EDL 407 - avril 2012.indd - Centre d'Action Laïque
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dossier<br />
De part et d’autre,<br />
je brandis ton nom,<br />
Liberté<br />
François De Smet<br />
Philosophe<br />
<strong>Centre</strong> de théorie politique - ULB<br />
<strong>Centre</strong> interdisciplinaire d’étude des religions et de la laïcité (CIERL) - ULB<br />
À qui appartient l’humanisme ? En théorie, à tout le monde.<br />
Depuis le triomphe des droits de l’homme comme axe de<br />
pensée des sociétés modernes, par leur double caractère<br />
universel et individuel, les êtres humains sont définitivement<br />
définis par une notion commune supposée les rassembler<br />
envers et contre toutes les différences. Si l’humanisme<br />
est devenu un concept fourre-tout semblant recueillir<br />
le consensus, c’est parce que la notion d’humain elle-même<br />
est le dernier concept rassembleur. Son usage permet<br />
à celui qui l’emploie de se positionner dans une figure de<br />
rassemblement car, quels que soient les particularismes<br />
différenciant les humains entre eux, il est incontestable que<br />
nous partageons tous le fait d’être des humains. Il était logique<br />
que l’humanisme, notion pourtant incarnée par des<br />
penseurs non dogmatiques comme Érasme, soit récupéré<br />
par un discours religieux ou œcuménique devant s’adapter à<br />
la modernité et à la sécularisation des institutions, permettant<br />
de réinsuffler de sens à une humanité devant compenser<br />
la perte de Dieu par une notion englobant les hommes.<br />
L’humanisme a donc subtilement glissé de sens pour compenser<br />
le caractère dogmatique de la transcendance pure<br />
souche, pour qualifier peu à peu la transcendance horizontale,<br />
celle qui rassemble autour de ce que tous les hommes<br />
et femmes partagent. C’est par ce biais que l’humanisme<br />
devient un référent de substitution au religieux utile et pertinent,<br />
à tel point que, dans le patronyme d’un célèbre parti, le<br />
mot « chrétien » a pu laisser sa place au mot « humaniste »<br />
dans aucun problème.<br />
La déclaration universelle<br />
rendue presque illisible par la<br />
suppression des espaces : objet<br />
de concorde ou de discorde ?<br />
© AFP/Eric Feferberg<br />
Ainsi, l’humanisme appartient à tout le monde, puisque<br />
chacun s’en revendique. Toutes les religions et convictions<br />
coexistent aujourd’hui, entrent en conflit, se jaugent dans un<br />
rapport de force permanent… mais aucune ne vient plus sérieusement<br />
défendre l’idée qu’il y aurait des hommes « humains<br />
» et d’autres non. La prépondérance de l’homme est<br />
une donnée de base, elle n’est plus remise en cause. Même<br />
les confessions présentant l’homme comme une création<br />
de Dieu invitent à préserver celui-ci comme valeur cardi-<br />
8 | Espace de Libertés <strong>407</strong> | <strong>avril</strong> 2012