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2008, Volume 14, N°2 - Centre d'études et de recherches ...

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Book reviews – Comptes rendus – Buchbesprechungen 161<br />

Book reviews – Comptes rendus – Buchbesprechungen<br />

Georges MINK, Laure NEUMAYER (dir.), L’Europe <strong>et</strong> ses passés douloureux,<br />

La Découverte, coll. «Recherches», Paris, 2007, 268 p. – ISBN 978-2-7071-5197-1<br />

– 30,00 €.<br />

C<strong>et</strong> ouvrage tente, en multipliant les angles d’approche originaux, <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre à jour<br />

les «gisements mémoriels» autres que nationaux, ainsi que les politiques publiques<br />

<strong>et</strong> <strong>de</strong> réconciliation au niveau européen. Il est le résultat <strong>de</strong> trois colloques<br />

internationaux organisés entre 2003 <strong>et</strong> 2006, <strong>et</strong> rassemblant <strong>de</strong>s chercheurs <strong>de</strong><br />

différents horizons.<br />

Le livre part d’un principe simple <strong>et</strong> direct (Georges Mink): il faut cesser <strong>de</strong><br />

penser que l’Europe n’est que l’anti-nazisme. Dans c<strong>et</strong>te optique, l’histoire est trop<br />

souvent considérée comme gênante: la construction européenne elle-même est<br />

tournée vers le présent <strong>et</strong> le futur, <strong>et</strong> axée sur le droit. L’Est nous donne c<strong>et</strong>te<br />

chance <strong>de</strong> réfléchir sur notre passé (comme le dit Maria Janion: «Oui à l’Europe,<br />

mais nous y rentrerons avec nos morts»). Ce passé bouillonne, <strong>et</strong> réclame, pour être<br />

appréhendé <strong>de</strong> la manière la plus juste, <strong>de</strong>s comités d’historiens ainsi que <strong>de</strong>s<br />

confrontations dans les arènes internationales, <strong>et</strong> peut-être <strong>de</strong>s musées. Il s’agit<br />

d’éviter un consensus mou dans lequel personne ne se reconnaîtrait, axé sur le<br />

«réconciliationnisme» entre les peuples. L’historicisation <strong>de</strong>vient nécessaire, à<br />

condition <strong>de</strong> respecter les règles scientifiques <strong>de</strong> base. Or, une nouvelle génération<br />

s’impose, surtout à l’Est, elle-même désireuse <strong>de</strong> s’expliquer avec un passé qu’elle<br />

connaît mal <strong>et</strong> qu’elle orchestre en fonction <strong>de</strong>s polémiques du présent, multipliant<br />

les risques <strong>de</strong> décontextualisation. Il s’agit ni plus ni moins d’une mémoire réactive<br />

dans laquelle s’engouffrent certains historiens militants. Dans ce cadre, l’Est<br />

surexploite le thème <strong>de</strong> la «trahison <strong>de</strong> Yalta», où «l’histoire [est] une sorte<br />

d’addition» agitée sous le nez <strong>de</strong> Bruxelles. Il est temps <strong>de</strong> réfléchir sereinement à<br />

ces problèmes que n’arrêtent pas les frontières, <strong>et</strong> qui agitent pourtant nos<br />

mémoires nationales.<br />

La gestion mémorielle est soumise aux variations <strong>de</strong> l’actualité <strong>et</strong> aux failles <strong>de</strong><br />

l’histoire. C’est ce que nous rappelle Benjamin Stora à propos du débat<br />

franco-algérien, qui ouvre les étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> cas. Ce <strong>de</strong>rnier souligne une résurgence<br />

actuelle <strong>de</strong>s polémiques («présence positive» dans l’outre-mer, monument à l’OAS,<br />

image <strong>de</strong>s harkis). Ce ne sont pas <strong>de</strong>s nouveautés: la mémoire <strong>de</strong> la guerre<br />

d’indépendance sert toujours <strong>de</strong> rente aux <strong>de</strong>ux pays. Quelle image donner <strong>de</strong> ce<br />

passé? L’auteur s’attar<strong>de</strong> sur un documentaire passé sur la chaîne française M6, le<br />

16 mai 2006, «Quand l’Algérie était française», dans lequel il perçoit une forme <strong>de</strong><br />

nostalgie qui n’a rien à voir avec l’histoire. Il estime même que la colorisation <strong>de</strong>s<br />

archives, utilisée dans ce reportage, s’apparente à une déformation, rendant compte<br />

d’un «bonheur pied-noir» qui n’est qu’un aspect <strong>de</strong> la vérité. D’après Stora, c<strong>et</strong>te<br />

tentative peut être rapprochée <strong>de</strong> ces manuels scolaires algériens qui montrent la<br />

colonisation sous le seul angle <strong>de</strong> la répression, avec <strong>de</strong>s tendances unanimistes qui<br />

montrent bien l’orchestration <strong>de</strong> la mémoire <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’histoire.

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