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Banque & finance Digérer la déferlante réglementaire Les fonds d’investissement luxembourgeois ont le vent en poupe, avec un volume total dépassant désormais les 3.000 milliards de dollars. Ces bons résultats s’inscrivent dans un contexte général de baisse des taux d’intérêts, mais pas uniquement. Interview de Marc Saluzzi, président de l’association luxembourgeoise des fonds d’investissement (ALFI). L’année 2014 a non seulement été une année historique pour le centre luxembourgeois des fonds d’investissement, dont le volume total dépasse désormais les 3.000 milliards d’euros, mais les placements effectués dans les fonds de droit luxembourgeois ont également été deux fois plus élevés que ceux attirés par le centre de fonds d’investissement suivant. Comment expliquer ces bons résultats? Ces bons résultats s’inscrivent dans un contexte général. Aujourd’hui, les fonds déposés sur des comptes bancaires ne rapportent rien, ce qui a poussé beaucoup d’investisseurs de par le monde à réinvestir à tout le moins une partie de leurs ressources financières dans des fonds d’investissement. En outre, lorsque nous créons un fonds au Luxembourg, nous sommes à même de le vendre dans 70 pays autour du globe. Un cercle vertueux se dessine, dès lors que cette plate-forme de distribution globale efficace a pour mérite d’attirer les meilleurs asset managers, ce qui rend possible l’ouverture de nouveaux marchés en termes de distribution, et ainsi de suite. Par ailleurs, le Luxembourg aréussi à créer une boîte à outils permettant à n’importe quel investisseur de «trouver chaussure à son pied», ce qui a séduit la clientèle institutionnelle, désormais grande consommatrice de UCITS et nous l’espérons d’AIFs. Grâce à la masse critique que nous sommes parvenus à atteindre, nous avons pu investir dans notre infrastructure de marché. La Directive sur les gestionnaires de fonds d'investissement alternatifs (AIFM) de 2011 a été transposée en droit luxembourgeois en 2013. Que prévoit cette directive et quelles ont été les répercussions sur l’activité des fonds au Luxembourg? Tout d’abord, soulignons que nous ne sommes qu’au début de l’aventureet qu’il est dès lors un peu tôt pour connaîtreles impacts de cette directive sur notre industrie. En ce qui concerne l’objectif, celui-ci consiste à aligner la réglementation de la gestion alternative sur la réglementation des produits retail, avec comme contrepartie la délivrance d’un passeport européen aux gestionnaires de produits alternatifs. Aujourd’hui, concrètement, suite à la mise en œuvre de la directive AIFM, tous les gestionnaires de fonds alternatifs ont dû s’enregistrer auprès de leur autorité de contrôle respective. Le Luxembourg a à l’heure actuelle à peu près 189 gestionnaires de fonds alternatifs autorisés, ce qui le place en troisième position en Europe, et a pour objectif de doubler la taille des actifs gérés par ces AIFMs pour les porter à 500 milliards d’euros. Vous avez affirmé à l’occasion de la conférence de presse traditionnelle de début d’année qu’«après des années caractérisées par une multitude de nouvelles législations et réglementations – très coûteuses pour le secteur - il est temps maintenant que l’industrie de la gestion d’actifs puisse ànouveau porter toute son attention sur le service à ses clients. Trop de réglementation tue-t-elle la réglementation? Le client est-il réellement passé au second plan ces dernières années? Notre point de vue sur l’avalanche réglementaire est très clair depuis le départ. La sphère financière dans son ensemble a été impactée de différentes façons au cours de ces dix dernières années. Or compte tenu de la grande résistance de la sphère «gestion d’actifs» aux conséquences de la crise, nous sommes d’avis qu’il n’y avait pas lieu de modifier de fond en comble leur réglementation tout comme il n’y avait pas lieu non plus d’accumuler des «couches» de réglementation dont l’objectif était de traiter le secteur financier dans son ensemble, de façon transversale, sans tenir compte des spécificités de chaque secteur. Pour répondre à votre deuxième question, lorsqu’un asset manager consacre 80% de son temps en moyenne pour revoir les impacts réglementaires sur ses opérations, il paraît évident que cela se fait au détriment de la qualité de service au client. Vous attendez-vous à un répit en la matière, ou bien prévoyez-vous de nouvelles exigences internationales? Nous nous attendons à un répit, c’est du moins ce que laisse supposer la posture de la Commission Juncker à ce sujet. Tout nouveau développement réglementaire significatif se doit maintenant d’être validé à tous les niveaux au sein de la Commission et faire l’objet d’une analyse coûts-avantages systématique. 12 <strong>LG</strong> - Juin 2015
“ La démarche des politiques désireux d’instaurer une taxe sur les transactions financières repose sur des arguments mensongers ” Ace propos, au niveau international, l’introduction d’une taxe sur les transactions financières (Financial Transaction Tax – FTT) a fait sa réapparition sur l’agenda. Sans surprise, l’ALFI reste strictement opposée à cette taxe. Pourtant, les raisons qui plaident en faveur d’une TTF sont de deux ordres… et semblent plus que légitimes: d’une part, réguler la globalisation financière et en particulier lutter contre la spéculation, et, d’autre part, financer les nouveaux besoins liés à la mondialisation et notamment les biens publics mondiaux. On retrouve bien les deux fonctions majeures de la fiscalité: réguler et collecter des ressources publiques. Qu’est-ce qui vous oppose à cette démarche? Marc Saluzzi La démarche des politiques désireux d’instaurer une taxe sur les transactions financières repose sur des arguments mensongers. Le premier mensonge consiste à arguer que ce sont les gestionnaires de fonds qui paieront cette taxe, ceci en guise de punition pour les errements de la sphère financière internationale, alors que ce sont les investisseurs de long terme qui devront mettre la main au porte-monnaie, c’est-à-dire Monsieur et Madame tout le monde. Le deuxième mensonge est de dire que des sommes très importantes seront récoltées par ce biais et allouées à de nobles causes. De fait, soit cette taxe est mise en œuvre à l’échelle mondiale, ce qui aura alors effectivement pour corollairede récolter des montants très importants, soit elle est instaurée àl’échelle européenne ou de la zone euro, ce qui aura pour conséquence un déplacement du business au-delà des frontière européennes et qui reviendrait à se tirer une balle dans le pied. PhR <strong>LG</strong> - Juin 2015 13
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