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dossier documentaire sur le Creusot

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LE CREUSOT, UN EXEMPLE DE VILLE INDUSTRIELLE<br />

DOC 1<br />

Dans <strong>le</strong> grand si<strong>le</strong>nce de la nuit, on entendait comme des siff<strong>le</strong>ments, des plaintes ha<strong>le</strong>tantes, des grondements<br />

formidab<strong>le</strong>s. Julien était de plus en plus inquiet :<br />

- Mon Dieu, monsieur Gertal, qu'y a-t-il donc ici? Bien sûr, il arrive là de grands malheurs.<br />

- Non, petit Julien. Seu<strong>le</strong>ment nous sommes en face du <strong>Creusot</strong>, la plus grande usine de France et peut-être d'Europe. Il y a<br />

ici quantité de machines et de fourneaux, et plus de seize mil<strong>le</strong> ouvriers [...]. C'est de ces machines et de ces énormes<br />

fourneaux chauffés à blanc continuel<strong>le</strong>ment que partent <strong>le</strong>s lueurs et <strong>le</strong>s grondements qui nous arrivent.<br />

[…]<br />

- I1 y a trois grandes usines distinctes dans l'établissement du <strong>Creusot</strong>, dit <strong>le</strong> patron […] : fonderie, ateliers de construction<br />

et mines ; mais voyez, ajouta-t-il en montrant des voies ferrées <strong>sur</strong> <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s passaient des locomotives et des wagons<br />

p<strong>le</strong>ins de houil<strong>le</strong>, chacune des parties de l'usine est reliée à l'autre par des chemins de fer; c'est un va-et-vient perpétuel.<br />

[…]<br />

- Vois, il y a là des enfants qui ne sont pas beaucoup plus âgés que toi qui travail<strong>le</strong>nt de tout <strong>le</strong>ur cœur; mais ils sont obligés<br />

de faire attention.<br />

[…]<br />

- Eh bien, examine d'abord, en face de toi, ces hautes tours de quinze à vingt mètres : ce sont <strong>le</strong>s hauts-fourneaux que nous<br />

voyions bril<strong>le</strong>r la nuit comme des brasiers. Il y en a une quinzaine au <strong>Creusot</strong>. Une fois allumés, on y entretient jour et nuit<br />

sans discontinuer un feu d'enfer. […] C'est pour fondre <strong>le</strong> minerai de fer. Quand <strong>le</strong> fer vient d'être retiré de la terre par<br />

<strong>le</strong>s mineurs, il renferme de la rouil<strong>le</strong> et une fou<strong>le</strong> de choses, de la pierre, de la terre ; pour séparer tout cela et avoir <strong>le</strong> fer<br />

plus pur, il faut bien faire fondre <strong>le</strong> minerai. Mais songe quel<strong>le</strong> cha<strong>le</strong>ur il faut pour <strong>le</strong> fondre et <strong>le</strong> rendre fluide comme de<br />

l'hui<strong>le</strong> ! Les hauts fourneaux du <strong>Creusot</strong> produisent ainsi chaque jour plus de 500 000 kilogrammes de fer ou de fonte. […]<br />

- Quand on eut bien admiré la fonderie, on passa dans <strong>le</strong>s grandes forges. […] Saisissant de longues tenail<strong>le</strong>s, ils retiraient<br />

des fours <strong>le</strong>s masses de fer rouge ; puis, <strong>le</strong>s plaçant dans des chariots qu'ils poussaient devant eux, ils <strong>le</strong>s amenaient en<br />

face d'énormes enclumes pour être frappées par <strong>le</strong> marteau. Mais ce marteau ne ressemblait en rien à un marteau<br />

ordinaire […] c'était un lourd bloc de fer qui, sou<strong>le</strong>vé par la vapeur entre deux colonnes, montait jusqu'au plafond, puis<br />

retombait droit de tout son poids <strong>sur</strong> l'enclume.<br />

- Regarde bien, Julien, dit M. Gertal : voici une des merveil<strong>le</strong>s de l'industrie. C'est ce qu'on appel<strong>le</strong> <strong>le</strong> marteau-pilon à<br />

vapeur qui a été fabriqué et employé pour la première fois dans l'usine du <strong>Creusot</strong> où nous sommes.<br />

On parcourut <strong>le</strong>s ateliers de construction où se font chaque année plus de cent locomotives; des quantités<br />

considérab<strong>le</strong>s de rails, des coques de bateaux à vapeur, des ponts en fer, des engins de toute sorte pour <strong>le</strong>s frégates et <strong>le</strong>s<br />

vaisseaux de ligne.<br />

- Voyons maintenant <strong>le</strong>s mines de houil<strong>le</strong>, dit M. Gertal.<br />

- Des mines ? dit Julien. Il y a des mines aussi !<br />

[...]<br />

- Est-ce que ce puits est bien profond? demanda Julien.<br />

- Il a 200 mètres environ [...]. Cette vil<strong>le</strong> souterraine renferme des rues, des places, des rails où rou<strong>le</strong>nt des chariots de<br />

charbon que <strong>le</strong>s mineurs ont arraché à coups de pic et de pioche. C'est ce charbon qui alimentera <strong>le</strong>s grands fourneaux que<br />

tu as vu, c'est lui qui mettra en mouvement ces machines qui siff<strong>le</strong>nt, tournent et travail<strong>le</strong>nt sans repos. Puis, quand à l'aide<br />

de ce charbon on aura fabriqué toutes <strong>le</strong>s choses que tu as vues, on <strong>le</strong>s expédiera par <strong>le</strong> canal du Centre <strong>sur</strong> tous <strong>le</strong>s points<br />

de la France.<br />

G. BRUNO, Le tour de France de deux enfants, Belin, 1ère édition 1877<br />

DOC 2<br />

DOC 5<br />

Éloge de la méthode Schneider<br />

Un général, si habi<strong>le</strong> qu'il soit, ne pourrait vaincre avec une armée<br />

indisciplinée. Le directeur du <strong>Creusot</strong> en était convaincu, mais il savait aussi qu'il<br />

n'y a qu'un moyen d'obtenir une discipline durab<strong>le</strong>, c'est de la graver dans <strong>le</strong>s jeunes<br />

cœurs. Aussi, dès <strong>le</strong> début, il a installé de bel<strong>le</strong>s éco<strong>le</strong>s dans la cour même du château<br />

de la Direction et soixante-dix instituteurs ou institutrices étaient chargés, il n'y a<br />

pas longtemps d'instruire plus de trois mil<strong>le</strong>s enfants. […] On ne se contente pas<br />

d'é<strong>le</strong>ver <strong>le</strong>s enfants, on donne une retraite aux parents [...]. Ajoutons encore que<br />

pour 6F par mois, il est logé dans une jolie petite maison, entourée d'un jardin et que,<br />

s'il est malade, il est soigné gratuitement.<br />

Professeur Lafon, Une visite à l'usine du <strong>Creusot</strong>, 1884


DOC 4<br />

Henri Schneider, patron des établissements Schneider au <strong>Creusot</strong>, est<br />

interrogé lors d'une enquête <strong>sur</strong> la question socia<strong>le</strong> en Europe en 1897<br />

« - Est-il indispensab<strong>le</strong> que <strong>le</strong> directeur d'une usine en absorbe tous <strong>le</strong>s<br />

bénéfices ?<br />

- Pensez-vous qu'il ne faut pas de l'argent pour faire marcher une "boîte"<br />

comme cel<strong>le</strong>-ci ? Le capital qui alimente chaque jour <strong>le</strong>s usines et <strong>le</strong>s outillages<br />

perfectionnés, <strong>le</strong> capital, sans <strong>le</strong>quel rien n'est possib<strong>le</strong>, qui nourrit l'ouvrier<br />

lui-même ! Ne représente-t-il donc pas une force qui dit avoir sa part de<br />

bénéfices ! [...] »<br />

DOC 6<br />

La famil<strong>le</strong> Schneider<br />

Les Schneider sortent de l'obscurité en 1836, à l'époque où ils se<br />

portent acquéreurs des établissements du <strong>Creusot</strong> alors en faillite.<br />

Adolphe et Eugène sont issus d'une famil<strong>le</strong> de petits propriétaires<br />

terriens de Lorraine.<br />

Ils consolident <strong>le</strong>ur position par des mariages brillants avec de<br />

riches héritières.<br />

Henri Schneider marie ses 5 enfants dans la nob<strong>le</strong>sse. [...] C'est un<br />

mode de vie qui attire <strong>le</strong>s Schneider [...]. Les alliances<br />

matrimonia<strong>le</strong>s ont permis aux Schneider de consolider et valoriser<br />

<strong>le</strong>ur réseau de relations.<br />

[…] Eugène est proche de l'Empereur. [Les Schneider reçoivent] <strong>le</strong>s<br />

grands noms de la nob<strong>le</strong>sse, de la finance, de l'industrie [...].<br />

Les lieux de la mise en scène sont <strong>le</strong>s demeures somptueuses que <strong>le</strong>s<br />

Schneider se sont fait construire ou aménager à chaque<br />

génération. Dans ces demeures ont travaillé <strong>le</strong>s plus grands<br />

architectes du temps. [Ces résidences fastueuses] sont la marque de<br />

la puissance de la famil<strong>le</strong> dans tous <strong>le</strong>s domaines, en particulier<br />

dans <strong>le</strong> domaine politique.<br />

A. Compos et S. Gacon, Les Schneider comme figure emblématique<br />

du patronat français, http://webpublic.ac-dijon.fr<br />

DOC 3<br />

La contestation de la méthode Schneider<br />

L'administration de l'usine <strong>le</strong>ur vend du terrain et <strong>le</strong>ur fait bâtir des maisons avec facilité de payer au<br />

moyen de retenues mensuel<strong>le</strong>s faites <strong>sur</strong> <strong>le</strong> salaire. Une fois <strong>le</strong> marché conclu, ces malheureux s'exténuent<br />

chaque jour à piocher, fumer 1 et embellir <strong>le</strong> légendaire jardinet attenant à la maisonnette; quand ils ont travaillé<br />

là un an ou deux, ils sont forcés de subir tous <strong>le</strong>s caprices de <strong>le</strong>urs chefs et la diminution de <strong>le</strong>ur salaire car<br />

n'ayant pas d'argent pour achever <strong>le</strong> paiement de la dette, ils sont mis dans cette alternative 2 : ou laisser à la<br />

Compagnie pour <strong>le</strong> prix d'achat ce lopin de terre, qu'ils ont arrosé de <strong>le</strong>urs sueurs, ou courber la tête sous<br />

toutes <strong>le</strong>s vexations. C'est ainsi qu'en tombant dans <strong>le</strong> piège capitaliste, de pauvres locataires deviennent de<br />

misérab<strong>le</strong>s propriétaires.[…]<br />

Sur quatre cent femmes environ occupées dans <strong>le</strong>s chantiers, un dixième à peine font un travail qui<br />

n'excède pas 3 <strong>le</strong>urs forces ; […] C'est <strong>le</strong> travail des hauts-fourneaux qui en occupe <strong>le</strong> plus grand nombre. El<strong>le</strong>s<br />

sont employées à rou<strong>le</strong>r <strong>le</strong> minerai de fer dans des brouettes excessivement lourdes ; il y a une équipe de jour et<br />

une équipe de nuit en toute saison.<br />

J.B. Dumay, Un fief capitaliste, Le <strong>Creusot</strong>, 1882.<br />

1 Enrichir avec du fumier<br />

2 Ce choix<br />

3 Qui ne dépasse pas<br />

DOC 7<br />

En 1899, <strong>le</strong>s usines Schneider<br />

constituent la première concentration<br />

industriel<strong>le</strong> du pays. Trois grèves se<br />

succèdent sous l'effet d'une<br />

accélération des cadences et de<br />

l'accession d'Eugène II Schneider à<br />

la direction hjjjjjjjj de l'entreprise. Les<br />

ouvriers revendiquent de pouvoir se<br />

syndiquer.<br />

Le marteaupilon<br />

à vapeur<br />

du <strong>Creusot</strong>

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