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2008, Volume 14, N°2 - Centre d'études et de recherches ...

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Book reviews – Comptes rendus – Buchbesprechungen 165<br />

première ligne). On assiste aux débuts d’une mémoire «daytonienne», totalement<br />

artificielle, mais pas <strong>de</strong> la guerre elle-même. Dans l’ensemble, c’est la volonté <strong>de</strong><br />

silence qui continue à primer.<br />

L’ouvrage se termine par une série d’étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong>s politiques publiques<br />

mémorielles en Europe.<br />

Laure Neumayer s’intéresse au rôle que les institutions européennes jouent en<br />

Europe centrale, où les conflits <strong>de</strong> mémoire ne manquent pas: «loi du statut» en<br />

Hongrie en 2001, décr<strong>et</strong>s Beneš entre la République tchèque <strong>et</strong> l’Allemagne, <strong>et</strong>c.<br />

Dans tous ces cas, c’est surtout le registre juridique qui est mis en avant, plutôt que<br />

la dimension historique. Les institutions européennes appellent au dialogue, se<br />

servent <strong>de</strong> l’acquis communautaire (exemple <strong>de</strong> la non-discrimination pour les<br />

Hongrois) <strong>et</strong> <strong>de</strong> la conditionnalité pour favoriser le compromis, si ce n’est la<br />

réconciliation. Ainsi, le «bon voisinage» <strong>de</strong>vient un critère <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te «politique<br />

d’apaisement», avec un eff<strong>et</strong> qu’il reste à juger sur un plus long terme.<br />

Gilles Bertrand étudie le conflit chypriote <strong>et</strong> ses conséquences. Dans ce pays<br />

«partagé», 37% du territoire est occupé par les Turcs. Pourtant, toute l’île est<br />

officiellement membre <strong>de</strong> l’UE, mais la zone turque ne reçoit pas d’ai<strong>de</strong>, <strong>et</strong> le turc<br />

n’est pas langue officielle. Une réconciliation est-elle possible, perm<strong>et</strong>tant plus <strong>de</strong><br />

cohérence? Du côté grec, l’auteur évoque une amnésie collective qui a un but<br />

politique précis: le plan Annan, le 24 avril 2004, a été rej<strong>et</strong>é essentiellement par les<br />

Grecs, ce qui empêche l’objectif <strong>de</strong> réunification, alors que l’île est entrée dans<br />

l’UE la semaine suivante. Depuis, le blocage par les Grecs continue, ce qui pourrait<br />

pousser <strong>de</strong> nouveau la communauté turque vers un discours souverainiste.<br />

Valérie Rosoux abor<strong>de</strong> la question <strong>de</strong> la mémoire(s) européenne(s), qui<br />

représente plus un proj<strong>et</strong> politique qu’une réalité sociologique. On peut parler <strong>de</strong><br />

cohabitation <strong>de</strong> mémoires nationales. Or, seuls le souvenir <strong>et</strong> l’enseignement<br />

peuvent créer un peuple européen, la violence n’étant plus à l’ordre du jour. De fait,<br />

il y a une volonté politique <strong>de</strong> moralisation <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s institutions européennes,<br />

aussi bien à usage interne qu’externe. Le résultat donne une lecture aseptisée du<br />

passé, <strong>et</strong> la mise en place d’un récit consensuel qui ne peut être que remis en cause<br />

au fur <strong>et</strong> à mesure <strong>de</strong> l’élargissement.<br />

Sandrine Lefranc s’interroge enfin sur les politiques <strong>de</strong> «réconciliation»,<br />

modèle <strong>de</strong> gestion <strong>de</strong> la sortie d’un conflit. Il s’agit d’assurer une paix durable en<br />

reconnaissant <strong>de</strong>s victimes <strong>et</strong> <strong>de</strong>s réparations. Les exemples latino-américains sont<br />

en partie insatisfaisants: ils montrent une vérité historique accélérée pour les<br />

besoins politiques <strong>de</strong> la réconciliation, aboutissant à <strong>de</strong>s «bricolages» renvoyant<br />

tout le mon<strong>de</strong> dos à dos. Ce modèle s’est répété ensuite (Afrique du Sud, Pérou),<br />

mais c<strong>et</strong>te fois avec une volonté <strong>de</strong> démocratisation plus forte, l’opinion étant<br />

invitée aux débats, tournant autour du rôle <strong>de</strong>s organisations internationales <strong>et</strong> <strong>de</strong> la<br />

question <strong>de</strong> l’intégration du processus au droit pénal international. Le modèle est-il<br />

perfectible, <strong>et</strong> peut-il avoir un rôle dans la gestion <strong>de</strong>s mémoires douloureuses en<br />

Europe, dont le livre nous montre qu’elles sont bien vivaces? La réponse est<br />

partagée. L’exercice est par définition un peu contraint, <strong>et</strong> maladroit dans sa<br />

démarche: l’UE cherche avant tout à faire passer une «grammaire <strong>de</strong>

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