la revendication particuliere de la reserve des quarante arpents

LA REVENDICATION PARTICULIERE DE LA RESERVE DES
QUARANTE ARPENTS: UN BREF HISTORIQUE
prepare par Simon Picard I
Le present document se veut un expose sommaire de l'historique de la revendication
particulillre de la reserve des Quarante Arpents. II est divise en trois parties.
Premierement, une description de la situation actuelle de la Nation huronne-wendat est
presentee. Par la suite, l'auteur decrit les faits marquants de la cession et de la vente des
Quarante Arpents qui ont donne lieu au depot de la revendication particuliere proprement
dite. Finalement, il expose les etapes qui ont suivi Ie depot de cette revendication jusqu'a
son reglement.
1. La situation actuelle de la Nation huronne-wendat
La Nation huronne-wendat est constituee de deux milles neuf cent trente-cinq (2935)
membres, dont mille deux cent soixante-cinq (1265) vivent dans la communaute de
Wendake. Cette reserve est situee a une vingtaine de kilometres (12 milles) du centre
ville de Quebec. Le territoire de cette petite reserve est d'approximativement 2 km 2 (1,2
millescarres). Environs mille six cent soixante dix (1670) membres de laNation vivent a
l'exterieur de la reserve, dont plus de la moitie d'entre eux habitent la region immediate
de Quebec.
En raison de la tres petite superficie du territoire de la communaute, les revendications
territoriales constituent un enjeu majeur pour l'avenir de la Nation huronne-wendat
I Avocat (L.L.M.). Simon Picard travaille pour Ie Conseil de la Nation huronne-wc:.ndat. Cependant, Ie
present document ne represente pas I'opinion ou la position officielle du Conseil de la Nation huronnewendat
mais celles de I'auteur. Ce document a ere prepare II partir de I'historique elabore par Gerard L.
Fortin en vue du depot de la revendication territoriale de la Reserve des Quarante Arpents et de divers
documents contenus aux archives de la Nation huronne-wendat

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compte tenu des besoins residentiels de ses membres et du developpement economique
bien souvent ralenti fuute d'un espace fancier suffisant.
Afin de fuire face a cette problematique et desirant obtenir reparation pour les injustices
commises a son egard, la Nation huronne-wendat a depose il y a plus de 4 ans la
revendication particuliere de la reserve de Rockmont 2 • Le dossier est toujours SOLIS etude
au ministere de la Justice du Canada. Le Conseil est aussi engage dans un processus de
recherche conjoint avec Ie ministere des Affaires indiennes en vue de deposer une
revendication particuliere de la Seigneurie de Sillery.
Le Conseil de la Nation huronne-wendat fut stimule dans ses efforts en ce qui a trait allx
revendications territoriales par Ie reglement de la revendication de la reserve des
Quarante Arpents au debut de I'an 2000. Voici donc un resume des faits marqllants ayant
donne ouverture a cette revendication.
2. La Reserve des Quarante Aments: De sa concession it la vente.
•
En 1650, les Hurons-Wendat se deplacerent de la Baie Georgienne vers Quebec. Puis, en
1651, Ie Roi de France concedait aux Sauvages neophytes chretiens domicilies de la
region de Quebec, dont faisait partie les Hurons-Wendat, la Seigneurie de Sillery. Les
Hurons-Wendat se deplacerent a quelques reprises dans la region de Quebec pour
finalement s'etablir, en 1697, au meme endroit OU est aujourd'hui situee la reserve de
Wendake.
Un aete notarie datant de 1742 confirma une concession de vive voix faite aux Hurons­
Wendat d'une terre de quarante arpents carres (ci-apres les Quarante Arpents). Ce
document sera egalement confirrne par un autre acte notarie en 1794 ayant
principalement pour but de fixer des conditions plus lourdes pour les Hurons-Wendat eut
egard aces terres, dont Ie versement de cens et rentes.
2 Est aussi souvent Ilcrit comme suit : Rocmont OU Roquemont.

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Les Quarante Arpents servirent essentiellement comme terre a bois et ades fins agricoles
et jusque vers les annees 1860, ou quelques familIes des Hurons-Wendat vinrent s'y
.etablir. Des membres de la Nation occupaient encore ces terres peu avant la vente par Ie
Departement des Affaires indiennes (ci-apres DAI) en 1904 et durent quitter cette
reserve.
Les evenements historiques qui menerent acette vente trouvent leur origine en 1888. En
effet, Ie 10 mars de cette annee, quatre cent trente-huit (438) habitants de la municipalite
de St-Ambroise de la Jeune Lorette, voisine de Wendake, adresserent une requete au
Surintendant des Sauvages pour que soit vendu les Quarante Arpents, pretextant l'inutilite
de cette terre pour les Hurons-Wendat et Ie besoin d'espace pour les gens de cette
municipalite afin que les jeunes puissent s'y etablir. Des Hurons-Wendat s'opposerent a
cette demande aupres du DAI et ce dernier signifia son refus aux habitants de la
municipalite.
A cette epoque, divers evenements entrainerent. une modification dans Ie monde de vie
des Hurons-Wendat: I'agriculture sur les Quarante Arpents devenait plus difficile vue la
construction d'un chemin de fer et, plus tard, la chasse deviendra presque impossible
suite ala creation d'un parc national en 1895. De plus, Ie commerce des mocassins et des
raquettes fonctionnait au ralenti. Les membres de la Nation envisagerent donc des 1892 la
possibilite de louer cette reserve et tine demande fut faite au DAI en ce sens. Cependant
les tractations politiques de Charles Fitzpatrick, qui deviendra depute, solliciteur general
puis ministre de la Justice du Canada, empecheront la realisation de ce projet au profit
d'une cession absolue.
De 1893 a 1895, les pressions des habitants des municipalites avoisinantes etaient telles
que les Hurons-Wendat durent demander I'intervention du DAI craignant d'etre
depossede de leur terre.

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En 1897, la situation economique des Hurons-Wendat continuant de se deteriorer, Ie
secretaire du DAI considera la possibilite de vendre les Quarante Arpents
vraisemblablement sous I'influence de Charles Fitzpatrick. L'agent du DAI, Antoine O.
Bastien, endossa egalement cette idee et on constatera plus tard qu'il etait lui aussi
influence par Fitzpatrick.
Le 30 octobre 1897, craignant que la vente puisse survenir rapidement suite a une
proposition de vente du DAI aux Hurons-Wendats, Fitzpatrick intervint aupres du
surintendant general des Affaires indiennes pour qu'il retarde la vente al'ete 1898, et ce,
afin qu'il puisse se servir de la vente des Quarante Arpents pour mousser sa campagne
electorale. D'ailleurs, I'agent Bastien attendra etrangement pres d'un an avant de
repondre ala lettre du secretaire du DAI datant de 1897 lui demandant de I'informer de la
decision des membres de la bande ala proposition de vente effectuee par Ie DAI..
A I'autornne 1898, I'agent Bastien souhaite que la vente s'effectue rapidement etant
donne ses difficultes financieres (esperant sans doute un benefice de Fitzpatrick s'j)
favorisait la vente) et j) laisse alors croire au D~ que les Htirons-Wendat sont en faveur
de la vente. n demandera au printemps 1899 des instructions afin de proceder ala vente.
Un fonctionnaire du DAI I'informera alors que cette question a ete mise en suspend car
ce n'est que vers 1902 que Fitzpatrick donnera son plein aval ala vente.
Lorsque les formulaires necessaires a la cession parviennent via un autre employe du
DAI a la reserve a la demande de I'agent Bastien, les Hurons-Wendat s'opposerent a
cette cession croyant y avoir un titre perpetuel et souhaitant voir la reserve de Rockmone
etre vendue avant d'envisager de se departir des Quarante Arpents.
En 1901, Fitzpatrick fait proceder a I'arpentage de la reserve des Quarante Arpents afin
qu'elle soit divisee en lot pour la vente. Le ministre responsable des Affaires indiennes,
Clifford Sifton, rival historique de son collegue Fitzpatrick, fait interrompre I'arpentage
de ces terres puisque I'autorisation des Affaires indiennes n'avait pas ete octroyee.
3 La reserve de Rockmont filt concede aux Hurons-Wenda! 1853.

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Le 18 decembre 1902, une offie de sept milles dollars ($7000) fut faite par des financiers
de New York pour acheter Rockmont et, Ie lendemain, Ie Conseil autorisa la vente par
resolution. Le DAI refusa de vendre Rockmont puisqu'un individu, Kennedy, y detenait
des droits de coupe. Kennedy plus tard renoncera ases droits de coupe en recevant une
indemnite de cinq cents dollars ($5000) de la part de Fitzpatrick.
Le 27 decembre 1902, Fitzpatrick convoque quatre (4) Chefs ason bureau de Quebec et
discute avec eux des conditions selon lesquelles pourraient se faire la vente des Quarante
Arpents.
Le 3 janvier 1903, Maurice Bastien, sous-chef huron-wendat, ecrit une lettre personnelle
aFitzpatrick pour lui expliquer que la vente de Rockmont est preferable parce que cette
reserve rapporte rien parce qu'elle est loin et impropre ala culture alors que les Quarante
Arpents ne peuvent que prendre de la valeur une fois reboisee.
Le 24 janvier 1903, Ie rninistre Sifton respon~able des Affaires indiennes, expose les
exigences du DAI selon lesquelles la vente de Rockmont pourra etre effectue ce qui
genera egalement les manreuvres de Fitzpatrick.
Alors que les electeurs de la paroisse de St-Ambroise pressent Fitzpatrick de voir a la
vente des Quarante Arpents, les Chefs hurons-wendat lui demandent d'intervenir afin que
la vente de Rockmont puisse proceder rapidement.
La vente de Rockmont devenant imminente et ne reussissant pas a forcer la vente de
Quarante Arpents sans la vente prealable de Rockmont, Fitzpatrick comprend qu'ilse
doit de favoriser aussi la vente de Rockmont au moment opportun.
La cession de la reserve de Rockmont etant approuvee par la bande Ie 6 aoiit 1903,
Fitzpatrick intervint au pret du Surintendant adjoint des Affaires indiennes afin que la
vente de Rockmont soit retardee. Le Surintendant adjoint enverra par la suite une lettre a

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I'agent Bastien, lui demandant de convoquer une assemblee afin d'approuver la cession
des Quarante Arpents.
L'agent Bastien recommande de retarder cette assemblee afin de s'assurer d'avoir un
moment favorable pour obtenir une majorite de votes des membres de la bande en faveur
de la cession, puisque II ce moment des gens favorables II la vente ne sont pas presents II
Wendake. n recommande de convoquer une assemblee II la mi-octobre puisque plusieurs
Hurons-Wendat opposes II la vente seront II la chasse.
Une resolution est adoptee II une reunion du Conseil, autorisant la signature des actes de
cession de Quarante Arpents, laquelle resolution est enterinee par quarante-deux (42)
membres de la bande, sous la condition que Rockmont soit vendu II Maurice Bastien, un
des chefs du Conseil au prix de sept milles cinq cents dollars ($7500).
. Plus tard Maurice Bastien informe Ie secretaire de Fitzpatrick qu'il est pret II payer dix
milles ($10 000) pour acheter Rockmont II condition que milles dollars ($1000) lui soit
remis afin qu'i1 distribue cinq cent ($500) aux Hurons-Wendat et ($500) II ceux qui se
sont occupes de la vente (soit notarnment Maurice Bastien et son fils, I'agent Antoine O.
Bastien).
Le ministre resposables des affaires indiennes Clifford Sifton refusait de vendre
Rockmont directement II Maurice Bastien.
Ains~
Ie 25 fevrier 1904, Fitzpatrick informe son secretaire que la vente de Rockmont
sera effectue par enchere publique puisque plusieurs personnes sont interessees. II se dit
prilt II garantir que les ventes des deux reserves se feront pour seize milles dollars ($ 16
000) soit dix miI1es dollars ($ 10 000) pour Quarante Arpents et six milles dollars ($
6000) pour Rockmont. De plus, il s'engage personnellement II versee la difference si ces
sommes ne sont pas realisees lors des deux ventes et II verser mille dollars ($1000) II
Maurice Bastien tel que ce dernier I'exigeait.

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Le 14 mars 1904, Fitzpatrick est informe par son secretaire que les resolutions de
cessions seront adoptees. En effet, une resolution de cession des Quarante Arpents fut
approuvee Ie soir meme par vingt-huit (28) membres de la bande.
Telle que Ie stipulait la resolution, Maurice Bastien conserva les documents de cessions
de Quarante Arpents signes Ie 17 mars 1904 en attendant la vente de Rockmont. La vente
aux encheres de Rockmont eut lieu Ie 3 aout 1904 pour la somme de sept miHes cinq cent
un dollars ($7501). Voyant cela, Maurice Bastien refusa de transmettre les documents de
cession puisque Ie produit de la vente promise par Fitzpatrick etait de dix milles dollars
($10 000) et Ie Conseil refusa aussi de reconnaitre la vente.
Une autre resolution fut finalement adoptee pour reconnaitre la vente aux prix de sept
milles cinq cent un dollars ($ 7501), etant donnee que mille deux cents dollars ($ 1200)
fut verse aMaurice Bastien, et ce, pour Ie plus grand avantage de la bande !
Les documents de cession transmis, la vente enchere des Quarante Arpents fut etfectuee
Ie 12 octobre 1904 et Fitzpatrick fut reelu Ie 4 noyembre de la meme annee.
Presque 80 ans se sont ecoules avant que la Nation huronne-wendat entreprenne des
demarches formelles en vue d'obtenir reparation.
3. Le processus de revendication et son reglement
Le 14 aout 1983, Ie Conseil de la Nation huronne-wendat s'inscrit a I'interieur de la
politique de revendication particuliere et obtient du financement Ie 9 janvier 1984. Une
expertise est preparee pour Ie Conseil et deposee au ministere des Affaires iridiennes.
Le 16 avril 1986, Ie gouvemement rejette de fayon preIiminaire la revendication des
Quarante Arpents.

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Les autorites du Conseil de 1a Nation huronne-wendat demande alors deux opinions
juridiques quant a la responsabilite du gouvemement federal relativement a la vente des
Quarante Arpents. Ces opinions juridiques seront transrnises Ie 23 juillet 1986
directement au rninistere de la Justice pour leur analyse.
Diverses correspondances ont ete echangees par la suite afin de presser Ie rninistere des
Affaires indiennes de fournir une opinion quant aI'acceptation de la revendication.
Le 11 avril 1990, Ie rninistere des Affaires indiennes acceptait la revendication,
reconnaissant I'invalidite de la cession puisque seulement vingt-huit (28) membres de la
bande avaient ratifie la cession alars que quatre-vingt-trois (83) membres etaient eligibles
a voter. Aussi i! fut reconnu qu'i! y eut des manquements a I'obligation de fiduciaire du
gouvernement federallors du processus entourant la cession.
Le 29 mai 1991, du financement est verse ala Nation afin de proceder aI'evaluation de la
valeur des Quarante Arpents.
A partir de cette date, des negociations seront entreprises afin de determiner Ie l110ntant
de compensation aetre verse. Insatisfait de I'evaluation fait par Ie rninistere des Affaires
indiennes, Ie Consei! embauche Ie 10 aout 1992 une firme d'experts en evaluation qui
conc1ura aune valeur presque 10 fois plus elevee que ceUe d6terrninee par Ie rninistere.
En mai 1993, un cornite compose de membres de la communaute est forme afin de
discuter de la negociation du montant de la compensation.
En 1996, suite une deuxieme evaluation fuite par Ie ministere et a des negociations, ce
dernier offrira douze (12) millions en compensation.
Plusieurs efforts· ont ete deployes par Ie Conseil afin d'obtenir une compensation se
rapprochant d'avantage de I'evaluation qu'i! avait fait produire mais ces efforts furent
vains.

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Elu en aout 1998, Ie Conseil dirige par Ie Grand ChefWellie Picard, apres avoir constater
qu'il serait impossible d'obtenir une compensation plus elevee, decida de presenter aux
membres de la Nation I'offre du rninistere des Affaires indiennes.
Ainsi, Ie Conseil ayant negocie une entente de reglement et, suite Ii des seances publiques
d'informations et Ii une distribution de documents d'informations sur I'entente de
reglement Ii tous les membres de la Nation, un referendum fut tenu Ie 28 janvier 2000
afin d'approuver I'entente de reglement. L'entente de reglement et la cession definitive
des Quarante Arpents fut approuvee dans une proportion de 84%.