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La Craie

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Compte rendu des journées d'études organisées les 3 et 4 novembre 1971,<br />

au <strong>La</strong>boratoire régional des Ponts et Chaussées de Rouen.


Les études effectuées mettent en évidence le caractère ambigu de la craie qui possède à la fois<br />

les caractéristiques des sols et des roches.<br />

L'observation au microscope électronique permet d'expliquer ces caractéristiques. <strong>La</strong> matrice<br />

crayeuse se présente, en effet, comme un empilement anarchique de grains de calcite associés<br />

à des coccolithes, texture apparentée à un empilement de grains de sable de très petites<br />

dimensions proches de celles de particules d'argile.<br />

<strong>La</strong> photo représente une coccosphère,<br />

constituée de coccolithes,<br />

telle qu'on peut l'observer<br />

au microscope électronique.


MINISTÈRE DE L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE, DE L'ÉQUIPEMENT, DU LOGEMENT ET DU TOURISME<br />

<strong>La</strong>boratoire central des Ponts et Chaussées - 58, boulevard Lefebvre<br />

75732 PARIS CEDEX 15 - Tél. : (1) 532 31 79 - Télex LCPARI 20361 F<br />

Sûécial V - Octobre 1973<br />

sommaire<br />

Présentation générale<br />

G. ARQUIÉ<br />

<strong>La</strong> craie du Bassin parisien<br />

Géologie de la craie dans le Bassin parisien<br />

11<br />

G. BIGNOT et M.P. AUBRY<br />

Pétrophysique de la craie<br />

23<br />

M. MASSON<br />

Texture et comportement des craies<br />

49<br />

A. LE ROUX<br />

<strong>La</strong> craie et les terrassements<br />

Stabilité des remblais crayeux de grande hauteur<br />

57<br />

A. DE RAGUENEL<br />

Problèmes de terrassement dans la craie<br />

81<br />

J. PUIG<br />

Etude par vibrobroyage de l'aptitude des craies au compactage<br />

99<br />

R. STRUILLOU<br />

<strong>La</strong> craie et les ouvrages d'art<br />

Fondations dans la craie<br />

113<br />

F. BAGUELIN<br />

Les cavités souterraines de la craie dans le nord de la France<br />

123<br />

J. LEPLAT<br />

<strong>La</strong> craie dans les sites d'ouvrages de production d'électricité<br />

149<br />

G. COMÉS<br />

Quelques remarques sur la stabilité des tunnels dans la craie<br />

159<br />

M. PAN ET<br />

Conclusions générales et recommandations<br />

165<br />

A. DE RAGUENEL<br />

RÉSUMÉS - ABSTRACTS - ZUSAMMENFASSUNGEN - RESUMENES - PE3IOME 171


PRÉSENTATION GÉNÉRALE<br />

G. ARQUIÉ<br />

Directeur de l'Ecole nationale des TPE<br />

<strong>La</strong> craie pose à l'ingénieur du génie civil des problèmes que l'on ne peut pas ramener à ceux<br />

des autres sols.<br />

Efficacité des essais<br />

Nous disposons pour les sols d'une série d'essais soit généraux (identification, essais de cisaillement,<br />

essais triaxiaux), soit orientés vers un objectif donné (Proctor, CBR, œdomètre, certains<br />

essais in situ).<br />

Certes ces essais ne sont pas, de beaucoup s'en faut, à l'abri de toute critique et dans certains<br />

cas, on a tenté de remplacer tel ou tel de ces essais par d'autres. Des efforts importants sont<br />

à faire pour obtenir des essais plus fidèles, moins dispersés, plus rapides, etc., mais tout cet<br />

arsenal est en gros efficace : il nous permet d'agir et même de comprendre comment se produisent<br />

les phénomènes.<br />

Malheureusement, pour la plupart de ces essais, cette efficacité disparaît pour la craie. En effet,<br />

toutes ces méthodes reposent sur la notion de grain, d'élément relativement indestructible.<br />

Or la craie est un mélange de blocs et de fines en proportions variables en fonction de sa nature<br />

et de son état de remaniement. Ce mélange « évolutif », lorsque sur un chantier on est amené<br />

à manipuler le matériau, est aussi évolutif lors des essais de laboratoire, ce qui ôte toute signification<br />

aux résultats obtenus.<br />

Qu'est-ce par exemple que la porosité d'une craie ? <strong>La</strong> craie n'est pas le seul matériau dans<br />

lequel les vides sont d'une part ceux entre grains et d'autre part des cavités internes aux grains.<br />

Mais dans le cas de la craie, la porosité interne à un grain se transforme par fragmentation<br />

en porosité entre grains ; de plus l'eau emprisonnée (ou relativement emprisonnée) dans les<br />

pores internes à un grain va par fragmentation de ce dernier être libérée et accroître brutalement<br />

la pression interstitielle locale : il en résulte une transformation complète des qualités mécaniques<br />

du matériau.<br />

Imprécision du vocabulaire<br />

Par ailleurs le terme de craie est équivoque ; il est utilisé pour un ensemble géologique important<br />

recouvrant des roches de nature et donc de comportement très différent sans qu'il existe actuellement<br />

de classification géologique ou géotechnique permettant de les situer en fonction de leur<br />

comportement géotechnique global.<br />

Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch. - Spécial V - Octobre 1973


Analyse de la structure intime de la craie<br />

Les travaux du colloque (et les études préparatoires) ont montré que toutes ces difficultés<br />

s'éclairaient lorsque l'on examinait la structure intime de la craie. Cette structure, ce « nannofacies<br />

» pour utiliser le terme de M. Bignot, nous permet de comprendre ou de commencer<br />

à comprendre.<br />

De plus cette étude de la structure permet de classer les craies et d'introduire dans le vocabulaire,<br />

des distinctions permettant de lever des ambiguïtés.<br />

Terrassements<br />

C'est peut être dans le domaine des terrassements que la clarté apportée par ces études est la<br />

plus nette.<br />

Le développement des travaux autoroutiers au profil en long très tendu, rend particulièrement<br />

intéressant ce progrès, car ces travaux ont conduit à multiplier les mouvements de terre importants<br />

en particulier sur les autoroutes du Nord (Al), du Sud (A6) et de Normandie (A13).<br />

Toutes ces radiales, partant du centre du bassin de Paris, ont traversé les auréoles crayeuses<br />

de l'étage géologique Crétacé. Pays de plateaux ou de plaines ouvertes, ces régions sont entaillées<br />

par de profondes vallées qu'il convenait de franchir. Les contraintes géométriques des projets<br />

ont ainsi conduit à la réalisation de déblais très importants à chaque raccordement de plateau.<br />

On peut estimer à 15-20 millions de mètres cubes, le volume de craie terrassé entre 1963 et 1968.<br />

Au sujet des difficultés rencontrées, les opinions émises sur la craie par beaucoup d'ingénieurs,<br />

en fonction de leur expérience personnelle acquise au cours des travaux, étaient très contradictoires<br />

allant d'un optimisme serein à un pessimisme noir.<br />

Ces divergences d'avis se sont traduites dans les faits, par de grandes incertitudes lors de l'établissement<br />

des projets, par de nombreuses surprises en cours de terrassements et une certaine<br />

crainte sur la tenue des ouvrages réalisés.<br />

Lors de Y exécution des terrassements, il était fréquent de rencontrer des craies facilement réduites<br />

en pâte, à forte teneur en eau, très difficiles à mettre en œuvre et à compacter. Elles ont le plus<br />

souvent été mises en dépôts.<br />

Elles ont parfois été utilisées en remblais qui ont souvent donné lieu, soit à des tassements<br />

importants dus en partie à un manque de compactage, soit à des fissures longitudinales très<br />

importantes, soit à des ruptures de talus.<br />

Fondations<br />

Très fréquemment les ingénieurs sont amenés à fonder des ouvrages sur pieux battus dans les<br />

horizons de craie altérée ; chacun sait que le refus est difficile à obtenir dans ces matériaux,<br />

mais que si, sans avoir obtenu le refus, on laisse un temps de repos de quelques jours, la force<br />

portante obtenue, mesurée par des essais statiques de chargement, est souvent très suffisante.<br />

Il y a là un phénomène très connu mais mal expliqué encore.<br />

Etudes entreprises<br />

Il est apparu indispensable, dès 1965, d'engager une recherche sur ces problèmes et ce, en<br />

remontant à la source même des difficultés, en particulier la connaissance de la nature et de la<br />

structure de la craie. Cette recherche entreprise de 1966 à 1970, a ainsi comporté différents<br />

aspects étudiés simultanément :<br />

— étude des caractéristiques géologiques, minéralogiques, pétrographiques et physiques des<br />

différentes craies. Cette étude avait pour but d'expliquer le comportement physique de ce matériau<br />

en fonction de sa nature et de sa structure, d'en déduire une classification utile pour le géotechnicien<br />

et par là même de permettre au géologue de se constituer une échelle litho-stratigraphique<br />

lui permettant d'établir des prévisions de comportement de façon spatiale;


— constatations sur l'exécution des terrassements (extraction, transport, mise en œuvre), sur<br />

les désordres constatés sur les grands remblais (fissuration, tassements) et sur l'exécution des<br />

pieux dans la craie en multipliant les essais de chargement ;<br />

— mise au point de nouveaux essais géotechniques permettant de prendre en compte le caractère<br />

évolutif de l'ensemble a craie blocs + pâte crayeuse», de prévoir le comportement de la craie<br />

à la mise en œuvre et au compactage, et d'adapter les essais de contrôle dans ce domaine.<br />

Colloque sur la craie à Rouen<br />

Le faisceau des recherches entreprises essentiellement au <strong>La</strong>boratoire des Ponts et Chaussées<br />

de Rouen en collaboration avec les <strong>La</strong>boratoires de l'Est parisien, de Lille et de Saint-<br />

Quentin, s'est avéré suffisamment convergent dès 1970 pour faire le point sur la craie et les<br />

problèmes de terrassements.<br />

L'organisation d'un colloque sur ce sujet est apparue comme le meilleur moyen d'une part<br />

de faire connaître l'état d'avancement des recherches et d'autre part de confronter nos connaissances<br />

avec celles obtenues dans ce domaine par d'autres spécialistes. Citons en particulier,<br />

les géologues du Bassin parisien et les ingénieurs ayant eu l'occasion de rencontrer la craie<br />

lors des études du tunnel sous la Manche, des centrales thermiques ou nucléaires à l'EDF,<br />

des stockages pétroliers souterrains et des nombreuses études de fondations d'ouvrages d'art.<br />

Ce colloque sur la craie s'est tenu à Rouen les 3 et 4 novembre 1971 en présence d'environ<br />

150 ingénieurs de différentes origines.<br />

Numéro spécial du Bulletin de Liaison<br />

On trouvera ci-après la reproduction, quasi intégrale des exposés qui ont été présentés, complétée<br />

par les articles de M. Le Roux : Texture et comportement des craies, de M. Struillou : Etude<br />

par vibrobroyage de l'aptitude des craies au compactage et de M. Panet : Quelques remarques<br />

sur la stabilité des tunnels réalisés dans la craie.<br />

Ce document ne prétend en aucun cas être exhaustif sur le sujet, mais a essentiellement pour but<br />

de publier un certain nombre de connaissances acquises sur la craie par les <strong>La</strong>boratoires des<br />

Ponts et Chaussées et en retour de susciter une collaboration plus étroite entre les chercheurs<br />

et praticiens qui sont amenés à se pencher sur le problème.<br />

Nous avons déjà eu l'occasion de mentionner les lumières qu'apporte sur le comportement<br />

de la craie l'étude de sa structure et l'emploi du microscope à balayage. L'exposé de M. Bignot<br />

et Mlle Aubry, l'article complémentaire de M. Le Roux et l'exposé de M. Masson, font le<br />

point sur cet apport. Il est, à notre avis, fondamental et nous croyons que l'on ne pourra plus<br />

travailler sur la craie sans se référer à l'un ou à l'autre de ces trois travaux.<br />

Plus pragmatiques apparaissent les contributions de M. de Raguenel et de M. Puig. Elles<br />

intéressent directement les ingénieurs routiers et spécialement les maîtres d'œuvre. Des enseignements<br />

décisifs en découlent :<br />

a) un grand remblai en craie peut très bien du fait de la présence d'eau se composer d'un<br />

matériau dont le coefficient de Poisson global est voisin de 0,5. Apparaissent alors dans le haut<br />

du remblai des contraintes de traction qui produisent des fissures de 1 à 2 décimètres de largeur ;<br />

b) le compactage d'un remblai en craie suppose l'emploi de techniques appropriées au cas<br />

particulier. Pour les choisir, l'essai de vibrobroyage exposé par M. Struillou permet de classer<br />

les craies et pour celles qui posent des problèmes de les éliminer ou de les mettre en œuvre<br />

suivant des techniques adaptées à la hauteur du remblai.<br />

Certes tout n'est pas dit dans ce domaine ; c'est ainsi que certains se demandent s'il est bien<br />

opportun de compacter jusqu'à dépasser dans le remblai les densités sèches qu'avaient les<br />

craies dans le gisement d'où elles sont extraites ; c'est ainsi que personnellement nous serions<br />

pour les remblais de faible hauteur, un peu plus prudent que ne l'est le rapport de M. Puig.<br />

Mais cela dit, il est très réconfortant de noter que l'on dispose enfin de recommandations claires<br />

concernant les terrassements.


<strong>La</strong> synthèse faite par M. Baguelin des essais de pieux et d'une manière plus générale de nos<br />

connaissances récentes dans le domaine des fondations dans la craie, montre clairement comment<br />

en pratique un ingénieur peut projeter ces ouvrages.<br />

De la même manière, l'exposé de M. Cornés montre comment exécuter les ouvrages souterrains<br />

et même si nous n'avons pas encore pénétré toutes les raisons de nos méthodes de travail, un<br />

progrès essentiel a été fait : nous savons comment projeter et exécuter.<br />

L'article de M. Panet montre dans quelle voie on peut étudier la stabilité des ouvrages souterrains<br />

dans la craie. <strong>La</strong> craie saine et non fissurée ne présente pas de difficultés très graves à court<br />

terme. Mais la craie est sujette à d'importantes déformations différées qui imposent au revêtement<br />

des sollicitations croissantes dans le temps, sollicitations qu'il faut prendre en compte.<br />

Conclusions<br />

Nous proposons de tirer du colloque quelques conclusions générales.<br />

Si les problèmes posés par les travaux dans la craie s'éclairent lorsque l'on examine la<br />

structure intime de la craie, il est toutefois nécessaire pour comprendre la mécanique de la<br />

craie d'entreprendre des études sur :<br />

— l'origine de la cohésion, à savoir, comment cette cohésion se détruit par des manipulations<br />

et se reconstitue au moment du repos ;<br />

— l'influence de la teneur en eau, à la fois sur cette cohésion et sur le comportement en masse<br />

de la craie ;<br />

— la normalisation des processus de prélèvement, de transport, de conservation, de préparation<br />

des éprouvettes et bien entendu d'essais ;<br />

— l'altération de la craie, étude à la fois des processus et des formes de cette altération.<br />

Ces études devront aboutir à une théorie mécanique de la craie expliquant aussi bien les constatations<br />

dans les travaux de fondations que dans ceux de terrassements.<br />

On ne devra jamais oublier que les grands remblais doivent être étudiés comme des ouvrages<br />

d'art, pour lesquels il est aujourd'hui possible de donner des recommandations. Celles-ci devront<br />

être appliquées avec prudence et leur exécution comme leur vie après construction devront<br />

faire encore l'objet de constatations.<br />

Les problèmes d'ouvrages souterrains dans la craie semblent liés à plusieurs paramètres :<br />

—• les caractéristiques intrinsèques du matériau (absence d'effet d'échelle, homogénéité d'ensemble)<br />

;<br />

— la hauteur de recouvrement ;<br />

— la méthodologie de foration ;<br />

— le type de soutènement;<br />

— le comportement à long terme et le fluage.<br />

•<br />

Il ne nous est pas possible de terminer cette présentation générale sans souligner le grand effort<br />

accompli depuis quelques années qui a abouti à des progrès très sensibles, sans souligner l'apport<br />

important de mise au point du colloque et sans féliciter chaleureusement les différents rédacteurs<br />

auxquels sont dus les progrès enregistrés.


<strong>La</strong> craie<br />

du Bassin parisien<br />

Séance sous la présidence de M. Berthier,<br />

Adjoint au Directeur du <strong>La</strong>boratoire Central des Ponts et Chaussées


Géologie de la craie<br />

dans le Bassin parisien<br />

G. BIGNOT<br />

M.P. AUBRY<br />

<strong>La</strong>boratoire de Micropalèontologie<br />

Université de Paris VI<br />

introduction<br />

Tous ceux qui ont séjourné sur le littoral cauchois ou visité les caves<br />

champenoises savent que la craie 1<br />

est Vun des principaux composants<br />

du sous-sol du nord de la France.<br />

Un examen plus attentif des falaises de Haute-Normandie révèle sans peine qu'en réalité la lithologie<br />

1 de cette roche n'est pas homogène (fig. 1) et que Ton peut distinguer des variétés différant<br />

les unes des autres par quelques détails (couleur, présence ou absence de silex, résistance à l'érosion,<br />

etc.).<br />

Les craies se définissent comme étant des roches sédimentaires de couleur claire, généralement<br />

blanches, poreuses, légères, faiblement cohérentes, presque exclusivement constituées de carbonate<br />

de calcium.<br />

En plus de cette signification pétrographique 1 ,<br />

une valeur stratigraphique 3 .<br />

le terme « craie » a acquis, au début du siècle dernier,<br />

Dès 1822, J.-B. Omalius d'Halloy groupa les craies du Bassin parisien à l'intérieur d'un système<br />

crétacé, représentatif d'une période de l'histoire de la Terre.<br />

Un peu plus tard, grâce aux particularités pétrographiques et paléontologiques* des craies,<br />

A. d'Orbigny proposa de diviser la portion la plus récente du Crétacé en trois étages, à savoir de<br />

haut en bas :<br />

— Sénonien ou craie blanche de Sens;<br />

— Turonien ou craie tuffeau de Tours;<br />

— Cénomanien ou craie chloritée du Mans.<br />

Ultérieurement, les géologues s'aperçurent que la craie d'un étage donné passe latéralement à des<br />

roches de nature différente : marnes, sables, grès, etc. Les changements d'aspect — on dit de faciès<br />

5<br />

— des terrains de même âge permettent de se représenter la sédimentation et ses variations<br />

dans un bassin à un moment donné. On peut alors reconstituer les différentes paléogéographies de<br />

celui-ci.<br />

Nous allons envisager successivement la craie sous ses aspects pétrographiques, stratigraphiques<br />

et paléogéographiques.<br />

1. <strong>Craie</strong> - du latin « creta » : roche peu cohérente telle la craie ou l'argile.<br />

2. Lithologie - du grec « lithos » : roche et de « logos » discours. Etude des caractères des roches. On dit aussi<br />

pétrographie - du grec « petros » : pierre.<br />

3. Stratigraphie - du latin « stratum » : couche et du grec « graphein » : décrire. Etude de la succession<br />

des terrains dans le but d'établir une chronologie ou « échelle stratigraphique ».<br />

4. Paléontologie - du grec « palaios » : ancien, « ontos » : être et « logos » : étude des êtres fossiles.<br />

5. <strong>La</strong> notion de faciès que nous devons à A. Gressly (1838) a été clairement définie par E. Haug comme suit<br />

« Par faciès géologique, nous entendons la somme des caractères lithologiques et paléontologiques que présente<br />

un dépôt en un point déterminé ».<br />

11<br />

Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch. - Spécial V - Octobre 1973


Fig. 1. — Les craies sur le terrain (faciès). _<br />

Dans les trois cas, les craies sont d'âge Sénonien inférieur.<br />

Falaises des environs d'Etretat.<br />

Les alignements de rognons de silex sont bien réguliers.<br />

Vue détaillée des falaises précédentes.<br />

Observez, parallèlement aux lits de silex, les<br />

bancs noduleux dont les parties dures sont<br />

mises en relief par l'érosion.<br />

continue, l'autre en rognons isolés.<br />

12


PÉTROGRAPHIE DES CRAIES<br />

Buffon s'intéressa le premier à la composition de la<br />

craie et fut suivi en cette voie par bien d'autres.<br />

Lucien Cayeux apporta les résultats fondamentaux.<br />

Sa magistrale Contribution à Vétude micrographique<br />

des roches sédimentaires [7] est consacrée, pour une<br />

part, aux craies du bassin de Paris. Publié en 1897,<br />

cet ouvrage fit autorité durant soixante ans et sa<br />

lecture reste encore aujourd'hui indispensable.<br />

Classiquement, l'étude pétrographique d'une craie<br />

nécessite quatre types d'examens :<br />

— les analyses chimiques et aux rayons X ;<br />

— le lavage et tamisage sous un filet d'eau. Les tamis<br />

les plus couramment employés ont des mailles de<br />

360 et 160 microns ; les résidus séchés sont examinés<br />

à la loupe binoculaire à de faibles grossissements (de<br />

10 à 50 fois) ;<br />

— le frottis qui consiste en l'examen au microscope<br />

optique, à de forts grossissements (de 1 000 à 1 500<br />

fois), de quelques gouttes d'eau dans lesquelles a été<br />

délayée une petite quantité de craie ;<br />

— la lame mince ou plaquette de craie collée sur une<br />

lame de verre et amenée à l'épaisseur de 25 à 50<br />

microns. <strong>La</strong> lame est examinée à la loupe ou au microscope<br />

(fig. 2, 3, 4, 7, 8 et 9).<br />

Les trois premières méthodes sont analytiques car on<br />

considère isolément les différents constituants chimiques,<br />

minéralogiques et paléontologiques. <strong>La</strong> dernière,<br />

par contre, est synthétique et tient compte à la fois<br />

des éléments constitutifs en place et de leur arrangement<br />

réciproque. J. Cuvillier a proposé de désigner<br />

cette image globale, ce « paysage sédimentaire », par<br />

le nom de « microfaciès ».<br />

Chimiquement et minéralogiquement, la craie est une<br />

roche presque entièrement formée de carbonate de<br />

calcium CaC0 3<br />

, à l'état de calcite. Son pourcentage<br />

peut dépasser 90, voire 95 %. Il peut s'y ajouter de<br />

la dolomite Mg Ca(C0 3<br />

) 2<br />

, du phosphate de calcium<br />

Ca 3<br />

(P0 4<br />

) 2<br />

, de la glaucome 6 , des argiles, de la silice,<br />

des sulfures de fer, en proportions variables. Lorsque<br />

la teneur en l'un de ces composants devient élevée,<br />

on distingue des craies dolomitiques, phosphatées,<br />

glauconieuses, marneuses ou des tuffeaux.<br />

<strong>La</strong>vages, frottis et lames minces révèlent la morphologie<br />

des constituants précédents. Depuis les travaux<br />

de Cayeux, on a pris l'habitude de distinguer dans<br />

les craies, comme d'ailleurs dans toute roche sédimentaire<br />

:<br />

—• les fragments détritiques provenant du démantèlement<br />

de roches préexistantes et resédimentés au fond<br />

des mers crétacées. C'est la fraction « héritée » ;<br />

— les restes des organismes ayant vécu autrefois dans<br />

ces mers. Le plus souvent, seules les parties initiale-<br />

6. <strong>La</strong> glauconie est un silicate hydraté de Fe et de K qui se présente<br />

en grains arrondis de couleur verte plus ou moins foncée.<br />

7. Ensemble des transformations subies par les sédiments postérieurement<br />

à leur dépôt.<br />

ment minéralisées ont été fossilisées. Elles sont complètes<br />

ou brisées en morceaux de taille variable ;<br />

— les minéraux de néoformation formés au moment<br />

de la sédimentation ou après au cours de la diagenèse 7 .<br />

Les fragments détritiques de grande taille ne sont pas<br />

courants dans les craies. Dans celles du Nord, de la<br />

Picardie et plus rarement du pays de Caux, des galets<br />

isolés de granité, de quartzite, de schiste et de houille,<br />

ont été rencontrés. Les grains de petite taille (de<br />

l'ordre du millimètre ou au-dessous) sont plus fréquents,<br />

les quartz abondent au Cénomanien. Les<br />

minéraux lourds : rutile, tourmaline, grenat, zircon,<br />

se trouvent quelquefois. Certaines argiles (montmorillonite)<br />

appartiennent à la fraction héritée èt représentent<br />

jusqu'à 40 % du total de la roche au<br />

Turonien inférieur. Les craies blanches, très pures,<br />

du Sénonien supérieur, sont presque totalement dépourvues<br />

d'éléments détritiques.<br />

Les organismes entiers ou en débris forment une<br />

portion importante des craies. A côté des grands<br />

fossiles qui sont, somme toute, accessoires, une foule<br />

de menus fragments d'origine organique s'observe<br />

au microscope : spicules de Spongiaires, débris de<br />

Bryozoaires (fig. 2), de Mollusques, d'Echinides (fig.<br />

3), accompagnés de microfossiles de petite taille (de<br />

0,1 à 1 mm) tels que des Ostracodes et des Foraminifères.<br />

Ces derniers peuvent être fort nombreux ; dans<br />

certaines craies picardes, leur nombre a été évalué à<br />

3 700 individus par 10 g de roche. Enfin, aux très<br />

forts grossissements, le microscope permet d'apercevoir<br />

des fossiles encore plus petits : Pithonelles (fig. 4),<br />

coccolithes (fig. 5) et Nannoconus (fig. 6) dont la taille<br />

avoisine 20 à 50 p. Ce sont les nannofossiles.<br />

Plusieurs minéraux de néoformation sont probablement<br />

d'origine biochimique, résultat de l'activité<br />

biologique de bactéries. On explique ainsi la formation<br />

des grains de glauconie (fig. 7), des boules de marcassite,<br />

du phosphate (fig. 8). <strong>La</strong> mise en place des silex<br />

et la dolomitisation (fig. 9) se comprennent encore mal.<br />

On constate cependant que cette dernière est localisée<br />

dans les régions affectées de plissements ou de failles<br />

(vallée de la Seine, bombement de Beynes, de Compiègne).<br />

Tous ces constituants sont noyés dans une matrice<br />

que les techniques classiques ne permettent pas d'analyser.<br />

Cayeux a appelé cette matrice « ciment » et l'a<br />

considérée comme « la somme des éléments minéraux<br />

et organiques de dimension tellement exiguë qu'il est<br />

impossible d'en préciser la forme et la nature ».<br />

L'utilisation récente depuis 1966 (D. Noël [9]) du<br />

microscope électronique qui permet des grossissements<br />

importants jusqu'à 50 000 fois, a considérablement<br />

accru nos connaissances. Contrairement à ce qui est<br />

de règle avec le microscope optique, où l'observation<br />

porte sur une certaine épaisseur de roche vue par<br />

transparence, en microscopie électronique, la surface<br />

seule du matériau — obtenue par simple cassure —<br />

est prise en considération. L'observation porte sur<br />

une fraction de la roche non modifiée, dans laquelle<br />

les différents constituants sont intacts et « in situ ».<br />

13


Fig. 2. — <strong>Craie</strong> à débris de Bryozoaires.<br />

Fig. 3. — <strong>Craie</strong> à débris d'Echinodermes.<br />

Fragments de Bryozoaires et Foraminifères noyés dans un « ciment » Gros débris d'Echinodermes, de <strong>La</strong>mellibranches, etc., grains de<br />

peu cohérent de calcite cryptocristalline.<br />

glauconie ; petits galets (?) de craie argileuse à Pithonelles et<br />

Sénonien supérieur (assise à Actinocamax quadrati,*). Saint-Didier-<br />

Foraminifères. « Ciment » de calcite spathique.<br />

des-Bois (Eure), x 18 (MPA 93). Turonien. Saint-Jouin (Seine-Maritime), x 10 (GB 1175).<br />

OI<br />

io<br />

io<br />

Fig. 4. — <strong>Craie</strong> argileuse à Pithonelles.<br />

Nombreuses Pithonelles ovales ou circulaires de 30 à 65 n à parois<br />

relativement épaisses. Une Calcisphaerula sphérique, plus grande<br />

(150 tx) et à paroi mince. A droite du cliché, un Foraminifère<br />

(Hedbergella). Quelques Radiolaires en dehors du champ photographié.<br />

« Ciment » de calcite et d'argiles cryptocristallines.<br />

Turonieninférieur (à Inoceramus <strong>La</strong>biatus et grandes Ammonites).<br />

Le Tréport (Seine-Maritime), x 45 (GB 126).<br />

Fig. 5.<br />

a) Coccosphère de Coccolithus pelágicas (d'après Murray et Blackmann,<br />

in Deflandre). <strong>La</strong> coccosphère est la coque, constituée de<br />

coccolithes, qui entoure la cellule du Coccolithophoridé, env. x 5000.<br />

b) Coccolithe isolé de Prediscosphaera cretácea (d'après Noël).<br />

Chaque coccolithe est formé de petits éléments calcaires de taille et<br />

de forme variables, x 15000.<br />

c) Eléments isolés, x 15000.<br />

k<br />

14


Fig. 7. — <strong>Craie</strong> glauconieuse.<br />

Petits quartz anguleux hétérométriques (0,1 à 0,4 mm). Grains de<br />

glauconie verte à contour arrondi ou lobé de 0,2 à 1 mm de diamètre.<br />

Spicules calcinés de Spongiaires, débris d'Echinides. « Ciment »<br />

cohérent de calcite cryptocristalline avec des plages plus largement<br />

cristallisées.<br />

Cénomanien. Octeville (Seine-Maritime), X 22 (GB 506).<br />

Fig. 8. — <strong>Craie</strong> phosphatée.<br />

Quelques petits quartz et plages d'opale. Fossiles (Polypiers) altérés<br />

par l'épigenèse en phosphate. Grains et feuillets de phosphate<br />

cristallin.<br />

Sénonien supérieur (assise à Actinocamax quadratus). Ileim-Monacu<br />

(Aisne), x 7 (GB 1681).<br />

Fig. 9. — <strong>Craie</strong> dolomitique.<br />

Petits débris de <strong>La</strong>mellibranches et d'Echinodermes. Nombreux<br />

microrhomboèdres de dolomite de 0,1 mm. « Ciment » cryptocristallin.<br />

Sénonien inférieur. Margny-lès-Compiègne (Oise), x 18 (GB 396).<br />

i<br />

Fig. 6.<br />

à) « Rosette » de Nannoconus steinmanni (d'après Trejo). <strong>La</strong> rosette<br />

constituée de Nannoconus rayonnants et jointifs, apparaît comparable<br />

morphologiquement à la coccosphère, env. x 1000.<br />

b) Schéma de la section axiale d'un Nannoconus steinmanni (d'après<br />

Bronnimann). Chaque nannoconus est constitué de prismes disposés<br />

radiairement, env. x 7000.<br />

c) Elément prismatique isolé env. x 7000.<br />

15


Fig. 10a. — Matrice constituée de coccolithes entiers mélangés à<br />

des éléments de calcite. Aucune liaison n'existe entre ces constituants :<br />

ils sont simplement juxtaposés les uns aux autres. Ainsi sont<br />

individualisés des vides de tailles variées.<br />

Campanien, Incarville (Eure), x 2000.<br />

Fig. 106. — Matrice principalement constituée d'éléments.<br />

Quelques coccolithes, une section axiale de Nannoconus.<br />

Coniacien, Rouvray (Seine-Maritime), x 2000.<br />

Fig. 10c. — Matrice plus hétérogène : coccolithes, éléments, un fragment<br />

de test de Foraminifère, de gros cristaux de calcite.<br />

Turonien supérieur, Trith-Saint-Léger (Nord), x 2000.<br />

Fig. lOd. — Détail de la structure d'une matrice : coccolithes, les uns<br />

entiers, les autres en partie désorganisés, éléments. Des vides<br />

( — pores) de taille variable sont individualisés.<br />

Coniacien, Sauqueville (Seine-Maritime), x 4500.<br />

A cette échelle, on ne peut plus parler de microfaciès.<br />

Le terme « nannofaciès », récemment introduit, désigne<br />

l'ensemble des caractères minéralogiques et paléontologiques,<br />

ainsi que leurs relations mutuelles (fig. 10,<br />

11, 12 et 13).<br />

Ainsi examiné, le ciment se montre constitué de<br />

nannofossiles et de très petits éléments (fig. 10) juxtaposés<br />

reliés entre eux par des ponts calcitiques, délimitant<br />

de nombreux espaces vides. <strong>La</strong> taille des éléments<br />

oscille autour du micron.<br />

Dans ses travaux sur les craies campaniennes,<br />

D. Noël [10] a considéré les éléments comme résultant<br />

de la fragmentation de coccolithes (fig. 5 et 11).<br />

Récemment, il a été établi (M.-P. Aubry [2]) que ce<br />

sont les Nannoconus (fig. 6 et 12) qui sont à l'origine<br />

de la plupart des éléments des craies turoniennes.<br />

Comme M. Masson l'exposera plus loin 8 , la connaissance<br />

des nannofaciès est fondamentale pour l'ingénieur.<br />

En effet, la taille et l'arrangement réciproque<br />

des éléments conditionnent diverses particularités des<br />

16


Fig. lia. — Coccolithes nombreux partiellement brisés et éléments.<br />

Coniacien supérieur, Sauqueville (Seine-Maritime), x 2000.<br />

Fig. 11b. — Accumulation de coccolithes partiellement désorganisés.<br />

Structure très lâche. Coniacien, x 3250.<br />

craies, leur densité, leur couleur, leur faible cohérence,<br />

leur grande porosité et leur perméabilité réduite. Le<br />

comportement géotechnique d'une roche (spécialement<br />

sa résistance mécanique et son comportement à l'eau)<br />

est en relation directe avec son nannofaciès.<br />

Le passage est insensible entre les véritables craies<br />

et les variétés dolomitiques, phosphatées, glauconieuses<br />

(fig. 7), marneuses (fig. 13) et tufïeaux. Cependant,<br />

l'augmentation sensible du pourcentage d'un<br />

constituant accessoire (dolomite, phosphate, glaucomes,<br />

argile, silice) modifie profondément le nannofaciès,<br />

et partant, les propriétés mécaniques du matériau<br />

résultant. A la limite, on aboutit à des roches<br />

(dolomies compactes, marnes, calcaires siliceux) qui<br />

n'ont plus rien de commun avec les véritables craies.<br />

On les désigne pourtant habituellement par le même<br />

terme « craie » suivi d'un adjectif. Un tel vocabulaire<br />

est source de confusions.<br />

STRATIGRAPHIE DES CRAIES<br />

Les craies parisiennes appartiennent à trois étages<br />

différents 9 . Chacun d'eux correspond à un ensemble<br />

de couches à contenu paléontologique défini et constant.<br />

Des études minutieuses ont montré que l'apparition<br />

ou la disparition de fossiles privilégiés permettent<br />

de pousser plus loin encore la division stratigraphique<br />

des terrains en définissant des biozones. Un étage en<br />

comprend un nombre variable.<br />

Il serait fastidieux de détailler les zonations établies<br />

au cours de la deuxième moitié du siècle par E. Hébert,<br />

8. Cf. article suivant de M. Masson : Pétrophysique de la craie.<br />

9. Notons que l'on connaît des craies non crétacées. Récemment,<br />

les géologues britanniques ont trouvé au fond de la<br />

Manche des roches tout à fait semblables pétrographiquement<br />

à nos craies, mais les fossiles qu'elles renferment sont beaucoup<br />

plus récents et d'âge miocène.<br />

Fig. 11c. — Coccosphère.<br />

Santonien, Vastérival (Seine-Maritime), x 8000.<br />

Ch. Barrois, J. <strong>La</strong>mbert, E. Bucaille, A. de Grossouvre<br />

et d'autres. Ils se basèrent sur les fossiles de grande<br />

taille ou macrofossiles appartenant aux groupes zoologiques<br />

suivants :<br />

— les Ammonites fréquentes dans le Cénomanien,<br />

plus rares ensuite ;<br />

— les <strong>La</strong>mellibranches ;<br />

17


— les Echinides toujours très nombreux ;<br />

— les Bélemnitelles précieuses pour la subdivision<br />

des craies du Sénonien supérieur.<br />

<strong>La</strong> répartition dans le temps des représentants de ces<br />

groupes a permis de dresser, pour les craies du Bassin<br />

parisien, une échelle désormais classique, résumée dans<br />

le tableau.<br />

Certains stratigraphes découpent le Sénonien parisien<br />

en trois sous-étages : Coniacien, Santonien et Campanien,<br />

définis dans les Charentes alors qu'il y a très<br />

Fig. 13. — Matrice à structure serrée : entre les éléments et les nannofossiles<br />

se glissent des feuillets d'argile, souvent concentrés en<br />

lentilles.<br />

Turonien supérieur, Trith-Saint-Léger (Nord), x 2000.<br />

peu de fossiles communs entre le nord du Bassin<br />

aquitain et le Bassin parisien. Pour cette raison,<br />

nous pensons qu'il est parfois imprudent de distinguer<br />

dans nos craies le Coniacien et le Santonien. On<br />

peut admettre, par contre, la synonymie approximative<br />

: Campanien = Sénonien supérieur, en se basant<br />

sur la présence simultanée de quelques fossiles.<br />

Fig. 12a. — Les Nannoconus sont très abondants dans les matrices des<br />

craies turoniennes. Ici, s'en observent deux, de part et d'autre des loges<br />

de Foraminifères ; l'un en section transverse, l'autre de profil.<br />

Turonien inférieur (à Inoceramus labiatus). Saint-Martin-Plage (Seine-<br />

Maritime), x 4000.<br />

Fig. \ïb. — Nannoconus.<br />

Si les macrofossiles ont historiquement joué un grand<br />

rôle dans l'établissement de la stratigraphie de la craie,<br />

ils sont maintenant un peu négligés à cause de leur :<br />

— rareté relative au moins en plusieurs régions<br />

(Champagne) ;<br />

— conservation souvent imparfaite ;<br />

— détermination difficile, due principalement au fait<br />

que la paléontologie classique est en ce moment une<br />

discipline peu en honneur en France.<br />

Pour dater les craies, on a de plus en plus recours aux<br />

microfossiles, Foraminifères principalement. Nous<br />

avons vu qu'ils sont toujours nombreux et que leur<br />

mise en évidence est aisée. Le lavage est la méthode<br />

la plus économique et la plus utilisée. Pour ce faire,<br />

un kilogramme de craie déposé sur un tamis à maille<br />

de 0,36 mm est délayé sous un filet d'eau, le refus<br />

sur le tamis, après disparition des particules les plus<br />

fines, est presque totalement constitué de microfossiles.<br />

Parallèlement à la zonation macropaléontologique,<br />

on a pu établir des microbiozonations basées sur<br />

l'apparition ou la disparition des espèces de Foraminifères.<br />

Jusqu'à ce jour, seules les zonations locales<br />

ont été publiées pour les régions suivantes :<br />

— Rouen (R.K. Goël, 1962) ;<br />

— Dieppe et Saint-Valéry-sur-Somme (A.A. Ariai,<br />

1965 et A. Chemirani, 1968) ;<br />

— Sens (K.K. Téhérani, 1968) ;<br />

— Tours (J.P. Bellier, 1968) ;<br />

— Reims et Epernay (K. Ebrahimzadeh, 1968).<br />

18


Tableau des subdivisions stratigraphiques établies dans les craies de trois régions différentes du Bassin parisien<br />

(d'après divers auteurs)<br />

HAUTE-NORMANDIE ARTOIS SENONAIS<br />

SENONIEN<br />

I (= SUPÉRIEUR<br />

CAMPANIEN)<br />

INFÉRIEUR<br />

j<br />

TURONIEN<br />

[OMANIEN<br />

u<br />

Assises à<br />

Belemnitella<br />

mucronata<br />

Assises à<br />

Actinocomax<br />

quadratus<br />

vlicraster<br />

unum<br />

Assises à Ì<br />

corangi<br />

Assises à Micraster<br />

decipiens<br />

(manque)<br />

<strong>Craie</strong> blanche de Saint-Didier-desbois<br />

à Actinocamax quadratus<br />

<strong>Craie</strong> blanche, tendre du Cap<br />

d'Ailly à Marsupites testudinarius<br />

<strong>Craie</strong> blanche tendre de Belbeuf<br />

à Micraster coranguinum<br />

<strong>Craie</strong> blanche de Canteleu à<br />

Echinocorys carinatus<br />

<strong>Craie</strong> grenue de Moulineaux et<br />

d'Orival à Bryozoaires et silex<br />

zones<br />

<strong>Craie</strong> blanche calcaire de Quevilly<br />

à Micraster decipiens<br />

(manque)<br />

<strong>Craie</strong>s phosphatées<br />

<strong>Craie</strong>s blanches<br />

<strong>Craie</strong> jaunâtre noduleuse de Saint- <strong>Craie</strong> phosphatée du Cambrésis à<br />

Etienne-du-Rouvray à Micraster Micraster decipiens<br />

decipiens et Micr. normanniae<br />

<strong>Craie</strong> de Montereau (et de Meudon)<br />

à Magas pumilus<br />

<strong>Craie</strong> de<br />

papillosa<br />

Michery à Galeola<br />

<strong>Craie</strong> de Soucy à Offaster pilula<br />

<strong>Craie</strong> de Sens à Marsupites testudinarius<br />

<strong>Craie</strong> de Paron à Conulus albogalerus<br />

<strong>Craie</strong> de Maillot à Inoceramus<br />

involutus<br />

<strong>Craie</strong> de Rosoy à Micraster<br />

decipiens<br />

<strong>Craie</strong> à Micraster decipiens, Epiaster<br />

brevis et Prionotropis neptuni<br />

<strong>Craie</strong> marneuse tendre de Blosseville-Bonsecours<br />

à Terebratulina<br />

planus<br />

<strong>Craie</strong> de Vervins à Holaster planus<br />

<strong>Craie</strong> de Saint-Julien à Holaster<br />

rigida<br />

<strong>Craie</strong> marneuse blanche de Maromme<br />

à Terebratula semiglobosa<br />

<strong>Craie</strong> noduleuse de la Poterie-<br />

Belbeuf à Inoceramus labiatus<br />

et grandes Ammonites<br />

<strong>Craie</strong>s à Actinocamax plenus<br />

<strong>Craie</strong> glauconieuse de Rouen à<br />

Acanthoceras rothomagensis<br />

<strong>Craie</strong> sableuse du Mont-Gargan à<br />

Pecten asper et Holaster subglobosus<br />

<strong>Craie</strong> sableuse d'Eauplet à Ostrea<br />

lateralis<br />

Marnes grises à Terebratulina<br />

rigida et Inoceramus brongniarti<br />

« Dièves vertes » à Inoceramus<br />

labiatus<br />

Marnes glauconieuses à Actinocamax<br />

plenus<br />

« Dièves blanches »<br />

« Tourtias » à Acanthoceras<br />

rothomagensis et Mantelliceras<br />

mantelli<br />

<strong>Craie</strong> de Villevallier à Cardiotaxis<br />

peroni<br />

<strong>Craie</strong> de Joigny à Terebratulina<br />

rigida<br />

<strong>Craie</strong> de Brion à Echinoconus<br />

subrotondus<br />

<strong>Craie</strong> Actinocamax plenus et<br />

Inoceramus labiatus<br />

<strong>Craie</strong> de Saint-Pierre à Scaphites<br />

aequalis<br />

<strong>Craie</strong> massive à Spongiaires et<br />

Echinides<br />

<strong>Craie</strong> à Céphalopodes<br />

On remarque que cette chronologie est relative. Elle permet uniquement de savoir que telle craie est plus ancienne ou plus récente<br />

que telle autre. Grâce à des procédés géochimiques complexes, il s'élabore peu à peu une chronologie absolue fixantpour chaque<br />

âge relatif une ancienneté précise. Les résultats obtenus sont encore imparfaits, mais les spécialistes s'accordent sur les chiffres<br />

approximatifs suivants :<br />

terrains sénoniens : autour de 75 millions d'années ;<br />

terrains turoniens : autour de 90 millions d'années ;<br />

terrains cénomaniens : entre 95 et 100 millions d'années.<br />

19


Une généralisation valable pour l'ensemble du Bassin<br />

parisien est actuellement mise au point par Ch. Monciardini<br />

qui détaillera, par ailleurs, sa méthode et les<br />

résultats qu'il a obtenus. D'ores et déjà, à la lumière<br />

de ces travaux récents et d'autres plus anciens, comme<br />

ceux menés il y a une trentaine d'années par P. Marie,<br />

on peut affirmer qu'il est tout à fait possible de dater<br />

rapidement et avec exactitude des craies, à partir de<br />

l'examen de leurs résidus de lavage.<br />

Quel est l'avantage, pour le géotechnicien, de situer<br />

les craies dans l'échelle stratigraphique ?<br />

Il réside dans le fait que la pétrographie des craies<br />

varie avec leur âge. Déjà en'1897, L. Cayeux écrivait :<br />

« Chacune des craies que j'ai étudiées possède des<br />

caractères microscopiques qui lui sont propres et que<br />

j'ai mis en évidence par l'examen pétrographique que<br />

j'en ai fait. <strong>La</strong> considération des minéraux, des organismes<br />

et du ciment d'un morceau de craie permet de<br />

fixer sa place, non seulement dans la série des assises,<br />

mais encore dans celles de leurs subdivisions ».<br />

En d'autres termes, on peut dater les craies à partir<br />

de leur microfaciès (fig. 2 à 9). Des recherches récentes<br />

encore inédites ont montré, comme il fallait s'y<br />

attendre, que les nannofaciès ont, eux aussi, une signification<br />

stratigraphique. On saura, très bientôt, caractériser<br />

et dater les craies par leurs nannofaciès. Leur<br />

étude apparaît alors comme une méthode de choix<br />

à intérêts multiples. Elle conduira à des renseignements<br />

dans le domaine stratigraphique en datant le matériau<br />

en même temps qu'elle expliquera et, éventuellement,<br />

permettra de prévoir ses propriétés mécaniques.<br />

L'observation des nannofaciès nécessite l'utilisation<br />

d'un matériel coûteux par des spécialistes avertis.<br />

Ceux-ci, en collaboration avec les géotechniciens,<br />

établiront peu à peu des tableaux où seront portés<br />

en parallèle, pour les différentes craies, âge (à partir<br />

des microfossiles) - nannofaciès - comportement<br />

mécanique. L'observation des nannofaciès, étape intermédiaire,<br />

sera faite une fois pour toutes et l'ingénieur<br />

mis en présence d'une craie, disposera, avec une simple<br />

datation, de renseignements géotechniques immédiatement<br />

utilisables.<br />

PALÉOGÉOGRAPHIE DU BASSIN PARISIEN<br />

AU CRÉTACÉ SUPÉRIEUR<br />

Les terrains de même âge présentent des caractères<br />

pétrographiques et paléontologiques, c'est-à-dire des<br />

faciès, des microfaciès et des nannofaciès différents<br />

selon leur position géographique ; en conséquence,<br />

leurs propriétés mécaniques se modifient parallèlement.<br />

Il est instructif de préparer, pour chaque étage, une<br />

carte de répartition de faciès. Un tel document rend<br />

particulièrement évidents les passages latéraux entre<br />

craies et roches de nature différente.<br />

Des tableaux de concordance âge-nannofacièscomportement<br />

géotechnique devront nécessairement<br />

être dressés pour plusieurs points du bassin. Plus ces<br />

points seront proches, plus leur utilisation sera fructueuse.<br />

L'établissement de ces données exige des<br />

recherches de longue haleine. Le travail est bien<br />

avancé pour ce qui concerne la Haute-Normandie.<br />

Les géologues et les ingénieurs des Ponts et Chaussées,<br />

travaillant en Collaboration, terminent actuellement<br />

l'étude détaillée des craies du Havre, de Rouen et<br />

de Dieppe.<br />

Il nous paraît indispensable d'aborder maintenant<br />

un problème proprement géologique : quelles sont<br />

les causes des variations géographiques de faciès ?<br />

Les géologues proposent une explication en essayant<br />

de reconstituer cartographiquement les paléogéographies<br />

successives des bassins sédimentaires. Il ne<br />

saurait être question de développer ici de longues<br />

considérations, mais quelques points méritent d'être<br />

soulignés. L'établissement des cartes paléogéographiques<br />

se heurte à un problème majeur. On ne connaît,<br />

en effet, que l'extension actuelle des sédiments conservés<br />

à l'intérieur de limites d'érosion. De sorte qu'il<br />

est toujours difficile — sauf cas exceptionnel de<br />

rivages fossilisés — d'établir l'extension réelle des<br />

sédiments d'un âge donné, donc de préciser les relations<br />

mer-continent.<br />

Rappelons, tout d'abord, que les craies parisiennes<br />

sont d'anciens dépôts marins ainsi qu'en témoignent<br />

les organismes fossiles qu'ils renferment et dont on<br />

retrouve des équivalents dans les mers actuelles<br />

(Coccolithophoridés, Echinides, etc.).<br />

Résumons comment les géologues se représentent<br />

l'évolution du Bassin parisien au cours du Crétacé<br />

supérieur.<br />

<strong>La</strong> mer cénomanienne a recouvert entièrement le<br />

Bassin parisien et la Manche orientale (fig. 14). Vers<br />

l'ouest (Cotentin, Anjou, Touraine), les dépôts très<br />

détritiques, sableux ou marneux, indiquent la proximité<br />

du littoral. Il en va de même pour le nord et le<br />

nord-est (Argonne, Hainaut, Artois) où se sont<br />

formées des gaizes et des marnes contenant à leur<br />

base des galets de roches anciennes. Au centre du<br />

bassin, les éléments détritiques les plus grossiers n'ont<br />

pu parvenir. Si la fraction organique y est prédominante,<br />

les apports continentaux à l'état soluble n'en<br />

sont pas moins importants. Ceux-ci donneront naissance<br />

à la glauconie (fig. 7) et aux silex. <strong>La</strong> mer<br />

cénomanienne communiquait dans l'océan par les<br />

emplacements actuels de la Loire et du Pas-de-Calais.<br />

Il semble bien qu'elle ait été également en relation,<br />

par le sud-est, avec la mer alpine (détroit morvanovosgien).<br />

Au Turonien, la situation est analogue (fig. 15). Les<br />

dépôts restent franchement détritiques dans le sudouest<br />

(« tuffeaux » de Touraine) et marneux vers le<br />

nord (« dièves bleues » de l'Artois). Au centre du<br />

bassin, des craies d'origine organique dominent (fig.<br />

3 et 4). Toutefois, la présence d'argiles (craies marneuses)<br />

témoigne d'un apport continental détritique<br />

non négligeable.<br />

Les sédimentations sénoniennes sont plus difficiles<br />

à reconstituer (fig. 16 et 17) car l'érosion a fait en<br />

20


grande partie disparaître les formations détritiques<br />

littorales. Toutefois, la « craie » de Villedieu suggère la<br />

proximité du rivage armoricain. Le Sénonien est<br />

presque exclusivement représenté par des craies<br />

blanches à silex dans lesquelles l'apport continental<br />

s'est limité à des arrivées de phosphates (fig. 8) et de<br />

silice dissous. Les craies blanches sont pratiquement<br />

dépourvues de fraction détritique sableuse ou marneuse<br />

(fig. 2).<br />

On ne sait si la mer s'est retirée à la findu Sénonien<br />

ou au Maestrichtien. Si des sédiments de ces âges se<br />

sont déposés dans le Bassin parisien, ils ont été entièrement<br />

déblayés par l'érosion post-crétacée.<br />

Pendant longtemps, la craie a été considérée comme<br />

l'équivalent fossile des actuelles boues à Globigérines<br />

que l'on rencontre au fond des océans Atlantique et<br />

Pacifique à des profondeurs excédant 1 000 m.<br />

L.Cayeux a vivement critiqué cette assimilation. Il a<br />

établi à partir de l'examen des macrofossiles que la<br />

craie s'est déposée sous une tranche d'eau inférieure<br />

à 250 m. Tous les résultats récents confirment l'hypothèse<br />

de Cayeux.<br />

Les terres émergées fournissaient à la sédimentation<br />

marine du matériel détritique sableux et argileux. Ce<br />

transport a atteint son maximum au Cénomanien,<br />

puis s'est progressivement réduit au cours du Turonien<br />

pour disparaître au Sénonien. Par contre, l'apport<br />

des éléments dissous, générateurs de glauconie, de<br />

silex et de phosphates, semble être resté important<br />

tout au long du Crétacé supérieur. Pour expliquer<br />

ce phénomène, l'hypothèse de masses continentales<br />

à peu près complètement arasées et pénéplanées dès<br />

le Turonien, a été proposée (Bailey 1923). L'érosion,<br />

cessant peu à peu, les apports détritiques diminueront.<br />

<strong>La</strong> théorie de la biorhésistasie (Ehrardt 1934) a conduit<br />

à une explication complètement différente. A l'idée<br />

d'un désert, s'est substituée celle d'un continent<br />

soumis à un climat humide et relativement chaud,<br />

Manche orientale<br />

vosgien<br />

•vosgien<br />

Fig. 14. — Le Bassin parisien au Cénomanien.<br />

Fig. 15. — Le Bassin parisien au Turonien.<br />

Emplacement approximatif des rivages de la mer<br />

Limites actuelles des sédiments de l'étage considéré<br />

Terres émergées<br />

Massif<br />

vosgien<br />

mor vano- vosg len<br />

Fig. 16. — Le Bassin parisien au Sénonien inférieur<br />

(= Conacien + Santonien).<br />

Fig. 17. — Le Bassin parisien au Sénonien supérieur ( = Campanien).<br />

21


favorisant le développement de la végétation. Ce<br />

couvert végétal a joué le rôle d'un filtre retenant les<br />

éléments détritiques grossiers (phase résiduelle insoluble)<br />

et permettant le départ des éléments minéraux<br />

et organiques dissous (phase migratrice soluble). Le<br />

bassin cesse d'être alimenté en sable et en argiles, mais<br />

continue à recevoir du carbonate de calcium, de la<br />

silice et des phosphates. Ceux-ci favorisent le pullulement<br />

des organismes marins : Coccolitophoridés,<br />

Nannoconus, Pithonelles, Spongiaires, etc. Ainsi,<br />

peut-être est-il possible d'interpréter la formation<br />

des véritables craies à silex et des craies phosphatées<br />

comme la conséquence de l'établissement progressif<br />

d'une végétation continentale dense.<br />

Conclusion<br />

Bien d'autres problèmes auraient dû être abordés, en particulier, celui de Vhydrogéologie des craies.<br />

Cela n'était guère possible en si peu de pages.<br />

Tel qu'il est, ce bref aperçu montre — une fois de plus — tout l'intérêt qu'il y a pour l'ingénieur à<br />

envisager ces problèmes sous un angle géologique. <strong>La</strong> pétrographie moderne, utilisant de plus en<br />

plus le microscope électronique, apporte avec la notion de nannofaciès, une explication aux particularités<br />

mécaniques des roches.<br />

Quant aux données stratigraphiques et paléogéographiques, elles permettent, en replaçant ces<br />

roches dans le temps et dans l'espace, de considérer les problèmes géotechniques dans un cadre<br />

générateur d'indispensables vues d'ensemble.<br />

BIBLIOGRAPHIE<br />

[1] ABRARD R., Géologie régionale du Bassin de Paris. 397 p., Paris. Payot (1950).<br />

[2] AUBRY M.-P., Importance géologique des Nannoconus dans les craies turoniennes de la région<br />

dieppoise, Bull. Soc. Géol. Normandie, t. LX (1970), p. 3-9.<br />

[3] AUBRY M.-P., Recherches sur les craies de Haute-Normandie, Thèse 3 e cycle, Univ. Paris-VI (à paraître).<br />

[4] BAILEY E.B., The desert shores of the chalk seas, Proc. Géol. Assoc., vol. LXI, (1924), p. 102-116.<br />

[5] BIGNOT G., Les microfaciès et leur utilisation stratigraphique, Coll. méth. tendances, Stratigraphie,<br />

Orsay, (1970).<br />

[6] BIGNOT G., et EBRAHIMZADEH K., <strong>La</strong> craie à Marsupites testudinarius du Cap d'Ailly (près de<br />

Dieppe, Seine-Maritime). Bull. Soc. Géol. Normandie, t. LIX (1969), p. 4-15.<br />

[7] CAYEUX L., Contribution à l'étude micrographique des terrains sédimentaires. 589 p., Lille, Le Bigot<br />

(1897).<br />

[8] EHRARDT H., <strong>La</strong> genèse des sols en tant que phénomène géologique. 177 p., Paris, Masson (1967).<br />

[9] NOËL D., Etude des Coccolithes in situ dans les roches. <strong>La</strong> notion de nannofaciès. Proc. First Int.<br />

Conf. Plankt. Micro/., Geneva, vol. II, (1967), p. 486-491.<br />

[10] NOËL D., Coccolithes crétacés. <strong>La</strong> craie campanienne du Bassin de Paris, 130 p. Paris, éd. CNRS<br />

(1970).<br />

NOTE DE L'AUTEUR<br />

Depuis le colloque de Rouen au cours duquel le texte ci-dessus a été présenté, les recherches sur la craie ont<br />

été activement poursuivies. En nous limitant à l'étude pétrographique au microscope électronique à balayage,<br />

il convient spécialement de citer les publications suivantes :<br />

AUBRY M.-P., Recherches pétrographiques, stratigraphiques et paléo-sédimentologiques sur les craies de Haute-<br />

Normandie.<br />

Thèse 3 e cycle, Univ. Paris-VI, 108 p., 24 pl. (1972).<br />

LE ROUX A., Caractéristiques mécaniques des roches argileuses en relation avec leur texture.<br />

Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., 61, sept.-oct. 1972, p. 151-178 (1972).<br />

Elles font le point sur les travaux qui étaient en cours lors du colloque.<br />

Les résultats détaillés dans ces ouvrages sont importants, bien que certains ne soient encore que des hypothèses<br />

de travail. L'utilisation du microscope électronique en pétrographie a entraîné une évolution importante des<br />

connaissances admises jusqu'alors depuis Cayeux. Il est souhaitable que les toutes récentes découvertes subissent<br />

un peu l'épreuve du temps et de la critique avant de sortir du domaine des spécialistes.<br />

22


1<br />

Pétrophysique de la craie<br />

introduction<br />

M. MASSON<br />

Assistant géologue<br />

<strong>La</strong>boratoire régional de Rouen<br />

<strong>La</strong> nécessité d'une étude particulière de la « craie » s'est révélée lorsque<br />

de grands travaux de terrassements ou defondations ont intéressé ce matériau<br />

naturel. En effet, des difficultés importantes sont alors apparues :<br />

— au niveau des chantiers : comportement très variable, proche soit de celui d'un calcaire, soit<br />

de celui d'un limon, voire d'une argile ;<br />

— au niveau des études : difficulté de prévision du comportement par les moyens habituels de la<br />

géotechnique.<br />

De premières recherches très limitées, liées à l'expérience de chantier, permettaient néanmoins de<br />

mettre l'accent, d'une part, sur la variété pétrographique recouverte par le terme « craie », d'autre<br />

part, sur l'influence probablement déterminante de la structure fine, microscopique, de ce matériau<br />

sur son comportement.<br />

Cependant, l'ambiguïté même de la craie — roche pour les uns, sol pour les autres, au sens mécanique<br />

du terme — ne constituait pas un facteur favorable à la programmation d'une recherche à<br />

ce sujet. A l'indifférence des géotechniciens répondait d'ailleurs celle des géologues, peu préoccupés<br />

par une formation en apparence fort monotone, et dont seules, très récemment, les techniques de<br />

la micropaléontologie (microfaciès et nannofaciès) permettent de renouveler l'étude.<br />

Les insuffisances des méthodes classiques de reconnaissance géotechnique ayant conduit à des déboires<br />

importants lors de terrassements routiers ou autoroutiers, c'est en définitive sur ce type de<br />

problème qu'a été concentrée la recherche. Les chantiers de terrassements présentent d'ailleurs<br />

l'avantage de constituer un terrain de constatations idéal et permettent, une fois achevés, des observations<br />

et des prélèvements aisés. Aussi, l'étude a-t-elle eu pour objet, à partir des problèmes<br />

concrets mis en évidence lors des travaux, de définir le plus précisément possible le matériau utilisé,<br />

sous le triple aspect géologique, physique et mécanique.<br />

En première phase, l'étude a posteriori de cinq types de craie de Normandie, liée à quatre chantiers<br />

importants, a permis de différencier ces craies et de corréler à leur comportement les résultats<br />

d'essais de laboratoire.<br />

L'extension de l'étude à des craies du nord, de Picardie et de la région parisienne a permis de vérifier<br />

la validité de la méthode.<br />

Cet article, rédigé dans une optique d'application géotechnique, a pour but :<br />

— sur le plan pratique, de proposer une méthode d'étude d'un massif crayeux en vue de la prévision<br />

du comportement en terrassement ;<br />

— sur le plan théorique, de mettre en évidence le rôle de la structure fine dans le comportement<br />

d'un matériau naturel.<br />

L'aspect théorique peut apparaître fastidieux aux yeux de praticiens. Néanmoins, il est apparu<br />

indispensable de comprendre effectivement les bases physiques dont dépend le comportement du<br />

23<br />

Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch. - Spécial V - Octobre 1973


matériau soumis à des contraintes. Après la définition stratigraphique et lithologique des craies 1 ,<br />

on serait tenté d'établir des corrélations entre la pétrographie fine (essentiellement la structure,<br />

les caractéristiques physiques et mécaniques) et le comportement en chantier de terrassements.<br />

A partir de cette analyse établie sur une quinzaine de types de craie différents, il est vraisemblable<br />

qu'il sera possible d'étendre cette méthode, d'une part, à des formations crayeuses nouvelles, d'autre<br />

part, à de nouveaux types de problèmes, dont particulièrement les fondations profondes.<br />

Cette démarche rejoint en partie des recherches menées par ailleurs depuis plusieurs années en<br />

Grande-Bretagne [9, 12, 16 et 18], et en France plus récemment [7 et 8] où l'EDF a particulièrement<br />

développé l'étude de l'aspect mécanique des roches, dont nous ne ferons que citer les résultats les<br />

plus importants 2 .<br />

<strong>La</strong> présente étude regroupe les travaux de plusieurs <strong>La</strong>boratoires des Ponts et Chaussées : LCPC,<br />

Est parisien, Lille, Rouen et Saint-Quentin. Elle tire également profit d'une étroite collaboration<br />

avec le laboratoire de Micropaléontologie de la faculté des sciences de Paris, pour l'étude pétrographique<br />

[5],<br />

1. Cf. article précédent de M. Bignot et de Mlle Aubry : <strong>La</strong> Géologie de la craie du Bassin parisien.<br />

2. Cf. article de M. Comès : <strong>La</strong> <strong>Craie</strong> dans les sites d'ouvrages de production d'électricité.<br />

1 - Déviation de Sauqueville<br />

2 - Belbeuf<br />

3-Rouvray > A U T O R O U T E A 13<br />

4 - Incarville S<br />

5 - Pacy-sur-Eure<br />

6 - Saint-Cloud (RN 187)<br />

7 - Le Catouillage (RN 1 )<br />

8 - Autoroute A 27<br />

9 - Trith-Saint-Lêger (Autoroute A 2)<br />

10 - Malincourt<br />

11 - Serain<br />

12 - Morval<br />

13 - Combles Autoroute A 1<br />

14 - Feuillères<br />

<strong>Craie</strong>s de Normandie<br />

Fig. 1. — Localisation des craies étudiées.


Choix des types de craie<br />

Du fait de l'orientation initiale de l'étude, on s'est<br />

efforcé de prendre en compte des craies ayant donné<br />

lieu à des chantiers de terrassements, dont les données<br />

essentielles sont présentées par ailleurs 3 . Les chantiers<br />

présentent l'avantage, lorsque des constatations ont<br />

été faites en nombre suffisant en cours de travaux, de<br />

constituer une appréciation globale de la qualité de<br />

la craie synthétisant tous les facteurs en présence :<br />

caractéristiques intrinsèques du matériau - conditions<br />

de gisement (fissuration - altération) - conditions<br />

météorologiques - matériel utilisé et cadences, ce que<br />

ne peut faire l'étude de laboratoire.<br />

Il est donc possible de classer les conditions de chantiers<br />

en fonction des difficultés rencontrées. Ce classement,<br />

qui présente l'inconvénient de n'être que qualitatif,<br />

peut être résumé de la façon suivante en fonction<br />

des conditions :<br />

— très favorables : comportement de la craie proche<br />

de celui d'un calcaire,<br />

— bonnes : pas de problème de chantier, sauf pour<br />

des conditions météorologiques très défavorables,<br />

— mauvaises : difficultés pour la circulation des<br />

engins et pour le compactage, sauf par très beau<br />

temps ; risques de tassements de remblais,<br />

— très mauvaises : difficultés par tous temps - tassements<br />

de remblais.<br />

Il a été vérifié dans tous les cas que le chantier n'intéressait<br />

qu'un seul type pétrographique de craie,<br />

dans des conditions de gisement homogènes, mis à<br />

part le facteur altération qui sera étudié dans le chapitre<br />

« <strong>La</strong> <strong>Craie</strong> dans son gisement».<br />

Certains types de craies, non rencontrées à ce jour<br />

en chantier de terrassement, ont néanmoins été choisies<br />

de manière à compléter la gamme pétrographique<br />

des craies testées.<br />

Le classement ainsi établi est donné dans le tableau I.<br />

3. Cf. article de M. Puig : Problème de terrassement dans la craie.<br />

L'emplacement de ces chantiers (fig. 1) montre que<br />

seule la moitié septentrionale du Bassin parisien a<br />

été concernée par la présente étude. Cela résulte du<br />

fait qu'aucun chantier de craie important n'a jusqu'à<br />

présent été étudié dans les autres régions, ce qui<br />

s'explique, outre l'aspect économique, par le fait que<br />

la craie typique n'y est pas toujours présente. C'est<br />

ainsi qu'ont été éliminés les tuffeaux de Touraine,<br />

par exemple. Il n'en demeure pas moins qu'une extension<br />

de l'étude au reste du Bassin parisien serait<br />

souhaitable.<br />

TABLEAU I<br />

Classement des différentes craies étudiées<br />

Désignation<br />

du<br />

chantier<br />

Comportement<br />

en<br />

chantier de<br />

terrassement<br />

Localisation<br />

Numéro<br />

de repérage<br />

sur la carte<br />

Très bon Feuillères, autoroute A 1 Picardie 14<br />

Bon<br />

Autoroute A 27 Nord 8<br />

Trith-Saint-Léger,<br />

autoroute A 2 Nord 9<br />

Rouvray, autoroute A 13 Normandie 3<br />

Combles, autoroute A 1 Picardie 12<br />

Incarville, autoroute Al 3 Normandie 4<br />

Mauvais Morval, autoroute A 1 Picardie 13<br />

Déviation de Sauqueville Normandie 1<br />

Très Le Catouillage, RN 1 Nord 7<br />

mauvais Déviation de Pacy-sur- Normandie 5<br />

Eure<br />

Inconnu<br />

Belbeuf* Normandie 2<br />

Saint-Cloud, RN 187<br />

Serain*<br />

Région<br />

parisienne<br />

Picardie<br />

Malincourt Picardie 10<br />

* Le comportement de cette craie est présumé bon.<br />

6<br />

11<br />

25


Caractéristiques physiques et mécaniques<br />

de différents types de craie<br />

Rôle de la structure microscopique<br />

POSITION STRATIGRAPHIQUE ET<br />

PÉTROGRAPHIE MACROSCOPIQUE<br />

Sachant que le faciès « craie » se limite à l'intérieur<br />

du Bassin parisien aux étages stratigraphiques du<br />

Crétacé supérieur, nous avons sélectionné dans cet<br />

ensemble des craies suffisamment caractéristiques sous<br />

l'angle pétrographique. Nous avons éliminé en particulier<br />

celles qui présentaient les particularités suivantes<br />

:<br />

— composition polyminérale trop accusée : les craies<br />

sableuses, glauconieuses ou phosphatées, les craies<br />

argileuses (marnes), les craies magnésiennes ou ferrifères,<br />

les craies siliceuses (gaizes) (certaines d'entre<br />

elles ont néanmoins été étudiées sommairement, à<br />

titre de référence) ;<br />

— diagenèse trop accusée : les craies noduleuses,<br />

ayant subi une recristallisation trop importante qui<br />

permet de les assimiler à des calcaires (également envisagées<br />

marginalement).<br />

Dans ces conditions, les craies étudiées tant en Haute-<br />

Normandie que dans les régions du Nord et du Pasde-Calais<br />

entrent toutes dans les limites suivantes<br />

(tableau II) :<br />

— teneur en CaC0 3<br />

> 94,5 %,<br />

— teneur en MgO ou Fe 2<br />

0 3<br />

< 4 %.<br />

L'analyse des résidus solides par diffractométrie de<br />

rayons X ou par analyse thermique différentielle<br />

montre que toutes ces craies contiennent des argiles,<br />

dont les mieux représentées sont la montmorillonnite,<br />

argile gonflante, et l'illite muscovite, caractéristiques<br />

d'un milieu confiné basique.<br />

TABLEAU II<br />

Stratigraphie, analyse chimique, lithologie des craies étudiées<br />

Origine<br />

Analyse chimique ( %)<br />

Position<br />

stratigraphique CaCOs MgO Fe 2<br />

0 3<br />

P2O3<br />

M<br />

Analyse des résidus solides<br />

IM<br />

Haute- Normandie<br />

Pacy-sur-Eure<br />

Incarville<br />

Sauqueville<br />

Rouvray<br />

Belbeuf<br />

Région parisienne<br />

Saint-Cloud<br />

Santonien sup.<br />

Campanien inf.<br />

Coniacien inf.<br />

Coniacien moy.<br />

Turonien<br />

Campanien sup.<br />

97,1<br />

98,9<br />

98,4<br />

96,9<br />

96<br />

+ +<br />

tr.<br />

+ +<br />

+<br />

+ +<br />

+<br />

+ +<br />

+<br />

+ +<br />

+ + +<br />

+ + +<br />

+ +<br />

+<br />

+<br />

+<br />

+ +<br />

+<br />

+ + +<br />

+<br />

Région du Nord<br />

Pas-de-Calais<br />

Le Catouillage, RN 1<br />

Autoroute A 27<br />

Trith-Saint-Léger<br />

Picardie<br />

Malincourt<br />

Serain<br />

Coniacien moy. à sup.<br />

Coniacien sup.<br />

Santonien inf.<br />

Turonien sup.<br />

Coniacien moy.<br />

(base)<br />

Turonien sup.<br />

98,4<br />

98,5<br />

94,5<br />

98,5<br />

97,6<br />

1,8<br />

0,5<br />

+<br />

+<br />

+ +<br />

+ +<br />

+<br />

+<br />

+<br />

+<br />

+<br />

Morval<br />

Combles<br />

Feuillères<br />

Coniacien moy.<br />

Santonien moy.<br />

96,8<br />

96,8<br />

97,1 0,1<br />

3,45<br />

M<br />

Q<br />

IM<br />

F<br />

A<br />

: montmorillonnite<br />

: quartz<br />

: illite muscovite<br />

: feldspath<br />

: autres (surtout hydroxydes de fer)<br />

+ : peu abondant \<br />

+ + : abondant I par rapport à l'ensemble<br />

+ + + : très abondant ( du résidu sec<br />

tr. : traces )<br />

26


Les limitations imposées sur le plan minéralogique<br />

ont amené un resserrement de l'échelle stratigraphique,<br />

en particulier par élimination des craies le plus souvent<br />

polyminérales du Cénomanien. Aussi, tous les<br />

faciès étudiés se rapportent-ils aux étages du Turonien<br />

et du Sénonien, qui constituent d'ailleurs les<br />

5/6 environ de la série crayeuse du Bassin parisien.<br />

Influence de la minéralogie sur le comportement des<br />

craies<br />

Nous avons vu que nous nous étions efforcés de nous<br />

limiter le plus possible aux craies typiques, dans<br />

lesquelles les minéraux autres que la calcite ne peuvent<br />

jouer un rôle important.<br />

<strong>La</strong> comparaison des tableaux I et II montre que ce<br />

résultat a été atteint dans la majorité des cas, puisque<br />

les faibles différences de teneur en CaC0 3<br />

constatées<br />

ne se traduisent pas par des différences significatives<br />

du comportement. Contrairement même à ce que<br />

l'on pourrait penser, une mauvaise « qualité » géotechnique<br />

s'accompagne souvent d'un pourcentage<br />

élevé de CaC0 3<br />

. Il en va ainsi des craies de Sauqueville<br />

et de la RN 1. Ceci indiquerait que, tout au moins<br />

dans ce registre minéralogique, ces faibles variations<br />

de teneur en résidu n'ont pas de répercussion notable<br />

sur la « qualité » de la craie. De même, la plus ou<br />

moins grande abondance relative de montmorillonnite<br />

ou d'illite dans le résidu ne se traduit pas de<br />

manière significative dans le comportement du matériau<br />

correspondant.<br />

Nous tenterons dans le chapitre « Les <strong>Craie</strong>s atypiques<br />

», d'analyser plus eu détail le rôle des minéralisations<br />

secondaires dans le comportement de la craie,<br />

et de définir à partir de quel pourcentage ce rôle ne<br />

peut plus être considéré comme négligeable.<br />

Les craies retenues peuvent donc être considérées<br />

comme monominérales, homogènes. Il est donc possible<br />

de comparer leurs caractéristiques physiques et<br />

mécaniques à partir d'un seul paramètre pétrographique<br />

: la texture 4 .<br />

PRINCIPALES PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET<br />

MÉCANIQUES<br />

Les études préalables à la réalisation des terrassements<br />

n'avaient pu permettre, le plus souvent, d'identifier<br />

clairement le matériau sous l'angle géotechnique, et<br />

par conséquent de prévoir son comportement. Les<br />

essais employés, soit de reconnaissance in situ (sismique<br />

réfraction), soit de laboratoire (granulométrie -<br />

limites d'Atterberg - essai de compactage - teneur<br />

en eau) donnaient en effet des mesures très dispersées<br />

et le plus souvent ininterprétables.<br />

4. Nous utiliserons désormais le terme texture, le terme structure<br />

étant réservé aux arrangements atomiques.<br />

Il a donc paru intéressant de reprendre ces études sur<br />

la base de la comparaison des résultats de plusieurs<br />

essais réalisés dans des conditions bien définies, de<br />

manière à obtenir chaque fois une moyenne représentative<br />

et une étude de la dispersion. Le problème<br />

était en effet de savoir si aux différences de comportement<br />

géotechnique pouvaient être comparées des<br />

différences dans les caractéristiques intrinsèques des<br />

matériaux.<br />

Sur chacune des craies retenues ont donc été réalisés<br />

les essais les plus courants concernant les caractéristiques<br />

physiques et mécaniques des sols et des roches :<br />

— mesure de la teneur en eau naturelle (w„)<br />

— densité de la roche sèche (yd)<br />

— vitesse de propagation d'ultra-sons sur échantillons<br />

{V l<br />

vitesse longitudinale)<br />

— résistance à la compression simple R c<br />

.<br />

Ces essais rapides et peu onéreux ont été autant que<br />

possible réalisés un nombre de fois permettant pour<br />

chaque type de craie une analyse de fréquence des<br />

mesures. Cette méthode nous a paru en effet indispensable,<br />

compte tenu de la dispersion parfois élevée<br />

observée avec certains essais, ou sur certains types de<br />

craie. Il devient ainsi possible de comparer entre eux<br />

ces différents types, et d'établir des corrélations entre<br />

les essais.<br />

Ayant constaté que le degré de saturation en eau<br />

pouvait avoir une influence considérable sur les résultats<br />

de différents essais, de même que sur le comportement<br />

en chantier, nous insisterons particulièrement<br />

sur cet aspect qui revêt une très grande importance<br />

en géotechnique.<br />

En dernier lieu, nous évoquerons rapidement les résultats<br />

obtenus par ailleurs concernant l'étude du<br />

comportement de la craie soumise à des contraintes<br />

mécaniques en laboratoire. Cet aspect, qui concerne<br />

la craie en tant que « roche » au sens géotechnique<br />

du terme, et qui est plus directement lié à des applications<br />

spécialisées, n'entre pas en effet directement<br />

dans le cadre de la présente étude, dont il constitue<br />

un prolongement ; il sera étudié plus en détail dans<br />

les articles suivants.<br />

Identifications par les essais courants<br />

Pour chaque type de craie et pour chaque essai (hormis<br />

R c<br />

) a été réalisé un minimum de vingt mesures, à<br />

partir desquelles ont été calculés la moyenne, l'étendue<br />

(intervalle de variation), l'écart type et le coefficient<br />

de variation.<br />

Les mêmes essais ont été effectués, à la fois sur des<br />

échantillons à teneur en eau naturelle, des échantillons<br />

saturés et des échantillons desséchés.<br />

Les vitesses de propagation d'ultra-sons ont été mesurées<br />

suivant les trois axes médians de chacun des<br />

échantillons étudiés. Les valeurs exprimées se rapportent<br />

donc à un minimum de soixante mesures par<br />

type de craie.<br />

27


Par contre, les essais de compression uniaxiale sur<br />

éprouvette d'élancement 2 ont été réalisés en nombre<br />

limité (3 à 5 par type de craie), ne permettant pas une<br />

analyse de type statistique.<br />

Une première observation des résultats montre qu'il<br />

y a lieu de distinguer les essais réalisés sur échantillons<br />

saturés ou à teneur en eau naturelle de ceux qui concernent<br />

les échantillons secs.<br />

ECHANTILLONS A w n<br />

ou A SATURATION<br />

Le tableau III récapitule les moyennes arithmétiques<br />

des résultats obtenus sur chaque type de craie.<br />

On constate ainsi de très fortes différences dans ces<br />

résultats d'un type de craie à l'autre se traduisant<br />

pour l'ensemble du tableau par une fourchette de<br />

valeur très étalée pour chaque type d'essai :<br />

14,7 < w n<br />

< 27,5 % (les valeurs < 10 % n'étant pas<br />

représentatives)<br />

1,44 < y d<br />

< 1,8<br />

23,6 < porosité < 43,8 %<br />

1963 < F, < 2 800 m/s<br />

13 < R c<br />

< 92 bars.<br />

Il est donc possible, pour chaque essai, d'établir un<br />

classement relatif des craies, allant par exemple des<br />

plus faibles valeurs aux plus fortes.<br />

TABLEAU III<br />

Moyennes arithmétiques des résultats d'essais.<br />

Une représentation graphique des résultats obtenus,<br />

du type nomogramme (fig. 2) permet de réaliser très<br />

rapidement les comparaisons des divers résultats d'essais<br />

en fonction du matériau étudié.<br />

On observe ainsi un parallélisme assez satisfaisant des<br />

graphes correspondant à chaque type de craie. En<br />

dehors du couple w, yd, les intersections sont relativement<br />

rares. En particulier, les craies situées en haut<br />

du nomogramme se distinguent très nettement de<br />

celles qui se concentrent à sa partie inférieure. Or, la<br />

comparaison avec le tableau I montre une corrélation<br />

très nette de la forme suivante :<br />

— faibles caractéristiques = très mauvais comportement,<br />

— fortes caractéristiques = très bon comportement.<br />

Entre ces deux extrêmes, se répartissent plusieurs<br />

craies, sans qu'il soit possible de définir des limites<br />

précises de familles distinctes sur le nomogramme.<br />

Cela peut s'interpréter par le fait qu'il n'existe pas de<br />

différences tranchées de nature entre les différents<br />

types de craie, mais plutôt des variations continues,<br />

par exemple de proportions relatives de divers constituants.<br />

Néanmoins, il est possible d'établir, dans<br />

cette succession continue, des coupures similaires à<br />

celles du tableau I, et concernant une ou deux familles<br />

intermédiaires.<br />

Il apparaît donc possible de caractériser à l'avance,<br />

au stade de l'étude, la qualité géotechnique appliquée<br />

aux terrassements d'une craie donnée, par rapport<br />

à une échelle de référence type, à condition d'opérer<br />

sur un nombre suffisant d'essais différents, ainsi que<br />

sur un nombre de mesures permettant le calcul des<br />

moyennes arithmétiques.<br />

Désignation Wn<br />

de la craie (%)<br />

Yd<br />

Porosité Vi Rc<br />

(%) (m/s) (bar)<br />

R eàw=0<br />

Pacy-sur-Eure 27,5 1,52 42,5 2 111 21,6<br />

Incarville 22,5 1,59 41 2 144 19,7<br />

Sauqueville 24,5 1,50 39,1 1 963 13,4<br />

Rouvray 22,5 1,57 40,9 2 246 33,7<br />

Belbeuf 15,8 1,60 23,6 2 648 91,7<br />

Saint-Cloud 25,7 1,57 42,0 2 091 12,3<br />

RN 1 24,3* 1,51 43,8 2 130 18<br />

Autoroute A 27 23,4* (1,44)** 37,3 23<br />

Trith-Saint-Léger 15,5* 1,69 35,2 2 560 40<br />

Malincourt 25 1,53 2 450 28<br />

Serain 20,3 1,65 2 545 32<br />

Morval 24,8 1,59 40,3 2 470 39,8<br />

Combles 19,5 1,64 41,5 2 480 39,3<br />

Feuillères 14,7 1,82 30,2 2 800 78<br />

* Valeur à saturation. Ces résultats peuvent être comparés<br />

aux valeurs de la teneur en eau d'un sable saturé, calculées en<br />

fonction de sa porosité :<br />

— texture compacte si<br />

— texture lâche si<br />

** Valeur douteuse.<br />

n = 0,2 w„ = 9,2 %<br />

« = 0,3 w n<br />

= 16 %<br />

n — 0,6<br />

n - 0,55<br />

wn = 25 %<br />

Wn = 30 %<br />

Pacy-sur-Eure<br />

Sauqueville<br />

Le Cafouillage (RN<br />

Morval<br />

Saint-Cloud<br />

Rouvray<br />

Serain<br />

Belbeuf<br />

Feuillères<br />

II<br />

, <strong>Craie</strong>s à mauvais comportement<br />

1 (d'après tableau 1}<br />

Fig. 2. — Nomogramme des résultats d'essais (moyennes arithmétiques).<br />

28


TABLEAU IV<br />

Dispersion des résultats d'essais<br />

Types de craies<br />

TypeT^^^^<br />

d'essais ^^^^<br />

Pacy-sur-Eure Sauqueville Incarville Rouvray Belbeuf Saint-Cloud<br />

w<br />

e<br />

X<br />

CV (%)<br />

4<br />

27,55<br />

1,09<br />

4<br />

10,50<br />

24,50<br />

3,19<br />

12,5<br />

5,30<br />

22,48<br />

1,48<br />

6<br />

3,60<br />

22,50<br />

0,88<br />

4<br />

8,20<br />

15,77<br />

1,92<br />

12<br />

4,7<br />

25,7<br />

1,16<br />

4,5<br />

Yd<br />

e<br />

X<br />

CV C/o)<br />

0,40<br />

1,52<br />

0,07<br />

5<br />

0,38<br />

1,50<br />

0,08<br />

5,5<br />

0,17<br />

1,59<br />

0,05<br />

3,5<br />

0,26<br />

1,57<br />

0,05<br />

3,5<br />

0,47<br />

1,60<br />

0,10<br />

6<br />

0,09<br />

1,57<br />

0,024<br />

1,5<br />

Vi<br />

e<br />

X<br />

CV(%)<br />

623,33<br />

2111,36<br />

156,96<br />

7<br />

606,67<br />

1 963,28<br />

190,97<br />

10<br />

636,67<br />

2 143,97<br />

170,40<br />

8<br />

270<br />

2 246,35<br />

70,14<br />

3<br />

470<br />

2 648,56<br />

143,02<br />

5,5<br />

557<br />

2 180<br />

122<br />

5,6<br />

Re à Wn<br />

e<br />

X<br />

CV (%)<br />

21,6 13,4 19,7 33,7 91,75<br />

7<br />

12,3<br />

2,32<br />

19,3<br />

Dispersion des résultats d'essais. Il est évident que le<br />

nomogramme des moyennes donne une représentation<br />

assez simplifiée de la réalité. Sa valfeur est en fait<br />

surtout fonction du nombre de mesures réalisées pour<br />

chaque essai. On se situe en effet pour cette étude à<br />

un degré de finessed'analyse qui nécessite de s'affranchir<br />

de toutes les influences secondaires qui peuvent<br />

contribuer à masquer les caractéristiques intrinsèques<br />

de l'échantillon. Il en va ainsi en particulier des microhétérogénéités<br />

liées soit à la pétrographie, soit à la<br />

fissuration. Interviennent également les dispersions<br />

inhérentes à l'exécution même des différents essais.<br />

Cela conduit à tempérer les déductions que l'on peut<br />

réaliser au niveau des seules moyennes par la prise<br />

en compte de la dispersion, exprimée essentiellement<br />

par l'écart type a.<br />

Notons tout d'abord que, si l'on considère la seule<br />

étendue e (intervalle de variation), on constate pour<br />

chaque type d'essai, un chevauchement très net des<br />

valeurs correspondant aux différents types de craies.<br />

Cela ressort nettement de l'examen du tableau IV.<br />

Il est donc clair qu'au degré de finesse recherché,<br />

l'exécution d'un très petit nombre de mesures par<br />

type d'essai ne donnerait à une étude que très peu de<br />

chances de différencier les craies en question, pourtant<br />

nettement différentes sous l'angle du comportement<br />

en terrassements.<br />

L'examen des écarts types a et des coefficients de<br />

variation CV permet de compléter l'analyse de la<br />

dispersion des essais de la manière suivante :<br />

— la dispersion, assez comparable pour tous les types<br />

d'essais, se caractérise par un CV généralement compris<br />

entre 5 et 10 % et paraît donc moyenne à forte ;<br />

— la dispersion relativement faible des mesures de<br />

jd pourrait être fortement réduite par l'emploi d'un<br />

pienomètre de précision, à vis et joints cylindriques,<br />

mis au point récemment au LCPC à l'occasion de<br />

l'étude sur la craie ;<br />

— la dispersion de l'essai V t<br />

pourrait sans doute être<br />

également réduite par l'application de conditions de<br />

mesures très rigoureuses ;<br />

— la dispersion varie suivant le type de craie. Elle est<br />

maximale pour la craie de Sauqueville qui présente<br />

des particularités de conditions de gisement (fissuration<br />

- altération).<br />

En définitive, on peut admettre que les différents essais<br />

retenus sont :<br />

— très peu sélectifs si l'on considère l'étendue,<br />

— suffisamment sélectifs lorsque le nombre de mesures<br />

est assez grand pour que l'on puisse calculer une<br />

moyenne et un écart type. Néanmoins, il y a lieu de<br />

veiller très soigneusement à l'exécution très précise<br />

de ces essais et éventuellement à définir des processus<br />

opératoires très rigoureux. En tout état de cause, un<br />

seul type d'essai ne peut permettre une identification<br />

précise de ces craies du fait des recoupements que l'on<br />

observe, même au niveau des écarts types. Seule, la<br />

comparaison des résultats de plusieurs essais peut<br />

permettre de classer assez précisément le matériau<br />

étudié dans l'échelle de qualité définie, en réduisant<br />

le risque d'erreur.<br />

Par ailleurs, et bien que le nombre de mesures soit<br />

faible, l'essai de R c<br />

apparaît comme particulièrement<br />

dispersé et ce, d'autant plus que la craie est plus tendre.<br />

Corrélations. Sous réserve de l'analyse ci-dessus, il<br />

est possible de corréler ces résultats d'essais avec le<br />

comportement géotechnique des différentes craies.<br />

En fait, il ne paraît pas possible, au vu de ces seuls<br />

résultats, de définir plus de trois familles distinctes<br />

de craie dont les caractéristiques seraient les suivantes<br />

(Tableau V).<br />

29


Essais<br />

y (%)<br />

T«<br />

Vi (m/s)<br />

Rc (bar)<br />

Type de craie<br />

TABLEAU V<br />

Caractéristiques des trois familles de craie<br />

Comportement en terrassements<br />

Très mauvais Mauvais Bon à très bon<br />

S* 24<br />

< 1,57<br />

< 2 150<br />

< 25<br />

Pacy-sur-Eure<br />

Sauqueville<br />

RN 1<br />

Saint-Cloud<br />

15 à 25<br />

1,53 à 1,70<br />

2 150 à 2 550<br />

20 à 50<br />

Morval<br />

Incarville<br />

Combles<br />

Malincourt<br />

*i 17<br />

> 1,60<br />

> 2 500<br />

> 40<br />

Feuillères<br />

Trith-Saint-<br />

Léger<br />

Belbeuf<br />

Il devrait être possible à l'avenir, en fonction des<br />

observations faites plus haut relativement à la dispersion,<br />

de préciser plus étroitement ces valeurs.<br />

Il faut remarquer dans le tableau V que le recouvrement<br />

des valeurs entre les trois familles est net pour<br />

les essais de w et yj mais plus réduit, pour les essais<br />

de V t<br />

et R c<br />

. Cela indiquerait qu'à de très faibles<br />

variations des propriétés physiques (donc de texture)<br />

correspondrait de très grandes variations du comportement<br />

de la roche aux essais mécaniques.<br />

Cette constatation est très importante car elle montre<br />

en particulier que la tolérance de la dispersion ne peut<br />

être la même pour tous les essais et qu'en particulier,<br />

l'essai de yd doit être réalisé avec une dispersion très<br />

faible (CV < 5 %, voire < 2 ou 3 %), alors que pour<br />

R c<br />

des écarts importants n'altéreraient pas exagérément<br />

la valeur de l'interprétation géotechnique. Cela<br />

paraît d'ailleurs logique si l'on tient compte de<br />

l'échelle des valeurs des différents essais pour un<br />

matériau carbonate :<br />

— 1,40 à 2,70 pour yd,<br />

— 1 800 à 6 000 m/s environ pour V x<br />

,<br />

— 10 à 3 000 bars environ pour R c<br />

.<br />

INFLUENCE DU DEGRÉ DE SATURATION EN EAU<br />

Une fois extraite de son gisement, la craie perd progressivement<br />

la plus grande partie de son eau interstitielle.<br />

Cette évolution se traduit par un changement<br />

des propriétés mécaniques, particulièrement sensible<br />

dans l'essai de compression simple.<br />

Des essais effectués sur la craie de Val-Guyon (Autoroute<br />

Al3, Eure) avaient permis d'observer une chute<br />

progressive des résultats de R c<br />

en fonction de l'augmentation<br />

du degré de saturation. <strong>La</strong> courbe obtenue<br />

présente une pente particulièrement forte au<br />

voisinage du point de saturation nulle. Ce résultat<br />

s'accorde avec ceux obtenus par Dessenne sur la craie<br />

d'Epernay [7].<br />

<strong>La</strong> comparaison des R c<br />

mesurées, d'une part sur<br />

échantillon saturé (R c<br />

sat.), d'autre part sur échantillon<br />

sec (R c<br />

sec) (sans mesure intermédiaire), a été<br />

réalisée pour les craies entrant dans le cadre de la<br />

présente étude. Elle permet d'observer des différences<br />

importantes de sensibilité à l'eau (rapport R c<br />

sec/R c<br />

sat.) entre les craies ; les échantillons étudiés se classent<br />

de la façon suivante par ordre croissant (tableauVI).<br />

Type de craie<br />

TABLEAU VI<br />

Sensibilité à l'eau<br />

R c<br />

sec<br />

Rc sat.<br />

Feuillères 2,8<br />

Belbeuf 2,9<br />

Rouvray 3,2<br />

Malincourt 3,3<br />

Combles 3,5<br />

Morval 3,6<br />

Sauqueville 3,7<br />

Incarville 4<br />

Serain 4,7<br />

Pacy-sur-Eure 4,8<br />

Bien que cet essai soit soumis aux réserves exprimées<br />

ci-avant quant à la dispersion, il n'en apparaît pas<br />

moins une gradation très nette que l'on peut mettre<br />

en corrélation avec les essais antérieurs et avec les<br />

observations de chantiers. On aurait ainsi la correspondance<br />

suivante :<br />

I? c<br />

sec , , ,<br />

< 3 : très bonnes craies,<br />

R c<br />

sat.<br />

3 < — < 3,5 : bonnes craies,<br />

3,5 < — < 4 : craies médiocres à mauvaises,<br />

— ^ 4 : craies très mauvaises.<br />

Seules les craies de Sauqueville et de Serain apparaissent<br />

mal classées dans cet ensemble. Cela peut<br />

être dû, pour la première, à l'incidence des conditions<br />

de gisement, déjà évoquée plus haut et pour la seconde<br />

à l'hétérogénéité liée à la présence de nodules phosphatés<br />

ou glauconieux.<br />

Il faut noter que toutes les craies étudiées ont, sous<br />

l'angle de la sensibilité à l'eau, un comportement<br />

totalement différent de celui des calcaires au sens strict<br />

pour lesquels le rapport R c<br />

sec/R c<br />

à saturation est<br />

voisin de 1 et le plus souvent de l'ordre de 1,1 à 1,2.<br />

Ce comportement s'apparente en fait plus à celui<br />

d'un sol argileux qu'à celui d'une roche.<br />

L'essai V x<br />

apparaît quant à lui peu sensible à la teneur<br />

en eau de la craie. Les variations constatées ne dépassent<br />

pas, en effet, 25 % et demeurent d'interprétation<br />

difficile, compte tenu de la dispersion de l'essai.<br />

30


Il semble, en fait, que les écarts les plus importants<br />

ne concernent pas les mesures à sec et à saturation,<br />

mais plutôt comparativement à celles-ci, les mesures<br />

correspondant à des teneurs en eau intermédiaires<br />

pour lesquelles on aurait une diminution des V t<br />

.<br />

Comportement de la craie, sous contraintes,<br />

en laboratoire<br />

Bien que cet aspect sorte du cadre de la présente étude,<br />

il paraît intéressant de rappeler brièvement des résultats<br />

obtenus par d'autres auteurs et concernant<br />

exclusivement la craie « roche ».<br />

Sous des contraintes statiques, Dessenne a montré<br />

qu'une craie blanche typique subit une densification<br />

pour des pressions de « confinement » élevées [7].<br />

ev<br />

<strong>La</strong> diminution de volume — atteint 15 % pour<br />

a<br />

\ — 3 ff = 900 bars. <strong>La</strong> résistance à la compression<br />

augmente très rapidement avec la densité.<br />

Par cisaillement direct, les caractéristiques suivantes<br />

ont été obtenues :<br />

— C = 20 bars (craie sèche),<br />

— C = 5 à 10 bars (craie saturée),<br />

— q> = 29°.<br />

Par ailleurs, Dessenne a mis en évidence une anisotropie<br />

de la craie, R c<br />

et V, étant maximales, et R,<br />

(résistance à la traction) minimale dans la direction<br />

perpendiculaire à la stratification.<br />

Pour les craies ayant fait l'objet de la présente étude,<br />

une anisotropie de ce type apparaît nettement par<br />

l'essai V l<br />

pour les craies du Rouvray et de Feuillères;<br />

elle est beaucoup moins nette dans les autres cas. Cela<br />

peut s'expliquer par le fait que, contrairement à la<br />

galerie d'Epernay, les zones concernées ici sont peu<br />

profondes et qu'une légère décompression a pu affecter<br />

le massif.<br />

Sous des contraintes dynamiques, la craie évolue très<br />

rapidement par fragmentation, puis pulvérisation, avec<br />

passage à l'état de « sol ». Cette transformation peut<br />

être obtenue expérimentalement :<br />

—- par vibration : dispositif EDF [8] et vibrobroyeur 5<br />

— par attrition : essai Deval adapté 5 ,<br />

— par compactage : essai de compactages répétés 5<br />

montrant, outre l'évolution de la granulométrie, la<br />

densification du matériau.<br />

Ces différents essais tentent de reproduire plus ou<br />

moins imparfaitement les conditions rencontrées sur<br />

5. L'essai de vibrobroyage a été mis au point et réalisé au LCPC<br />

par M. Struillou (Cf. à ce sujet son article : Etude par vibrobroyage<br />

de l'aptitude des craies au compactage) ; l'essai Deval<br />

adapté a été mis au point et réalisé au <strong>La</strong>boratoire de Saint-<br />

Quentin ; l'essai de compactages répétés a été réalisé au <strong>La</strong>boratoire<br />

de Rouen. Les résultats obtenus avec ces trois essais<br />

sont donnés dans l'article de M. Puig.<br />

chantier. Ce sont des tests de comportement. Ils se<br />

différencient donc nettement des essais d'identification<br />

géotechnique, à caractère plus général. Néanmoins,<br />

il est montré par ailleurs que, bien qu'empirique,<br />

l'essai de vibrobroyage en particulier peut tenir lieu<br />

d'essai d'identification.<br />

MISE EN ÉVIDENCE DU ROLE<br />

DE LA TEXTURE<br />

Le comportement très particulier de la craie, intermédiaire<br />

entre celui d'une roche et celui d'un sol, ne<br />

peut s'expliquer indépendamment de la composition<br />

minéralogique que par des caractéristiques spéciales<br />

de sa texture. <strong>La</strong> gamme de variation très étendue de<br />

ce comportement selon le type de craie considéré ne<br />

peut donc s'expliquer que par des variations de cette<br />

texture. Il est donc important de prolonger l'étude<br />

physique et mécanique par une étude plus théorique,<br />

permettant de définir de manière plus rationnelle le<br />

matériau craie.<br />

Deux méthodes d'investigation peuvent être utilisées<br />

dans ce domaine, l'une purement physique et quantitative,<br />

l'autre pétrographique, qualitative.<br />

Mesures physiques<br />

Différentes techniques ont été utilisées pour caractériser<br />

les craies.<br />

Porométrie au mercure<br />

Les diagrammes de la figure 3 montrent que dans leur<br />

quasi-totalité, les micropores des différentes craies<br />

(les macropores, d'ailleurs très peu nombreux, ne<br />

pouvant être décelés par ce procédé) ont des dimensions<br />

comprises entre 1,5 et 0,1 ii (moyenne : 0,9 à<br />

0,25 p).<br />

On remarque que les craies de Normandie se différencient<br />

globalement des autres craies par des diamètres<br />

de pores sensiblement plus grands : moyenne<br />

de 0,8 à 0,75 ii au lieu de 0,5 à 0,25 a. Seule échappe<br />

à cette règle, la craie de Belbeuf, d'âge turonien.<br />

Les courbes cumulatives sont toutes très serrées, indiquant<br />

une distribution unimodale du diamètre des<br />

pores. Cette distribution distingue assez nettement les<br />

craies d'autres roches carbonatées [10]. De même,<br />

les pores des calcaires francs sont généralement plus<br />

fins que ceux de la craie.<br />

Il n'apparaît pas possible de mettre en corrélation<br />

directement les mesures de porométrie avec le comportement<br />

des différents types de craie.<br />

Mesure de la surface spécifique<br />

Les mesures de porométrie sont corroborées par les<br />

mesures de surface spécifique réalisées avec l'appareil<br />

BET simplifié, mis au point par M. Deloye au LCPC<br />

31


pour le <strong>La</strong>boratoire d'Autun. Néanmoins, les valeurs<br />

relativement faibles obtenues (0,98 à 2,33 m 2 /g)<br />

semblent indiquer que la totalité des vides n'a pu être<br />

explorée par ce procédé. En effet, des mesures antérieures<br />

réalisées sur des craies comparables avaient<br />

permis d'obtenir des valeurs généralement proches<br />

de 3 m 2 /g. Une étude complémentaire serait nécessaire<br />

à l'interprétation plus précise des résultats de cet essai.<br />

Mesure de la succion<br />

<strong>La</strong> succion représente le déficit de pression qui apparaît<br />

dans les pores d'un matériau du fait des forces de<br />

liaison entre l'eau et le squelette solide. Ces forces,<br />

de nature capillaire dans les sols sableux non saturés,<br />

sont également des forces d'adsorption dans le cas<br />

des sols argileux. <strong>La</strong> succion est exprimée par le symbole<br />

pF, qui représente le logarithme décimal de la<br />

succion exprimé en centimètres d'eau.<br />

<strong>La</strong> figure 4 représente les courbes de drainage obtenues<br />

à titre d'expérience, pour quelques-unes des craies<br />

étudiées, ainsi que des exemples types empruntés à<br />

des études réalisées en Grande-Bretagne [12].<br />

Bien que ces essais n'aient pas été menés à terme du<br />

fait de la nécessité d'utiliser divers types d'appareils<br />

en fonction de la gamme de pF testée, ils montrent<br />

néanmoins que toutes les craies présentent une succion<br />

très élevée, c'est-à-dire qu'elles ne se drainent<br />

que très difficilement. En fait, un drainage notable de<br />

la craie ne peut se produire au-dessous d'un pF de<br />

3,2 à 3,5 correspondant à une hauteur de 30 à 50 m<br />

au-dessus de la nappe aquifère. Ce résultat est directement<br />

lié aux précédents concernant la dimension des<br />

pores et confirme que la craie s'apparente nettement,<br />

(%)<br />

100<br />

50<br />

l/<br />

/<br />

u<br />

//<br />

i<br />

/!<br />

i<br />

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*<br />

3Û îk<br />

0,01 u 0,1 P IP<br />

oo oo<br />

ooo<br />

H<br />

ti<br />

r<br />

1 Calcaire de Tancarville<br />

2 Feu i Hères<br />

3 Autoroute A 2<br />

4 Autoroute A 27<br />

5 Saint-Cloud<br />

6 Belbeuf •<br />

7 Combles<br />

8 Le Catouillage (RN 1)<br />

9 Morval<br />

10 Pacy-sur-Eure \<br />

11 Incarville f<br />

12 Rouvray l<br />

13 Sauqueville '<br />

1<br />

<strong>Craie</strong>s de Normandie<br />

lOu<br />

Diamètre des pores<br />

Fig. 3. — Courbes de répartition des pores (essais réalisés par le Centre de Géomorphologie du CNRS de Caen).<br />

32


du point de vue de sa texture, à des sols fins limoneux<br />

ou argileux. Le diamètre équivalent des pores (D),<br />

calculé d'après la loi de Jurin,<br />

pDg<br />

avec . tension superficielle T = 76,4 dyn/cm ) pour<br />

. masse spécifique p = 1 g/cm 3 ) l'eau<br />

. accélération de la pesanteur g = 981 cm/s 2<br />

varie de 1,5 p pour pF — 3 à 0,5 p pour pF = 3,5,<br />

ce qui s'accorde aux porométries mesurées sur les<br />

craies de Normandie.<br />

Mesure de la vitesse d'ascension capillaire<br />

Cet essai présente l'avantage d'être extrêmement simple.<br />

Il consiste à déposer un échantillon de craie de<br />

hauteur suffisante (> 15 cm) dans un bac contenant<br />

de l'eau, de manière que sa base seulement soit immergée,<br />

sur une hauteur de 1 cm. L'essai consiste à<br />

mesurer la hauteur d'ascension capillaire, en fonction<br />

du temps, sur une face aplanie de l'échantillon (fig. 5).<br />

Le front d'ascension capillaire étant nettement visible,<br />

cet essai présente l'avantage d'être particulièrement<br />

simple.<br />

On constate ainsi que :<br />

— la hauteur d'ascension capillaire est très forte pour<br />

toutes les craies étudiées. Elle n'a généralement pas<br />

été testée complètement du fait de la hauteur insuffisante<br />

des échantillons ;<br />

— les vitesses d'ascension sont constantes pour un<br />

type de craie donné, mais très variables d'un type<br />

de craie à un autre : 50 mm en 16 mn pour la craie<br />

de Sauqueville et en 3 h 16 mn pour la craie de Trith-<br />

Saint-Léger (A2) ;<br />

— le classement obtenu est parfaitement corrélable<br />

avec les résultats des essais physiques et mécaniques<br />

et avec le classement en fonction du comportement ;<br />

— l'ensemble des craies se différencie nettement, dans<br />

cet essai comme dans la mesure de porométrie, du<br />

calcaire sublithographique.<br />

Cet essai présente, par ailleurs, l'avantage de pouvoir<br />

refléter dans une certaine mesure le comportement de<br />

la craie sur chantier en fonction des conditions météorologiques,<br />

sous l'angle de l'aptitude à l'absorption de<br />

l'eau de pluie. Il est vraisemblable d'ailleurs qu'à l'inverse,<br />

l'aptitude à la dessiccation pourrait également<br />

caractériser les différentes craies.<br />

33


2 4 6 8 10 12<br />

4mn 16mn 36mn 64mn lOOmn<br />

18 20<br />

5h2imn<br />

Sauqueville<br />

Pacy-sur-Eure<br />

Le Catouillage (RN 1)<br />

4 Saint-Cloud<br />

5 Morval<br />

6 +++++++ Incarville<br />

7 —•*• • Malincourt<br />

8<br />

9<br />

10<br />

11<br />

12<br />

13<br />

14<br />

Combles<br />

Serai n<br />

Autoroute A 27<br />

Belbeuf<br />

Feu i Hères<br />

Autoroute A 2<br />

Calcaire sublithographique<br />

5. — Hauteur d'ascension capillaire dans la craie et dans un calcaire en fonction du temps.<br />

Mesure de la décroissance de la réimbibition en fonction<br />

des cycles séchage-imbibition<br />

Les mesures de ce type montrent qu'une craie séchée,<br />

puis réimbibée ne peut reprendre totalement sa teneur<br />

en eau primitive et, a fortiori, sa teneur en eau de<br />

saturation. <strong>La</strong> décroissance de teneur en eau atteint<br />

en moyenne pour les craies de Normandie 7 à 8,5 % ;<br />

elle est particulièrement accentuée pour la craie de<br />

Belbeuf qui possède les pores les plus fins : 18 %.<br />

On peut supposer que cette évolution est due, lors<br />

du séchage, à la précipitation des ions contenus par<br />

l'eau de gisement de la craie, cette précipitation provoquant<br />

alors un colmatage partiel des pores.<br />

Gélivité de la craie<br />

Aucune mesure de gélivité n'a été réalisée dans le<br />

cadre de la présente étude. <strong>La</strong> craie est connue pour<br />

sa très forte gélivité et, du fait de la sévérité des essais<br />

de gel habituellement employés pour les roches, il<br />

paraît vain de tenter de différencier les craies par cette<br />

méthode. Une étude spécifique de gélivité comparant<br />

une craie de Normandie à divers calcaires a été réalisée<br />

par ailleurs au Centre de géomorphologie de Caen [10].<br />

Etude pétrographique<br />

LA<br />

CRAIE<br />

Les différentes méthodes d'étude utilisées mettent en<br />

évidence le caractère ambigu de la craie qui possède<br />

à la fois des caractéristiques de sol et de roche.<br />

Dotée à la fois d'une cohésion et d'un angle de frottement<br />

interne, elle apparaît d'une sensibilité à l'eau<br />

qui l'apparente fortement à un sol limoneux ou argileux.<br />

L'observation au microscope électronique permet d'expliquer<br />

au moins partiellement ces caractéristiques.<br />

<strong>La</strong> matrice crayeuse se présente en effet comme un<br />

empilement anarchique de grains de calcite (fig. 6).<br />

Cette texture s'apparente à celle résultant d'un empilement<br />

de grains de sable, avec toutefois une granulometrie<br />

très fine des grains, allant de 0,5 à 2 u<br />

environ, donc de l'ordre des dimensions théoriques<br />

des particules d'argile exprimées dans la classification<br />

géotechnique type LPC.<br />

Cela est en accord avec les résultats des mesures ou<br />

des observations réalisées par ailleurs et en particulier<br />

avec celles que nous allons énumérer.<br />

34


Les mesures purement physiques liées directement à<br />

la texture :<br />

— porosité de l'ordre de 40 % en moyenne correspondant<br />

sensiblement aux cas théoriques 2 et 4 (définis<br />

par Graton et Fraser) d'arrangement de sphères<br />

de même diamètre 6 . <strong>La</strong> porosité théorique maximale<br />

(47,6 %) ne peut être atteinte du fait de la granulometrie<br />

relativement étalée des grains élémentaires,<br />

auxquels se superposent des éléments plus gros de<br />

l'ordre de 10 p. (nannofossiles). de 50 à 150 LI (Foraminifères)<br />

et parfois plus (100 p. à quelques millimètres<br />

pour les débris de coquilles),<br />

— yd directement fonction de la porosité dans le cas<br />

d'un matériau monominéral,<br />

— porométrie. moyenne de 0,5 p, compatible avec un<br />

assemblage majoritaire de grains de 0,5 à 10 p,<br />

— succion élevée, directement liée à la porométrie,<br />

de même que la vitesse d'ascension capillaire ;<br />

l'ensemble de ces résultats permettrait de classer les<br />

craies, du point de vue de la granularité, entre les<br />

limons et les argiles (au sens de la classification géotechnique).<br />

Ceci est également en accord avec des<br />

mesures de perméabilité réalisées sur échantillons :<br />

k x 10 _ 6<br />

cm/s.<br />

<strong>La</strong> présence d'un frottement interne dû aux contacts<br />

des grains élémentaires, à arêtes vives et de forme grossièrement<br />

cubique, rhomboédrique ou lamellaire.<br />

<strong>La</strong> variation des résultats d'essais mécaniques (R c<br />

) en<br />

fonction de la teneur en eau.<br />

L'aptitude à la densification sous contrainte statique<br />

ou dynamique, du fait du réarrangement des grains<br />

tendant à réaliser une texture plus compacte, et de<br />

la fragmentation des coccolithes qui constituent en<br />

quelque sorte des ponts de matière à l'intérieur même<br />

de la matrice.<br />

<strong>La</strong> figure 7 montre l'évolution de la texture de la craie<br />

de Pacy-sur-Eure soumise à, un, puis à quatre compactages.<br />

Le resserrement des grains, peu visible dans le<br />

premier cas, apparaît particulièrement accentué dans<br />

le second.<br />

Cependant, l'observation de la texture ne permet pas<br />

d'expliquer de manière satisfaisante la présence d'une<br />

cohésion au sein de la craie. En effet, cette cohésion<br />

ne peut être directement comparable à celle qui se<br />

manifeste dans les argiles pour lesquelles les forces<br />

d'adsorption dues à l'eau liée jouent un rôle important.<br />

Par ailleurs, on n'observe pas nettement de liaisons<br />

mécanique ou chimique entre les grains du type de<br />

celles qui caractérisent les roches ; ces liaisons n'apparaissent<br />

que pour des craies sortant de la gamme<br />

étudiée ici et se rapprochant nettement des calcaires<br />

au sens strict (cf. chapitre « Les <strong>Craie</strong>s atypiques »).<br />

En fait, et faute de démonstration directe, il faut admettre<br />

que cette cohésion est intermédiaire entre celle<br />

des argiles et des roches. Elle peut être due à la composition<br />

de différentes forces :<br />

— en partie, des forces de surface développées entre<br />

l'eau des pores et les grains solides, ces forces pouvant<br />

s'exercer jusqu'à des dimensions de l'ordre du micron<br />

[3]. Ces forces de surface peuvent être augmentées<br />

de l'effet de la pression osmotique liée à la présence<br />

vraisemblable de sels dissous dans l'eau des pores ;<br />

— en partie, au collage chimique des grains, mis<br />

en évidence par ailleurs [11], sous la forme de ponts<br />

de calcite, sans qu'il soit possible pour le moment<br />

de chiffrer la densité de ces ponts et d'estimer leur<br />

influence véritable sur la cohésion de la roche.<br />

Le passage de la craie de l'état de roche à celui de<br />

boue au sein de laquelle peut se manifester le phénomène<br />

du coussin de caoutchouc (observé fréquemment<br />

dans les chantiers de terrassements et produit également<br />

par le battage des pieux) est vraisemblablement<br />

lié à la perte de cohésion due à la destruction de la<br />

texture. Les grains élémentaires seraient alors entourés<br />

d'une pellicule d'eau capillaire, supportant seule les<br />

contraintes mécaniques, avec développement de surpressions<br />

interstitielles [4]. Le phénomène serait<br />

d'autant mieux développé qu'une plus grande proportion<br />

de grains serait ainsi libérée.<br />

Par ailleurs, le fait qu'une craie desséchée ne peut<br />

recouvrer la totalité de sa teneur en eau de saturation<br />

s'explique, sous réserve de vérification, par le<br />

dépôt au cours du drainage, des sels dissous dans l'eau<br />

interstitielle. Il pourrait s'agir d'une véritable cristallisation<br />

chimique qui, bien que peu importante quantitativement,<br />

abaisserait de façon sensible la porosité<br />

de la roche. <strong>La</strong> très forte variation de R c<br />

en fonction<br />

de la teneur en eau pourrait également s'expliquer en<br />

partie de la même façon.<br />

Fig. 6. — <strong>Craie</strong> de Pacy-sur-Eure vue au microscope électronique<br />

(G = x 2500).<br />

6. Modèles de Graton et Fraser : arrangement de couches de<br />

sphères, à disposition carrée ou à disposition rhombique. <strong>La</strong><br />

porosité théorique atteint ainsi un maximum de 47,64 % (cas 1)<br />

et un minimum de 25,95 % (cas 6).<br />

35


a) Etat après un compactage Proctor normal. b) Etat après quatre compactages Proctor normal.<br />

Fig. 7. — <strong>Craie</strong> de Pacy-sur-Eure vue au microscope électronique (G = X2250).<br />

Cette possibilité paraît vérifiée par l'observation à de<br />

très forts grossissements de craies ayant subi de<br />

nombreux compactages, puis séchées en vue de la<br />

réalisation de l'étude microscopique (fig. 8).<br />

On peut supposer également qu'il s'agit ici d'une<br />

amorce de recristallisation, provoquée par le développement<br />

de fortes contraintes au niveau des grains,<br />

plutôt que d'une précipitation d'ions dissous dans<br />

l'eau interstitielle.<br />

De toute manière, ces indications s'accordent à des<br />

observations empiriques relatives à un « phénomène<br />

de prise » se produisant sur des craies déstructurées,<br />

puis laissées au repos, tant sur des remblais que lors<br />

du battage de pieux. Une étude plus poussée de ce<br />

phénomène, qui peut avoir d'importantes conséquences<br />

pratiques, pourrait avantageusement être<br />

envisagée. Des développements devraient en découler<br />

sous l'angle du traitement de la craie. Outre le traitement<br />

au ciment pour lequel des essais encourageants<br />

ont été réalisés dans un passé récent, des traitements<br />

chimiques divers (par imprégnation d'une solution<br />

saturée en sels) ou électrochimiques peuvent s'avérer<br />

efficaces pour la résolution de certains problèmes de<br />

chantiers.<br />

Fig. 8. — <strong>Craie</strong> de Pacy-sur-Eure après quatre compactages ; on<br />

remarque des liaisons très nettes entre grains évoquant des soudures<br />

par nourrissage (G = x 7500).<br />

LES CRAIES<br />

<strong>La</strong> famille de la craie se différenciant assez nettement<br />

des autres types de matériau, il s'avère intéressant de<br />

poursuivre l'analyse en tentant de discerner les facteurs<br />

pétrographiques déterminant des différences de<br />

comportement d'un type de craie à l'autre.<br />

Cette tentative peut être réalisée par méthode directe,<br />

au moyen de l'observation microscopique, qui met<br />

en évidence des possibilités de fluctuation :<br />

d'une part, au niveau de la microscopie optique (microfaciès),<br />

en effet, certaines craies se distinguent nettement<br />

des autres par étude de lames minces, voire directement<br />

par observation macroscopique. Il en va ainsi<br />

particulièrement des craies fournissant le meilleur<br />

comportement (craies très bonnes ou bonnes):<br />

— craies du Turonien de teinte grise, caractérisées<br />

par la grande abondance de Foraminifères de forme<br />

plus ou moins sphériques, les coccosphères et les<br />

36


Fig.9. — <strong>Craie</strong> de Belbeuf (G = X 45).<br />

Fig. 10. — <strong>Craie</strong> de Feuillères avec des rhomboèdres de dolomie.<br />

(G = x 45).<br />

Pithonelles. Les parois (tests) de ces microorganismes,<br />

très proches les unes des autres, constituent en effet<br />

une sorte de squelette à la roche et expliquent ses<br />

caractéristiques relativement élevées. Une telle texture<br />

se rencontre pour les cas de Belbeuf (fig. 9) et<br />

de Trith-Saint-Léger ;<br />

— craies à cristaux de néoformation. <strong>La</strong> craie de<br />

Feuillères se caractérise par la présence de rhomboèdres<br />

de dolomie ou de sidérose, en nombre relativement<br />

important (fig. 10) et dont la présence peut<br />

expliquer en partie certaines caractéristiques élevées<br />

mesurées sur ce matériau ;<br />

— craies très grossières. <strong>La</strong> craie du Rouvray se caractérise<br />

par une grande abondance de débris de<br />

coquilles, de dimension moyenne de 200 \x à 10 mm<br />

(fig. 11).<br />

Dans tous les cas, la proportion relative de gros éléments,<br />

constitués de calcite cristalline pure de y d ~ 2,70<br />

(ou de dolomie ou de sidérose) peut influer directement<br />

sur la porosité de la roche, donc sur sa densité<br />

et ses caractéristiques mécaniques.<br />

En ce qui concerne les différentes craies de Normandie,<br />

il semble exister une relation entre cette proportion<br />

et le classement géotechnique obtenu par les méthodes<br />

précédentes. Cette observation demeure malheureusement<br />

qualitative du fait de la difficulté d'évaluation<br />

visuelle du pourcentage de gros éléments.<br />

Par contre, et mis à part le cas des craies du Turonien,<br />

l'extension de cette corrélation à d'autres régions ne<br />

paraît pas satisfaisante, certaines craies « mauvaises »<br />

du Nord contenant une forte proportion de ces éléments.<br />

Il est donc nécessaire de tempérer cette observation<br />

en prenant en compte les caractéristiques de<br />

la matrice elle-même.<br />

Fig. 11. — <strong>Craie</strong> de Rouvray (G = X 45).<br />

d'autre part, au niveau de la microscopie électronique<br />

(nannofaciès), les différentes craies présentent des<br />

variations non négligeables :<br />

— des dimensions des grains élémentaires : de 0,5 à<br />

1 p pour certaines craies, atteignant une moyenne de<br />

1 à 2 p pour d'autres, ce qui confirme les données des<br />

mesures physiques (porométrie - succion) ;<br />

— de la proportion des nannofossiles intacts : les<br />

craies du Nord présentent généralement des cocco-<br />

37


lithes intacts, alors qu'ils apparaissent plus fragmentés<br />

dans les craies de Normandie ;<br />

— de la forme des nannofossiles ou des microfossiles :<br />

sphérique pour les coccosphères et les Pithonelles,<br />

elle s'apparente à des anneaux pour les coccolithes,<br />

à des bâtonnets pour les Rhabdolithes.<br />

Ces différents facteurs influencent vraisemblablement<br />

le degré de compacité atteint par la matrice, fonction<br />

du mode d'arrangement des grains. Des différences<br />

sensibles de cet arrangement apparaissent à l'observation<br />

microscopique, mais ne peuvent, pour le moment<br />

du moins, donner lieu à une interprétation quantitative.<br />

De même il y aurait lieu de vérifier la présence éventuelle<br />

de ponts, susceptibles d'exister de manière plus<br />

ou moins ténue dans certaines craies.<br />

Les différences observées dans l'étude des microfaciès<br />

et des nannofaciès semblent se répercuter sur le comportement<br />

des craies soumises à des contraintes. C'est<br />

ainsi qu'au cours de compactages répétés, le resserrement<br />

de la texture apparaît moins rapide pour la craie<br />

de Rouvray que pour celle de Pacy-sur-Eure. De plus,<br />

ce resserrement, homogène pour la craie de Pacy,<br />

se fait irrégulièrement pour la craie de Rouvray, ce<br />

qui se traduit en fin de compte par une texture en<br />

alvéoles.<br />

Un essai de quantification des données relatives à la<br />

texture a été réalisé par une méthode indirecte, au<br />

moyen de l'essai de microdureté. Cet essai, qui s'apparente<br />

à un poinçonnement, consiste à enfoncer<br />

sous une pression donnée, une pointe diamantee sur<br />

une face polie du matériau. On mesure la dimension<br />

de l'empreinte, à partir de laquelle on calcule à l'aide<br />

d'un tableau de référence, une résistance au poinçonnement<br />

exprimée en kg/mm 2<br />

(Hv : dureté Vickers).<br />

Pour la craie, la dimension de l'empreinte atteint 100<br />

à 200 ¡i en moyenne. L'essai peut donc s'appliquer à<br />

un milieu homogène, dont la majeure partie est constituée<br />

d'éléments de dimension inférieure à 50 \x. Il<br />

est ainsi possible de mesurer la microdureté de la<br />

matrice. Lorsque la mesure intéresse un élément de<br />

grande dimension, sa valeur tend à se rapprocher de<br />

la microdureté du cristal de calcite, soit 110 kg/mm 2 .<br />

Le principe même de l'essai suppose donc la réalisation<br />

d'un grand nombre de mesures sur chaque échantillon<br />

testé, de manière à obtenir une représentation<br />

de type statistique.<br />

Les résultats, exprimés par des courbes de fréquence,<br />

s'avèrent très représentatifs de la dispersion du milieu<br />

: l'absence de gros éléments et la présence d'une<br />

matrice peu compacte se traduit par des valeurs très<br />

faibles, très peu dispersées aux alentours de la limite<br />

de sensibilité de l'essai (1,8 kg/mm 2 ) ; une grande<br />

abondance de gros éléments de calcite cristalline se<br />

traduit par une forte dispersion des essais, et un glissement<br />

vers la droite du graphique de la moyenne arithmétique<br />

des mesures.<br />

<strong>La</strong> figure 12 permet de visualiser très rapidement les<br />

différences obtenues dans les courbes de fréquence<br />

et les moyennes arithmétiques des valeurs mesurées,<br />

concernant un minimum de 100 mesures par type de<br />

craie, sont également très significatives (résultats en<br />

kg/mm 2 ) :<br />

Pacy-sur-Eure : 2,4 Incarville : 4,5<br />

Le Catouillage (RN 1) 2,5 Rouvray : 5<br />

Saint-Cloud : 2,5 A 27 : 7<br />

Sauqueville : 2,7 Trith-Saint-Léger : 7,5<br />

Morval : 3 Belbeuf : 8,7<br />

Malincourt : 4 Feuillères : 15<br />

Ce classement est en parfaite corrélation avec ceux qui<br />

ont été établis précédemment. L'essai de microdureté<br />

paraît ainsi bien adapté à l'étude géotechnique des<br />

craies.<br />

INTERPRÉTATION<br />

GÉNÉRALE<br />

A la suite de l'étude des différentes caractéristiques<br />

physiques et mécaniques et de la pétrographie fine<br />

des craies étudiées, il paraît possible :<br />

— de différencier nettement la famille « craie » des<br />

autres roches carbonatées et particulièrement des calcaires<br />

;<br />

— d'expliquer le comportement général des craies en<br />

chantier par leur texture très particulière ;<br />

— de différencier nettement, au moyen d'essais physiques<br />

et mécaniques de laboratoire, des craies présentant<br />

des comportements différents en terrassements.<br />

Il paraît donc possible de définir une méthode d'étude<br />

des caractéristiques intrinsèques des craies. En fait,<br />

il s'avère que, moyennant un certain nombre de précautions,<br />

de nombreux essais peuvent concourir au<br />

résultat cherché. Par contre, il paraît indispensable<br />

de corréler les résultats de plusieurs essais différents<br />

pour caractériser de manière sûre une craie donnée.<br />

Parmi les essais les plus simples et les moins onéreux,<br />

il est possible de retenir :<br />

. la densité sèche (yd),<br />

. la vitesse longitudinale (V,),<br />

. la microdureté (Hv),<br />

. le vibrobroyage, (V b<br />

), processus sans eau,<br />

. la vitesse d'ascension capillaire (V AC<br />

),<br />

Rc sat.<br />

L'interprétation des résultats peut être réalisée directement<br />

par la méthode du nomogramme.<br />

Un soin tout particulier doit être apporté à la réalisation<br />

des essais, de manière à diminuer la dispersion,<br />

spécialement pour l'essai de yd, et dans une moindre<br />

mesure pour l'essai de V t<br />

.<br />

L'application de cette méthode d'identification, mise<br />

au point pour les problèmes spécifiques de terrassements,<br />

intéresse également tant la stabilité des grands<br />

38


Fig. 12. — Courbes de fréquence des microduretés.<br />

<strong>Craie</strong> du Nord<br />

et de la Picardie<br />

1 ^ ^ r ~ H — i — H 1 — l ' ' > T ' ^ i—i 1—i ±i±».<br />

2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 U 15 16<br />

Hv (kg/mm )<br />

2<br />

40"<br />

30--<br />

+ + + + +<br />

Sauqueville<br />

Pacy -sur-Eure<br />

Incarville<br />

Rouvray<br />

Belbeuf<br />

Saint-Cloud<br />

<strong>Craie</strong> de Normandie<br />

et de la région parisienne<br />

10 •-<br />

lì ^<br />

I 60"<br />

E<br />

a><br />

Y. 50-<br />

20-<br />

" ' - VCL<br />

&•>' / !* -,<br />

-I—i—i-<br />

5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16<br />

Hv(kg/mm2)<br />

\ Essais<br />

Dif. \<br />

cas\<br />

TABLEAU VII<br />

Corrélation entre les caractéristiques des craies<br />

et leur aptitude à changer de structure<br />

Ta<br />

Vi<br />

m/s<br />

Hv<br />

kg/<br />

mm 2<br />

VAC<br />

R c<br />

sec Aptitude à<br />

en<br />

Vo<br />

changer de<br />

16 mn R c<br />

sat.<br />

structure<br />

%<br />

1 1,70 2 500 10 2 > 2 faible<br />

craie dure<br />

15<br />

2 1,60 2 300 5 2,5 20 > 3 notable<br />

craie<br />

mi-dure<br />

3 1,55 2 100 3 4 30 3= 4 particulièrement<br />

forte: craie<br />

tendre<br />

remblais que, vraisemblablement, les problèmes de<br />

fondations profondes.<br />

Il paraît essentiel dans tous les cas de mettre en évidence<br />

l'aptitude de la craie à modifier sa texture, par<br />

resserrement ou par fragmentation d'éléments organiques,<br />

aptitude liée à l'intensité des contraintes<br />

subies (tableau VII).<br />

Il est ainsi possible de différencier trois domaines<br />

de caractéristiques des craies, en corrélation avec trois<br />

types de comportement. Plutôt que de « bonnes » ou<br />

« mauvaises » craies, termes qui ne peuvent se définir<br />

que par rapport à un type donné de travaux, nous<br />

donnerons l'appellation suivante à ces cas :<br />

— cas 1 : craie dure,<br />

— cas 2 : craie mi-dure,<br />

— cas 3 : craie tendre.<br />

39


<strong>La</strong> craie dans son gisement<br />

HÉTÉROGÉNÉITÉS DES MASSIFS DE CRAIE<br />

L'étude pétrophysique est nécessaire à l'identification<br />

précise du matériau concerné sur le plan géotechnique,<br />

et à la prévision de son comportement. Elle prend<br />

toute sa valeur dans le cas d'un milieu homogène,<br />

auquel peuvent s'extrapoler ses résultats. Les massifs<br />

de craie remplissent généralement cette condition.<br />

Cependant, même ces massifs homogènes sur le plan<br />

strictement pétrographique présentent des caractères<br />

secondaires générateurs d'hétérogénéité ; ce sont :<br />

. la présence de lits de silex ou de cherts,<br />

. la fissuration,<br />

. l'altération.<br />

Présence de silex<br />

Rares sont les faciès crayeux dépourvus de silex 7 .<br />

Mis à part le Turonien, tous les étages de la série<br />

crayeuse en renferment, en nodules isolés, ou plus<br />

souvent, en lits de 10 à 20 cm d'épaisseur, espacés<br />

de 0,50 à 2 m selon les niveaux.<br />

Sur le plan géotechnique, ces silex se traduisent<br />

essentiellement par :<br />

— des perturbations apportées aux mesures sismiques,<br />

— les usures apportées aux matériels de sondage<br />

(couronnes) ou de terrassement (pneus de la décapeuse),<br />

— leur rôle positif dans le comportement du matériau<br />

en terrassement, du fait de leur caractère non évolutif.<br />

Ces aspects ont été jusqu'à présent assez peu étudiés,<br />

bien qu'ils puissent dans certains cas avoir une incidence<br />

non négligeable sur le déroulement d'un chantier.<br />

Fissuration<br />

<strong>La</strong> série crayeuse du Crétacé a subi des efforts tectoniques,<br />

contrecoups de la phase alpine, qui se sont<br />

traduits par des plissements à grand rayon de courbure<br />

7<br />

et par une fissuration importante.<br />

Aux deux extrémités de l'échelle de fissuration, les<br />

conséquences géotechniques sont assez peu marquées :<br />

— les failles relativement abondantes en pays de<br />

craie, où elles ont déterminé le plus souvent l'orientation<br />

des vallées, peuvent être décelées au niveau d'un<br />

projet par une étude de corrélation pétrographique<br />

entre sondages, et par la sismique réfraction. Un cas<br />

particulier est constitué dans les vallées par les effondrements<br />

de falaises en grands panneaux d'origine<br />

ancienne (fin de la dernière période glaciaire), relativement<br />

fréquents en Normandie ;<br />

7. Cf. article de M. Bignot et de Mlle Aubry.<br />

— la microfissuration apparaît généralement faible,<br />

voire inexistante, dans la craie, ce qui est en accord<br />

avec l'aspect « sol » de ce matériau. Une vérification<br />

indirecte de ce caractère est apportée par la mesure<br />

de la vitesse de propagation des ultrasons, du fait de<br />

la faible influence de la teneur en eau sur les résultats<br />

de cet essai.<br />

<strong>La</strong> macrofissuration, par contre, est très abondante<br />

dans toute la série crayeuse. Elle est très variable<br />

suivant l'âge et le type de craie. Ainsi en Normandie :<br />

— craie blanche du Sénonien : fissures verticales,<br />

très nettes, fermées, de maille très resserrée : 0,10 à<br />

0,30 m dans les cas observés ;<br />

— craie grise du Turonien : fissures courbes plus ou<br />

moins inclinées sur l'horizontale, de maille très variable,<br />

délimitant très souvent des dièdres ;<br />

— craie calcaire : fissures verticales, à maille lâche<br />

(1 à 5 m), souvent ouvertes.<br />

Sur le plan géotechnique, et tout au moins pour les<br />

ouvrages courants, la fissuration rencontrée dans le<br />

sein même des massifs de craie ne se traduit généralement<br />

pas par des conséquences très importantes,<br />

positives ou négatives. Au-dessous de la zone d'altération,<br />

en effet, les fissuressont ordinairement fermées<br />

et ne renferment pas de matières compressibles. <strong>La</strong><br />

perméabilité qui leur est associée est dans ce cas très<br />

faible ainsi qu'ont pu le montrer les percements de<br />

galeries d'essai du tunnel sous la Manche et de<br />

l'usine souterraine d'EDF à Epernay [8]. En déblai,<br />

elles ne posent pas de problème grave de stabilité,<br />

sauf dans le cas où le pied de talus concernerait la<br />

base du Cénomanien, dans son contact avec la glaucome<br />

et l'argile albienne. Elles peuvent par contre<br />

faciliter la gélifraction de la craie.<br />

En terrassement, il a été observé, sur les chantiers<br />

de l'autoroute Al3 que l'exécution du ripage dans<br />

le sens de la fissurationpermettait de reculer la limite<br />

d'emploi de ce procédé.<br />

Au niveau de l'étude géotechnique, la fissuration<br />

amène à des difficultés d'interprétation des résultats<br />

de la sismique. Dans ce cas, en effet, les fissuresnon<br />

ouvertes et très resserrées de la craie tendre peuvent<br />

n'avoir aucun effet sur les vitesses mesurées in situ<br />

qui deviennent très proches des vitesses mesurées sur<br />

échantillons. Par contre, les craies calcaires, très dures<br />

peuvent passer inaperçues du fait de l'espacement<br />

très important de leur maille de fissuration. On conçoit<br />

ainsi qu'il ne soit guère possible dans ce cas d'interpréter<br />

directement les mesures sismiques, mais qu'un<br />

étalonnage banc par banc, sur la base d'une étude<br />

pétrophysique (et plus particulièrement d'une comparaison<br />

entre les vitesses in situ et les vitesses longitudinales)<br />

s'impose.<br />

40


Altération<br />

Sous ce titre sont regroupées l'ensemble des vicissitudes<br />

subies par les massifs de craie après leur mise en place<br />

et leurs déformations tectoniques, du fait d'actions<br />

climatiques diverses.<br />

Les types d'altération rencontrés en zones de craie<br />

sont très variés, mais il y a lieu de distinguer deux cas<br />

principaux.<br />

FORMES DE DISSOLUTION<br />

<strong>La</strong> dissolution de la craie, essentiellement en période<br />

de climat chaud, s'est traduite par la création de<br />

formes de type karstique : les lapiez constitués de<br />

poches et d'entonnoirs très profonds (10 à 50 m),<br />

très nombreux et les karsts profonds, beaucoup moins<br />

répandus, comprenant des galeries et des cavités profondes<br />

(Caumont, près de Rouen), mais qui dans des<br />

conditions topographiques favorables, apparaissent<br />

très près de la surface.<br />

Le développement de ces formes apparaît lié, d'une<br />

part à la nature de la craie, d'autre part à celle du<br />

terrain de couverture. Ainsi, à Dieppe, la présence de<br />

sables tertiaires (Thanétien) aquifères au contact de<br />

la craie a entraîné la création de poches de dissolution<br />

profondes, orientées selon les réseaux de diaclases,<br />

alors qu'à 10 km de là, au cap d'Ailly, ces<br />

poches disparaissent en même temps que les sables.<br />

De même, le karst profond paraît lié, du moins en<br />

Normandie, aux bancs de craie calcaire de la base du<br />

Sénonien ou du toit du Turonien très peu perméables,<br />

sur lesquels s'est réalisé un drainage important.<br />

Sur le plan géotechnique, la présence de ces poches<br />

et cavités se traduit par différents problèmes pratiques :<br />

— les lapiez comblés et recouverts par l'argile à silex<br />

se caractérisent par une hétérogénéité considérable<br />

Fig. 13. — Altération de la craie d'Incarville par fissuration<br />

horizontale.<br />

qui rend très aléatoire toute étude géotechnique classique.<br />

Or, on observe, soit dans les poches de dissolution,<br />

soit dans les épis de craie qui les bordent, des zones<br />

partiellement déconsolidées, susceptibles de tasser.<br />

<strong>La</strong> solution de ce problème ne peut être obtenue,<br />

très souvent, que lors de l'ouverture des fouilles ;<br />

— le karst profond pose les problèmes classiques<br />

de fondations liés aux cavités souterraines. Il ne<br />

devient préoccupant cependant qu'en vallée, là où<br />

l'érosion est proche du niveau de base de ce karst.<br />

A ces formes de dissolution sont le plus souvent liées<br />

des formations résiduelles bien connues sous les noms<br />

d'argile à silex ou bief à silex, qui peuvent recouvrir<br />

la surface de la craie sur des épaisseurs de plusieurs<br />

mètres (jusqu'à 15 à 20 m) et emplissent les poches<br />

de dissolution. Nous n'aborderons cependant pas ce<br />

sujet qui ne présente qu'un rapport théorique (problème<br />

de genèse) avec la craie.<br />

ALTÉRATION AU SENS STRICT<br />

Elle est surtout associée aux climats froids développés<br />

dans nos régions depuis la fin de la dernière période<br />

glaciaire. Elle se manifeste donc essentiellement, dans<br />

les zones non recouvertes de formations résiduelles,<br />

de limons éoliens ou de formations du Tertiaire, et<br />

dans les vallées.<br />

En sommet de versant, on observe une altération<br />

profonde liée essentiellement à l'action du gel. Elle<br />

comprend une zone superficielle cryoturbée, dans<br />

laquelle la craie est à l'état de nodules enrobés dans<br />

une pâte crayeuse abondante ; en dessous, le passage<br />

se fait progressivement avec une zone où prédomine<br />

la fissuration horizontale de maille très serrée tout<br />

d'abord, puis de plus en plus lâche jusqu'à la craie<br />

intacte (fig. 13).<br />

<strong>La</strong> profondeur de cette altération peut varier, en<br />

moyenne entre 1 et 5 m et peut atteindre une dizaine<br />

de mètres.<br />

Son incidence sur le plan géotechnique n'est pas<br />

négligeable, d'une part sous l'angle des fondations<br />

(force portante décroissante avec l'intensité de l'altération),<br />

d'autre part sous l'angle des terrassements.<br />

Ainsi, les constatations faites sur le déblai d'Incarville<br />

ont montré que la craie altérée se mettait en place<br />

beaucoup plus difficilement que la craie saine, ce qui a<br />

entraîné la nécessité de l'extraire à la pelle, en butte.<br />

En fond de vallée, cette altération s'est propagée<br />

différemment suivant la nature de la craie : tantôt<br />

limitée à une simple ouverture des fissures (craies<br />

dures), elle se traduit parfois par le développement<br />

sur plusieurs mètres d'épaisseur du faciès nodules<br />

plus pâte indiqué plus haut. Cela se traduit par une<br />

compressibilité importante de la craie, dont le prélèvement<br />

peut d'ailleurs être réalisé dans ce cas avec<br />

carottier à paroi mince foncé ou battu.<br />

L'ouverture des fissures, phénomène dominant dans<br />

les craies dures et en fond de vallons secs, du fait de<br />

la décompression et de la circulation des eaux, consti-<br />

41


éelles se traduit tant par une faible perméabilité que<br />

par l'absence de l'effet d'échelle. Dans ce cas, les<br />

résultats obtenus sur échantillons sont directement<br />

applicables au massif. <strong>La</strong> craie peut alors être étudiée<br />

comme une roche homogène, élastique, légèrement<br />

anisotrope [7-8].<br />

Ce cas idéal est vraisemblablement représenté sous<br />

tous les plateaux, à forte profondeur lorsqu'il n'y a<br />

pas de couverture imperméable ou directement sous<br />

cette couverture lorsque celle-ci existe (Tertiaire).<br />

Les méthodes classiques de la mécanique des roches<br />

peuvent être appliquées dans ce cas, sans perdre de<br />

vue le fait que tout remaniement ou toute contrainte<br />

dynamique se traduiront par une déstructuration du<br />

matériau et un comportement comparable à celui du<br />

sol.<br />

Domaine superficiel<br />

Fig. 14. — Bloc de craie de Sauqueville montrant sur sa face inférieure<br />

des chenaux dus à la circulation des eaux.<br />

tue un facteur favorable pour la recherche d'eau, à<br />

cause de l'augmentation très forte de la perméabilité,<br />

mais défavorable par contre sous l'angle des fondations.<br />

Du point de vue des terrassements, il semble que,<br />

dans un cas au moins des chantiers intéressés par la<br />

présente étude, à Sauqueville, l'altération pénétrant<br />

à l'intérieur du massif, à la faveur des fissures naturelles<br />

et complétée par une amorce de karstification<br />

(fig. 14) ait modifié dans un sens défavorable les<br />

caractéristiques de la craie. Cela expliquerait certaines<br />

contradictions observées dans les résultats d'essais<br />

formulés précédemment.<br />

En pied de versant, les alternances de gel-dégel ont<br />

provoqué la mise en place des dépôts de pente, parfois<br />

développés sur plusieurs mètres d'épaisseur. Ces<br />

dépôts, qui sont en fait des formations superficielles,<br />

n'entrent pas dans le cadre du présent sujet. De même,<br />

la gélivité très forte de la craie constitue, outre l'aspect<br />

esthétique, le principal obstacle à la réalisation de<br />

talus de déblais verticaux ou à pente très forte.<br />

MÉTHODES D'ÉTUDE EN PLACE<br />

DES MASSIFS DE CRAIE<br />

Compte tenu des observations précédentes, il y a lieu<br />

de considérer deux domaines d'étude en place des<br />

massifs de craie.<br />

Domaine profond<br />

Le domaine profond n'est pas affecté par l'altération,<br />

les fissures sont fermées du fait des contraintes liées<br />

au poids du recouvrement. L'absence de discontinuités<br />

Le domaine superficiel peut atteindre de 1 à 20 ou<br />

30 m selon les cas ; il est caractérisé par le développement<br />

de l'altération.<br />

Ce domaine est le plus concerné par la grande majorité<br />

des travaux de génie civil. Il pose de nombreux problèmes<br />

:<br />

— de géométrie : localisation de poches de dissolution<br />

ou de cavités souterraines ;<br />

— de caractéristiques : variation progressive des<br />

caractéristiques depuis la surface en direction de la<br />

profondeur.<br />

Les méthodes d'étude les mieux adaptées à ces problèmes<br />

semblent, à l'heure actuelle, être les suivantes.<br />

Géomorphologie : il est possible dans un site ou une<br />

région donnée, d'établir des relations entre la profondeur<br />

de l'altération et la situation topographique ou<br />

l'orientation du versant.<br />

De même, on peut déceler les zones favorables à<br />

l'existence de cavités souterraines, lorsque l'on connaît<br />

la relation de celles-ci avec un niveau préférentiel,<br />

soit lithologique (base du Coniacien), soit hydrogéologique<br />

(niveau de base).<br />

Des observations systématiques seraient à entreprendre<br />

pour dégager clairement et généraliser de telles relations.<br />

Géophysique : hormis la gravimétrie, employée avec<br />

des succès variables pour la recherche des cavités<br />

souterraines, la sismique réfraction est fréquemment<br />

utilisée pour l'étude de zones d'extraction, telles que<br />

des déblais autoroutiers. Nous avons vu précédemment<br />

(§ Fissuration) que les résultats de la sismique devaient<br />

nécessairement être contrôlés par une étude pétrophysique.<br />

On peut penser également que, dans certains<br />

cas du moins, une investigation à base de diagraphies<br />

soniques devrait également permettre un tel étalonnage.<br />

Essais de perméabilité : les essais Lugeon ont été<br />

réalisés pour l'étude des fondations d'ouvrages importants<br />

(Normandie : ponts d'Oissel, de Criquebeuf -<br />

42


1<br />

viaduc de la Risle, sur l'autoroute A 13). Il apparaît<br />

que la sensibilité de l'essai est généralement trop<br />

grande vis-à-vis du problème posé : la forte perméabilité<br />

des zones superficielles ne permet pas la montée<br />

en pression, les débits minimaux retenus (40 1/mn sous<br />

une pression de 4 bars au pont d'Oissel) intéressant<br />

une profondeur trop importante eu égard aux possibilités<br />

réelles de fondations dans une craie à fissures<br />

ouvertes [15]. Des observations en fond de caissons<br />

à air comprimé ont d'ailleurs montré que ces fortes<br />

perméabilités pouvaient être le fait de bancs de craie<br />

d'apparence massive, à réseau assez lâche de fissures<br />

très peu ouvertes et peu oxydées, et sur lesquels des<br />

essais de plaques permettaient d'obtenir de très bons<br />

résultats (résistance ^ 50 bars).<br />

L'observation des carottes constitue par ailleurs un<br />

test intéressant de la fissuration du massif, toujours<br />

pessimiste, de même que les perméabilités, elle montre<br />

que l'obtention régulière de morceaux de carottes<br />

cylindriques de plus de 5 à 10 cm de longueur, à faces<br />

peu oxydées, indique un milieu très peu fissuré.<br />

Essais de mécanique des sols en place. L'essai pressiométrique<br />

et l'essai de chargement de pieu paraissent<br />

bien adaptés à la détermination des caractéristiques<br />

mécaniques du massif de craie 8 , mais ils sont coûteux.<br />

Les craies atypiques<br />

Termes de transition entre les craies et les roches comparables<br />

Influence de la minéralisation secondaire et de la recristallisation<br />

sur les caractéristiques physiques et mécaniques des roches crayeuses ou assimilées<br />

Ayant isolé et étudié les facteurs déterminants du<br />

comportement de la craie typique, qui peut être<br />

considérée comme monominérale, il est intéressant<br />

d'examiner l'incidence de variation de la composition<br />

chimique et minéralogique sur les caractéristiques et<br />

le comportement géotechnique de roches habituellement<br />

assimilées aux craies.<br />

Nous ne disposons pas de résultats d'essais en nombre<br />

suffisant pour établir de manière précise ces corrélations.<br />

Néanmoins, il est possible, à partir des résultats<br />

d'anciennes études de projets particuliers, de dégager<br />

certaines tendances qui pourront être précisées par<br />

la suite.<br />

Il y a lieu de distinguer dans cette optique 9 :<br />

. les craies siliceuses,<br />

. les craies magnésiennes, ferrifères ou glauconieuses,<br />

. les craies à recristallisation partielle,<br />

. les craies argileuses.<br />

8. Cf. article de M. Baguelin : Les Fondations dans la craie.<br />

9. Cf. article de M. Bignot et de Mlle Aubry.<br />

<strong>Craie</strong>s siliceuses<br />

Elles sont très différentes selon la nature de la minéralisation<br />

siliceuse.<br />

Les craies quartzeuses (ou « sableuses ») présentent<br />

des caractéristiques physiques sensiblement meilleures<br />

{yd, porosité) que les craies typiques. <strong>La</strong> granulante<br />

de leurs constituants est plus grossière et moins<br />

évolutive, leur perméabilité est plus élevée. Aussi<br />

peut-on supposer, en l'absence de constatations, que<br />

leur comportement en chantier de terrassement est<br />

meilleur que dans les cas étudiés. Elles sont également<br />

peu sensibles à l'altération.<br />

Les craies à silice amorphe (calcédonite, opale) se<br />

caractérisent par des propriétés physiques très particulières<br />

: yd très faible (1,10 à 1,20), teneurs en eau<br />

très élevées (60 à 80 %). Ces propriétés s'expliquent<br />

par la texture très particulière de la roche composée<br />

alors, soit de spicules d'épongés en forme d'aiguilles,<br />

très enchevêtrés, soit de sphérules très petites (< 50 «)<br />

agglomérées par de fortes tensions capillaires. De tels<br />

matériaux, dont le comportement en terrassement n'est<br />

pas connu, ne peuvent cependant pas être classés<br />

dans la famille des craies malgré leur position au sein<br />

de la série du Crétacé supérieur.<br />

43


Yd R c s e c<br />

• Mesures deyd<br />

x Mesures de Rc<br />

Plage de variation pour les<br />

craies de Normandie<br />

I 1 1 1 1 »1<br />

SO 60 70 80 90 100<br />

Ca C03 (o/o)<br />

Fig. 15. —• Variation de YS et Rc en fonction de la teneur en CaCCh.<br />

<strong>Craie</strong>s magnésiennes, ferrifères et glauconieuses<br />

Des craies magnésiennes ou ferrifères observées dans<br />

la région de Rouen présentent des caractéristiques<br />

assez proches de celles de la craie au sens strict,<br />

lorsque leur teneur en Mg ou Fe est faible 10 %).<br />

Des études de fondations d'ouvrages d'art montrent<br />

qu'elles se distinguent néanmoins par des densités<br />

apparentes élevées (yd =1,7 à 2) alors que leur<br />

résistance est peu différente de celle d'une craie typique<br />

: R c<br />

sec < 100 bars. Cette non-corrélation s'explique<br />

à l'observation au microscope optique par la<br />

dispersion de cristaux rhomboédriques de dolomie Mg<br />

Ca (C0 3<br />

) 2<br />

ou de sidérose Fe Ca (C0 3<br />

) 2<br />

, au sein<br />

d'une matrice crayeuse. <strong>La</strong> densité du matériau est<br />

donc affectée par la présence de ces minéraux, de<br />

densité sèche y s<br />

plus élevée que la calcite (2,85 à 2,90<br />

au lieu de 2,72) alors que ces caractéristiques R c<br />

et<br />

V x<br />

ne sont guère accrues par la présence de ces cristaux<br />

non jointifs. L'assimilation de ce faciès à la craie au<br />

sens strict est donc possible.<br />

<strong>Craie</strong>s calcaires<br />

Dans la série crayeuse, certains bancs se révèlent<br />

extrêmement indurés et leurs caractéristiques s'apparentent<br />

à celles de calcaires. Ainsi dans la région de<br />

Rouen, pour la base du Coniacien, on obtient en<br />

moyenne les valeurs suivantes :<br />

2,00 ^ yd < 2,20, pouvant atteindre 2,40<br />

150 ^ R c<br />

sec ^ 500 bars<br />

3 000 ^ V x<br />

< 5 000 m/s<br />

Ces caractéristiques s'expliquent, en dehors de toute<br />

minéralisation secondaire, par une recristallisation<br />

plus ou moins poussée de la matrice. Cette diagenèse<br />

paraît liée à la présence de dolomie ou de sidérose :<br />

on observe en effet, au microscope, des craies dans<br />

lesquelles des rhomboèdres ont été dissous et n'apparaissent<br />

plus que par leur empreinte : dans d'autres<br />

cas, dans ces cavités se forme une recristallisation<br />

très fine de calcite ; au bout de l'évolution, on remarque<br />

une invasion de l'ensemble de la matrice par la<br />

recristallisation calcitique : on obtient alors un calcaire<br />

lithographique très compact, très résistant. Entre la<br />

craie à rhomboèdres et ce calcaire, le stade intermédiaire<br />

se traduit macroscopiquement par des hétérogénéités<br />

liées à l'inégalité de la recristallisation au<br />

sein de la roche : le faciès correspondant constitue<br />

la craie noduleuse.<br />

Sur le plan géotechnique, ces niveaux très favorables<br />

pour les fondations, constituent des obstacles sérieux<br />

à l'extraction et nécessitent alors l'emploi de l'explosif.<br />

En fait, il n'est plus possible alors de parler de craie<br />

au sens défini plus haut : il est nécessaire d'attribuer<br />

à un tel matériau la dénomination de calcaire ou,<br />

dans les cas intermédiaires, de craie-calcaire.<br />

<strong>Craie</strong>s argileuses<br />

Ces craies sont mal connues sur le plan géotechnique.<br />

Dans certains cas (dièves du nord-est du Bassin parisien),<br />

elles sont assimilées à des marnes. Les principaux<br />

résultats d'étude géotechnique concernant ces craies<br />

argileuses sont relatifs au tunnel sous la Manche 10<br />

pour lequel des identifications poussées ont été réalisées<br />

dans les formations du Cénomanien, du Turonien<br />

et du Sénonien inférieur.<br />

Dans ce cas, la connaissance de la teneur en CaC0 3<br />

a permis de délimiter des horizons différents, homogènes<br />

sur l'ensemble du tracé, sur lesquels ont été<br />

réalisés un grand nombre d'essais géotechniques.<br />

Il est donc possible d'étudier la variation des caractéristiques<br />

physiques et mécaniques en fonction de la<br />

teneur en CaCÔ 3<br />

. C'est ce que nous avons tenté de<br />

réaliser avec les essais yd et R c<br />

, dont les valeurs retenues<br />

correspondent à des moyennes arithmétiques,<br />

sur la figure 15 qui concerne à la fois les craies du<br />

tunnel sous la Manche et les craies faisant l'objet de<br />

notre étude.<br />

On remarque ainsi que pour des pourcentages en<br />

CaC0 3<br />

croissants de 55 à 100 % (environ), les<br />

résultats de yd et R c<br />

croissent, passent par un maximum<br />

(pour 70 à 75 % de CaC0 3<br />

), puis décroissent pour<br />

atteindre la gamme des craies au sens strict définies<br />

dans la présente étude. A ce niveau, si les valeurs de<br />

yd prolongent sensiblement la courbe précédente, les<br />

résultats de R c<br />

présentent une plage de variation<br />

très étendue qui n'a plus grand rapport avec la courbe<br />

correspondante. Il est possible de déduire de ce graphique<br />

:<br />

10. Informations partielles communiquées par M. Berthier du<br />

LCPC.<br />

44


— la spécificité des craies que nous avons étudiées<br />

par rapport à des craies argileuses sur le plan des<br />

caractéristiques physiques et mécaniques. <strong>La</strong> limite<br />

à 95 % retenue a priori paraît très significative pour<br />

la définition des craies au sens strict ;<br />

— le rôle d'une minéralisation secondaire dans<br />

l'évolution des caractéristiques d'une roche. L'optimum<br />

obtenu sur les courbes représente vraisemblablement<br />

le résultat de l'engrenage maximum de deux<br />

phases minérales distinctes, de granularité très différente<br />

: la calcite d'une part sous forme de grains de<br />

1 à 10 p, l'argile d'autre part en grains beaucoup plus<br />

petits (0,1 à 0,01 u), cette dernière remplissant les<br />

vides qui séparent les grains de calcite.<br />

Le même phénomène devrait se retrouver dans le cas<br />

des craies sableuses, bien que jouant en sens inverse :<br />

gros grains de quartz ( > 50 u), petits grains de calcite.<br />

Il y aurait lieu de vérifier la validité de ces relations<br />

sur un grand nombre de craies argileuses. Il devrait<br />

être possible ainsi de délimiter le domaine des craies<br />

marneuses, celui des marnes au sens strict et celui<br />

des marnes argileuses.'-<br />

Proposition d'une méthode d'étude géotechnique<br />

d'un massif crayeux<br />

L'analyse des différents paramètres qui commandent<br />

le comportement d'une craie considérée dans son<br />

massif montre qu'il y a lieu de distinguer, au niveau<br />

de l'étude géotechnique, les aspects suivants :<br />

. géologique,<br />

. pétrophysique,<br />

. conditions de gisement.<br />

Il paraît possible désormais d'énoncer un certain<br />

nombre de règles permettant une appréciation au<br />

plus juste du comportement de ce matériau soumis<br />

à tel ou tel type de contraintes.<br />

Etude géologique<br />

Elle a pour but de situer la zone étudiée par rapport<br />

à la série stratigraphique, d'identifier macroscopiquement<br />

les différents faciès et de réaliser l'analyse<br />

structurale du massif. L'étude particulière d'un projet<br />

doit se caler par rapport à des références régionales<br />

qui ont valeur de lois 11 .<br />

Etude pétrophysique<br />

Elle a pour but, pour chaque faciès ainsi défini :<br />

de Videntifier minéralogiquement par rapport aux craies<br />

au sens strict, et par rapport aux craies atypiques.<br />

<strong>La</strong> mesure de la teneur en CaC0 3<br />

éventuellement<br />

complétée d'une analyse minéralogique du résidu,<br />

satisfait à cette condition;<br />

de Videntifier du point de vue de sa texture fine lorsqu'il<br />

s'agit d'une craie typique. Cette identification peut<br />

se faire de manière indirecte :<br />

. par des mesures physiques : yd - V l<br />

- vitesse<br />

d'ascension capillaire, porométrie, etc., exprimant<br />

des caractéristiques intrinsèques du matériau ;<br />

. par des essais empiriques, testant de manière<br />

plus ou moins précise le comportement du matériau<br />

soumis à tel ou tel type de contrainte : R c<br />

,<br />

microdureté, vibrobroyage.<br />

Ce type d'identification nécessite d'une part un recoupement<br />

entre les résultats de plusieurs essais différents,<br />

d'autre part la réalisation d'un nombre de<br />

mesures suffisant pour chaque type d'essai. Cette méthode<br />

permet, en effet, de comparer des moyennes<br />

arithmétiques et des dispersions qui seules permettent<br />

de différencier valablement des matériaux qui, sur le<br />

plan de l'identification, présentent une plage de variation<br />

très faible, mais qui sur le chantier présentent<br />

des comportements très différents.<br />

Dans la pratique, nous proposons de retenir de préférence<br />

les essais suivants :<br />

. la densité sèche (yd) sous réserve de l'emploi d'une<br />

technique de mesure très élaborée,<br />

. la vitesse longitudinale (F;),<br />

. la microdureté (H v<br />

),<br />

. la vitesse d'ascension capillaire (V AC<br />

),<br />

. le vibrobroyage (V b<br />

).<br />

11. Cf. article de M. Bignot et de Mlle Aubry.<br />

45


j.//,.;-v:vy/j <strong>Craie</strong>s tendres<br />

| | <strong>Craie</strong>s mi-dures<br />

\////\ <strong>Craie</strong>s dures<br />

<strong>Craie</strong>s atypiques<br />

craies calcaires<br />

calcaires<br />

craies polyminérales<br />

Td<br />

"AC<br />

Densité sèche<br />

Vitesse longitudinale<br />

Vitesse d'ascension capillaire :<br />

hauteur atteinte en 16' (cm)<br />

Hu : Microdureté Vickers (kg/mm 2 )<br />

Vb<br />

: Vibrobroyage-% d'usure, processus sans eau.<br />

Rc sec Rapport de Rc sur échantillon desséché<br />

R sat. ' à R sur échantillon<br />

saturé<br />

Fig. 16. — Nomogramme d'identification géotechnique des craies.<br />

Tous ces essais présentent l'avantage d'une grande<br />

rapidité d'exécution et d'un faible coût. Ils peuvent<br />

être complétés, en particulier, par la détermination<br />

du rapport :<br />

R c<br />

sec<br />

R c<br />

sat.<br />

'<br />

Il est possible avec une expérience plus grande, que<br />

le nombre de ces essais soit diminué à l'avenir.<br />

Parallèlement, l'identification peut être réalisée de<br />

manière directe, par observation aux microscopes optique<br />

et électronique. Un étalonnage systématique reste<br />

cependant à faire, de même qu'un essai de traduction<br />

quantitative des observations ainsi faites. Une connaissance<br />

plus élaborée des faciès régionaux devrait<br />

permettre une progression rapide dans cette voie ;<br />

de le situer par rapport à une échelle de référence,<br />

deux types d'échelles peuvent être élaborés :<br />

. l'une théorique, découlant des résultats de l'étude<br />

pétrophysique (craies tendres, mi-dures et dures)<br />

et exprimée par le nomogramme (fig. 16) ;<br />

. l'autre appliquée à un type de travaux donné,<br />

par exemple aux chantiers de terrassements :<br />

comportement mauvais, moyen ou bon.<br />

Dans le cas des terrassements, nous avons établi a<br />

priori une relation directe entre les deux échelles. Il<br />

est évident que pour d'autres cas (fondations par<br />

exemple), il y aurait lieu de reconsidérer le problème.<br />

Le matériau considéré peut être comparé à cette<br />

échelle, directement issue des constatations sur chantiers,<br />

par l'intermédiaire d'essais spécialisés, par<br />

exemple l'essai de compactages répétés.<br />

Etude des conditions de gisement<br />

Elle permet de préciser les conditions de gisement,<br />

c'est-à-dire de mettre en évidence les hétérogénéités<br />

qui se superposent à celles inhérentes à la lithologie<br />

et à la structure tectonique. Il en va ainsi des problèmes<br />

liés à la fissuration du massif et à son altération au<br />

cours des périodes récentes de l'histoire géologique<br />

(Tertiaire, Quaternaire).<br />

Cette étude doit permettre de discerner des sousfamilles<br />

à l'intérieur d'un ensemble lithologiquement<br />

homogène, par exemple : craie saine - craie altérée,<br />

et par là même de réduire la dispersion des résultats<br />

d'essais. Elle doit faciliter également la prise en compte<br />

du comportement de masse, différent du comportement<br />

de l'échantillon. Les méthodes classiques de<br />

reconnaissance en place appliquées aux terrassements<br />

(sismique réfraction, sondages mécaniques) demeurent<br />

donc valables à condition d'être éclairées par une<br />

étude pétrophysique qui seule permet leur interprétation<br />

correcte.<br />

Ainsi conçue comme un ensemble homogène et compréhensif,<br />

l'étude géotechnique d'un massif crayeux<br />

devrait permettre d'apporter au maître d'œuvre des<br />

résultats concrets, directement utilisables pour une application<br />

pratique particulière.<br />

46


Conclusion<br />

L'étude pétrophysique de la craie a permis, sur le plan pratique, de mettre au point une méthode<br />

d'étude géotechnique, reposant sur la mesure de caractéristiques physiques et mécaniques, interprétées<br />

en liaison avec la connaissance de la texture du matériau. A cette méthode d'étude des<br />

caractéristiques intrinsèques de la craie, il est nécessaire de coupler une méthode plus générale<br />

d'étude des massifs de craie, prenant en compte en particulier les hétérogénéités dues à la fissuration<br />

et à l'altération.<br />

Il s'avère désormais possible de prévoir le comportement d'un tel matériau, en fonction de références<br />

précises à des chantiers antérieurs. De la même façon pourra être choisi le mode d'exécution<br />

à employer (matériel, techniques de chantier).<br />

Cet objectif est en partie réalisé en ce qui concerne les terrassements généraux et les grands remblais.<br />

Les possibilités d'application de la méthode restent par contre à étudier en ce qui concerne<br />

d'autres types de travaux (fondations - tunnels). De même, des développements sont envisageables<br />

dans le domaine des traitements.<br />

Sur le plan théorique, a été mis en évidence l'influence de la texture d'un matériau naturel sur ses<br />

caractéristiques physiques et mécaniques, ainsi que sur son comportement. <strong>La</strong> méthode ainsi dégagée<br />

demeure embryonnaire, mais son développement ultérieur devrait permettre des améliorations<br />

dans la connaissance des matériaux naturels, et une simplification de leur étude sur le plan géotechnique.<br />

De ce point de vue, la craie, intermédiaire entre un sol et une roche, constitue un corps idéal,<br />

à partir duquel peut être envisagée la mise au point d'une méthode mixte d'observation, de mesure<br />

et d'expérimentation, comparable à celle qui est utilisée à l'heure actuelle pour les matériaux artificiels,<br />

tels que le béton ou les métaux.<br />

BIBLIOGRAPHIE<br />

[1] AISENSTEIN R. et DAVID D., Quelques propriétés d'une craie rencontrée lors de la préparation<br />

de la carte géotechnique de Jérusalem. Cong. int. de géologie de l'ingénieur, Paris, sept. 1970.<br />

[2] ALBISSIN M. (d'), Les traces de déformation dans les roches calcaires. Revue de géographie physique<br />

et de géologie dynamique, 1963.<br />

[3] ANDREI S., Le drainage de l'eau dans les sols à granulation fine. Cahiers de la Recherche, 22.<br />

[4] ARQUIÉ G., Théorie générale de l'influence de la teneur en eau sur les résultats du compactage.<br />

Bull, liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., 64, mars-avril 1973, p. 145-158.<br />

[5] AUBRY M.P., Recherches sur les craies de Haute-Normandie, thèse 3 E cycle. Univ. Paris-VI.<br />

[6] CAYEUX L., Contribution à l'étude micrographique des terrains sédimentaires, Lille, Le Bigot, 1897.<br />

[7] DESSENNE J.L., Etude rhéologique et géologique de la craie, thèse de Docteur-Ingénieur, Grenoble,<br />

27 janv. 1971.<br />

[8] DESSENNE J.L., COMES G., DUFFAUT P. et GÉRARD P., <strong>La</strong> craie au laboratoire et dans un tunnel,<br />

profond, VII Cong. int. de méc. sols et trav. de fond., Mexico, août 1969.<br />

[9] HIGGINBOTTON, The engineering geology of chalk. Proceedings of the Symposium de l'Institution of<br />

Civil Engineers, 1965.<br />

[10] LAUTRIDOU J.P., Recherches de gélifraction expérimentale. II Calcaires de Normandie et de Provence,<br />

publication du Centre de Géomorphologie du CNRS, Bull. 6, mai 1970.<br />

[11] LE Roux A., Caractéristiques mécaniques des roches argileuses en relation avec leur texture,<br />

Bull, liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., 61, sept-oct. 1972, p. 155-178.<br />

[12] LEWIS et CRONEY, The properties of chalk in relation to road foundations and pavements, id. [9],<br />

[13] MAMILLAN, Dix ans de recherches sur les pierres calcaires. Ann. ITBTP, fév. 1954.<br />

[14] NOËL D., Coccolithes crétacés. <strong>La</strong> craie campanienne du Bassin de Paris, 130 p. édition du CNRS,<br />

Paris, 1970.<br />

[15] RAGUENEL A. (de). L'essai Lugeon, Bull, liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., numéro spécial N, Hydraulique<br />

des sols, avril 1970, p. 67-74.<br />

[16] TOMS, Chalk in cuttings and embankments, id. [9].<br />

[17] TOURENCQ C. et FOURMAINTRAUX D., Propagation des ondes et discontinuités des roches, Colloque<br />

.sur la fissuration, Soc. int. de méc. des roches, Nancy, 1970.<br />

[18] WAKELING, Foundations on chalk, id. [9].<br />

47


Texture et comportement<br />

des craies<br />

A. LE ROUX<br />

Docteur en géologie<br />

Département de géotechnique<br />

<strong>La</strong>boratoire central<br />

<strong>La</strong> minéralogie appuyée sur les rayons X apparaissait<br />

comme une méthode élégante, capable d'apporter<br />

aux mécaniciens des sols la réponse au comportement<br />

curieux de certains matériaux. Une mise au point [3]<br />

a montré l'intérêt de la connaissance de la minéralogie<br />

dans l'étude du comportement des sols, mais également<br />

ses limites. Aussi, l'étude des textures s'est-elle tout<br />

naturellement imposée d'autant qu'elle était rendue<br />

possible par l'apparition depuis quelques années du<br />

microscope électronique à balayage [1].<br />

Les craies qui sont étudiées ici confirment l'importance<br />

du rôle joué par la texture dans leur comportement.<br />

Minéralogiquement, les craies apparaissent comme<br />

constituées presque exclusivement de carbonate de<br />

calcium. (CaC0 3<br />

> 95 %), la fraction argileuse s'y<br />

trouve réduite à quelques pour-cent et a, comme<br />

nous le verrons, une action assez peu sensible sur le<br />

comportement.<br />

Nous avons étudié huit échantillons, cinq étant<br />

fournis par le <strong>La</strong>boratoire de Rouen et trois provenant<br />

de sondages effectués dans la région parisienne (qui<br />

font partie, comme les craies rouennaises, de la série<br />

terminale du Crétacé supérieur).<br />

Le tableau I donne la composition des craies de Rouen.<br />

Les proportions des différents minéraux argileux<br />

présents dans la partie insoluble ont été exprimées de<br />

façon semi-quantitative. Cependant, si on compare<br />

deux craies comme Pacy-sur-Eure et Belbeuf qui ont<br />

un pourcentage de CaC0 3<br />

voisin de 97 % nous pouvons<br />

faire certaines remarques.<br />

Dans le cas de la craie de Pacy-sur-Eure, la montmorillonite<br />

est affectée de deux croix sur un total de<br />

huit alors que la craie de Belbeuf en a deux sur un<br />

total de quatre. Il y aurait donc approximativement<br />

deux fois plus de montmorillonite dans la craie de<br />

Belbeuf que dans celle de Pacy-sur-Eure. Or, le<br />

comportement sur chantier de la craie de Belbeuf<br />

est en fait excellent alors que celui de la craie de<br />

Pacy-sur-Eure est un des plus mauvais. Cela indique<br />

que l'influence de la minéralogie du résidu est peu<br />

importante quant à la qualité de la craie et qu'il est<br />

possible de comparer les caractéristiques physiques et<br />

mécaniques des craies en connaissant un seul paramètre<br />

: la texture.<br />

Les différents essais mécaniques effectués sont en<br />

bon accord avec les observations de chantier, ce qui<br />

permet de classer les craies en trois groupes :<br />

— bonnes : Rouvray, Belbeuf, sondages A, B et C ;<br />

— mauvaises : Incarville ;<br />

—• très mauvaises : Sauqueville, Pacy-sur-Eure.<br />

Pacy-sur-<br />

Eure<br />

TABLEAU I<br />

Echantillon<br />

Position<br />

strati-<br />

CaCOa<br />

graphique<br />

(%)<br />

Santonien<br />

sup.<br />

Incarville Campanien<br />

inf.<br />

Sauqueville<br />

Rouvray<br />

Coniacien<br />

inf.<br />

Analyse du résidu insoluble<br />

à HC1<br />

M IM Q F A<br />

97,1 + + + + + + + +<br />

98,9 tr. + + + +<br />

98,4 + + + + +<br />

Coniacien<br />

moy. + +<br />

Belbeuf Turonien 96,9 + + + +<br />

+ +<br />

+ + + +<br />

M : montmorillonite tr. traces<br />

IM : illite muscovite + peu abondante<br />

Q : quartz<br />

+ + abondant<br />

F : feldspath + + + très abondant<br />

A : hydroxydes de fer<br />

49<br />

Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch. - Spécial V - Octobre 1973


Observations microscopiques<br />

Les différents échantillons ont été étudiés au microscope<br />

électronique à balayage. <strong>La</strong> métallisation<br />

indispensable à l'observation a nécessité, pour certains<br />

échantillons, une technique légèrement différente de<br />

celle utilisée habituellement. Préalablement à la<br />

métallisation or-palladium, l'échantillon a été recouvert<br />

d'un dépôt très mince de carbone par vaporisation<br />

sous vide. <strong>La</strong> membrane de carbone, sans doute plus<br />

élastique que le film d'or-palladium, nous a permis<br />

des observations confortables jusqu'à 50 000 de<br />

grossissement, sans voir les phénomènes de charges<br />

fréquents avec la seule métallisation or-palladium.<br />

Tous les échantillons se sont montrés constitués de<br />

grains de CaC0 3<br />

plus ou moins anguleux associés à<br />

des coccolithes intacts ou partiellement détruits ainsi<br />

qu'à d'autres espèces de fossiles 1 . Les cristaux constituant<br />

la roche ont une taille variable comprise entre<br />

0,5 et 2 microns. On peut observer également des<br />

cristaux de CaC0 3<br />

très bien formés, souvent groupés<br />

et de taille comprise entre 2 et 20 microns (fig. 1 et 2).<br />

Il est important de constater que dans tous les échantillons<br />

observés les « grains » de CaC0 3<br />

apparaissent<br />

1. Cf. l'article de M. Bignot et de Mlle Aubry : <strong>La</strong> Géologie de<br />

la craie du Bassin parisien.<br />

liés entre eux par des ponts de CaC0 3<br />

deux types<br />

d'image sont alors possibles :<br />

soit des cristaux bien formés liés entre eux par<br />

interpénétration (fig. 3 et 4) ;<br />

soit des cristaux ayant l'aspect de « bonbons<br />

sucés », la liaison se faisant alors par l'intermédiaire<br />

d'un pont de CaC0 3<br />

de 0,1 ou 0,2 micron (fig. 5 et 6).<br />

Ce dernier cas est le plus fréquent.<br />

L'origine de ces deux types de liaisons est sans doute<br />

différent [3], mais ils contribuent tous deux à donner<br />

à la craie une cohésion qui la distingue des matériaux<br />

rencontrés généralement par le mécanicien des sols.<br />

Plongée dans l'eau, la craie peut rester intacte pendant<br />

très longtemps : il faut pour la désagréger apporter<br />

une certaine énergie mécanique. Ainsi, les vibrations<br />

dues aux passages des engins de chantiers, en brisant<br />

les liaisons, la transforme plus ou moins rapidement<br />

en boue.<br />

Les liaisons entre cristaux présentés dans tous les<br />

matériaux étudiés sont plus abondantes dans les<br />

échantillons de Rouvray, Belbeuf et des sondages A,<br />

B et C, ce qui semble aller dans le même sens que les<br />

autres essais et expliquerait leur bon comportement sur<br />

chantier.<br />

Le tableau II donne quelques caractéristiques associées<br />

à l'estimation visuelle du nombre de liaisons.<br />

Fig. 1. Fig. 2.<br />

Les grands cristaux que nous montre la figure 1 se présentent dans le matériau comme une microgéode. Ce faciès est assez peu<br />

fréquent, plus souvent ce sont des cristaux isolés ou groupés en petit nombre qui apparaissent complètement enrobés dans la<br />

matrice constituée de débris de coccolithes et autres nannofossiles associés à de petits cristaux de CaCOs (fig. 2).<br />

50


Echantillon<br />

TABLEAU II<br />

V¡<br />

(m/s)<br />

R c<br />

(bar)<br />

Estimation visuelle<br />

du nombre de ponts<br />

Pacy-sur-Eure 2 110 21,6 +<br />

Incarville 2 140 19,7 +<br />

Sauqueville 1 960 13,4 +<br />

Rouvray 2 250 33,7 + +<br />

Belbeuf 2 650 91,7 + + +<br />

A 3 850 157 + + + +<br />

B 3 000 71,6 + + +<br />

C 76 + + +<br />

Ecuelles 4 000/4 500 500 très abondants et<br />

très visibles<br />

Remarque : L'échantillon provenant d'Ecuelles, qui<br />

doit être considéré comme un calcaire, est en quelque<br />

sorte un intermédiaire entre les craies et les calcaires<br />

francs. Les figures7, 8, 9 montrent un assemblage de<br />

grains (de 5 à 10 microns) assez semblable à celui des<br />

craies, dimension mise à part ; les cristaux de CaC0 3<br />

montrent de très fortes liaisons entre eux, ce qui<br />

explique les caractéristiques mécaniques relativement<br />

élevées du matériau.<br />

Le fait que la vitesse de propagation des ondes longitudinales<br />

soit plus élevée montre aussi que le nombre<br />

de liaisons entre grains est plus grand. Il en résulte<br />

d'ailleurs une porosité plus faible de telles craies, leur<br />

granulante étant sensiblement la même.<br />

Fig. 4. — Réplique obtenue par la méthode de la double empreinte et ombrée assez fortement ce qui<br />

contribue à donner l'impression de relief. On remarque dans le quart supérieur gauche de la photo<br />

une liaison par interpénétration. <strong>La</strong> réplique observée au microscope électronique à transmission est le<br />

complément de l'observation au microscope électronique à balayage.<br />

51


Fig. 5.<br />

Existence de liaisons par ponts associées à des cristaux<br />

arrondis à l'aspect de dragées. Le carbonate de calcium qui<br />

a donné naissance à ces ponts provient des grains voisins<br />

par dissolution ; la recristallisation s'étant faite aux points<br />

de contact entre grains. Ces liaisons suffisamment résistantes<br />

pour s'opposer à la désagrégation de la roche en présence<br />

d'eau sont assez fragiles pour se briser sous des sollicitations<br />

mécaniques (vibrations, etc.). Les petites taches circulaires de<br />

1 à 2/10 de micron que l'on voit sur les cristaux sont les<br />

traces de ces liaisons brisées lors de la préparation de<br />

l'échantillon.<br />

Fig. 6.<br />

Conclusion<br />

<strong>La</strong> faible importance de la phase argileuse dans les matériaux étudiés et la mise en évidence de liaisons<br />

entre cristaux montrent l'importance de la texture dans le comportement des matériaux en présence<br />

d'eau :<br />

— d'une part les cristaux restent accrochés les uns aux autres, ce qui empêche les craies de se<br />

désagréger. Cela reste valable même pour les plus « mauvaises », qui se comportent dans Veau<br />

comme des roches et non comme des sols au sens géotechnique du terme ;<br />

— d'autre part l'existence de liaison va dans le sens d'une amélioration des propriétés mécaniques.<br />

52


Fig. 9.<br />

Ce matériau est intermédiaire entre les craies et les calcaires. Nous voyons que les liaisons par ponts y sont beaucoup plus nombreuses<br />

que dans les figures précédentes et surtout que les ponts sont ici très bien fermés (fig. 9). Assez résistant pour donner au matériau des caractéristiques<br />

mécaniques convenables, ils apparaissent aussi beaucoup plus fragiles que les grains qu'ils soudent : lors d'une rupture, il est<br />

exceptionnel de briser un grain, la séparation se faisant au niveau des ponts. <strong>La</strong> figure 9 rend compte de cette fragilité relative.<br />

BIBLIOGRAPHIE<br />

[1] LE ROUX A., Le microscope électronique à balayage. Applications à l'étude des marnes, Bull,<br />

liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., 54, août-sept. 1971, p. 6-12.<br />

[2] LE Roux A., Caractéristiques mécaniques des roches argileuses en relation avec leur texture, Bull,<br />

liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., 61, sept.-oct. 1972, p. 155-178.<br />

[3] PILOT G., AMAR S. et LE Roux A., Relation entre la composition minéralogique et les caractéristiques<br />

mécaniques de quelques sols argileux français, Bull, liaison <strong>La</strong>bo. Routiers P. et Ch., 43, janv.-fév.<br />

1970, p. 69-80.<br />

53


<strong>La</strong> craie<br />

et les terrassements<br />

Séance sous la présidence de M. Brault,<br />

Ingénieur des Ponts et Chaussées,<br />

Arrondissement Etudes et Travaux neufs de Seine-Maritime.


Stabilité<br />

des remblais crayeux<br />

de grande hauteur<br />

A. de RAGUENEL<br />

Chef du groupe géotechnique<br />

<strong>La</strong>boratoire régional de Rouen<br />

introduction<br />

L'étude des remblais crayeux de grande hauteur a été abordée à l'occasion<br />

des désordres constatés sur le remblai crayeux du Val-Guy on<br />

sur l'autoroute A 13 à hauteur de la déviation de Bonnières.<br />

En 1969, D. Pasturel 1<br />

a présenté un historique de la construction de l'ouvrage et un inventaire<br />

chronologique des désordres constatés, que l'on peut résumer comme suit : ce remblai de 34 m de<br />

hauteur maximale et de 300 m de longueur, mis en service en août 1964, n'a présenté aucun signe<br />

apparent de faiblesse avant février 1966 ; des désordres sont alors apparus, en février 1966, mai<br />

1966, janvier-février 1967, avril 1968.<br />

Ces désordres se sont traduits par deux phénomènes :<br />

— des tassements atteignant 2 m d'amplitude dans la zone de remblai maximal ;<br />

— des fissures, le plus souvent longitudinales, affectant l'ensemble de la plate-forme, sauf au droit<br />

de la butée fournie par la « décharge sud ».<br />

En vue de définir les risques probables d'aggravation des désordres et les travaux confortatifs à<br />

entreprendre, une première reconnaissance a montré que :<br />

— les teneurs en eau étaient systématiquement très élevées (19 à 25 %), proches de la saturation,<br />

mais variaient peu dans le temps (relevé de profils neutroniques) ;<br />

— le remblai était sujet à des déformations faibles, mais désordonnées, sans que l'on puisse noter<br />

aucun plan de cisaillement au niveau de tubes témoins de déformation ;<br />

— la stabilité du remblai était limite, le coefficient de sécurité déterminé sommairement en partant<br />

de résultats d'essais pressiométriques étant compris entre 1 et 1,5.<br />

Il est surtout apparu en fait qu'il nous était impossible de déterminer, en interprétant ces quelques<br />

essais, d'une part, les causes des fissures, imputables soit à des glissements par cisaillement, soit à<br />

une consolidation, soit à un fluage, d'autre part, l'origine des tassements dus à l'existence de vides<br />

laissés lors de la construction ou à une modification de structure de la craie.<br />

Il a alors semblé indispensable, pour expliquer les phénomènes, de pousser les recherches sur les<br />

points suivants :<br />

— détermination précise des caractéristiques physiques et mécaniques des matériaux crayeux<br />

du remblai ;<br />

— étude de la craie ayant été utilisée pour l'édification de l'ouvrage ;<br />

— étude des possibilités de déformations résultant d'un processus strictement élastique.<br />

Ces différentes recherches, synthétisées dans le présent document, permettront de définir les causes<br />

probables des désordres constatés et d'envisager des recommandations pour l'exécution des remblais<br />

crayeux à venir.<br />

1. Désordres dans un grand remblai de craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., 36, janv.-fév. 1969, p. 119-134.<br />

57<br />

II. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch. - Spécial V - Octobre 1973


Rappel historique de la vie du remblai<br />

DESCRIPTION DE L'OUVRAGE<br />

L'autoroute A 13 franchit le Val-Guyon par un grand<br />

remblai de craie situé entre le passage inférieur de<br />

l'antenne de Bonnières et la butte de la Houssaye<br />

(fig. 1 à 5). Ses caractéristiques géométriques principales<br />

sont les suivantes :<br />

— longueur : 300 m,<br />

— hauteur maximale : 34 m,<br />

— pente du talus : 3/2,<br />

— largeur en tête : 34 m.<br />

L'édification du remblai a comporté la mise en œuvre<br />

des cubages suivants :<br />

— 20 000 m 3 de gros blocs de craie calcaire provenant<br />

du déblai à l'explosif de Bonnières ;<br />

— 183 000 m 3 de déblais crayeux à la décapeuse constitués<br />

par une craie relativement sèche et pulvérulente<br />

(H> < 19 %) provenant de la carrière située du côté<br />

de Paris, immédiatement au nord-est du passage inférieur<br />

de la bretelle de Bonnières ;<br />

<strong>La</strong> hauteur maximale de remblai atteinte à ce moment<br />

était d'environ une dizaine de mètres.<br />

— 305 000 m 3 de craie, provenant des déblais à la<br />

décapeuse de la butte de la Houssaye bordant à l'ouest<br />

le Val-Guyon, ont constitué le reste du remblai. Cette<br />

craie blanche, altérée et humide (w > 20 %), le plus<br />

souvent pâteuse, contenait quelques veines d'argile<br />

ocre.<br />

Le compactage était assuré par deux cylindres à pneus<br />

de 20 t et un cylindre de 50 t. <strong>La</strong> densité sèche obtenue<br />

était comprise entre 1,55 et 1,61 pour une teneur en<br />

eau très variable comprise approximativement entre<br />

16 et 22 %.<br />

Les travaux ont débuté en mai 1963 et se sont terminés<br />

en octobre 1963, après un mois d'août très pluvieux<br />

puisqu'il n'a comporté que quatre jours de travail.<br />

<strong>La</strong> construction des chaussées n'est intervenue qu'au<br />

printemps 1964, le remblai demeurant exposé aux intempéries<br />

sans protection particulière durant l'automne<br />

et l'hiver.<br />

Les chaussées sont constituées par :<br />

— 10 cm de couche drainante,<br />

— 30 à 60 cm de couche de fondation en grave non<br />

traitée,<br />

— 15 cm de couche de base non traitée en grave 0/30,<br />

— 8 cm de couche de liaison en enrobés denses 0/30<br />

traitée au bitume 80/220,<br />

— 3,5 cm de couche de roulement en béton bitumeux.<br />

Les accotements sud et nord étaient constitués par<br />

25 cm de grave naturelle dont les 10 cm supérieurs<br />

étaient sommairement traités au ciment.<br />

59


P18 P19 P 20 P21 P 22 P 23 P 2ü P25 P26 P 27 P28 P29 P30 P31<br />

Fig. 3. —<br />

Profil en long.<br />

partie en déblai vers Evreux.<br />

60


Un terre-plein central de 2 m de largeur supportait<br />

une végétation arbustive.<br />

Les eaux de ruissellement des chaussées et accotements<br />

étaient recueillies du côté sud de chaque chaussée par<br />

un collecteur enterré (400 mm de diamètre) en bordure<br />

du terre-plein central d'une part et sous l'accotement<br />

sud d'autre part (fig. 6). Ces collecteurs sont des<br />

canalisations en béton armé à joints de caoutchouc<br />

serrées au tirefort. Il convient de noter que les caniveaux<br />

qui conduisent les eaux de ruissellement jusqu'aux<br />

regards à grilles de ces collecteurs, situés tout<br />

les trente mètres, n'ont été exécutés que plusieurs mois<br />

après la mise en service de l'ouvrage qui est intervenue<br />

en août 1964.<br />

APPARITION DES DÉSORDRES<br />

TRAVAUX CONFORTATIFS<br />

Le relevé des fissures au 10 mai 1966 mettait en évidence<br />

de nouvelles fissures ou l'extension et le creusement<br />

des anciennes. Par contre, les broches ne dénotaient<br />

pas d'écartement.<br />

L'eau apparaissant comme la cause majeure de ces<br />

désordres, il fut décidé de recourir à un système de<br />

drains horizontaux. Celui-ci fut mis en place à l'automne<br />

1966 ainsi qu'un ensemble de tubes témoins<br />

verticaux de 15 à 20 m de profondeur destinés à permettre<br />

la surveillance des déformations éventuelles<br />

dans la masse du remblai.<br />

Ces tubes témoins sont des tubes en plastique de<br />

20/24 mm de diamètre. Pour la mesure, on fait descendre<br />

à l'intérieur du tube une tige métallique de<br />

diamètre légèrement inférieur (18 ou 14 mm) et de<br />

30 cm de longueur. Une légère déformation du tube<br />

empêche la tige de descendre plus profondément et<br />

indique donc le niveau à partir duquel le tube n'est<br />

plus vertical.<br />

Premiers désordres : février 1966<br />

Les premiers désordres sont apparus en février 1966<br />

sous la forme de fissures longitudinales peu ouvertes<br />

mais très étendues, réparties d'une extrémité à l'autre<br />

du remblai sur une longueur de 300 m environ. Le<br />

laboratoire de l'Ouest parisien, contacté à ce moment<br />

là, a effectué le relevé des fissures (fig. 7).<br />

En mars 1966 de nouvelles perturbations en surface,<br />

à l'aplomb du collecteur central, et des affaissements,<br />

autour des supports des glissières de sécurité, dénotant<br />

des infiltrations d'eau dans le terre-plein central et<br />

l'accotement sud, ont été observées.<br />

Les fissures furent colmatées superficiellement et des<br />

broches mises en place à 60 cm de part et d'autre<br />

pour surveiller leur écartement.<br />

5 S ici<br />

NORD "i<br />

2 V.<br />

—3,57.3,57. -Í 3sr 3,5 7. — r<br />

Echelle: V 600<br />

Fig. 6. — Profil type de la chaussée en remblai.<br />

Fig. 7. — Relevé des fissures.<br />

61


Fig. 8 et 9. — Désordres apparus en<br />

janvier 1967. Fissures sur la chaussée<br />

nord, de direction essentiellement longitudinale,<br />

dont l'ouverture peut atteindre<br />

2 à 3 cm. On ne note ici aucun<br />

rejet.<br />

Fig. 8.<br />

On a noté un léger débit sur certains drains hauts du<br />

versant sud, uniquement au moment de leur mise en<br />

place. Aucun débit n'a été signalé depuis.<br />

Le forage des drains (70 mm de diamètre), effectué en<br />

rotation et percussion à l'air comprimé, a également<br />

mis en évidence des zones très humides sur le versant<br />

sud, mais l'appréciation de cette humidité était purement<br />

qualitative :<br />

— pour la ligne des drains supérieurs située à 8 m sous<br />

la chaussée, ces zones sont situées à l'aplomb de l'accotement<br />

;<br />

— plus profondément, vers 20 à 25 m sous la chaussée,<br />

l'humidité est également très grande et à peu près constante<br />

depuis la surface du talus jusqu'au cœur du remblai.<br />

Ces observations laissent supposer que la perméabilité<br />

des accotements non traités, ainsi que la présence de<br />

collecteurs non étanches pourraient être, en grande<br />

partie, responsables des fortes teneurs en eau mesurées<br />

et, partant, des désordres observés.<br />

Deuxième vague de désordres : janvier 1967<br />

Des désordres plus graves furent observés à partir du<br />

10 janvier 1967 constitués par de nouvelles fissures,<br />

certaines pouvant présenter une ouverture de 3 cm<br />

et un rejet de 2 cm (fig. 8 à 13). Le relevé précis des<br />

fissures, effectué le 8 février 1967, est représenté sur<br />

la figure 14. Ces désordres succédaient à une période<br />

de précipitations, combinée avec une période de gel.<br />

Des infiltrations d'eau manifestes avaient lieu par le<br />

terre-plein central en bordure des chaussées et sous<br />

l'accotement sud (affaissements, entonnoirs autour<br />

des poteaux des glissières de sécurité, etc) (fig. 15 et 16).<br />

62


Fig. 10. — Janvier 1967, fissure longitudinale entre la chaussée et<br />

l'accotement côté nord.<br />

Fig. 11. — Janvier 1967, réparation des fissures sur la chaussée nord<br />

par simple remplissage superficiel avec un mortier bitumineux.


Fig. 16. — Janvier 1967, affaissement du terre-plein central.<br />

Fig. 17. — Janvier 1967, chaussée nord, ouverture d'une tranchée<br />

à l'aplomb d'une fissure.<br />

Des tranchées furent exécutées à l'endroit des fissures<br />

(fig. 17) et mirent en évidence une ouverture continue<br />

de 3 à 5 cm de largeur, apparemment très profonde<br />

(plus de 2 m). Les lèvres en craie de la fissures étaient<br />

relativement sèches (fig. 18). Toutes les fissures ainsi<br />

mises à jour furent colmatées manuellement à l'aide<br />

d'un mortier et ne se sont plus manifestées depuis.<br />

Des essais d'étanchéité par mise en charge de certains<br />

tronçons des collecteurs centraux et sud indiquèrent<br />

une étanchéité très imparfaite, source probable d'entrée<br />

d'eau dans le remblai. Dans le courant de l'année<br />

1967, on continuait à observer de lents affaissements<br />

en rigoles, de part et d'autre des fissures indiquant<br />

un mouvement descendant des matériaux du corps<br />

de chaussée dans les fissures ouvertes non colmatées.<br />

A la suite des premières investigations et du rôle<br />

semble-t-il important joué par les venues d'eau, un<br />

certain nombre de travaux confortatifs ont été réalisés<br />

en partant des principes suivants :<br />

1. Protection aussi poussée que possible de venues<br />

d'eau éventuelles dans le remblai. Il a été effectué à<br />

cet effet :<br />

— la mise hors service de collecteurs centraux et sud<br />

remplacés par une gouttière, à ciel ouvert, en béton<br />

bitumeux canalisant les eaux vers l'aval de l'ouvrage<br />

et jusqu'au pied du talus,<br />

— le revêtement imperméable des accotements nord<br />

et sud,<br />

— la réduction de la largeur du terre-plein central,<br />

sur lequel une certaine végétation a pu être maintenue<br />

et une protection plus efficace de ses bords contre les<br />

eaux de ruissellement.<br />

2. Reconstitution des propriétés mécaniques de la<br />

partie supérieure du remblai et colmatage des vides<br />

existants au moyen d'injections de mortiers, de ciment<br />

et de sable fin. Ces injections ont été faites de part et<br />

d'autre des fissures depuis 5 m de profondeur en remontant<br />

jusqu'à 1,50 m. <strong>La</strong> pression d'injection était<br />

pratiquement nulle et atteignait très rarement la pression<br />

maximale qui avait été fixée à 2 bars.<br />

Les quantités injectées ont été très importantes, particulièrement<br />

au voisinage des grandes fissures ou des<br />

zones d'affaissement. On a observé certaines résurgences<br />

à la surface par les fissuresainsi que sur presque<br />

tous les drains de la ligne supérieure située pourtant<br />

à plus de 7,50 m sous la chaussée. Ces observations<br />

dénotent particulièrement bien le mauvais état de la<br />

partie supérieure du remblai.<br />

Toutes les fissures de la chaussée sud (province-Paris)<br />

ont été ainsi traitées, de même que la moitié ouest de<br />

la chaussée nord (Paris-province), mais d'une manière<br />

moins intense.<br />

65


Fig. 18. — Vue détaillée des fissures au fond de la tranchée. <strong>La</strong> profondeur de ces fissuresatteint au moins 2 m<br />

et leur largeur 3 à 5 cm. Les lèvres en craie des fissures étaient relativement sèches.<br />

Nouveaux désordres : avril 1968<br />

De nouvelles fissures analogues aux précédentes sont<br />

apparues en avril 1968 dans la partie non traitée et<br />

partiellement traitée de la chaussée nord.<br />

<strong>La</strong> chaussée sud qui avait été complètement traitée<br />

n'a absolument pas bougé.<br />

Des tranchées ont été ouvertes au droit des fissures<br />

principales afin de les reboucher manuellement avec<br />

un mortier de ciment. Elles ont donné lieu à des observations<br />

semblables à celles de 1967.<br />

Les observations poursuivies après la pose d'un nouveau<br />

tapis d'enrobés ont montré que, bien que les<br />

tassements se poursuivent à raison de 10 cm par an en<br />

moyenne, aucune nouvelle fissure n'est apparue.<br />

En résumé, il convient de souligner les comportements<br />

suivants :<br />

— les premières fissures ne sont apparues que 18 mois<br />

après la mise en service de l'autoroute ; c'est dans la<br />

zone de hauteur maximale qu'elles furent les plus importantes<br />

;<br />

— ces fissures largement ouvertes, 3 à 5 cm, n'ont<br />

jamais présenté de forts rejets ; ceux-ci étaient le plus<br />

souvent imperceptibles ;<br />

— l'injection des 5 m supérieurs du remblai, bien que<br />

l'ensemble du remblai continue à se tasser de quelque<br />

10 cm par an, a neutralisé la formation de fissures ;<br />

— sur la portion de chaussée sud (province-Paris)<br />

butée par une importante décharge, aucune fissure<br />

ne s'est jamais manifestée alors que les tassements ont<br />

été du même ordre de grandeur que sur la chaussée<br />

nord parallèle ;<br />

— les tassements cumulés auraient atteint actuellement<br />

quelque deux mètres au maximum d'amplitude, de<br />

façon relativement régulière à raison de 10 à 20 cm<br />

par an, sauf au début de la vie du remblai où ils n'ont<br />

pas été suivis et où l'on ignore leur amplitude.<br />

66


Etude des caractéristiques physiques et mécaniques<br />

Cette étude a été menée en partant d'une part d'échantillons<br />

de craie prélevés sur les lieux d'emprunt et<br />

d'échantillons intacts prélevés directement dans le<br />

remblai au moyen du carottier battu à parois minces<br />

(diamètre 78 ou 100 mm) ; le pourcentage de carottes<br />

fut le plus souvent de 100 %.<br />

de la craie de remblai<br />

IDENTIFICATION<br />

<strong>La</strong> craie d'emprunt du déblai de la Houssaye est une<br />

craie blanche à silex du Sénonien supérieur. Cette<br />

craie plus ou moins altérée est humide, légèrement<br />

pâteuse et contient de nombreuses veines d'argile<br />

ocre.<br />

Elle présente les caractéristiques suivantes :<br />

— teneur en eau naturelle :19 < w„ < 24 %<br />

(moyenne 21,8 %)<br />

— limites d'Atterberg : 21 < w L<br />

< 29<br />

16 < w P<br />

< 21<br />

5 < I P<br />

< 11<br />

— densité des blocs : 1,36 < yd < 1,77<br />

(moyenne 1,61)<br />

— résistance<br />

à la compression<br />

des blocs<br />

Granulométrie<br />

à teneur en eau naturelle<br />

21,6 < Rc < 29,6 bars<br />

échantillon séché<br />

63,4 < Rc < 79,6 bars<br />

Les granulométries effectuées à l'alcool, pour éviter<br />

le délitage de la craie, sur le matériau prélevé à différentes<br />

profondeurs du remblai se situent dans le fuseau<br />

de la figure 19. Si l'on fait abstraction de la proportion<br />

d'éléments supérieurs à 20 mm constitués essentiellement<br />

par des silex, les courbes ont des formes identiques<br />

indépendantes de la profondeur. Il convient de<br />

noter le pourcentage important des fines (éléments<br />

plus petits que 0,08 mm), soit 58 % en moyenne.<br />

Ce fait est à comparer à la courbe granulométrique<br />

de la fraction 0/20 de la craie brute, extraite à la pelle<br />

dans le déblai et son évolution, sous l'effet d'un compactage<br />

au Proctor normal (fig. 19).<br />

On constate que même sous une énergie de choc importante,<br />

on provoque essentiellement une diminution<br />

de la taille des blocs de craie sans que l'on note pour<br />

autant une augmentation sensible des fines dont la<br />

proportion reste voisine de 15 %.<br />

0,5 , 0,2 0,1 S0(j 20(j lOp 5)J 2p<br />

Fuseau granulométrique de la craie prélevée<br />

dans le remblai<br />

Evolution de la granulométrie au compactage<br />

sur la craie du déblai<br />

Fig. 19.<br />

Il semble donc que, au cœur du remblai, on ait eu dans<br />

le temps une production importante de fines, difficilement<br />

explicable à la mise en œuvre.<br />

Densité des blocs - Densité de la niasse du remblai<br />

Des mesures de densité ont été effectuées sur la carotte<br />

entière (nous les appellerons « densités globales »),<br />

et sur les blocs restant intacts dans la carotte.<br />

Les deux histogrammes (fig. 20 et 21) montrent d'une<br />

part une très grande dispersion des résultats obtenus<br />

à différents niveaux ; d'autre part, que la densité<br />

moyenne des blocs ne diffère pas sensiblement de la<br />

densité globale mesurée sur carotte.<br />

Cependant, si l'on effectue des moyennes pour différentes<br />

tranches de profondeur, on obtient les valeurs<br />

suivantes (tableau I) :<br />

Profondeur<br />

(m)<br />

Densité des<br />

blocs<br />

(moyenne)<br />

TABLEAU I<br />

Densité<br />

globale<br />

(moyenne)<br />

Teneur en eau<br />

globale<br />

(%)<br />

1 à 6 1,63 1,62 22,6 < w < 26,7<br />

7 à 17 1,68 1,68 10 < w < 24<br />

17 à 25 1,73 1,72 17,4 < w < 21,5<br />

On note une augmentation de la densité moyenne des<br />

blocs en profondeur avec correspondance de la densité<br />

moyenne globale. Cette évolution peut provenir, soit<br />

67


Nombre de mesures<br />

Nombre de mesures<br />

Densités globales<br />

Yd moyen = 1,69<br />

1,52


5 < Pi < 25 bars (moyenne 13)<br />

2,7 < P f<br />

< 15 bars (moyenne 8,5)<br />

25 < E < 240 bars (moyenne 132).<br />

Nombre de mesures<br />

Les rapports — sont le plus souvent égaux à 10 et<br />

Pi<br />

les pressions de fluage P f<br />

sont systématiquement sup<br />

périeures à — ; on en déduit que la craie présente une<br />

2<br />

structure relativement rigide et assez peu plastique.<br />

14 16 18 20 22 24 26 (bar)<br />

Fig. 23. — Histogramme des valeurs des pressions limites (Pî)<br />

dans le remblai.<br />

On note peu d'amélioration avec la profondeur, sauf<br />

dans le substratum où la craie présente des caractéristiques<br />

nettement meilleures.<br />

P, = 28 à 50 bars<br />

E = 280 à 530 bars<br />

<strong>La</strong> variation du coefficient de sécurité F =— (la<br />

H c<br />

hauteur critique H c<br />

étant définie par la méthode de<br />

Tailor), en fonction des couples de valeurs C et


Résistance au cisaillement<br />

Les caractéristiques obtenues dans les essais de cisaillement<br />

au triaxial ont conduit aux résultats suivants :<br />

Essais triaxiaux drainés (fig. 25)<br />

éprouvettes compactées | 31,5 < D.<br />

L'étude des cercles de glissement montre (fig. 26) :<br />

1. que les cercles de glissement les plus probables sont<br />

des cercles quasi superficiels qui intéressent essentiellement<br />

les talus entre le pied et le voisinage de la crête ;<br />

2. vis-à-vis de tels glissements, le coefficient de sécurité<br />

n'est jamais inférieur à 1, mais il est parfois très<br />

faible (cas d'une hauteur de remblai de 34 m) (tableau<br />

ii);<br />

»0.<br />

• 0.<br />

70<br />

M<br />

0 10 JO 30 40 50 «0 70 X(m)<br />

* 1,4 55<br />

i,40z/ / ' / /><br />

( \\<br />

50 U3°8 \ V329<br />

40<br />

30<br />

20.<br />

10<br />


3. l'augmentation du facteur de sécurité résultant<br />

d'une augmentation de


plus faibles lors de l'application de la contrainte supérieure<br />

que lors de la contrainte immédiatement<br />

avec h : demi-hauteur de l'éprouvette<br />

t l00<br />

: temps consolidation terminée<br />

inférieure.<br />

a :4<br />

nh 2 faible résistance à la compression des blocs humides<br />

Ce fait incite à penser que le remblai crayeux du Val-<br />

0,17-10" 2 < C v<br />

< 4,3-10" 2 cm 2 /s suivant les échantillons.<br />

Guyon n'a pas un comportement plastique et que l'on<br />

aurait des réarrangements successifs de grains, correspondant<br />

à des états d'équilibre limite successifs Si l'on tente d'évaluer le délai de consolidation totale<br />

entre lesquels on retrouve à nouveau un état d'équilibre<br />

surabondant.<br />

propre poids, en admettant une possibilité de drainage<br />

du remblai supposé saturé et soumis à l'action de son<br />

radial, on obtient :<br />

Compressibilité du remblai<br />

_ nh 2<br />

1<br />

'100 — ~ ~<br />

Les courbes de consolidation hydrostatique des éprouvettes<br />

soumises aux essais triaxiaux avec préconsoli­<br />

4C„<br />

dation et les mesures de compressibilité sur des éprouvettes<br />

soumises, dans une cellule triaxiale, à une pression<br />

hydrostatique croissant par paliers, nous ont permis<br />

d'apprécier la compressibilité du remblai.<br />

Le module E déduit des essais précédents en supposant<br />

h x 17 m : 1/2 hauteur du remblai<br />

R « 50 m (tenant compte de la longueur du remblai)<br />

C v<br />

= 10" 2 cm 2 /s<br />

le coefficient de Poisson v = 0,33 prend les valeurs<br />

suivantes :<br />

E (bar)<br />

0-3 (bar)<br />

= 910 jours = 2,5 années<br />

11<br />

100 à 250 0,5 à 2<br />

200 à 350<br />

2k 4<br />

Ce calcul très sommaire fournit un ordre de grandeur<br />

300 à 500<br />

4 à 10<br />

vraisemblablement maximal du temps de tassement<br />

compte tenu de la perméabilité des fissuresdu remblai<br />

et du fait qu'il n'était certainement pas saturé après<br />

Un calcul sommaire permet d'évaluer un ordre de compactage.<br />

grandeur du tassement possible du remblai du Val-<br />

Guyon d'une hauteur de 34 m en prenant une pression<br />

de précompactage c' c<br />

= 1 bar et un y n<br />

de 2 t/m 3 .<br />

Les tassements observés à partir de 1967 ne sont donc<br />

pas imputables au phénomène de consolidation, ce<br />

d'autant plus que les 10 cm de tassements observés<br />

On obtient avec ces hypothèses, apparemment pessimistes,<br />

un tassement total de 55 cm. Or, d'une part ce compte tenu de l'évolution logarithmique du phéno­<br />

en 5 mois au cours de 1968 conduiraient à admettre,<br />

tassement est inférieur au tassement total observé, mène en fonction du temps, que les tassement antérieurs<br />

auraient atteint plusieurs mètres.<br />

d'autre part s'il s'est réellement produit, il n'a pu se<br />

faire que dans les premières années de vie du remblai,<br />

compte tenu de la perméabilité du massif crayeux.<br />

En effet, la vitesse de stabilisation des tassements<br />

dépend essentiellement de la vitesse de dissipation<br />

de la pression interstitielle, c'est-à-dire des propriétés<br />

de consolidation du sol.<br />

En conclusion, on retiendra :<br />

— que les fissureslongitudinales au centre du remblai<br />

ne peuvent être dues à un phénomène de rupture<br />

circulaire ;<br />

— que les simples phénomènes de consolidation ne<br />

peuvent expliquer les tassements observés ;<br />

— que le remblai est proche de la saturation et que<br />

On a : C„ =<br />

les variations de teneurs en eau dans le cœur du<br />

m 0<br />

-y w<br />

remblai n'existent pas ;<br />

C v<br />

: coefficient de consolidation<br />

m v<br />

: coefficient de compressibilité volumétnque<br />

— que la densité des blocs de craie qui subsistent<br />

dans le remblai est en moyenne nettement supérieure<br />

à la densité des blocs de craie à l'extraction.<br />

si<br />

-7 1 1<br />

k = 7-10 cm/s, m„ = — = — bar<br />

<strong>La</strong> seule explication qui apparaît alors comme plausible<br />

est d'attribuer l'origine des fissuresau développe­<br />

E 100<br />

C v<br />

= 0,07 cm 2 /s<br />

ment de fissures de traction et le tassement à une<br />

densification du remblai par désagrégation progressive<br />

sous l'effet statique du poids du remblai et peut-être<br />

ou encore en exploitant les courbes de consolidation : des vibrations dues aux véhicules, des blocs de craie<br />

de faible densité, ce qui semble compatible avec la<br />

a t 100<br />

et à la proportion anormale de fines dans le remblai.<br />

72


Etude théorique<br />

des déformations élastiques du remblai<br />

Le but de l'étude était de calculer le remblai par la<br />

méthode des éléments finis, dans un schéma élastique<br />

parfait. <strong>La</strong> connaissance du champ de contraintes et<br />

de déformations nous permettant de comprendre la<br />

formation des fissures et les tassements enregistrés.<br />

On a supposé, dans le calcul, le milieu crayeux du<br />

remblai élastique, homogène et isotrope de caractétiques<br />

E, v.<br />

i ÛH<br />

Icm)<br />

INFLUENCE DU COEFFICIENT DE POISSON<br />

Nous avons fait les hypothèses de calcul suivantes :<br />

Remblai<br />

hauteur 34 m<br />

chaussée 34 m<br />

pente 3/2<br />

C = 0,05 bar<br />


Contraintes<br />

Tractionlbarl<br />

L'élargissement de la chaussée obtenu précédemment<br />

pour v > 0,385 coïncide avec l'apparition d'une<br />

contrainte horizontale de traction dans la partie<br />

supérieure du remblai, et maximale au centre du<br />

remblai (fig. 32).<br />

Pour v = 0,4 on observe une traction horizontale<br />

pour un seul élément au centre de la chaussée ; puis<br />

quand v croît la zone de traction s'étale horizontalement<br />

pour atteindre pour v = 0,44 tout le sommet<br />

du remblai sur une couche du découpage soit sur<br />

une épaisseur de 3,8 m environ et pour v = 0,49<br />

l'épaisseur de la couche supérieure du remblai en<br />

traction atteint 7,6 m.<br />

Zones de plasticité<br />

En comparant en chaque point le rapport<br />

Compression (bar)<br />

,ygQ,« ^<br />

Traction sur 5 à 7 m<br />

de profondeur<br />

V2 largeur du remblai<br />

(m|<br />

-!^v=0 4 Valeur probable<br />

à la construction '<br />

Fig. 32. — Valeur des efforts de traction en différents points delà<br />

demi-plateforme du remblai pour différentes valeurs du coefficient<br />

de Poisson.<br />

avec le coefficient de butée<br />

o- 2<br />

+ C/tg K P<br />

.<br />

Les figures 33, 34 et 35 montrent les valeurs de ce<br />

rapport calculées pour des coefficients de Poisson<br />

= 0,25, 0,38 et 0,49, dans l'hypothèse où E = 100<br />

bars, yh = 2 t/m 3 , C„ = 0,05 bar et q> = 32°.<br />

On constate que si v est faible (fig. 33) la zone de<br />

plasticité définie quand RAP > 3,25 atteint pratiquement<br />

toute la base du remblai ; pour v = 0,38 la<br />

zone de plasticité se développe au centre du remblai<br />

et sur ses bords ; quand v croît, elle gagne la partie<br />

supérieure du remblai et le coin inférieur (fig. 35).<br />

Fig. 33. — v = 0,25.<br />

74


Fig. 34. — 0,38. Apparition des zones de plasticité (en couleur)<br />

pour un rapport limite > 3,25 suivant<br />

les différentes valeurs du coefficient de<br />

Poisson.<br />

Fig. 35. — v = 0,499.<br />

75


APPLICATION AU REMBLAI DU VAL-GUYON<br />

E(bar)<br />

Valeurs à prendre en compte pour le remblai<br />

Module élastique du remblai<br />

— module d'Young calculé en partant du module<br />

œdométrique : 200 < E < 280 bars ;<br />

— module obtenu par essai de plaque : 198 < E < 593<br />

bars ;<br />

— module pressiométrique : 74 < E < 195 bars ;<br />

— module de compression simple : 40 < E < 150 bars.<br />

ISO.<br />

ÎOO<br />

Si l'on suppose le matériau du remblai homogène<br />

et isotrope, il nous semble plausible de prendre en<br />

compte un module élastique E = 200 bars.<br />

Coefficient de Poisson<br />

On peut penser que le coefficient de Poisson dans le<br />

remblai était inférieur à 0,40 lors de la construction<br />

de celui-ci. Il semble très probable par ailleurs qu'un<br />

apport d'eau dans le remblai et que les processus de<br />

consolidation et de densification dans le temps aient<br />

provoqué une augmentation de v qui aurait pu atteindre<br />

0,499 lors de mise en charges temporaires de<br />

l'eau interstitielle.<br />

Nous supposerons donc de telles variations du coefficient<br />

de Poisson qu'une étude ultérieure devrait<br />

permettre de confirmer.<br />

Conséquences des variations du coefficient de Poisson<br />

Tassement (fig. 36)<br />

Pour v = 0,42 et E = 200 bars, le tassement élastique<br />

obtenu en fin de construction serait de 30,25 cm. Pour<br />

expliquer le tassement d'environ 2 m constaté, il<br />

faudrait que le module du remblai soit descendu à<br />

30 bars.<br />

Cela semble incompatible avec la réalité et le tassement<br />

ne peut s'expliquer de façon élastique.<br />

Fissuration<br />

Si l'on suppose pour E = 200 bars que v passe de<br />

0,40 à 0,499, on aurait un élargissement de la plateforme<br />

de 9,5 cm, une zone en traction correspondant<br />

à la partie supérieure de la plate-forme et sur 5 à 7 m<br />

de profondeur. Les efforts de traction, maximaux au<br />

centre du remblai, décroissent en profondeur et sur<br />

les bords de remblai.<br />

De telles contraintes doivent conduire, compte tenu<br />

de la faible résistance à la traction de la craie, à l'apparition<br />

de fissures longitudinales maximales au centre<br />

du remblai et donc sensiblement analogues à celles<br />

observées dans la réalité.<br />

Fig. 36. — Tassement central élastique de la chaussée en fonction<br />

de la variation de E.<br />

Zones de plasticité<br />

Une zone importante du remblai a atteint l'équilibre<br />

limite (fig. 35), mais il est impossible de dire si cette<br />

zone plastique va entraîner de grandes déformations.<br />

Le calcul purement élastique ne nous permet pas de<br />

voir les répartitions de contraintes résultant d'une<br />

loi de déformation élastoplastique.<br />

ESSAI D'EXPLICATION DES DÉSORDRES<br />

DU VAL-GUYON<br />

Tassement<br />

Le tassement semble assez complexe et imputable<br />

en partie à différents phénomènes :<br />

— tassement dû à la consolidation et tassement<br />

élastique qui n'ont pu se produire que relativement<br />

rapidement (1 à 2 ans) et pour une valeur totale<br />

certainement inférieure à 60 cm ;<br />

— tassement différé dû soit à une mise en plasticité<br />

du remblai (nuage) et difficile à préciser, soit plus<br />

probablement à une densification du remblai à la<br />

suite d'une modification de structure de la craie par<br />

destruction des blocs crayeux de faible densité et<br />

augmentation corrélative de la densité globale du<br />

remblai sous l'effet de son propre poids. On constate<br />

en effet une augmentation sensible de la densité optimale<br />

de compactage à la suite de compactages répétés<br />

détruisant les blocs. Or, une augmentation de densité<br />

de 1,6 à 1,7 conduirait à un tassement de 2 m et ce,<br />

de façon progressive comme il a été constaté.<br />

76


1<br />

Fissuration<br />

L'action combinée du tassement et de l'apport d'eau<br />

conduisant à une saturation du massif crayeux et à<br />

des mises en charge de l'eau interstitielle même de<br />

façon temporaire entraînerait une augmentation du<br />

coefficient de Poisson, favorisant le développement<br />

de fissures de traction longitudinales.<br />

Cette interprétation se voit confirmée par trois faits<br />

principaux :<br />

— l'apparition des fissures seulement 18 mois après<br />

la mise en service,<br />

— l'injection des cinq mètres supérieurs du remblai<br />

a neutralisé les fissures,<br />

— aucune fissure n'a été observée sur la partie de<br />

chaussée sud, butée par une importante décharge<br />

modifiant totalement le schéma de contraintes précédemment<br />

défini.<br />

Recommandations<br />

pour la construction des remblais crayeux<br />

INFLUENCE DE LA PENTE ET DE LA<br />

HAUTEUR DU REMBLAI<br />

Les calculs ont été faits avec les hypothèses suivantes :<br />

E = 100 bars<br />

• v = 0,42<br />

. 1H = 2 t/m 3<br />

C = 0,05 bar<br />

q> = variable<br />

pente de talus 2/1 et 3/2<br />

On a fait les observations suivantes :<br />

1. le tassement AH au centre de la chaussée est proportionnel<br />

à la hauteur et peu influencé par la pente<br />

de talus (fig. 37) ;<br />

2. l'élargissement — de la demi-plate-forme négli-<br />

2<br />

geable pour les remblais de faible hauteur atteint un<br />

maximum pour les remblais d'une vingtaine de mètres<br />

et est peu influencé par la pente de talus (fig. 38) ;<br />

3. les contraintes de traction maximales sous la chaussée<br />

n'apparaissent que pour des remblais supérieurs<br />

à 10 m de hauteur et deviennent très importantes pour<br />

77


des remblais de 20 à 30 m de hauteur ; la pente de<br />

talus influence peu la valeur de ces contraintes (fig. 39) ;<br />

4. l'angle de frottement minimal, pour éviter dans<br />

le remblai le développement de zones de plasticité,<br />

est fonction d'une part de la hauteur, d'autre part,<br />

et ce de façon importante, de la pente de talus.<br />

INFLUENCE DES CONDITIONS DE MISE<br />

EN ŒUVRE<br />

c„<br />

X<br />

\30-35° ^<br />

1 i i \ 0".<br />

<strong>La</strong> figure 40 montre les valeurs de R c<br />

obtenues en<br />

fonction du couple ya, w, résultat d'une intensité de<br />

compactage donnée. Elle permet d'avancer quelques<br />

conseils sur le compactage de la craie et son utilisation.<br />

<strong>La</strong> résistance à la compression R c<br />

nous permet de<br />

calculer la cohésion C„ = — et de définir un critère<br />

2<br />

de stabilité à court terme. Si l'on adopte pour un<br />

échantillon du remblai un coeflicient des terres au<br />

repos de 0,6 on devra avoir, pour qu'il y ait équilibre :<br />

o-i-o-3 <<br />

R c<br />

a, = 0,6 o-, d'où o\


RECOMMANDATIONS<br />

Il convient de distinguer les bonnes craies ne demandant<br />

a priori aucune précaution particulière hormis<br />

les règles habituelles de bonne mise en œuvre, des<br />

craies douteuses ou mauvaises que l'on peut caractériser<br />

par les paramètres suivants :<br />

— densité sèche (yd) < 1,7,<br />

— résistance à la compression (R c<br />

) < 50 bars (humide),<br />

— vitesse longitudinale (V,) < 2 200 m/s,<br />

— teneur en eau naturelle (w„) > 20 %.<br />

Ces craies rencontrées le plus souvent avec de fortes<br />

teneurs en eau naturelle seront :<br />

— difficiles à mettre en œuvre,<br />

— réduites facilement en pâte molle,<br />

— sujettes au phénomène de « densification » par<br />

destruction dans le temps des éléments blocs,<br />

— une fois réduites en poudre auront des angles de<br />

frottement faibles.<br />

Remblai de faible hauteur : 0 à 5 m<br />

<strong>La</strong> stabilité d'un tel remblai nécessitera une résistance<br />

à la compression supérieure à 0,5 bar, ce qui est<br />

facilement obtenu, même avec une forte teneur en<br />

eau et un compactage faible ; les contraintes faibles<br />

au cœur d'un tel remblai n'entraîneront que peu de<br />

densification et pas de contraintes de traction.<br />

Les critères de mise en œuvre seront donc prépondérants<br />

sur les problèmes de stabilité. Les problèmes de<br />

mise en œuvre se poseront si les teneurs en eau sont<br />

fortes (elles étaient supérieures à 20 % dans le cas<br />

de la craie du Val-Guyon) ; on aura alors intérêt,<br />

pour faciliter cette mise en œuvre, à limiter au maximum<br />

le fractionnement des blocs et à éviter un surcompactage.<br />

<strong>La</strong> densité du remblai sera faible, mais<br />

la mise en œuvre possible, en l'absence du phénomène<br />

dit du « coussin de caoutchouc ».<br />

Remblai de hauteur moyenne : 5 à 12 m<br />

On devra avoir une résistance à la compression comprise<br />

entre 1 et 2 bars et la teneur en eau de mise en<br />

œuvre devra être inférieure à 20 % si l'on développe<br />

une énergie correspondant au Proctor normal. Un<br />

compactage plus poussé ne sera pas nocif, au contraire,<br />

le fractionnement des blocs évitant les risques de<br />

densification éventuels.<br />

On ne devrait pas rencontrer dans ces conditions de<br />

problèmes de stabilité et de fissurations.<br />

Remblai de grande hauteur : 15 m et plus<br />

Ces remblais devront être étudiés et réalisés comme<br />

des ouvrages d'art. Il convient en effet de déterminer,<br />

en fonction de la géométrie du remblai et des contraintes<br />

qui s'y développent, quelles sont les caractéristiques<br />

minimales tolerables.<br />

Nous avons vu que dans le cas du remblai plan du<br />

Val-Guyon de 34 m de hauteur, ces conditions auraient<br />

été les suivantes :<br />

— R c<br />

> 3 ce qui nécessite une teneur en eau de mise<br />

en œuvre inférieure à 19 % et une intensité de compactage<br />

supérieure à l'OPN évitant ainsi les densités<br />

inférieures à 1,65 ;<br />

— angle cp > 34° pour une pente de 2/1 ou (p > 38°<br />

pour une pente de 3/2 ;<br />

— un fractionnement poussé à l'extraction et à la<br />

mise en œuvre de façon à désagréger les blocs les plus<br />

tendres et à éviter ainsi les phénomènes de densification<br />

ultérieurs ;<br />

— éviter toute entrée d'eau dans le remblai en cours<br />

et après la construction, en excluant tout collecteur<br />

dans le terre-plein central et en effectuant une imperméabilisation<br />

totale de la plate-forme.<br />

A priori, l'ensemble de ces conditions était irréalisable,<br />

la teneur en eau à l'extraction étant trop forte et le<br />

fractionnement intense étant peu conciliable avec un<br />

angle de frottement élevé : les désordres observés<br />

étaient donc prévisibles.<br />

Conclusion<br />

L'étude du remblai du Val-Guyon nous a permis de mettre en lumière les causes des désordres susceptibles<br />

de se produire sur les remblais crayeux de grande hauteur en « mauvaise craie ».<br />

L'ensemble des phénomènes résulte de la conjonction d'une craie de faible densité (donc de faible<br />

résistance, facilement transformable en pâte de façon statique) et d'une forte teneur en eau à la<br />

mise en œuvre ou introduite ultérieurement dans la vie du remblai.<br />

Trois processus semblent primordiaux :<br />

— une densification de la masse du remblai par désagrégation des blocs les plus tendres entraînant<br />

une consolidation lente et régulière, donc des tassements importants ;<br />

79


— le développement de fissures de traction résultant d'un processus élastique permettant le développement<br />

de contraintes de traction liées à une variation du coefficient de Poisson probablement<br />

résultant de mises en charge même partielles et temporaires de Veau interstitielle ;<br />

— la mise en plasticité de zones importantes pouvant conduire à des phénomènes de fluage<br />

assez complexes.<br />

Les grands remblais crayeux en mauvaise craie sont donc à étudier et à réaliser comme des ouvrages<br />

d'art ; les conséquences des désordres apparaîtront comme d'autant plus graves que le remblai<br />

sera dissymétrique et d'épaisseur variable en profil en travers.<br />

Cet article s'appuie sur les travaux de MM. Guerpillon, Pasturel, Puig et de Raguenel effectués au<br />

<strong>La</strong>boratoire de Rouen et exprimés dans des documents internes.


Problèmes de terrassement<br />

dans la craie<br />

J. PUIG<br />

Assistant<br />

<strong>La</strong>boratoire régional de Rouen<br />

introduction<br />

et en<br />

Picardie.<br />

Dans le cadre des grands programmes d'aménagement en cours, les<br />

travaux de terrassement intéressent de plus en plus fréquemment le<br />

substratum crayeux du Bassin parisien, particulièrement en Normandie<br />

Il s'agit essentiellement de déblais et remblais autoroutiers, d'emprunts destinés au remblaiement,<br />

de tracés d'autoroute ou de zones industrielles par exemple.<br />

Les volumes mis en œuvre atteignent ou dépassent fréquemment un million de mètres cubes.<br />

Or, ces dernières années, certains chantiers de cet ordre ont posé des problèmes importants de circulation<br />

d'engins, de réemploi et de compactage, de tassement et de stabilité dans le cas de grands<br />

remblais.<br />

En fait, le laboratoire s'avérait assez démuni en ce qui concerne l'étude préalable de ces problèmes.<br />

<strong>La</strong> craie se comporte, en effet, tantôt comme une roche, tantôt comme un sol, et l'on utilisait indifféremment,<br />

sans beaucoup de succès, les types d'essais adaptés à l'un ou l'autre état (granulométrie,<br />

résistance à la compression, limites d'Atterberg, densité, compactage Proctor).<br />

Il s'avérait très difficile de préciser :<br />

— le seuil de non-utilisation possible d'une craie,<br />

— les méthodes d'extraction et de compactage les mieux adaptées.<br />

Les constatations effectuées sur les chantiers de terrassement crayeux nous ont montré qu'il était<br />

nécessaire de rechercher et mettre au point des méthodes d'identification et d'étude de terrassement<br />

mieux adaptées à ce type de matériau.<br />

On trouvera ci-après un certain nombre de constatations sur chantier et les enseignements qui ont<br />

pu être obtenus en partant des études réalisées à Rouen, et dans les <strong>La</strong>boratoires de Lille, de Saint-<br />

Quentin, de l'Est parisien, et au LCPC.<br />

81<br />

Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch. - Spécial V - Octobre 1973


<strong>La</strong> craie et les essais géotechniques<br />

Avant extraction, nous avons affaire à un massif<br />

crayeux rocheux dont l'analyse géologique générale,<br />

la lithostratigraphie et la pétrophysique au niveau<br />

des blocs élémentaires ont été étudiées 1 .<br />

En terrassement, sous les actions des engins d'extraction,<br />

du pétrissage dû aux passages des matériels de<br />

transport et du compactage, les blocs de craie de<br />

faible densité (craie blanche) se transforment en<br />

craie-sol.<br />

<strong>La</strong> destruction partielle ou complète de la structure<br />

« roche » dépend, bien sûr, des conditions de gisement,<br />

mais aussi et surtout, dans le cadre précis des craies<br />

ayant posé des problèmes de terrassement, des conditions<br />

d'extraction et de mise en œuvre.<br />

<strong>La</strong> craie-sol<br />

Au point de vue minéralogique, toutes les craies<br />

étudiées sont à peu près exclusivement carbonatées<br />

(tableau I).<br />

Type de craie<br />

TABLEAU I<br />

Teneur en CaCÛ3<br />

(%)<br />

Densité des<br />

grains solides y/«<br />

Pacy-sur-Eure 97,1 2,714<br />

Sauqueville 98,4 2,720<br />

Incarville 98,9 2,724<br />

Belbeuf 96,9 2,721<br />

Saint-Cloud 96 2,72<br />

Malincourt 98,5 2,72<br />

Serain 97,6 2,72<br />

Morval 96,8 2,72<br />

Combles 96,9 2,72<br />

Feuillères 97,1 2,72<br />

M. Masson a montré que la faible teneur en argile<br />

trouvée dans le résidu ne joue pas un rôle notable<br />

dans le comportement géotechnique.<br />

Dans la classification des sols LPC, on dispose d'un<br />

nombre de grandes familles qui ont des propriétés<br />

géotechniques suffisamment différentes pour que le<br />

rattachement d'un matériau donné à l'une des familles<br />

permette une connaissance approximative, mais fort<br />

utile, de ses propriétés géotechniques.<br />

Pour la craie-sol, les caractéristiques qui servent au<br />

classement, granulometrie et limites d'Atterberg, sont<br />

difficiles à mesurer.<br />

Granulométrie<br />

<strong>La</strong> granularité de la craie est variable en fonction<br />

des précautions que l'on prend pour effectuer l'essai.<br />

Par voie humide (essai normalisé), les éléments se<br />

fragmentent aisément et même se délitent dans l'eau<br />

au cours des opérations de lavage-tamisage.<br />

Par voir sèche, il est impossible de séparer les éléments<br />

les plus fins qui restent collés aux éléments les plus<br />

gros et, si l'on poursuit le tamisage, on produit par<br />

attrition une proportion de fines non contrôlable.<br />

Cet essai n'est donc pas significatif, et ne peut être<br />

pris en compte pour le classement géotechnique de<br />

la craie. De plus, entre l'extraction et la mise en<br />

œuvre-compactage, l'évolution de la granularité peut<br />

être très importante.<br />

On peut en juger par quelques essais réalisés avec<br />

un mode opératoire qui semble mieux adapté à ce<br />

type de matériau. Afin d'éviter au maximum le délitage<br />

au cours de l'essai, nous avons utilisé de l'alcool<br />

à la place de l'eau.<br />

Ces essais ont été effectués sur des prélèvements au<br />

déblai de Bonnières, au remblai du Val-Guyon, après<br />

apparition des désordres et récemment au cours de<br />

mise en œuvre sur l'autoroute A 15 au remblai du<br />

« four à chaux » (fig. 1).<br />

Suivant les critères de classification LPC, on peut<br />

donc être en présence d'un sol grenu (craie brute<br />

du déblai de Bonnières), ou d'un sol fin (craie de<br />

l'autoroute A 15).<br />

On conçoit aisément que le comportement géotechnique<br />

soit très différent.<br />

-S 100<br />

S 40<br />

CAILLOUX GRAVIERS GROS SABLE SABLE FIN<br />

\<br />

'<br />

\ > S S<br />

T<br />

• mm 200 100 5 0 2 0 10 S 2 1 0,5 0,2 0,1 50p 20u<br />

(T)<br />

Fraction 0/20 de la craie-sol extraite du déblai de Bonnières<br />

(2) A 15 après mise en œuvre et 8 passages Tamping C 825<br />

\<br />

J<br />

-<br />

Y<br />

(3) Remblai Vai-Guyon<br />

1. Cf. article de M. Masson : Pétrophysique de la craie.<br />

Fig. 1. — Courbes granulométriques de la craie-sol.<br />

82


1<br />

Limites d'Atterberg<br />

Sous l'action de pétrissage des engins de chantier<br />

et des compacteurs, la craie se transforme en une<br />

pâte à comportement plastique et parfois même (tout<br />

particulièrement lors de conditions météorologiques<br />

défavorables) en une boue impossible à travailler.<br />

Si l'on considère que la très faible proportion d'argile<br />

peut être négligée, les limites d'Atterberg effectuées<br />

sur le mortier (fraction à 0,4 mm) dépendront de la<br />

granulante du matériau.<br />

Bien que l'augmentation du pourcentage de fines<br />

puisse entraîner une évolution de la plasticité, un<br />

certain nombre de résultats obtenus sur différentes<br />

craies-sol, montrent que leur fraction mortier aurait<br />

plutôt des caractéristiques géotechniques se rapprochant<br />

d'un limon peu plastique Lp (fig. 2).<br />

<strong>La</strong> craie-sol est un matériau particulier, difficile à<br />

classer, car en fait, suivant le nombre de manipulations<br />

qu'elle aura subi, elle pourra être classée comme<br />

un sol grenu (grave limoneuse ou grave argileuse,<br />

suivant la plasticité du mortier), ou comme un sol<br />

fin (limon peu plastique ou argile peu plastique).<br />

Quelle que soit la dénomination adoptée, elle caractérise<br />

mal ce type de matériau et elle ne permet pas<br />

au départ d'avoir une idée de son comportement<br />

géotechnique.<br />

X<br />

X<br />

Ap ,<br />

"i '«"<br />

x'«<br />

y<br />

o<br />

LO<br />

I<br />

5<br />

1 n<br />

0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100<br />

Teneur en eau<br />

Limite de liquidité<br />

Fig. 2. — Plasticité de quelques craies-sol.<br />

Ce paramètre est aussi assez délicat à définir.<br />

Teneur en eau de la craie-bloc<br />

Dans le massif, les craies ayant posé des problèmes<br />

en terrassement sont en moyenne à des teneurs en<br />

eau proches de la saturation (tableau II).<br />

L'influence de la teneur en eau sur les caractéristiques<br />

mécaniques est extrêmement importante. Ce<br />

paramètre déterminant pour les valeurs trouvées dans<br />

les essais mécaniques, l'est aussi sur les chantiers.<br />

w L<br />

Type de<br />

craie<br />

moyenne<br />

TABLEAU n<br />

w % Pour­<br />

moyenne<br />

saturé (cal­<br />

°/<br />

culé) pour centage<br />

de<br />

/o Y* = 2,72 saturation<br />

Pacy-sur-Eure 1,52 27,5 28,9 96<br />

Sauqueville 1,50 24,5 29,7 83<br />

Incarville<br />

Rouvray<br />

1,59<br />

1,57<br />

22,5<br />

22,5<br />

26,1<br />

26,9<br />

86<br />

83,5<br />

Belbeuf 1,60 15,8 25,7 61,5<br />

Saint-Cloud 1,57 25,7 26,9 96<br />

RN 1 1,51 24,3 29,4 83<br />

Malincourt 1,53 25 28,6 87,5<br />

Serain 1,65 20,3 23,8 85,5<br />

Mot val 1,59 24,8 26,1 95<br />

Combles 1,64 19,5 24,2 80,5<br />

Feuillères 1,82 14,7 18,1 81<br />

Teneur en eau de la craie-sol<br />

Lors des manipulations dues à l'extraction, à la mise<br />

en œuvre et au compactage, la craie-bloc est soumise<br />

à des efforts mécaniques violents qui la réduisent<br />

en craie-sol et qui libèrent l'eau. Celle-ci, en tant que<br />

constituant de la craie-bloc, avait peu d'influence<br />

sur les caractéristiques physiques. Il n'en est plus de<br />

même avec la craie-sol. A teneur en eau égale de<br />

départ (craie-bloc), plus les efforts mécaniques seront<br />

importants, plus on libérera de l'eau qui viendra<br />

lubrifier en quelque sorte les éléments constitutifs<br />

de la craie-sol. D'autre part, plus la teneur en eau<br />

de la craie-bloc sera forte, moins seront importants<br />

les efforts mécaniques pour obtenir rapidement une<br />

craie-sol. Les craies ayant posé des problèmes à la<br />

mise en œuvre ont toutes des résistances à la compression<br />

simple, (à la teneur en eau naturelle) très<br />

faibles, comprises entre 10 et 40 bars.<br />

<strong>La</strong> teneur en eau de la craie-sol est donc un paramètre<br />

très important : d'une part, il renseigne pour la craiebloc<br />

sur la fragilité de la craie soumise à des efforts<br />

mécaniques violents ; d'autre part, il est, comme le<br />

dit M. Reverdy [6] un des quatre éléments qu'il est<br />

impossible de maîtriser parfaitement sur un chantier<br />

de terrassement.<br />

Dans la craie-sol, on peut parler de teneur en eau<br />

« globale », mais il est impossible de faire la part de<br />

l'eau de rétention capillaire (bloc de craie intact) et<br />

la part de l'eau « libérée » qui conditionne le comportement<br />

du sol à la mise en œuvre et au compactage.<br />

Il est donc très difficile de déterminer une teneur en<br />

eau probable de compactage pour la craie-sol.<br />

Conditions probables de mise en œuvre et de compactage<br />

Essai Proctor<br />

En applicant le mode opératoire normalisé de l'essai<br />

Proctor, et s'agissant d'un matériau évolutif, en<br />

reconstituant un échantillon pour chaque point Proctor,<br />

on obtient sur la craie-sol une courbe Proctor<br />

83


16 18 20 22 24 w% 16 18 20 22 24<br />

a) Courbe Proctor obtenue et courbe Proctor corrigée. b) Production de finesde compactage.<br />

Fig. 3.<br />

très mal définie sans optimum marqué. Ce fait s'explique<br />

par la disparité dans la production des fines au<br />

compactage.<br />

Plus la proportion d'éléments fins est importante,<br />

plus la densité obtenue par compactage devrait être<br />

forte. Si le matériau compacté était identique pour<br />

l'ensemble des teneurs en eau, on aurait donc une<br />

« courbe corrigée » plus conforme à ce que l'on<br />

obtient avec un sol classique (fig. 3).<br />

Influence de l'état initial<br />

Les conditions de préparation des échantillons pour<br />

la réalisation de l'essai Proctor ont aussi une grande<br />

influence sur le résultat de l'essai.<br />

Si l'on prend deux échantillons de nature identique<br />

provenant d'un même chantier et si l'on effectue<br />

deux compactages Proctor normal :<br />

— l'un avec des éprouvettes obtenues en partant de<br />

la teneur en eau naturelle par évaporation lente et<br />

humidification,<br />

— l'autre avec des éprouvettes préalablement séchées,<br />

puis réimbibées pendant 24 h,<br />

on obtient deux courbes très différentes (fig. 4).<br />

77 est donc impossible de définir par la méthode habituelle<br />

une densité maximale et une teneur en eau optimale<br />

de compactage.<br />

Influence du nombre de compactages<br />

<strong>La</strong> craie-bloc se présente, à partir des observations<br />

au microscope électronique, comme un empilement<br />

anarchique de grains de calcite (fig. 5a).<br />

Sous contrainte statique ou dynamique, ou en terrassement<br />

sous l'action des manipulations successives,<br />

il y a destruction partielle de cette texture. L'action<br />

de compactage tend à réaliser une texture plus<br />

compacte accompagnée d'une fragmentation des<br />

coccolithes constituant en quelque sorte dans la<br />

craie-bloc des ponts de matière à l'intérieur même<br />

de la matrice.<br />

L'aptitude à la compaction de la craie-sol est bien<br />

mise en évidence si l'on effectue une série de compactages<br />

successifs à l'énergie Proctor normal (fig. 6).<br />

Avec la craie de Pacy-sur-Eure, pour une teneur en<br />

eau de 20 %, on obtient 1,46 au premier compactage<br />

et 1,61 au troisième compactage.<br />

Les figures 5 b et 5 c montrent bien l'évolution de<br />

la texture, et le resserrement des grains, peu visible<br />

après un compactage, apparaît particulièrement accentué<br />

après quatre compactages.<br />

Cette aptitude à la compaction est étroitement liée<br />

à la texture. <strong>La</strong> connaissance géologique et pétrophysique<br />

de la craie en place est prépondérante.<br />

Les résultats de l'analyse pétrophysique renseignent<br />

bien sur les paramètres liés à cette texture (densité,<br />

microdureté, résistance à la compression, teneur en<br />

eau).<br />

Pour l'étude de terrassement, l'étude de la portance<br />

en fonction de la teneur en eau de départ et du nombre<br />

de compactages répétés apparaît comme un test de<br />

comportement global de la craie.<br />

x-<br />

16 18 20 22 24 26 28<br />

w %<br />

Fig. 4. — Compactage Proctor normal, fraction 0/20.<br />

X-<br />

-x<br />

Portance<br />

Pour une teneur eau donnée, le nombre de manipulations<br />

(une manipulation = une intervention mécanique<br />

modifiant la granularité de la craie) influe<br />

directement sur la portance. Le graphique (fig. 7)<br />

montre que pour une teneur en eau de 22 %, on<br />

84


Fig. 5. — <strong>Craie</strong> de Pacy-sur-Eure.<br />

Observations au microscope électronique.<br />

1,60<br />

7d<br />

• 1 compactage<br />

0 2 compactage<br />

e<br />

1 3 e compactage<br />

CBR<br />

50,<br />

*0<br />

30<br />

p<br />

\<br />

\ V<br />

t \ 1<br />

><br />

L<br />

1,50<br />

U0<br />

20<br />

10<br />

\<br />

\<br />

\<br />

1 V<br />

\<br />

w %<br />

Fig. 6. — Essai Proctor normal.<br />

Cinq couches.<br />

w %<br />

Fig. 7. — Essai CBR.<br />

Poinçonnement immédiat.<br />

<strong>Craie</strong> de Pacy-sur-Eure. Evolution de la densité sèche et du CBR<br />

immédiat en fonction du nombre de compactages.<br />

a) Etat avant compactage ( x 2500),<br />

^100<br />

1 90<br />

" 80<br />

(A<br />

I 70<br />

E<br />

¡3 60<br />

V)<br />

•ë 50<br />

4 0<br />

f<br />

§ 30<br />

o 20<br />

1 0<br />

0<br />

CAILLOUX GRAVIERS GROS SABLE SABLE FIN<br />

Graviers Sable ^<strong>Craie</strong><br />

• mm 200 100 50 20 10 5 2 1 0,5 Q2 0,1 50u 20u<br />

Fig. 8. — Analyse granulométrique des constituants.<br />

b) Etat après un compactage ( x 2250),<br />

peut avoir une excellente portance au premier compactage<br />

(CBR = 37), alors qu'elle devient très faible<br />

au troisième compactage (CBR = 8).<br />

Pour une teneur en eau donnée, plus le nombre de<br />

compactages est élevé, plus le pourcentage de mortier<br />

(ou pâte), est important. Pour un état donné, ce<br />

pourcentage influe directement sur la portance.<br />

A partir de quel pourcentage de pâte a-t-on l'apparition<br />

d'une portance faible conduisant à des conditions<br />

de mise en œuvre difficiles ?<br />

Cette étude a été effectuée sur deux types de craie :<br />

Feuillères et Combles, la première étant considérée<br />

comme excellente, la seconde comme médiocre.<br />

c) Etat après quatre compactages ( x 2250).<br />

Les échantillons de craie à étudier ont été broyés à<br />

sec jusqu'à l'obtention d'une poudre de granularité<br />

0/0,5. A ce stade de fragmentation, on peut avancer<br />

que la craie était très peu ou pas évolutive.<br />

85


Afin d'obtenir un matériau 0/20, du sable propre et<br />

du gravier de granularité donnée par la figure 8 ont<br />

été ajoutés dans les proportions suivantes :<br />

craie : x<br />

sable 0,5/5 roulé et lavé : 100-x<br />

5/20 silex :<br />

100 -x<br />

Ces deux derniers matériaux n'étant pas évolutifs,<br />

seul, le pourcentage de la craie pourrait donc modifier<br />

la portance du mélange.<br />

Résultats<br />

<strong>La</strong> variation de la portance (CBR immédiat) pour une<br />

énergie de compactage de Proctor normal est très<br />

significative. Pour la pâte seule, le CBR chute très<br />

rapidement entre 16 et 18 % pour Feuillères et entre<br />

21 et 22 % pour Combles (fig. 9).<br />

Dès que l'on introduit du sable et du gravier, le comportement<br />

est très différent.<br />

Pour des pourcentages de craie de 10 %, le squelette<br />

sable-gravier l'emporte nettement sur la matrice, la<br />

craie joue le rôle de liant et la portance est excellente<br />

(fig. 10 et 11).<br />

Le comportement du mélange est sensiblement le même<br />

que celui de la pâte dès que le pourcentage de cette<br />

dernière est supérieur à 20 %.<br />

Il semble même que l'eau se porte essentiellement sur<br />

la craie, les mélanges contenant un fort pourcentage<br />

de craie ont une portance qui chute rapidement pour<br />

des teneurs en eau plus faibles.<br />

L'essai CBR permet de chiffrer la portance. Bien<br />

qu'empirique, il nous paraît devoir être le seul donnant<br />

un critère valable pour la détermination des conditions<br />

probables de mise en œuvre.<br />

86


Recherche et mise au point<br />

d'essais mieux adaptés<br />

<strong>La</strong> liaison entre l'identification géotechnique de la<br />

craie-roche et le comportement sur chantier ne peut<br />

être réalisée au moyen des essais classiques de sols.<br />

Nous avons donc tenté d'utiliser des tests de comportement<br />

empruntés aux essais de pierres pour la mise au<br />

point d'un classement géotechnique directement applicable<br />

aux problèmes de terrassement.<br />

Il s'agit de l'essai Deval et de l'essai de vibrobroyage,<br />

ces deux essais ont été adaptés.<br />

Pour les deux, il est pris en compte la production<br />

d'éléments fins (tamisât à 1,6 mm pour le Deval et<br />

tamisât à 1,25 mm pour le vibrobroyage) produits<br />

à partir de blocs de craie de tailles différentes. Cette<br />

production plus ou moins importante d'éléments fins<br />

a une incidence directe sur la portance.<br />

En ce qui concerne la prévision du comportement sur<br />

chantier, l'étude en laboratoire courante (Proctor -<br />

CBR) des conditions de terrassement ne s'applique<br />

pas à la craie-sol ; il est donc impossible, par cette<br />

méthode, de déterminer les conditions probables de<br />

mise en œuvre et de compactage.<br />

Il n'est pas possible de définir une densité, celle-ci<br />

variant avec le nombre de manipulations pouvant<br />

conduire même, pour une teneur en eau donnée, à<br />

une portance très médiocre.<br />

Il est apparu que l'utilisation d'un essai de compactages<br />

répétés et poinçonnement CBR, prenant en<br />

compte la production d'éléments fins - densification,<br />

en fonction de la teneur en eau de la craie-sol, pouvait<br />

apporter les éléments nécessaires à la détermination<br />

des conditions probables de mise en œuvre et de compactage.<br />

Essai Deval 2<br />

Essais comparatifs sur cubes sciés<br />

et sur blocs 4 x 7 cm<br />

Dans cet essai, il était important de déterminer si<br />

la forme de 44 blocs nécessaires à l'essai avait une<br />

influence sur la quantité de pâte produite en fonction<br />

du nombre de tours. Des essais ont donc été réalisés<br />

sur des cubes sciés et sur des blocs sensiblement parallélépipédiques<br />

de 4 x 7 cm d'arête environ.<br />

Les résultats sont donnés dans le tableau III.<br />

<strong>La</strong> différence sur la production de fines n'est importante<br />

que pour les craies fragiles (Sauqueville). Elle<br />

est due essentiellement à l'augmentation du nombre<br />

de blocs dès les premiers tours du pot Deval, ce qui<br />

conduit bien sûr à une augmentation très sensible<br />

du nombre d'arêtes.<br />

2. Essais réalisés par le <strong>La</strong>boratoire de Saint-Quentin.<br />

>-15<br />

-<br />

k<br />

-<br />

= 10<br />

.s'A<br />

V>" ><br />

• s*<br />

•<br />

-<br />

A<br />

/A<br />

V s>A !>'<br />

IV ^'<br />

^-^<br />

100 200 300 500 800 1300 1600 1800<br />

Nombre de tours<br />

x xlncarville A ABelbeuf û A Feuillères••--•Combles<br />

»__#Sauqueville Malincourt • • Serain o—-—OMorval<br />

Fig. 12. — Essai Deval à teneur en eau naturelle.<br />

Variation du pourcentage de tamisât cumulé à 1,6 mm pour huit<br />

craies différentes en fonction du nombre de tours.<br />

4 i<br />

;<br />

-J<br />

100 200 300 500<br />

kBelbeuf<br />

i Malincourt<br />

I i .... i 1 I 1 1 1<br />

800<br />

1300 1600 1800<br />

Nombre de tours<br />

A<br />

ûFeuillères<br />

• • Serain<br />

•—-•• Combles<br />

o-—O Morval<br />

Fig. 13. — Essai Deval sec.<br />

Variation du pourcentage de tamisât cumulé à 1,6 mm pour six<br />

craies différentes en fonction du nombre de tours.<br />

87


TABLEAU m<br />

Pourcentage de tamisât à 1,6 mm cumulé<br />

Résultats sur cubes (sciés) et blocs parallélépipédiques<br />

Nombre tours 100 200 300 500 800 1 300 1 600 1 800 2 000 2 200<br />

Cubes 1,7 3,3 5 6,5 10 13,4 16,2 18,4 20,9 23,5<br />

Feuillères<br />

Blocs 1,4 3 5 7 9,3 13 16,2 18,4 19,4 21,2<br />

Différence +0,3 +0,3 0 -0,5 +0,7 +0,4 0 0 + 1,5 +2,3<br />

Différence peu significative.<br />

Cubes 6,7 14 23,2 31,6<br />

Sauqueville<br />

Blocs 11,4 20,6 29,6 39<br />

Différence -4,7 -6,6 -6,4 -7,4<br />

Différence significative, augmentation du nombre d'arêtes dès les premiers tours par fragmentation des blocs.<br />

Cubes 2,5 4,6 7,4 11,5 17,9 24,6 30,3<br />

Malincourt<br />

Blocs 4,5 6,7 10 14,1 22 29,8<br />

Différence -2 -2,1 -2,6 -2,6<br />

-4,1 -5,2<br />

Comportement analogue à celui de la craie de Sauqueville, mais différence moins importante.<br />

Cubes 2,5 4,7 8,3 13,3 19,3 25,8 30,3<br />

Morval Blocs 4,3 8,1 12 17,3 22,4 28,8 33<br />

Différence -1,8 -3,4 -3,7 -4 -3,1 -3 -2,7<br />

Cubes 1,6 3,9 5,9 9 13,3 18,7 23,3 27 30,5<br />

Combles<br />

Blocs 2,8 6 9,6 14,4 19,6 23,2 29,9 32,8 37<br />

Différence -1,2 -2,1 -3,7 -4,6 -6,3 -4,5 -6,1 -5,8 -6,5<br />

Comportement voisin des précédents mais à noter, pas d'augmentation au-delà de 500 tours.<br />

Cubes 3,5 5,6 8,4 12,2 17,8 22,2 27,6 31,8<br />

Blocs 2,2 5 8,2 12 17 22,4 26,6 30 36<br />

Serain Différence +2,3 +0,6 +0,2 +0,2 +0,8 -0,2 + 1 + 1,8<br />

Hétérogénéité, présence de nodules phosphatés. Les blocs ont automatiquement été pris dans les échantillons les<br />

plus durs, résistant le mieux au burin et permettant de tailler des morceaux de 4x 7 cm environ.<br />

A noter que pour augmenter l'attrition, après chaque<br />

pesée, seuls les blocs étaient réintroduits dans le pot.<br />

Essai Deval en présence d'eau (blocs à teneur en eau<br />

naturelle proche de la saturation)<br />

et essai Deval sec.<br />

A partir des essais réalisés sur huit types de craie<br />

pour le Deval en présence d'eau et six types pour<br />

le Deval sec, on peut classer les craies en fonction<br />

du pourcentage de pâte produite pour un certain<br />

nombre de tours, soit, en somme, en fonction de leur<br />

« fragilité » (fig. 12 et 13).<br />

Au bout de 500 tours avec l'essai sur blocs à teneur<br />

en eau naturelle, le comportement est différent selon<br />

le type de craie (tableau IV).<br />

TABLEAU IV<br />

Deval en présence d'eau (blocs à teneur en eau naturelle)<br />

Pourcentage de tamisât cumulé à 500 tours du pot Deval<br />

pour huit types de craie<br />

Incarville Sauqueville Belbeuf Malincourt<br />

17 % 40 % 4,5 % 12,5 %<br />

Feuillères Serain Combles Morval<br />

5 % 10,5 % 8 % 10,5 %<br />

88


On a, d'une part, des craies peu fragiles (Belbeuf<br />

et Feuillères), des craies moyennement fragiles (Malincourt,<br />

Serain. Combles et Morval) et des craies<br />

très fragiles comme Sauqueville. Avec le Deval sec,<br />

les différences sont bien moins significatives.<br />

L'attrition produite par les différentes opérations de<br />

terrassement pourra donc être appréciée au moyen<br />

de cet essai.<br />

Mais c'est un essai long, demandant une préparation<br />

minutieuse de 44 blocs de dimensions 4 x 7 cm environ,<br />

qui ne rend pas compte à lui seul de toutes<br />

les conditions dans lesquelles se trouve soumise la<br />

craie au cours des manipulations.<br />

<strong>La</strong> production d'éléments fins à 100 tours du pot<br />

Deval, ce qui est déjà énorme par rapport à ce qui<br />

peut se produire sur chantier est, excepté pour Sauqueville,<br />

très faible et inférieure à 4 %.<br />

Ce mode d'usure n'explique pas à lui seul la grande<br />

proportion de fines rencontrées dans les remblais<br />

(ex. Val-Guyon) après mise en œuvre. Il peut correspondre<br />

à un certain atelier de mise en œuvre très<br />

limité et peu réaliste.<br />

Vibrobroyage 3<br />

Mode opératoire<br />

Cet essai a l'avantage de permettre l'utilisation des<br />

échantillons demandant une préparation moins importante<br />

; il est donc très rapide.<br />

Après concassage de blocs de craie préalablement<br />

séchés, on reconstitue un échantillon de granularité<br />

5/20 (fig. 14) qui est immergé pendant une heure.<br />

Trois essais au vibrobroyeur sont réalisés :<br />

— usure à sec,<br />

— usure à teneur en eau obtenue après une heure<br />

d'immersion (proche de la saturation),<br />

— usure à teneur en eau obtenue après une heure<br />

d'immersion, le bol étant rempli d'eau.<br />

Après 30 secondes de vibration, on détermine par<br />

tamisage sous l'eau le pourcentage du tamisât passant<br />

à 1,25 mm.<br />

Le poids de matériau introduit à chaque essai est<br />

calculé avec le rapport suivant : (500-d)/2,8<br />

500 = volume du bol en cm 3 ,<br />

2,8 = densité des matériaux normalement utilisés.<br />

Résultats<br />

Ce classement (tableau V) est bien lié aux difficultés<br />

apparues lors de la réalisation des terrassements,<br />

excepté pour Sauqueville. Pour cet emprunt, il est probable<br />

que la teneur en eau de l'essai très inférieure à<br />

la teneur en eau moyenne (21 au lieu de 24,5 %)<br />

et le mode de préparation (concassage à sec, éliminant<br />

les blocs les plus tendres dans le cas d'une craie très<br />

hétérogène) ont influencé l'essai.<br />

Dans cet essai, la craie se trouve broyée non plus<br />

seulement par attrition, mais surtout par éclatements<br />

successifs dus aux contraintes développées au cours<br />

de l'essai et transmises bloc en bloc.<br />

3. Essais réalisés par M. Struillou au LCPC, section de minéralogie<br />

et pétrographie appliquées, cf. article suivant : Etude par<br />

vibrobroyage de l'aptitude des craies au compactage.<br />

TABLEAU V<br />

Pourcentage tamisât à 1,25 mm<br />

moyenne sur 3 essais<br />

Provenance<br />

échantillon<br />

Usure<br />

« à sec »<br />

%<br />

Usure<br />

« saturé »<br />

/o<br />

Usure<br />

« saturé<br />

+ 250gd'eau»<br />

%<br />

Teneur en eau après<br />

1 h d'immersion<br />

%<br />

Teneur<br />

en eau naturelle<br />

moyenne<br />

%<br />

Observations de chantier<br />

Belbeuf 9 14 36 15 15,8<br />

Rouvray 14 20 36,3 23 22 Pas de problème majeur à l'extraction<br />

et à la mise en œuvre.<br />

Saint-Cloud 15 26,6 61,5 26 25,7 <strong>Craie</strong> mise à la décharge.<br />

Sauqueville 16 28* 73 21 24,5 Gros problèmes à la mise en œuvre,<br />

craie très hétérogène.<br />

Incarville 17,8 31* 87 21,6 22,5 Quelques problèmes à la mise en<br />

œuvre si extraction au bouteur<br />

+ chargeur. Pas de problème avec<br />

l'extraction à la pelle.<br />

Pacysur-Eure<br />

18 44 92,2 26 27 Problèmes importants à l'extraction<br />

et à la mise en œuvre.<br />

* Sauqueville et Incarville identiques si l'on tient compte des teneurs en eau réelles en place.


100<br />

90<br />

80<br />

7 0<br />

60<br />

50<br />

40<br />

30<br />

2 0<br />

1 0<br />

• mm 200 100 50<br />

Fig.<br />

S 20<br />

CAILLOUX | GRAVIERS<br />

\<br />

L<br />

\<br />

20 10<br />

14. — Granulométrie des gravillons de craie pour essai de<br />

vibrobroyage.<br />

1 0<br />

Belheuf<br />

\<br />

\<br />

Sauc lueville •<br />

/<br />

/<br />

/<br />

/<br />

1<br />

Par>\/_ci ir.Pi iro<br />

/<br />

/<br />

/<br />

m<br />

/<br />

/<br />

/<br />

/<br />

/<br />

/<br />

/<br />

/<br />

/<br />

• Incarville<br />

/<br />

y* Sain -Cloud<br />

•<br />

^ • L Rouvra'<br />

sec<br />

R„ saturé<br />

Fig. 15. — Relation entre l'augmentation du pourcentage de tamisât<br />

à 1,25 mm entre l'essai saturé et l'essai sec (vibrobroyage) et le<br />

rapport Rc sec/if<br />

c<br />

« sat. ».<br />

On peut d'ailleurs remarquer que plus le rapport<br />

Rc sec//? c<br />

sat. est élevé, plus la différence entre le<br />

pourcentage du tamisât à sec et « saturé » est forte<br />

(fig. 15).<br />

<strong>La</strong> production d'éléments inférieurs à 1,25 mm est<br />

très importante. Compte tenu de l'influence de cette<br />

fraction granulométrique sur les conditions probables<br />

de mise en œuvre, on peut raisonnablement se<br />

fixer une limite à 30 %.<br />

Cette limite peut être prise en compte aussi bien dans<br />

l'essai d'usure « saturé » (conditions de mise en œuvre<br />

par temps favorable) que dans l'essai d'usure « saturé<br />

dans l'eau » (conditions de mise en œuvre par<br />

temps de pluie ou après précipitations importantes).<br />

Il serait donc possible avec cet essai de déterminer<br />

rapidement l'aptitude d'une craie au terrassement<br />

(tableau VI).<br />

TABLEAU VI<br />

Usure « saturé » et usure « saturé<br />

dans l'eau», donnant un pourcentage<br />

d'éléments inférieurs à 1,25 mm, inférieur<br />

à 30 %.<br />

Usure « saturé » donnant un pourcentage<br />

d'éléments inférieurs à 1,25 mm,<br />

inférieur à 30 % et usure « saturé<br />

dans l'eau» produisant plus de 30%<br />

d'éléments supérieurs à 1,25 mm.<br />

Cas où les deux essais donnent un<br />

pourcentage supérieur à 30 %.<br />

Essai de compactages répétés<br />

<strong>Craie</strong> tous temps à<br />

utiliser sans précautions<br />

particulières.<br />

<strong>Craie</strong> à employer en<br />

dehors des périodes<br />

défavorables.<br />

<strong>Craie</strong> dangereuse.<br />

Chaque échantillon réduit en fraction 0/20 est soumis<br />

à des compactages répétés (énergie Proctor normal)<br />

pour des teneurs en eau différentes encadrant<br />

la teneur en eau naturelle moyenne, mais très voisines.<br />

Après chaque compactage, un poinçonnement CBR<br />

immédiat est effectué.<br />

On assimile un compactage à une manipulation.<br />

Compte tenu de la préparation en fraction 0/20,<br />

celle-ci conduit en fait déjà à obtenir un échantillon<br />

ayant subi une manipulation qui, bien sûr, a produit<br />

une quantité non négligeable d'éléments fins (Cf.<br />

§ granulométrie ). On peut estimer que leur pourcentage<br />

ne dépasse pas 15 % à 1,25 mm.<br />

Ces essais ont été réalisés sur cinq types de craie :<br />

Rouvray - Incarville - Sauqueville - Pacy-sur-Eure -<br />

Saint-Cloud.<br />

Normalement, pour un sol non évolutif, le nombre<br />

de compactages pour une énergie donnée influe peu<br />

sur la densité sèche. <strong>La</strong> production de fines est négligeable.<br />

Il n'en est pas de même pour la craie.<br />

L'augmentation de la densité sèche pour une même<br />

teneur en eau peut être très importante en fonction<br />

du nombre de compactages.<br />

Cet essai peut donc permettre de déterminer la sensibilité<br />

aux manipulations pour une craie dans un état<br />

donné et de fixer la valeur maximale de la densité<br />

sèche qu'elle pourra atteindre.<br />

90


Evolution de la densité sèche en fonction du nombre<br />

de compactages<br />

Pour des teneurs en eau faibles, la densité continue<br />

à évoluer au-delà de cinq compactages et atteint un<br />

palier entre sept et huit compactages.<br />

Pour des teneurs en eau élevées (> 22 %), la quantité<br />

d'eau devient trop importante, il est difficile de dépasser<br />

deux à trois compactages sans apparition du<br />

« coussin de caoutchouc » ; la densité sèche maximale<br />

obtenue est beaucoup plus faible (fig. 16).<br />

Si Ton compare les résultats obtenus pour les différents<br />

types de craie (y 2 2 %<br />

1 2 3 U 5 6 7 8<br />

Nombre de compactages<br />

Fig. 16. — Allure des courbes obtenues en fonction du nombre<br />

de compactages.<br />

Evolution de la portance et des caractéristiques. Conséquences<br />

Considérons maintenant une série de courbes (fig. 17)<br />

obtenues après un nombre de compactages croissant<br />

avec les valeurs du CBR immédiat correspondantes.<br />

• Un premier cas est celui d'une densité sèche moyenne<br />

pour une teneur en eau faible (point I).<br />

Supposons que la teneur en eau ne varie pas : il<br />

n'y aura pas d'augmentation de la densité sèche si<br />

les contraintes ultérieures ne sont pas supérieures à<br />

celles mises en œuvre au compactage.<br />

Types<br />

de<br />

craie<br />

yd max. pour<br />

5 compactages<br />

répétés<br />

TABLEAU VII<br />

e<br />

>><br />

° R<br />

S-S<br />

Différence<br />

v= moyenne<br />

bloc<br />

Incarville 1,68 1,59 0,09 17,5 22,5 5<br />

o<br />

«> i<br />

*-<br />

Si<br />

Q*<br />

correspondante<br />

Pacy-sur-<br />

Eure 1 66 1,52 0,14 20,0 27,5 7,5<br />

Rouvray 1,64 1,57 0,07 19,6 22,5 2,9<br />

Sauqueville 1,63 1,50 0,13 19,4 24,5 5,1<br />

Saint-Cloud 1,62 1,57 0,05 18,3 25,7 6,4<br />

/o<br />

1,40 I I I I I I I • I I I I<br />

18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 w %<br />

Fig. 17. — Courbes Proctor normal pour différents nombres de<br />

compactages.<br />

Les caractéristiques mécaniques seront élevées 4<br />

si<br />

l'on se réfère aux résultats obtenus sur la craie de<br />

Val-Guy on (fig. 18) : R c<br />

est très supérieur à 2 bars.<br />

<strong>La</strong> portance est excellente (CBR immédiat > 20).<br />

Si la teneur en eau vient à augmenter et s'il n'y a<br />

pas modification des contraintes, les caractéristiques<br />

mécaniques se trouveront modifiées ; R c<br />

peut être<br />

alors inférieur à 2 bars ; la portance (CBR après<br />

imbibition) peut chuter au-dessous de la valeur CBR =<br />

10.<br />

• Un second cas est celui d'une densité sèche faible<br />

pour une teneur en eau élevée (point II proche de la<br />

saturation).<br />

Au départ, la mise en œuvre sera difficile (portance<br />

très faible même après un compactage) avec apparition<br />

rapide du « matelas ».<br />

Les caractéristiques mécaniques seront très médiocres<br />

R c<br />

< 2 bars et des risques d'instabilité mécanique<br />

seront à craindre.<br />

4. Cf. article précédent de A. de Raguenel : Stabilité des remblais<br />

crayeux de grande hauteur.<br />

91


Rc(bar)<br />

6<br />

4<br />

0<br />

3<br />

2<br />

O 16 %<br />

A 18 %<br />

• 20 %<br />

• 22 %<br />

//<br />

///<br />

JA<br />

w<br />

•y<br />

/<br />

Granu ométrie creuse<br />

Granu ométrie sableu se ><br />

//y<br />

/ff y*<br />

•<br />

Energie<br />

Proctor norma i<br />

,— \<br />

Energie<br />

Pr< )ctor modifié<br />

0<br />

100 200 300 400 500<br />

Energie de compactage<br />

Fig. 18. — Résistance à la compression simple en fonction de la<br />

teneur en eau et de l'énergie de compactage (craie de Val-Guyon).<br />

n<br />

y<br />

O<br />

•<br />

•<br />

Détermination du nombre de manipulations au-delà duquel<br />

la portance est faible,<br />

<strong>La</strong> figure 19 donne le nombre de compactages en<br />

fonction de la teneur en eau au bout duquel le CBR<br />

est inférieur à 10. Si l'on place la valeur des w„<br />

moyennes sur ces courbes, il apparaît que le nombre<br />

N de compactages à partir duquel la portance est peu<br />

compatible avec la bonne exécution des travaux est :<br />

— pour Rouvray : 3 < N < 4<br />

— pour Incarville : l < N < 2<br />

— pour Sauqueville : 1 < N < 2<br />

— pour Pacy-sur-Eure : N < 2<br />

— pour Saint-Cloud : N < \<br />

Nous avons calculé pour chaque essai les valeurs de :<br />

V a<br />

= volume de l'air avec ys = 2,72<br />

Un CBR immédiat < 5 est obtenu sur les divers types<br />

de craie pour des valeurs de V a<br />

nettement différentes<br />

(tableau VIII).<br />

On pourra a priori « manipuler » la craie de Rouvray<br />

au-delà de la teneur en eau moyenne du gisement.<br />

TABLEAU VU!<br />

Types<br />

de<br />

craie<br />

Rouvray<br />

Incarville<br />

Sauqueville<br />

Pacy-<br />

sur-<br />

Eure<br />

Saint-<br />

Cloud<br />

\ Ro uvray<br />

\<br />

\<br />

N<br />

Sauquevill<br />

1 ncarvi<br />

S<br />

[ avy-sur-i-ui c<br />

N<br />

V<br />

w (%)<br />

correspondante<br />

moyenne<br />

% dans<br />

le gisement<br />

4 7 8 6 11<br />

23,5 19,3 19,4 21,6 22,5<br />

22 22,5 24,5 27 25,7<br />

Diffétence<br />

W — Wn + 1,5 -3,2 -5,1 -5,4 -3,2<br />

Sa nt-Clc ud y —<br />

18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 w %<br />

Fig. 19. — Nombre de compactages en fonction de la teneur en eau<br />

au bout duquel le CBR est inférieur à 10.<br />

Supposons que la teneur en eau diminue. Il peut<br />

alors y avoir consolidation (chemin fléché 1) et si<br />

les contraintes sont suffisantes, densification (chemin<br />

fléché 2), car les blocs de craie, encore proches de la<br />

saturation, offrent une résistance très faible à l'écrasement.<br />

Dans les deux cas, on peut s'attendre à des tassements<br />

non négligeables.<br />

Par contre, pour la craie de Sauqueville et Pacy-sur-<br />

Eure, il sera très difficile de la mettre en œuvre sans<br />

qu'apparaisse très rapidement le phénomène du coussin<br />

de caoutchouc : la différence w — w n<br />

est supérieure à<br />

l'étendue des valeurs de w„ pour Pacy-sur-Eure et égale<br />

à la moitié pour Sauqueville.<br />

Des précautions particulières seront à prendre avec<br />

la craie d'Incarville et de Saint-Cloud.<br />

Ces remarques s'accordent avec les constatations de<br />

chantier et avec les résultats obtenus avec l'essai de<br />

vibrobroyage.<br />

Il apparaît donc possible, à partir de compactages<br />

répétés, de fixer le mode d'extraction et de mise en<br />

œuvre conduisant à un minimum de manipulations<br />

permettant d'obtenir une « portance acceptable ».<br />

92


Comportement de la craie en chantier<br />

<strong>La</strong> craie est essentiellement un matériau évolutif.<br />

Des essais simples peuvent permettre, au cours de<br />

l'étude géotechnique, d'en préciser les limites d'utilisation<br />

et donc de fournir les éléments qui conduiront<br />

à une décision pour le maître d'oeuvre.<br />

Pour une craie donnée, l'évolution est liée au nombre<br />

de manipulations qu'elle subit.<br />

Examinons sur un chantier de terrassement ces différentes<br />

manipulations et leur effet.<br />

A l'extraction<br />

Hormis l'explosif, dont l'emploi ne semble jamais<br />

nécessaire dans le cas de craies stricto sensu, les<br />

chantiers modernes recourent à divers moyens, suivant<br />

les cas :<br />

— bouteur (bulldozer) + chargeur<br />

— décapeuse (scraper)+pousseur<br />

— défonceuse (ripper) + une des deux solutions précédentes<br />

— pelle travaillant en butte.<br />

Mis à part le cas de la pelle, peu répandu sur les chantiers<br />

importants, ces divers moyens se traduisent par<br />

une grande puissance de destruction vis-à-vis du matériau<br />

initial.<br />

Les chenilles du bouteur et les pneus des décapeuses<br />

ont une action de pétrissage très importante. Il est<br />

courant que la défonceuse (D9 - 3 dents montées sur<br />

parallélogramme) ait quelques difficultés à effectuer<br />

son travail pour extraire des blocs de dimension importante<br />

et qu'après un passage de chenille de bouteur<br />

et un passage de décapeuse, on n'ait plus qu'une<br />

craie-sol dont les éléments les plus gros ne dépassent<br />

pas 40 mm.<br />

<strong>La</strong> lame du bouteur poussant le matériau produit<br />

une attrition importante, on obtient dans ce cas des<br />

blocs émoussés (fig. 20a), ce qui n'est pas le cas<br />

dans l'extraction à la pelle en butte (fig. 20b).<br />

Enfin, dans le cas de craies très friables, il arrive que<br />

le défonçage ne soit pas nécessaire. <strong>La</strong> lame de la<br />

décapeuse « râpe » la craie comme l'on râperait une<br />

tablette de chocolat avec la lame d'un couteau et,<br />

dès le chargement, il ne subsiste presque plus de blocs<br />

de craie intacte.<br />

A la mise en œuvre<br />

Les opérations de mise en œuvre sont réalisées :<br />

— par les décapeuses, au camion ou au tombereau<br />

(dumper), pour l'approvisionnement. Cette manipulation<br />

modifie peu la granularité de la craie-sol ;<br />

— par un bouteur pour le régalage grossier. <strong>La</strong> puissance<br />

de cet engin est liée à la cadence d'approvisionnement.<br />

Il peut être de taille respectable (D9) si les<br />

cadences journalières dépassent 6 000 m 3 /jour. Son<br />

action de pétrissage (chenilles) et d'attrition (lame)<br />

a) <strong>Craie</strong> non rippée extraite au bulldozer ; blocs arrondis (avant<br />

chargement).<br />

Fig. 20. — Etat de la craie après diflei<br />

b) <strong>Craie</strong> extraite en butte ; blocs anguleux (avant chargement).<br />

modes d'extractions. <strong>Craie</strong> d'IncarvOIe.<br />

93


peut alors être très importante. Il assure aussi un<br />

précompactage non négligeable ;<br />

•— par la niveleuse (motoi grader) qui assure un nivellement<br />

fin de la plate-forme. Son action est assez superficielle,<br />

mais dans le cas de craies très humides, il<br />

peut effectuer, avec ses roues motrices surtout, une<br />

action de pétrissage non négligeable.<br />

Au compactage<br />

A ce stade, la craie a déjà subi au moins deux et le<br />

plus souvent trois manipulations.<br />

Les ateliers de compactage sont très variés et plus<br />

souvent fonction des disponibilités en matériel de<br />

l'entreprise que des exigences du chantier. Cela étant<br />

dû aussi au fait que jusqu'à ces derniers temps, on<br />

ne savait pas trop quel engin était le mieux adapté<br />

à ce type de matériau.<br />

Citons quelques ateliers couramment utilisés :<br />

— pneu lourd (type 791 Richier)+vibrant (Bomag<br />

BW 200),<br />

— vibrant tracté seul (ABG 13,5 tonnes),<br />

— engin à pieds dameurs (C 825 Caterpillar automoteur)<br />

+ rouleau à grilles.<br />

Pour une craie-sol à teneur en eau faible (voisine<br />

de 20 %), les pneus ne permettent pas d'obtenir des<br />

densités en place élevées. Les efforts transmis par<br />

les roues sont insuffisants pour briser au maximum<br />

les blocs de craie, le matériau se comportant alors<br />

comme un « sol rocheux ». Les densités obtenues même<br />

pour des couches inférieures à 0,35 m foisonné sont<br />

faibles (yd < 1,60) et il est courant d'observer, lors<br />

de la réalisation de tranchées, la présence de vides<br />

plus ou moins importants (fig. 21). Le pneu lourd<br />

associé à un vibrant (Bomag BW 200) dans les mêmes<br />

conditions donne des résultats bien meilleurs, la vibration<br />

jouant certainement un rôle très important<br />

(fait à lier avec l'essai de vibrobroyage).<br />

L'exécution de tranchées dans le remblai de Sotteville<br />

compacté au pneu lourd + vibrant a nécessité<br />

l'emploi d'une défonceuse et aucun vide décelable à<br />

l'œil nu n'a été observé sur les parois de la fouille.<br />

Le vibrant lourd seul permet d'obtenir des densités<br />

sèches plus fortes (yd ^ 1,60) que le pneu seul, mais<br />

son utilisation est souvent faite avec la mise en place<br />

de couches épaisses (> à 0,50 m). Il est probable,<br />

mais ce fait resterait à vérifier, que la densité en profondeur<br />

soit beaucoup plus faible. D'autre part, s'il<br />

est tracté, l'action de pétrissage par les chenilles du<br />

bouteur n'est pas à négliger.<br />

Dans le cas de craie humide (w > 20 %) ou de conditions<br />

météorologiques défavorables, la limite de circulation<br />

des engins à pneus et vibrants est très rapidement<br />

atteinte, ce qui, dans le meilleur des cas, conduit<br />

à l'arrêt du chantier ou, ce qui est moins souhaitable,<br />

surtout dans le cas de remblais importants, à une<br />

réduction de compactage. On se contente alors d'un<br />

léger « lissage » du matériau en utilisant soit un<br />

compacteur « délesté » (pneu) ou un vibrant « sans<br />

vibration ».<br />

Fig. 21. — Présence de vides lors de la réalisation d'un prélèvement<br />

pour la mesure de la teneur en eau sur un remblai compacté (A 13).<br />

Q.-CD<br />

30<br />

3.2 2S<br />

E-g<br />

S | 20<br />

"f S 1 5<br />

o<br />

10<br />

Diamètre des mailles<br />

des tamis en mm<br />

"1<br />

>0,08<br />

0,5<br />

-20<br />

31,5<br />

1 2 3 4 5 6 7 8<br />

Nombre de passages<br />

Fig. 22. — Evolution du fractionnement en fonction du nombre de<br />

passages d'un engin à pieds dameurs, le C 825 Caterpillar (craie du<br />

remblai du «four à chaux», A 15).<br />

Les engins à pieds dameurs ou les rouleaux à grilles<br />

utilisés sur des couches de faibles épaisseur (0,35 m) ont<br />

une puissance de destruction qui est de loin la plus<br />

importante de tous les compacteurs utilisés à notre<br />

connaissance sur la craie. Le C 825 Caterpillar peut<br />

produire à partir d'une craie-sol humide (w„ = 22 %)<br />

30 % d'éléments inférieurs à 0,08 mm pour huit aller<br />

et retour (fig. 22).<br />

Le grand nombre de manipulations auquel est soumise<br />

la craie au cours des travaux de terrassement<br />

conduit d'abord à la production d'un pourcentage<br />

de pâte plus ou moins important et ensuite, suivant<br />

les conditions d'humidité et sous l'action de pétrissage<br />

à une portance variable, et souvent rapidement<br />

très médiocre, dans le cas de craie" douteuse.<br />

<strong>La</strong> similitude entre les essais étudiés au chapitre<br />

« Recherche et mise au point d'essais mieux adaptés »<br />

et les constatations de chantier ci-dessus, nous ont<br />

incité à proposer, d'une part, un essai géotechnique<br />

permettant un classement rapide de toutes les craies<br />

et, d'autre part, un essai empirique et global répondant<br />

mieux aux problèmes de mise en œuvre et de compactage<br />

des craies douteuses.<br />

94


Recommandations pour l'étude géotechnique<br />

et la mise en œuvre de la craie<br />

Propositions d'une méthode d'étude de problèmes<br />

de terrassement dans la craie<br />

Pour l'étude géotechnique, M. Masson a montré<br />

qu'il y avait lieu de distinguer dans l'analyse des<br />

différents paramètres qui commandent le comportement<br />

d'une craie considérée dans son massif, les<br />

aspects suivants : géologique, pétrophysique, conditions<br />

de gisement.<br />

Il apparaît désormais possible d'apprécier au plus<br />

juste la qualité globale de ce matériau en s'appuyant,<br />

d'une part sur la mesure de ses caractéristiques physiques<br />

et mécaniques interprétées en liaison avec la<br />

connaissance de sa texture et d'autre part, sur l'étude<br />

d'un massif prenant en compte en particulier les hétérogénéités<br />

dues à la fissuration et à l'altération.<br />

Les éléments fournis par l'étude géologique, l'étude,<br />

pétrophysique et celle du massif permettent la prise<br />

en compte du comportement de masse de la craie<br />

et de la situer par rapport à une échelle de référence<br />

conduisant à un classement en craies tendres, craies<br />

moyennes, craies dures.<br />

Pour l'étude de terrassement il est indispensable de<br />

disposer d'essais empiriques permettant de donner<br />

un classement rapide du comportement lié aux travaux<br />

de terrassement en grande masse.<br />

Nous avons été conduits au classement suivant :<br />

— craies dangereuses,<br />

— craies douteuses,<br />

— craies bonnes.<br />

Ce classement de comportement doit tenir compte<br />

des problèmes posés à court terme (extraction, mise<br />

en œuvre, compactage) et à moyen ou long terme<br />

(densification, stabilité des remblais).<br />

Parmi les essais analysés dans notre étude, deux nous<br />

paraissent pouvoir répondre à ces préoccupations :<br />

— l'essai de vibrobroyage permettant de classer les<br />

craies ;<br />

— les essais de compactages répétés permettant de<br />

déterminer la sensibilité de la craie à la densification<br />

liée aux problèmes de portance et de stabilité.<br />

Il est adapté à toutes les craies, dures, douteuses et<br />

mauvaises, et permet d'effectuer un classement.<br />

En retenant un pourcentage de 30 % d'éléments<br />

inférieurs à 1,25 mm pour l'essai « saturé » et l'essai<br />

« saturé dans l'eau », on peut se proposer de classer<br />

les craies de la façon suivante :<br />

— production d'éléments inférieurs à 1,25 mm inférieurs<br />

à 30 % dans les deux cas, craies ne posant<br />

pas de problèmes en terrassement ;<br />

— production d'éléments inférieurs à 1,25 mm inférieurs<br />

à 30 % pour l'essai « saturé » et supérieurs<br />

pour l'essai « saturé dans l'eau », craies douteuses posant<br />

des problèmes en cas de conditions météorologiques<br />

défavorables ;<br />

— production d'éléments inférieurs à 1,25 mm supérieurs<br />

à 30 % dans les deux cas, craies dangereuses,<br />

difficiles à mettre en œuvre, même par conditions météorologiques<br />

favorables.<br />

Compactages répétés Proctor normal et poinçonnement<br />

CBR<br />

Ces essais effectués sur la fraction.0/20 permettent<br />

de juger du comportement global de la craie-sol et<br />

de définir par référence aux chantiers antérieurs les<br />

conditions d'extraction, de mise en œuvre et de compactage<br />

(nombre de manipulations).<br />

Il est possible d'en déduire :<br />

— la densité maximale de la craie-sol ;<br />

— le nombre critique de « manipulations » conduisant<br />

à une portance peu acceptable au regard des<br />

bonnes règles de terrassement ;<br />

— un avis sur les risques de densification et d'instabilité<br />

à moyen ou long terme des remblais de hauteur<br />

importante.<br />

Pour ce dernier point, il sera indispensable d'étudier<br />

et de réaliser comme des ouvrages d'art, les grands<br />

remblais en craie douteuse ou mauvaise. Il sera alors<br />

fait appel à des méthodes d'étude et de calcul très<br />

élaborées, intéressant la mécanique des sols.<br />

Recommandations pour l'extraction et la mise en<br />

œuvre des craies<br />

Essai de vibrobroyage<br />

C'est un essai qui paraît adapté aux problèmes d'évolution<br />

granulométrique et de sensibilité à l'eau, donc<br />

de mise en œuvre.<br />

Il est rapide et ne demande pas une longue préparation,<br />

il tient compte de l'hétérogénéité éventuelle de<br />

la craie (grand nombre de gravillons).<br />

<strong>Craie</strong>s bonnes<br />

Elles ne nécessitent a priori aucune précaution particulière,<br />

hormis les règles habituelles de bonne mise<br />

en œuvre.<br />

Signalons toutefois la nécessité de disposer des moyens<br />

d'extraction appropriés (défonceuse + décapeuse) pour<br />

réduire au maximum la présence d'éléments de taille<br />

95


trop importante et afin d'obtenir une granularité assez<br />

continue ainsi que de moyens de compactage lourds<br />

et efficaces pour éviter les risques de vides importants<br />

dans le remblai.<br />

<strong>Craie</strong>s douteuses<br />

Deux cas peuvent se présenter :<br />

• On ne craint pas de densification ultérieure et on.<br />

veut éviter l'apparition d'une faible portance à la mise<br />

en œuvre. Il faudra donc limiter au maximum le<br />

fractionnement des blocs.<br />

Cela pourra être obtenu par :<br />

— l'utilisation d'une pelle travaillant en butte au<br />

déblai et le transport au camion ou tombereau,<br />

— la mise en œuvre en couches n'excédant pas 30 cm<br />

compactées,<br />

— le compactage au pneu lourd.<br />

Il faudra toutefois protéger rapidement la plateforme<br />

de remblai pour éviter toute pénétration des<br />

eaux météorologiques.<br />

• Une densification est à craindre, mais on veut toujours<br />

disposer d'une portance acceptable.<br />

Le nombre de manipulations devra être important<br />

et donc les moyens d'extraction et de mise en œuvre<br />

très « agressifs ». Cela conduit à limiter l'emploi d'une<br />

telle technique aux craies douteuses ayant des teneurs<br />

en eau naturelles faibles et inférieures à 20 %.<br />

On pourra alors utiliser les moyens suivants :<br />

— défonceuse + bouteur,<br />

— décapeuse,<br />

— compacteur à pieds dameurs ou rouleau à grilles.<br />

<strong>Craie</strong>s dangereuses<br />

Pour ces craies, l'utilisation même des moyens légers<br />

pour l'extraction et la mise en œuvre conduisent très<br />

rapidement à l'obtention d'un massif très peu portant<br />

et instable.<br />

Elles seront à déconseiller pour l'utilisation en terrassement,<br />

excepté pour des remblais de hauteur<br />

inférieure à 2 m ne devant supporter une infrastructure<br />

qu'un an au moins après leur mise en œuvre.<br />

Dans cette catégorie on doit ajouter les craies douteuses<br />

à forte teneur en eau manipulées avec des moyens trop<br />

puissants.<br />

Recommandations pour la mise en remblai des craies<br />

douteuses<br />

En liaison avec l'étude réalisée pour le remblai de<br />

Val-Guyon 5<br />

plusieurs cas peuvent se présenter.<br />

Remblai de faible hauteur (0 à 5 m)<br />

<strong>La</strong> densification est peu à craindre, elle sera peu dangereuse,<br />

excepté aux abords des ouvrages et des bords<br />

de talus où des précautions particulières seront à<br />

prendre. Il n'y a pas de problème de stabilité. On pourra<br />

donc tolérer la mise en œuvre de craies à teneur en eau<br />

élevée. Les compacités seront faibles.<br />

Seuls les problèmes de mise en œuvre se poseront dans<br />

ce dernier cas. Il faudra donc limiter au maximum le<br />

fractionnement des blocs. Cela pourra être obtenu<br />

comme décrit au paragraphe « <strong>Craie</strong>s douteuses ».<br />

On devra disposer d'une solution d'appoint en cas<br />

de mauvaise condition de mise en œuvre : traitement<br />

localisé, purges, méthode sandwich, pour assurer la<br />

continuité du chantier.<br />

Remblai de grande hauteur (> 12 m)<br />

Ces remblais devront être conçus comme des ouvrages<br />

d'art.<br />

Ils ne pourront être réalisés dans de bonnes conditions<br />

de travail qu'avec des craies à teneur en eau faible<br />

(w < 20 %). Le nombre de manipulations devra être<br />

important pour fractionner au maximum les blocs<br />

les plus tendres et éviter les phénomènes de densification<br />

ultérieurs.<br />

<strong>La</strong> compacité à atteindre devra être maximale (voisine<br />

ou égale à 1,70 par exemple pour la craie du Val-<br />

Guyon) pour obtenir des R c<br />

> 2 bars.<br />

Pour cela, à l'extraction et à la mise en œuvre, il<br />

faudra utiliser des moyens puissants (Cf. paragraphe<br />

« <strong>Craie</strong>s douteuses »).<br />

Si la craie a des teneurs en eau en place supérieures<br />

à 20 %, on ne pourra dans ce cas accepter la craie<br />

en remblai que dans de mauvaises conditions de mise<br />

en œuvre conduisant à l'obtention de R c<br />

et de compacité<br />

faibles et au risque d'instabilité mécanique (fluage,<br />

fissures).<br />

On sera donc conduit à adopter des solutions améliorant<br />

la mise en œuvre et la stabilité à long terme :<br />

— méthode sandwich (sable ou grave) : méthode la<br />

moins efficace en ce qui concerne les risque d'apparition<br />

de contraintes de traction ;<br />

— traitement au ciment ou aux cendres volantes<br />

+chaux ;<br />

— armature du remblai (méthode peu utilisée à ce<br />

jour, mais qui devrait donner de bons résultats si<br />

l'on sait bien définir la place des armatures et leur<br />

nature).<br />

Enfin, chaque fois que cela sera possible dans le cas<br />

d'un tel ouvrage, il sera préférable d'évacuer les<br />

craies dangereuses à la décharge.<br />

5. Cf. article de A. de Raguenel.<br />

96


BIBLIOGRAPHIE<br />

[1] ARQUIÉ G., Le compactage routes et pistes. Ed. Eyrolles Paris (1970), 316 p.<br />

[2] Compactation de terrenos-terraplenes y pedraplenes. Ed. Técnicos asociados S.A., Barcelone (1966),<br />

261 p.<br />

[3] GERBER, Hydraulique souterraine. Cours de l'Université de Toulouse, Ed. de l'AGET (1964).<br />

[4] LEWIS J.G. et CRONEY D., Chalk in earthworks and fondations (la craie dans les terrassements et les<br />

fondations). Proceeding du symposium tenu à l'Institution of Civil Engineer le 22 avril 1965.<br />

[5] PARSONS A.S., Earthworks in soft chalk. A study of some of the factors affecting construction - RRL<br />

Report LR 112 - Road Research laboratory.<br />

[6] REVERDY G., Quatre-vingts maximes de terrassements routiers. Revue générale des Routes, 429 (fév.<br />

1968), p. 57-87.<br />

[7] TCHENG Y., Etude du compactage - Ann. ITBTP (juil.-août 1963), p. 725-727.<br />

Cet article a été publié dans le Bulletin de Liaison des <strong>La</strong>boratoires des Ponts et Chaussées, r,° 63,janv.-fév. 1973.<br />

97


Etude par vibrobroyage<br />

de l'aptitude<br />

des craies au compactage<br />

R. STRUILLOU*<br />

Docteur en géologie<br />

Département de géotechnique<br />

<strong>La</strong>boratoire central<br />

introduction<br />

Normalement, la prévision du comportement des matériaux au compactage<br />

peut se faire correctement en se référant aux résultats des essais<br />

Proctor et CBR, à la comparaison entre la teneur en eau et la limite<br />

de plasticité wP, et aux données de Vexpérience acquise dans le traitement de matériaux similaires.<br />

Malheureusement, avec les craies, les essais Proctor et CBR classiques semblent inadaptés, les<br />

mesures de limites de plasticité sont très imprécises et l'expérience est à peu près inutilisable dans<br />

la mesure où on ne dispose pas de critères bien définis pour opérer les comparaisons entre les divers<br />

chantiers. On est donc très mal armé pour effectuer des prévisions à l'occasion d'un projet de remblai<br />

de craie, en particulier si les teneurs en eau w sont supérieures à 20 %.<br />

Une position très prudente consiste à considérer que le compactage devient aléatoire dès que la<br />

teneur en eau est supérieure à la limite de plasticité des fines. Cela revient à admettre que la craie<br />

risque de se désagréger complètement au cours du compactage et donc de se comporter en matériau<br />

pulvérulent.<br />

Une telle position ne me semble pas réaliste dans la mesure où la pulvérisation n'est jamais complète.<br />

Le maître a"œuvre est tenté de considérer une telle prévision comme pessimiste, et par conséquent,<br />

de vouloir mettre en place des matériaux dont la teneur en eau est largement supérieure à wP, cela<br />

en espérant que l'influence bénéfique du squelette constitué par les blocs résiduels compensera le<br />

rôle néfaste des fines très humides. Mais, en prenant cette décision, il évolue complètement dans<br />

l'inconnu et prend donc de très gros risques. Cela a d'ailleurs été malheureusement vérifié par<br />

des expériences récentes.<br />

A mon sens, si on veut que la prévision serve à quelque chose, il faut qu'elle prenne en compte aussi<br />

bien le rôle bénéfique des blocs résiduels, que l'influence néfaste des fines. Cela pourrait théoriquement<br />

être réalisé à l'aide d'un essai global de compactage artificiel, avec mesure de portance<br />

(genre CBR par exemple) à condition que le compactage soit du même type que celui réellement<br />

utilisé sur le chantier (c'est-à-dire, au moins en partie, vibratoire) et rencontre les mêmes difficultés<br />

que lui. Le problème serait donc de remplacer les essais Proctor et CBR classiques, par un autre<br />

essai plus adapté à la craie, et qui permette de prendre en compte la formation progressive de fines<br />

au cours du compactage.<br />

Dans le travail présent, je me suis intéressé à une seconde voie, qui pourrait être complémentaire<br />

de la précédente, et qui serait susceptible de conduire à des conclusions facilement utilisables pour<br />

l'orientation générale des chantiers et une première sélection des matériaux, en particulier au<br />

stade des études préliminaires. Elle consisterait à caractériser, d'une part, l'aptitude de la craie<br />

à donner des fines au cours des diverses opérations de la mise en œuvre, et d'autre part, le rôle<br />

nocif des fines formées. Le raccordement des résultats de laboratoire aux difficultés de chantier<br />

devraient alors se faire à l'aide de facteurs empiriques qui seraient précisés progressivement à<br />

l'aide des observations accumulées sur le terrain pour des matériels Ue mise en œuvre et des craies<br />

bien identifiées.<br />

Actuellement maître de recherche à l'École nationale supérieure des Mines<br />

99<br />

Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch. - Spécial V - Octobre 1973


Evaluation de l'aptitude d'une craie à donner des éléments fins<br />

L'aptitude d'une craie* à donner des éléments fins<br />

est évidemment fonction aussi bien de ses caractéristiques<br />

propres que de celles des engins utilisés.<br />

Elle dépend de sa teneur en eau, de sa densité, de la<br />

nature et de la disposition de ses divers composants,<br />

de la résistance de ses liaisons intercristallines.<br />

Malheureusement, on ne sait pas pondérer l'influence<br />

de ces facteurs variés et souvent non chiffrables.<br />

<strong>La</strong> seule solution pratique reste donc de les<br />

faire agir ensemble dans un essai de laboratoire faisant<br />

intervenir des mécanismes de destruction de la<br />

craie aussi proches que possible de ceux qui existent<br />

sur les chantiers.<br />

Les matériels d'extraction — en particulier les engins<br />

à lame : décapeuse (scraper), bouteur (bulldozer)<br />

— et ceux de compactage ont pour effet d'écraser<br />

les blocs de craie et de détruire leurs arrangements<br />

cristallins, par pression ou vibration. Les écrasements<br />

se font soit par contact direct engin sur bloc,<br />

soit surtout par attrition et par poinçonnement en<br />

chaîne des blocs entre eux. C'est donc en utilisant,<br />

au laboratoire, un mode de destruction du même type<br />

que l'on a, a priori, la probabilité maximale d'obtenir<br />

des résultats transposables sur le chantier.<br />

Le vibrobroyage me paraît être particulièrement adapté<br />

à ce problème. Il consiste, en effet, à soumettre<br />

des granulats, éventuellement humides, à l'action<br />

destructrice d'un galet cylindrique plein et mobile<br />

dans un bol métallique animé d'un mouvement<br />

vibratoire intense. Sous l'effet des vibrations, les granulats<br />

se compactent autour du galet qui, par inertie,<br />

les pousse les uns contre les autres. Le résultat<br />

global obtenu (pourcentage d'éléments fins formés)<br />

est donc une combinaison des effets de l'attrition,<br />

du poinçonnement et des vibrations.<br />

MODE OPÉRATOIRE<br />

UTILISÉ POUR LE VIBROBROYAGE<br />

Nous avons utilisé un vibrobroyeur « Auxiliaire de<br />

construction, type T 100» avec un galet cylindrique<br />

plein, en acier, de 700 g (h = 45 mm, d = 50 mm),<br />

et un temps d'usure de 30 s (fig. 1). <strong>La</strong> courbe granulométrique<br />

retenue a été une courbe linéaire entre<br />

5 et 20 mm en représentation semi-logarithmique<br />

(5/20 régulier). Pour chaque essai nous avons<br />

utilisé un volume constant de granulats de poids<br />

P — 180 yd (avec yd = densité sèche de la craie),<br />

c'est-à-dire :<br />

— - de 5/6,3, 6,3/8, 8/10, 10/12,5 ;<br />

— — de 12,5/14, 14/16, 16/18, 18/20.<br />

12<br />

Avant usure, les matériaux ont été séchés, puis concassés,<br />

puis tamisés au vibrotamis, puis lavés, puis<br />

à nouveau séchés.<br />

L'usure a été réalisée soit sur matériaux secs, soit<br />

sur matériaux réhumidifiés dans diverses conditions.<br />

L'évaluation des quantités d'éléments fins formés<br />

par usure a été obtenue par pesée des refus à 1,25 mm<br />

après tamisage manuel à cette dimension, sous courant<br />

d'eau, puis séchage.<br />

RÉSULTATS DES ESSAIS DE VIBROBROYAGE<br />

Influence de la teneur en eau sur l'usure<br />

Le tableau et la figure 2 donnent les résultats obtenus<br />

sur six craies différentes, usées à diverses teneurs en<br />

eau (de 0 à environ 100 à 115 %) avec la teneur en eau<br />

poids d'eau total dans le vibrobroyeur<br />

poids de craie sèche dans le vibrobroyeur<br />

Pour la craie de la butte de Sèvres-Meudon, les points<br />

à 15 et 20 % d'eau correspondent à une aspersion<br />

du matériau sec.<br />

Pour toutes les autres humidifications, on a procédé<br />

de la façon suivante :<br />

— immersion des granulats pendant 1 h dans l'eau,<br />

— égouttage sur tamis couvert pendant 15 mn,<br />

— pesée des granulats humides et détermination<br />

(approximative) de la teneur en eau interne,<br />

— ensuite, soit usure directe de la craie humide<br />

(points situés entre 15 et 26 % d'eau), soit usure de<br />

la craie humide après adjonction de 250 g d'eau dans<br />

le bol du vibrobroyeur (points extrêmes entre 95 et<br />

115 % d'eau). Cela permet de séparer le rôle de l'eau<br />

interne des granulats et celui de l'eau libre externe.<br />

On constate pour une même craie, une faible dispersion<br />

des résultats d'usure et des teneurs en eau<br />

interne après 1 h d'immersion et une usure linéaire<br />

en fonction de la teneur en eau globale (somme des<br />

eaux interne et externe) tant que l'usure ne dépasse<br />

pas 80 %. L'influence de l'asymptote à 100 % d'usure<br />

ne se fait sentir qu'au-delà de ce chiffre, ce qui se<br />

traduit par l'incurvation de la droite (craie de Pacysur-Eure).<br />

* <strong>La</strong> liste des symboles utilisés dans cet article est reportée<br />

in fine.<br />

100


On peut donc en déduire que le vibrobroyage constitue<br />

un moyen très commode pour caractériser<br />

l'aptitude d'une craie à donner naissance à des<br />

éléments fins sous l'effet d'une action mécanique<br />

du même type. Il suffit en effet de deux points du<br />

domaine linéaire pour tracer la droite U = aw + b<br />

(avec U et w en pourcentage) caractéristique du matériau<br />

(par exemple l'usure à sec et l'usure à une teneur<br />

en eau quelconque, en particulier après 1 h d'immersion<br />

et 15 mn d'égouttage, ce qui donne une teneur en<br />

eau proche de la teneur en eau naturelle moyenne).<br />

A partir de ces deux points, on peut déterminer<br />

tous les autres, sans essai complémentaire.<br />

L'eau interne des granuláis et Veau externe libre<br />

jouent strictement le même rôle, ce qui est très<br />

important et assez inattendu. C'est la teneur en<br />

eau globale qui intervient dans la formation des<br />

éléments fins. Cela est précieux, en particulier<br />

pour prévoir, après une pluie, le comportement de<br />

la dernière couche d'un remblai où les teneurs en<br />

eau externe peuvent être très fortes.<br />

Fig. 1. — Le vibrobroyeur « Auxiliaire de contraction, type T 100 »<br />

ouvert.<br />

L'eau interne et l'eau externe jouant strictement<br />

le même rôle, on peut en déduire que l'eau interne<br />

n'a qu'une influence secondaire sur la force des<br />

liaisons intercristallines dans la craie. Celles-ci ont<br />

donc une autre origine.<br />

101


Evaluation de la nocivité des fines de craie<br />

en fonction de leur teneur en eau<br />

<strong>La</strong> figure 2 montre que, pour une énergie mécanique<br />

donnée, une même quantité de fines peut être<br />

obtenue avec des teneurs en eau très diverses suivant<br />

les craies envisagées. Or les propriétés mécaniques<br />

de fines sont très sensibles à de faibles variations de<br />

teneur en eau. Une augmentation absolue de 6 %<br />

peut en effet permettre le passage du comportement<br />

non plastique au comportement liquide. On a en<br />

effet les limites d'Atterberg moyennes suivantes :<br />

w P<br />

« 21 % ; w L<br />

« 27 % ; /, « 6 %.<br />

Il me semble donc indispensable de caractériser la<br />

nocivité des fines vis-à-vis du compactage.<br />

ESTIMATION DE L'INDICE DE LIQUIDITÉ<br />

DES FINES DE CRAIE FRANCHE<br />

Je pense que le critère le plus simple et le plus représentatif<br />

pour caractériser le rôle néfaste des fines<br />

dans le compactage est leur indice de liquidité I L<br />

.<br />

Il prend, en effet, en référence la situation de la teneur<br />

en eau w„ par rapport aux teneurs en eau w P<br />

et w L<br />

correspondant aux limites de plasticité et de liquidité,<br />

c'est-à-dire à deux états essentiels du point de<br />

vue à la fois minéralogique et mécanique :<br />

_ w n<br />

-w P<br />

_<br />

w„-w P<br />

IL , — " •<br />

I P<br />

w L<br />

-w P<br />

Malheureusement, les mesures de w P<br />

sont très difficiles<br />

et imprécises avec les fines de craies franches à cause<br />

de leur thixotropie entre w L<br />

et w P<br />

. C'est à tel point<br />

vrai que la dispersion sur w P<br />

, pour une craie donnée,<br />

est équivalente à la dispersion des moyennes obtenues<br />

sur les diverses craies franches.<br />

Dans ces conditions, la mesure directe de w P<br />

ne signifie<br />

plus grand chose pour ces matériaux. Cela n'empêche<br />

pas que w P<br />

joue certainement un rôle prépondérant<br />

dans le compactage des fines de craie. Son<br />

influence y est même plus importante qu'avec les<br />

autres produits pulvérulents pour lesquels on la<br />

mesure facilement, les argiles du type kaolinite<br />

par exemple. En effet, dans les fines de craie, comme<br />

dans celles des autres produits fins dont toutes les<br />

surfaces ont des déficits de charges électriques de même<br />

signe (surfaces électropositives pour la calcite, surfaces<br />

électronégatives pour le quartz, etc.), la thixotropie<br />

prend une très grande ampleur dès que la teneur<br />

en eau w est supérieure à w P<br />

et que l'on se trouve en<br />

régime dynamique. Le phénomène est évidemment<br />

particulièrement accentué dans le compactage vibratoire<br />

qui représente un moyen très efficace de rendre<br />

à la liberté l'eau faiblement liée aux particules de<br />

calcite (c'est-à-dire l'eau adsorbée au-dessus de w P<br />

)<br />

qui établit normalement des ponts entre elles en<br />

régime statique. Cela étant réalisé, les particules,<br />

entourées de leurs auréoles d'eau orientée (eau<br />

fixée pour w < w P<br />

), à comportement uniformément<br />

électropositif, se repoussent entre elles comme pour<br />

w < w P<br />

, mais ici en présence d'eau provisoirement<br />

libre. Il en résulte un comportement « liquide »<br />

transitoire qui cesse dès que l'on revient en régime<br />

statique.<br />

On comprend dès lors que w P<br />

joue un rôle plus important<br />

dans ce type de matériaux que dans les argiles<br />

kaolinitiques par exemple, où l'existence simultanée,<br />

dans une même particule, de surfaces « électropositives<br />

» (surfaces latérales) et de surfaces « électronégatives»<br />

(surfaces basales) permet l'établissement de<br />

liaisons entre particules même si, par des vibrations,<br />

on a rendu à la liberté l'eau faiblement liée fixée<br />

précédemment au-dessus de w P<br />

. En effet, les surfaces<br />

électropositives et électronégatives s'attirent mutuellement<br />

et il s'établit ainsi des liaisons « surface<br />

latérale » contre « surface basale » qui empêchent le<br />

développement du comportement « liquide » et de<br />

la thixotropie, même en régime dynamique avec w<br />

compris entre w P<br />

et w L<br />

.<br />

Si w est inférieur à w P<br />

, ces liaisons entre surfaces de<br />

signe différent subsistent, et avec elles, un certain<br />

comportement « plastique ».<br />

•<br />

En résumé, pour les fines de craies franches (comme<br />

pour les fines de quartz), w P<br />

représente, en régime<br />

dynamique, le passage brusque du comportement<br />

« non plastique » (absence de liaisons entre particules<br />

et absence d'eau libre) au comportement « liquide »<br />

(absence de liaison entre particules et présence d'eau<br />

libre). Pour la kaolinite au contraire, le comportement<br />

« plastique » commence bien avant w P<br />

et se<br />

continue jusqu'à w L<br />

, sans aucune transition brusque.<br />

Dans ce cas, w P<br />

représente un point de repère arbitraire<br />

et non une discontinuité dans le comportement<br />

du matériau. Cela explique les grandes difficultés<br />

que l'on rencontre pour les craies franches dans la<br />

détermination de w P<br />

par la technique du « boudin<br />

d'Atterberg». En effet, en cours de manipulation,<br />

on est en régime dynamique avec w supérieur à w P<br />

.<br />

L'eau « libérée » se concentre dans certaines zones.<br />

Le boudin a donc toujours tendance à se briser ou<br />

à se désagréger, soit à cause du comportement « non<br />

plastique» anormal de certaines de ses parties, soit,<br />

au contraire, à cause du comportement « liquide »<br />

anormal, de certaines autres.<br />

102


Pour la kaolinite, au contraire, la faiblesse de la thixotropie<br />

permet une détermination précise et reproductible<br />

de w P<br />

. Mais, paradoxalement, cette détermination<br />

a moins d'importance que pour les fines<br />

de craie où elle est très délicate à réaliser.<br />

Dans ces conditions, et compte tenu de la constance<br />

de composition minéralogique des craies franches<br />

(plus de 95 % de CaC0 3<br />

), je crois que la meilleure<br />

solution est de tenter de trouver une méthode indirecte<br />

pour la détermination de leur limite de plasticité.<br />

Pour leurs fines exemptes de granulats polycristallins,<br />

les variations de w P<br />

, w L<br />

et I P<br />

sont des fonctions de<br />

la taille des cristaux de calcite, le rôle des impuretés<br />

étant probablement négligeable. En effet, pour<br />

w P<br />

, il correspond une épaisseur e x<br />

constante d'eau<br />

fortement liée et orientée autour de chaque cristal.<br />

De même, pour w L<br />

, la couche d'eau faiblement liée<br />

surimposée à la précédente a une épaisseur constante<br />

e 2<br />

s o n t<br />

. Les valeurs e x<br />

et e 2<br />

caractéristiques<br />

du minéral calcite et non de la craie considérée.<br />

Les volumes globaux de ces couches d'épaisseur e x<br />

et e 2<br />

sont donc proportionnels à la surface externe S<br />

des cristaux de calcite supposés non poreux. On aura<br />

donc: WpXCi-S et w L<br />

x(e 1<br />

+e 2<br />

)-S avec:<br />

— S (cm 2 /g de craie sèche),<br />

—• e x<br />

et e 2<br />

(cm)<br />

donc : w P<br />

x( ——— ] w L<br />

.<br />

Vi + eJ<br />

Théoriquement donc pour déterminer ——— il<br />

suffirait d'avoir avec précision w P<br />

et w L<br />

pour les<br />

fines monocristallines d'une seule craie. En réalité,<br />

nous avons vu plus haut que nous ne disposions<br />

pas de ces données à cause des difficultés de mesure<br />

de w P<br />

. Je propose donc de prendre en référence, au<br />

moins provisoirement, les valeurs moyennes des limites<br />

d'Atterberg des diverses craies franches telles<br />

qu'elles apparaissent à partir de nombreux essais<br />

imparfaits réalisés à ce jour sur des matériaux pour<br />

lesquels w L<br />

est inférieure à la teneur en eau maximale<br />

des agrégats w s<br />

:<br />

wP = 21 ; wL = 27 ; I P<br />

= 6.<br />

En effet, dans ce cas, l'état de fragmentation des<br />

matériaux, et donc les manipulations n'ont que peu<br />

d'influence sur wP et wL.<br />

« . • 2 1 / ^ 2 1<br />

On obtient alors : e, = — (e\+e 2<br />

) et : w P<br />

= —w L<br />

27 27<br />

6<br />

T<br />

27w n<br />

— 21 w f<br />

soit : 7, = — w L<br />

et I L<br />

= "- * .<br />

27 6w L<br />

Ces expressions de w P<br />

et I L<br />

en fonction de w L<br />

sont<br />

précieuses, car la détermination de w L<br />

, contrairement<br />

à celle de w P<br />

est assez facile, précise et reproductible,<br />

à la coupelle granuleuse de Casagrande.<br />

Toute rupture de la continuité du matériau est repérable<br />

en cours d'essai et conduit à des points anormaux<br />

qu'il faut éliminer du calcul des moyennes.<br />

Pour les essais qui se passent normalement, on obtient,<br />

en général moins d'un point de différence pour deux<br />

épreuves parallèles. Une moyenne sur trois ou quatre<br />

essais donne w L<br />

à moins de ± 0,5 point.<br />

Le raisonnement qui précède n'est valable, d'une façon<br />

générale, que pour les fines dépourvues de microagrégats<br />

; dans la réalité ceux-ci existent toujours.<br />

a) w P<br />


Pour le faire, il me semble qu'il faut toujours<br />

se référer à des fines fabriquées suivant un mode<br />

opératoire constant.<br />

FABRICATION DES FINES DE CRAIE POUR<br />

LA MESURE DE w L<br />

Nous proposons provisoirement le mode opératoire<br />

suivant :<br />

— préparation d'un lot de 300 g environ de gravillons<br />

secs 5/20 réguliers (50 g de 5/6,3, 6,3/8, 8/10,<br />

10/12,5 et 25 g de 12,5/14, 14/16, 16/18, 18/20),<br />

— immersion pendant une heure dans 300 g d'eau,<br />

— usure pendant 5 mn dans les 300 g d'eau précédents,<br />

— tamisage à 400 ii et récupération des fines,<br />

— séchage partiel,<br />

— mesure de w L<br />

à la coupelle granuleuse de Casagrande<br />

(aux alentours de 25 coups),<br />

, , , x 27w_ —21w t<br />

— calcul de IL = avec w„ = teneur<br />

6wL<br />

en eau naturelle de la craie prévue pour le compactage.<br />

Le tableau donne les résultats w L<br />

obtenus sur cinq<br />

craies diverses usées par ailleurs. Les fines ainsi<br />

obtenues, simulent probablement assez bien les fines<br />

les plus dangereuses formées sur les chantiers. Par<br />

ailleurs, leur teneur en micro-agrégats est, a priori,<br />

en relation directe avec la sensibilité à la microfragmentation<br />

sur chantier.<br />

TABLEAU<br />

Résultats expérimentaux obtenus pour les usures par vibrobroyage<br />

et les mesures de limites de liquidité w L<br />

sur les fines de vibrobroyage<br />

Teneur<br />

en eau<br />

(%)<br />

globale<br />

interne<br />

Eléments < 12,5 mm<br />

après vibrobroyage<br />

(%)<br />

U- aw+b<br />

externe<br />

Résultats Moyenne a b<br />

WL*<br />

(%)<br />

Y* W s** Observations<br />

Sèvres<br />

Meudon<br />

Belbeuf<br />

0 0 0 15,6-16,0 15,8<br />

15 15 0 20,6 20,6<br />

20 20 0 23,4 23,4 0,40 15,8 29<br />

26,2 26,2 0 26,4-25,9 26,1<br />

115 25,8 89,2 59,0-64,0 61,5<br />

0<br />

0 0 8,7- 9,3 9,0<br />

25,5<br />

(25 à 26) 15,7 27<br />

14,7 14,7 0 14,9-13,6 14,2 0,29 9,0 28 15,7 1,75 20<br />

95 14,1 80,9 36,5-36,0 36,2<br />

0 0 0 14,0-14,6 14,3<br />

Rouvray 23,1 23,1 0 19,4-20,4 19,9 0,20 14,3<br />

108 23,1 84,9 37,0-36,0 36,5<br />

0 0 0 15,8-15,7 15,7<br />

Sauqueville 19,9 19,9 0 27,1-25,0 26,0 0,50 15,7 24<br />

112 19,9 92,1 72,8-72,5 72,6<br />

0 0 0 18,1-17,4 17,7<br />

Pacy-sur-Eure 25,8 25,8 0 43,3-45,4 44,4 1,0 17,7 30<br />

115 26,0 89,0 91,5-92,9 92,2<br />

0 0 0 17,4-18,1 17,8<br />

Incarville 21,3 21,3 0 34,4-30,9 32,6 0,63 17,8 25<br />

110 21,6 88,4 85,5-88,6 87,0<br />

* Limite de liquidité sur fines de vibrobroyage<br />

** Teneur en eau à saturation des agrégats<br />

18<br />

(14 à 22)<br />

26<br />

(24 à 28)<br />

24<br />

(20 à 28)<br />

22<br />

(16 à 26)<br />

Pas utilisé<br />

en remblai<br />

Pas utilisé<br />

en remblai<br />

1,60 26 Sans<br />

problèmes<br />

1,54 28<br />

1,58 27<br />

1,56 27<br />

Chantier<br />

catastrophique<br />

1/3 décharge<br />

avec<br />

la décapeuse<br />

1/3 décharge<br />

avec la pelle<br />

104


Evaluation rapide de l'aptitude globale<br />

des craies franches au compactage<br />

<strong>La</strong> difficulté du compactage Y d'une craie franche, à une teneur en eau donnée, dépend :<br />

— de son aptitude à donner des fines, que l'on peut caractériser par l'essai de vibrobroyage<br />

U = aw + b (¡7 et w en %) ;<br />

— de l'indice de liquidité IL de ces fines IL = 27w — 2lw L<br />

6wL<br />

— des caractéristiques du mode d'extraction : X ±<br />

;<br />

— des caractéristiques du mode de compactage : X 2<br />

;<br />

soit : Y = f(U, IL, X u<br />

X 2<br />

).<br />

Le pourcentage et la microfragmentation des fines dépendent des caractéristiques de chantier<br />

X t<br />

et X 2<br />

. Celles-là doivent donc être considérées comme des correctifs des données de laboratoire.<br />

FORMULATION DE LA DIFFICULTÉ DU COMPACTAGE D'UNE CRAIE HOMOGÈNE<br />

Pour une teneur en eau critique w c<br />

, correspondant à une valeur critique Y c<br />

de Y, le compactage<br />

correct n'est plus possible.<br />

Si tout le matériau est constitué par des fines, on a :<br />

U = 100 %. Dans ce cas, on sait que w c<br />

x w P<br />

.<br />

Cela est d'ailleurs valable, au moins approximativement, pour tous les matériaux fins pulvérulents,<br />

aussi bien la craie que les argiles.<br />

Nous pouvons alors fixer la forme probable de l'expression Y :<br />

soit pour les craies franches :<br />

Y = —-—I L<br />

-X,-X 2<br />

,<br />

100-1/<br />

aw + b 27 w — 2lw L<br />

Y = ^ f l ; . (1)<br />

100-(aw + b) 6w L<br />

est une constante carac­<br />

Pour une chaîne d'extraction et de compactage donnée, K = YJX 1<br />

-X 2<br />

téristique correspondant au compactage critique.<br />

On peut écrire pour les craies franches :<br />

K<br />

_ aw c<br />

+b 27w c<br />

-2\w L =<br />

U 27w c<br />

-21w L<br />

^<br />

soit :<br />

100-(aw c<br />

+ b) 6w L<br />

100-1/ 6w L<br />

1<br />

w c<br />

=<br />

54a<br />

A + s/A +108 awLB 2 (3)<br />

avec : A = (2l-6K)aw L<br />

-27b<br />

B = 216 + 6X(100-6).<br />

105


Détermination provisoire de K<br />

<strong>La</strong> détermination des diverses valeurs de K correspondant aux différentes chaînes d'extraction<br />

et de compactage ne peut se faire que d'une façon empirique sur les chantiers si on connaît la<br />

teneur en eau critique wc au-delà de laquelle le compactage acceptable est devenu impossible,<br />

ainsi que a, b et wL.<br />

Pour le moment, nous ne disposons d'éléments que pour deux chantiers répondant à cette condition<br />

: Pacy-sur-Eure et Incarville. Dans les deux cas, le compactage semble avoir été mené d'une<br />

façon à peu près équivalente à l'aide de compacteurs lourds à pneus puis vibrants.<br />

Par contre le mode d'extraction a été différent :<br />

— extraction à la décapeuse à Pacy-sur-Eure ;<br />

— extraction à la pelle à Incarville.<br />

A l'aide des données de ces deux chantiers, on peut donc tenter de calculer au moins un ordre<br />

de grandeur provisoire de la valeur de K pour le compactage classique précédé soit d'une extraction<br />

à la décapeuse, soit d'une extraction à la pelle.<br />

a) Extraction à la décapeuse - Compactage « pneu + vibrant »<br />

Chantier de Pacy-sur-Eure<br />

U = w+18 soit a=letô = 18<br />

wL = 30 % ; wc « 25 %<br />

soit d'après l'équation (2) : Kiicapeuse x 0,2.<br />

b) Extraction à la pelle - Compactage « pneu + vibrant »<br />

Chantier d'Incarville.<br />

U = 0,63w + 6 soit a = 0,63 et b = 18<br />

wL = 25 % wc x 23 %<br />

soit d'après l'équation (2) : KpeUe « 0,3.<br />

Détermination provisoire de la teneur en eau critique wc<br />

L'application des valeurs de K à l'expression (3) donne :<br />

a) Extraction à la décapeuse - Compactage a pneu + vibrant»<br />

1<br />

54^<br />

A + V^2<br />

+ 108flw L<br />

Bj<br />

(4)<br />

avec : A = 20 a wL — 27 b<br />

B = 20è + 120.<br />

b) Extraction à la pelle - Compactage « pneu + vibrant »<br />

C<br />

pelle<br />

54 a<br />

[A + \/A 2 +108 awLB<br />

(5)<br />

avec : A = 19 a wL — 21b<br />

B = 19 6 + 180.<br />

MÉLANGES HÉTÉROGÈNES DE MATÉRIAUX DIFFÉRENTS<br />

Une bonne caractérisation d'un gisement conduit toujours à y distinguer plusieurs familles de<br />

matériaux à peu près homogènes, qu'il serait éventuellement possible de traiter individuellement<br />

106


lors des terrassements. Les distinctions portent alors, par exemple, sur les différences d'altération,<br />

d'étage géologique ou de teneur en eau.<br />

Si le compactage d'une famille i de craies caractérisée par U t<br />

et w t<br />

s'annonce difficile ou impossible<br />

(w ;<br />

> (w c<br />

)i), il peut être intéressant d'essayer d'éviter sa mise à la décharge en la mélangeant<br />

avec des matériaux d'une autre famille j caractérisée par Uj et Wj et dont le compactage<br />

s'annonce très favorable Wj nettement inférieur à (wc)j.<br />

Si une telle combinaison n'était pas envisageable en utilisant les différentes familles de craies<br />

d'un même déblai, il pourrait être intéressant de tenter de combiner entre elles les diverses familles<br />

de deux ou trois déblais différents pour la réalisation d'un même remblai. Si cette technique<br />

permettait d'éviter les mises à la décharge, elle pourrait entraîner des économies importantes,<br />

compensant très largement les sujétions d'organisation de chantier qu'elle entraînerait, en particulier<br />

dans les cas de déficit important de remblai intéressant.<br />

En cas d'extraction séparée en déblai, la mise en œuvre se ferait alors, en général, suivant la<br />

technique des couches minces en « sandwich » de façon que, à chacune de ses passes, le compacteur<br />

ait à densifier un mélange hétérogène des deux matériaux. Par contre, dans le cas d'une extraction<br />

globale des deux familles de craies (par exemple si l'extraction se faisait « en butte», à la pelle<br />

sur un front sub-vertical comprenant à la fois les matériaux altérés superficiels et les matériaux<br />

profonds sains), le compactage se ferait sur un mélange plus ou moins homogène des deux matériaux.<br />

Dans les deux cas, on aboutirait, sous l'effet du compacteur vibrant, à un mélange intime des<br />

fines formées par l'une et l'autre des craies, en particulier à cause du processus de remontée<br />

et de migration de ces fines. Leurs caractéristiques moyennes correspondraient à la pondération<br />

des caractéristiques de leurs composants (w et w L<br />

).<br />

On pourrait donc écrire, à partir de l'expression (1) :<br />

Y x 1<br />

U 1<br />

+(l-x 1<br />

)U 2<br />

X l<br />

X 2<br />

100-[x l<br />

U i<br />

+(l-x L<br />

)U 2<br />

] 1 r 27[x 1<br />

t/ 1<br />

w 1<br />

+ (l-x 1<br />

)t/ 2<br />

w 2<br />

] _<br />

21"<br />

(6)<br />

avec : — x L<br />

: teneur du mélange en matériau « 1 »,<br />

— x 2<br />

: teneur du mélange en matériau « 2 »,<br />

— Xy + X 2<br />

= 1,<br />

— f/, = a í<br />

w l<br />

+b í<br />

(essai de vibrobroyage),<br />

— U 2<br />

= a 2<br />

w 2<br />

+ b 2<br />

(essai de vibrobroyage),<br />

— Wj et w 2<br />

: teneurs en eau des matériaux 1 et 2.<br />

L'expression (6) pourrait servir à résoudre deux problèmes pratiques différents.<br />

a) Connaissant la répartition des matériaux, soit x l<br />

et x 2<br />

= l — x lt<br />

et leurs caractéristiques<br />

w u<br />

w 2<br />

, (w L<br />

) l<br />

, (w L<br />

) 2<br />

, C/j et U 2<br />

, le compactage acceptable est-il possible ?<br />

Il le sera si l'inéquation (7) est vérifiée :<br />

x l<br />

U i<br />

+(l-x 1<br />

)U 2<br />

27[x 1<br />

L7 1<br />

w 1<br />

+(l-x 1<br />

)L r 2w 2<br />

]-21[x 1<br />

I7 1<br />

(w 1<br />

) 1<br />

+(l-x 1<br />

)I/ 2<br />

(w L<br />

)i] UI e t U 2<br />

des deux matériaux, dans<br />

quelles proportions faut-il effectuer le mélange pour que le compactage acceptable soit<br />

possible, c'est-à-dire quelles valeurs doit-on donner àx 1<br />

etx 2<br />

= l — x i<br />

l<br />

Pour cela, il suffit de résoudre l'équation (8) pour en tirer x l<br />

K =<br />

x l<br />

U 1<br />

+(l-x 1<br />

)U 2<br />

27[x 1<br />

f71Wi +(1 -Xi)l/ 2<br />

w 2<br />

] -21[x 1<br />

t/ 1<br />

(vvJ 1<br />

+(l-x i<br />

)U 2<br />

(w L<br />

) 2<br />

]<br />

10Q-[x 1<br />

V 1<br />

+0--Xi)U 2<br />

] 6 [*! U 1<br />

(w L<br />

) 1<br />

+(1 -x 1<br />

)L/ 2<br />

(w L<br />

) 2<br />

]<br />

107


soit :<br />

K = 0,2 pour l'extraction à la décapeuse (valeur provisoire)<br />

K = 0,3 pour l'extraction à la pelle (valeur provisoire)<br />

U 1<br />

= a 1<br />

w l<br />

+ b 1<br />

; U 2<br />

= a 2<br />

w 2<br />

+ b 2<br />

; A = (U 1<br />

— U 2<br />

) ;<br />

B 1<br />

= U lWi<br />

; B 2<br />

= U 2<br />

w 2<br />

; C = (B l<br />

- B 2<br />

) ;<br />

Dj. = l/i(wr)i î D 2<br />

= U 2<br />

( WL<br />

) 2<br />

; E = (D t<br />

— D 2<br />

) ;<br />

F = (100-C/ 2<br />

); G = (27C-21£); (9)<br />

H = (27B 2<br />

-21D 2<br />

); M = A [G + 6EK~\ ;<br />

JV = AH+U 2<br />

G + 6K(AD 2<br />

-EF); P = U 2<br />

H-6KD 2<br />

F ;<br />

1<br />

2M<br />

X2 = 1 X j<br />

Si le matériau « 2» n'est plus de la craie mais une grave propre à faible teneur en eau externe,<br />

à granularité insensible aux engins et se compactant bien, les expressions (8) et (9) se simplifient<br />

car U2 x 0.<br />

On obtient alors les expressions (10) et (11) :<br />

K =<br />

X i U l 27w<br />

i~ 21 (wz)i . 1 Q )<br />

lOO-XiUi 6(w L<br />

) 1<br />

soit :<br />

100 K<br />

U t<br />

+K<br />

avec :<br />

, T<br />

. 27 w,— 21 (wr), . , , . +<br />

(I L<br />

) 1<br />

= = indice de liquidité des fines de la craie 1 (11)<br />

6(w L<br />

),<br />

C/i = a^w^ + bi (vibrobroyage)<br />

K = 0,2 pour l'extraction à la décapeuse (valeur provisoire)<br />

K = 0,3 pour l'extraction à la pelle (valeur provisoire)<br />

En pratique, il serait évidemment prudent d'augmenter légèrement la proportion du meilleur matériau<br />

par rapport au résultat donné par l'équation (9) ou (11) de façon à se placer sensiblement<br />

en deçà des conditions de compactage critique.<br />

Par ailleurs, il serait également prudent d'adopter pour w 1<br />

et w 2<br />

, dans les équations (7), (9) et<br />

(11) les valeurs w x<br />

= (w m<br />

)i + °'i e t w i = W2+ f f 2<br />

avec :<br />

w m<br />

= teneur en eau moyenne de la craie considérée.<br />

a = écart type des teneurs en eau de la craie considérée.<br />

Conclusion<br />

Bien que le présent travail doive être considéré simplement comme la phase préliminaire<br />

d'une recherche ultérieure plus approfondie, il semble que l'on devrait pouvoir déterminer déjà,<br />

avec une précision acceptable, la teneur en eau critique w c<br />

d'une craie au-delà de laquelle un compactage<br />

correct risque d'être difficile sinon impossible avec un ensemble de matériels donné.<br />

Ce qui manque le plus actuellement, ce sont les exemples précis et concrets où la limite de compactage<br />

critique a été atteinte. A l'avenir, chaque fois que cela sera possible, des prélèvements systématiques<br />

devront être réalisés, en boîtes étanches, dans les matériaux correspondants afin de permettre,<br />

d'une part, des mesures de teneur en eau globale et d'usure au vibrobroyeur et, d'autre part, des<br />

raccordements entre les résultats de laboratoire et les caractéristiques des chaînes d'extraction


et de compactage effectivement utilisées sur les chantiers. Il serait bon que les prélèvements soient<br />

effectués éventuellement par les entreprises de compactage qui sont, probablement, les plus directement<br />

intéressées par cette affaire.<br />

Je pense qu'il serait déjà possible de retenir, provisoirement, pour le compactage mixte « pneu +<br />

vibrant» et pour, soit l'extraction par engins à lame, soit l'extraction à la pelle, respectivement<br />

les expressions (4) et (5) de la teneur en eau critique w c<br />

.<br />

Vinterprétation des résultats pourraient être la suivante, avec w = la teneur en eau de la craie<br />

lors du compactage. :<br />

w < 0,Sw L<br />

: peu de problèmes de compactage ;<br />

0,8w L<br />

< w < w c<br />

— 2 : compactage acceptable possible mais peut-être difficile ;<br />

w c<br />

— 2 ^ w < w c<br />

: compactage difficile et imparfait, mais probablement acceptable ;<br />

w c<br />

< w < w c<br />

+1 : compactage très difficile et probablement inacceptable ;<br />

w ^ w c<br />

+1 : compactage acceptable impossible.<br />

Je suis persuadé qu'ainsi utilisée, cette méthode, malgré ses imperfections certaines, peut déjà<br />

rendre de grands services au géologue ou au géotechnicien à qui on demande de prévoir le comportement<br />

au compactage d'une craie inconnue. Par sa rapidité et sa souplesse, elle parait être particulièrement<br />

adaptée aux études préliminaires dont dépend souvent l'efficacité de l'organisation<br />

ultérieure du chantier. Le problème pratique est alors de caractériser des volumes de craie à peu<br />

près homogènes par leurs propriétés et susceptibles de donner lieu à un traitement particulier à<br />

l'échelle du terrassement et du compactage ou, éventuellement, à des mélanges (extraction globale<br />

ou compactage en « sandwich » ) dont la composition pourra être étudiée à l'aide des expressions<br />

(7), (9) ou (11).<br />

L'utilisation de la méthode ne doit pas exclure celle des autres essais (Proctor, recherche du compromis<br />

optimal entre la densité sèche et le CBR, identificationpétrophysique, etc), mais au contraire,<br />

faciliter le choix des échantillons représentatifs pour ces derniers.<br />

En résumé, le mode opératoire préconisé serait le suivant :<br />

— prélèvement d'échantillons représentatifs par une technique modifiant le moins possible les<br />

teneurs en eau (échantillonnage soit manuel en tranchées ou en puits, soit par sondage, si possible<br />

du type carottier battu, Highway ou Benoto, sinon par carottage normal avec prélèvement, au<br />

cœur des carottes, pour mesure des teneurs en eau) ;<br />

— conservation en boîtes étanches des échantillons destinés aux mesures de teneur en eau;<br />

— détermination des teneurs en eau naturelles w„ avec leur dispersion;<br />

— classement des échantillons par familles, en tenant compte à la fois des données du gisement<br />

et de celles des mesures de teneur en eau;<br />

— séchage et concassage d'échantillons représentatifs des diverses familles;<br />

— confection de mélanges 5/20 réguliers pour chaque famille après tamisage au vibrotamis, lavage<br />

et séchage;<br />

— usure du 5/20 régulier au vibrobroyeur avec un galet cylindrique plein de 700 g pendant 30 s,<br />

d'une part à sec, et d'autre part, après une immersion d'une heure dans l'eau et un égouttage d'un<br />

quart d'heure sur tamis couvert;<br />

— détermination pour chaque famille des paramètres a et b de la droite d'usure<br />

U = aw + b;<br />

— usure dans l'eau pendant 5 mn, au vibrobroyeur muni d'un galet de 700 g, de 300 g environ<br />

de craie 5/20 (poids sec) de chaque famille immergée depuis 1 h dans environ 300 g d'eau (usure<br />

à une teneur en eau w = 100 %), puis tamisage sous l'eau des fines inférieures à 400 microns<br />

formées;<br />

— détermination de la limite de plasticité w L<br />

des fines ainsi fabriquées pour chaque famille;<br />

— calcul de w c<br />

pour la valeur de K correspondant à la chaîne extraction-compactage choisie<br />

(expressions (4) et (5) ) ;<br />

— comparaison, pour chaque famille, de w c<br />

avec w n<br />

en tenant compte des dispersions de w„;<br />

— interprétation globale des résultats, à l'échelle du chantier, par comparaison des histogrammes<br />

w n<br />

des diverses familles avec les w c<br />

correspondantes et en envisageant les variations de w„ susceptibles<br />

de se produire au cours du chantier (assèchement par temps ensoleillé ou par gros vent,<br />

humidification par temps de pluie) ;<br />

109


— choix des modes d'extraction et de compactage les plus adaptés a priori;<br />

— évaluation des cubages de décharge éventuels dans l'hypothèse d'une extraction aveugle;<br />

— recherche d'une solution pour réduire le volume des décharges en combinant entre elles les<br />

diverses familles de craie du gisement, et en faisant éventuellement appel à des mélanges avec<br />

des craies ou d'autres matériaux provenant d'autres gisements (expressions (7), (9) et (11),) ;<br />

— étude éventuelle d'une solution faisant appel à des adjuvants chimiques ( ciment, chaux vive, etc.).<br />

Ainsi conçu, le schéma d'investigation donne une part prépondérante aux teneurs en eau qui représentent<br />

la caractéristique à la fois la plus importante et la plus rapidement mesurable d'une craie<br />

destinée à être mise en remblai.<br />

LISTE DES SYMBOLES<br />

a Pente de la droite d'usure en vibrobroyage.<br />

b Ordonnée à l'origine de la droite d'usure en<br />

vibrobroyage (% d'usure à teneur en eau nulle).<br />

e x<br />

Epaisseur constante d'eau fortement liée, orientée<br />

autour de chaque cristal de calcite (cm).<br />

e 2<br />

Epaisseur constante d'eau faiblement liée, orientée<br />

autour de chaque cristal de calcite (cm).<br />

I L<br />

Indice de liquidité (%).<br />

I P<br />

Indice de plasticité ( %).<br />

K Constante caractéristique du compactage critique<br />

pour un ensemble de matériels donné.<br />

S Surface spécifique externe des cristaux de calcite<br />

(cm 2 /g).<br />

U Pourcentage des fines obtenues après l'essai de<br />

vibrobroyage.<br />

w Teneur en eau ( %).<br />

w c<br />

Teneur en eau critique ( %).<br />

w L<br />

Limite de liquidité ( %).<br />

w a<br />

Teneur en eau naturelle (%).<br />

w P<br />

Limite de plasticité (%).<br />

w s<br />

Teneur en eau maximale des agrégats ( %).<br />

X x<br />

Caractéristiques du mode d'extraction.<br />

X 2<br />

Caractéristiques du mode de compactage.<br />

Y Difficulté de compactage d'une craie.<br />

Y c<br />

Valeur critique de la difficulté de compactage.<br />

yd Densité sèche de la craie.<br />

110


<strong>La</strong> craie<br />

et les ouvrages d'art<br />

Séance sous la présidence de M. Legrand,<br />

Adjoint au Directeur du <strong>La</strong>boratoire central<br />

des Ponts et Chaussées.


Fondations dans la craie<br />

F. BAGUELIN<br />

Chef de la section des fondations<br />

<strong>La</strong>boratoire central<br />

introduction<br />

Cet exposé n'a pas pour prétention de traiter tous les problèmes qui<br />

peuvent se poser à l'occasion de travaux de fondations dans la craie,<br />

mais il se limite à un aspect assez particulier à ce matériau et qui est la<br />

détermination de la force portante (niveau de la fondation et taux de travail) et les méthodes de<br />

reconnaissance à utiliser.<br />

Par ailleurs, on aura essentiellement en vue la craie tendre telle qu'on la rencontre dans la région<br />

de Paris.<br />

Certains points ne seront pas applicables à d'autres craies, celle de Touraine pour citer un exemple,<br />

généralement plus dure et dans certains cas très sableuse. On s'est en effet surtout appuyé sur l'expérience<br />

de chantiers réalisés au voisinage de Paris, sur l'étude synthétique de MM. Florentin,<br />

L'Hériteau, Farhi et Parez [1], qui concerne des craies du Bassin parisien, et enfin sur Vétude expérimentale<br />

réalisée au pont d'Oissel (A 13), relatée par M. Pasturel [5].<br />

L'écueil principal à éviter dans la détermination de la force portante de fondations sur craie est<br />

probablement la tendance au pessimisme, que Von acquiert facilement lorsqu'on aborde l'étude<br />

par sondages carottés et essais mécaniques sur échantillons, et qui peut provenir aussi des résultats<br />

de battages, généralement trop faciles.<br />

Nous examinerons donc successivement les points suivants, à la fois pour la craie franche et pour<br />

la craie altérée qui la recouvre en plus ou moins grande épaisseur, et qui est tout autant digne d'intérêt<br />

dans les problèmes de fondations :<br />

— prélèvements et essais mécaniques sur échantillons,<br />

— essais mécaniques en place,<br />

— méthodes de calcul,<br />

— observations et expérimentations sur ouvrages.<br />

113<br />

Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch. - Spécial V - Octobre 1973


1<br />

PRÉLÈVEMENTS ET ESSAIS<br />

SUR ÉCHANTILLONS<br />

MÉCANIQUES<br />

<strong>La</strong> figure 1 présente un exemple de résultats de carottage<br />

dans la craie campanienne au voisinage de Paris.<br />

Il est très fréquent d'obtenir des pourcentages de<br />

carottages réduits dans la partie altérée : c'est le cas<br />

lorsqu'on a des blocs de dimensions centimétriques<br />

à décimétriques emballés dans une gangue plus ou<br />

moins marneuse ; cette dernière peut se trouver<br />

éliminée complètement. Ces problèmes ne sont pas<br />

spécifiques à la craie et se présentent plus généralement<br />

avec les matériaux composites, comportant à la<br />

fois des éléments durs et une matrice plus molle.<br />

L'impression que l'on retire de l'examen de tels<br />

carottages est très souvent défavorable, surtout pour<br />

le non-spécialiste.<br />

Les essais mécaniques ne peuvent être pratiqués que<br />

sur les blocs qui sont représentatifs du matériau sain,<br />

ou bien sur la gangue dans la mesure où il en reste ;<br />

si l'on est amené à la reconstituer, on peut légitimement<br />

se poser la question de savoir quel est alors son<br />

rapport avec le matériau en place. Les essais susceptibles<br />

d'être effectués sont indiqués ci-dessous.<br />

Uessai de résistance à la compression simple R c<br />

est<br />

réalisé sur des blocs de craie saine (fig. 2 et 3).<br />

Les conditions d'humidité peuvent faire varier de<br />

manière importante (du simple au double) le résultat.<br />

<strong>La</strong> protection des échantillons est donc nécessaire si<br />

l'on veut obtenir des informations représentatives<br />

du matériau en place. Néanmoins, malgré ces précautions,<br />

on note généralement une assez grande<br />

dispersion des résultats.<br />

L'essai triaxial est difficile à effectuer sur des échantillons<br />

de craie saine. Par ailleurs, la gamme de contraintes<br />

intéressantes dans les problèmes de fondations<br />

ne dépasse pas quelques dizaines de bars. Ayant<br />

constaté une grande variation de la résistance à la<br />

compression simple, qui n'est autre qu'un essai triaxial<br />

rapide à contrainte latérale


T(bar)<br />

Le frottement latéral unitaire est généralement faible.<br />

Ce phénomène s'observe aussi avec d'autres types<br />

de sols, mais est particulièrement marqué pour la<br />

craie, à tel point que l'effort de frottement latéral<br />

total peut même décroître avec la profondeur [1].<br />

<strong>La</strong> figure 6 illustre ce phénomène entre les profondeurs<br />

de 11 et 15 mètres.<br />

Pressiomètre<br />

Fig. 4. —<br />

X (bar)<br />

a(bar)<br />

Essais triaxiaux sur la craie franche, effet de la dispersion.<br />

<strong>La</strong> sonde est mise en place dans un forage préalable<br />

et l'essai peut être pratiqué aussi bien dans la zone<br />

de craie franche que dans la zone de craie altérée.<br />

Le forage peut s'effectuer de diverses façons : par<br />

outil plein (taillant de wagon-drill), par carottier<br />

battu type Delmag ou par carottier à rotation.<br />

On sait d'une manière générale que les résultats de<br />

l'essai pressiométrique sont sensibles au mode de<br />

réalisation du forage ou de la mise en place de la<br />

sonde [2]. C'est pour diminuer ces variations systématiques<br />

qu'un mode opératoire a été mis au point [4].<br />

Néanmoins, la pression limite reste dans une large<br />

mesure peu affectée et caractérise généralement bien<br />

la réaction de masse du sol.<br />

Fig. 5. —<br />

1 2 3 4 o-(bar)<br />

Essais triaxiaux sur la craie molle ((pont de Grenelle).<br />

En conclusion, on peut retenir que les prélèvements<br />

intacts dans la craie sont généralement très difficiles,<br />

surtout dans la partie altérée, et que les essais mécaniques<br />

ne peuvent souvent pas être faits dans de<br />

bonnes conditions. <strong>La</strong> résistance à la compression<br />

simple est sans doute le paramètre le plus significatif<br />

pour la craie saine, encore que ses valeurs expérimentales<br />

présentent souvent une grande dispersion.<br />

ESSAIS MÉCANIQUES EN PLACE<br />

On examinera successivement les essais au pénétromètre<br />

statique, au pressiomètre et les essais de battage.<br />

Pénétromètre statique<br />

Le pénétromètre statique permet en général de reconnaître<br />

la zone altérée, le refus s'obtenant souvent<br />

assez rapidement dans la craie saine. Suivant la<br />

densité et la grosseur des blocs, les diagrammes de<br />

pénétration de la pointe présentent des pics plus ou<br />

moins accusés et nombreux. <strong>La</strong> valeur des minimums<br />

dépend du diamètre de la pointe, phénomène lié au<br />

broyage des blocs [1].<br />

Fig. 6. —<br />

Essai au pénétromètre statique de 10 t (Saint-Cloud).<br />

116


1<br />

Notons aussi que le forage préalable permet d'obtenir<br />

en outre d'autres informations : courbe de battage<br />

et extraction de terrain remanié (carottier battu),<br />

courbe d'avancement (outil plein).<br />

Essais de battage<br />

En général, la pénétration dynamique s'avère relativement<br />

aisée et les rapports de la résistance correspondante<br />

aux divers paramètres tirés d'essais de type<br />

statique sont plus faible, que pour d'autres sols.<br />

Fig. 7. — Essai pressiométrique (Boulogne-Billancourt).<br />

Ainsi, on obtient une image pessimiste de ce matériau.<br />

Citons quelques valeurs typiques :<br />

— le nombre de coups nécessaires à un enfoncement<br />

de 10 cm du carottier battu Delmag peut rester voisin<br />

de 5 dans la craie moyennement altérée (P, de l'ordre<br />

de 15 bars) ;<br />

— des essais de battage de palplanches réalisés en<br />

Seine conduisent à des frottements latéraux moyens<br />

apparents de l'ordre de 0,1 bar.<br />

MÉTHODES DE CALCUL<br />

Il semble toutefois que l'essai pressiométrique mis<br />

en œuvre par les moyens précités reste encore pessimiste<br />

dans les parties altérées, à en juger par les valeurs<br />

faibles généralement obtenues pour le rapport EjP l<br />

(de l'ordre de 5 contre 10 généralement) et également<br />

par l'observation de certaines fouilles dont l'état<br />

s'est avéré meilleur qu'on ne pouvait le penser.<br />

Un profil pressiométrique typique est donné (fig. 7),<br />

faisant apparaître la partie altérée.<br />

Un autre exemple est fourni par les résultats obtenus<br />

sur le chantier du pont d'Oissel [5] ; les fourchettes<br />

de valeurs sont données dans le tableau.<br />

Etat de la craie Pi (bar) E (bar)<br />

<strong>Craie</strong> très altérée à consistance<br />

marneuse 7 à 12 40 à 60<br />

<strong>Craie</strong> altérée très morcelée 20 à 30 150 à 300<br />

<strong>Craie</strong> massive, fissurée, peu<br />

altérée > 35 300 à 500<br />

D. Pasturel note que les dispersions sont plus élevées<br />

dans la craie altérée très morcelée.<br />

On trouve des résultats tout à fait comparables pour<br />

la craie de Paris, notamment dans la boucle de la<br />

Seine à Boulogne-Billancourt.<br />

En résumé, l'essai pressiométrique peut fournir des<br />

indications valables sur la réaction de masse de la<br />

craie massive ou altérée, quoiqu'un peu pessimiste<br />

dans le cas de cette dernière.<br />

Pour les fondations de type superficiel (semelles,<br />

radiers, caissons), il est usuel de déterminer la force<br />

portante en utilisant deux critères : un critère de<br />

poinçonnement et un critère de tassement.<br />

Pour les fondations profondes (pieux), on se contente<br />

en général du premier, et deux termes sont pris en<br />

compte : la résistance de pointe et le frottement<br />

latéral.<br />

Pour exploiter les essais de laboratoire, qui fournissent<br />

des paramètres mécaniques ponctuels, on utilise<br />

des théories relatives à des massifs semi-indéfinis :<br />

théorie de la capacité portante pour évaluer la pression<br />

de poinçonnement, théorie élastique pour évaluer<br />

les tassements. On sait que les coefficients de portance<br />

Ny, Nq, Nc dépendent éminemment de l'angle de<br />

frottement du matériau sous le type de chargement<br />

considéré, paramètre qu'il est en fait difficile de déterminer<br />

pour la craie altérée et la craie franche.<br />

Cette approche n'est guère possible que pour certaines<br />

craies altérées ne comportant pas de blocs. Par exemple<br />

dans le cas d'un chantier à Boulogne-Billancourt<br />

(fig. 8), on a pu mesurer sur la craie molle en partie<br />

supérieure des caractéristiques à l'essai triaxial rapide<br />

non drainé :<br />

C„ = 1 à 2 bars


5<br />

= 0, ce qui conduit à considérer le matériau doué<br />

d'une cohésion égale à RJ2. En fait, on a vu que la<br />

résistance à la compression simple présente généralement<br />

des valeurs expérimentales dispersées, et sur<br />

la base d'essais de plaque et d'essais de pieux, Florentin<br />

et al. [1] préconisent d'adopter plutôt une valeur de<br />

la cohésion fictive égale au 1/3 de la valeur moyenne<br />

de R c<br />

. Le coefficient de portance N c<br />

correspondant<br />

vaut 10 pour une fondation profonde et de 5 à 7<br />

pour une fondation superficielle, suivant sa forme.<br />

Les essais pressiométriques fournissent des paramètres,<br />

pression limite P, et module pressiométrique E, caractéristiques<br />

de l'expansion d'une cavité cylindrique<br />

au sein d'un massif indéfini, phénomène qui présente<br />

une analogie certaine avec le refoulement du sol sous<br />

la base d'une fondation profonde et même, quoiqu'à<br />

un moindre degré, avec le refoulement du sol sous<br />

une fondation superficielle. Il n'est donc pas étonnant<br />

qu'on ait cherché à corréler de manière simple les<br />

paramètres pressiométriques avec ceux caractérisant<br />

le comportement des fondations [3]. <strong>La</strong> formule<br />

donnant la pression de poinçonnement est :<br />

qi = k(Pi-Po) + qo<br />

Le facteur k est le facteur de portance dépendant de<br />

l'encastrement relatif et de la nature du sol. Il vaut<br />

0,8 pour les semelles non encastrées et pour les pieux<br />

fichés dans la craie, on peut opter pour une valeur<br />

comprise entre 3,5 et 5,8 suivant la nature de la craie ;<br />

D. Pasturel [5] adopte :<br />

— 3,5 pour la craie très altérée de consistance marneuse,<br />

— 5,8 pour la craie roche fissurée et non altérée.<br />

Les calculs de tassements dans la craie effectués par<br />

la méthode pressiométrique sont probablement pessimistes,<br />

notamment pour la craie altérée, compte tenu<br />

du remaniement apporté par le forage.<br />

Les essais au pénétromètre statique présentent évidemment<br />

une analogie certaine avec le pieu, au moins<br />

soit q t<br />

= 0,5 R p<br />

,<br />

— pour le frottement latéral / : 1/40<br />

soit / = — p .<br />

40<br />

OBSERVATIONS ET EXPÉRIMENTATIONS<br />

SUR OUVRAGES<br />

Les difficultés d'étude du matériau craie et les limitations<br />

des méthodes de calcul sont apparues clairement.<br />

Les méthodes les plus élaborées qui tentent de prévoir<br />

le comportement de la fondation à partir de paramètres<br />

mécaniques élémentaires sont en fait très<br />

sensibles à de faibles variations de ces paramètres ;<br />

or, ces derniers sont très difficiles à mesurer sur<br />

éprouvettes dans la gamme de contraintes utiles pour<br />

les problèmes de fondations ; par ailleurs, l'effet du<br />

prélèvement peut difficilement être estimé dans la<br />

plupart des cas.<br />

Les méthodes les plus simples ont recours à un seul<br />

paramètre mesuré, jugé de manière plus ou moins<br />

intuitive, déterminant et représentatif pour le problème<br />

de la force portante : soit un paramètre mécanique<br />

élémentaire, la résistance à la compression simple<br />

R c<br />

, utilisable dans le cas de la craie franche ; soit un<br />

paramètre caractéristique d'une sollicitation analogue<br />

à celle des fondations, résistance de pointe R p<br />

dans<br />

le cas de l'essai pénétrométrique, pression limite P,<br />

dans le cas de l'essai pressiométrique. Le passage à<br />

la fondation se fait par le jeu de simples coefficients<br />

multiplicateurs. Le caractère empirique de ces méthodes<br />

est évident et elles nécessitent d'être calées<br />

sur l'expérience.<br />

De là l'intérêt des observations et expérimentations<br />

en vraie grandeur, malheureusement peu nombreuses.<br />

Deux références [1 et 5] ont été mentionnées au début<br />

de l'exposé :<br />

— dans la première, on rapporte des essais de chargement<br />

sur trois pieux battus préfabriqués en béton<br />

118


0. 40 x 0,40 m. Des essais de plaque au fond de forages<br />

de pieux sont aussi mentionnés ;<br />

— dans la deuxième, il s'agit de quatre essais de<br />

chargement, l'un effectué sur un pieu en béton armé,<br />

les trois autres sur un pieu caisson formé de deux<br />

palplanches <strong>La</strong>rssen III, fichés à trois niveaux différents<br />

et chargés avec des délais de repos variables.<br />

Les principales observations sont les suivantes :<br />

1. Les résistances dynamiques sont faibles. Dans le<br />

premier cas [1], la formule des hollandais utilisée avec<br />

un coefficient réducteur de 6 donne des charges admissibles<br />

de 35, 90, 20 tonnes, alors que les essais de<br />

chargement montrent un comportement du pieu tout<br />

à fait admissible sous la charge nominale de 80 tonnes.<br />

Dans le deuxième cas [5], on a évalué la résistance<br />

dynamique « limite » à partir de formules prenant<br />

en compte les raccourcissements élastiques, du pieu<br />

et du sol notamment (formule de Léonards et Chellis).<br />

Les valeurs ainsi obtenues sont proches de celles<br />

évaluées pour le terme de pointe seulement par la<br />

méthode pressiométrique.<br />

2. <strong>La</strong> craie se reconstitue après le battage. <strong>La</strong> craie<br />

est brisée et désorganisée par le battage et devient<br />

sans doute proche de l'état liquide. Cependant laissée<br />

au repos, elle regagne une certaine résistance dans<br />

les jours qui suivent. Cela peut être observé lors des<br />

reprises de battage qui donnent des résistances élevées<br />

aux premiers coups de mouton ; les essais du pont<br />

d'Oissel effectués avec un délai de repos allant de 1<br />

à 10 jours montrent de façon nette cet effet. En raisonnant<br />

sur les estimations pressiométriques, il semble<br />

que ce soit le frottement latéral dans la craie altérée<br />

qui y soit essentiellement soumis.<br />

Notons que le mécanisme de ce phénomène n'est pas<br />

encore élucidé : deux facteurs doivent jouer dans<br />

des proportions qui ne sont pas connues, la dissipation<br />

des surpressions interstitielles dues au battage<br />

et une restructuration de la craie (thixotropie).<br />

3. <strong>La</strong> capacité portante des pieux dans la craie peut<br />

être évaluée à partir de la résistance à la compression<br />

simple R c<br />

suivant les règles indiquées précédemment,<br />

ce qui conduit usuellement à des fichesde 3 à 5 diamètres<br />

seulement dans la craie, « abstraction faite de<br />

la couche décalcifiée de surface » [1].<br />

Elle peut aussi être évaluée à partir de la méthode<br />

pressiométrique qui a été en bon accord avec les<br />

résultats des essais statiques de chargement [5] dans<br />

la craie altérée chaque fois que le délai de repos a<br />

été suffisant.<br />

<strong>La</strong> méthode pénétrométrique a, par ailleurs, été<br />

étalonnée sur quelques essais de chargement [1].<br />

4. Des essais de plaques sur la craie altérée montrent<br />

son très bon comportement de masse.<br />

Bien que des corrélations n'aient pas été relatées<br />

dans ces deux références, l'essai pressiométrique<br />

s'avère en pratique convenable pour calculer les<br />

fondations superficielles dans la craie altérée.<br />

Ces observations et expérimentations fournissent<br />

donc une base raisonnable d'évaluation de la capacité<br />

portante de la craie et permettent d'éviter un pessimisme<br />

excessif. Notons cependant qu'elles sont en<br />

nombre très limité et qu'en ce qui concerne les pieux,<br />

elles ont trait uniquement à des pieux battus et sont<br />

des vérifications globales, sans que les parts respectives<br />

du frottement latéral et de la pointe aient été déterminées<br />

1 .<br />

Des observations, notamment de tassements, pour<br />

des fondations superficielles sur la craie altérée seraient<br />

en outre souhaitables pour mieux apprécier la validité<br />

des méthodes actuellement utilisables.<br />

1. Depuis lors, des essais de chargements ont été réalisés à<br />

Boulogne-Billancourt sur deux pieux forés de 0,60 m de diamètre,<br />

fichés dans la craie altérée. Les dispositions ayant été<br />

prises pour mesurer séparément les efforts de frottement latéraux<br />

et l'effort de pointe, ces essais ont montré que la craie<br />

altérée (Pi 15 bars) pouvait fournir un frottement latéral unitaire<br />

élevé et ainsi constituer une couche de fondation parfaitement<br />

valable, alors qu'il avait été question initialement de<br />

descendre jusqu'à la craie saine. Les résultats de ces essais paraîtront<br />

prochainement dans le Bulletin de Liaison des <strong>La</strong>boratoires<br />

des Ponts et Chaussées.<br />

Conclusion<br />

<strong>La</strong> craie est un matériau difficile à étudier, spécialement sur échantillons prélevés par carottage,<br />

et qui offre une résistance au battage généralement faible.<br />

Les essais en place de type statique permettent d'appréhender sa réaction de masse utile pour les<br />

problèmes de capacité portante.<br />

Corrélés avec quelques observations et expérimentations sur ouvrages, ils fournissent une base raisonnable<br />

de dimensionnement, notamment des fondations sur pieux. Une autre méthode consiste<br />

à utiliser la résistance à la compression simple R c<br />

.<br />

De toute manière, la craie s'avère comme un matériau de fondations tout à fait convenable.<br />

119


BIBLIOGRAPHIE<br />

[1] FLORENTIN, L'HÉRITEAU, FARHI et PAREZ, Observations faites sur la craie comme couche de fondation,<br />

Comptes rendus du V e<br />

Congrès International de Mécanique des Sols et de Travaux de Fondations,<br />

Paris (1961), 1, p. 10.<br />

[2] JÉZÉQUEL, LEMASSON et TouzÉ, Le pressiomètre L. MÉNARD : quelques problèmes de mise en œuvre<br />

et leur influence sur les valeurs pressiométriques. Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. routiers P. et Ch., 32, juinjuillet<br />

1968, p. 97-127.<br />

[3] MÉNARD, Calcul de la force portante des fondations sur la base des résultats des essais pressiométriques,<br />

Sols-Soils, Paris, 2, n° 5, 2 e trimestre 1963, p. 9-24.<br />

[4] Mode opératoire LCPC : L'essai pressiométrique normal, Dunod (1971).<br />

[5] PASTUREL, Essais de chargement de pieux dans la craie altérée. Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. routiers P. et Ch.,<br />

29, janv.- fév. 1968, p. 6-10.<br />

120


Ij'ensemble de la série crayeuse du Bassin parisien a, comme tout substratum rocheux d'une région<br />

particulière, été exploité par l'homme.<br />

HISTORIQUEMENT, quatre utilisations principales ont laissé dans ce substratum des cavités artificielles<br />

résultant d'une exploitation.<br />

<strong>La</strong> craie fut souvent la seule roche d'exploitation locale susceptible de fournir de la pierre à bâtir.<br />

Les bancs les plus durs et les moins gélifs donnaient ainsi lieu à de grandes exploitations souterraines<br />

localisées en général en fonction des variations locales de faciès à la base du Sénonien (Coniacien)<br />

et dans le Turonien.<br />

Les horizons de décomposition de la craie ou « argile à silex » conduisent à des sols acides qu'il convient,<br />

pour les besoins agricoles, de chauler. Cette opération appelée « marnage » s'effectue localement<br />

par extraction et répandage d'une craie tendre, si possible phosphatée, dans les champs. De nombreuses<br />

exploitations souterraines ou « marnières » le plus souvent abandonnées subsistent donc dans le substratum<br />

crayeux.<br />

<strong>La</strong> craie a été, dans certaines zones, exploitée de façon souterraine pour alimenter des fours à chaux.<br />

En bordure de rivière, des caves importantes existent fréquemment (Touraine, Charente, Saintonge).<br />

Ces cavités souterraines diverses, le plus souvent mal répertoriées, posent des problèmes de sécurité importants<br />

pour les constructions nouvelles. L'article sur « Les Cavités souterraines de la craie dans le nord de<br />

la France » présente la façon dont le problème se pose et est susceptible d'être résolu dans une région<br />

donnée. Bien que cet article n'ait pas fait l'objet de communication au cours des journées sur la craie,<br />

il nous a paru utile de l'insérer dans ce numéro.<br />

ACTUELLEMENT, ces types d'exploitation sont pour la plupart abandonnés. Par contre, le développement<br />

des travaux urbains, en particulier les collecteurs profonds et les besoins industriels (stockages pétroliers<br />

souterrains, centrales EDF, etc.), conduisent à réaliser des tunnels linéaires ou des cavités de stockage dans<br />

la craie. L'article sur « <strong>La</strong> <strong>Craie</strong> dans les sites d'ouvrages de production d'électricité» montrera les problèmes<br />

particuliers posés par la roche craie dans les travaux souterrains.<br />

121


MER DU NORL<br />

OCataès<br />

[yf?M<br />

Formations dunales<br />

Dépôts fland riens de [a plaine maritime<br />

ESSSSSBB Formations post-yprésiennes<br />

Waaeea des monts des Flandres<br />

l'.v.'.v.i Yprésien des bassins des Flandres et<br />

;y.$|:*:: l'y':*:':'! d'Orchies — Argile des Flandres<br />

;*l:ïï: I<br />

<strong>La</strong>ndénien<br />

1 Terrains du Crétacé supérieur de l'Artois-Mélantois<br />

&"ïv£ I I (Cénomanien, Turonten, Sénonien)<br />

raomn Terrains antérieurs au Crétacé supérieur<br />

(Boulonnais, Avesnois, Tournaisis)<br />

QUATERNAIRE<br />

TERTIAIRE<br />

SECONDAIRE<br />

et<br />

PRIMAIRE<br />

St-Omer° 9 \ f~Ti \<br />

Bassin houiller<br />

Emplacement des<br />

cavités souterraines<br />

Limites de département<br />

/lontreuil<br />

* . " * * * * * ^ *'v . Douai O'-rt^^^^B^ÉlWNr^^^K^Alr<br />

"TVv • ' ». Doullens V<br />

Fig. 1.<br />

Carte géologique simplifiée montrant l'importance des cavités souterraines dans la région nord de la France, en liaison avec l'affleurement<br />

des assises crayeuses (d'après la carte géologique au 1/320 000).<br />

Fig. 2a. — Carrière souterraine du Bon-Dieu-Noir à Loos, près de Lille. On y cultive<br />

une variété de salade, la chicorée ou barbe-de-capucin.<br />

Fig. 2b. — Les cultivateurs isolaient chacun leur<br />

propre exploitation en bouchant certaines ouvertures<br />

par des murs en moellons de craie liés par un genre de<br />

torchis, complétés à la partie supérieure par une sorte<br />

de toile.<br />

122


Les cavités souterraines<br />

de la craie<br />

dans le nord de la France<br />

J. LEPLAT<br />

Assistant géologue<br />

<strong>La</strong>boratoire régional de Lille<br />

introduction<br />

Le développement croissant de l'urbanisation et l'aménagement du<br />

réseau routier, qui se traduisent par l'extension des villes existantes<br />

ou la création de villes nouvelles d'une part, par l'amélioration des<br />

anciennes routes ou le percement d'autoroutes et de voies nouvelles d'autre part, conduisent les<br />

urbanistes, les promoteurs, les ingénieurs routiers et autres constructeurs à la découverte de<br />

problèmes nouveaux, liés à l'implantation des travaux dans des sites jusqu'alors évités.<br />

Dans le nord de la France, un de ces problèmes est la présence dans la craie, formation bien développée<br />

dans la région et généralement considérée comme saine, de cavités souterraines autrefois<br />

creusées par l'homme.<br />

Si l'on excepte les sapes de la guerre 1914-1918, qui jalonnent le front de l'Artois, ces cavités<br />

résultent de l'exploitation de la craie au cours des siècles, pour les besoins de l'agriculture et surtout<br />

de la construction.<br />

Encore bien connues de nos ancêtres, puisque certaines gardèrent leur activité jusqu 'à la fin du<br />

siècle dernier et même le début de notre siècle, les carrières souterraines sont vite entrées dans la<br />

légende, leur souvenir n'étant gardé que par le biais des invasions (beaucoup d'entre elles ayant<br />

servi de refuge aux populations pendant les guerres), ou de certaines cultures maraîchères ( quelquesunes<br />

ayant été transformées en champignonnières) (fig. 2).<br />

On les redécouvre maintenant, et la prospection systématique entreprise il y a quelques années<br />

par le service des Carrières révèle leur développement considérable dans la région (fig. 1 et 3).<br />

Le présent article se propose :<br />

— de réaliser la synthèse des connaissances actuelles sur l'exploitation souterraine de la craie<br />

dans le nord de la France;<br />

— de passer en revue les diverses méthodes de prospection appliquées à la recherche de ces cavités<br />

dans la craie, afin de définir la méthodologie la mieux adaptée au problème;<br />

— d'examiner un certain nombre de traitements que l'on peut faire subir aux cavités qui affectent<br />

des terrains destinés à la construction.<br />

Il a été mené à bien grâce à une excellente collaboration avec les ingénieurs du service des Carrières<br />

du département du Nord, que je tiens à remercier ici, de même que toutes les personnes qui m'ont<br />

aidées dans l'accomplissement de ce travail.<br />

123<br />

Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch. - Spécial V - Octobre 1973


124


Contexte géologique<br />

En France et dans les pays voisins de l'Europe du<br />

nord, la craie occupe des surfaces considérables.<br />

L'importance de ce faciès, jointe à une incontestable<br />

originalité, n'ont pas manqué d'attirer l'attention des<br />

premiers géologues qui, contrairement à l'habitude,<br />

se sont servis du nom de sa roche la plus caractéristique<br />

pour définir le système crétacé, dernier tiers<br />

des temps secondaires.<br />

SYSTÈME CRÉTACÉ<br />

Le Crétacé correspond à un cycle sédimentaire<br />

complet : les mers epicontinentales qui s'étaient<br />

retirées à la fin du Jurassique transgressent à nouveau<br />

au début du Crétacé, franchissant les détroits<br />

qui séparent les massifs hercyniens, et s'installent<br />

dans les dépressions que constituent les bassins<br />

anglo-parisien, aquitain et rhodanien. Le cycle se termine<br />

par une grande régression, et la lacune de<br />

sédimentation qui s'ensuit généralement marque à la<br />

fois la fin du Crétacé et celle de l'ère secondaire.<br />

Ce n'est qu'au maximum d'extension des mers de<br />

l'époque qu'apparaissent les faciès crayeux, d'où la<br />

division schématique généralement adoptée en un<br />

Crétacé inférieur sans craie et un Crétacé supérieur<br />

le plus souvent crayeux (tableau I).<br />

Crétacé du nord de la France<br />

En ce qui concerne le nord de la France, l'axe de<br />

la transgression étant orienté sensiblement sudest-nord-ouest,<br />

la sédimentation crayeuse apparaît<br />

dès le Cénomanien dans la partie sud-ouest (Boulonnais),<br />

où les mers sont installées depuis l'Aptien-<br />

Albien.<br />

Ailleurs, l'invasion marine se produit à partir du<br />

Cénomanien 1 , et les faciès correspondants ont un<br />

caractère plus littoral : ce sont des sables glauconieux,<br />

des argiles et des marnes qui reposent sur<br />

un conglomérat de base appelé « tourtia » par les<br />

mineurs du bassin Nord-Pas-de-Calais. Ce conglomérat,<br />

de plus en plus récent à mesure que l'on<br />

progresse vers le nord-est (Cénomanien à Valenciennes,<br />

Turonien à Lille ?), marque la conquête<br />

graduelle par la mer du bord sud du continent ardennais.<br />

Les dépôts crayeux se généralisent au Turonien<br />

supérieur, faisant suite à des alternances de marnes<br />

et de craies caractéristiques du Turonien moyen.<br />

Les craies de ce niveau sont souvent assez grossières,<br />

d'une teinte blanc grisâtre. Elles contiennent<br />

presque toujours d'énormes silex cornus.<br />

Au Sénonien, la mer atteint son extension maximale<br />

et dépose la craie blanche.<br />

Les deux termes de base, le Coniacien et le Santonien,<br />

affleurent largement dans les départements du<br />

Nord et du Pas-de-Calais. Ils y sont quasiment indissociables,<br />

et la datation précise des craies qui les<br />

caractérisent nécessite une analyse approfondie de<br />

leurs microfaunes respectives. Toutefois, la craie<br />

santonienne se distingue en général de la craie coniacienne<br />

par une finesse et une pureté plus grande,<br />

ainsi que par l'absence des silex.<br />

1. Cf. article de M. Bignot et de Mlle M.P. Aubry : <strong>La</strong> Géologie<br />

de la craie dans le Bassin parisien.<br />

TABLEAU I<br />

Etages et sous-étages Faciès et localité types Fossile caractéristique<br />

Danien<br />

Calcaire du Danemark à<br />

Bryozoaires<br />

/ Maestrichtien <strong>Craie</strong>-tuffeau de Maestricht Belemnitella- mucronata<br />

Crétacé<br />

supérieur ) Campanien <strong>Craie</strong> de Champagne Belemnitella quadrata<br />

crayeux Sénonien j (charentaise)<br />

[ Santonien <strong>Craie</strong> de Saintonge Micraster coranguinum<br />

\ Coniacien <strong>Craie</strong> de Cognac Micraster cortestudinarium<br />

Turonien<br />

<strong>Craie</strong>-tuffeau de Touraine<br />

Cénomanien<br />

Sable du Maine<br />

Crétacé<br />

inférieur<br />

sans craie<br />

Albien<br />

Aptien<br />

Barrémien<br />

( Hauterivien<br />

Néocomien <<br />

( Valanginien<br />

125


Le Campanien qui leur fait suite n'apparaît que<br />

plus au sud, en Picardie, ainsi qu'à l'est de Valenciennes,<br />

dans le prolongement du bassin de Mons.<br />

Il est représenté, suivant les endroits, par :<br />

— de la craie grise phosphatée,<br />

— de la craie jaune, dure, un peu phosphatée et<br />

fréquemment magnésienne,<br />

— de la craie blanche.<br />

Là où elles existent, les craies phosphatées et magnésiennes<br />

occuperaient plutôt la base de l'étage.<br />

Le Maestrichtien et le Danien n'ont jamais été signalés<br />

dans la région qui nous intéresse.<br />

Faciès particuliers rencontrés aux limites d'étages<br />

Certaines limites d'étages ou de sous-étages sont<br />

fréquemment marquées par l'existence de faciès<br />

crayeux assez différents des craies habituelles. Ainsi,<br />

le passage du Turonien au Sénonien se réalise très<br />

souvent par l'intermédiaire de couches d'une craie<br />

chargée de grains de glauconie et de phosphate de<br />

chaux, et de bancs durcis, de niveaux noduleux ou<br />

congloméroïdes (meules et tuns) qui traduisent un<br />

caractère beaucoup plus littoral et éventuellement<br />

des mouvements du fond marin.<br />

Des phénomènes du même genre se reproduisent<br />

parfois à la limite Santonien-Campanien où une<br />

couche noduleuse et même un conglomérat de nodules<br />

phosphatés ont pu être mis en évidence.<br />

Exploitation souterraine de la craie<br />

DOMAINES D'UTILISATION DE LA CRAIE<br />

Par le passé, les principales utilisations de la craie<br />

dans le nord de la France étaient liées à sa composition<br />

chimique et à sa qualité de roche dans une<br />

région qui en était particulièrement dépourvue.<br />

Composition chimique<br />

<strong>La</strong> craie a pour constituant de base le carbonate<br />

de calcium CaC0 3<br />

(en proportion le plus souvent<br />

supérieure à 90 %) ; à certains niveaux s'y ajoutent<br />

la glauconie (minéral argileux de la famille de l'illite 2 ,<br />

et surtout le phosphate tricalcique. Ces divers éléments<br />

en faisaient une matière première de choix<br />

pour la fabrication des chaux et une source de calcium<br />

et de phosphore pour l'agriculture (pratique du<br />

marnage).<br />

Qualité de roche<br />

<strong>La</strong> craie, ou tout au moins quelques bancs de craie<br />

peu gélive au sein de la formation crayeuse, est<br />

demeurée pendant fort longtemps la seule pierre<br />

à bâtir 3<br />

pour une bonne partie du nord de la France.<br />

Elle a servi en particulier à la construction des grandes<br />

villes de la région que sont Lille, Douai, Cambrai<br />

et Valenciennes, comme en témoignent les<br />

vieux édifices qui y subsistent encore (châteaux,<br />

églises, fortifications, etc.) (fig. 4).<br />

Comme le transport n'était guère facile, le matériau<br />

était extrait au plus près du lieu d'utilisation ; c'est<br />

ainsi que, à chaque fois que cela était possible, d'énormes<br />

carrières furent ouvertes aux portes mêmes<br />

de ces villes.<br />

Dans les campagnes, la craie était également exploitée<br />

pour la construction, mais les carrières y étaient<br />

naturellement moins étendues, à l'exception de celles<br />

qui, placées à peu de distance de villes où la craie à<br />

bâtir se trouvait hors d'atteinte, ont pu les alimenter.<br />

Un exemple typique de ce cas particulier est celui<br />

des importantes carrières du village de Bouvigny-<br />

Boyeffles, dont une partie de la production était<br />

acheminée par chariots vers la ville de la Bassée,<br />

pourtant située à une quinzaine de kilomètres à vol<br />

d'oiseau.<br />

Ces exploitations sont parfois très anciennes, ainsi<br />

à Lezennes, près de Lille, certains documents les<br />

font remonter au VIP siècle. Activement poursuivies<br />

jusque vers le milieu du XVIII e<br />

siècle, elles furent<br />

alors peu à peu abandonnées, la craie à bâtir étant<br />

2. Formule générale de l'illite : (Si(4-z)Alz)Al20io(OH)2K*<br />

avec x sa 0,5.<br />

Dans la glauconie, presque tout l'aluminium est remplacé<br />

par du fer ferrique (Fe2C"3) ; ce minéral contient en outre du<br />

fer ferreux (FeO) et du magnésium (MgO).<br />

3. Les grès mamelonnés que l'on rencontre parfois vers le<br />

sommet de l'étage landénien ont été également exploités dans<br />

ce but. Toutefois, comme ils étaient beaucoup plus rares et<br />

que l'on en faisait aussi des pavés, on s'en servait uniquement<br />

pour réaliser les soubassements.<br />

126


1<br />

pierre à bâtir. En effet, en l'absence d'un recouvrement<br />

protecteur parfaitement imperméable (cas<br />

général pour la région), les horizons supérieurs de<br />

la craie ont subi au cours des temps géologiques<br />

une altération plus ou moins poussée suivant les<br />

conditions du site. A tout le moins, cette altération<br />

se traduit par une fragmentation des bancs qui les<br />

rend impropres à la confection de pierres de taille.<br />

Les exploitations à l'affleurement étaient donc impossibles,<br />

et dans la pratique il fallait bénéficier de<br />

circonstances très favorables pour extraite de la craie<br />

à bâtir à moins de 4 m de profondeur.<br />

En ce qui concerne les autres domaines d'utilisation,<br />

l'extraction souterraine était liée à l'existence<br />

des formations qui surmontent habituellement la<br />

craie, c'est-à-dire les dépôts superficiels et éventuellement<br />

la base du <strong>La</strong>ndénien. Dans la région<br />

lilloise, par exemple, la craie, constamment masquée<br />

par une telle couverture, a fait partout l'objet d'une<br />

exploitation souterraine, quel qu'en fût l'usage.<br />

En revanche, dans les régions où la craie apparaît<br />

en surface, les affleurements pouvaient être traités<br />

à ciel ouvert.<br />

IMPORTANCE RELATIVE DES DIFFÉRENTS<br />

DOMAINES D'UTILISATION<br />

Fig. 4. — A l'emplacement d'un ancien centre d'extraction de craie à<br />

bâtir, la petite église du village de Lezennes, près de Lille.<br />

progressivement supplantée par la brique dont la<br />

fabrication commençait à s'industrialiser. A la fin<br />

du XIX e<br />

siècle, la plupart d'entre elles étaient désaffectées,<br />

et seules quelques-unes furent prolongées<br />

jusqu'au début de notre siècle (Hordain et Avesnesle-Sec<br />

entre Valenciennes et Cambrai).<br />

CAUSES DE L'EXPLOITATION<br />

SOUTERRAINE<br />

De nos jours, les équipements mécaniques permettent<br />

non seulement d'exploiter les gisements<br />

à ciel ouvert en dépit de découvertes parfois considérables,<br />

mais encore d'atteindre des profondeurs<br />

très importantes au prix du pompage d'une ou même<br />

de plusieurs nappes aquifères. Il n'en a pas toujours<br />

été ainsi, et l'extraction souterraine de la craie se<br />

comprend parfaitement si l'on compare le volume<br />

des stériles, qu'il aurait d'abord fallu déblayer avec<br />

les moyens de l'époque, à la quantité de substance<br />

utile disponible, et si l'on tient compte du fait que<br />

ce mode d'exploitation permettait de garder intactes<br />

les excellentes terres de culture du pays.<br />

Dans ces conditions, l'exploitation souterraine était<br />

pratiquement impérative dans le domaine de la<br />

C'est incontestablement la production des pierres à<br />

bâtir qui a consommé les plus fortes quantités de<br />

craie, et qui, par conséquent, a déterminé les cavités<br />

les plus importantes, d'autant que, comme nous<br />

l'avons vu plus haut, ce domaine d'utilisation était<br />

pratiquement le seul exigeant une exploitation souterraine.<br />

En seconde position devait se placer l'industrie<br />

chaufournière, dont on peut noter qu'un certain<br />

nombre d'exploitations souterraines sont relativement<br />

récentes. Très actives au XIX e<br />

et au début<br />

du XX e siècle, elles prenaient en quelque sorte le<br />

relais des carrières de pierre à bâtir. L'exemple le<br />

plus caractéristique que nous possédions est celui<br />

d'un four à chaux de la région valenciennoise qui<br />

a fonctionné jusqu'en 1962, alimenté par la craie<br />

blanche de son sous-sol (fig. 5).<br />

En dernier lieu venaient sans doute les besoins pour<br />

l'agriculture, le marnage des terres n'ayant pu engendrer<br />

que des exploitations de petite taille, vraisemblablement<br />

très dispersées et, de plus, limitées<br />

aux zones dépourvues d'affleurements crayeux.<br />

Le cas des exploitations souterraines de craie phosphatée,<br />

quasiment absentes de la région considérée<br />

ne sera pas évoqué ici. En effet, si l'on excepte quelques<br />

tentatives peu fructueuses d'extraction de<br />

craie phosphatée au niveau des tuns (limite Turonien-Sénonien)<br />

dans les carrières de pierre à bâtir<br />

de Lezennes près de Lille, tentatives qui auraient<br />

donné naissance au fameux <strong>La</strong>c Bleu, les premières<br />

exploitations se trouvent à la limite des départe-<br />

127


i<br />

Fig. 5. — Ce four à chaux de la<br />

région valenciennoise(Saint-Saulve)<br />

a fonctionné jusqu'en 1962.<br />

Fig. 6. — Carrières souterraines<br />

d'Hordain, près de Valenciennes.<br />

Détail des bancs constituant l'assise<br />

de la Bonne pierre (la torche<br />

mesure 24 cm).<br />

ments du Pas-de-Calais et de la Somme ; elles concernent<br />

l'assise de craie phosphatée qui constitue en<br />

Picardie la base du Campanien.<br />

CRAIES UTILISÉES<br />

Pour la fabrication de la chaux, de même que pour<br />

le marnage des terres, il semble que l'on se soit<br />

servi assez indifféremment des craies turonienne<br />

ou sénonienne, avec peut-être une préférence pour<br />

les craies généralement plus fines et plus pures du<br />

Santonien et du Campanien, tout au moins dans les<br />

régions où le choix était possible.<br />

En revanche, dans toute la série des dépôts crayeux,<br />

quelques bancs seulement étaient à la fois assez résistants<br />

et peu gélifs pour fournir des pierres de taille.<br />

Ces bancs constituent habituellement un niveau<br />

de 2 à 5 ou 6 m d'épaisseur. Ils sont formés d'une<br />

craie compacte, de teinte gris blanchâtre à grise,<br />

fréquemment chargée de grains de glauconie et de<br />

phosphate de chaux. Suivant les régions, ils appartiennent<br />

à la base du Sénonien (région de Lille),<br />

au sommet du Turonien (région de Valenciennes),<br />

ou même au Turonien par les couches inférieures et<br />

au Sénonien par les couches supérieures mais de toute<br />

façon, ils se situent toujours à la limite de ces deux<br />

étages (fig. 6).<br />

A titre d'exemple, nous donnons un extrait de la<br />

coupe la plus complète relevée par L. Cayeux dans<br />

les carrières souterraines de Lezennes, près de Lille,<br />

de haut en bas (tableau II) [3].<br />

Comme on peut le voir la « craie à bâtir », épaisse<br />

ici d'environ 3 m, forme de base du Sénonien, si l'on<br />

considère le 1 er<br />

tun comme la limite entre le Sénonien<br />

et le Turonien.<br />

Dans la région de Valenciennes, on peut relever<br />

la coupe schématique également de haut en bas,<br />

donnée dans le tableau III [7 et 9].<br />

Si l'on compare cette coupe à celle de Lille, en faisant<br />

abstraction des considérations relatives à la faune,<br />

il semble que la Bonne pierre de Valenciennes, directement<br />

au contact de la craie à silex cornus, se situe<br />

à un niveau inférieur à celui de la craie à bâtir de<br />

Lille. L'examen des faunes avait conduit Cayeux [4]<br />

à la même conclusion.<br />

128


1<br />

TABLEAU II<br />

A<br />

B<br />

Petit Blanc avec « soies » 5 m c'est la craie à Inoceramus involutus,<br />

disloquée.<br />

<strong>Craie</strong> avec « soies » formant un banc de 1,30 m.<br />

<strong>Craie</strong> à chaux<br />

S<br />

E<br />

N<br />

C<br />

<strong>Craie</strong> à bâtir, grise, présentant des rognons ferrugineux qui rendent difficile<br />

le travail de la roche et qui ont valu à cette craie le qualificatif de Banc des<br />

roux ; elle constitut un banc de 1,50 m.<br />

O<br />

N<br />

<strong>Craie</strong> à bâtir<br />

I<br />

D<br />

<strong>Craie</strong> un peu plus grise, plus sableuse, plus tendre, mais plus estimée comcomme<br />

pierre à bâtir. Ce banc, épais de 1,50 m, repose directement sur le<br />

tun et porte pour cette raison le nom de Banc du tun.<br />

E<br />

N<br />

E 1 er tun ou phosphate de chaux en nodules dans une craie grise légèrement<br />

glauconieuse. Ces nodules sont jaunâtres, gros comme le poing, roulés et<br />

couverts d'huîtres, de spondyles ou de tubes de serpules.<br />

Le 1 er<br />

tun, qui n'a guère que 0,40 m d'épaisseur en moyenne, est recherché<br />

comme source de phosphate.<br />

F<br />

<strong>Craie</strong> grise, légèrement sableuse, très glauconieuse et peu cohérente<br />

(0,10 m).<br />

G<br />

H<br />

<strong>Craie</strong> sableuse, glauconieuse (0,80 m).<br />

<strong>Craie</strong> jaunâtre, sableuse, aussi riche en glauconie que le niveau F. Elle se<br />

distingue des deux horizons précédents par une cohérence plus grande<br />

(0,80 m).<br />

I 2 e tun, connu sous le nom de Tun blanc. C'est une nouvelle couche phosphosphatée,<br />

en nodules d'un blancjaunâtre dans une craie plus pâle (0,50m).<br />

J<br />

<strong>Craie</strong> grise (0,10 m).<br />

<strong>Craie</strong><br />

phosphatée<br />

T<br />

U<br />

R<br />

O<br />

N<br />

I<br />

E<br />

N<br />

K 3 e tun, en nodules tout à fait blancs dans une craie de même couleur<br />

(0,50 m).<br />

L<br />

M<br />

<strong>Craie</strong> gris-blanc (0,30 m).<br />

<strong>Craie</strong> à silex cornus (1,50 m).<br />

<strong>Craie</strong> à silex<br />

DIVERS TYPES D'EXPLOITATION<br />

SOUTERRAINE<br />

D'une manière générale, on peut distinguer deux<br />

grands types d'exploitations : « en bouteilles » et<br />

« en galeries et piliers ».<br />

Exploitation en bouteilles<br />

Cette exploitation consistait d'abord à creuser un<br />

puits de 1 à 1,5 m de diamètre dans la couverture<br />

(de limons le plus souvent) ; ensuite, une fois arrivé<br />

dans la craie, à élargir progressivement la cavité,<br />

lui donnant ainsi une forme de bouteille (fig. 7).<br />

Une bouteille achevée, une autre bouteille était réalisée<br />

juste à côté, à une distance telle qu'elle recoupait<br />

en général la précédente à la base, réalisant ainsi<br />

une communication de forme sensiblement ogivale<br />

(fig. 8). L'exploitation terminée, chaque bouteille<br />

était fermée, à la base du col, par une voûte en moellons<br />

de craie non cimentés, et le col de la bouteille<br />

rebouché (fig. 9).<br />

129


TABLEAU HI<br />

<strong>Craie</strong>s rencontrées<br />

Puissance<br />

(m)<br />

Etages<br />

<strong>Craie</strong> blanche sans silex<br />

« Gris » : craie fendillée contenant<br />

un peu de « matière verte<br />

» 4 .<br />

« Verts » : craie grossière, remplie<br />

de « matière verte » se délitant<br />

à l'air.<br />

3,00<br />

1,00 Sénonien<br />

Bonne pierre » : \<br />

craie grise, ten- l<br />

dre, glauconi- ; <strong>Craie</strong> à bâtir<br />

fère se taillant \<br />

facilement 1<br />

2,50<br />

Blanchâtre à silex cornus<br />

Turonien<br />

Fig. 7. — <strong>La</strong> carrière à ciel ouvert de Loos'Ennequin près de Lille,<br />

autrefois exploitée par les Ciments du Nord, a recoupé les carrières<br />

souterraines du Bon-Dieu-Noir. <strong>La</strong> photo met en évidence la forme<br />

de bouteilles donnée à ce type d'exploitation. <strong>La</strong> bouteille située à<br />

l'extrémité droite a même gardé une partie de la voûte en moellons de<br />

craie qui la fermait.<br />

Ce mode d'exploitation est très caractéristique de la<br />

région lilloise. Il devait être orienté essentiellement<br />

vers la fourniture de craie pour les fours à chaux<br />

ou pour l'amendement, mais il est possible que certains<br />

niveaux plus résistants aient été réservés pour<br />

la production de pierres de taille ou de moellons.<br />

<strong>La</strong> hauteur de ces bouteilles est extrêmement variable,<br />

de 7 à 15 m ou même plus; elle dépend principalement<br />

de la position de la nappe aquifère retenue<br />

dans la craie par les marnes sous-jacentes, puisque<br />

dans ce type d'exploitation l'on cherchait à exploiter<br />

la plus forte épaisseur de craie possible.<br />

Actuellement encore, certaines de ces cavités sont<br />

partiellement inondées en période de hautes eaux,<br />

ce qui signifie que l'on a profité des périodes d'étiage<br />

pour les pousser en profondeur.<br />

Exploitation en galeries et piliers<br />

Cette exploitation, appelée aussi en chambres et<br />

piliers ou encore en piliers tournés, était réalisée<br />

à partir de puits verticaux descendus jusqu'aux<br />

couches intéressées ou, lorsque le site s'y prêtait,<br />

à partir d'entrées implantées directement à flanc<br />

de coteau (fig. 10). Après extraction, subsiste un<br />

réseau de galeries plus ou moins régulier (fig. 11,<br />

12 et 13).<br />

Les dimensions de ces galeries et des piliers varient<br />

naturellement suivant la région, la puissance du<br />

niveau exploitable et sa profondeur d'enfouissement.<br />

Dans le Valenciennois, à Hordain et Estreux (fig. 14)<br />

les galeries ont une largeur de 1,5 à 3 m pour une<br />

Fig. 8. — Carrières du Bon-Dieu-Noir. Les bouteilles communiquent<br />

entre elles par des ouvertures de forme ogivale qui sont ici parfaitement<br />

alignées. Remarquer au premier plan les sillons témoins de la culture<br />

des champignons maintenant abandonnée.<br />

4. Il s'agit de glauconie vraisemblablement.<br />

5. Le taux de défruitement, T, est défini comme le rapport<br />

de la surface exploitée à la surface totale T = -g = —^—<br />

Sp désignant la surface des piliers.<br />

130


hauteur moyenne de 2,5 à 3 m. <strong>La</strong> section des piliers<br />

est souvent faible, de l'ordre de 2 à 3 m 2 , d'où un<br />

taux de défruitement 5 qui peut avoisiner 90 %.<br />

A Lezennes, dans la région lilloise, les galeries sont<br />

plus hautes (3 à 3,50 m) et souvent plus larges, certaines<br />

pouvant atteindre 4 à 5 m (fig. 15). Toutefois,<br />

les piliers sont également plus importants (les sections<br />

de 12 à 16 m 2<br />

ne sont pas rares) et le taux de<br />

défruitement est en général moins élevé (60 à 70 %).<br />

Ce type d'exploitation a été surtout utilisé pour la<br />

production des pierres à bâtir, la taille se faisant<br />

au fond (fig. 16) les rebuts étant employés au remblaiement<br />

de certaines galeries. Cependant, l'industrie<br />

chaufournière a pu donner lieu à des exploitations<br />

d'un type très voisin. Sous le four à chaux<br />

de Saint-Saulve par exemple, l'exploitation de la<br />

matière première, la craie blanche en l'occurrence,<br />

a déterminé le creusement d'un réseau de galeries<br />

larges de 1,5 à 3 m mais dont la hauteur atteint<br />

couramment 4 à 6 m (hauteur maximale 8 m) (fig. 17).<br />

Fig. 9. — Carrières souterraines de Lezennes. Puits d'accès ou catiche,<br />

vu d'en bas, montrant la voûte en moellons de craie qui ferme<br />

le col de la bouteille.<br />

Dans l'exploitation en galeries et piliers, les puits<br />

d'accès sont rares. Dans le Valenciennois leur nombre<br />

est de 2 à 4 par hectare, alors qu'il peut s'élever<br />

à 150 pour les exploitations en bouteilles du sud de<br />

Lille. De ce point de vue, les carrières de Lezennes<br />

réalisent une sorte de compromis, puisque l'exploitation<br />

en galeries et piliers de la craie à bâtir comporte<br />

néanmoins une cinquantaine d'accès en bouteille<br />

(les catiches) par hectare (fig. 11 et 12).<br />

Fig. 10. — Carrières souterraines à flanc de coteau à Ames-Amettes.<br />

131


Fig. 11. — Carrières sous la déviation du CD 146 à Lezennes. Lever montrant la disposition et l'importance des piliers. Les puits d'accès (catiches)<br />

sont figurés par des petits cercles.<br />

Fig. 12. — Carrières sous l'autoroute A 2, à Estreux, près de Valenciennes. Lever montrant la disposition et l'importance des piliers. A noter la<br />

rareté des puits d'accès carrés marqués V x p ts .<br />

132


133


Fig. 16. — Carrières de craie blanche pour la fabrication de la chaux<br />

à Saint-Saulve. Les galeries, très profondes (jusqu'à 25 m par rapport<br />

au terrain naturel), sont très hautes. Remarquer lesdiaclases noircies<br />

par des dendrites d'oxyde de manganèse.<br />

•<br />

Fig. 17.<br />

Carrières à Hordain. Stock de pierres taillées dans la<br />

chambre d'exploitation.<br />

m<br />

Prospection des cavités souterraines<br />

Depuis 1967, le département du Nord possède un<br />

service des Carrières qui a pour mission principale<br />

la constitution d'un atlas des carrières souterraines<br />

du département [10].<br />

L'obligation de déclarer au service des Mines l'ouverture<br />

d'une exploitation souterraine remonte à<br />

1892. Le service des Carrières dispose donc, en<br />

principe, de renseignements sur les exploitations<br />

ouvertes après cette date.<br />

Les carrières plus anciennes ne sont souvent connues<br />

que par ouï-dire, les informations s'étant transmises<br />

de génération en génération, ou encore par l'intermédiaire<br />

des noms de lieux-dits sur la carte d'étatmajor.<br />

Les archives étant inexistantes et les accès<br />

bouchés, il faut donc recourir aux méthodes de<br />

prospection.<br />

CONNAISSANCE GÉOLOGIQUE<br />

Lorsque, dans le cadre d'un projet quelconque, l'on<br />

veut lever l'incertitude quant à la présence éventuelle<br />

de cavités souterraines dans la craie, le point<br />

de départ indispensable est une bonne connaissance<br />

de la géologie régionale.<br />

En fonction :<br />

— de la position de la nappe aquifère,<br />

— de la profondeur des couches de craie qui ont<br />

pu faire l'objet d'une exploitation souterraine,<br />

— de l'existence d'une couverture plus ou moins<br />

épaisse de morts-terrains (dépôts superficiels ou<br />

tuffeau),<br />

134


le géologue pourra se faire une idée de la probabilité<br />

d'existence de cavités souterraines, et même,<br />

dans une certaine mesure, du mode d'exploitation.<br />

Cette connaissance sera utilement complétée par<br />

des observations portant essentiellement sur les<br />

constructions anciennes (châteaux, églises, maisons<br />

et fermes, fortifications, fours à chaux), par la consultation<br />

des archives communales, ainsi que par des<br />

renseignements recueillis auprès des personnes âgées.<br />

Enfin, l'examen des photographies aériennes disponibles<br />

dans les zones suspectes apportera, dans<br />

certains cas, une aide précieuse : différence de végétation<br />

à l'emplacement des puits, fontis en préparation,<br />

etc. (fig. 18).<br />

Cette première phase d'investigations étant terminée,<br />

on pourra passer à la prospection proprement<br />

dite, dont les méthodes peuvent être classées sous<br />

deux grandes rubriques : les méthodes non destructives<br />

et les méthodes destructives.<br />

Fig. 18. — Emplacement des carrières de Saint-Saulve. Les zones<br />

plus sombres indiquent des fontis rebouchés ou en préparation, et à<br />

coup sûr une zone de carrières souterraines.<br />

MÉTHODES NON DESTRUCTIVES<br />

Prospection gravimétrique<br />

<strong>La</strong> première idée qui vient à l'esprit est de profiter<br />

du contraste de densité entre la cavité et les terrains<br />

encaissants, et par conséquent de se tourner<br />

vers la prospection gravimétrique [1, 11, 12, 13<br />

et 14].<br />

Notre propos n'est pas ici d'exposer en détail cette<br />

méthode de prospection, mais d'examiner ses possibilités<br />

quant à la détection des carrières souterraines<br />

du nord de la France. Aussi, nous contenterons-nous<br />

de rappeler quelques généralités indispensables.<br />

<strong>La</strong> recherche des cavités souterraines est une application<br />

relativement récente de la gravimétrie. En<br />

effet, les anomalies négatives qui résultent de la présence<br />

de telles cavités sont en général très faibles,<br />

et ce n'est que depuis une trentaine d'années que l'on<br />

dispose de gravimètres suffisamment perfectionnés<br />

pour les enregistrer avec une précision convenable.<br />

Les appareils modernes donnent assez couramment<br />

le 1/100 de milligal, c'est-à-dire approximativement<br />

1 -10~ 8 g (g x 981 gais), et certain gravimètre américain<br />

apparu tout récemment sur le marché français<br />

permet d'obtenir la précision du microgal<br />

(MO- 9 £ (fig. 19).<br />

Mesures<br />

Dans ce type de prospection, les gravimètres étant<br />

utilisés au maximum de leur précision, il importe<br />

de soigner particulièrement la qualité des mesures.<br />

Dans ce but :<br />

— toutes les stations sont rattachées à une même<br />

base, ce qui évite d'ajouter à l'erreur de lecture à<br />

la station les erreurs commises aux bases ;<br />

— les programmes de mesures débutent et se terminent<br />

systématiquement à la base ; ainsi connaît-on<br />

la dérive instrumentale, que l'on réduit en limitant<br />

la durée de chaque programme à une heure environ<br />

;<br />

— chaque station fait l'objet d'au moins deux<br />

mesures, et si l'écart entre ces deux mesures est<br />

jugé trop grand (par exemple supérieur à 0,03 milligal)<br />

on procède à une troisième mesure voire même<br />

à une quatrième.<br />

Fig. 19. — Un gravimètre perfectionné (<strong>La</strong> Coste et Romberg).<br />

135


Corrections<br />

<strong>La</strong> comparaison des mesures de g entre elles nécessite<br />

un certain nombre de corrections qui ont pour<br />

but. d'éliminer les effets de la dérive instrumentale,<br />

des marées luni-solaires, de la latitude (1/100 milligal<br />

pour un déplacement nord-sud de 12,5 m) , de<br />

l'altitude et des masses latérales situées au voisinage.<br />

En gravimétrie de fin détail, ces corrections doivent,<br />

comme les mesures, être effectuées avec la plus<br />

grande précision. En particulier, la correction d'altitude<br />

AZ est fondamentale. Elle est obtenue à partir<br />

de la formule :<br />

Ag t<br />

= Z(0,308 6-0,041 9 y)<br />

où g x<br />

= valeur corrigé de la gravité en milligals<br />

Z = altitude en mètres<br />

y = densité moyenne du sous-sol.<br />

pour y = 2,67 Ag x<br />

= 0,196 Z<br />

y = 2 Ag t<br />

= 0,225 Z.<br />

AZ doit être inférieur à 5 cm pour que Ag t<br />

soit<br />

inférieur à 1/100 milligal. En conséquence, chaque<br />

station de mesure doit être soigneusement rattachée<br />

au niveau NGF. En général, on peut compter sur<br />

des erreurs d'altitude inférieures à 2 cm, ce qui correspond<br />

à moins de 4/1 000 milligal sur g.<br />

En ce qui concerne la correction introduite par l'influence<br />

des masses latérales, un pays de plaine comme<br />

le nord de la France permet de la négliger.<br />

Anomalie résiduelle<br />

A la valeur de g ainsi corrigée, on soustrait alors la<br />

gravité théorique, calculée en supposant la Terre<br />

homogène, pour obtenir ce que l'on appelle l'anomalie<br />

de Bouguer, qui traduit les hétérogénéités<br />

du sous-sol. Cette anomalie peut encore se décomposer<br />

en une anomalie régionale, qui représente une<br />

certaine structure géologique profonde et que l'on<br />

appréhende au mieux, et en une anomalie résiduelle<br />

qui, dans le cas qui nous occupe, pourra correspondre<br />

à la présence d'une cavité.<br />

Résultats obtenus<br />

Les résultats d'une prospection gravimétrique appliquée<br />

à la recherche de telles cavités souterraines<br />

sont généralement fournis sous la forme de cartes<br />

d'isogammes, de cartes de l'anomalie de Bouguer,<br />

de cartes de l'anomalie résiduelle, et éventuellement<br />

de l'anomalie résiduelle lissée.<br />

Ces résultats sont plus ou moins spectaculaires,<br />

parfois même décevants, et en ce sens, il est intéressant<br />

de connaître les limites de ce type de prospection<br />

en fonction de la forme et de la profondeur<br />

d'enfouissement des cavités. On peut pour cela se<br />

livrer à quelques calculs théoriques en assimilant<br />

les cavités aux formes géométriques simples qui<br />

s'en approchent le plus. Réalisée avant une prospection,<br />

cette étude théorique, que l'existence d'abaques<br />

rend maintenant plus aisée, permettra entre<br />

autres de choisir la maille de mesure.<br />

Premier exemple d'application — Exploitation de<br />

type bouteilles.<br />

Cette carrière souterraine se situe dans la région<br />

lilloise. Les bouteilles ont généralement un col de<br />

2 à 4 ou 5 m de hauteur, un diamètre à la base de<br />

4 à 8 m, et leur fond se situe suivant les cas entre 10<br />

et 15 m de profondeur, exceptionnellement plus.<br />

Une cavité moyenne de ce type peut être assimilée<br />

à une sphère de rayon R = 4 m dont le centre serait<br />

placé à 8 m de profondeur. Le calcul montre qu'elle<br />

se traduirait, théoriquement, par une anomalie maximale<br />

de 6/100 de milligal environ pour un point<br />

situé à l'aplomb du centre de la cavité, et qu'il faudrait<br />

adopter une maille de 5 m pour la déceler.<br />

Cependant, comme ces cavités sont pratiquement<br />

toujours groupées, l'anomalie gravimétrique est beaucoup<br />

plus importante et une maille de 20 m donne<br />

une probabilité de détection quasi absolue.<br />

En général, la pratique confirme assez bien la théorie<br />

: on a pu mesurer sur des exploitations de ce<br />

type une anomalie maximale de 30/100 de milligal<br />

alors que le calcul théorique prévoyait 30 à 40/100<br />

de milligal (fig. 20).<br />

Second exemple d'application — Exploitation en galeries<br />

et piliers.<br />

Il s'agit ici d'une exploitation dans la région de<br />

Valenciennes qui a fourni uniquement des pierres<br />

à bâtir. Le niveau exploité, la Bonne pierre, est peu<br />

épais, de l'ordre de 2,5 m, et son toit se situe à plus<br />

de 15 m de profondeur. Les communications avec<br />

la surface sont très rares, contrairement à ce qui<br />

se passe dans la région lilloise. Il s'agit de puits dont<br />

le diamètre atteint au maximum 2 m et qui se comptent<br />

au nombre de deux à l'hectare en moyenne.<br />

Or les calculs faits pour une cavité de section rectangulaire<br />

haute de 2 m et large de 20 m montrent<br />

que pour une épaisseur de recouvrement de l'ordre<br />

de 15 m, l'anomalie maximale n'excède guère 5/100<br />

milligal, et que l'espacement entre stations doit être<br />

très faible (de l'ordre de 5 m) pour que les anomalies<br />

soient mises en évidence.<br />

Ces résultats théoriques sont en partie confirmés<br />

par les études gravimétriques réalisées sur le site :<br />

les anomalies sont peu importantes (fig. 21). Il faut<br />

toutefois signaler que, comme l'ont montré les reconnaissances<br />

ultérieures, les carrières souterraines s'étendaient<br />

pratiquement sous toute la zone étudiée par<br />

gravimétrie, ce qui peut expliquer dans une certaine<br />

mesure l'absence de contraste.<br />

136


Fig. 20. — Carrières souterraines en bouteilles de la région lilloise. Sur ce plan sont superposées :<br />

— les courbes de l'anomalie résiduelle obtenues par prospection gravimétrique ,<br />

— les limites d'extension des carrières connues à la suite du lever souterrain (en grisé).<br />

On remarque que deux de ces carrières coincident parfaitement avec le plan parcellaire. Echelle approximative 1/2 000.<br />

Fig. 21. — Carrières souterraines en galeries et piliers de la région valenciennoise. Superposition identique à celle de la figure20. Ici les carrières,<br />

beaucoup plus profondes, ne donnent que des anomalies résiduelles très faibles.<br />

En résumé, en dépit de résultats plus ou moins favorables<br />

suivant les conditions de site, la prospection<br />

gravimétrique est une bonne méthode de dégrossissage<br />

dans la recherche des cavités souterraines de notre<br />

région.<br />

Si toutes les anomalies négatives qu'elle révèle ne<br />

correspondent pas forcément à des vides (certaines<br />

peuvent être attribuées, par exemple, à la présence<br />

dans les terrains de couverture de roches plus légères<br />

telles que le tuffeau), on peut affirmer que les zones<br />

d'anomalies positives sont saines.<br />

C'est une méthode relativement rapide et d'un coût<br />

moyen, compte tenu de l'importance du problème.<br />

Avec les appareils les plus perfectionnés du moment<br />

et dans des conditions de travail normales, une<br />

équipe, composée d'un chef de mission et de trois<br />

à quatre agents (dont un topographe) suivant l'importance<br />

de l'étude, peut réaliser de 45 à 60 stations<br />

réelles par jour (soit 3 à 4 programmes de 15 stations),<br />

ce qui correspond à une surface prospectée de 2 à<br />

2,5 hectares pour une maille moyenne de 20 mètres.<br />

Pour une étude suffisamment étendue, la station<br />

de mesure revient à 50/60 F, ce qui fait de 1 250 F<br />

à 1 500 F l'hectare.<br />

137


Prospection électromagnétique<br />

Il y a peu de temps, une nouvelle méthode de détection<br />

des cavités souterraines dans la craie était mise<br />

au point par R. Gabillard, professeur à l'université<br />

de Lille I, dans le cadre des investigations menées<br />

sur le site de la future nouvelle ville est de Lille.<br />

Cette méthode est spécialement adaptée aux cavités<br />

de la région lilloise. Nous l'exposons brièvement<br />

dans les lignes qui suivent, en renvoyant le lecteur<br />

qui désirerait plus d'informations aux articles récents<br />

publiés sur ce sujet par M. Gabillard [5 et 6].<br />

Principe de la méthode<br />

<strong>La</strong> méthode électromagnétique se distingue essentiellement<br />

des méthodes de prospection électrique<br />

classiques par l'utilisation d'un courant alternatif<br />

sinusoïdal et un dispositif d'émission fixe.<br />

Le courant est injecté dans le sol par l'intermédiaire<br />

de deux électrodes fixes A et B distantes de 1 m.<br />

Le récepteur, que l'on déplace progressivement,<br />

permet de mesurer la différence de potentiel entre<br />

deux électrodes M et N pour des distances croissantes<br />

par rapport à l'émetteur (fig. 22-23).<br />

<strong>La</strong> longueur MN étant faible, la différence de potentiel<br />

et le champ électrique produit par les électrodes<br />

d'injection du courant sont confondus. Or, dans un<br />

terrain homogène, de conductivité donnée, l'intensité<br />

du champ électrique décroît régulièrement suivant<br />

une loi connue. Sur la courbe représentative, l'existence<br />

d'une cavité souterraine se traduit par une remontée<br />

du champ électrique.<br />

Limites<br />

<strong>La</strong> netteté avec laquelle apparaît la remontée du<br />

champ électrique, dépend de trois facteurs : la profondeur<br />

du sommet de la cavité (a), la distance qui<br />

sépare la cavité de l'émetteur (r0) et la distance qui<br />

sépare la cavité du profil de mesures (p).<br />

Pour chacun de ces trois paramètres, il y a une limite<br />

au-delà de laquelle la présence d'une cavité ne se<br />

fait plus sentir. Ces limites fixent les possibilités<br />

de la méthode et conditionnent sa mise en œuvre.<br />

Ainsi, pour des cavités dont le sommet se situerait<br />

à 2 m de profondeur, ce qui est assez fréquent dans<br />

la région de Lille, l'anomalie de champ devient<br />

négligeable lorsque r 0<br />

et p dépassent respectivement<br />

25 m et 2 m. Ces considérations ont conduit à adopter :<br />

une longueur de ligne de 20 m et une distance entre<br />

profils au plus égale à 4 m.<br />

Fig. 22. — L'appareillage de prospection<br />

électromagnétique conçu par<br />

le professeur Gabillard. A gauche,<br />

antenne d'émission alimentée à partir<br />

de l'émetteur à l'aide d'un cable<br />

coaxial pouvant atteindre 100 m de<br />

longueur, ce qui permet de prospecter<br />

des terrains inaccessibles au véhicule<br />

qui porte le dispositif émetteur.<br />

Fig. 23. — Le dispositif d'émission logé à l'arrière du véhicule,<br />

138


Avantages et inconvénients<br />

Au chapitre des avantages de cette méthode, on<br />

peut citer un encombrement assez faible (tout l'appareillage<br />

peut trouver place à l'arrière d'un véhicule<br />

du type break) et une grande facilité de mise en<br />

œuvre et d'exécution des mesures.<br />

Dans la pratique, la prospection s'effectue par bandes<br />

de 20 m de large, à raison d'une mesure tous les<br />

mètres pour chaque profil.<br />

L'expérience ayant montré que les points de mesures<br />

trop proches de l'émetteur n'apportaient rien, la<br />

première mesure d'un profil n'est réalisée qu'à<br />

quelques mètres de l'émetteur (4 à 5 m généralement).<br />

L'équipe se compose de deux agents dont un manœuvre.<br />

A chaque point de mesure, le chef d'équipe<br />

enregistre la valeur du champ électrique qui s'inscrit<br />

sur un cadran numérique.<br />

L'exploitation des résultats se fait par ordinateur.<br />

Chaque point de mesure est affecté d'un indice de<br />

présence de cavité, que l'on calcule à partir d'un<br />

profil de référence implanté en terrain dépourvu de<br />

cavité, donc homogène. En réunissant tous les points<br />

où cet indice présente la même valeur, on obtient<br />

une carte en courbes de niveau sur laquelle apparaissent<br />

les emplacements des cavités.<br />

Au chapitre des inconvénients, il faut signaler que<br />

la remontée du champ électrique ne traduit pas<br />

obligatoirement la présence d'une cavité souterraine<br />

: des effets similaires peuvent résulter de variations<br />

de conductivité imputables à d'autres raisons,<br />

par exemple à un substrat crayeux moins profond.<br />

Par ailleurs, les incidences sur le champ électrique<br />

d'une cavité placée entre deux profils peuvent être<br />

compensées par des variations locales de conductivité.<br />

En dépit de ces petits inconvénients, la méthode<br />

électromagnétique de R. Gabillard permet de localiser<br />

la plupart des cavités avec précision, et même,<br />

dans certains cas, de distinguer les cavités vides des<br />

cavités remblayées, à condition bien entendu que les<br />

mesures s'étendent également à des terrains ne<br />

contenant pas de cavité (cela afin que le profil de<br />

référence choisi par l'ordinateur soit valable), cette<br />

remarque étant d'ailleurs tout aussi valable pour la<br />

prospection gravimétrique.<br />

On peut toutefois regretter que son domaine d'action<br />

soit pratiquement limité à un type de cavité, très<br />

caractéristique de la région lilloise.<br />

D'après R. Gabillard [6], le prix de revient de la<br />

méthode serait de l'ordre de 4 000 F l'hectare.<br />

<strong>La</strong> prospection électromagnétique est donc deux à<br />

trois fois plus chère que la prospection gravimétrique,<br />

et surtout bien moins rapide puisqu'il faut un mois<br />

pour couvrir 1,5 ha. Elle compense ces handicaps<br />

par une précision plus grande, encore que l'on puisse<br />

se demander si la gravimétrie ne donnerait pas une<br />

précision similaire avec une maille de mesures plus<br />

petite 6<br />

(ce qui, bien entendu, augmenterait son<br />

coût).<br />

Autres méthodes de prospection géophysique<br />

En prospection électrique classique, les nombreuses<br />

tentatives effectuées par différents organismes n'ont<br />

presque jamais été couronnées de succès, les principales<br />

raisons de ces échecs étant les dimensions<br />

réduites des cavités eu égard à leur profondeur et<br />

à l'hétérogénéité électrique du site.<br />

Les autres méthodes de prospection géophysique ont<br />

également été testées, le plus souvent sans résultat<br />

probant. C'est ainsi qu'une étude comparative,<br />

réalisée par le BRGM sur des cavités de type bouteilles<br />

présentes sous l'aéroport de Lille-Lesquin, concluait<br />

au classement suivant [13] :<br />

1. gravimétrie ;<br />

2. magnétisme, les résultats inattendus donnés par<br />

cette méthode étant sans doute le fait de circonstances<br />

fortuites extrêmement favorables, en l'occurrence<br />

la fermeture des puits par plaques de tôle;<br />

3. résistivité ;<br />

4. sismique - réfraction.<br />

MÉTHODES DESTRUCTIVES<br />

FORAGES ET SONDAGES<br />

Forages<br />

Le principal obstacle à l'utilisation de cette méthode<br />

de reconnaissance est son prix de revient, compte<br />

tenu de la maille, en général très petite, qu'il faudrait<br />

employer pour détecter les cavités à coup sûr. Au<br />

stade de la reconnaissance proprement dite, il ne faut<br />

par conséquent utiliser les forages qu'en dernier<br />

recours, après avoir épuisé les méthodes non destructives,<br />

dans la mesure où ces dernières sont susceptibles<br />

d'apporter des résultats.<br />

En recherche de cavités, la qualité essentielle d'un<br />

forage est sa rapidité. Pour cela il faut :<br />

— disposer d'un atelier de forage très mobile ;<br />

— utiliser le procédé rotary, ou mieux les tarières<br />

hélicoïdales à âme pleine avec lesquelles on s'affranchit<br />

des problèmes d'alimentation en eau.<br />

Avec une certaine habitude, on pourra détecter les<br />

cavités souterraines par l'observation soit d'une chute<br />

éventuelle de la pression appliquée sur l'outil, correspondant<br />

à un avancement très rapide, soit d'une<br />

perte d'injection totale.<br />

Le gros avantage du forage est de permettre la photographie<br />

des cavités ainsi découvertes par introduction<br />

d'un appareil adapté, cette information supplémentaire<br />

étant particulièrement intéressante lorsqu'il<br />

s'agit d'implanter au mieux un puits d'accès.<br />

6. Une étude dans ce sens est en cours au service des Carrières.<br />

139


Sondages pénétrométriques<br />

Par rapport aux sondeuses classiques, les engins<br />

dérivés du pénétromètre représentent un progrès<br />

certain en matière de prospection de cavités'dans<br />

le domaine de la rapidité et par conséquent du coût.<br />

C'est dans cette optique qu'a été réalisé l'appareil<br />

représenté sur la figure 24 et baptisé « Frelon », sorte<br />

de pénétromètre dynamique confectionné à partir<br />

d'une grue classique. <strong>La</strong> flèche de la grue est équipée<br />

d'un dispositif qui permet d'enfoncer par percussion<br />

une tige d'environ 3 m de long terminée en forme<br />

de burin.<br />

Les variations de la vitesse d'avancement permettent<br />

à un opérateur entraîné de reconnaître les ouvertures<br />

de cavités et même, dit-on, de distinguer les cavités<br />

remblayées.<br />

Mais bien qu'ayant apporté des résultats certains,<br />

le Frelon a été assez rapidement abandonné en raison<br />

de son coût élevé et des dégâts occasionnés par le<br />

passage de l'engin.<br />

Pendant la période de tâtonnements qui présida aux<br />

premières reconnaissances de cavités sur le territoire<br />

de la future ville nouvelle de Lille, le Frelon fut employé<br />

seul, avec un maillage très serré compte tenu du<br />

diamètre habituel d'ouverture des anciennes exploitations.<br />

Par la suite, une meilleure connaissance de<br />

la maille de répartition de ces ouvertures a permis<br />

d'élargir la maille de travail du Frelon. Enfin, dès<br />

que l'emploi de la méthode électromagnétique fut<br />

généralisé, le Frelon en devint le complément quasi<br />

indispensable mais dès lors il était surdimensionné.<br />

Fig. 25. — Le Cobra : pénétromètre léger ; type marteau-piqueur.<br />

140


Actuellement, on s'oriente vers l'utilisation d'appareils<br />

très légers du type marteau-piqueur équipés de<br />

tiges-allonges (fig. 25). Outre qu'ils ne présentent<br />

plus les inconvénients du Frelon, ces équipements<br />

permettent de mieux «sentir» les cavités 7 .<br />

Lever souterrain<br />

Lorsqu'une cavité a été découverte, on peut en<br />

déboucher l'ouverture et procéder à l'exploration<br />

par le fond. Le lever souterrain est fait par un géomètre<br />

à peu près de la même manière qu'un lever en surface.<br />

C'est évidemment cette méthode qui donne les résultats<br />

les plus sûrs ; aussi faut-il la mettre en œuvre dès que<br />

possible, en principe dès que la première ouverture<br />

a été repérée. Les cavités étant souvent groupées,<br />

on peut lever des surfaces assez grandes et, par conséquent,<br />

faire des économies sur les autres méthodes<br />

de prospection, le lever souterrain étant de toute<br />

façon indispensable.<br />

Le coût d'un lever souterrain varie dans de larges<br />

proportions suivant les conditions de site, mais il<br />

est toujours très élevé (actuellement de 12 000 à<br />

22 000 F pour le lever d'un hectare de terrain, lever de<br />

surface compris.<br />

Traitement des cavités souterraines<br />

DANGERS PRÉSENTÉS PAR LES CARRIÈRES<br />

Tant qu'une zone de carrières souterraines ne reçoit<br />

pas d'autres sollicitations que celles qui sont liées<br />

à l'agriculture, les dangers sont minimes. Néanmoins<br />

des fontis se déclarent périodiquement, en particulier<br />

pendant ou à la finde la période hivernale. Dans la<br />

région lilloise, ces fontis sont pratiquement toujours<br />

le résultat de l'effondrement des puits d'accès simplement<br />

rebouchés en surface. <strong>La</strong> voûte en moellons<br />

de craie finit par lâcher, entraînant avec elle le remplissage<br />

du puits et parfois même ses parois lorsque<br />

la craie est très diaclasée. Ailleurs, ils traduisent<br />

l'écroulement du plafond d'une galerie, affaibli par<br />

des éboulements successifs et « remonté » progressivement<br />

vers la surface (fig. 26).<br />

<strong>La</strong> construction de routes ou d'immeubles fait courir<br />

des risques bien plus grands. Des charges trop fortes<br />

peuvent à la limite entraîner des ruptures de piliers<br />

(fig. 27) et déterminer l'effondrement d'une carrière<br />

en partie ou en totalité. A notre connaissance, ce<br />

phénomène ne s'est encore produit que rarement<br />

dans la région, mais certaines carrières situées sous<br />

des routes ou des habitations sont devenues extrêmement<br />

dangereuses et menacent à tout moment de<br />

s'écrouler.<br />

Ces risques peuvent encore être multipliés dans la<br />

mesure où l'on se sert de certaines carrières souterraines<br />

comme d'une décharge ou d'un tout-à-l'égoût,<br />

certaines émanations étant susceptibles d'accélérer<br />

la dégradation des piliers et par conséquent de précipiter<br />

les effondrements (fig. 28).<br />

7. L'introduction dans le forage d'un fil à plomb permet de<br />

confirmer ou non l'existence de la cavité.<br />

REMÈDES A APPORTER<br />

Lorsque l'on doit construire dans une zone de carrières<br />

souterraines, trois types de solutions sont<br />

possibles : combler les cavités, les garder ou les<br />

aménager, les foudroyer.<br />

<strong>La</strong> première solution est sûre mais coûteuse; la<br />

deuxième est beaucoup moins chère mais peut présenter<br />

certains risques ; quant à la troisième, elle<br />

est généralement évitée, surtout au voisinage des<br />

agglomérations, la stabilisation des terrains traités<br />

de cette manière étant très lente.<br />

C'est à travers quelques exemples que nous allons<br />

examiner ce qui a été réalisé dans le nord de la France,<br />

au moins en ce qui concerne les deux premiers types<br />

de solutions.<br />

Comblement<br />

Méthode pneumatique<br />

Dans la région lilloise, la prise de conscience du<br />

problème posé par les carrières souterraines en<br />

construction routière est assez récente, puisqu'elle<br />

ne remonte pratiquement qu'au chantier de la déviation<br />

du CD 146 sur le territoire de Lezennes.<br />

Ce village fut jusqu'à une époque assez récente un<br />

grand centre d'extraction de pierre à bâtir, bien<br />

connu des géologues et la présence de ces carrières<br />

a été signalée dès les études d'avant-projet effectuées<br />

en 1962.<br />

Toutefois, les accès praticables s'étant progressivement<br />

perdus, la reconnaissance par le fond ne<br />

141


Fig. 26. — Fontis à l'emplacement des carrières souterraines du<br />

four à chaux de Saint-Saulve produit par la remontée du toit de la<br />

carrière.<br />

commença qu'en 1967. Cette reconnaissance révéla<br />

que les quelques 800 m de projet intéressés par le<br />

problème étaient implantés sur des carrières assez<br />

saines dans l'ensemble, à l'exception d'une zone<br />

qu'il aurait fallu surveiller de plus près. On convint<br />

par conséquent de garder intactes les carrières, en<br />

se contentant de combler les puits d'accès, de confectionner<br />

une dalle prenant appui sur les piliers<br />

et d'aménager des puits de visite en zone mauvaise.<br />

Les travaux étaient à peine commencés que, dans<br />

une zone réputée saine, l'ouverture d'un puits d'accès<br />

provoquait un effondrement d'environ 8 m de long<br />

sur plusieurs mètres de large, suivant un réseau de<br />

diaclases.<br />

A la suite de cet incident, on prit la décision de<br />

remblayer intégralement les carrières souterraines<br />

sous l'emprise de la déviation.<br />

Le choix une fois fixé sur la méthode pneumatique,<br />

des essais réalisés sur différents matériaux régionaux<br />

(sables à lapins, sables de dunes, schistes, scories, etc.)<br />

conduisirent à adopter un granulat 0/22 en provenance<br />

des carrières du Tournaisis.<br />

L'atelier de remblaiement (fig. 29-30) était constitué<br />

comme suit :<br />

— un placy de 1 m 3 monté sous une trémie,<br />

— trois compresseurs donnant approximativement<br />

300 ch au total,<br />

— deux citernes d'air de 3 m 3 chacune,<br />

— un chargeur et une sauterelle pour approvisionner<br />

la trémie,<br />

— des tuyaux de 150 mm de diamètre en acier.<br />

Quatre à neuf agents se trouvaient en permanence<br />

au fond, dont une équipe de sécurité sous la direction<br />

d'un spécialiste des mines, et un agent au placy.<br />

Au nombre des sujétions importantes, il faut retenir :<br />

— les opérations de boisage et déboisage qui précèdent<br />

et suivent le comblement;<br />

— les changements de poste, l'atelier défini plus<br />

haut ayant un rayon d'action d'environ 30 à 40 m<br />

(fig. 31);<br />

— le renouvellement fréquent de la tuyauterie, un<br />

élément droit et un coude ayant respectivement des<br />

durées de vie maximales de trois semaines et de<br />

huit jours.<br />

Citons également le problème des vibrations des<br />

compresseurs, qui doivent être placés à l'écart ou<br />

dans une zone saine, et signalons enfin que le granulat<br />

0/22 initialement prévu, trop riche en fines,<br />

fut remplacé très rapidement par un 8/22 en raison<br />

des phénomènes de bourrage (suivis éventuellement<br />

de départs en coup de canon avec ébranlement de<br />

toute l'installation) et de la quantité considérable de<br />

poussière libérée au fond.<br />

Fig. 27. — Carrières souterraines à Hordain, pilier fissuré.<br />

De janvier à mai 1969, le remblaiement se poursuivit<br />

à la cadence journalière moyenne de 400 t pour<br />

deux postes de huit heures (avec des pointes de 600 t).<br />

142


143


Fig. 31. — Vue en plan montrant le rayon d'action d'une installation de comblement par la méthode pneumatique. A noter le réseau des tuyaux dans<br />

lesquels chemine le matériau.<br />

A la fin du chantier 40 000 t avaient été injectées,<br />

ce qui correspondait à un volume total d'environ<br />

23 000 m 3 .<br />

A la suite de cet exemple, d'autres chantiers routiers<br />

traversant des zones de carrières souterraines appliquèrent<br />

la même méthode de comblement. Ce fut<br />

le cas de l'autoroute A 2 à proximité de Valenciennes.<br />

Ici, les carrières différaient nettement de celles de<br />

Lezennes par :<br />

— leur situation à plus grande profondeur,<br />

— corrélativement, un petit nombre de puits d'accès,<br />

— l'exploitation en galeries et piliers d'une couche<br />

épaisse de 2 à 3 m, guère plus.<br />

Ces différences se traduisirent par des difficultés supplémentaires<br />

au niveau de la tuyauterie. En effet,<br />

outre des coudes plus nombreux au fond du fait de<br />

l'architecture de la carrière, le tuyau de descente,<br />

long de 15 m, était non plus oblique comme à Lezennes<br />

mais vertical, d'où les phénomènes de bourrage qui<br />

conduisirent à rajouter une injection d'air au pied<br />

du tuyau.<br />

Fig. 32. — Murs de pierres sèches recouverts d'une toile plastique<br />

simplement agrafée sur les piliers de craie pour que le coulis ne puisse<br />

pas passer à travers.<br />

Méthode par injection<br />

L'application de cette méthode au remblaiement de<br />

cavités souterraines dans le cadre de la construction<br />

routière remonte, dans la région, à l'année 1966.<br />

Il s'agissait en l'occurrence de remblayer d'anciennes<br />

carrières souterraines exploitées en galeries et piliers<br />

sous la RN 17 près de Cambrai.<br />

144


Les caractéristiques géométriques de ces carrières<br />

étaient les suivantes :<br />

— épaisseur des terrains au-dessus des galeries :<br />

4 à 8 m,<br />

— hauteur des galeries : 1 à 3 m,<br />

— largeur des galeries : 1 à 4 m.<br />

Le comblement par injection y fut retenu en raison<br />

du mauvais état général des cavités et de l'exploitation<br />

apparemment très anarchique, rendant très<br />

difficile une consolidation par maçonneries.<br />

On choisit un coulis à base de cendres volantes,<br />

dosées à 100 kg de ciment pour 1 000 kg de cendres<br />

volantes, avec un surdosage à 150-200 kg de ciment<br />

pour le clavage.<br />

Par rapport à la méthode pneumatique, l'injection<br />

nécessite des travaux préliminaires plus importants.<br />

Il faut en effet exécuter les forages d'injection et<br />

ériger les murs qui circonscriront la zone à injecter.<br />

Ces murs peuvent le plus souvent être réalisés à<br />

bon compte avec des moellons abandonnés et des<br />

rebuts de taille de l'ancienne exploitation. On les<br />

monte à sec, sans les cimenter, et on les recouvre<br />

d'une toile plastique que l'on fixe au moyen d'agrafes<br />

(fig. 32).<br />

Toutefois, la phase de comblement est beaucoup<br />

plus facile, l'intervention humaine au fond se limitant<br />

à une simple surveillance du remplissage.<br />

Une installation d'injection classique (fig. 33-34)<br />

comporte essentiellement :<br />

— un stockage pour les éléments constitutifs du<br />

mélange et bien entendu une alimentation en eau ;<br />

— un dispositif de fabrication du coulis, avec notamment<br />

un malaxeur;<br />

— des presses d'injection fonctionnant à l'air comprimé,<br />

qui refoulent le coulis dans les flexiblesd'injection<br />

et de là dans les cavités par l'intermédiaire des<br />

forages d'injection.<br />

Dans le présent exemple, les travaux durèrent environ<br />

cinq mois, installation et déménagement compris.<br />

Fig. 34. — Vue en plan d'une<br />

installation type d'injection sur<br />

une zone de carrières souterraines<br />

à remblayer. Sont également<br />

représentés les forages<br />

d'injection et les murs en pierres<br />

sèches qui délimitent la zone<br />

145


Près de 6 000 t furent injectées en quatre mois d'injection<br />

effectifs.<br />

Tout récemment, cette méthode a été de nouveau<br />

appliquée au comblement de carrières souterraines<br />

sur plusieurs chantiers du Valenciennois.<br />

Comparaison de ces deux méthodes<br />

<strong>La</strong> méthode de comblement par injection présente<br />

de gros avantages.<br />

Elle est plus sûre : si les forages d'injection sont<br />

convenablement implantés les cavités sont parfaitement<br />

comblées, et ce par un matériau qui acquiert<br />

en peu de temps une résistance au moins comparable<br />

à celle de la roche originelle (fig. 35). Les risques<br />

d'effondrement sont ainsi totalement supprimés alors<br />

que la méthode pneumatique se contente de les<br />

atténuer.<br />

Fig. 35. — Comblement par injection. En arrière-plan, on distingue<br />

le coulis qui s'écoule du plafond de la galerie par le forage d'injection.<br />

Elle est moins onéreuse : les prix récemment pratiqués<br />

se montaient, pour l'injection uniquement 8 , à environ<br />

75 F le m 3 , ce qui correspond à environ 85 F le m 3<br />

compte tenu des fournitures de cendres volantes et<br />

de ciment 9 .<br />

Par la méthode pneumatique le m 3<br />

de matériau mis<br />

en place est payé au minimum 110 à 120 F 8 e t 9 .<br />

—f L/u/**r «y» :<br />

Fig. 36. — Détail d'un plan montrant la disposition des pieux sous l'un des immeubles.<br />

146


Son seul inconvénient réside peut-être dans une<br />

rapidité moindre. L'augmentation, possible, de la<br />

cadence de mise en œuvre se traduirait par une<br />

multiplication des moyens matériels.<br />

Remarque<br />

Dans le cas des exploitations uniquement en bouteilles,<br />

une méthode de comblement beaucoup plus<br />

simple que celles que nous venons d'exposer pourrait<br />

être envisagée. Il suffirait en effet de remplir une à<br />

une les bouteilles préalablement ouvertes en y déversant<br />

un matériau susceptible de se mettre en place<br />

par gravité (par exemple un sable régional bien<br />

arrosé).<br />

8. Prix moyen hors taxes. Ce prix est susceptible de variations<br />

suivant l'importance du chantier. En ce qui concerne les<br />

chantiers les plus récents traités par la méthode par injection,<br />

les prix pratiqués avoisinaient 100 F le m 3 .<br />

9. Ce prix est évidemment fonction de la distance aux lieux<br />

d'approvisionnement.<br />

Aménagement<br />

Quand on se trouve en présence d'une carrière saine,<br />

il est préférable du point de vue économique de la<br />

garder ou tout au moins de différer son comblement.<br />

Il faudra alors :<br />

— renforcer les zones faibles par consolidation de<br />

certains piliers ou même exécution de piliers supplémentaires,<br />

étalement de certaines galeries, etc. ;<br />

— aménager des accès, afin que le service des Carrières<br />

puisse effectuer des visites périodiques et suivre<br />

l'évolution éventuelle des cavités.<br />

Ces travaux réalisés, la zone pourra éventuellement<br />

supporter des logements individuels.<br />

Si des immeubles collectifs sont prévus, ces mesures<br />

ne seront plus suffisantes. Les charges apportées par<br />

la construction devront être transférées sous le niveau<br />

des cavités par l'intermédiaire de fondations profondes.<br />

Les figures 36 et 37 illustrent une réalisation de ce<br />

type dans la région lilloise.<br />

Conclusion<br />

En matière de prospection, il faut retenir l'importance fondamentale de l'enquête sur le terrain.<br />

Cette enquête doit être menée par un géologue connaissant bien la région, apte à faire la part des<br />

légendes qui entourent généralement le sujet. Par la suite, une campagne gravimétrique bien faite<br />

147


permet dans un grand nombre de cas de localiser la ou les zones suspectés. Bien entendu, les cavités<br />

isolées ou en petits groupes sont difficilement détectées par cette méthode, mais les autres techniques<br />

de prospection géophysique connues à l'heure actuelle se révèlent également inefficaces.<br />

En ce qui concerne le traitement de ces cavités souterraines dans la craie, on doit tenir compte :<br />

— de leur état de conservation,<br />

— des constructions qu'elles supportent déjà ou qu'elles devront supporter ; en ce sens, chaque cas<br />

est un cas d'espèce. Au moment de la décision, il ne faut surtout pas oublier que les solutions de<br />

comblement sont très chères et qu'elles devraient par conséquent être réservées en priorité aux<br />

cavités les plus instables ou les plus endommagées. Pour les autres, on pourrait se contenter, au<br />

moins en première phase, d'un confortement bien étudié moyennant une surveillance périodique,<br />

ce qui suppose l'aménagement d'un certain nombre d'accès.<br />

BIBLIOGRAPHIE<br />

[1] ARNOULD M., <strong>La</strong> recherche de cavités souterraines sur les tracés autoroutiers, Bull, liaison <strong>La</strong>bo.<br />

Routiers P. et Ch., 10, nov.-déc. 1964, p. 1-4.<br />

[2] BRIQUET A., Turonien supérieur et Sénonien inférieur dans le nord de la France. Annales de la<br />

Société géologique du Nord, 46, pp. 127-137.<br />

[3] CAYEUX L., <strong>La</strong> faune du tun ; extension en épaisseur de la zone à Micraster breviporus. Annales<br />

de la Société géologique du Nord, 16, (1888-89).<br />

[4] CAYEUX L., Mémoire sur la craie grise du nord de la France. Annales de la Société géologique<br />

du Nord, 17, (1889-90).<br />

[5] GABILLARD R., DUBUS J.-P. et LOUAGE F., Procédé électromagnétique pour la détection des<br />

carrières souterraines. Simulation sur une cuve électrolytique HF. L'onde électrique, 49, fasc. 2,<br />

fév. 1969, pp. 168-173.<br />

[6] GABILLARD R., DUBUS J.-P. et CAUTERMAN M., Campagne de détection de carrières souterraines<br />

dans la région lilloise par une méthode de prospection électrique. Bulletin liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch.,<br />

54, août-sept. 1971, pp. 101-108.<br />

[7] GOSSELET J., Esquisse géologique du nord de la France (1880).<br />

[8] GOSSELET J., Constitution géologique du Cambrésis (1865).<br />

[9] GOSSELET J., Les assises crétaciques et tertiaires (1904-1913).<br />

[10] GRZELCZYK E. et PALAT P., Les carrières du Nord, <strong>La</strong> chronique (1972).<br />

[11] LABORATOIRE DES PONTS ET CHAUSSÉES DU DÉPARTEMENT DE LA SEINE. Application d'une méthode<br />

géophysique à la recherche des activités souterraines. Bull, liaison <strong>La</strong>bo. Routiers P. et Ch.,<br />

10, nov.-déc. 1964, pp. 1-4 -1-6.<br />

[12] LAKSHMANAN J., Reconnaissance de cavités dans le sous-sol par procédés électriques et gravimétriques.<br />

Sols - Soils, 2, mars 1963, pp. 9-15.<br />

[13] MILLON R., Essai de diverses méthodes géophysiques sur des cavités souterraines. Chronique<br />

d'hydrogéologie. BRGM, 2, (1963), pp. 59-63.<br />

[14] NEUMANN R., <strong>La</strong> gravimétrie de haute précision. Application aux recherches de cavités. Geophysical<br />

Prospecting, 15, n° 1, (1967).<br />

Cet article a été publié dans le Bulletin de Liaison des <strong>La</strong>boratoires des Ponts et Chaussées, n° 63, janv.-fév. 1973.<br />

148


<strong>La</strong> craie<br />

dans les sites d'ouvrages<br />

de production d'électricité<br />

G. COMÉS<br />

Ingénieur<br />

Division Géologie-Géotechnique<br />

Direction de l'Equipement d'EDF<br />

Au cours des cinq dernières années, la division Géologie-Géotechnique<br />

introduction de la direction de l'Equipement d'EDF a été amenée, par suite de<br />

l'évolution dans l'implantation et dans la réalisation des ouvrages<br />

de production d'énergie électrique, à étudier la craie comme matériau de fondation.<br />

Les caractéristiques mécaniques présentées par la craie font que ce matériau a un comportement<br />

très différent de ceux des roches habituellement rencontrées jusqu'à présent, telles que : granités,<br />

schistes, calcaires, etc. Il a donc paru intéressant de faire état, dans le cadre de ce colloque, de<br />

l'expérience recueillie sur ce matériau sédimentaire.<br />

Les investigations géologiques et géotechniques entreprises ont été réalisées sur différentes craies du<br />

Sénonien. Les sites envisagés pour y implanter des ouvrages futurs se trouvent être répartis dans le<br />

Bassin parisien au sens large du terme.<br />

L'exposé qui va suivre est articulé sur deux études bien distinctes. Tout d'abord, il sera question<br />

des travaux entrepris dans la région d'Epernay où devait être installée une station souterraine de<br />

transfert d'énergie par pompage. Puis il sera fait état des résultats de recherches plus récentes<br />

dans le pays de Caux.<br />

<strong>La</strong> craie du pays champenois<br />

GÉOLOGIE DU SITE<br />

Le site de Venteuil-Tincourt, près d'Epernay, se situe<br />

sur le bord oriental du plateau de la Brie entaillé par<br />

la vallée de la Marne.<br />

<strong>La</strong> pente du versant est douce, ce qui implique que le<br />

matériau formant le plateau est constitué par des<br />

roches tendres.<br />

Le soubassement du plateau est formé par la craie<br />

de Champagne. Sur ce soubassement repose une<br />

succession de couches diverses correspondant à<br />

différents étages du Tertiaire.<br />

Les ouvrages souterrains se trouvent être calés dans<br />

le Sénonien. <strong>La</strong> couche de craie intéressée est la craie<br />

d'Epernay, dite légère par opposition à la craie<br />

sous-jacente qui est la craie de Reims lourde et argileuse.<br />

Les études entreprises sur ce site et notamment<br />

celles relatives à l'usine souterraine ont comporté le<br />

creusement d'une galerie de reconnaissance pour.<br />

atteindre la zone envisagée sous 200 m de recouvrement<br />

environ.<br />

En fonction de la progression de l'avancement et de<br />

l'enfoncement de la galerie sous la colline, des prélèvements<br />

d'échantillons rocheux ont été effectués et<br />

envoyés au laboratoire, alors que parallèlement des<br />

essais en place ont été exécutés.<br />

149<br />

Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch. - Spécial V - Octobre 1973


CARACTÉRISTIQUES PHYSIQUES<br />

<strong>La</strong> craie ne contient pas d'argile. Elle est composée<br />

par un assemblage de cristaux automorphes de 1 à<br />

2 microns laissant entre eux des vides de dimensions<br />

inférieures au micron. <strong>La</strong> craie est formée presque exclusivement<br />

de carbonate de calcium, 95,7 % sous sa<br />

forme cristalline habituelle, la calcite provenant<br />

essentiellement du squelette calcaire d'animaux microscopiques<br />

(coccolithe) :<br />

— densité du squelette (y s<br />

) 2,70<br />

— densité d'un échantillon naturel (y) 2,00<br />

— densité d'un échantillon sec (j


En effet, à partir de 780 m, soit pour une hauteur de<br />

recouvrement de 127 m, la craie s'est écaillée à la<br />

paroi et des dalles se sont détachées de la calotte,<br />

créant des chapelles de forme ogivale de 1,50 m de<br />

hauteur. <strong>La</strong> perforation a été arrêtée, des cintres ont<br />

été posés, puis le creusement a été repris en abattant<br />

la craie au marteau-piqueur.<br />

A partir de 900 m, l'écaillage s'est manifesté aussi<br />

parallèlement à la surface du front de taille.<br />

Les cadences d'avancement qui étaient de 6 à 8 m<br />

par jour sur le tronçon n° 2 sont tombées de 3 à 4 m<br />

par jour dans le dernier tronçon (ces chiffres ne<br />

tiennent pas compte de l'arrêt pour traitement du<br />

radier). Quant aux cadences d'avancement réalisées<br />

sur le premier tronçon, elles sont difficilement<br />

chiffrables, compte tenu des difficultés citées précédemment.<br />

Marinage<br />

Cette phase de travail devint rapidement la préoccupation<br />

essentielle du chantier, et elle le demeura<br />

pendant toute la durée des travaux.<br />

Il faut rappeler que l'avancement était effectué en<br />

attaque descendante, et qu'à partir de 200 m la nappe<br />

phréatique a été rencontrée, ce qui a eu pour effet de<br />

provoquer des suintements très modestes il est vrai,<br />

qui ont atteint à la fin des travaux 0,5 1/s.<br />

L'engin de chargement équipé de chenilles et les<br />

camions de transport sur pneus malaxaient la craie<br />

en la transformant en pâte et ouvraient dans le radier<br />

des ornières profondes. Le mouvement des engins<br />

s'est ralenti considérablement et la circulation du<br />

personnel devint difficile.<br />

Il fut alors nécessaire de procéder au traitement du<br />

radier. Diverses solutions ont été essayées en vain :<br />

— mise en place dans les ornières d'enrochement<br />

calcaires 0/250,<br />

— pose de traverses en bois,<br />

— pose de plaques en béton armé préfabriquées de<br />

1 500 x 700 x100.<br />

Après toutes ces tentatives infructueuses, on dut<br />

revêtir le radier d'une chappe en béton de 0,20 m<br />

d'épaisseur. Le béton a été dosé à 300 kg/m 3<br />

avec<br />

un accélérateur de prise. Ce procédé, assez irrationnel<br />

en lui-même, puisque l'on circulait sur le béton bien<br />

avant le durcissement total, a permis de réaliser la<br />

perforation de l'ouvrage de reconnaissance.<br />

Exhaure<br />

L'évacuation des eaux d'infiltration, bien que portant<br />

sur un faible débit, a été une opération très difficile à<br />

réaliser. En effet, il a fallu tenir compte de la pente de<br />

la galerie et surtout pomper en permanence des boues<br />

provenant du malaxage et de la dilution de la craie<br />

par les engins de terrassement.<br />

Malgré l'emploi de pompes capables d'aspirer des<br />

eaux très chargées, il a fallu se résoudre, pour rendre<br />

l'exhaure possible, à importer en permanence au<br />

front de taille 1,5 1/s d'eau propre afin de diluer les<br />

boues. Précisons que le moindre arrêt dans l'alimentation<br />

pouvait provoquer la prise en masse du matériau<br />

dans les pompes et les tuyauteries du fait de phénomènes<br />

de thixotropie.<br />

En outre, un important bassin de décantation a dû<br />

être installé à l'extérieur afin de ne pas envoyer à la<br />

rivière des eaux trop chargées.<br />

Hors-profils<br />

L'abattage de la craie, que ce soit à l'outil pneumatique<br />

ou à l'explosif peu brisant, a permis de réaliser une<br />

section d'excavation ne présentant pratiquement pas<br />

de hors-profils.<br />

Il en est allé différemment pour le radier où, pour les<br />

raisons déjà signalées, il a été nécessaire d'évacuer<br />

près de 3 000 m 3<br />

de matériau supplémentaire, ce qui<br />

représente un hors-profil de près du quart de la section<br />

théorique.<br />

Soutènement<br />

Deux zones ont dû être cintrées, comme il a été<br />

indiqué plus haut : la zone remaniée superficielle à<br />

l'entrée de l'ouvrage, puis la zone profonde où se<br />

manifestaient les ruptures par décompression.<br />

Les essais spéciaux<br />

Boulonnage<br />

Dans le massif à comportement élastique, c'est-à-dire<br />

la zone centrale, des essais de mise en place de boulons<br />

d'ancrage de 2 m de longueur ont été réalisés.<br />

Les boulons à coquilles d'expansion ont été mis en<br />

place, mais les essais de traction exécutés ont montré<br />

que les mâchoires glissaient systématiquement à<br />

partir de 2 à 4 t ce qui était incompatible avec<br />

le but recherché. Par contre, les boulons scellés à la<br />

résine ont montré un comportement satisfaisant<br />

puisque l'on n'obtient pas d'arrachement en dessous<br />

de 161 et cela pour des tiges de 25 mm de diamètre. Il a<br />

été nécessaire d'employer des plaques de répartition<br />

d'assez grande dimension afin de ne pas poinçonner<br />

la craie.<br />

Gunitage<br />

Le gunitage des parois du souterrain a été essayé<br />

comme procédé de soutènement.<br />

Tout d'abord on s'est assuré que la gunite adhérait<br />

correctement à la craie. A cet effet, quelques cintres<br />

légers de sécurité ont été démontés à 190 m, et ils ont<br />

été remplacés par une gunite mince de 3 cm d'épaisseur.<br />

<strong>La</strong> stabilité de la zone testée n'ayant pas évolué, il a<br />

été décidé de mettre en œuvre ce procédé à l'avancement<br />

dans la partie où la décompression apparaissait.<br />

C'est ainsi que plusieurs tentatives ont été réalisées<br />

avec succès, à partir de 850 m l'épaisseur de la gunite<br />

mise en place étant cette fois de 15 cm. Cette épaisseur<br />

a été obtenue en réalisant plusieurs passes. Toutefois,<br />

afin d'assurer au maximum la sécurité du personnel,<br />

151


il importe que la mise en place de la gunite soit exécutée<br />

par des spécialistes et au fur et à mesure du creusement<br />

afin d'éviter la chute naturelle des écailles.<br />

Effet des vibrations<br />

<strong>La</strong> résistance de la craie aux efforts alternés a été<br />

étudiée. Pour ce faire, un moteur à balourd a été<br />

fixé sur des massifs de béton de diverses dimensions.<br />

Ces massifs étaient encastrés dans la craie et fixés à<br />

l'aide de boulons scellés à la résine.<br />

<strong>La</strong> force centrifuge était réglable jusqu'à 3 500 kg. <strong>La</strong><br />

vitesse de rotation des éléments tournants était<br />

constante (1 500 tr/mn).<br />

Cinq essais successifs ont été réalisés dont trois ont<br />

abouti rapidement au descellement des massifs. Au<br />

contact du béton, la craie s'est transformée en bouillie<br />

liquide qui est remontée le long des faces latérales des<br />

blocs (fig. 2).<br />

L'exploitation de machines tournantes dans ce<br />

matériau pose donc des problèmes que l'expérimentation<br />

réalisée n'a fait qu'aborder.<br />

T. (bar)<br />

0.5<br />

0,4<br />

0,3<br />

+<br />

+<br />

0,2<br />

O<br />

0 1 + Mass f arraché<br />

0 Massif stable<br />

0<br />

0,1 0,2 0,3 oMbar)<br />

Fig. 2. — Essais de vibration sur la craie.<br />

LA CRAIE AU LABORATOIRE<br />

Résistance<br />

<strong>La</strong> craie, selon qu'elle est saturée ou sèche, présente<br />

des caractéristiques de résistance différente (tableau I)<br />

En compression monoaxiale, la craie sèche se comporte<br />

comme un solide élastique fragile doué d'une très<br />

légère viscosité. <strong>La</strong> rupture est du type explosif, avec<br />

formation de colonnettes orientées parallèlement à<br />

l'axe de l'effort (rupture par extension).<br />

<strong>La</strong> craie saturée se comporte comme un solide viscoélastique,<br />

dont la résistance décroît quand la teneur<br />

en eau augmente. Dans ce cas la rupture est du type<br />

progressif, elle est obtenue par glissement après que<br />

l'on ait mesuré une déformation très importante.<br />

Cycles<br />

Module en 10 3 bars<br />

H<br />

V<br />

1 61 51<br />

2 50 44<br />

3 41 37<br />

4 37 34<br />

5 33 28<br />

6 31 22<br />

TABLEAU I<br />

Résistance monoaxiale de la craie (bar)<br />

Echantillon Direction Compression<br />

Traction<br />

(brésilien)<br />

Fig. 3. — Anisotropie de déformabilité de la craie.<br />

<strong>Craie</strong> sèche verticale 1<br />

horizontale 2 100 à 120<br />

80 à 100<br />

<strong>Craie</strong> saturée<br />

verticale<br />

horizontale<br />

1. Normalement à la sédimentation.<br />

2. Parallèlement à la sédimentation.<br />

40 à 55<br />

25 à 35<br />

8<br />

10<br />

<strong>La</strong> craie, de par sa texture, présente une anisotropie<br />

de résistance, laquelle s'inverse d'ailleurs lorsqu'on<br />

passe de la compression à la traction. Ce phénomène<br />

s'explique si la rupture en compression est bien due à<br />

l'extension transversale de l'échantillon.<br />

6<br />

9<br />

Déformabilité<br />

Le module d'élasticité est plus élevé pour la craie<br />

sèche que pour la craie saturée. Pour une porosité<br />

donnée il est anisotrope, plus élevé dans la direction<br />

perpendiculaire à la stratification (tableau II).<br />

Il est remarquable que les ordres de grandeur des<br />

valeurs mesurées en laboratoire sur échantillons<br />

(diamètres, 36, 60 et 100 mm) ont été vérifiés sur le<br />

terrain quelles que soient les méthodes d'investigations<br />

utilisées (vérin à plaques de charge circulaires, dilatomètre<br />

en sondage, vérin plat en saignée) (fig. 3).<br />

152


Le module dynamique lui aussi est encore du même<br />

ordre de grandeur. <strong>La</strong> célérité des ondes dans la craie<br />

sèche est plus faible que dans la craie saturée.<br />

Type d'essai<br />

TABLEAU II<br />

Module d'élasticité de la craie<br />

Direction<br />

Domaine<br />

de<br />

contrainte<br />

(bar)<br />

Module<br />

(10 3 bar)<br />

cette variation influence la résistance à la compression<br />

et le module d'Young du matériau.<br />

En outre, à porosité égale, les mesures de calcimétrie<br />

permettent de préciser que la résistance de la craie est<br />

liée à la teneur en carbonate de calcium. Le diagramme<br />

de la figure 4, établi en recherchant dans la bibliographie<br />

les résultats obtenus sur différents types de<br />

craie présentant une composition minéralogique à<br />

peu près identique, illustre correctement ce phénomène.<br />

<strong>La</strong>boratoire<br />

r<br />

craie sèche<br />

[ craie saturée<br />

verticale<br />

verticale<br />

horizontale<br />

0-50<br />

0-30<br />

0-30<br />

70<br />

60<br />

40<br />

Rc<br />

(bar)<br />

Souterrain<br />

vérin à plaques<br />

de charge<br />

verticale<br />

(calotte)<br />

horizontale<br />

(parements)<br />

0-60<br />

0-60<br />

32,5<br />

22,5<br />

' dilatomètre en verticale<br />

1 sondage horizontale<br />

0-50<br />

0-50<br />

40<br />

50<br />

vérin plat verticale 20-40 90<br />

sismique<br />

réfraction<br />

horizontale 0 66<br />

On remarquera la bonne concordance des résultats<br />

entre les diverses méthodes de mesures mises en œuvre.<br />

On peut attribuer cet avantage à la continuité du<br />

massif de craie étudié.<br />

Rupture fragile<br />

<strong>La</strong> rupture a été obtenue également en souterrain et<br />

pour la même valeur de contrainte qu'au laboratoire.<br />

Les mesures de contraintes exécutées à la paroi du<br />

tunnel et pour différentes profondeurs de recouvrement<br />

ont montré systématiquement que la contrainte<br />

parallèle à l'axe du tunnel est égale à la pression due<br />

au recouvrement et que la contrainte tangentielle<br />

verticale sur l'extrémité d'un diamètre horizontal<br />

était le double de cette pression. Ainsi le matériau,<br />

avant le percement de la galerie, était dans un état<br />

de contrainte très voisin de l'hydrostatisme.<br />

Il était alors aisé de prévoir que la résistance à la<br />

compression du matériau saturé serait atteinte sur le<br />

pourtour du tunnel dès lors que la hauteur de recouvrement<br />

dépasserait 125 m. Le chef de chantier en<br />

avait été informé en prévision des difficultés qui allaient<br />

surgir, dues à la nécessité de mettre en place un<br />

soutènement. En effet, à partir de 750 m, les difficultés<br />

sont apparues sous la forme d'un écaillage de la paroi.<br />

Cette rupture aurait même dû se manifester plus tôt<br />

en calotte à cause de l'anisotropie des résistances.<br />

Ces divers caractères font de la craie une roche privilégiée,<br />

dont le comportement élastique fragile est le<br />

même dans le massif et au laboratoire, grâce à l'absence<br />

de fissuration.<br />

Influence de la porosité<br />

Au cours des prélèvements effectués sur le tracé du<br />

tunnel, des variations dans la porosité de la craie ont<br />

été décelées. Les mesures en laboratoire montrent que<br />

Ca C03 > 90 %<br />

0 10 20 30 40<br />

Porosité<br />

Fig. 4. — Influence de la porosité et de la teneur en Ca CO3 sur la<br />

résistance à la compression.<br />

Courbe intrinsèque<br />

Résistance au cisaillement<br />

<strong>La</strong> grande différence entre un essai triaxial et un<br />

essai de cisaillement direct vient du fait que dans le<br />

premier essai le cisaillement de l'échantillon est<br />

libre, tandis que dans le second il est imposé. C'est<br />

pour cette raison que l'essai de cisaillement Lundborg<br />

(fig. 5) a été adopté. Cet essai, par son principe, se<br />

place à mi-chemin entre ces deux conceptions (double<br />

cisaillement d'un cylindre soumis à une pression<br />

axiale dans une chambre suffisamment ajustée pour<br />

que la déformation transversale par réaction développe<br />

une sollicitation triaxiale).<br />

Les essais de cisaillement permettent d'explorer avec<br />

beaucoup de précision le début de la courbe intrinsèque.<br />

En compression triaxiale, non drainée, la craie saturée<br />

présente un comportement en deux phases : une<br />

branche élastique, suivie d'une déformation indéfinie<br />

dont la plus grande partie est permanente (comportement<br />

plastique). Après essai, l'échantillon montre<br />

simplement un changement de forme, sans fissuration<br />

ni altération notable.<br />

Le comportement de la craie sèche est différent et<br />

dépend uniquement de la valeur de la pression latérale.<br />

Entre 20 et 100 bars, le comportement est élastique<br />

fragile, et l'échantillon se casse en deux parties suivant<br />

une inclinaison voisine de 60°. Au-delà de 100 bars,<br />

le matériau a un comportement de type ductile,<br />

on peut alors obtenir des déformations considérables.<br />

n(%)<br />

153


Les résultats des essais de cisaillement obtenus<br />

montrent que la craie saturée présente une cohésion<br />

appréciable de l'ordre de 10 bars (tableau III).<br />

TABLEAU m<br />

Résistance au cisaillement de la craie (bar)<br />

Contrainte normale <strong>Craie</strong> sèche <strong>Craie</strong> saturée<br />

0 20 10<br />

10 — 20<br />

25 — 25,5<br />

50 — 29,5<br />

100 66 25<br />

150 85 26<br />

LE LABORATOIRE SUR LE CHANTIER<br />

MODÈLE RÉDUIT DE CAVITÉ<br />

Fig. 5. — Essai de double cisaillement, type Lundborg.<br />

Dans ce dernier cas, après essai, l'échantillon présente<br />

une forme en barillet. L'échantillon constituant le<br />

barillet possède alors une densité et une porosité<br />

différentes du matériau originel.<br />

Le fait de creuser une excavation en souterrain modifie<br />

l'état d'équilibre initial présenté par le matériau<br />

rocheux.<br />

Il est évident que pour un ouvrage de petite dimension,<br />

creusé en une seule phase, comme cela est le cas pour<br />

les galeries, un nouvel état d'équilibre se produit<br />

après les travaux d'excavation. En règle générale,<br />

la paroi de l'excavation reste stable.<br />

En ce qui concerne la stabilité des parois des grandes<br />

cavités, le problème est plus complexe. Le creusement<br />

5.45<br />

Fig. 6. — Alvéole d'essais.<br />

a) Phase d'abattage, b) Dispositif d'auscultation.<br />

154


de ce type d'ouvrage comporte de nombreuses phases<br />

dans les opérations d'abattage. Chacune de ces phases<br />

modifie l'état d'équilibre à la paroi de l'excavation.<br />

L'effet de la succession de ces différents états peut<br />

être nocif sur la stabilité finale.<br />

L'excavation d'un grand alvéole souterrain, comme<br />

celui destiné à recevoir une salle des machines, est<br />

réalisée en général suivant un schéma bien défini.<br />

Tout d'abord la voûte est creusée puis elle reçoit un<br />

revêtement en béton. Et c'est à l'abri de cette protection<br />

que l'excavation sera poursuivie sur toute la<br />

hauteur nécessaire. <strong>La</strong> réalisation des diverses phases<br />

d'abattage s'accompagne d'une déformation du<br />

matériau rocheux qui peut aller jusqu'à provoquer<br />

des désordres dans la voûte en béton.<br />

C'est pour étudier ce problème, qu'un modèle réduit<br />

de l'usine projetée a été exécuté. Implanté sous une<br />

hauteur de recouvrement de 90 m, pour éviter les<br />

phénomènes de rupture fragile décelés plus profondément,<br />

le modèle réduit a été réalisé à l'échelle 1/5.<br />

Les travaux d'abattage ont été menés, comme pour<br />

une véritable usine souterraine, en plusieurs phases.<br />

Toutefois, la voûte en béton n'a pas été exécutée (par<br />

raison d'économie uniquement), simplement un boulonnage<br />

systématique avec grillage a été posé (fig. 6).<br />

Le dispositif d'auscultation mis en place dans l'alvéole<br />

d'essai à permis de contrôler :<br />

— les variations de largeur de la cavité dans sa partie<br />

haute et dans sa partie médiane ;<br />

— l'évolution du matériau à partir de la paroi de<br />

l'excavation, à l'aide de forages dans lesquels il a été<br />

réalisé un contrôle endoscopique (fig. 7, 8, 9).<br />

Fig. 7. — Aperçu de la partie haute de l'alvéole d'essais.<br />

Pendant que les travaux d'abattage se déroulaient, un<br />

calcul élastique était mené par la méthode des éléments<br />

finis. A l'aide de ce modèle mathématique, il a été<br />

calculé en fonction des diverses phases de creusement :<br />

— les contraintes à la paroi,<br />

— le déplacement des parements.<br />

Les résultats obtenus en place donnent des déplacements<br />

inférieurs à ceux obtenus par les calculs (dans le<br />

rapport de 1 à 3 mm). Une telle différence ne peut<br />

s'expliquer que par une accomodation élastique de<br />

la craie avec diminution de volume.<br />

Ces résultats ont d'ailleurs été confirmés par d'autres<br />

moyens d'essais utilisés tels que : vérins plats et<br />

mesures dynamiques.<br />

Fig. 8. — Auscultation de l'alvéole d'essais. Les rubans sont utilisés<br />

pour les mesures transversales, on notera à droite les contrepoids qui<br />

assurent la tension des rubans.<br />

Fig. 9. — Contrôle des parois dans l'alvéole d'essais à l'endoscope,<br />

155


<strong>La</strong> craie du pays de Caux<br />

GÉOLOGIE DU SITE<br />

Dans la région étudiée, le pays de Caux est constitué<br />

par la craie du Sénonien. <strong>La</strong> série intéressée par le<br />

projet mesure environ 80 m de hauteur.<br />

Il s'agit essentiellement d'une craie blanche se présentant<br />

en bancs de 20 à 130 cm de puissance, séparés les<br />

uns des autres par des lits de silex en rognons plus<br />

ou moins discontinus.<br />

<strong>La</strong> texture fine des bancs crayeux présente quelques<br />

différences selon le niveau observé dans la série.<br />

Ainsi, on remarque une texture du genre fausse<br />

brèche dans les 22 m inférieurs. Cette fausse brèche se<br />

présente sous l'aspect d'éléments de forme irrégulière,<br />

constitués par de la craie à grains fins, très compacte,<br />

dure, enrobée par un ciment de grains plus grossiers et<br />

relativement friables. Au-dessus de cette tranche, la<br />

craie est constituée par une pâte homogène dont les<br />

caractéristiques à l'observation semblent être intermédiaires,<br />

du point de vue porosité et résistance,<br />

entre les éléments durs et la pâte friable des éléments<br />

sous-jacents.<br />

Cette différence a pu être confirmée par les résultats<br />

obtenus tant en place qu'en laboratoire.<br />

Pour permettre de définir les emplacements où les<br />

échantillons crayeux devaient être prélevés, il fut<br />

décidé d'explorer la craie sur toute la hauteur intéressante,<br />

à l'aide du scléromètre à béton Schmidt (fig. 10).<br />

A partir des indices de rebondissement obtenus, on a<br />

procédé à un premier classement de la craie par<br />

tranches horizontales. C'est ainsi que l'on a déterminé<br />

approximativement trois niveaux sur lesquels des<br />

prélèvements ont été entrepris.<br />

Rapidement, les premiers résultats de laboratoire<br />

permirent de limiter à deux niveaux distincts les différences<br />

dans le matériau.<br />

C'est ainsi que pour la compréhension de ce qui va<br />

suivre nous appellerons le matériau provenant :<br />

— des niveaux compris entre 0 et +22 m (fausse<br />

brèche), série 1,<br />

— des niveaux compris à +22 m et au-dessus (pâte<br />

homogène), série 2.<br />

Remarque : Cette étude est à sa phase exploratoire,<br />

c'est-à-dire que le choix du site n'est pas arrêté. Cela<br />

implique que les prélèvements ont été effectués<br />

manuellement, ce qui a eu pour principal effet de<br />

limiter le nombre et le volume des échantillons.<br />

CARACTÉRISTIQUES PHYSIQUES<br />

Caractéristiques physiques principales :<br />

Série 1 Série 2<br />

— densité du squelette (y s<br />

) 2,67 - 2,68 2,70<br />

— densité d'un échantillon<br />

à saturation (y) 1,96- 2 1,98 - 2<br />

— densité d'un échantillon<br />

sec (yd) 1,63 - 1,72 1,65<br />

— porosité (n) % 35 à 39 38<br />

— teneur en eau<br />

à saturation (w) % 21 à 23 22 à 24<br />

75 100<br />

Indice sclérométrique<br />

Fig. 10. — Résultats des essais au scléromètre à béton.<br />

L'examen de ces résultats montre une homogénéité<br />

d'ensemble entre les deux séries. Toutefois, les résultats<br />

obtenus sur la série 1 présentent une dispersion<br />

plus importante que celle de la série 2, par suite de la<br />

constitution même du matériau. En effet, le pourcentage<br />

de répartition des matériaux constitutifs de<br />

cette série n'est pas constant dans les éprouvettes<br />

testées.<br />

156


CARACTÉRISTIQUES MÉCANIQUES<br />

O* (bar)<br />

50<br />

Comme la craie d'Epernay, selon qu'elle est saturée<br />

ou sèche, cette craie présente des caractéristiques de<br />

résistances différentes (tableau IV).<br />

TABLEAU IV<br />

Résistance monoaxiale de la craie (bar)<br />

Echantillon Direction Repère<br />

Compression<br />

Traction<br />

(brésilien)<br />

\<br />

\<br />

\<br />

\<br />

/<br />

/<br />

/<br />

/<br />

60°<br />

/<br />

/<br />

30°<br />

<strong>Craie</strong> sèche<br />

<strong>Craie</strong> saturée<br />

verticale<br />

verticale<br />

verticale<br />

verticale<br />

série 1<br />

série 2<br />

série 1<br />

série 2<br />

90 à 92<br />

95<br />

30 à 32<br />

40 à 50<br />

6à8<br />

7 à 7,5<br />

3 à4<br />

3 à 3,2<br />

<strong>La</strong> craie, de par sa texture, présente une anisotropie<br />

de résistance. Pour les raisons énoncées plus haut,<br />

la mise en évidence de ce paramètre n'a pu être<br />

déterminée valablement que sur les échantillons<br />

provenant de la série 2. On.notera que l'hétérogénéité<br />

de la série 1 est mise en évidence par les résultats<br />

en compression monoaxiale sur échantillons saturés<br />

(fig. 11).<br />

Déformabilité<br />

L'anisotropie de comportement du matériau crayeux<br />

est également décelable à travers les valeurs du<br />

module d'Young. Le module est plus élevé dans la<br />

direction perpendiculaire à la stratification.<br />

Les résultats obtenus à partir des échantillons de la<br />

série 1 ne sont, encore une fois, guère représentatifs et<br />

sans grande signification. Par contre, le module<br />

d'élasticité de la craie saturée de la série 2 est de 39<br />

à 40 000 bars dans le sens vertical et de 31 000 bars<br />

dans le sens horizontal.<br />

Résistance au cisaillement<br />

Droite intrinsèque<br />

Les essais à la cellule triaxiale et à la boîte de cisaillement<br />

Lundborg ont été réalisés pour la craie cauchoise<br />

comme pour celle provenant d'Epernay,<br />

/<br />

/ s'<br />

\<br />

\<br />

ra \<br />

0 10 20 30 40 50<br />

cr (bar)<br />

Fig. 11. — Anisotropie de résistance de la craie saturée du pays de<br />

Caux (série 2).<br />

c'est-à-dire avec le même matériel d'essai et surtout<br />

dans les mêmes conditions technologiques. Toutefois,<br />

les expérimentations ont été, de très loin, bien moins<br />

nombreuses et de ce fait, elles furent limitées au<br />

matériau saturé de la série 2 et à la définition de la<br />

courbe intrinsèque sur la frange de l'axe x.<br />

Les valeurs obtenues présentent des ordres de grandeur<br />

assez comparables à ceux relevés sur la craie d'Epernay<br />

(tableau V).<br />

s'<br />

TABLEAU V<br />

Essai Lundborg. Résistance au cisaillement de la craie (bar)<br />

Contrainte normale <strong>Craie</strong> sèche <strong>Craie</strong> saturée<br />

0 32 10<br />

5 40 16<br />

10 45 22<br />

15 49 26<br />

Conclusion<br />

Les études réalisées sur la craie ont conduit à exécuter des investigations géotechniques en laboratoire<br />

et en place plus longues et plus importantes que prévu.<br />

Les caractéristiques de résistance présentées par le matériau crayeux ont un rapport très étroit avec<br />

les caractéristiques physique et chimique. <strong>La</strong> compréhension et l'analyse de la dispersion présentée<br />

par les valeurs de résistance ne sont possibles que si l'on effectue une identification physique et<br />

chimique de la craie (texture, porosité, pourcentage de Ca C0 3<br />

, teneur en argile, etc.).<br />

Les propriétés mécaniques présentées par la craie en font une roche présentant un comportement<br />

assez exceptionnel quand on veut l'utiliser comme fondation :<br />

— pour les travaux en souterrain, la craie impose que des techniques nouvelles soient innovées notamment<br />

en ce qui concerne les méthodes et les matériels de foration, les procédés et les vitesses<br />

157


d'abattage, la définition et la réalisation du soutènement (boutonnage, gunitage), le procédé et<br />

le mode d'évacuation du marinage ;<br />

— pour les travaux à l'extérieur, la craie nécessite que soit étudiée la stabilité des talus et des<br />

remblais (pente, tenue au gel, etc.).<br />

Les appréhensions que suscite la craie au début de toute étude s'estompent, en général, lentement<br />

au fur et à mesure du déroulement des travaux, car dans chaque cas, le projeteur a toujours su<br />

adapter la fondation à réaliser sur ce type de matériau.<br />

BIBLIOGRAPHIE<br />

TROISVALLET, Exécution<br />

mars 1968.<br />

d'une galerie de reconnaissance dans la craie, rapport interne EDF, (non publié),<br />

DESSENNE J.L., COMÈS G., DUFFAUT P. et GÉRARD P., <strong>La</strong> craie au laboratoire et dans un tunnel profond,<br />

VII e Cong. int. méc. sols et trav. de fond., Mexico, thème IV, août 1969.<br />

DESSENNE J.L. et DUFFAUT P., Les propriétés rhéologiques de la craie et leur influence sur le percement<br />

des galeries, <strong>La</strong> houille blanche, mai 1970.<br />

DESSENNE J.L., Etude rhéologique et géotechnique de la craie, thèse de Docteur-Ingénieur, Grenoble,<br />

27 janvier 1971.<br />

DIVISION GÉOLOGIE-GÉOTECHNIQUE, Compte rendu des essais géotechniques<br />

Tincourt, rapport interne EDF, (non publié) (1967).<br />

DIVISION GÉOLOGIE-GÉOTECHNIQUE, Compte rendu des essais géotechniques<br />

rapport interne EDF, (non publié) (1971).<br />

réalisés sur le site de Venteuil-<br />

sur la craie en pays cauchois,<br />

FLORENTIN, L'HÉRITEAU, FARHI et PAREZ, Observations faites sur la craie comme couche de fondation,<br />

V e Cong. int. méc. sols et trav. de fond., Paris, 1961, 1, p. 101.<br />

158


Quelques remarques<br />

sur la stabilité des tunnels<br />

réalisés dans la craie<br />

M. PANET<br />

Chef du Département de géotechnique<br />

<strong>La</strong>boratoire central<br />

introduction<br />

<strong>La</strong> craie est généralement considérée comme un terrain très favorable<br />

à la réalisation d'ouvrages souterrains.<br />

\ <strong>La</strong> tenue de la craie est en général bonne comme on peut s'en rendre<br />

compte dans les nombreuses caves non soutenues creusées dans la craie.<br />

<strong>La</strong> craie massive a une perméabilité faible et les venues d'eaux sont pratiquement inexistantes.<br />

Enfin l'excavation est facile et la foration mécanique semble devoir trouver dans la craie un matériau<br />

propre à la réalisation de vitesses d'avancement exceptionnelles. On peut d'ailleurs rappeler à ce<br />

sujet les performances remarquables de la machine du Colonel Beaumont lors des premiers essais<br />

de percement du tunnel sous la Manche en 1884 (un avancement moyen de 12 m par jour pendant<br />

53 jpour une galerie de 2,80 m de diamètre).<br />

Cette appréciation optimiste doit être cependant tempérée. Toutes les craies ne sont pas identiques<br />

et ne se présentent pas toujours de manière homogène. Les zones altérées ou fracturées, surtout<br />

lorsqu'elles sont situées sous la nappe, peuvent constituer des passages particulièrement difficiles<br />

à franchir. <strong>La</strong> présence de telles zones constitue indiscutablement le risque le plus grand qui doit être<br />

envisagé dans l'étude du projet de tunnel sous la Manche.<br />

Les engins de terrassement et les vibrations transforment certains types de craie saturée en une<br />

boue liquide qui pose de difficiles problèmes de chantier et de marinage. Ces différents aspects<br />

doivent être pris en considération lors de tétude d'un ouvrage souterrain dans la craie, ici nous nous<br />

limiterons à l'analyse des seuls problèmes de stabilité.<br />

L'analyse de la stabilité des ouvrages souterrains dans la craie comporte deux questions distinctes :<br />

— quelles sont les conditions de stabilité et comment doit-on éventuellement soutenir l'excavation<br />

pendant les travaux de creusement ?<br />

— quel est le comportement à long terme des terrains encaissants et quelles sont les sollicitations<br />

qui seront finalement encaissées par le soutènement définitif, par exemple un revêtement bétonné ?<br />

Nous appellerons de manière générale soutènement, les moyens mis en œuvre pour assurer la stabilité<br />

du tunnel pendant les travaux et pendant son exploitation.<br />

159<br />

Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch. - Spécial V - Octobre 1973


Conditions de stabilité des tunnels<br />

creusés dans la craie, pendant les travaux<br />

CRAIE MASSIVE PEU FISSURÉE<br />

<strong>La</strong> stabilité des chantiers de tunnel exécutés dans une<br />

craie massive est en général excellente tant que la<br />

profondeur du tunnel n'est pas trop élevée. En effet,<br />

à partir d'une certaine hauteur de recouvrement, les<br />

contraintes tangentielles à la paroi, calculées en<br />

régime élastique, excèdent la résistance en compression<br />

simple de la craie, et il se produit un écaillage à la<br />

paroi caractéristique, par rupture fragile, identique à<br />

ceux qui se sont produits lors du percement du tunnel<br />

du Mont-Blanc. <strong>La</strong> roche étant beaucoup moins rigide<br />

et résistante, le phénomène de décompression n'atteint<br />

jamais dans la craie un caractère explosif avec projections.<br />

On peut prévoir la possibilité d'un écaillage à la paroi<br />

si on connaît l'état des contraintes initiales et la<br />

résistance mécanique du matériau.<br />

On ne peut pas connaître a priori l'état des contraintes<br />

initiales dans un massif rocheux. Cependant, la craie<br />

ayant des déformations différées importantes, on peut<br />

imaginer au cours des temps une certaine relaxation<br />

des contraintes conduisant à un état des contraintes<br />

voisin de l'hydrostaticité, comme celui qui a été<br />

mesuré dans la galerie EDF de Venteuil-Tincourt.<br />

Toutefois, il serait imprudent d'extrapoler ce résultat<br />

à tous les sites dans la craie ; ainsi, lors du dénoyage<br />

en 1959 de la galerie de Sangatte creusée en 1880,<br />

les mesures de contraintes qui ont été effectuées conduisent<br />

à penser que la contrainte horizontale est la<br />

moitié de la contrainte verticale.<br />

i '<br />

En régime élastique, la contrainte tangentielle à la<br />

paroi d'une galerie circulaire est donnée par :<br />

a e<br />

= [1+A 0<br />

-2(1-A 0<br />

) cos 20] a\<br />


1<br />

I. craie remaniée sans structure contenant des nodules<br />

de craie intacte ;<br />

II. craie morcelée en partie altérée, en bancs diaclasés,<br />

les diaclasés sont espacées de 10 à 60 mm, avec des<br />

ouvertures allant jusqu'à 20 mm, souvent remplies<br />

de craie molle remaniée et de fragments ;<br />

III. craie saine morcelée ou en blocs ; les diaclasés<br />

sont espacées de 60 à 200 mm avec des ouvertures<br />

allant jusqu'à 3 mm, parfois remplies de fragments ;<br />

IV. craie en blocs de dureté moyenne, l'espacement<br />

des diaclasés est supérieure à 200 mm, les diaclasés<br />

sont fermées ;<br />

Fig. 2. — Courbe effort-déformation de la craie dans un essai de<br />

compression simple.<br />

à des contraintes tangentielles moins élevées à la paroi<br />

que celles obtenues dans l'hypothèse de l'élasticité<br />

linéaire.<br />

<strong>La</strong> présence de fissuresou de plans de stratification<br />

peut modifier très sensiblement la distribution des<br />

contraintes.<br />

Enfin la présence d'un écoulement convergent vers la<br />

galerie modifie aussi le régime des contraintes.<br />

Dans le cas de tunnels profonds, ces phénomènes<br />

d'écaillage peuvent se produire au front de taille.<br />

Dans le cas d'un état de contrainte initiale hydrostatique,<br />

les écaillages apparaissent au front de<br />

taille lorsque la hauteur de recouvrement exprimée<br />

en mètres est sensiblement égale à 1,3 — soit pour la<br />

y<br />

3 R<br />

craie, en admettant y = 20 kN/m , —-.<br />

15<br />

Ces phénomènes de rupture fragile sont superficiels<br />

et peuvent être facilement stabilisés par boulonnage.<br />

Dans la craie, le boulonnage à ancrage réparti présente<br />

de nombreux avantages sur le boulonnage à ancrage<br />

ponctuel.<br />

CRAIES FISSURÉES ET ALTÉRÉES<br />

Les conditions de stabilité des tunnels peu profonds<br />

exécutés dans la craie dépendent essentiellement de<br />

l'état de fissuration ou d'altération de la craie. A cet<br />

égard il est intéressant de rappeler la classification et<br />

les résultats d'essais effectués en Grande-Bretagne<br />

par J.B. Burland et J.A. Lord sur un site de craie<br />

turonienne.<br />

Pour l'étude des fondations d'un accélérateur à protons,<br />

cinq catégories de craie ont été distinguées :<br />

V. craie identique à celle de la catégorie II mais dure<br />

et fragile.<br />

Des essais pour déterminer les caractéristiques mécaniques<br />

de la craie ont été réalisés à diverses échelles,<br />

des essais en laboratoire sur des échantillons carottés<br />

(module moyen de déformabilité E : 90 000 bars),<br />

des essais de plaque en place, des essais en vraie grandeur<br />

par remplissage d'un réservoir ayant 18 m de<br />

diamètre et 18 m de hauteur ; le tableau I donne une<br />

idée des effets d'échelle constatés.<br />

TABLEAU I<br />

Echelle des dégradations des qualités d'un massif<br />

avec l'augmentation de la fissuration et de l'altération<br />

Catégorie<br />

ElJEiab.<br />

I 0,1<br />

II 0,1 à 0,2<br />

III 0,2 à 0,4<br />

IV 0,6 à 0,8<br />

Et. module mesuré en place par remplissage du réservoir.<br />

Eiab. module mesuré au laboratoire sur carottes.<br />

Sur cet exemple, on voit la dégradation des qualités<br />

d'un massif de craie avec l'augmentation de la fissuration<br />

et de l'altération.<br />

Les conditions de réalisation d'un tunnel peu profond<br />

dans ces différentes catégories de terrains seraient<br />

radicalement différentes. On peut tenter d'imaginer<br />

des conditions de soutènement pour chacune de ces<br />

catégories.<br />

I. Conditions de tenue du front de taille extrêmement<br />

précaires ; si les travaux sont exécutés sous la nappe<br />

avec des teneurs en eau supérieures à 20 %, une méthode<br />

par enfilage et un blindage du front de taille<br />

s'avéreraient nécessaires.<br />

II. On peut espérer pour un tunnel de section moyenne<br />

une tenue suffisante du front de taille. Mais le soutènement<br />

doit être mis en œuvre immédiatement derrière<br />

le front de taille. Ce soutènement peut être constitué<br />

par des cintres espacés de 0,5 à 1 m avec au minimum<br />

161


un blindage en voûte. On pourrait aussi faire appel<br />

à la technique du béton projeté en piédroit et en voûte<br />

avec un grillage, et l'utilisation simultanée de boulonnage.<br />

III. Même type de soutènement que dans le cas<br />

précédent. Cependant l'espacement des cintres peut<br />

être plus grand (1 à 1,20 m) ; un blindage à claire-voie<br />

de la voûte devrait être suffisant ; de même l'emploi<br />

de béton projeté serait tout indiqué.<br />

IV. Le soutènement pourrait être beaucoup plus<br />

léger et pourrait être réalisé par boulonnage à ancrage<br />

réparti et grillage occasionnel ou éventuellement<br />

par une couche de béton projeté de faible épaisseur<br />

(5 à 10 cm).<br />

<strong>La</strong> fissuration de la craie conduit à une augmentation<br />

très importante de la perméabilité. Alors que les craies<br />

franches et massives de la base du Cénomanien ont<br />

des perméabilités de l'ordre de 10" 5 cm/s, les craies<br />

très altérées et très fissurées peuvent avoir des perméabilités<br />

supérieures à 10~ 3<br />

cm/s, les débits d'exhaure<br />

sont donc multipliés par cent.<br />

Lorsqu'au cours de creusement, le front d'attaque<br />

approche d'une zone à perméabilité beaucoup plus<br />

forte sous charge hydraulique élevée, un gradient<br />

hydraulique vers le front de taille croît rapidement à<br />

proximité du front de taille. M. Rat a donné une<br />

valeur approchée de la charge hydraulique en régime<br />

permanent entre le front de taille et l'équipotentielle<br />

correspondant à la limite entre deux zones de perméabilité<br />

très différente.<br />

Il peut alors se produire un éclatement du front de<br />

taille avec une irruption brutale d'eau entraînant un<br />

débourrage des matériaux altérés et fissurés dans le<br />

chantier. <strong>La</strong> gravité d'un tel accident ne dépend pas<br />

uniquement de la pression existante, mais aussi de<br />

la quantité d'eau en charge dans la zone aquifère.<br />

Il est donc indispensable de faire une reconnaissance<br />

à l'avancement lorsqu'on craint de tels accidents ;<br />

actuellement ces reconnaissances à l'avancement ne<br />

peuvent être faites que par sondage. Il est possible<br />

de faire tomber la pression par drainage lorsque les<br />

débits en régime permanent ne sont pas trop élevés ;<br />

dans le cas contraire, il faut avoir recours à un traitement<br />

des terrains.<br />

Comportement à long terme d'un tunnel<br />

situé dans la craie<br />

Le percement d'un tunnel dans un massif de craie<br />

provoque des déformations immédiates qui suivent<br />

les travaux et des déformations différées qui se stabilisent<br />

très lentement. Dans une craie saine, le soutènement<br />

définitif est mis en place suffisamment loin du<br />

front de taille pour que la convergence instantanée<br />

se soit produite entièrement, ce qui nous autorise à<br />

raisonner pour le comportement différé en déformations<br />

planes (fig. 3).<br />

Afin d'analyser les sollicitations auxquelles peut être<br />

soumis le revêtement d'un tunnel creusé dans la craie,<br />

il convient d'étudier le comportement différé de la<br />

craie.<br />

Dans un essai de fluage en compression simple de la<br />

craie, on observe une déformation instantanée s t<br />

et<br />

une déformation différée e d<br />

qui croît avec le temps<br />

(fig. 4).<br />

Cette déformation différée tend vers une valeur<br />

asymptotique si la contrainte appliquée est très<br />

inférieure à la résistance en compression simple ; par<br />

contre pour des valeurs de la contrainte inférieure,<br />

mais proche de la résistance en compression simple,<br />

on observe une rupture différée.<br />

Fig. 3 a. — Coupe longitudinale d'une galerie circulaire en cours de<br />

creusement.<br />

Fig. 3 b. — Variation du déplacement radial instantané un en fonction<br />

de la distance au front de taille pour une galerie circulaire.<br />

162


<strong>La</strong> valeur de la charge ultime qui est le seuil qui sépare<br />

les deux types de comportement pour les craies,<br />

varie entre 50 et 80 % de la résistance en compression<br />

simple.<br />

Les déformations différées dans une craie saturée sont<br />

liées d'une part aux mouvements de l'eau interstitielle<br />

dans un milieu à faible perméabilité et d'autre part<br />

à un comportement visqueux du squelette solide qu'on<br />

peut mettre en évidence par des essais sur la craie<br />

sèche. Il n'existe cependant pas d'étude suffisante<br />

pour préciser la part due à chacun de ces phénomènes.<br />

Selon Morlier, dans un corps poreux, la pression<br />

interstitielle u dans un essai non drainé est proportionnelle<br />

à la contrainte moyenne appliquée a m<br />

soit :<br />

avec<br />

0 < x < 1 •<br />

<strong>La</strong> dissipation de ces pressions interstitielles est un<br />

phénomène lent dans les milieux à faible perméabilité.<br />

<strong>La</strong> durée de ce processus dépend de la longueur de<br />

drainage. Aussi pour étudier les déformations différées<br />

dans un massif poreux saturé, il est indispensable de<br />

tenir compte simultanément du comportement de la<br />

matrice rocheuse et de la dissipation des pressions<br />

interstitielles. L'analyse en contraintes totales à partir<br />

des caractéristiques de comportement différé mesurées<br />

sur éprouvettes, peut conduire à des résultats complément<br />

faux quant à la durée des phénomènes différés.<br />

Si une galerie creusée dans la craie est laissée sans<br />

revêtement, on observera une convergence progressive<br />

des parois qui se stabilisera peu à peu, si la résistance<br />

ultime de la craie n'est pas dépassée. <strong>La</strong> galerie de<br />

Sangatte creusée en 1880 fut abandonnée sans soutènement<br />

; elle fut dénoyée en parfait état en 1959.<br />

Les contraintes maximales mesurées sur le plan<br />

diamétral horizontal étaient en moyenne de 45 bars,<br />

soit très inférieures à la résistance en compression<br />

simple. Cependant même si selon les calculs, les<br />

contraintes tangentielles dépassent la résistance<br />

ultime de la craie, on observe rarement des ruptures<br />

différées sur les parois d'une excavation dans la craie ;<br />

cela semble dû au fait que la rupture différée n'est pas<br />

une rupture fragile avec foisonnement du matériau,<br />

mais une rupture par glissement avec diminution de<br />

volume ; il se produit vraisemblablement une adaptation<br />

plastique des contraintes autour de la galerie, de<br />

sorte que les contraintes tangentielles à la paroi<br />

s'adaptent à la résistance ultime de la craie.<br />

Si, au contraire, la galerie est revêtue, la lente<br />

convergence de la galerie est contrariée par le revêtement<br />

et on doit observer une sollicitation progressive<br />

du revêtement accompagnée d'une relaxation des<br />

contraintes dans la craie.<br />

Faisons l'hypothèse qu'on puisse assimiler le comportement<br />

rhéologique de la craie à celui d'un corps<br />

viscoélastique linéaire. Cette hypothèse est vraisemblable<br />

dans le cas d'une craie sèche, mais peu admissible<br />

dans le cas d'une craie saturée du fait de la dissipation<br />

des pressions interstitielles et de l'établissement<br />

du régime permanent de l'écoulement vers la galerie.<br />

On peut démontrer que si on fait l'hypothèse d'un<br />

état initial des contraintes hydrostatiques, et que le<br />

revêtement est mis en place immédiatement après<br />

que les déformations instantanées se soient produites,<br />

la pression exercée sur le revêtement au bout d'un<br />

temps très long est donnée par l'expression :<br />

2/^oo + K L<br />

/*oJ<br />

u 0<br />

module de cisaillement instantané du matériau,<br />

H x<br />

module de cisaillement final du matériau,<br />

k s<br />

coefficient de rigidité du revêtement.<br />

Pour un revêtement circulaire en béton d'épaisseur e<br />

pour une galerie circulaire de rayon r, si e est faible<br />

devant r<br />

ks ~ — Eb<br />

r<br />

163


où<br />

E h<br />

module d'Young du béton « 3 x 10 7 kN/m 2<br />

(300 000 bars).<br />

Cette analyse sommaire montre l'influence :<br />

— du rapport — ; des résultats expérimentaux pour<br />

Ho<br />

certains types de craie donnent — « 0,5, ce qui<br />

Ho<br />

conduirait à = — — ; la pression exercée<br />

2<br />

fyço+K<br />

sur le soutènement serait au plus la moitié de la<br />

contrainte initiale dans le cas d'un revêtement extrêmement<br />

rigide ;<br />

— de l'épaisseur du revêtement ; en effet, si on prend<br />

une craie de module instantané E = 2,8 x 10 6 kN/m 2<br />

(28 000 bars) ; en admettant v = 0,4 on obtient<br />

u 0<br />

x 10 6 kN/m 2 ,<br />

admettons p x<br />

« 0,5 x 10 6 kN/m 2 ,<br />

d'où<br />

P s<br />

=<br />

e<br />

30-<br />

a<br />

±<br />

1+30? 2<br />

r<br />

si - = 0,2 (revêtement relativement épais)<br />

r<br />

p s<br />

= 0,43


CONCLUSIONS GÉNÉRALES<br />

ET RECOMMANDATIONS<br />

A. de RAGUENEL<br />

Chef du groupe géotechnique<br />

<strong>La</strong>boratoire régional de Rouen<br />

Le Colloque sur la craie, loin de se prétendre exhaustif sur un sujet aussi vaste<br />

et paradoxalement peu abordé, a permis de soulever un certain nombre de problèmes<br />

rencontrés dans les travaux de génie civil aussi différents que les terrassements, les<br />

fondations et les travaux souterrains. Un certain nombre de réponses originales, bien<br />

que partielles, ont pu être données grâce à l'apport synthétique de la géologie, de la<br />

pétrophysique et de la géotechnique, et grâce à l'utilisation de constatations valorisées<br />

par une recherche théorique et pratique simultanée.<br />

Il a été ainsi possible de dégager certaines conclusions d'ordre général, d'autres plus<br />

spécifiques au matériau « craie » et aux problèmes techniques qu'il soulève.<br />

MÉTHODOLOGIE DE LA RECHERCHE<br />

L'ensemble des résultats présentés procèdent d'une approche méthodique du problème<br />

basée sur un certain nombre de démarches dont il convient de souligner l'efficacité :<br />

— le point de départ de l'étude est constitué par un faisceau de constatations d'anomalies<br />

de comportement, d'incidents sur chantier et de désordres sur ouvrages dont<br />

on recherche les causes avant de proposer des solutions techniques ;<br />

— la compréhension des phénomènes découle d'une analyse qui remet en question les<br />

connaissances acquises sur le matériau « craie » lui-même, roche du sol, et la validité<br />

des essais usuels de laboratoire ;<br />

— l'étude géologique régionale permet d'avoir avec le recul nécessaire une vue suffisamment<br />

large pour comprendre et, par la même, prévoir les différences et hétérogénéités<br />

de nature et de texture essentielles, pour juger du comportement géotechnique<br />

à l'échelle du massif ou de l'échantillon ;<br />

— l'utilisation simultanée des techniques de la géologie, de la mécanique des sols,<br />

de la mécanique des roches et Vexamen du matériau par les techniques les plus récentes<br />

de la microscopie (microscopie électronique à balayage) aboutissent comme un<br />

faisceau convergent à une explication synthétique des phénomènes ;<br />

— la confrontation permanente de la recherche à la réalité des chantiers au moyen<br />

de constatations permet d'aboutir concrètement à des recommandations réalistes en<br />

matière de travaux ;<br />

— la collaboration à l'intérieur de nos laboratoires entre géologues et mécaniciens<br />

des Sols et vers l'extérieur avec l'université, les bureaux d'études spécialisés, les entreprises<br />

et les maîtres d'œuvres peut être considérée comme la clef de voûte de toute<br />

recherche efficace en ce domaine.<br />

165<br />

Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch. - Spécial V - Octobre 1973


APPORT DES TECHNIQUES NOUVELLES<br />

Si la craie était mal connue, cela était imputable essentiellement à Y'insuffisance des<br />

techniques d'analyse anciennes'. Il s'avère en effet que les connaissances acquises<br />

récemment sont dues pour beaucoup à l'utilisation des techniques nouvelles. On notera<br />

en particulier :<br />

— le développement de la micropaléontologie qui en Vabsence de « bons » macrofossiles<br />

permet maintenant de situer les différents niveaux stratigraphiques. On a ainsi pu<br />

établir une échelle stratigraphique fine, indispensable au développement de la paléogéographie<br />

;<br />

— l'emploi du microscope électronique à balayage permet la connaissance des nannofaciès<br />

de la craie, donc de la texture très particulière de la matrice crayeuse constituée<br />

d'un empilement lâche de petits éléments de calcite et de nannofossiles. Cette observation<br />

apparaît comme essentielle pour expliquer les différences d'état (densité,<br />

porosité, succion) et de comportement (résistance à la compression à sec et humide,<br />

microdureté, vitesse de transmission d'ondes, courbe intrinsèque, etc.) ;<br />

— l'utilisation du microduromètre liée à une étude des constituants sur plaques minces<br />

permet d'expliquer l'hétérogénéité au niveau de l'échantillon due à la présence des corps<br />

figurés et des cristallisations de néoformation ;<br />

— la technique de vibrobroyage débouche sur un essai rapide et simple permettant<br />

de classer les craies en fonction de leur résistance aux chocs et à l'abrasion à sec et<br />

sous Veau ;<br />

— le développement de l'essai pressiométrique facilite la connaissance de la résistance<br />

mécanique globale d'un massif crayeux fissuré ;<br />

— la réalisation d'un plus grand nombre d'essais de chargement de pieux a montré<br />

l'importance du délai de repos sur la portance d'un pieu battu dans la craie ;<br />

— l'introduction des calculs par éléments finis, associés aux constatations, a permis<br />

pour les travaux souterrains d'établir que la craie avait une réaction isotrope en<br />

profondeur et, au-delà d'une certaine contrainte, se comportait comme une roche<br />

plastique. Ces calculs en élasticité pure ont permis par ailleurs de fournir des explications<br />

logiques aux désordres constatés sur grand remblai crayeux.<br />

LA CRAIE, MATÉRIAU<br />

"ÉVOLUTIF"<br />

<strong>La</strong> craie doit être considérée comme un matériau évolutif sous Veffet de contraintes<br />

statiques ou de chargements répétés. L'identification d'une craie doit donc mettre en<br />

relief cette aptitude à changer de texture par resserrement ou fragmentation. Une<br />

identification basée sur une analyse de résultats d'essais simples (densité sèche, vitesse<br />

de propagation d'ondes longitudinales, microdureté, vitesse d'ascension capillaire,<br />

essai de vibrobroyage, rapport de la résistance à la compression à sec et saturé) permet<br />

de classer les craies en dures, moyennes et tendres. <strong>La</strong> craie sera d'autant plus évolutive<br />

qu'elle sera tendre.<br />

Évolution de la craie sous charges statiques<br />

Dans un essai triaxial, la craie au-delà d'un seuil de contrainte de confinement a un<br />

comportement de type plastique avec un tassement de sa texture et une déformation<br />

en barillet. Dans les travaux souterrains, cette propriété se traduit par une transmission<br />

isotrope des contraintes, une déformation élastique moins forte que celle obtenue par<br />

le calcul qui, absorbée par un tassement de la texture, conduit à une expulsion d'eau<br />

de la roche.<br />

Sous une charge statique de longue durée des blocs crayeux à faible densité peuvent<br />

s'écraser au profit d'une pâte crayeuse plus dense. Ce phénomène peut occasionner des


tassements de remblais importants. Corrélativement, une mise en pression de Veau<br />

interstitielle peut faire croître le coefficient de Poisson au cœur du remblai et provoquer<br />

des fissures longitudinales dues au développement de contraintes de traction dans la<br />

partie supérieure des remblais.<br />

Évolution de la craie sous charges dynamiques<br />

• Sous Veffet des chocs, lors de Vextraction, de la mise en œuvre et du compactage<br />

en terrassement, les blocs de craie donnent un sol qui est un mélange de craie et de<br />

fines crayeuses. Ce mélange sensible aux différentes « manutentions » sera d'autant<br />

moins porteur et d'autant plus difficile à mettre en remblai que le degré de fragmentation<br />

sera fort.<br />

L'utilisation en remblai et le choix des techniques de mise en œuvre seront donc conditionnés<br />

par la fragilité du matériau (sa résistance mécanique) après mise en œuvre<br />

et sa teneur en eau.<br />

• Sous Veffet du battage, en particulier de pieux, la craie roche se désagrège, sa texture<br />

s'effondre et sous l'effet de pressions interstitielles importantes dues aux chocs se<br />

comporte comme un fluide à faible résistance. Par un phénomène mal connu, soit de<br />

dissipation de surpressions interstitielles, soit de recristallisation, soit de thixotropie,<br />

on observe une reconstitution de la portance après un temps de repos.<br />

• Sous Veffet de la vibration, la craie a tendance à se liquéfier, probablement par effondrement<br />

de sa texture ; ce phénomène a malheureusement été peu étudié.<br />

RECHERCHES A ENTREPRENDRE<br />

Malgré le chemin parcouru, les points d'interrogation et les voies de recherche restent<br />

nombreux. Il convient de mentionner en particulier :<br />

— la mise au point d'essais normalisés adaptés aux différents problèmes techniques<br />

qui se posent ;<br />

— l'amélioration des techniques d'étude de la craie dans son gisement, en tenant<br />

compte en particulier des formes d'altération si importantes dans tous les travaux de<br />

génie civil ;<br />

— des recherches sur la cohésion de la craie-roche et de la craie-sol, de façon à comprendre<br />

comment se détruit et se reconstitue cette cohésion ;<br />

— des recherches sur l'interaction des gaines de calcite et de l'eau et de son influence<br />

sur la plasticité, la résistance à la compression et sur certaines propriétés thixotropiques<br />

éventuelles ;<br />

— l'amélioration des techniques de prélèvement d'échantillons et le développement<br />

des techniques de diagraphie (microsonique et diagraphie nucléaire) ;<br />

— des recherches sur les méthodes de mise en œuvre des techniques pressiométriques,<br />

de façon à optimiser les mesures de module à prendre en compte dans les calculs de<br />

fondation ;<br />

— des recherches sur l'influence de la vibration dans la destruction de la texture de<br />

la craie. Influence des phénomènes vibratoires dans le corps d'un remblai ou dans le<br />

fût d'un pieu sur la stabilité ou la portance de l'ouvrage ;<br />

— l'étude du coefficient de Poisson et des causes de son éventuelle variation dans le<br />

temps au cours de la vie d'un remblai ;<br />

— le développement des techniques de traitement de la craie, soit en vue de travaux<br />

confortatifs, soit en vue de son utilisation en corps de chaussée.<br />

167


On conçoit donc que les conclusions du géotechnicien concernant Vutilisation de<br />

ce matériau ne peuvent découler d'une étude du matériau seul, sans connaître le rôle<br />

que Von veut lui faire jouer (remblai, fondation, tunnel), la géométrie de l'ouvrage,<br />

et les techniques de réalisation. L'étude géotechnique de la craie devra être une étude<br />

« à la carte ».<br />

Sous réserve d'une reconnaissance bien conduite et adaptée au problème, la plupart des<br />

croies, moyennant certaines précautions d'emploi constituent de bons remblais, un<br />

niveau satisfaisant de fondation et une roche qui se prête bien aux travaux souterrains.<br />

Cependant les craies tendres, voire mi-dures, en particulier si elles sont altérées, feront<br />

l'objet d'une attention particulière et justifieront le plus souvent une adaptation des<br />

techniques usuelles à ce matériau très sensible, en fonction du problème à résoudre.<br />

RECOMMANDATIONS POUR L'UTILISATION<br />

DES CRAIES EN REMBLAI<br />

Toute utilisation de craie en remblai nécessitera la réalisation d'études géotechniques<br />

préalables comportant :<br />

— une identification de la craie basée sur la réalisation d'essais simples mais nombreux<br />

et bien adaptés (densité sèche, vitesse de propagation d'ondes longitudinales,<br />

microdensité, vitesse d'ascension capillaire, résistance à la compression du matériau<br />

sec et saturé) ;<br />

— une étude géotechnique de laboratoire utilisant l'essai de vibrobroyage et l'essai<br />

de compactages répétés au Proctor normal avec mesure de poinçonnement C B R ;<br />

— une étude des conditions de gisement.<br />

Ces différents essais permettront de classer les craies en :<br />

• craies dures ne posant que peu de problèmes de terrassements,<br />

• craies moyennes ou douteuses,<br />

• craies tendres qui nécessiteront des précautions particulières.<br />

Des conditions particulières de mise en œuvre seront prévues comme suit en fonction<br />

de la géométrie de l'ouvrage dans le cas de craies tendres ou mi-dures.<br />

REMBLAI DE FAIBLE HAUTEUR : 0 < H < 5 m<br />

Les problèmes de densification (source de tassement) et de stabilité ne se poseront<br />

pas. Seuls les problèmes de mise en œuvre seront à considérer.<br />

<strong>La</strong> mise en œuvre se fera d'autant mieux qu'on limitera le fractionnement des<br />

blocs. On pourra tolérer alors des teneurs en eau élevées et une compacité du corps


de remblai faible. Le minimum de fragmentation sera obtenu par une extraction<br />

à la pelle avec transport au camion. Le compactage se fera par couche de 30 cm<br />

au pneu lourd. On s'efforcera d'imperméabiliser au maximum les plates-formes<br />

supérieures.<br />

REMBLAI DE GRANDE HAUTEUR : H > 12 m<br />

Ces remblais devront être conçus comme des ouvrages d'art. Pour éviter le tassement<br />

par densification et les fissurations ou ruptures, il conviendra de fractionner au<br />

maximum les blocs les plus tendres, ce qui imposera pour la mise en œuvre, une teneur<br />

en eau faible ( < 20 %). <strong>La</strong> compacité maximale devra être obtenue au compactage,<br />

avec un minimum de 1,70.<br />

Cela peut être obtenu par un travail à la défonceuse (ripper) et à la décapeuse (scraper)<br />

et un compactage au rouleau à pieds dameurs (tamping) ou au rouleau à grilles<br />

(grid-roller) sur couches de 30 cm.<br />

Dans l'hypothèse d'une craie à fortes teneurs en eau, nous avons comme alternative,<br />

soit une mise en dépôts, soit une utilisation adaptée qui pourra être suivant les cas,<br />

un traitement au ciment ou aux cendres volantes+chaux, l'utilisation de la technique<br />

du sandwich (craie + grave), l'armature du remblai au moyen d'additif de<br />

structure ou d'armatures rigides à déterminer par le calcul.<br />

169


RESUMES<br />

Géologie de la craie dans le Bassin parisien<br />

G. BIGNOT et M.P. AUBRY<br />

Les auteurs décrivent la nature pétrographique de la craie constituée de fragments détritiques et<br />

de microfossiles, Ostracodes et Foraminifères noyés dans une matrice, mélange de nannofossiles<br />

et de très petits éléments de calcite. <strong>La</strong> structure lâche de cette matrice observée au microscope<br />

électronique à balayage permet d'expliquer le comportement mécanique de la craie.<br />

Les divisions stratigraphiques obtenues par étude de la microfaune et la paléogéographie du Bassin<br />

parisien permettent au géologue de définir des variations de faciès : craie à tendance détritique en<br />

bordure de bassin et craie à fort pourcentage de CaCÛ3 au centre du bassin.<br />

En conclusion, la connaissance des nannofaciès aide à comprendre les particularités des caractéristiques<br />

mécaniques de la roche. Les données stratigraphiques et pétrophysiques en replaçant la<br />

roche dans le temps et l'espace permettent de considérer les problèmes géotechniques dans un cadre<br />

plus général.<br />

MOTS CLÉS - 42. Géologie — <strong>Craie</strong> — Pétrographie — Roche — Sédiment — Carbonate — Calcium<br />

— Classification — Stratigraphie — Minéralogie — Microscope électronique à balayage — Faciès —<br />

Bassin parisien.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., spécial V, oct. 1973, p. 11.<br />

Pétrophysique de la craie<br />

M .<br />

MASSON<br />

L'étude pétrophysique de la craie a permis de mettre en évidence l'influence de la texture fine<br />

du matériau sur ses caractéristiques physiques et mécaniques.<br />

On note en particulier l'importance des éléments figurés sur la valeur et la dispersion de la résistance<br />

mécanique (résistance à la compression, microdureté, vitesse de la transmission d'ondes) et de la<br />

matrice microscopique sur les caractéristiques physiques (densité, porosité, succion, ascension<br />

capillaire).<br />

L'analyse de ces différents paramètres et de leur incidence sur les problèmes géotechniques a permis<br />

de définir une méthode d'identification des craies au moyen d'essais simples et de les classer en trois<br />

familles : craies dures, mi-dures et tendres. A cette méthode d'étude sur échantillon, il est nécessaire<br />

de coupler une méthode d'étude plus générale des massifs de craie prenant en compte les hétérogénéités<br />

dues à la fissuration et à l'altération.<br />

MOTS CLÉS - 42-43. <strong>Craie</strong> — Sol — Roche — Pétrographie — Caractéristiques — Physique — Mécanique<br />

— Microstructure (géomorphologie) — Stratigraphie — Teneur — Carbonate —• Calcium —<br />

Oxyde — Magnésium — Minéralogie — Essai — Saturation — Porosité — Résistance —• Densité —<br />

Contrainte — <strong>La</strong>boratoire — Surface spécifique —• Succion —• Vitesse — Capillarité — Compactage<br />

— Silex' — Fissuration —• Altération — In situ — Siliceux — Argile — Cristallisation —<br />

Calcaire — Dureté — Broyage — Vibration.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., spécial V, oct. 1973, p. 23.<br />

Texture et comportement des craies<br />

A. LE ROUX<br />

L'étude en microscopie électronique à balayage montre l'importance du paramètre texture dans<br />

le comportement des matériaux. Les liaisons intergranulaires mises en évidence sur la totalité des<br />

matériaux étudiés sont cependant en nombre variable ; suivant les échantillons elles seront peu<br />

nombreuses (cas des craies d'Incarville, Sauqueville et Pacy-sur-Eure) ou abondantes, le matériau<br />

posera de nombreux problèmes sur le chantier ou aura un comportement satisfaisant.<br />

L'étude d'un matériau qui peut être considéré comme un terme de passage entre les craies et les<br />

calcaires confirme l'existence des « ponts » qui apparaissent dans ce cas extrêmement nets. Les relations<br />

qui existent entre les liaisons intergranulaires et les caractéristiques mécaniques du matériau<br />

sont également confirmées.<br />

171


En présence d'eau, les liaisons sont affaiblies (gonflement des argiles, etc.), mais encore assez résistantes<br />

pour s'opposer à une désagrégation du matériau. Ce qui explique, en l'absence de tout<br />

autre phénomène, la bonne tenue des craies immergées, mais également la désagrégation de certaines<br />

d'entre elles dès qu'elles sont soumises aux vibrations (par exemple lors du passage des engins de<br />

chantier).<br />

L'étude préalable des textures devrait permettre la prévision du comportement et renseigner ainsi<br />

le maître d'oeuvre sur les matériaux avec lesquels il aura à composer.<br />

MOTS CLÉS - 42-43. <strong>Craie</strong> — Texture — Comportement — Calcaire — Liaison (chimie) — Eau —<br />

Gonflement — Argile — Immersion — Vibration — Prévision — Minéralogie — Carbonate —<br />

Calcium.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., spécial V, oct. 1973, p. 49.<br />

Stabilité des remblais crayeux de grande hauteur<br />

A. DE RAGUENEL.<br />

Les constatations et études effectuées sur le remblai crayeux du Val-Guyon sur l'autoroute A 13<br />

ont permis d'expliquer la cause des tassements et Assures observés.<br />

Ces désordres ne peuvent s'expliquer par les théories classiques. Il est montré que les tassements<br />

de la plate-forme du remblai sont imputables à une densification de celui-ci à la suite d'une désagrégation<br />

dans le temps des blocs crayeux de faible densité. Cette densification conduirait à des<br />

mises en pression de l'eau interstitielle et une augmentation du coefficient de Poisson du mélange<br />

crayeux. Cette variation entraînerait, comme le montre une étude des contraintes par la méthode<br />

des éléments finis, le développement de contraintes de traction en tête du remblai qui expliquerait<br />

les fissureslongitudinales constatées.<br />

Ces calculs ont permis de définir l'influence des caractéristiques mécaniques de la craie, de la hauteur<br />

du remblai et de sa pente de talus sur le développement de telles fissures. Il a été ainsi possible de<br />

définir des recommandations pour l'utilisation des craies tendres pour l'exécution de remblais de<br />

différentes géométries.<br />

MOTS CLÉS - 42-43. Stabilité des talus — Stabilité — Remblai — <strong>Craie</strong> — Hauteur — Autoroute —<br />

Tassement — Fissuration — Teneur en eau — Déformation — Silex — Argile — Granulométrie —<br />

Densité — Essai — Coefficient de sécurité — Résistance —• Cisaillement — Triaxial — Drainage —<br />

Rupture — Fluage — Tassement — Compressibilité — Elasticité — Coefficient de Poisson —<br />

Contrainte — Traction — Chaussée — Plasticité — Pente — <strong>La</strong>rgeur — Compression — Compactage<br />

— /A 13.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., spécial V, oct. 1973, p. 57.<br />

Problèmes de terrassement dans la craie<br />

J. PUIG.<br />

L'article expose les résultats de recherches entreprises sur la craie dans les problèmes de terrassements<br />

et les conclusions pratiques que l'on peut en tirer.<br />

Les essais classiques de géotechnique (granulométrie, limites d'Atterberg, teneur en eau, essai<br />

Proctor) sont inadaptés pour identifier la craie, matériau essentiellement « évolutif » et donc pour<br />

prévoir son comportement.<br />

L'influence du pourcentage de pâte ou fines est prépondérante sur les conditions de mise en œuvre.<br />

Ce pourcentage est essentiellement fonction d'une part de la nature de la « craie-roche » plus ou<br />

moins facilement désagrégeable, d'autre part du nombre et de la nature des manutentions que l'on<br />

va lui faire subir.<br />

<strong>La</strong> recherche a conduit à mettre au point des essais empiriques permettant d'appréhender simultanément<br />

ces deux facteurs : l'essai de vibrobroyage et l'essai de compactages répétés.<br />

Des constatations sur chantier, lors de la mise en œuvre et de stabilité à plus long terme des remblais<br />

crayeux, nous ont permis de définir des recommandations sur l'étude géotechnique des matériaux<br />

crayeux et les conditions de mise en œuvre en fonction de leur nature et de la géométrie de l'ouvrage.<br />

MOTS CLÉS - 41-51. Terrassement — <strong>Craie</strong> — Essai — Teneur — Fin (matériau) — Essai — Broyage<br />

— Vibration — Compactage — Remblai — Mise en œuvre — Granulométrie — Roche — Sol —<br />

Limite de liquidité — Limite de plasticité — Indice de plasticité — Teneur en eau — Proctor —<br />

CBR — Stabilité des talus.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., spécial V, oct. 1973, p. 81.<br />

172


Etude par vibrobroyage de l'aptitude des craies au compactage<br />

R. STRUILLOU.<br />

L'utilisation du vibrobroyage est envisagée dans l'optique de la prévision en laboratoire des difficultés<br />

de compactage des craies sur chantiei. Les échantillons, concassés à sec, en granuláis 5/20,<br />

sont usés, pendant 30 s, à diverses teneurs en eau .On constate que pour la plupart des craies, la<br />

quantité d'éléments inférieurs à 1,25 mm formée varie linéairement avec la teneur en eau. Chaque<br />

craie peut donc être caractérisée par une droite d'usure, qui donne sa sensibilité à la fragmentation.<br />

Par ailleurs, les fines d'une craie donnée sont caractérisées par leur limite de liquidité WL, à partir<br />

des produits inférieurs à 400 ¡J, formés par son vibrobroyage en milieu aqueux, dans des conditions<br />

constantes, cela pour tenir compte de la sensibilité des limites d'Atterberg de beaucoup de craies<br />

aux conditions opératoires.<br />

En combinant les caractéristiques d'usure, la teneur en eau naturelle w n<br />

, la teneur en eau de liquidité<br />

WL des fines de vibrobroyage et les coefficients empiriques destinés à tenir compte des diverses<br />

conditions de chantier, on détermine la teneur en eau critique w c<br />

au-delà de laquelle des difficultés<br />

importantes risquent d'être rencontrées au cours du compactage.<br />

MOTS CLÉS - 42. Compactage — <strong>Craie</strong> — Broyage — Vibration — Prévision — <strong>La</strong>boratoire —<br />

Granulat — Granulométrie — Teneur en eau — Usure —• Fin (matériau) — Limite de liquidité —<br />

Limite de plasticité — Remblai.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., spécial V, oct. 1973, p. 99.<br />

Fondations dans la craie<br />

F. BAGUELIN.<br />

L'auteur, après avoir mentionné les difficultés rencontrées pour effectuer des prélèvements de craie<br />

utilisables en laboratoire et la dispersion des caractéristiques mécaniques qui en résultent, montre<br />

l'intérêt des mesures in situ en particulier pressiométriques pour apprécier la réaction globale de<br />

la craie dans sa masse.<br />

Des observations et expérimentations ont montré que les calculs en partant de ces différents essais<br />

étaient pessimistes, en particulier les formules de battage dynamique utilisées dans le cas de pieux<br />

battus. <strong>La</strong> craie a en effet tendance à se liquéfier sous l'effet des chocs et sa résistance mécanique<br />

se reconstitue après battage soit par dissipation en surpression interstitielle, soit par une restructuration<br />

thixotropique de la craie encore mal connue.<br />

MOTS CLÉS - 42-43. Mécanique des sols — Mécanique des roches — Fondations — <strong>Craie</strong> —• Portance<br />

— Prélèvement d'échantillons —• Essai — Mécanique — In situ — Méthode — Calcul —<br />

Carottage — Résistance — Compression — Triaxial — Dureté — Compressibilité — Pénétromètre<br />

statique — Pénétromètre dynamique — Battage — Compression —/ Pressiomètre.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., spécial V, oct. 1973, p. 113.<br />

Les cavités souterraines de la craie dans le nord de la France<br />

J. LEPLAT.<br />

<strong>La</strong> craie du nord de la France a autrefois fait l'objet d'une exploitation intensive pour les besoins<br />

de l'agriculture et surtout de la construction. Dans ce dernier domaine, la production de pierres<br />

à bâtir, pour lesquelles l'extraction souterraine était alors obligatoire, a déterminé l'ouverture d'une<br />

quantité impressionnante de carrières que les grands travaux actuels font redécouvrir.<br />

L'absence fréquente d'archives valables, la perte progressive des informations jadis transmises<br />

de père en fils rendent très difficile la prospection de ces cavités souterraines. En tout état de cause<br />

la base de départ indispensable est une bonne connaissance géologique de la région, qui permettra<br />

de sélectionner et de valoriser les informations recueillies lors de l'enquête sur le terrain (par exemple<br />

en tenant compte du fait que la craie à bâtir se situe pratiquement toujours au même niveau stratigraphique).<br />

L'étape suivante doit être une campagne gravimétrique, seule méthode de prospection géophysique<br />

qui puisse s'appliquer à tous les cas de figuredans la région. <strong>La</strong> méthode électromagnétique du professeur<br />

Gabillard a été conçue pour la recherche des cavités du type « bouteilles » de la région lilloise ;<br />

précise et efficace dans ce cas particulier, ses possibilités à l'échelle de la région sont relativement<br />

limitées. Lorsque la prospection gravimétrique (ou électromagnétique) a révélé des anomalies<br />

négatives attribuables à des cavités souterraines, il faut alors mettre en œuvre des moyens de reconnaissance<br />

mécaniques. Dans les cas favorables, puits d'accès nombreux, cavités peu profondes, on<br />

173


peut faire appel à des engins du type pénétromètre, sinon des forages sont nécessaires. Enfin, dès<br />

qu'une cavité a été mise en évidence, la dernière démarche consiste à y descendre pour en effectuer<br />

le lever.<br />

Pour le traitement des cavités souterraines dans la craie, deux types de solutions peuvent être retenus :<br />

le comblement ou l'aménagement. Le comblement, solution sûre mais chère, est réalisé dans la<br />

région, soit au moyen d'un granulat de carrière mis en place par la méthode pneumatique, soit par<br />

injection d'un coulis de cendres volantes et de ciment, cette seconde solution étant apparemment<br />

plus sûre et moins coûteuse. L'aménagement doit s'adapter au problème posé et revêt par conséquent<br />

des formes variées, le plus simple étant la construction de puits d'accès permettant la surveillance<br />

périodique de la cavité.<br />

MOTS CLÉS - 41. Prospection — Cavité (sol) — <strong>Craie</strong> — Carrière — Souterrain — Géophysique —<br />

Méthode — Mesure — Gravité (pesanteur) — Electricité — Magnétisme — Pénétration — Forage<br />

(trou) — Remblayage — Granulat — Injection — Coulis — Cendre volante — Ciment — Géologie —<br />

/Nord — France — Gravimétrie (géophysique).<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., spécial V, oct. 1973, p. 123.<br />

<strong>La</strong> craie dans les sites d'ouvrages de production d'électricité<br />

G. COMÉS.<br />

<strong>La</strong> division Géologie-Géotechnique de la direction de l'Equipement d'EDF a été amenée, au cours<br />

des cinq dernières années, par suite de l'évolution dans la réalisation et dans l'implantation des<br />

ouvrages de production électrique à étudier la craie comme matériau de fondation.<br />

Les caractéristiques mécaniques présentées par la craie font que ce matériau a un comportement<br />

très différent de ceux des roches habituellement rencontrées pour ces sortes d'ouvrages, telles que<br />

granités, schistes, calcaires, etc.<br />

Les sites étudiés se trouvent être répartis dans le Bassin parisien au sens large du terme. Les travaux<br />

géologiques et géotechniques entrepris ont été réalisés sur la craie du Sénonien en pays champenois<br />

et en pays cauchois.<br />

Les caractéristiques géotechniques des craies ont été déterminées en laboratoire et in situ. Le comportement<br />

du matériau en place est examiné et analysé.<br />

<strong>La</strong> réalisation d'ouvrages souterrains dans la craie est possible si un certain nombre de précautions,<br />

d'ordre technologique, sont prises au cours des travaux.<br />

MOTS CLÉS - 43. Mécanique des roches — Roche — <strong>Craie</strong> — Fondation — Usine — Electricité —<br />

Géologie — Souterrain — Caractéristiques — Physique — Galerie — Reconnaissance — Sautage —<br />

Marinage —• Pompage — Essai — Boulonnage — Béton projeté — Vibration — <strong>La</strong>boratoire —<br />

Résistance — Compression — Rupture — Module d'élasticité — Porosité — Tunnel — Cisaillement<br />

— Modèle — Echelle — Cavité (sol).<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., spécial V, oct. 1973, p. 149.<br />

Quelques remarques sur la stabilité des tunnels réalisés dans la craie<br />

M .<br />

PANET<br />

<strong>La</strong> craie saine et non fissurée est un terrain qui présente des caractéristiques favorables pour la réalisation<br />

d'ouvrages souterrains (bonne tenue, perméabilité faible, excavation facile). Cependant<br />

les zones altérées et fracturées conduisent à des difficultés importantes.<br />

<strong>La</strong> craie saine et non fissurée présente, à court terme, un comportement élasto-fragile et lorsque la<br />

hauteur de recouvrement devient importante, on observe des ruptures de décompression classiques<br />

mais peu brutales qu'on peut facilement stabiliser par boulonnage.<br />

<strong>La</strong> craie montre des déformations différées importantes ; on peut observer par des essais de fluage<br />

au laboratoire des ruptures différées pour des sollicitations très nettement inférieures à la résistance<br />

mesurée lors d'un chargement rapide.<br />

Les revêtements doivent être calculés en fonction de ce comportement rhéologique de la craie ;<br />

en effet le revêtement en s'opposant aux déformations différées de convergence est soumis à des<br />

sollicitations croissantes dans le temps.<br />

MOTS CLÉS - 43. Mécanique des roches — Tunnel — Roche — <strong>Craie</strong> — Stabilité —• Elasticité —<br />

Fragilité — Rupture — Boulonnage — Déformation — Retard — Essai — Fluage — <strong>La</strong>boratoire —<br />

Résistance — Charge — Rapide — Revêtement de tunnel — Comportement — Rhéologie — Fissuration<br />

— Altération.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., spécial V, oct. 1973, p. 159.


ABSTRACTS<br />

The geology of chalk in the Paris Basin<br />

G. BIGNOT et M.P. AUBRY<br />

The authors describe the petrographic nature of chalk, which consists of detrital fragments and microfossils,<br />

ostracodes and foraminiferas, embedded in a gangue comprising a mixture of nannofossils<br />

and very small particles of calcite. The loose structure of this gangue, observed under the electron<br />

microscope, explains the mechanical behaviour of clay.<br />

The stratigraphic divisions obtained by a study of the microfauna and paleography of the Paris<br />

Basin enable geologists to define the variations of facies : chalk which tends to be detrital on the<br />

edge of the Basin, and chalk containing a high percentage of CaC03 in the centre.<br />

Knowledge of the nannofacies helps us to understand the particularities of the mechanical characteristics<br />

of the rock. Stratigraphic and petrophysical data, situating the rock in time and space,<br />

make it possible to consider geotechnical problems in a more general context.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., special V, oct. 1973, p. 11.<br />

The petrophysics of chalk<br />

M. MASSON<br />

The petrophysical study of chalk has revealed the influence of the fine structure of the material<br />

on its physical and mechanical characteristics.<br />

We note in particular the importance of the factors brought to light in relation to the value and<br />

dispersion of mechanical strength (compressive strength, micro-hardness, speed of wave propagation)<br />

and the importance of the microscopic gangue in relation to physical characteristics (density,<br />

porosity, suction, capillary rise).<br />

The analysis of these different parameters and of their relation to geophysical problems has made<br />

it possible to define a method of identifying chalks by means of simple tests and to class them in<br />

three families : hard, semi-hard, and soft. With this method of sample study it is necessary to combine<br />

a more general method of studying chalk masses, taking account of heterogeneities due to<br />

cracking and weathering.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., special V, oct. 1973, p. 23.<br />

The texture and behaviour of chalk<br />

A. LE ROUX<br />

Examination under the electron microscope shows the importance of the parameter of texture<br />

in the behaviour of these materials. But the intergranular bonds revealed in the whole of the materials<br />

studied vary in number from one sample to another ; there may be few of them (as in the Incarville,<br />

Sauqueville and Pacy-sur-Eure chalks) or they may be abundant, with the result that the material<br />

may pose numerous on-site problems, or it may behave satisfactorily.<br />

The study of a material which can be considered as intermediate between chalk and limestone confirms<br />

the existence of « bridges » which in this case are very clearly in evidence. Relations existing<br />

between intergranular bonds and the mechanical characteristics of the material are also confirmed.<br />

In the presence of water, the bonds are weakened (swelling of clay, for example), but they are still<br />

strong enough to prevent the material loosening. This explains, in the absence of any o ther phenomenon,<br />

the satisfactory behaviour of chalk under water ; and also explains why some chalks loosen<br />

when they are subjected to vibrations (e.g. the passage of on-site truck-mounted machinery).<br />

The preliminary study of textures should make it possible to predict behaviour and thereby provide<br />

the contractor with information about the materials he will have to work with.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., special V, oct. 1973, p. 49.<br />

175


The stability of very high chalk embankments<br />

A. DE RAGUENEL<br />

Observations and studies made on the Val-Guyon embankment on the A 13 autoroute have provided<br />

an explanation of the cause of the settlements and cracks observed.<br />

These disturbances cannot be explained by classical theories. It is shown that the settlements of<br />

the bed of the embankment are attributable to a densification of the latter resulting from a disintegration<br />

of the low-density chalk blocks in the course of time. This densification may lead to pressure<br />

being exerted on the pore water and an increase in the Poisson's ratio of the chalky mixture. This<br />

variation may in turn entail, as shown by a study of stresses using the method of finite elements,<br />

the development of tensile stresses at the head of the embankment which would explain the longitudinal<br />

cracks observed.<br />

These calculations made it possible to define the influence of the mechanical characteristics of the<br />

chalk, the height of the embankment, and its gradient, on the development of such cracks. This<br />

led to the possibility of laying down recommendations for the use of soft chalk in constructing<br />

embankments of various geometries.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., special V, oct. 1973, p. 57.<br />

Problems of earthworks in chalk<br />

J. PUIG<br />

The authors give the results of research conducted on the problems of earthworks in chalk, and the<br />

practical conclusions that may be drawn from them.<br />

Conventional geotechnical tests (particle size, Atterberg limits, water content, Proctor test) are<br />

unsuitable for identifying chalk, which is essentially an evolutive material, and consequently they<br />

cannot be used for predicting its behaviour.<br />

The percentage of paste or fineshas a predominant influence on working conditions. This percentage<br />

is essentially dependent on the nature of the « rock chalk », which may be more or less easy to break<br />

up, and also on the nature of the handling to which it is subjected.<br />

Research has led to the development of empirical tests enabling both these factors to be determined<br />

simultaneously : the vibrocrushing test and the repeated compaction test.<br />

On-site observations of the construction of chalk embankments and their stability in the longer<br />

term have made it possible to lay down recommendations concerning the geotechnical study of<br />

chalky materials and their conditions of use in the light of their nature and of the geometry of the<br />

structure.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., special V, oct. 1973, p. 81.<br />

The study, by vibration grinding, of the aptitude of chalks for compacting<br />

R. STRUILLOU<br />

The use of vibration grinding is envisaged for the purpose of predicting in the laboratory the difficulties<br />

of compacting chalks on working sites. Crushed dry samples in the form of 5/20 aggregates<br />

are ground for 30 s at various water contents. It is observed that for most chalks the quantity of<br />

elements below 1,25 mm which are formed varies linearly with the water content. Every chalk can<br />

therefore be characterized by a line of wear which gives its sensitivity to fragmentation.<br />

Furthermore, the fines of a given chalk are characterized by their liquid limit WL with effect from<br />

products below 400 microns formed by vibration grinding of the chalk in an aqueous medium under<br />

constant conditions (so as to allow for the sensitivity of the Atterberg limits of many chalks to operating<br />

conditions).<br />

By combining the characteristics of wear, natural water content w„, liquid limit WL of finesproduced<br />

by vibration grinding, and empirical coefficients whose purpose is to allow for various conditions<br />

on site, it is possible to determine the critical water content w c<br />

beyond which serious difficulties may<br />

be encountered during compacting.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., special V, oct. 1973, p. 99.


Foundations in chalk<br />

F. BAGUELIN.<br />

After referring to the difficulties encountered in taking chalk samples which can be used in the laboratory<br />

and the resulting dispersion of mechanical characteristics, the author shows the advantages<br />

of in situ measurements, in particular pressiometric measurements, for assessing the overall reaction<br />

of chalk in the mass.<br />

Observations and experiments have shown that calculations based on these various tests were pessimistic,<br />

especially dynamic driving formulae employed in the case of driven foundation piles. Chalk<br />

tends to liquefy under the effect of impacts, and recovers its mechanical strength after driving either<br />

by dissipation under excess pore pressure or by a thixotropic restructuring of the chalk of which<br />

little is so far known.<br />

<strong>La</strong> craie. Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., special V, oct. 1973, p. 113.<br />

Underground cavities in the chalk soil of Northern France<br />

J. LEPLAT.<br />

The chalk of Northern France was formerly worked intensively to meet the needs of agriculture<br />

and especially the building industry. In this latter sector, the production of buiding stone, which<br />

at that time had to be extracted from below ground, led to the opening of a large number of quarries<br />

which are being rediscovered by present-day major projects.<br />

The frequent absence of reliable records, the gradual loss of information formerly handed down<br />

from father to son, makes the prospection of these underground cavities very difficult. In any event,<br />

the essential starting point is a thorough geological knowledge of the region, which makes it passible<br />

to select and valorize data gathered during the field survey (for example by taking account of the<br />

fact that building chalk is almost always located at the same stratigraphic level). The next stage should<br />

be a gravimetric campaign, the only method of geophysical prospection applicable to all cases in<br />

this region. Professor Gabillard's electromagnetic method is designed for the detection of cavities<br />

of the « bottle » type in the region of Lille. Though it is accurate and effective in this particular case,<br />

its possibilities over the whole area are relatively limited. When the gravimetric or electromagnetic<br />

prospection reveals negative anomalies attributable to underground cavities, then mechanical<br />

means of reconnaissance must be employed. In favourable cases (numerous access shafts, shallow<br />

cavities) recourse can be had to devices of the penetrometer type ; otherwise, drilling is necessary.<br />

As soon as a cavity has been detected, the final stage is to enter it in order to survey it.<br />

For the treatment of underground cavities in chalk, two types of solutions may be adopted : filling<br />

in or tidying up. Filling in is reliable but costly ; in this region it is done by introducing quarry<br />

aggregate pneumatically, or by injecting a grout of fly ash and cement. The latter solution seems<br />

to be more reliable and less costly. Tidying up must be apdapted to the particular conditions, and<br />

consequently takes various forms, the simplest being the construction of access shafts allowing<br />

the cavity to be supervised periodically.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., special V, oct. 1973, p. 123.<br />

Chalk in electric power station construction sites<br />

G. COMES.<br />

The Division Geologie-Geotechnique of the Direction de l'Equipement de l'Electricité de France<br />

has in the course of the past five years to study chalk as a foundation material as a consequence of<br />

the evolution in the building and siting of electric power stations.<br />

The mechanical characteristics of chalk are such that this material behaves very differently from<br />

the rocks usually encountered in connection with these types of structures, such as granite, shale,<br />

limestone, etc.<br />

The sites studied are located at various points of the Paris Basin, taking that area in its widest sense.<br />

The geological and geotechnical work undertaken was performed on Senonian chalk in the Champenois<br />

and Cauchois localities.<br />

The geotechnical characteristics of the chalks in question were determined in the laboratory and in<br />

situ. The behaviour of the material in place is examined and analysed in this article.<br />

It is possible to build underground structures in chalk provided that a certain number of precautions<br />

of a technological nature are taken while the work is in progress.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., spécial V, oct. 1973, p. 149.<br />

177


Notes on the stability of tunnels driven through chalk<br />

M . PANET.<br />

Sound and unfissured chalk possesses favourable characteristics (satisfactory behaviour, low permeability,<br />

ease of excavation) for the construction of underground structures. But weathered and<br />

fractured zones lead to considerable difficulties.<br />

In the short term, sound and unfissured chalk behaves in an elasto-fragile manner, and when the<br />

thickness of overlay is considerable one observes classic but not brutal decompression failures which<br />

can be easily stabilized by bolting.<br />

Chalk reveals important deformations in the long term ; laboratory creep tests show deferred<br />

failures under stresses markedly below the resistance measured under rapid loading.<br />

Tunnel linings must therefore be calculated in the light of this rheological behaviour of chalk ;<br />

for in counteracting deferred convergence strains the lining is subjected to increasing stresses with<br />

the passage of time.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., special V, oct. 1973, p. 159.


ZUSAMMENFASSUNGEN<br />

Geologie des Kreidegesteins des Pariser Beckens<br />

G. BIGNOT. et M.-P. AUBRY<br />

Die Verfasser beschreiben die Petrographie des Kreidegesteins, das aus Mikrofissilfragmenten und<br />

Gesteinschutt und aus Ostrakoden und Foraminiferen, die in ein Gemisch von Nanofossilien und<br />

sehr kleinen Kalzitelementen eingefügt sind, zusammengesetzt ist. Das mechanische Verhalten<br />

des Kreidegesteins kann mit der lockeren Struktur dieses Gefüges, die mit Hilfe des Elektronenmikroskopes<br />

beobachtet werden kann, erklärt werden.<br />

Aufgrund der stratigraphischen Unterteilungen, die man mit Hilfe der Untersuchung der Mikrofauna<br />

und der Paläogeographie des Pariser Beckens ermittelt, kann der Geologe die verschiedenen<br />

Fazien bestimmen : meist detritusartiges Kreidegestein an den Rändern des Beckens und Kreidegestein<br />

mit starkem CaCOä Gehalt im Zentrum des Beckens.<br />

Als Schlussfolgerung kann gesagt werden, dass die Kenntnis der Nanofazien dazu beiträgt, die<br />

besonderen mechanischen Eigenschaften des Felsgesteins zu erklären. Aufgrund der stratigraphischen<br />

und petrophysikalischen Gegebenheiten und indem man das vorhandene Felsgestein zeitlich und<br />

räumlich im Rahmen der erdgeschichtlichen Entwicklung untersucht, können die geotechnischen<br />

Probleme sehr viel genereller erfasst werden.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., special V, oct. 1973, p. 11.<br />

Petrophysik des Kalkgesteins<br />

M. MASSON.<br />

Mittels einer petrophysikalischen Untersuchung des Kreidegesteins konnte der Einfluss der feinen<br />

Materialstruktur auf die physikalischen und mechanischen Eigenschaften bestimmt werden.<br />

Insbesondere wurde der Einfluss der mikroskopisch sichtbaren Elemente auf die Festigkeitswerte<br />

und-streuung (Druckfestigkeit, Mikrohärte, Ausbreitungsgeschwindigkeit der Wellen) und der<br />

mikroskopischen Grundmasse auf die physikalischen Eigenschaften (Dichte, Porosität, Saugfähigkeit,<br />

kapillare Steigfähigkeit) festgestellt.<br />

Mit Hilfe der Analyse dieser verschiedenen Parameter und ihres Einflusses auf die geotechnischen<br />

Probleme konnte ein Verfahren zur Bestimmung der Kreidegesteinarten mittels einfacher Prüfungen<br />

entwickelt werden und eine Klassifizierung in drei Familien — hart, mittelhart und weich — vorgenommen<br />

werden. Zusätzlich zu diesem Untersuchungsverfahren mit Probekörper muss eine<br />

Untersuchungsmethode für Kreidemassive angewendet werden, die die Heterogenität infolge Rissbildung<br />

und Verwitterung berücksichtigt.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., special V, oct. 1973, p. 23.<br />

Textur und Verhalten von Kreidegestein<br />

A. LE ROUX.<br />

Die elektronenmikroskopische Untersuchung zeigt den Einfluss der Textur auf das Verhalten der<br />

Materialien. Die Anzahl der Korn-zu-Korn Bindungen, die an allen untersuchten Materialien<br />

festgestellt wurden, ist jedoch variabel ; je nach den entnommenen Proben ist sie gering (im Falle<br />

der Kreidegesteine von Incarville, Sauqueville, und Pacy-sur-Eure) oder erheblich, d.h. in anderen<br />

Worten die Probleme auf der Baustelle sind zahlreich oder das Material zeichnet sich durch ein<br />

zufriedenstellendes Verhalten aus.<br />

Aufgrund der Untersuchung eines Materials, das eine Art von Übergang zwischen Kreidegestein<br />

und Kalkgestein darstellt, kann festgestellt werden, dass klare Zwischenabstufungen bestehen.<br />

Ausserdem können die Beziehungen zwischen den Korn-zu-Korn Bindungen und den mechanischen<br />

Eigenschaften des Materials nachgewiesen werden.<br />

179


Bei Vorhandensein von Wasser verringert sich die Bindung zwischen den Einzelkörnern (Hebungen<br />

von Tonböden, usw.) ; sie ist jedoch noch stark genug, um eine vollkommene Auflösung zu verhindern.<br />

Hiermit kann, falls kein anderer Faktor einwirkt, das gute Verhalten von unter Wasser<br />

stehendem Kreidegestein erklärt werden, aber auch die Auflösung bestimmter Kreidegesteinarten,<br />

sobald sie Vibrationen ausgesetzt sind (zum Beispiel infolge der Einwirkung von Baumaschinen).<br />

Aufgrund einer vorhergehenden Untersuchung der Textur könnte das Verhalten dieser Materialien<br />

vorherbestimmt werden und somit dem Bauleiter Angaben über das anzutreffende Material an<br />

die Hand gegeben werden.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., special V, oct. 1973, p. 49.<br />

Stabilität von hohen Dämmen aus Kreidegestein<br />

A. DE RAGUENEL<br />

Mit Hilfe der Beobachtungen und Untersuchungen, die am Damm aus Kreidegestein von Val-<br />

Guyon der Autobahn A 13 vorgenommen wurden, ist es möglich, die Ursache der beobachteten<br />

Setzungen und Rissbildung zu erklären.<br />

Diese Erscheinungen können mit Hilfe der klassischen Theorien nicht erklärt werden. Es wird<br />

gezeigt, dass die Setzungen des Dammplanums der weiteren Verdichtung des Dammes als Folge<br />

einer zeitlich fortschreitenden Auflösung der Kreideblöcke geringer Dichte zuzuschreiben sind.<br />

Diese Verdichtung dürfte zu einer Erhöhung des Porenwasserdruckes und des Poissonkoeffizienten<br />

des Kreidegemisches führen. Wie es die mit Hilfe des Verfahrens finiter Elemente durchgeführte<br />

Untersuchung zeigt, ergeben diese Veränderungen Zugspannungen in der obersten Schicht, die die<br />

Ursache der beobachteten Längsrisse sein dürften.<br />

Aufgrund dieser Berechnungen konnten der Einfluss der mechanischen Eigenschaften des Kreidegesteins,<br />

der Dammhöhe und der Böschungsneigung auf die Entwicklung derartiger Risse ermittelt<br />

werden. Somit konnten Empfehlungen aufgestellt werden hinsichtlich der Anwendung weichen<br />

Kreidegesteins zur Ausführung von Dämmen verschiedener Abmessungen.<br />

<strong>La</strong> craie. Bull. Liaison <strong>La</strong>bo P. et Ch., special V, oct. 1973, p. 57.<br />

Probleme bei Erdarbeiten mit Kreideböden<br />

J. PUIG.<br />

Der Bericht beschreibt die Ergebnisse von Untersuchungen über Probleme bei Erdarbeiten mit<br />

Kreideböden und enthält die folgenden praktischen Schlussfolgerungen.<br />

Die klassischen geotechnischen Versuche (Kornverteilung, Atterberg'sehe Grenzen, Wassergehalt,<br />

Proktor) sind zur Kennzeichnung von Kreideböden d.h. Materialien, die Veränderungen unterworfen<br />

sind, und damit zur Bestimmung ihrer Verhaltensweisen ungeeignet.<br />

Der Anteil an Paste oder Feinbestandteilen ist für den Einbau von überragender Bedeutung. Dieser<br />

Prozentanteil ist im wesentlichen von zwei Faktoren abhangig : erstens von der Art des mehr oder<br />

weniger zerkleinbaren « Kreidefels » und zweitens von der Anzahl und Art der Behandlungen,<br />

denen die Böden unterworfen werden.<br />

Aufgrund der Untersuchungen konnten empirische Versuche entwickelt werden, mit denen gleichzeitig<br />

diese zwei Faktoren erfasst werden können : und zwar der « Vibrationsmahlversuch » und der<br />

« Versuch mehrmaliger Verdichtung ».<br />

Aufgrund von Baustellenbeobachtungen während des Einbaues und der langzeitigen Stabilität<br />

von Böschungen aus Kreideböden konnten Empfehlungen aufgestellt werden, und zwar hinsichtlich<br />

der geotechnischen Untersuchung von Kreideböden und der Einbaubedingungen in Abhängigkeit<br />

von der Art und der Geometrie von Bauwerken.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., special V, oct. 1973, p. 81.<br />

Untersuchung der Verdichtungsfähigkeit von Kreidegestein mit Hilfe des Vibrationsbrechverfahrens<br />

R. STRUILLOU.<br />

Der Beitrag beschreibt die Anwendung der Vibrationszerkleinerung, um im <strong>La</strong>bor die auf der<br />

Baustelle auftretenden Verdichtungsschwierigkeiten beim Einbau von Kreidegestein vorherzubestimmen.<br />

Dabei werden die aus trocken gebrochenen Zuschlagstoffen 5/20 bestehenden Proben<br />

etwa 30 Sek. bei verschiedenen Wassergehalten diesem Verfahren unterworfen. Für die meisten<br />

Kreidegesteinsarten kann festgestellt werden, dass der dabei entstehende Anteil mit einer Korngrösse<br />

geringer als 1,25 mm proportional zum Wassergehalt ist. Jede Kreidegesteinsart zeichnet sich also<br />

durch eine « Abriebgerade » aus, die ihre Zerkleinerungsempfindlichkeit ausdrückt.


Ausserdem zeichnen sich die Feinbestandteile eines bestimmten Kreidegesteins durch eine bestimmte<br />

Fliessgrenze WL aus. Diese Fliessgrenze wird an Teilchen mit einer Grösse geringer als 400 Mikron<br />

bestimmt, die bei der Vibrationsbrechung unter Vorhandensein von Wasser entstehen, und zwar<br />

unter konstanten Bedingungen, um dem Einfluss der Versuchsdurchführung auf die Atterberg'sehen<br />

Grenzen bei vielen Kreidegesteinsarten Rechnung zu tragen.<br />

Wenn man die Abriebeigenschaften, den natürlichen Wassergehalt w n<br />

, den Wassergehalt bei der<br />

Fliessgrenze WL der durch Vibrationsbrechung entstehenden Feinbestandteile und die empirischen<br />

Baustellenfaktoren miteinander verbindet, kann man einen Wassergehalt w c<br />

bestimmen, der —• falls<br />

überschritten — zu erheblichen Schwierigkeiten bei der Durchführung von Verdichtungsarbeiten<br />

führen kann.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo P. et Ch., special V, oct. 1973, p. 99.<br />

Gründungen im Kreidegestein<br />

F. BAGUELIN.<br />

Zuerst erwähnt der Verfasser die Schwierigkeiten, die bei der Probenahme von Kreidegestein für<br />

<strong>La</strong>borzwecke auftreten, und die dabei sich ergebende Streuung der mechanischen Eigenschaften.<br />

Dann wird auf die Bedeutung von Messungen im Terrain eingegangen, insbesondere von pressiometrischen<br />

Messungen, um das Gesamtverhalten von Kreidegestein zu beurteilen.<br />

Mit Hilfe von Beobachtungen und Versuchen wurde nachgewiesen, dass die auf verschiedenen<br />

Prüfungen fussenden Berechnungen konservative Resultate ergeben, insbesondere die dynamische<br />

Rammung für Rammpfähle. Tatsächlich zeigt das Kreidegestein die Tendenz, sich unter der<br />

Schlagwirkung zu verflüssigen, und seine Festigkeit erhöht sich anschliessend wieder, und zwar<br />

entweder als Folge der Energiedissipation in Porenwasserüberdruck oder infolge einer noch nicht<br />

vollkommen erforschten tixotropen Restrukturierung.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., special V, oct. 1973, p. 113.<br />

Unterirdische Hohlräume der Kreidevorkommen im Norden Frankreichs<br />

J. LEPLAT.<br />

Die Kreidevorkommen im Norden Frankreichs wurden früher intensiv abgebaut, um den Bedarf<br />

der <strong>La</strong>ndwirtschaft und besonders der Bauwirtschaft zu decken. Die Herstellung von Bausteinen,<br />

für die ein Untertagebau notwendig war, führte dazu, eine hohe Anzahl von unterirdischen Steinbrüchen<br />

anzulegen, die heute im Rahmen grösserer Bauarbetein wieder entdeckt werden.<br />

Infolge des Mangels zuverlässiger Unterlagen und des fortschreitenden Verlustes von ehemals von<br />

Vater zu Sohn weitergegebenen Informationen ist die Untersuchung der unterirdischen Hohlräume<br />

äusserst schwierig geworden. Grundsätzlich ist die genaue Kenntnis der geologischen Verhältnisse<br />

des Gebietes die unerlässliche Grundlage weiterer Untersuchungen und ermöglicht die Auswahl<br />

und Auswertung der im Rahmen von Untersuchungen an Ort und Stelle erworbenen Daten<br />

(beispielsweise ist die Tatsache, dass das Kreidevorkommen sich normalerweise immer im gleichen<br />

stratigraphischen Niveau befindet, zu berücksichtigen).<br />

Anschliessend ist es notwendig eine Serie von gravimetrischen Untersuchungen durchzuführen ;<br />

die Gravimetrie stellt das einzige geophysikalische Prüfverfahren dar, das sich bei allen Hohlraumformen<br />

in diesem Gebiet anwenden lässt. Zur Feststellung von Hohlräumen in « Flaschen » form<br />

in der Gegend von Lille wurde das elektromagnetische Verfahren des Professors Gabillard benützt,<br />

das — obwohl genau und schnell in diesem besonderen Fall — im gesamten Gebiet nur begrenzt<br />

angewendet werden kann. Wenn die gravimetrischen Messungen (oder das elektromagnetische<br />

Verfahren) zu anormalen Ergebnissen führt, die unterirdischen Hohlräumen zugeschrieben werden<br />

können, müssen mechanische Sondierungsverfahren angewendet werden. In günstigen Fällen<br />

— zahlreiche Eingangsbrunnen, Hohlräume in geringer Tiefenlage — kann man Sondierungsmaschinen<br />

einsetzen, wenn nicht, sind Bohrungen notwendig. Schliesslich, wenn ein Hohlraum<br />

nachgewiesen worden ist, muss abgestiegen werden und die Abmessungen werden aufgenommen<br />

Zur Sicherung der unterirdischen Hohlräume in Kreidevorkommen sind zwei Lösungen möglich :<br />

Auffüllen oder Ausbau. Die erste Lösung ist sicher aber kostspielig und wird in dem genannten<br />

Gebiet entweder durch pneumatisches Einbringen von Zuschlagstoffen aus Steinbrüchen oder<br />

durch Injektion von Schlämmen aus Flugasche und Zement durchgeführt, wobei das letztere Verfahren<br />

sicherer und weniger kostspielig ist. Der Ausbau entspricht den vorliegenden örtlichen<br />

Bedingungen und ist daher verschiedenartig ; die einfachste Lösung besteht darin, Eingangsbrunnen<br />

zu bauen und den Hohlraum regelmässig zu überwachen.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., special V, oct. 1973, p. 123.<br />

181


Kreidegestein an Baustellen von Elecktrizitätsanlagen<br />

G . COMES.<br />

Während der letzten fünf Jahre musste die Abteilung für geotechnische Geologie der Baudirektion<br />

der EDF infolge der Entwicklung hinsichtlich der Herstellung und des Baus von Elektrizitätsanlagen<br />

Untersuchungen über das Kreidegestein als Gründungsmaterial durchführen.<br />

Aufgrund seiner mechanischen Eigenschaften weist das Kreidegestein ein vollkommen anderes<br />

Verhalten als die üblichen Felsgesteine, wie z.B. Granit, Schiefer, Kalgstein, beim Bau derartiger<br />

Anlagen auf.<br />

Die untersuchten Baustellen befinden sich im Pariser Becken im weiteren Sinne des Wortes. Die<br />

durchgeführten geotechnischen und geologischen Arbeiten wurden am senonischen Kreidegestein<br />

im Gebiet von Champagne und Caux vorgenommen.<br />

Die geotechnischen Eigenschaften des Kreidegesteins wurden sowohl im <strong>La</strong>bor als auch im Terrain<br />

bestimmt. Das Verhalten des Materials wurde and Ort und Stelle untersucht und analysiert.<br />

Die Herstellung von Bauwerken untertage ist möglich, falls einige technische Vorsichtsmassregeln<br />

während der Durchführung der Arbeiten getroffen werden.<br />

<strong>La</strong> traie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., special V, oct. 1973, p. 149.<br />

Einige Bemerkungen über die Stabilität von Tunnel in Kreidegestein<br />

M .<br />

PANET.<br />

Ein gesundes Kreidegestein ohne Risse weist für den Bau von Untertagebauwerken günstige Eigenschaften<br />

auf (gute Standfestigkeit, geringe Durchlässigkeit, leichter Abbau). Die Verwitterungszonen<br />

mit Rissbildung führen jedoch zu erheblichen Schwierigkeiten.<br />

Ein gesundes Kreidegestein ohne Risse weist kurzfristig ein elastisches, aber auch sprödes Verhalten<br />

auf. Falls die Höhe der Überdeckung gross ist, kann man die klassischen Risse der Druckminderung<br />

feststellen, die jedoch nicht abrupt auftreten und die man ohne Schwierigkeiten mittels Ankerausbau<br />

stabilisieren kann.<br />

Das Kreidegestein weist erhebliche Nachverformungen auf ; mit Hilfe von Fliessversuchen im<br />

<strong>La</strong>bor kann man — bei deutlich geringeren Beanspruchungen als die bei schneller Belastung gemessene<br />

Festigkeit — verzögerte Risse feststellen.<br />

Die Verkleidung muss in Abhängigkeit dieses Theologischen Verhaltens des Kreidegesteins dimensioniert<br />

werden ; tatsächlich ist die Verkleidung, die die Konvergenz-Nachverformungen aufnimmt,<br />

den zeitlich wachsenden Beanspruchungen unterworfen.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., special V, oct. 1973, p. 159.


i<br />

RESUMENES<br />

Geología de la creta en la Cuenca parisiense<br />

G. BIGNOT. et M.-P. AUBRY<br />

Describen los autores la naturaleza petrográfica de la creta constituida por fragmentos detríticos<br />

y microfósiles, ostracodios y foraminíferos incrustados en una matriz, mezcla de nanofósiles y de<br />

muy pequeños elementos de calcita. Observando la estructura suelta de la matriz en el microscopio<br />

electrónico se puede explicar el comportamiento mecánico de la creta.<br />

Mediante las divisiones estratigráficas obtenidas estudiando la microfauna y la paleogeografía<br />

de la Cuenca parisiense, el geólogo define las variaciones de facies : creta con tendencia detrítica<br />

en los bordes de cuenca y creta con gran porcentaje de CaC03 en el centro de la cuenca.<br />

Concluyendo, el conocimiento de las nanofacies ayuda a comprender las peculiaridades de las<br />

características mecánicas de la roca. Los datos estatigráficos y petrofísicos, al sustituir a la roca<br />

y en el espacio, permiten considerar los problemas geotécnicos dentro de un contexto más general.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., spécial V, oct. 1973, p. 11.<br />

Petrofísica de la creta<br />

M .<br />

MASSON.<br />

Con el estudio petrofísico de la creta se ha puesto de manifiesto el influjo de la estructura fina del<br />

material en sus características físicas y mecánicas.<br />

Se observa especialmente la importancia de los elementos figurados sobre el valor y la dispersión<br />

de la resistencia mecánica (resistencia a la compresión, microdureza, velocidad de transmisión de<br />

ondas) y la matriz microscópica sobre las características físicas (densidad, porosidad, succión,<br />

ascensión capilar).<br />

Analizando los distintos parámetros y su incidencia sobre los problemas geotécnicos, se ha podido<br />

definir un método de identificación de las cretas mediante ensayos sencillos y clasificarlas en tres<br />

familias : cretas duras, semiduras y blandas. A este método de estudio con muestras, es menester<br />

añadir un método de estudio más general de los macizos de creta teniendo en cuenta las heterogeneidades<br />

debidas a la fisuración y a la alteración.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., spécial V, oct. 1973, p. 23.<br />

Textura y comportamiento de las cretas<br />

A. LE ROUX.<br />

El estudio en microscopía electrónica demuestra la importancia del parámetro textura en el comportamiento<br />

de los materiales. Sin embargo, las uniones intergranulares puestas de manifiesto en la<br />

totalidad de los materiales estudiados son de número variable ; según las muestras, serán poco numerosas<br />

(ejemplo de las cretas de Incarville, Sauqueville y Pacy-sur-Eure) o abundantes, el material<br />

planteará múltiples problemas en la obra o tendrá comportamiento satisfactorio.<br />

El estudio de un material que se puede considerar como un término de paso entre las cretas y las<br />

calizas confirma la existencia de los « puentes » que aparecen, en este caso, con suma nitidez. También<br />

se confirma las relaciones que existen entre las uniones intergranulares y las características mecánicas<br />

del material.<br />

En presencia de agua, quedan debilitadas las uniones (hinchamiento de las arcillas, etc.), pero todavía<br />

son lo bastante resistentes para oponerse a la desagragación del material, con lo que se explica,<br />

en ausencia de cualquier otro fenómeno, la correcta estabilidad de las cretas sumergidas, aunque<br />

también la desagregación de algunas de las mismas en cuanto quedan sometidas a las vibraciones<br />

(por ejemplo, el paso de los vehículos de la obra).<br />

El estudio previo de las texturas debería pemitir la previsión del comportamiento, quedando así<br />

informada la administración de la obra acerca de los materiales con los que deberá compaginar.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., spécial V, oct. 1973, p. 49.<br />

183


Estabilidad de los terraplenes cretáceos de gran altura<br />

A. DE RAGUENEL.<br />

Mediante las comprobaciones y estudios efectuados en el terraplén cretáceo de Val-Guyon (Francia)<br />

en la autopista A 13, se puede explicar la causa de los asentamientos y fisurasobservados. No pueden<br />

explicarse estos desórdenes con las teorías clásicas. Se ha demostrado que los asentamientos de la<br />

plataforma del terraplén se pueden imputar a la densificación del mismo como consecuencia de la<br />

desagregación en el tiempo de los bloques cretáceos de escasa densidad. <strong>La</strong> densificación llevaría<br />

a fenómenos de puesta a presión del agua intersticial y al aumento del coeficiente de Poisson de la<br />

mezcla Cretácea. <strong>La</strong> variación acarrearía, como se ve en un estudio de las tensiones con el método<br />

de los elementos acabados, el desarrollo de las tensiones de tracción en la cabeza del terraplén,<br />

con lo que se explicarían las fisuraslongitudinales comprobadas.<br />

Los cálculos han permitido definir el influjo de las características mecánicas de la creta, de la altura<br />

del terraplén y de su pendiente de talud en el desarrollo de las fisuras.Así se han podido definir<br />

recomendaciones para la utilización de las cretas blandas en la ejecución de terraplenes de distintas<br />

geometrías.<br />

<strong>La</strong> craie, Bal/. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., spécial V, oct. 1973, p. 57.<br />

Problemas de explanación en la creta<br />

J. PUIG.<br />

El artículo expone los resultados de investigaciones emprendidas sobre la creta, en los problemas<br />

de explanaciones y las conclusiones prácticas que se pueden sacar.<br />

Los ensayos clásicos de geotécnica (granulometría límites de Atterberg, contenido de agua, ensayo<br />

proctor) son inadaptados para la identificación de la creta, material esencialmente « evolutivo »<br />

y por consiguiente para preveer su comportamiento.<br />

<strong>La</strong> influencia del porcentage de pasta o elementos finos es preponderante sobre las condiciones de<br />

puesta en obra. Este porcentage es esencialmente función por una parte, de la naturaleza de la<br />

« creta roca » más o menos disgregable, y por otra parte, del numero y de la naturaleza de las manipulaciones<br />

a las que será sometida.<br />

<strong>La</strong> investigación ha conducido a poner a punto pruebas empíricas que permiten dominar estos<br />

dos factores : el ensayo de vibrotrituración y el ensayo de compactación repetida.<br />

Constataciones en obras, en el momento de la puesta en obra y de la estabilidad a más largo plazo<br />

de los terraplenes de creta, nos han permitido definir recomendaciones sobre : el estudio geotécnico<br />

de los materiales de creta y las condiciones de puesta en obra en función de su naturaleza y de la<br />

geometría de la obra.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., spécial V, oct. 1973, p. 81.<br />

Estudio, mediante vibrotrituración, de la aptitud de las cretas para la compactación<br />

R. STRUILLOU<br />

Se considera la utilización de la vibrotrituración con objeto de prever en el laboratorio las dificultades<br />

que se pueden encontrar para compactar las cretas en las obras. Se desgastan las muestras, machacadas,<br />

en seco, en áridos 5/20, durante 30 s, con diversos contenidos de agua. Se comprueba que<br />

en la mayoría de las cretas, la cantidad formada de elementos inferiores a 1,25 mm varía linealmente<br />

con el contenido de agua. Así, pues, cada creta se puede caracterizar por una recta de desgaste,<br />

la cual proporciona su sensibilidad a la fragmentación.<br />

Por otro lado, los áridos finosde una creta determinada se caracterizan por el límite de liquidez WL,<br />

a partir de productos inferiores a 400 mieras formados mediante vibrotrituración en medio acuoso,<br />

en condiciones constantes, con objeto de tener en cuenta la sensibilidad de los límites de Atterberg<br />

de cuantiosas cretas en condiciones operatorias.<br />

Combinando las características de desgaste, el contenido de agua natural w n<br />

, el contenido de agua<br />

de liquidez WL de los áridos finos de vibrotrituración y coeficientes empíricos que sirven para tener<br />

en cuenta las diversas condiciones de la obra, se determina el contenido de agua crítico w c<br />

por encima<br />

del cual se corre el peligro de encontrarse con importantes dificultades durante la compactación.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., spécial V, oct. 1973, p. 99.


Cimentaciones dentro de la creta<br />

F. BAGUELIN.<br />

El autor, tras apuntar las dificultades halladas para efectuar tomas de muestras de creta utilizables<br />

en el laboratorio, y la dispersión de las características mecánicas que se infieren, pone de manifiesto<br />

el interés de las medidas in situ, especialmente presiométricas para apreciar la reacción global de<br />

la creta en su masa.<br />

<strong>La</strong>s observaciones y experimentaciones han demostrado que los cálculos, basándose en esos distintos<br />

ensayos, eran pesimistas, en especial las fórmulas de hinca dinámica empleadas en el caso<br />

de pilotes hincados. Efectivamente, la creta tiene tendencia a licuarse bajo el efecto de los choques,<br />

reconstituyéndose la resistencia mecánica después de la hinca mediante disipación en sobrepresión<br />

intersticial, o bien mediante la restructuración tixotrópica de la creta todavía mal conocida.<br />

<strong>La</strong> craie, Bul!. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., spéa'al V, oct. 1973, p. 113.<br />

<strong>La</strong>s cavidades subterráneas de la creta en la región norte de Francia<br />

J. LEPLAT.<br />

<strong>La</strong> creta del norte de Francia fue objeto antaño de una explotación intensiva para las necesidades<br />

de la agricultura y sobre todo de la construcción. En lo concerniente a esta última, la producción<br />

de piedras para edificar para las cuales la extracción subterránea era entonces obligatoria, ha determinado<br />

la apertura de una cantidad impresionante de canteras que las obras importantes actuales<br />

hacen descubrir de nuevo.<br />

<strong>La</strong> falta frecuente de archivos locales valederos, la pérdida progresiva de informes transmitos antaño<br />

de padre a hijo, hacen más difícil la prospección de dichas cavidades subterráneas. Fuera lo que<br />

fuere, el punto de partida indispensable, es un buen conocimiento geológico de la región, que permita<br />

seleccionar y valorar los informes recogidos durante la encuesta en el lugar mismo (por ejemplo,<br />

el tener en cuenta del hecho que la creta para edificar se sitúa siempre prácticamente al mismo nivel<br />

estatigráfico).<br />

<strong>La</strong> etapa siguiente tiene que ser una cruzada gravimétrica, sólo método de prospección geofísica,<br />

que puede aplicarse a todos los casos de la región. El método electromagnético del profesor Gabillard<br />

ha sido concebido para la investigación de las cavidades del tipo « botellas » de la región de<br />

Lille ; preciso y eficaz en este caso particular, sus posibilidades a la escala de la región son relativamente<br />

limitadas cuando la prospección gravimétrica (o electromagnética) ha revelado anomalías<br />

negativas que pueden atribuirse a cavidades subterráneas, se han de poner en obra, entonces,<br />

medios de reconocimiento mecánicos. En los casos favorables pozos de acceso numerosos, cavidades<br />

poco profundas, se puede recurrir a aparatos del tipo penetrometro, o sino, es necesario horadar.<br />

Enfín, así que se ha puesto en evidencia una cavidad el último paso consiste en descender adentro<br />

para efectuar el levantamiento topográfico.<br />

Para el tratamiento de las cavidades subterráneas en la creta, se pueden retener dos tipos de soluciones<br />

: el rellenarlas o el aprovecharlas. <strong>La</strong> colmatación, solución segura pero cara, se realiza en<br />

la región ya sea mediante un árido de cantera, puesto en sitio con el método neumático, o mediante<br />

una lechada de cenizas volantes y de cemento, esta segunda solución siendo en apariencia más<br />

segura y menos costosa. El aprovechamiento debe adaptarse al problema planteado y reviste por<br />

consiguiente formas variadas, la más sencilla siendo la construcción de pozos de acceso que permitan<br />

la vigilancia periódica de la cavidad.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., spécial V, oct. 1973, p. 123.<br />

<strong>La</strong> creta en los lugares de instalación de estructuras para la producción de electricidad<br />

G. COMES.<br />

<strong>La</strong> división Geología-Geotécnica de la dirección del Equipamento de « Electricité de France » ha<br />

estado llevada, en el último lustro, a raíz de la evolución en la realización y la instalación de las<br />

estructuras para la producción eléctrica, a estudiar la creta como material de cimentación.<br />

<strong>La</strong>s características mecánicas que presenta la creta hacen que este material tenga un comportamiento<br />

muy distinto de los de las rocas normalmente encontradas para este tipo de estructuras, tal como<br />

granitos, esquistos, calizas, etc.<br />

Los lugares estudiados se encuentran repartidos por la Cuenca parisiense en un sentido bastante<br />

amplio. Los trabajos geológicos y geotécnicos emprendidos fueron realizados en la creta del seoniense<br />

en tierra de Champaña y en tierra de Caux.<br />

185


Se determinaron las características geotécnicas de las cretas en el laboratorio e in situ. Se examina<br />

y analiza el comportamiento del material localmente.<br />

<strong>La</strong> realización de estructuras subterráneas en la creta es viable si durante las obras se adoptan ciertas<br />

precauciones de orden tecnológico.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., spécial V, oct. 1973, p. 149.<br />

Algunas observaciones sobre la estabilidad de los túneles construidos en la creta<br />

M .<br />

PANET.<br />

<strong>La</strong> creta sana y no Asurada es un terreno que presenta características favorables para realizar estructuras<br />

subterráneas (estabilidad correcta — baja permeabilidad — fácil excavación), aunque<br />

sin embargo, las zonas alteradas y fracturadas acarrean importantes dificultades.<br />

<strong>La</strong> creta sana y no Asurada presenta, a corto plazo, un comportamiento elasto-frágil y cuando llega<br />

a ser importante la altura de recubrimiento, se observan rupturas de descompresión clásicas, aunque<br />

poco bruscas que se pueden estabilizar con facilidad mediante empernado.<br />

<strong>La</strong> creta pone de maniAesto importantes deformaciones diferidas ; se pueden observar, en los ensayos<br />

de fluencia en el laboratorio, rupturas diferidas para solicitaciones clarísimamente inferiores a la<br />

resistencia medida durante una carga rápida.<br />

Se han de calcular los revestimientos en función de ese comportamiento reológico de la creta, pues<br />

al oponerse el revestimiento a las deformaciones diferidas de convergencia, queda sometido a crecientes<br />

solicitaciones en el tiempo.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., spécial V, oct. 1973, p. 159


PE3FOME<br />

reojioriiH MCjioBwx OTjiosisemiii ll:ipn;i;ci;oro öacceiraa<br />

G. BIGNOT et M . P. AUBRY<br />

JUaHO neTporpaiJiH^ecKoe onncaHiie Mena, cocTomriero H3 oÔJiOMOiHbix nacrau, H MHnpo-<br />

HCKonaeMMx oerpanojioB H g)opaMHHii(j)ep, B ocHOBe 113 ciwecH HaHo-HCKonaeMtix c<br />

O x ieHb MaJleHbKHMH laCTHTOaMH KajIblIHTa. HaÔJIIOHaeMaH HOU 3JieKTp0HHHM MHKpoc-<br />

KonoM HenjioTHaH CTpyKTypa no3BOJiHeT o6T»HCHHTb MexaHmecKne CBOHCTBa Mena.<br />

CTpaTHrpacjìHMecKHe pa3JiHiHH, nojiyneHHbie npn HccnenoBariHH MHnpo$ayHbi, a Táreme<br />

naneorpaânm ITapHîKCKoro 6acceitHa no3BOJiHK)T reonory BbiHBHTb H3MeHeHHH (hain :<br />

no oKpanHe ôaccetea — Men oßnoMorabiH, B iiempe — Men c BHCOKHM conepHtaHHeM<br />

Ca CO3.<br />

B 3aKJiK> l ieHne — HccnenoBaHiie Haiio(j)auHii cnocoôcTByeT noHHMaHHK) ocoöeHOCTett<br />

npoHHOCTHbix xapamepHCTHK nopoffbi. CTpaTHrpachnqecKHe H neTpoH3HHecKHe<br />

HaHHbie, yTOMHHH nonoîKeHHe nopoHbi BO BpeMeHH H B npocTpaHCTBe, no3BonHK>T<br />

paccMaTpHBaTb HHHteHepHO-reonorHTOCKHe npo6jieMbi B 6onee mnpoKOM acneKTe.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., spécial V, oct. 1973, p. 11.<br />

lIi'T|)0(|)ii.tui;a ne.ni<br />

M .<br />

MASSON<br />

rieTp0(j)H3H l ieCK0e HCCnenBaHHe Mejia nOSBOJIHJIO BbiHBHTb BnHHHHe TOHKOHHCnepCHOÜ<br />

CTpyKTypbi Ha ero H3<br />

Tpex rpynn, BKmoiaiomHX Men TBepnbiñ, nonyTBepnbiñ H MHrKHñ. 3ïy MeTOUHKy<br />

HccnenoBamiH no o6pa3iraM cnejryeT coneTaTb c Sonee oßiiniM MeTonoM H3y*ieHHH MenoBbix<br />

MaCCHBOB, yHHTblBatOUIHM HeOnHOpOHHOCTII, CBH3aHHbie C HanHHHeM TpeiIJHH H BblBeTpenocTbio.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., spécial V, oct. 1973, p. 23.<br />

TeKCTypa 11 noBejjemie iwejioBbix uopo.i<br />

A . LE<br />

ROUX<br />

3neKTpoHHOMHKpocKOnHqecKoe HccnejiOBaHHe BMHBnfleT 3HaneHHe TeKCTypu B noBe-<br />

HeHHH MaTepnanoB. MejK3epH0Bbie CBH3H, BbiHBneHHbie Ha Bcex HccnenoBaHHbix MaTepnanax,<br />

KonnMecTBeHHO MCHHIOTCH; B 3aBiicHM0CTH OT o6pa3iiOB OHH ManoHHcneHHbi<br />

(B cnyqae MenoB HHKapBHnb, CoKeBHnb H riacH-cK>p-9p) HOT MHoroMHcneHHbi, H COOT-<br />

BeTCTBeHHo nopona Ha cTpoHTenbHbix nnoinannax 6yneT npH^HHOü MHornx TpynHOCTefl<br />

HnH we OKameTCH BnonHe ynoBneTBopHTenbHbix KanecTB.<br />

IfeyneHHe noponbi, KOTopyio MOHÎHO paccMaTpHBaTb KaK nepexojrHyio Memny MenoM H<br />

H3BecTHHK0M, nonTBepHtnaeT cymecTBOBaHHe « MOCTHKOB », B naHHOM cnynae OHeHb<br />

OTMeTnHBO BHHHMbix. rionTBepîKjT,aeTCH TaKJKC H 3aBHCHMOCTb npo i iHOCTHbix xapaKTepHCTHK<br />

OT Me?K3epH0BbIX CBH3eÍÍ.<br />

B npHcyTCTBHH BOUM CBH3H ocnaôneHbi (rnnHbi HaôyxaiOT H T. H.), HO eme Hoc/raTOMHO<br />

npo^Hbi, HTO6H BocnpenHTCTBOBaTb pa3pymeHHio ñopo/na. 3THM odiHCHHeTCH ycTOHHH-<br />

BOCTb oôBOAHeHHoro Mena, B OTcyTCTBHH HHbix dpaKTopoB, HO Tanate H nonHoe pa3-<br />

pymeHHe HeKOTopbix MenoB npw HannHHH BHÔpauHft (HanpHMep, Bbi3BaHHbix cTpoHTeb-<br />

HblM TpaHCIlOpTHblM HBHÎKeHHeM).<br />

FIpejiBapHTenbHoe H3yqeHHe TeKCTypbi flonHtHO no3BonHTb nporao3HpoBaTb noBeji,eHHe<br />

nopon H npenocTaBHTb HHHîeHepy OTBeTCTBeHHOMy 3a cTpoitay HywHbie cBep;eHHH o<br />

MaTepnanax, c KOTOPHMH eMy npnjreTCH HMeTb jreno.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., spécial V, oct. 1973, p. 49.<br />

187


ycTOHHiiBocTb BbicoKiix MejioBux Hacbineii<br />

A. DE RAGTJENEL<br />

HaßjiioHeHHH H Hccjieji,OBaHHH MejioBoíi Hacunn Bajib-rniioH Ha MarncTpajibHoli<br />

aBTOMOÖHJIbHOH HOpOre A-13 n03B0JIHJIH BblHBHTb npHHHHy OCajIOK H TpemHH.<br />

KjiaCCHHeCKHe TeOpHH He n03B0JIHK»T oOlHCHHTb 3TH HapyilieHHH yCTOHIHBOCTH. BHJIO<br />

noKa3aHO, ITO ocaHKH ocHOBaHHH Hacbinn BH3BaHH ero ynjiOTHeHHeM, BCJieacTBHe<br />

pa3ynpoHHeHHH co BpeMeHeM HeruiOTHbix MCJIOBHX 6JIOKOB. 3TO ynJioTHeHHe Bbi3biBaeT,<br />

noBHHHMOMy, Hanop nopoBoít BOJIM H yBejnweHHe KostbrhHinreHTa IlyaccoHa MCJIOBOH<br />

MaccH. Kan noKa3ano HccJienoBaHHe HanpHSKeHHtt MCTOHOM KOHCHKHX sjieMeHTOB,<br />

a H3MeHeHHH BepoHTHO BjieKyT sa coôoit pa3BHTHe pacTHrHBaroiUHX HanpHîKeHHtt B<br />

BepxHeft uacTH HacbmH, HTO MOHtei o6T>HCHHTb noHBjieraie nponont-Hbix TperUHH.<br />

9TH pacneTbi no3BojiHHH BbiHBiiTb BJIHHHHC npoHHocTHbix xapaKTepncTHK Mejia, BLICOTM<br />

Hacbinn H HaKJioHa OTKOCOB Ha pa3BHTHe nojroôHbix TpeiuiiH. OKa3ajiocb,TaKHM o6pa30M,<br />

B03M0JKHMM COCTaBHTb peKOMeHJiaiJHIÏ nO HCnOJIb30BaHHK> MOTKOrO Mena JS.HH B03Be-<br />

HeHHH Hacbineíi pasjiHHHOil rhopMH.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., spécial V, oct. 1973, p. 57.<br />

Bonpocbi npoH3Bo^CTBa 3eiHJiHHbix paôoT B Me.ioribix nopo^ax<br />

J. PUIG<br />

B CTaThe npHBeneHbi pe3yjibTaTW HccjiejroBaHHii, npoBe,n.eHHbix B oTHOiiieHHH npoH3-<br />

BOHCTBa 3eMJiHHbix paôoT B MenoBbix nopojjax H jjaHti npaKTnqecKne BHBOJTM .<br />

KjiaccHMecKHe reoTexHHHecKiie HcnuTaHHH (onpeaejieHue rpaHyjiOMeTpHuecKoro<br />

cocTaBa, rpaHHTi TenyiecTH H njiacnmHOCTii, BJia»iHOCTH H njioTHOCTii no IIpoKTOpy)<br />

He OTpawKaiOT xapaKTepHbie cBoñcTBa Mejia, MaTepnajia B OCHOBHOM « HSMCHMHBOFO »,<br />

H TeM caMbiM He no3BOJiHiOT nporH03HpoBaTb ero ycTOËraBOCTb.<br />

CoHepwaHHe MeJiOBoro TecTa HUH MejiK03epHHCTbix ^acTHii OKa3HBaeT Hpeoojiajraioiiie<br />

BJIHHHHC Ha ycjioBHH npoH3Boj;cTBa paôoT. 3TO coHepwaHHe rjiaBHWM o6pa30M 3aBHCiiT,<br />

c offHOH CTOpoHH OT npHpon,bi canoro Mejia KaK nopo^bi Sojiee HJIH MeHee oierno pa3-<br />

Mejib^aromeñcH, c apyroft cTopoHbi — OT B03MO>KHoro KOJiHHecTBa H xapaKTepa norpy-<br />

30iHO-TpaHcnopTHbix onepaiíHíl.<br />

Hccjiep;oBaHHe npwBejio K pa3pa6oTKe 3MnHpH iecKHX HcnuTaHHü, KOTopbie no3BOJiHK>T<br />

l<br />

OHHOBpeiweHHo oxBaTHTb o6a STH dpaKTopa : ncnbiTaHHH Ha BH6poH3iviejibqeHHe H ncnu-<br />

TaHHH Ha noBTopHoe ynjiOTHeriHe.<br />

HaôJHoaeHHH 3a cTpoHTejibHbiMii oßieKTaMH npH npoH3BOHCTBe 3eMJiHHbix paßoT H<br />

HaôJHO^eHHH 3a nojiroBpeivieHHoiî ycToiteHBocTbio no3BojiHJiH pa3pa6oTaTb peKOMeHjrauHH,<br />

KacaiouuîecH HHwenepHoreojiorHiecKHx HCCJieflOBaHHti MejiOBbix nopoH H<br />

ycjiOBHñ npoH3BoacTBa paôoT B 3aBHCHM0CTH OT Ha3HaieHHH H reoMeTpHHecKHX xapaK-<br />

TepHCTHK COOpyJKeHHH.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., spécial V, oct. 1973, p. 81.<br />

HccjieflOBaHHe Bii6pojjpo6.iieHiicM ynjioTHHeMocTii lueaoBbix uopo;!<br />

R. STRUILLOU<br />

MeTOH BH6po,npo6jieHHH npHMeHeH JIJIH BbiBoaa JiaôopaTopHoro nporao3a o TpyjnrocTHx<br />

ynjioTHeHHH MejiOBbix (bopMauHii B ycJioBHHX cTpoHTejiKHbix nnomaaoK. 06pa3Ubi,<br />

HpoÔJieHHbie B cyxoM COCTOHHHH Ha 3epHa KpyrmocTbio 5/20 MM, HCTHpaiOTCH B TeneHHH<br />

30 ceK. npH pa3JiHqHbix coflepHîaHHHx BOHH. HaojiionaeTCH, HTO B öojibuiHHCTBe MejiOBbix<br />

nopoH KOJiHiecTBO o6pa30BaHHbix 3JieMeHTOB Mejibne 1,25 MM jiHHeüHO H3MeHHeTCH<br />

B 33BHCHM0CTH OT COJiep?KaHH BOflbI.<br />

CnenoBaTejibHo, Kawji;aH MejioBan nopona MOHteT SbiTb xapaKTepH30BaHa jinHueft<br />

H3Hoca, yKa3HBaioiueH Ha ee MyBCTBHTejibHocTb K rhparMeHTaiiHH.<br />

KpoMe Toro, Menrae rhpaKUHH «aHHoro Mena xapaKTepH3yioTCH npenejioM TeKyqecTH<br />

« COL » nponyKTOB Mejibie 400 MHKPOH, o6pa30BaHHbix BHSpoflpoßjieHHeM B BOflHoii<br />

cpene npH nocTOHHHbix ycjiOBHH3x, c TeM MTO6H yqecTb nyBCTBHTejibHOCTb npejieJiOB<br />

Arrepôepra MHorax nopojr Mejia K ycjioBHjiM npoiiecca.<br />

CoBMecTHoe onpe^ejieHHe H3Hoca, co^epHîaHHH ecTecTBeHHoñ BJiaHorocTH wn' coRep-<br />

HiaHHH nOraOlUeHHOIi BOHH MCJIKHMH fjpaKUHHMH BH6pOJI,po6jleHHH CUL H 3MnHpHHeCKHX<br />

K03(J)$HHHeHTOB, npHHHTbix jsjisi y^CTa pa3JiHHHbix ycjioBHH cTpoHTejibHOH nJiomaHKH,<br />

no3BojiHeT onpe^enHTb coaep?KaHHe BOUM W C<br />

, 3a npenejiaMH KOToporo MoryT B03HHKHyTb<br />

KpynHbie 3aTpyjnreHHH B nponecce ynjioTHeHHH.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., spécial V, oct. 1973, p. 99.


MejiOBbie ocHOBaHHH<br />

F. BAGUELIN<br />

IlepeTOCJiHB TpyHOCTH, BCTpeiaeMbie npn OTOope MCJIOBHX o6pa3UOB, npnronHbix<br />

HJIH jiaSopaTopHbix HCCJienoaHHii, noniepimyB pa36pocaHHOCTb 3HaneHHH cooTBeT-<br />

CTByiouiHx npoiHOCTHbix xapaKTepacTHK, aBTop BbiHBJiHeT npeHMymecTBa nojieBbix<br />

H3MepeHHH, B HaCTHOCTH npeCCHOMeTpHieCKHX, HJIH OIjeHKH rJI06ajIbHOft npOHHOCTH<br />

MejIOBOH Maccbi.<br />

HarjjnoneHHH H sncnepHMeHTHpoBaHHe nonasajiH, ^TO pacieTbi, npoBOHHMbie Ha OCHO-<br />

BaHHH TaKHx HcnHTaHHH, jTaioT neccHMHCTHnecKHe pe3yjihTaTbi; STO, B nacraocTH,<br />

BepHo HJIH $opMyji HUHaMH*iecKOH 3a6HBKH cBaii, KOTopne npHMeHHioTCH HJIH pac*ieTa<br />

3a6HBHbix cBaft. B cai«OM neJie HaSjironaeTCH, HTO non neiicTBHeM ynapoB MeJi oGHapy-<br />

H?HBaeT TeHHeHiiHio nepexoHHTb B Tenynee cocTOHHHe; no oKOHnaHHio 3a6nBKH npoi-<br />

HocTb ero BoccTaHaBjiHBaeTCH HJIH 6jiaronapH pacceHBaHHio nopoBoro cBepxnaBjieHHH,<br />

HJIH Qjiaronapfl THKCOTpomioMy pecTpyKrypHpoBaHHio Mejia, KOTopoe eme njioxo H3yieH0.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., special V, oct. 1973, p. 113.<br />

IIoj^ieiMiMC MejiOBbie noJiocTH Ha ceaepe OpaHUHH<br />

J. LEPLAT<br />

B npouiJioM, una HVJKJT 3eMJieHejiHH H B OCOQCHHOCTH CTpoHTejibCTBa, Ha ceBepe


PÍ3y*ieHHi>ie MCCTHOCTH pacnojioweHw B IlapHHiCKOM ôacceftae, B innpoKOM cMMcne<br />

TepMHHa. TeojiorHMecKHe H HHjKeHepHo-reojiorHnecKHe pa3pa6oTKH 6MJIH npoBenem>i<br />

Ha MejiOBoii nopoae ceHOHCKoro npyca B upanx IIIaHneHya H Komya.<br />

reoTexHHHecKHe xapaKTepiicTHKH Mena ÖHJIH onpejrejieHbi B jiaßopaTopHbix H B nojieBbix<br />

ycjioBHHX.BtiJio H3yHeHo H npoaHajiH3iipoBaHO noBeaemie MaTepnajiaHaMecTe 3ajieraHH.<br />

YcTpOHCTBO nOH3eMHBIX COOpyjKeHHH B MejIOBOH nopoae B03M0ÎKH0, eCJIH BO BpeMH<br />

npoH3BOHcTBa pa6oT npHHiiiviaTb HeoóxonHMbie TexHOJiorimecKHe Mepbi npejiocTO-<br />

PWKHOCTH.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., spécial V, oct. 1973, p. 149.<br />

HecKOJibKD :ia vicia unii no nosojry ycToüineocTii TOIIHCJH'Ü ,<br />

HOCTpoeHHwx B MCJIOBI.IX iiopojjax<br />

M .<br />

PANET<br />

Men HenoBpejKHeHHbiil n 6e3 TpenjHH — nopoaa 6jiaronpHHTHan UJIH npoxoRKH no«3eM-<br />

Hbix coopyjKeHHö (ycToöiHBaH, cJiaooBononpoHiinaeMaH, jierKo pa3pa6aTbiBaeiviaH).<br />

Mewjiy TeM, BbiBeTpenbie H TpemwHOBaTbie yqacTKH HBJIHIOTCH npHiHHoñ 6ojibiuHx<br />

3aTpyjnaeHHít.<br />

HenoBpejKjreHHbift H HeTpemHHOBaTbiìi Men oßjiajiaeT BpeivieHHbiMH ynpyro-xpynuHMH<br />

xapaKTepHCTHKaMH; norna >Ke MoruHocTb noKpbiBawmeii TOJIIUH — ôojibinan, HaôjiioaaiOTCH<br />

HBJieHHH pa3rpy3KH OT CÎKHMaiOmHX HanpHÎKeHHH, KJiaCCHHeCKHe, HO He pe3KHe,<br />

KOTopbie jierKO ocTaHOBHTb niTaHroBbiM KpenjieHHeM.<br />

Meny npncyruH MejrjieHHbie, ßojibiiiHe nedpopiwauHH; jiaoopaTopHbie HcnbrraHHH Ha<br />

noji3yiecTb no3B0JiHioT onpejiejiHTb HJiHTeJibHyro npoHHOCTb o6pa3uoB, KOTopwe<br />

pa3pyinaK)TCH npn HanpHHieHHHX 3HaHHTejibH0 MeHbiiiHX BpeMeHHoft npoMHOCTH,<br />

H3MepHeMoft npw GwcTpoM HarpyweHHH.<br />

OÖJIHUOBKH cjieayeT pacHHTHBaTb c yneTOM BTHX peojiorHnecKHx CBOÌÌCTB Mena, BBH«y<br />

TOrO HT O HanpHÎKeHHH, BbI3BaHHbie AJIHTejIbHHMH, CXOHHrUHMHCH, o6»HMaiornHMH<br />

ne$opManHHMH, pacTyT co BpeiueHeivi.<br />

<strong>La</strong> craie, Bull. Liaison <strong>La</strong>bo. P. et Ch., spécial V, oct. 1973, p. 159.

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