moins une semaine dans cette zone d'accueil,<br />

période durant laquelle la IIDA vérifie leur éligibilité A partir de là, la parcelle de 80 m 2 , qui<br />

comprend à la base un accès à l'eau potable et des latrines, est attribuée aux familles<br />

éligibles.<br />

- Garantie: Les responsables de la communauté sont les garants de leurs<br />

coreligionnaires.<br />

- Ingénierie financière: Les bénéficiaires doivent faire un premier versement fixé à 50<br />

US$ (1.000 roupies) destiné à couvrir les premières installations (eau et latrines). Ils doivent<br />

également mobiliser une épargne préalable sous forme d'un versement mensuel régulier, fixé<br />

en fonction des possibilités des bénéficiaires (de 2,50 à 5 US$, soit 50 à 100 roupies),<br />

jusqu’à couvrir le coût total de la parcelle, c'est-à-dire 450 US$ (9.000 roupies). Enfin, ils<br />

doivent contribuer à la mise en place des services en fonction des niveaux et types de<br />

services auxquels ils donnent leur préférence et leur priorité.<br />

3) Collecte des ressources.<br />

- Mobilisation des ressources : Elle se fait à trois niveaux<br />

* Les résidents sont fortement encouragés à installer eux-mêmes les infrastructures<br />

nécessaires à leur logement, notamment les Sanitaires, le système des ordures, l'électricité<br />

et même la construction de routes. Le développement des services est confié à la main<br />

d’œuvre qualifiée de la communauté, ce qui permet de réaliser des économies, une meilleure<br />

103


exécution du travail et d'offrir du travail aux résidents.<br />

* La promotion de l'auto-emploi et la création de revenus font partie de l'approche du<br />

projet. Un Programme d'Entreprises Familiales a été lancé. HDA a obtenu un important crédit<br />

de 0,25 million USS (5 millions de roupies) de la HBFC pour financer les programmes de<br />

créations de revenus. Les prêts sont octroyés aux organisations des îlots qui les<br />

redistribuent, après s'être assuré des besoins et des capacités de remboursements de<br />

chaque candidat. Les prêts vont de 50 à 500 USS (1.000 à 20.000 roupies) mais peuvent<br />

être rehaussés si les remboursements se font correctement.<br />

* En plus de l'implication d'agences spécialisées dans les infrastructures et les services<br />

(fourniture en eau, égouts. drainage, électricité, etc.), plusieurs autres agences ont contribué<br />

de manière significative aux autres activités transports publics, écoles, dispensaires, etc.<br />

- Gestion de l'épargne Le versement des mensualités est effectué de préférence sur un<br />

compte en banque, géré conjointement par des représentants désignés par les résidents et<br />

le personnel de la HDA.<br />

4) Gestion et recouvrement du crédit.<br />

- Octroi et suivi de l'emprunt : Comptabilité, responsabilité de l'entretien des services,<br />

action contre les mauvais payeurs et l'absentéisme sont gérés au niveau de chaque îlot.<br />

- Recouvrements : Le taux de recouvrement des crédits-logement dépasse les 95%.<br />

- Réinvestissements : Les remboursements permettent l'octroi de nouveaux crédits,<br />

destinés au logement ou aux activités créatrices de revenus.<br />

5) Bilan.<br />

- Impact économique et social : En 1989, 3.826 parcelles avaient été attribuées, dont<br />

2.094 étaient déjà construites. Quant au Programme d'Entreprises Familiales, il avait généré<br />

117 emplois.<br />

- Réplicabilité : Elle suppose un travail d'approche et une connaissance excellente des<br />

populations. Elle suppose également une mobilisation et une organisation extraordinaire des<br />

bénéficiaires.<br />

- Aspects innovants remarquables : KKB représente une approche innovante du<br />

financement du logement pour les plus démunis, dans la mesure où le poids de la prise en<br />

charge financière est quasiment nul pour l'Etat. Selon HDA le Plan est même complètement<br />

autofinancé.<br />

104


VIII - ORANGI PILOT PROJECT PROGRAMS (OPP)<br />

PAKISTAN<br />

Pays<br />

Lieu<br />

Champ d’action<br />

Maître d’ouvrage<br />

Assistance à maîtrise d’ouvrage<br />

Partenaires financiers<br />

Pakistan<br />

Quartier d'Orangi à Karachi<br />

accès au foncier, amélioration du logement<br />

L'organisation communautaire<br />

l'ONG "OPP"<br />

fondation BCCI<br />

I / DONNEES SUR LE PAYS<br />

1) Indicateurs<br />

- Population urbaine : 33%<br />

- Densité de population :162 hab/krn2.<br />

- Main d’œuvre : 28% (dont 47% dans l'agriculture, 20% dans l'industrie et 33% dans le<br />

tertiaire).<br />

- Part du revenu : rapport des 20% les plus riches aux 20% les plus pauvres entre 1980 et<br />

1991: 4,7<br />

- PIB (US$) : 49,9 milliards.<br />

- PNB/hab. (US$) : 400<br />

2) Secteur habitat<br />

- Situation globale du logements : Le secteur du logement est caractérisé par un manque<br />

considérable de logements, et cela en raison d'une augmentation vertigineuse des prix de la<br />

terre, de l'absence de ressources pour les infrastructures et la production de nouveaux<br />

logements, du manque d'entretien et de réhabilitation du parc existant, notamment celui des<br />

ménages à bas revenus. Il semblerait que le déficit s'élève à 3 millions d'unités de<br />

logements.<br />

- Production globale de logements : La construction de logements en zones urbaines a reçu<br />

des crédits institutionnels et a fait l'objet de projets de développement. Mais non seulement<br />

ces interventions sont toujours restées à une échelle très modeste, mais ce sont<br />

essentiellement les ménages à revenus moyens qui en ont le plus bénéficié.<br />

- Accès des secteurs sociaux à l'habitat : L'absence d'accès au crédit. les tendances<br />

inflationnistes, le manque d'encouragement à l'épargne, les matériaux de constructions<br />

archaïques, le poids administratif, etc., sont autant de goulots d'étranglement pour l'accès<br />

des ménages à faibles revenus au logement.<br />

- Politiques de financement du logement : 66% des besoins financiers en logements sont<br />

couverts par le secteur informel et le reste par différents types d'institutions. Celles qui<br />

fournissent le plus souvent des crédits-logement sont les banques commerciales, la HBFC<br />

(House Building Finance Corporation) qui octroie des crédits hypothécaires, des<br />

coopératives et certains services ministériels à leurs fonctionnaires. Dans le cadre de la<br />

politique nationale en faveur du logement, il a été décidé d'encourager les investissements<br />

publics et privés dans ce secteur, mais les performances accomplies n'ont pas été à la<br />

hauteurs des espérances. Les difficultés d'acquisition de terrains, les limitations de crédits et<br />

les rigidités administratives ont en effet accru le fossé entre l'offre et la demande, dans un<br />

contexte d'accroissement non maîtrisé de la population de Karachi, qui est passée de<br />

400.000 en 1947 à 8 millions de personnes en 1988. En fait. la stratégie gouvernementale<br />

105


actuelle en matière d'habitat pour les plus démunis consiste à leur laisser construire leur<br />

propre logement.<br />

II/ LE PROJET<br />

1) Aspects généraux<br />

- Historique : Malgré une tentative du gouvernement qui a promu dans les années 80 la<br />

notion de Katchi Abadi (zones de squattage) à travers un programme d'amélioration et de<br />

régularisation de l'habitat, les Katchi Abadi restent extrêmement vulnérables et peu<br />

développés : à peine 15% de leurs résidents sont reliés à des réseaux d'égouts. D'où des<br />

problèmes d'hygiène incommensurables. Orangi est le plus grand Katchi Abadi de Karachi. Il<br />

compte environ 800.000 personnes et 95.000 logements que les résidents ont eux-mêmes<br />

construit, avec l'aide du secteur informel. l’Etat et le secteur privé n'étant pas en mesure de<br />

répondre aux besoins de développement des Katchi Abadi (infrastructures, logements, etc.),<br />

un programme visant à améliorer les conditions de vie a été initié à Orangi.<br />

- Caractéristiques du projet : Le programme pilote d'Orangi (OPP) a été mis en place<br />

durant les années 80 par un chercheur pakistanais, le Dr. Akher Hameed Khan, et le<br />

président de la fondation BCCI qui finance le projet. Il s'agit pour eux de promouvoir<br />

l'organisation communautaire, l'action coopérative et de fournir l'aide technique nécessaire à<br />

de telles initiatives. OPP est une ONG et se considère avant tout comme un institut de<br />

recherche, destiné à analyser et résoudre durablement les problèmes notables du quartier.<br />

Pour cela ont été mis en place sept volets :<br />

* un volet sanitaire qui permet aux familles à faibles revenus de construire des<br />

infrastructures modernes (latrines à chasse d'eau et égouts), afin d'enrayer le<br />

développement de maladies comme la typhoïde ou la malaria,<br />

* un volet "logement social" destiné à améliorer la qualité de la construction (les logements<br />

étant la plupart du temps en très mauvais état), tout en formant des maçons à une<br />

technologie peu onéreuse,<br />

* un volet "santé et planning familial" destiné aux femmes illettrées et semi-illettrées,<br />

* un volet "crédits" destinés à de petites entreprises familiales,<br />

* un volet éducatif pour les enfants,<br />

* un volet "création d'un centre de travail pour les femmes<br />

* un volet "développement rural".<br />

2) Crédits<br />

- Conditions préalables : L'organisation communautaire ne doit pas dépasser 40 ménages.<br />

- ingénierie financière : Le projet implique et soutient le secteur informel dans le processus<br />

grâce à une aide technique et de petits crédits à court terme. La réduction des coûts est<br />

obtenue entre autres grâce à la formation de maçons, une simplification des tracés, la<br />

fourniture de plans précis et d'estimations, la prêt d'outils, un accompagnement technique et<br />

social (appui des leaders de quartier, organisation de réunions avec les bénéficiaires,<br />

résolution des conflits, etc.), et des constructions de modèles à l'aide de l’audiovisuel. Sans<br />

cette réduction des coûts, il n'aurait pas été possible de persuader les familles à faibles<br />

revenus de prendre la responsabilité de s'autofinancer, de s'autogérer et de continuer à<br />

entretenir les infrastructures.<br />

Après le succès du volet sanitaire (commencé en 1982), OPP a lancé le volet logements<br />

destiné à améliorer la qualité des logements. OPP s'appuie pour cela sur les Thalla, petites<br />

sociétés privées qui vendent des matériaux de construction et qui contribuent à la<br />

106


construction des logements dans les quartiers pauvres. Les matériaux étant de mauvaise<br />

qualité, il s'agit d'aider à la mécanisation de ces Thalla et à la formation de maçons. En 1993,<br />

OPP avait vendu une trentaine de machines aux Thalla d'Orangi.<br />

3) Collecte des ressources.<br />

- Mobilisation des : L'action d'OPP est financée par la fondation BCCI et d'autres donateurs.<br />

D'autre part. OPP part du principe que les propriétaires des logements ont la volonté et les<br />

compétences pour assumer la responsabilité d'une construction ou de l'entretien des<br />

infrastructures sanitaires (à savoir les latrines dans le logement. les égouts et les<br />

canalisations collectives). Le travail, aidé par OPP, est financé par les résidents avec leur<br />

propre épargne et sous leur responsabilité.<br />

- Gestion des ressources : Les fonds sont gérés par la société OPP.<br />

4) Bilan.<br />

- Impact économique et social : Le projet sanitaire d'OPP a été présenté en 1981. Entre 1982<br />

et 1989, le programme a concerné la moitié d'Orangi. Grâce à la formation de maçons et de<br />

leaders de quartier, le niveau de compétences est élevé à Orangi. Les habitants sont moins<br />

dépendants d'aide technique et sociale. Et la différence avec les autres quartiers populaires<br />

de Karachi est à présent très nette. Il est dès lors plus facile pour la municipalité<br />

d'entreprendre un développement externe des réseaux d'égouts principaux et d'usines de<br />

traitement des eaux.<br />

- Réplicabilité : En 1988, le programme a été répliqué par des agences publiques. des<br />

organisations internationales (UNICEF - Banque Mondiale) et par des ONG dans d'autres<br />

quartiers de Karachi.<br />

107


IX - KAMPUNG IMPROVEMENT PROGRAM (KIP)<br />

INDONESIE<br />

Pays<br />

Lieu<br />

Champ d’action<br />

Assistance à maîtrise d’ouvrage<br />

Partenaires locaux<br />

Partenaires financiers<br />

Indonésie<br />

Kaliurang<br />

Crédits-logements<br />

Association "Crédit Union Kartini"<br />

Planning Familial<br />

Coordination Nationale des coopératives de Crédits<br />

I / DONNEES SUR LE PAYS<br />

1) Indicateurs<br />

- Population urbaine : 30%<br />

- Densité de population :100 habitat/km 2 .<br />

- Population économiquement active : 43% (dont 56% dans l'agriculture, 14% dans<br />

l'industrie et 30% dans le tertiaire).<br />

- Rapport des 20% les plus riches aux 20% les plus pauvres : 4,9<br />

- PIB (US$) :116,5 milliards<br />

- PNB par habitant (US$) : 610<br />

2) Secteur habitat<br />

- Situation globale du logement : En Indonésie, plus de 50% des logements sont<br />

dégradés. Moins du tiers de la population a accès au réseau d'eau potable et le<br />

nombre de bénéficiaires d'un système d'assainissement ou de collecte d'ordures<br />

ménagères est encore plus restreint. D'ici l'an 2000, il sera nécessaire de construire<br />

1,6 million logements par an pour absorber les déficits.<br />

- Production globale de logements : Le secteur privé construit des logements de<br />

haut standing. Le secteur public et quelques entrepreneurs privés produisent des<br />

logements à coût moyen qui restent néanmoins inaccessibles à plus de 60% de la<br />

population. Plus de 90% des logements urbains sont construits par les familles ellesmêmes<br />

qui, grâce à une épargne collective (famille, amis. voisins). louent<br />

ponctuellement les services d'ouvriers.<br />

- Accès des secteurs sociaux à l'habitat : Outre les difficultés d'accès au crédit des<br />

ménages à faibles revenus (illétrisme, manque de garantie à offrir), il existe de<br />

nombreux obstacles pour ces mêmes ménages dus au système de propriété<br />

relativement complexe et à la spéculation foncière. En effet, les lois foncières sont<br />

confuses dans la mesure où différents droits coexistent (la propriété, les droits<br />

d'usage et d'exploitation). La propriété de 80% des logements urbains serait<br />

revendiquée par le biais des droits d'usage et non pas des actes de propriété ou<br />

autres enregistrements officiels. C'est pourquoi, si dans les quartiers populaires<br />

(Kampungs), 40% des habitants sont locataires, les autres ne sont pas à proprement<br />

dit des squatters. Ce système n'est pas légal. mais il est officiellement reconnu et<br />

soumis à l'impôt.<br />

- Politiques de financement du logement : Etant donnée l'importance de la croissance<br />

urbaine (4% par an), la politique en matière d'habitat est devenue une priorité<br />

gouvernementale. La politique nationale du logement vise de façon pragmatique à<br />

108


améliorer les logements existants. Quatre institutions sont impliquées dans la mise<br />

en œuvre de cette politique : l'entreprise publique PERUMNAS, le Conseil National<br />

pour l'Habitat (BKPN), le programme de financement d'accès à la propriété (KPFC)<br />

et la Banque d'Epargne Nationale (BTN). Cette dernière est un acteur important de la<br />

politique indonésienne du logement puisqu'elle reçoit des prêts importants de<br />

banques internationales ainsi que de la Banque d'Indonésie, prêts qu'elle redistribue<br />

à la fois au secteur privé et au secteur public.<br />

II/ LE PROJET<br />

1) Aspects généraux<br />

- Historique : Suite à une série d'études menées par le gouvernement avec l'aide de<br />

la Banque Mondiale et de l'USAID, un programme sans précédent a été lancé dans<br />

les années 70 : le programme d'amélioration des Kampungs (KIP). Dans les<br />

Kampungs, la qualité des logements et des revenus est très variable. Ce qui les<br />

distingue des autres zones d'habitation, c'est l'existence de services de proximité,<br />

que les ménages à faibles revenus prédominants dans les Kampungs, ne sont pas<br />

en mesure de financer, d'où la mise en place du KIP.<br />

- Caractéristiques du projet : S'appuyant sur les formes prédominantes<br />

d'organisations populaires, le KIP vise à l'amélioration des conditions de vie dans<br />

les Kampungs. Il met notamment l'accent sur les travaux d'infrastructures<br />

(construction de routes, de systèmes de drainage et d'égouts. accès à l'eau,<br />

services de ramassage des ordures, etc.), sur l'emploi (aide à la création de<br />

ressources), et sur l'assistance aux ménages en matière de logements, directement<br />

ou par l'intermédiaire de coopératives. Le KIP constitue le niveau local d'un projet<br />

plus ambitieux, le IUIDP (Projet intégré de développement des infrastructures<br />

urbaines), qui a connu plusieurs phases : Pelita I à III (1969-1984), Pelita IV (1984-<br />

1989) et Pelita V (à partir de 1990). La réalisation des plans est présidée par une<br />

grande décentralisation (découpages géographiques des zones d'intervention).<br />

Dans chaque secteur, un groupe de travail, intermédiaire entre les gouvernements<br />

locaux et les organisations de quartier, est mis en place.<br />

2) Crédits<br />

- Conditions préalables : Une proposition doit être faite par les organisations de<br />

quartier au groupe de travail qui en estimera la validité. Si la proposition est<br />

acceptée, elle sera soumise au gouvernement local pour approbation. Une fois le<br />

projet accepté et amendé, l'accord final appartient aux organisations de quartier.<br />

- Ingénierie financière : Le processus intègre une étude des financements : quels<br />

fonds à prêter ou à donner ; quelle sera la contribution des organisations de quartier.<br />

La décision peut être aidée par des ONG et/ou des universités qui peuvent<br />

également devenir maîtres d’œuvre du projet. Le financement des projet est effectué<br />

en une seule tranche. Les budgets KIP sont accordés par la province.<br />

3) Collecte des ressources<br />

- Epargne et mobilisation des ressources : L'épargne des organisations de quartier<br />

est récoltée par les ONG associées au projet. Elle est complétée par des fonds<br />

étatiques et des aides internationales (prêts ou dons).<br />

- Gestion des ressources : Les budgets KIP sont accordés à travers les<br />

109


gouvernements de province. Les fonds du gouvernement et ceux des organisations<br />

de quartier sont combinés au niveau des travaux de réalisation et de maintenance.<br />

Les dons peuvent être octroyés directement aux gouvernements locaux ou aux ONO<br />

impliqués dans le projet.<br />

4) Gestion et recouvrement du crédit<br />

- Octroi et suivi de l'emprunt : Les crédits vont de 20.000 à 200.000 roupies.<br />

L'inflation étant de 13% par an et le taux d'intérêt des prêts d'1 % par mois, le taux<br />

d'intérêt réel est nul. Le délai de grâce est de deux mois pour tous les crédits.<br />

* Crédit de 20.000 roupies remboursement en 12 mois, soit 1.813 roupies par mois,<br />

* Crédit de 50.000 roupies : remboursement en 12 mois, soit 4.532 roupies par mois,<br />

* Crédit de 50.000 roupies remboursement en 24 mois, soit 2.401 roupies par mois.<br />

* Crédit de 100.000 roupies remboursement en 24 mois, soit 4.802 roupies par mois.<br />

* Crédit de 150.000 roupies remboursement en 36 mois, Soit 5.082 roupies par<br />

mois.<br />

* Crédit de 200.000 roupies remboursement en 36 mois, Soit 6.776 roupies par<br />

mois.<br />

- Recouvrements : Les mécanismes de remboursements sont variés. Les<br />

organisations de quartier remboursent au gouvernement local les crédits octroyés<br />

pour les travaux d'infrastructures et de logements. Le gouvernement local rembourse<br />

à l'Etat les prêts destinés aux réalisations hors de portée des habitants des<br />

Kampungs. Les recouvrements au niveau des organisations de quartier sont<br />

relativement faibles (50%).<br />

5) Bilan<br />

- Impact social et économique : Les 10 plus grandes villes, 40 villes de taille<br />

moyenne et 150 petites villes ont bénéficié du KIP. D'un point de vue technique<br />

cependant, l'aménagement de l'espace a posé nombre de difficultés et n'a pas donné<br />

les résultats escomptés. D'une part la prise de conscience par les bénéficiaires de la<br />

nécessité des infrastructures a été lente. D'où des problèmes de recouvrement et de<br />

responsabilisation face aux travaux de maintenance. D'autre part, la densité de<br />

population et la dispersion des unités de logement a entravé l'aménagement de<br />

routes, d'égouts, de systèmes de drainage, et l'organisation de l'espace de manière<br />

rationnelle. Enfin, les ressources publiques étaient parfois si restreintes que certains<br />

programmes ont dû être repoussés voire annulés.<br />

- Evaluation : Les résultats varient d'un Kampung à l'autre, mais ils sont globalement<br />

négatifs. Dans beaucoup de cas en effet, la réhabilitation des logements et<br />

l'amélioration des infrastructures a entraîné des hausses de loyers que la plupart des<br />

ménages à faibles revenus n'ont pas pu honorer, entraînant la vacance de nombreux<br />

logements.<br />

- Aspects innovants remarquables : mixage entre fonds publics et ressources des<br />

ménages à faibles revenus permettant de démultiplier les moyens d'intervention et<br />

l'ampleur du projet.<br />

- Réplicabilité : elle dépend d'une contractualisation entre l'Etat et les organisations<br />

de quartier garantissant aux bénéficiaires la jouissance des logements après<br />

aménagement des zones d'intervention et réhabilitation des habitations.<br />

110


X - COMMUNITY MORTGAGE PROGRAM<br />

PHILIPPINES<br />

Pays<br />

Lieu<br />

Champ d’action<br />

Maître d’ouvrage<br />

Assistance à maîtrise d’ouvrage<br />

Partenaires locaux<br />

Philippines<br />

244 zones de développement prioritaire<br />

Acquisition foncière et construction de logements<br />

L'Agence "National Home Mortgage Finance<br />

Corporation"<br />

Housing and Urban Development Coordinating<br />

Counsil<br />

Municipalités, agences gouvernementales, ONG<br />

I / DONNEES SUR LE PAYS<br />

1) Indicateurs<br />

- Population urbaine 44%<br />

- Densité de population 217 habikm 2 .<br />

- Population économiquement active 56% (dont 45% dans l'agriculture, 16% dans l'industrie<br />

et 39% dans le tertiaire).<br />

- Rapport des 20% les plus riches aux 20% les plus pauvres: 7,4<br />

- PIB (US$) : 44,9 milliards<br />

- PNB par habitant (US$) 740<br />

2) Secteur habitat<br />

- Situation globale du logement : Elle est marquée par la faiblesse extrême des niveaux de<br />

ressources monétaires et de la capacité d'épargne des citadins en général, par le manque<br />

d'infrastructures urbaines et par la faiblesse de l'offre foncière urbaine aménagée par rapport<br />

à l'accroissement urbain. Il est communément admis que le déficit en logements est de 3,6<br />

millions.<br />

- Production globale de logements : Il se construit de manière formelle seulement 20.000 à<br />

50.000 logements par an aux Philippines, la demande annuelle nationale de logements étant<br />

d'environ 250.000 logements. L'agglomération de Manille représente 40% de la demande<br />

nationale.<br />

- Accès des secteurs sociaux à l'habitat : Seuls 10% de la population ont accès au crédit<br />

bancaire. Le secteur informel est donc prépondérant. Mais l'accès au foncier est un facteur<br />

de blocage Car, héritage colonial, la terre est détenue par un tout petit nombre de personnes<br />

et reste le plus souvent inoccupée. La population n'a donc pas d'autres recours que les<br />

invasions de terrains et le squat, et ce sont 20 à 30% de la population qui occupent des<br />

terres illégalement.<br />

- Politiques de financement du logement : Le financement du logement pour les plus démunis<br />

est virtuellement un monopole gouvernemental puisque seul l’Etat pratique des crédits<br />

subventionnés sur 25 ans permettant des taux d'intérêt situé entre 6 et 16%, alors que les<br />

banques privées en proposent sur 5 ans à des taux compris entre 18 et 30%. En tous les<br />

cas, le logement est considéré comme une priorité par les pouvoirs publics et leur objectif à<br />

terme est de soutenir un rythme total de 100.000 à 130.000 logements neufs par an, soit<br />

55.000 logements aidés par l'Etat et 75.000 logements construits par le secteur privé. Plus<br />

de 4 milliards de pesos ont été affectés au secteur logement par le Plan National (1988-<br />

111


1992). Les ressources financières mobilisables ont été rassemblées à l'agence<br />

gouvernementale "National Home Mortgage Finance Corporation" (NHMFC), et la<br />

coordination de toutes les organisations concernées par la mise en œuvre de la politique<br />

nationale de l'habitat est assurée par la Housing and Urban Development Coordinating<br />

Counsil (HUDCC).<br />

II/ LE PROJET<br />

1) Aspects généraux<br />

- Historique : En 1988, un programme de prêts communautaires hypothécaires (Community<br />

Mortgage Program -CNIP) en faveur des squatters des cités est lancé par la NHMFC. Le<br />

programme vise à permettre aux squatters de devenir propriétaires fonciers dans un premier<br />

temps, et propriétaires de logements décents dans un deuxième temps. Sont plus<br />

particulièrement concernés les résidents des 244 zones de développement prioritaire et de<br />

réforme urbaine.<br />

- Caractéristiques du projet : Les bénéficiaires doivent s'organiser en associations, et cela<br />

grâce à l'appui d’institutions locales (municipalités, agences gouvernementales ou ONG) qui<br />

impulsent le projet. En 1993, il y en avait 27. Une fois constituées, ces associations achètent<br />

les terrains aux propriétaires des terrains squattés, avec un prêt hypothécaire proposé par la<br />

NHMFC. Le prêt est octroyé par l'intermédiaire des institutions qui ont impulsé le projet. Ces<br />

opérateurs, en plus de produire le document de prêt et d’hypothèque, doivent assurer une<br />

assistance technique des associations bénéficiaires des prêts.<br />

L’acquisition foncière est collective, en vertu d'un contrat d'agrément mutuel entre le<br />

propriétaire et l'association des habitants à différentes conditions : la propriété doit être<br />

indiscutable le prix du terrain ne doit pas dépasser 10.000 pesos. Ce dernier est négocié<br />

avec le propriétaire et si les bénéficiaires occupent plus de 80% du terrain concerné, la<br />

communauté est habilitée à donner sa propre estimation du prix.<br />

La construction de routes, l'installation de systèmes de drainage et la division du terrain en<br />

parcelles individuelles sont effectués dans un deuxième temps. La division des parcelles doit<br />

être faite dans les deux ans après l'octroi du crédit. en vertu d'un contrat passé entre la<br />

communauté et ses différents membres. A partir de là, la construction des maisons<br />

commence.<br />

2) Crédits<br />

- Conditions préalables : Le CNIP permet l'achat d'une parcelle non équipée. Le plafond est<br />

de 30.000 pesos par parcelle. Il peut aller jusqu'à 45.000 pesos quand la parcelle, équipée<br />

ou non, est insérée dans un quartier où les infrastructures doivent être développées. Le prêt<br />

est octroyé sur la base des ressources des bénéficiaires.<br />

- Garantie : Au premier niveau, les bénéficiaires doivent faire un dépôt préalable équivalant à<br />

deux mensualités du crédit. Au deuxième niveau, le CNIP établit une lettre de garantie au<br />

propriétaire. Cette lettre de garantie permet le transfert de propriété qui se fait au nom de la<br />

communauté, avec une hypothèque en faveur de la NHMFC.<br />

- Ingénierie financière : Le crédit est octroyé en trois étapes.<br />

* la NHNIFC propose un prêt à l'association des habitants pour financer l'acquisition foncière<br />

collective. Le crédit autorisé est plafonné à 30 fois le revenu mensuel formel (certifié par<br />

112


l'employeur ou vérifié sur la déclaration d'impôt sur le revenu) et 20 fois le revenu mensuel<br />

informel.<br />

* Un deuxième prêt finance les opérations d'aménagement foncier (voiries, tout-à-l'égout,<br />

électricité, sanitaires, etc.). Le prêt proposé ne peut pas excéder 15.000 pesos par famille<br />

membre de l'association des résidents. Quelques difficultés peuvent alors apparaître à cette<br />

étape pour la répartition de ces coûts d'aménagement entre les bénéficiaires. Le rôle de<br />

l'association de base est alors essentiel.<br />

* Un troisième prêt finance la construction du logement à partir du moment où<br />

l'individualisation des lots est établie. Cette subdivision foncière doit être enregistrée par<br />

l'ULURB (Urban and Land Use Regulatory Board). Ce prêt devient alors individuel.<br />

Le total des prêt sur les trois étapes ne peut pas excéder 80.000 pesos.<br />

3) Collecte des ressources<br />

- Mobilisation des ressources : La NHMFC est financée par le Fonds Mutuel pour le<br />

Développement de l'Habitat, le Système de Sécurité Sociale, le Système d'Assurance<br />

Gouvernementale et l'Agence Nationale du Logement qui bénéficie de prêts de la Banque<br />

Mondiale.<br />

Les institutions locales qui impulsent les projets CNIP reçoivent de la NHMFC 500 pesos par<br />

bénéficiaire d’association communautaire pour financer leurs propres frais.<br />

- Gestion des ressources : La NHMFC octroie différents prêts au logement sur 25 ans.<br />

* Ressources mensuelles de 2.700 pesos : prêts maximum 80.000 pesos à 6% d'intérêt<br />

annuel,<br />

* Ressources mensuelles de 3.500 pesos : prêts de 80.000 à 120.000 pesos à 9% d'intérêt<br />

annuel,<br />

* Ressources mensuelles de 4.700 pesos prêts de 120.000 à 180.000 pesos à 12% d'intérêt<br />

annuel,<br />

* Ressources mensuelles de 7.000 pesos : prêts de 180.000 à 240.000 pesos à 15%<br />

d'intérêt annuel,<br />

* Ressources mensuelles de 10.000 pesos : prêts de 240.000 à 300.000 pesos à 16%<br />

d'intérêt annuel,<br />

4) Gestion et recouvrement du crédit<br />

- Octroi de l'emprunt : Le CNIP prend en considération la nature spécifique du revenu de<br />

chaque bénéficiaire et de sa capacité de remboursement. Un prêt de 60.000 pesos à 6%<br />

pour 25 ans signifie un remboursement mensuel de 387 pesos.<br />

- Réglementations éventuelles : L'association des habitants tient le livre de comptes de<br />

chaque bénéficiaire.<br />

- Recouvrements : L'association des habitants est chargée de récolter les mensualités de<br />

ses membres jusqu'à ce que le prêt collectif ait été individualisé. La communauté doit<br />

remplacer les membres qui ne paient pas pendant plus de trois mois. Pour parer à ces<br />

éventualités, les communautés ont été autorisées à collecter une petite commission<br />

supplémentaire, destinée à créer et alimenter des fonds communautaires.<br />

5) Bilan<br />

- Evaluation : En 1993, le CNIP avait permis à 208 communautés d'accéder au crédit, avec<br />

une valeur hypothécaire de 568 millions de pesos. 99% des prêts ont servi à accéder à la<br />

propriété. Le CNIP a rencontré plusieurs problèmes : le bénéficiaire récalcitrant qui est<br />

habitué à disposer de 100 m 2 en tant que squatter, et qui passe à une situation régularisée<br />

en ne disposant plus que de 50 m 2 par exemple; l'augmentation très vive des prix fonciers ;<br />

113


l’accroissement des prix des matériaux de construction, au double taux de l'inflation, soit plus<br />

de 20%. Ces difficultés donnent lieu à des remboursements peu satisfaisants, dus également<br />

à la mauvaise sélection des communautés. C'est pourquoi il est prévu d'individualiser les<br />

hypothèques communautaires.<br />

- Réplicabilité : Elle est remise en cause par l'individualisation des hypothèques<br />

communautaires et les difficultés de la maîtrise d'ouvrage collective.<br />

- Aspects innovants remarquables : Le montage financier mis en œuvre par l'Etat permet<br />

une répartition des coût de au logement selon les capacités financières des différents<br />

bénéficiaires.<br />

114


XI - RESTRUCTURATION - REGULARISATION <strong>DU</strong> QUARTIER D’HABITAT IRREGULIER<br />

MEDINA FASS M’BAO<br />

DE LA COMMUNE DE PIKINE, <strong>AU</strong> SENEGAL.<br />

Pays<br />

Sénégal<br />

Lieu<br />

Pikine, agglomération de Dakar<br />

Champ d’action Développement urbain<br />

Maître d'œuvre Association française des volontaires du progrès (AFVP)<br />

Maître d’ouvrage Direction de l’urbanisme et de l’architecture (<strong>DU</strong>A)<br />

Autres partenaires Gesellschaft für technische zusammenarbeit (GTZ),organisme<br />

allemand de coopération<br />

Partenaires financiers Caisse française de développement, Etat du Sénégal<br />

Durée 1993-1996<br />

Coût<br />

20 millions de FF<br />

I / DONNEES SUR LE PAYS<br />

Population urbaine: 41 %<br />

Densité de population: 39 hab/km²<br />

Population économiquement active: 38 %<br />

PIB (US$): 6,2 milliards<br />

PNB / habitant (US$): 780<br />

Le contexte du projet<br />

La construction informelle demeure à Dakar le mode principal de logement des familles<br />

défavorisées. Pour améliorer les conditions de vie des populations, le gouvernement<br />

sénégalais a fait de la restructuration des quartiers irréguliers, un des axes majeurs de sa<br />

politique de l’habitat. Une cellule opérationnelle de la Direction de l’urbanisme et de<br />

l’architecture (<strong>DU</strong>A), mise en place en 1987, a progressivement élaboré avec l’appui de la<br />

coopération allemande, une démarche de restructuration de l’habitat spontané basée sur une<br />

participation aussi large que possible des populations, et sur la mobilisation de leurs<br />

ressources financières et humaines.<br />

Cette démarche, expérimentée puis ajustée à l’occasion de la restructuration d’un quartier de<br />

Dakar (Dalifort), a été élargie à d’autres quartiers de l’agglomération dakaroise et à des villes<br />

de provinces. Elle constitue aujourd’hui une approche d’envergure nationale dotée<br />

d’instruments et de moyens spécifiques. C’est dans le cadre de cette politique que l’AFVP a<br />

été sollicitée par la <strong>DU</strong>A pour agir en tant que maître d'œuvre de la restructuration du<br />

quartier Fass M’Bao.<br />

Enjeux et objectifs<br />

La restructuration du quartier Médina Fass M’Bao poursuit trois objectifs principaux :<br />

- régulariser la situation foncière des occupants et établir un nouveau parcellaire intégré à<br />

l’agglomération ;<br />

- viabiliser et équiper le quartier, en priorité en eau, électricité et voiries, mais aussi en<br />

intégrant des activités socio-économiques ;<br />

- alimenter un fonds d’investissement selon un mode de recouvrement des coûts<br />

partiellement supportés par les habitants du quartier.<br />

115


La traduction opérationnelle de ses orientations se manifeste au travers d’un plan de<br />

restructuration du quartier ayant valeur de plan d’urbanisme de détail pour les services de la<br />

<strong>DU</strong>A. La particularité de ce plan est d’être conçu, non seulement sur la base de contraintes<br />

techniques et réglementaires, mais surtout avec la participation étroite des habitants qui<br />

discutent et valident le nouveau parcellaire, déterminent eux-mêmes le niveau plus ou moins<br />

élevé de viabilisation souhaité, et négocient les coûts et les modalités de leur participation<br />

financière.<br />

A plus long terme, l’opération de restructuration, par la mobilisation qu’elle suscite, tente de<br />

jeter les bases d’une gestion urbaine consensuelle entre populations et institutions.<br />

II/ LE PROJET<br />

Le quartier Médina Fass M’Bao est constitué d’environ 1 500 parcelles, et s’étend sur une<br />

superficie de 40 ha située en périphérie de la commune de Pikine.<br />

La politique de restructuration des pouvoirs publics sénégalais s’appuie sur le désir des<br />

occupants irréguliers d’espaces urbains de légaliser leur situation pour conforter leurs droits<br />

sur le sol, et pour ainsi se mettre à l’abri de toute menace de déguerpissement ou de conflits<br />

éventuels avec les prétendus ayants droit. Cette politique repose sur la règle du « donnant -<br />

donnant ». En échange d’un effort financier de la part des habitants, l’Etat accorde un droit<br />

de superficie transformable en un titre de propriété après une période de mise en valeur qui<br />

pourra atteindre cinquante ans (délai correspondant au temps jugé nécessaire pour<br />

permettre aux plus pauvres de construire leur maison en dur).<br />

Conformément au canevas opérationnel établi par la <strong>DU</strong>A et le GTZ, le processus de<br />

restructuration se déroule en cinq étapes.<br />

1 - Phase préliminaire<br />

Elle inclut l’information de la population, le dénombrement officiel et exhaustif des ménages<br />

résidant dans la zone d’aménagement, et l’étude foncière. Il importe d’avoir des données<br />

précises sur les conditions juridiques d’attribution et d’occupation du sol afin de pouvoir, le<br />

moment venu, réaliser les opérations de redécoupage parcellaire rendues nécessaires pour<br />

améliorer le quartier. La carte des droits fonciers dans la zone d’étude est dressée par un<br />

bureau d’études de géomètre puis vérifiée par l’administration du cadastre.<br />

2 - Phase de préparation<br />

Elle correspond à la mise en place du cadre institutionnel de la participation communautaire.<br />

La structure institutionnelle appelée à parler, à agir et à décider au nom des habitants est un<br />

groupement d’intérêt économique (GIE). C’est l’interlocuteur représentatif et légitime de<br />

l’administration.<br />

Cette phase comprend aussi la vérification des ayants droit, c’est-à-dire la vérification que les<br />

personnes appelées à terme à recevoir un droit de superficie sont bien celles qui, de<br />

notoriété publique, sont installées depuis longtemps dans le quartier, et y ont réalisé ellesmêmes<br />

des dépenses pour leur installation.<br />

3 - Phase de planification<br />

C’est la réalisation, selon une méthode participative, du plan d’urbanisme et d’aménagement<br />

ainsi que du plan de restructuration du quartier. Cette phase est clôturée par la fixation du<br />

prix au mètre carré de chaque parcelle à créer. Le prix de la parcelle contient deux<br />

éléments :<br />

116


- le prix du terrain nu du domaine privé, fixé unilatéralement par l’Etat ;<br />

- les frais de viabilisation du quartier à restructurer, décidés d’un commun accord entre les<br />

représentants du quartier et les techniciens du projet (puis ratifiés par l’autorité ministérielle<br />

compétente).<br />

4 - Phase de réalisation<br />

Elle recouvre non seulement les mesures de mise en place des infrastructures ou des<br />

équipements, selon les choix arrêtés par la population, mais aussi celles liées à la<br />

restructuration foncière. Celle-ci commence par la délimitation cadastrale des parcelles et<br />

des îlots, car, sans la mesure des parcelles, il serait impossible de déterminer le coût de ces<br />

dernières. Il faut ensuite délivrer des dossiers d’attribution aux ayants droit concernant la<br />

procédure d’obtention du droit de superficie.<br />

C’est également pendant cette phase qu’il est procédé aux opérations de recasement, c’està-dire<br />

à l’affectation d’une parcelle aux légitimes propriétaires d’impenses dont les maisons<br />

auraient été affectées par l’application du plan de restructuration ou frappées d’alignement.<br />

Enfin, il convient d’obtenir la participation financière du GIE aux opérations de régularisation.<br />

Le GIE est le passage obligé entre les ayants droit et la Banque de l’habitat du Sénégal et à<br />

ce titre c’est lui qui a la responsabilité de la prise en charge du coût des aménagements<br />

techniques. Il doit donc déposer auprès de cette banque un fonds de garantie des emprunts<br />

contractés par les particuliers. Le compte est bloqué jusqu’au moment du paiement des<br />

travaux.<br />

5 - Phase finale<br />

Le projet est terminé lorsque les ayants droit ont tous acquitté le montant de leur droit de<br />

superficie et qu’ils ont obtenu ceux-ci en retour.<br />

Mode de financement des travaux<br />

Le coût de viabilisation (hors coût de droit de superficie) à charge des populations s’élève à<br />

1430 FF par parcelle, soit un total d’environ 3 millions de FF. Les financements<br />

complémentaires nécessaires à la totalité du programme sont assurés par une dotation de la<br />

Caisse française de développement (2,5 millions de FF) qui couvre des infrastructures<br />

primaires. L’Etat sénégalais participe lui aussi à la trame primaire. Pour la viabilisation<br />

tertiaire, le volume des travaux est exécuté à hauteur du montant atteint par le recouvrement<br />

des coûts.<br />

Impacts du projets<br />

En juillet 1995, le projet arrivait aux deux tiers de sa durée. Le contenu du plan de<br />

restructuration, les modalités de prise en charge financière et de mise en œuvre avaient été<br />

discutés, analysés, négociés puis arrêtés contractuellement entre le GIE et la <strong>DU</strong>A.<br />

Evaluation<br />

Un des points les plus originaux de la méthode employée tient à ce que la population des<br />

quartiers irréguliers n’est pas passive. Elle est au contraire un partenaire à part entière du<br />

projet de restructuration - régularisation, grâce à l’émergence d’une structure sociale locale<br />

capable de légitimer les choix techniques et politiques auxquels se trouvent confrontés les<br />

institutions publiques.<br />

117


La principale difficulté du projet provient du remboursement d’une partie des coûts de la<br />

restructuration par les bénéficiaires. En effet, la mise en œuvre du programme a montré que<br />

la part du coût de la restructuration supportée par les ménages, bien que négociée et<br />

consentie par le quartier et sa représentation, restait trop élevée. Il en est ressorti que son<br />

recouvrement dépendait de la mise en place de relais d’épargne- crédit.<br />

118

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