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ONANA, François-Xavier Université de douala, ENSET, Canada ...

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UN ESSAI D'ANALYSE THÉORIQUE DES MOTIVATIONS DES FEMMES À<br />

ENTRER EN AFFAIRES AU CAMEROUN<br />

<strong>ONANA</strong>, François-<strong>Xavier</strong><br />

Université <strong>de</strong> <strong>douala</strong>, <strong>ENSET</strong>, <strong>Canada</strong><br />

onanafx@yahoo.fr<br />

7ème Congrès <strong>de</strong> l’Académie <strong>de</strong> L’Entrepreneuriat et <strong>de</strong> l’Innovation<br />

Paris, 12-15 octobre 2011


UN ESSAI D'ANALYSE THÉORIQUE DES MOTIVATIONS DES FEMMES À<br />

ENTRER EN AFFAIRES AU CAMEROUN<br />

Résumé<br />

Les motivations à entrer en affaires sont généralement étudiées sous le prisme d’un<br />

modèle générique : le modèle push et pull. A partir d’une enquête quantitative et <strong>de</strong>s<br />

observations empiriques menées au Cameroun, cet article essaie <strong>de</strong> montrer que dans<br />

l’ensemble, les motivations <strong>de</strong> nécessité et <strong>de</strong> volonté que recouvre le modèle push/pull sont<br />

essentiellement tirées par la recherche <strong>de</strong> l’autonomie. Un détour par la psychologie sociale<br />

révèle l’importance du contexte et la diversité qu’il introduit dans les motivations <strong>de</strong>s femmes<br />

à entrer en affaires, notamment par le système d’apprentissage social, les valeurs du groupe<br />

social, les normes et les lois. Ainsi, l’analyse <strong>de</strong>s motivations entrepreneuriales selon la<br />

double approche empiriste et situationnelle nous prête à avancer que si la femme occi<strong>de</strong>ntale,<br />

influencée par <strong>de</strong>s règles <strong>de</strong> compétition essentiellement individualistes, entre en affaires pour<br />

accé<strong>de</strong>r à une autonomie <strong>de</strong> soi, sa consœur du Sud, et singulièrement la femme entrepreneur<br />

au Cameroun entre en affaires pour permettre à son groupe d’appartenance (famille, clan,<br />

ethnie…), d’accé<strong>de</strong>r à une autonomie économique et sociale. Les contraintes financières et<br />

techniques expliquent la prééminence <strong>de</strong> l’entrée <strong>de</strong>s femmes en affaires par le secteur<br />

informel.<br />

Mots clés : motivations – secteur informel – secteur formel – femmes entrepreneurs –<br />

Cameroun


D’une manière générale, l’intérêt <strong>de</strong>s chercheurs pour les problématiques associées à<br />

l’entrepreneuriat féminin est globalement récent. En effet, les premiers travaux <strong>de</strong> recherche<br />

focalisés entièrement ou intégrant partiellement les femmes entrepreneurs datent <strong>de</strong> la fin <strong>de</strong>s<br />

années 1970 (Brush, 1992 ; Barret, 1994 ; Richier et St-Cyr, 2007). L’importance <strong>de</strong>s travaux<br />

ainsi développés fait <strong>de</strong> l’entrepreneuriat féminin un sujet <strong>de</strong> recherche intéressant qui le situe<br />

aujourd’hui au rang <strong>de</strong>s spécialités singulières relevant du champ <strong>de</strong> l’entrepreneuriat (Filion,<br />

1997). Mais, il convient <strong>de</strong> souligner que cette popularité <strong>de</strong> l’entrepreneuriat féminin comme<br />

objet <strong>de</strong> recherche est restée limitée dans l’espace par rapport au contexte <strong>de</strong> réalisation <strong>de</strong>s<br />

travaux et à l’origine <strong>de</strong>s auteurs. En fait, la plupart <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong> recherche effectués sur le<br />

sujet proviennent <strong>de</strong>s Etats-Unis et du <strong>Canada</strong> (Stevenson, 1990 ; Lerner, Brush et Hisrich,<br />

1997) et très récemment, et quoique dans une proportion moindre, <strong>de</strong> la France (Ducheneaut<br />

et Orhan, 2000). En l’état actuel <strong>de</strong> nos connaissances, force est <strong>de</strong> reconnaître que les<br />

chercheurs du mon<strong>de</strong> francophone se sont très peu penchés sur les problématiques associées à<br />

l’entrepreneuriat féminin (Cadieux, Lorrain et Hugon, 2002).<br />

Pourtant la montée en puissance <strong>de</strong> l’entrée <strong>de</strong>s femmes en affaires dans les pays en<br />

développement au cours <strong>de</strong> ces vingt <strong>de</strong>rnières années est clairement constatée (Chea, 2008 ;<br />

Pillania, Lall et Sahai ; 2010), consacrant ainsi le caractère universel <strong>de</strong> cette percée <strong>de</strong>s<br />

femmes dans un mon<strong>de</strong> socialement construit au masculin (Duchéneaut et Orhan, 2000).<br />

Aujourd’hui, le nombre sans cesse croissant d’entreprises créées par les femmes en Afrique<br />

en général, et singulièrement au Cameroun, appelle à expliquer si non pourquoi certaines<br />

femmes sont disposées à créer plus que les autres, du moins à analyser les facteurs qui<br />

expliquent pourquoi les femmes déci<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> se mettre à leur propre compte par la création<br />

d’entreprises.<br />

Une synthèse <strong>de</strong>s travaux effectués sur l’entrepreneuriat féminin au cours <strong>de</strong>s vingt cinq<br />

<strong>de</strong>rnières années a récemment été réalisée (Carrier, Julien et Menvielle, 2006). De ce bilan <strong>de</strong><br />

recherche, les motivations font partie <strong>de</strong>s sept thèmes <strong>de</strong> recherche ayant alimenté les<br />

réflexions <strong>de</strong>s auteurs. Selon les pays, leur ordre d’importance varie quelque peu. Dans le<br />

contexte <strong>de</strong> la France par exemple, les femmes entrent en affaires globalement parce qu’elles<br />

recherchent l’ « autonomie et la flexibilité », la « réalisation personnelle », la « possibilité <strong>de</strong><br />

faire <strong>de</strong>s bénéfices », la « possibilité <strong>de</strong> <strong>de</strong>venir son propre patron » (Ducheneaut et Orhan,<br />

2000). Viennent ensuite la « reconnaissance extérieure », la « saisie d’une opportunité » et<br />

l’ « influence <strong>de</strong> la famille ». Hughes (2006) observe que dans <strong>de</strong>s recherches similaires<br />

effectuées dans les contextes canadien, britannique et américain, les motivations d’autonomie<br />

sont prédominantes (citées par 67 % <strong>de</strong>s femmes entrepreneurs) ; elles sont suivies du besoin<br />

d’exploiter une opportunité financière i<strong>de</strong>ntifiée (39 %). « Relever un défi » constitue la<br />

troisième motivation <strong>de</strong>s femmes à entrer en affaires (28 %). Même si les auteurs <strong>de</strong> la<br />

synthèse évoquée ci-<strong>de</strong>ssus laissent glisser habilement que « ces thèmes ne sont pas restrictifs<br />

et que leur importance relative n’est pas toujours du même ordre », un constat se dégage<br />

cependant. En effet, comme bien d’autres travaux <strong>de</strong> recherche consacrés à l’entrepreneuriat<br />

féminin ont eu à le souligner (Hayes et Robinson, 2010), cette synthèse renseigne peu sur les<br />

réalités du sujet dans le contexte africain. Nonobstant une contribution certaine au recul <strong>de</strong> la<br />

pauvreté et <strong>de</strong>s inégalités par la création d’emplois et d’autres richesses, l’entrepreneuriat<br />

féminin en Afrique reste globalement l’objet d’étu<strong>de</strong>s partielles et parcellaires. A titre


d’illustration au Cameroun où le taux d’activité entrepreneuriale <strong>de</strong>s femmes est compté<br />

parmi les plus élevés en Afrique au Sud du Sahara (Rajemison, 1995), les pouvoirs publics,<br />

les chercheurs et d’autres partenaires au développement se sont rarement interrogés sur les<br />

motivations <strong>de</strong>s femmes à entrer en affaires et encore moins à ce qui les détermine. Bien plus,<br />

l’importance du secteur informel en Afrique et la forte présence constatée <strong>de</strong> femmes<br />

entrepreneurs en son sein, nous amènent aussi à nous interroger sur les déterminants du choix<br />

<strong>de</strong>s femmes entrepreneurs à entrer en affaires davantage par le secteur informel.<br />

Partant <strong>de</strong>s données issues d’une enquête effectuée auprès <strong>de</strong> 117 femmes entrepreneurs,<br />

l’objet <strong>de</strong> cette communication est <strong>de</strong> caractériser les déterminants <strong>de</strong>s motivations <strong>de</strong>s<br />

femmes à entrer en affaires au Cameroun d’une part, et d’autre part, s’il y a lieu, les facteurs<br />

explicatifs <strong>de</strong> la forte présence <strong>de</strong>s femmes entrepreneurs dans le secteur informel.<br />

Ainsi, après une tentative d’explication <strong>de</strong>s fon<strong>de</strong>ments théoriques et conceptuels <strong>de</strong>s<br />

motivations entrepreneuriales <strong>de</strong>s femmes, la démarche méthodologique retenue pour<br />

conduire cette recherche sera présentée. Puis suivra une caractérisation <strong>de</strong>s motivations <strong>de</strong>s<br />

femmes à entrer en affaires au Cameroun. La communication se terminera par une discussion<br />

sur les déterminants <strong>de</strong> ces motivations ainsi que sur les fon<strong>de</strong>ments du choix d’entrer en<br />

affaires par l’informel ou le formel.<br />

1. Les fon<strong>de</strong>ments théoriques et conceptuels <strong>de</strong>s motivations entrepreneuriales : un<br />

détour par la psychologie sociale<br />

Si les différentes approches <strong>de</strong> l’entrepreneuriat s’intéressent au concept <strong>de</strong> motivation<br />

qu’elles abor<strong>de</strong>nt, soit comme une composante <strong>de</strong> la dimension cognitive (Verstraete, 2001) –<br />

approche phénoménale <strong>de</strong> l’entrepreneuriat – soit comme une variable psychologique <strong>de</strong><br />

l’entrepreneur (Gartner, 1985 ; Hernan<strong>de</strong>z, 2001) – approche processuelle <strong>de</strong><br />

l’entrepreneuriat, il convient <strong>de</strong> rappeler que c’est vers les années 1930 que le concept <strong>de</strong><br />

motivation a été créé par les spécialistes <strong>de</strong> la publicité subliminaire (Muchuelli, 2001). A la<br />

base <strong>de</strong> tout ce qui pousse l’individu à l’action, la motivation renvoie à un ensemble <strong>de</strong><br />

facteurs conscients et inconscients agissant sur les conduites.<br />

Le caractère abstrait du concept <strong>de</strong> motivation et l’ambition <strong>de</strong> rendre compte <strong>de</strong>s<br />

facteurs explicatifs <strong>de</strong>s conduites individuelles ont donné lieu à un foisonnement <strong>de</strong> théories<br />

regroupées en <strong>de</strong>ux gran<strong>de</strong>s catégories : les théories <strong>de</strong>s contenus <strong>de</strong>s motivations qui<br />

expliquent par quoi on est motivé et les théories <strong>de</strong> processus <strong>de</strong>s motivations qui tentent<br />

d’expliquer comment on est motivé. Elles sont régulièrement mobilisées dans l’élucidation <strong>de</strong><br />

certaines problématiques associées à l’animation <strong>de</strong>s hommes dans les organisations.<br />

Ainsi, même si leur portée limitée est très souvent dénoncée (Louart, 1997), la théorie<br />

<strong>de</strong> McClelland (besoins d’accomplissement, <strong>de</strong> pouvoir, d’appartenance), l’échelle <strong>de</strong> besoins<br />

<strong>de</strong> Maslow ainsi que la théorie bi factorielle <strong>de</strong> Herzberg (motivations intrinsèques et<br />

extrinsèques) s’illustrent comme les plus représentatives <strong>de</strong>s théories dites <strong>de</strong> contenu et<br />

viennent en soutien aux démarches explicatives <strong>de</strong>s ressorts <strong>de</strong>s comportements <strong>de</strong>s acteurs en<br />

contexte organisationnel. De même, dans le registre <strong>de</strong> récusation <strong>de</strong> la pertinence <strong>de</strong>s<br />

théories dite <strong>de</strong> contenu, les théories <strong>de</strong> processus, très souvent présentées comme les plus<br />

pratiques et opérationnalisables, et par conséquent plus à même <strong>de</strong> faire le lien entre facteurs<br />

motivationnels et objets motivants, dévoilent elles aussi leurs limites par rapport à leur portée


explicative puisqu’elles se fon<strong>de</strong>nt sur l’hypothèse <strong>de</strong> la rationalité parfaite <strong>de</strong>s acteurs. A titre<br />

d’illustration, dans la recherche <strong>de</strong>s fon<strong>de</strong>ments ou facteurs explicatifs <strong>de</strong> l’action d’un<br />

individu, peut-on véritablement écarter l’abstraction du lien entre l’effort et les résultats qui<br />

en découlent ? Cet exercice semble pourtant possible au regard <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong>s attentes.<br />

Certes, il semble assez délicat d’interroger les ressorts psychologiques <strong>de</strong> l’action d’un<br />

individu (la création d’entreprise) en recourant à <strong>de</strong>s démarches éprouvées dans la recherche<br />

d’éléments explicatifs du comportement <strong>de</strong>s acteurs au sein d’un contexte donné<br />

(l’entreprise). Toutefois, la visée téléologique d’une recherche portant sur les tenants<br />

psychologiques <strong>de</strong> la décision <strong>de</strong> créer une entreprise n’est pas l’organisation dont il faut<br />

contribuer à l’amélioration du fonctionnement mais plutôt l’i<strong>de</strong>ntification <strong>de</strong>s déterminants<br />

psychosociologiques <strong>de</strong>s motivations qui vont donner naissance à une nouvelle organisation.<br />

En fait, il ne s’agit pas ici <strong>de</strong> rendre compte <strong>de</strong>s déterminants du comportement <strong>de</strong>s acteurs<br />

(employés) que l’on voudrait pouvoir influencer. L’objectif <strong>de</strong> la recherche comman<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

privilégier une démarche ontologique <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s motivations à entrer en affaires en<br />

questionnant leurs sources.<br />

Dans cette texture et en rapport avec le foisonnement <strong>de</strong>s théories <strong>de</strong> la motivation,<br />

Muchielli (2001) a construit un cadre conceptuel qui ressort <strong>de</strong>s hypothèses qui fon<strong>de</strong>nt les<br />

différentes conceptions <strong>de</strong>s motivations en établissant tout l’intérêt qu’il y a à aller interroger<br />

et à prendre en compte les déterminants <strong>de</strong>s motivations pour comprendre les conduites et les<br />

comportements <strong>de</strong>s individus.


Tableau 1. Les principales conceptions <strong>de</strong>s motivations et positionnement <strong>de</strong> la recherche<br />

Conceptions<br />

innéistes <strong>de</strong>s<br />

motivations<br />

Conceptions<br />

empiristes <strong>de</strong>s<br />

motivations<br />

Conceptions<br />

situationnelles <strong>de</strong>s<br />

motivations<br />

Pourquoi les individus sont-ils motivés ?<br />

Hypothèse<br />

Facteurs<br />

motivationnels<br />

Les déterminants du<br />

comportement sont<br />

innés, référence aux<br />

facteurs biologiques<br />

Le comportement ou<br />

les conduites sont<br />

façonnés par le milieu<br />

et l’apprentissage<br />

social, référence aux<br />

valeurs du groupe<br />

Le comportement ou<br />

la conduite sont<br />

contraints par les<br />

réalités du contexte,<br />

références aux lois et<br />

normes<br />

Besoins, désirs, tendances, impulsions, instincts…<br />

Quelle approche (s)<br />

<strong>de</strong>s motivations à la<br />

base <strong>de</strong> l’entrée <strong>de</strong>s<br />

femmes en affaires ?<br />

Positionnement<br />

<br />

Les motivations à entrer en affaires sont<br />

façonnées par le milieu ou suscitées par les<br />

réalités du contexte<br />

<br />

Le tableau ci-<strong>de</strong>ssus fait la synthèse <strong>de</strong> ce cadre conceptuel. Les possibilités d’analyse<br />

qu’il donne jettent la lumière sur les limites <strong>de</strong> la plupart <strong>de</strong>s travaux en entrepreneuriat qui se<br />

focalisent sur les facteurs motivationnels qu’ils essayent <strong>de</strong> classer sous le prisme du modèle<br />

push/pull. Trois conceptions <strong>de</strong>s motivations résultent <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong> Muchielli : les<br />

conceptions innéistes <strong>de</strong>s motivations, les conceptions empiristes <strong>de</strong>s motivations et les<br />

conceptions situationnelles <strong>de</strong>s motivations. Si ces conceptions <strong>de</strong>s motivations permettent<br />

une lecture fructueuse <strong>de</strong>s déterminants <strong>de</strong>s comportements et conduites <strong>de</strong>s individus <strong>de</strong><br />

façon générale, la double conception situationnelle et empiriste <strong>de</strong>s motivations semble<br />

indiquée dans la recherche <strong>de</strong>s déterminants <strong>de</strong>s motivations <strong>de</strong>s femmes à entrer en affaires.<br />

Les conceptions innéistes <strong>de</strong>s motivations se réfèrent essentiellement au niveau<br />

biologique <strong>de</strong>s facteurs motivationnels en supposant qu’il existe chez l’individu <strong>de</strong>s<br />

caractéristiques fondamentales, constitutives <strong>de</strong> la nature humaine qui déterminent son<br />

comportement. Il s’agit <strong>de</strong> forces opérant à un niveau infraconscient c'est-à-dire à l’intérieur<br />

<strong>de</strong> l’individu et déterminant son comportement (Bandura, 1980). Au regard <strong>de</strong> la littérature en<br />

entrepreneuriat, cette première conception <strong>de</strong>s motivations renvoie à l’ensemble <strong>de</strong> travaux<br />

que recouvre l’approche par les traits, plus singulièrement les travaux qui ont investigué sur<br />

les traits <strong>de</strong> personnalité <strong>de</strong> l’entrepreneur et qui ont cherché à répondre à la question : « qui<br />

<strong>de</strong>vient entrepreneur ? » Même si l’unanimité semble établie sur l’absence d’entrepreneur<br />

typique, dans la synthèse effectuée par Belley, cité par Hernan<strong>de</strong>z (2000), le besoin<br />

d’accomplissement, l’internalité du lieu <strong>de</strong> contrôle ainsi que la propension à la prise <strong>de</strong><br />

risque constituent <strong>de</strong>s traits <strong>de</strong> personnalité positivement associés au désir d’entrer en affaires.<br />

Ils sont plus accentués chez les entrepreneurs et permettent <strong>de</strong> les distinguer <strong>de</strong>s non<br />

entrepreneurs.


Les conceptions empiristes <strong>de</strong>s motivations attribuent un rôle majeur au milieu et à<br />

l’apprentissage social dans le déterminisme <strong>de</strong>s facteurs motivationnels. En effet, les<br />

caractéristiques <strong>de</strong> l’entrepreneur, notamment ses motivations, semblent contingentes au lieu<br />

d’où émerge celui-ci (Verstraete et Saporta, 2006). L’emprise du contexte d’émergence <strong>de</strong><br />

l’acteur sur ses comportements et rationalités est une réalité qui, par rapport à la création<br />

d’entreprises qui en résulte comme conséquence, apparaît avec plus d’acuité dans certains<br />

contextes. Ainsi, si la culture s’affirme aujourd’hui comme une variable pertinente pour<br />

comparer les motivations <strong>de</strong>s entrepreneurs par <strong>de</strong>là les frontières ou alors, au sein d’un même<br />

pays, entre plusieurs régions, la thèse <strong>de</strong>s différences <strong>de</strong>s motivations défendue par la plupart<br />

<strong>de</strong>s analyses se fon<strong>de</strong> sur l’hypothèse selon laquelle les conditions culturelles différentes sont<br />

susceptibles <strong>de</strong> produire <strong>de</strong>s entrepreneurs différents parce que les pratiques <strong>de</strong> socialisation<br />

<strong>de</strong>s enfants sont différentes dès le départ (Cochran, 1971). En réalité, c’est la perception que<br />

les retombées du comportement entrepreneurial seront personnellement et socialement<br />

désirables qui explique finalement la désirabilité <strong>de</strong> l’entrepreneuriat (Gasse, 2003). Mais,<br />

cette perception est influencée par le type <strong>de</strong> valeurs que le milieu associe à l’entrepreneuriat.<br />

Ainsi, la force du désir d’entrer en affaires peut tirer sa source dans une incitation publique,<br />

une initiative privée <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> « capitalistes », mais aussi, et sans doute surtout, d’une forte<br />

légitimité culturelle et sociale associée à la fonction entrepreneuriale (Marchesnay,<br />

Chabchoub et Ellouze, 2006).<br />

Dans le contexte <strong>de</strong>s pays développés, l’incitation publique apparaît plus qu’un adjuvant<br />

dans les facteurs <strong>de</strong> diffusion <strong>de</strong> l’esprit d’entreprise. C’est elle qui se trouve au départ <strong>de</strong> la<br />

création d’entreprises dans une large échelle dans <strong>de</strong>s zones ou régions précises, transformées,<br />

à l’occasion, en districts industriels, technopoles, pépinières d’entreprises, etc. On peut<br />

évoquer l’exemple <strong>de</strong> la silicon valley aux Etats-Unis, ou les districts Marshalliens dans<br />

l’Italie du Nord, la Catalogne en France, etc. divers démembrements <strong>de</strong> l’Etat, tels que les<br />

collectivités territoriales décentralisées, servent souvent <strong>de</strong> bras séculier dans la<br />

matérialisation <strong>de</strong> cette incitation publique à la création d’entreprises et à la diffusion <strong>de</strong><br />

l’esprit d’entreprise.<br />

Mais comme le rappellent Durance et Mousli (2010 : 7) dans le rapport du Conseil<br />

d’Analyse Economique, ce ne sont pas les infrastructures qui font le développement, ni même<br />

la taille <strong>de</strong>s villes ; mais l’esprit d’entreprise <strong>de</strong>s habitants dont le passé a créé <strong>de</strong>s liens et une<br />

ambiance propice au désir <strong>de</strong> vivre et d’entreprendre. Dans les pays en développement et<br />

singulièrement en Afrique, la diffusion <strong>de</strong> l’esprit d’entreprise est beaucoup plus le fait <strong>de</strong><br />

« familles » ou <strong>de</strong> « groupe ethnique » au point où l’entrepreneuriat comme pratique ou fait<br />

social au sens <strong>de</strong> Mauss est associé à certaines communautés. Ces analogies culturellement<br />

entretenues s’illustrent parfois avec force dans le contenu du référentiel <strong>de</strong>s pratiques, <strong>de</strong>s<br />

usages et orientations socioéconomiques <strong>de</strong>s acteurs <strong>de</strong>s différentes communautés. Ainsi,<br />

certains facteurs liés à la trajectoire historique et culturelle <strong>de</strong>s communautés ethniques sont<br />

parfois avancés pour expliquer le succès <strong>de</strong> leurs ressortissants dans les affaires. Dans sa<br />

psychologie économique africaine, Binet (1970) donne une illustration <strong>de</strong> la géographie <strong>de</strong>s<br />

activités socioéconomiques du Cameroun à partir <strong>de</strong>s aires culturelles <strong>de</strong> ce pays. Ce travail<br />

empirique permet <strong>de</strong> comprendre pourquoi plus que les autres, les ressortissants <strong>de</strong>s aires<br />

culturelles <strong>de</strong>s régions <strong>de</strong>s grass field s’adonnent aux activités commerciales tandis que les<br />

ressortissants <strong>de</strong>s régions <strong>de</strong> la forêt sont plus attirés par les carrières administratives dans la


fonction publique. Même si les raisons historiques et culturelles ne peuvent pas seules<br />

expliquer leur succès en affaires, les ressortissants Soussou en Guinée (Diakité, 2004), les<br />

Bamilékés au Cameroun (Warnier, 1993) et les Dioulas au Mali et en Côte d’Ivoire tiennent<br />

leur suprématie dans les affaires, d’abord dans l’importance <strong>de</strong>s valeurs qu’ils accor<strong>de</strong>nt à la<br />

création d’entreprise par rapport aux autres opportunités d’activités. Ensuite, ces<br />

communautés ont un mo<strong>de</strong> d’organisation socioéconomique plus contraignant qui incite les<br />

membres à la prise d’initiative, donc à la prise <strong>de</strong> risque ; <strong>de</strong>s dispositions psychologiques qui<br />

« subliment » la nouveauté et l’innovation, et favorisent finalement la création d’entreprises.<br />

Enfin, on a constaté que les ressortissants <strong>de</strong>s groupes ethniques à fort potentialité<br />

entrepreneuriale ont en commun, et plus que les ressortissants <strong>de</strong>s autres communautés au<br />

sein du même pays, une forte propension à l’âpreté au gain et à l’accumulation. C’est tout un<br />

ensemble <strong>de</strong> dispositions psychologiques favorables à l’investissement, donc à la création<br />

d’entreprises.<br />

Les conceptions situationnelles <strong>de</strong>s motivations constituent la troisième catégorie<br />

dans la classification <strong>de</strong> Muchielli (2001). Elles renvoient à l’ensemble <strong>de</strong>s motivations qui se<br />

signalent en général à <strong>de</strong>s moments qui marquent <strong>de</strong>s ruptures dans la trajectoire <strong>de</strong> vie d’un<br />

individu (fin d’une formation scolaire, universitaire ou professionnelle, licenciement, etc.).<br />

Les ruptures peuvent être provoquées tout comme elles peuvent être subies. A l’origine, il<br />

s’agit <strong>de</strong>s forces qui agissent sur l’individu et l’incitent à dévier <strong>de</strong> sa trajectoire <strong>de</strong> vie. Selon<br />

la littérature en entrepreneuriat, ces forces ou facteurs motivationnels découlent <strong>de</strong><br />

l’environnement immédiat et la situation personnelle <strong>de</strong> l’entrepreneur potentiel. C’est un<br />

ensemble d’ « évènements déclencheurs » <strong>de</strong> sa décision d’entrer en affaires. Ces évènements<br />

précipitatifs (Emin, 2003) encore appelés « déplacements » ou « discontinuités » au sens <strong>de</strong><br />

Lacasse (1990) peuvent être <strong>de</strong> nature négative ou positive. Les « déplacements » négatifs<br />

sont ceux qui échappent au contrôle <strong>de</strong> l’individu, parce qu’imposés <strong>de</strong> l’extérieur. Arocena et<br />

al. (1981) les assimilent à un mo<strong>de</strong> traumatique <strong>de</strong> déclenchement du processus <strong>de</strong> création,<br />

caractérisé par une rupture subie et non provoquée par le créateur. En revanche, le désir <strong>de</strong><br />

mettre en pratique <strong>de</strong>s connaissances acquises consécutivement à une formation scolaire ou<br />

professionnelle tout comme le besoin d’exploiter une occasion d’affaire i<strong>de</strong>ntifiée constituent<br />

à proprement parler <strong>de</strong>s facteurs motivationnels qui caractérisent les « déplacements » positifs<br />

du créateur.<br />

Incontestablement, l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s motivations entrepreneuriales a généralement été<br />

abordée sans gran<strong>de</strong> considération <strong>de</strong> l’influence que peuvent avoir le milieu et le groupe<br />

d’appartenance sur les motivations et finalement sur le comportement <strong>de</strong> l’individu. Pourtant,<br />

comme le souligne Muchielli (2001), citant Parsons, toute action s’inscrit dans quatre<br />

contextes à la fois (biologique, psychique, social et culturel) et résulte toujours d’une<br />

interaction <strong>de</strong> forces ou d’influences provenant <strong>de</strong> chacun d’eux. La plupart <strong>de</strong>s travaux<br />

consacrés aux motivations entrepreneuriales se sont contentés <strong>de</strong> les caractériser. Cette<br />

démarche a donné lieu à <strong>de</strong>ux types <strong>de</strong> motivations qui constituent désormais les facteurs d’un<br />

modèle générique du fait qu’elles reflètent le résultat final vers lequel convergent la plupart<br />

<strong>de</strong>s travaux qui s’intéressent aux motivations <strong>de</strong>s entrepreneurs : les motivations <strong>de</strong> type push<br />

ou les motivations <strong>de</strong> nécessité et les motivations <strong>de</strong> type pull ou les motivations <strong>de</strong> volonté.<br />

Si les <strong>de</strong>ux types <strong>de</strong> motivations apparaissent indéniablement à un moment donné dans la<br />

trajectoire <strong>de</strong> vie <strong>de</strong> l’individu qu’elles « traumatisent » par la mise en œuvre <strong>de</strong> la décision


qui en découle (l’entrée en affaires), les motivations <strong>de</strong> volonté sont suscitées par <strong>de</strong>s<br />

évènements précipitatifs positifs (i<strong>de</strong>ntification d’une occasion d’affaires, rencontre d’un<br />

partenaire en affaires…). En revanche, les motivations <strong>de</strong> nécessité sont produites par un<br />

ensemble <strong>de</strong> facteurs négatifs associés à la situation personnelle <strong>de</strong> l’entrepreneur potentiel ou<br />

alors à son environnement immédiat (licenciement, fin d’une formation, tracasseries <strong>de</strong><br />

l’environnement professionnel …). Le modèle <strong>de</strong> motivations pull/push qui résulte <strong>de</strong> ce<br />

regroupement <strong>de</strong>s motivations entrepreneuriales a mainte fois été éprouvé dans l’examen<br />

aussi bien <strong>de</strong>s déterminants <strong>de</strong> l’entrée en affaires que <strong>de</strong> la performance <strong>de</strong>s petites<br />

entreprises (Robichaud, Cachon et Haq, 2010). L’observation <strong>de</strong>s résultats issus <strong>de</strong> la plupart<br />

<strong>de</strong> ces travaux révèlent cependant que ce modèle recouvre un ensemble <strong>de</strong> variables dont le<br />

<strong>de</strong>gré d’importance varie selon les contextes.<br />

Ainsi, les motivations entrepreneuriales <strong>de</strong>s femmes du contexte <strong>de</strong>s pays développés<br />

semblent recouvrer une certaine homogénéité aussi bien par rapport à ce qui les sous tend que<br />

dans l’ordre d’importance qui a prévalu dans leur classement par les différents chercheurs qui<br />

s’y sont intéressés. Elles semblent plus proches <strong>de</strong>s motivations <strong>de</strong> type pull. En effet, il<br />

semble que dans les pays développés, la plupart <strong>de</strong>s femmes entrent en affaires au départ<br />

d’une situation d’employée, dans une entreprise ou une administration. La création<br />

d’entreprise apparaît alors comme une solution permettant <strong>de</strong> contourner le « plafond <strong>de</strong><br />

verre 1 », <strong>de</strong> rompre avec les règles et carcans <strong>de</strong> l’entreprise (Cornet et Constantinidis, 2004).<br />

66 % <strong>de</strong>s femmes interrogées par ces <strong>de</strong>ux auteurs dans le contexte <strong>de</strong> la Belgique<br />

travaillaient avant <strong>de</strong> lancer leur propre activité. Les motivations à entrer en affaires seraient<br />

donc fortement influencées par la situation professionnelle ou sociale précédant l’entrée en<br />

affaires. Les tendances observées dans le contexte <strong>de</strong> la Côte d’Ivoire établissent que la<br />

situation professionnelle, la force <strong>de</strong>s stéréotypes socialement construits sur son rôle dans la<br />

société ainsi que les représentations qu’elle se fait sur sa trajectoire <strong>de</strong> vie restent<br />

déterminantes dans le désir <strong>de</strong> la femme à se mettre à son propre compte. L’enquête effectuée<br />

par Hernan<strong>de</strong>z (1997) sur les femmes entrepreneurs en Côte d’Ivoire révèle que près <strong>de</strong> 95 %<br />

<strong>de</strong>s femmes interrogées travaillaient en majorité dans le même secteur avant <strong>de</strong> créer leurs<br />

entreprises respectives. Au Ghana, les motivations <strong>de</strong>s femmes à entrer en affaires sont<br />

portées par la force du système <strong>de</strong> soutien familial et celle <strong>de</strong>s réseaux sociaux et<br />

professionnels (Chea, 2008). Ce constat souligne l’intérêt d’interroger les déterminants <strong>de</strong><br />

l’entrée <strong>de</strong>s femmes en affaires. Il soulève la nécessité d’approfondir <strong>de</strong>s développements sur<br />

la relation entre la situation sociale et professionnelle <strong>de</strong> la femme entrepreneur potentielle et<br />

son désir d’entrer en affaires dans une perspective <strong>de</strong> théorisation <strong>de</strong> l’entrepreneuriat<br />

féminin. Enfin, ce constat appelle aussi à élargir l’investigation à <strong>de</strong>s candidates à la création<br />

d’entreprises répondant à <strong>de</strong>s statut socialement et professionnellement différents, et <strong>de</strong><br />

surcroît dans un contexte marqué par <strong>de</strong>s réalités différentes. C’est ce que nous essayons <strong>de</strong><br />

montrer dans cette recherche.<br />

2. Méthodologie<br />

1 Le plafond <strong>de</strong> verre ou barrière invisible est une expression désignant le fait qu’au sein <strong>de</strong> l’entreprise, les<br />

femmes sont empêchées <strong>de</strong> gravir les <strong>de</strong>rniers échelons <strong>de</strong> la hiérarchie du fait <strong>de</strong> stéréotype endogènes et<br />

exogènes


Le contexte <strong>de</strong> la recherche, le Cameroun, à l’instar <strong>de</strong>s autres pays en développement,<br />

se caractérise par une dualité <strong>de</strong>s activités qui s’y déploient. Ces activités se regroupent au<br />

sein <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux grands secteurs : le secteur formel et le secteur informel. Au regard <strong>de</strong> son<br />

importance et son emprise sur l’organisation socioéconomique, le secteur informel fait partie<br />

<strong>de</strong>s caractéristiques <strong>de</strong>s économies africaines qu’il contribue à singulariser. Il est entendu ici<br />

au sens <strong>de</strong> l’Institut national <strong>de</strong> la statistique (INS), inspiré lui-même <strong>de</strong>s résolutions <strong>de</strong> la<br />

15 ème conférence internationale <strong>de</strong>s statisticiens du travail tenue à Genève en 1993 et qui<br />

retient dans le secteur informel « l’ensemble <strong>de</strong>s unités <strong>de</strong> production dépourvues <strong>de</strong> numéro<br />

<strong>de</strong> contribuable et/ou ne tenant pas une comptabilité écrite formelle au sens du plan comptable<br />

OHADA ». Évi<strong>de</strong>mment, les entreprises du secteur formel sont celles qui remplissent ces<br />

conditions d’i<strong>de</strong>ntification et <strong>de</strong> tenue d’une comptabilité écrite au sens du plan comptable<br />

OHADA 2 .<br />

Afin <strong>de</strong> conduire notre processus <strong>de</strong> recherche, une démarche méthodologique en <strong>de</strong>ux<br />

étapes a été retenue. En effet, suite à <strong>de</strong>s séminaires que nous avons animés au profit <strong>de</strong><br />

quelques femmes entrepreneurs basées dans la ville <strong>de</strong> Douala et à l’enquête préliminaire qui<br />

en a découlée, une revue <strong>de</strong> la littérature a été effectuée dans un premier temps. Il s’agissait <strong>de</strong><br />

positionner les motivations <strong>de</strong>s femmes entrepreneurs au Cameroun sur les motivations<br />

entrepreneuriales avancées par la littérature. Dans un second temps, une enquête quantitative<br />

conduite sur un échantillon <strong>de</strong> femmes entrepreneurs construit à partir <strong>de</strong> la base <strong>de</strong> données<br />

la plus récente <strong>de</strong> la CCIMA 3 <strong>de</strong> Douala a été effectuée. La structure <strong>de</strong> l’échantillon ainsi<br />

constituée restitue la dualité <strong>de</strong> l’économie nationale au niveau <strong>de</strong> sa configuration. Ainsi, sur<br />

un total <strong>de</strong> 166 femmes entrepreneurs ayant volontairement accepté <strong>de</strong> participer à l’enquête,<br />

117 ont effectivement rempli le questionnaire, à raison <strong>de</strong> 65 femmes entrepreneurs du secteur<br />

formel et 52 femmes entrepreneurs du secteur informel.<br />

Il est généralement admis aujourd’hui, et bien plus qu’hier, que les hommes et les<br />

femmes ne sont pas différents du point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> leurs motivations à entrer en affaires<br />

(Cahoon, Wadhwa et Mitchell, 2010). Ceci étant, notre recherche se fon<strong>de</strong> sur un dispositif<br />

théorique découlant à la fois <strong>de</strong> nos observations et <strong>de</strong> la littérature en entrepreneuriat, plus<br />

précisément <strong>de</strong>s motivations entrepreneuriales i<strong>de</strong>ntifiées par Blais et Toulouse (1990). Plus<br />

concrètement, les motivations entrepreneuriales retenues et que nous nous sommes attaché à<br />

contextualiser sont finalement regroupées dans le tableau ci-après.<br />

Tableau 3. Motivations à entrer en affaires<br />

Motivations entrepreneuriales<br />

-être mon propre patron<br />

-être libre vis-à-vis <strong>de</strong> mon travail<br />

-être indépendante financièrement<br />

-continuer une tradition familiale<br />

-avoir plus d’influence dans mon milieu<br />

-élever le statut et le prestige <strong>de</strong> la famille<br />

-besoin d’argent pour survivre<br />

-faire plus d’argent pour être riche<br />

-assurer l’avenir <strong>de</strong> mes enfants<br />

-m’occuper <strong>de</strong>s affaires et <strong>de</strong> la famille<br />

-relever un défi<br />

-suivre un modèle d’homme d’affaires<br />

-tirer profit <strong>de</strong> ma formation<br />

-quitter la situation <strong>de</strong> sans emploi<br />

-échapper aux frustrations <strong>de</strong> l’emploi précé<strong>de</strong>nt<br />

-assurer le bien être <strong>de</strong> la famille<br />

-ai<strong>de</strong>r ma communauté<br />

-établir mon propre horaire <strong>de</strong> travail<br />

2 Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit <strong>de</strong>s Affaires<br />

3 Chambre <strong>de</strong> commerce, <strong>de</strong> l’industrie, <strong>de</strong>s Mines et <strong>de</strong> l’Artisanat.


Les facteurs motivationnels énumérés ci-<strong>de</strong>ssus sont généralement avancés dans la<br />

littérature en entrepreneuriat pour expliquer pourquoi les hommes et les femmes déci<strong>de</strong>nt<br />

d’entrer en affaires. La sélection <strong>de</strong> ces facteurs se fon<strong>de</strong> sur leur capacité à appréhen<strong>de</strong>r et à<br />

rendre compte <strong>de</strong>s réalités d’un contexte marqué à la fois par l’influence <strong>de</strong>s systèmes<br />

institutionnels (marché du travail, système éducatif, système financier…) et l’emprise <strong>de</strong> la<br />

culture sur les rationalités et finalement le comportement <strong>de</strong> celui qui en émerge. En effet le<br />

comportement <strong>de</strong> la femme entrepreneur est façonné par les valeurs <strong>de</strong> son groupe (famille,<br />

clan, ethnie…) et auxquelles elle se réfère constamment, le besoin d’entrer en affaires n’est<br />

pas moins influencé par l’état du contexte économique et légal dans lequel se trouve la femme<br />

et qui fait désormais <strong>de</strong> la création d’entreprise l’ultime solution pour accé<strong>de</strong>r à lautonomie.<br />

3. Profil <strong>de</strong>s femmes entrepreneurs et <strong>de</strong> leurs motivations à entrer en<br />

affaires<br />

Avant d’analyser le poids <strong>de</strong>s motivations <strong>de</strong>s femmes à entrer en affaires, les<br />

caractéristiques <strong>de</strong>s femmes entrepreneurs et l’examen <strong>de</strong>s déterminants <strong>de</strong> leurs choix<br />

d’entrer en affaires par le secteur informel ou formel sont d’abord présentés.<br />

Femmes entrepreneurs : caractéristiques et déterminants <strong>de</strong> l’entrée en affaires par le<br />

formel ou l’informel<br />

Si l’entrepreneuriat féminin comme objet <strong>de</strong> recherche connaît aujourd’hui une montée<br />

en puissance, c’est en raison <strong>de</strong> la nécessité d’investiguer qu’appelle un certain nombre <strong>de</strong><br />

singularités qui ont été i<strong>de</strong>ntifiées aussi bien chez les femmes entrepreneurs que dans les<br />

entreprises créées par les femmes. Au Cameroun, comme dans la plupart <strong>de</strong>s pays en Afrique<br />

au Sud du Sahara, la géographie <strong>de</strong>s activités économiques révèle une dualité dans leur<br />

configuration ; dualité caractérisée par l’existence <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux secteurs plutôt complémentaires au<br />

niveau <strong>de</strong> l’offre mais complètement différents, d’abord au regard <strong>de</strong> la lecture qu’en donne la<br />

loi et qui apparaît dans les différentes définitions qui en découlent, ensuite par rapport aux<br />

conditions <strong>de</strong> création <strong>de</strong>s entreprises et aux mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> gestion privilégiés par leurs dirigeants :<br />

le secteur formel et le secteur informel. Certains travaux i<strong>de</strong>ntifient un lien positif entre<br />

l’entrepreneuriat féminin et le secteur informel lui trouvant même une forte intensité. C’est<br />

ainsi que le secteur informel est généralement présenté comme cadre <strong>de</strong> prédilection <strong>de</strong>s<br />

activités économiques <strong>de</strong> femmes qu’il accueille soit comme employées ou alors comme<br />

entrepreneurs (ECAM 4 , 2001 ; BIT, 2007).<br />

Voulant en savoir davantage dans le contexte singulier du Cameroun, les<br />

caractéristiques qui permettent <strong>de</strong> cerner les femmes entrepreneurs sont présentées et<br />

analysées. L’analyse s’étend à l’influence que ces caractéristiques sont susceptibles d’avoir<br />

sur le choix <strong>de</strong> la femme entrepreneur à exercer ou non dans le secteur informel ou formel<br />

lorsqu’elle déci<strong>de</strong> d’entrer en affaires.<br />

Le tableau ci-<strong>de</strong>ssous donne une illustration <strong>de</strong> l’importance <strong>de</strong> ces caractéristiques et la<br />

mesure <strong>de</strong> la force <strong>de</strong> leur relation avec le choix <strong>de</strong> la femme entrepreneur à exercer dans le<br />

secteur informel ou formel.<br />

Tableau 4. Caractéristiques <strong>de</strong>s femmes entrepreneurs<br />

FESF FESI Total Mesures d’association<br />

Niveau <strong>de</strong> formation<br />

4 Enquête sur l’emploi et le secteur informel au Cameroun, Phase2, 2006.


Primaire<br />

Secondaire<br />

Bac<br />

Bac+3<br />

Plus Bac+3<br />

Age <strong>de</strong> la femme<br />

entrepreneur<br />

Moins <strong>de</strong> 31 ans<br />

31 à 35 ans<br />

36 à 40 ans<br />

Plus <strong>de</strong> 40 ans<br />

Expérience<br />

professionnelle avant<br />

l’entrée en affaires<br />

Oui<br />

Non<br />

Situation<br />

matrimoniale<br />

Mariées<br />

Célibataires<br />

Divorcée<br />

Existence d’un<br />

entrepreneur dans la<br />

famille<br />

Oui<br />

Non<br />

Capital <strong>de</strong> départ<br />

Moins <strong>de</strong> 100 000<br />

100 001-300 000<br />

300 001-500 000<br />

500 001-1000 0000<br />

1000 001-1500 000<br />

1500 001-3000 000<br />

3000 001-5000 000<br />

Plus <strong>de</strong> 5000 000<br />

10 (8,5 %)<br />

19 (16,2 %)<br />

9 (7,7 %)<br />

11 (9,4 %)<br />

13 (11,1 %)<br />

9 (7,7 %)<br />

18 (15,4 %)<br />

17 (14,5 %)<br />

18 (15,4 %)<br />

43 (36,8 %)<br />

19 (16,2 %)<br />

42 (35,9 %)<br />

15 (12,8 %)<br />

5 (4,3 %)<br />

37 (31,6 %)<br />

25 (21,4 %)<br />

5 (4,3 %)<br />

7 (6 %)<br />

9 (7,7 %)<br />

5 (4,3 %)<br />

11 (9,4 %)<br />

11 (9,4 %)<br />

6 (5,1 %)<br />

8 (6,8 %)<br />

13(11,6 %)<br />

27 (23,1 %)<br />

10 (8,5 %)<br />

4 (3,4 %)<br />

1 (0,9 %)<br />

21 (19,7 %)<br />

15 (12,8 %)<br />

14 (12 %)<br />

5 (4,3 %)<br />

31 (26,5 %)<br />

24 (20,6)<br />

34 (29,1 %)<br />

16 (13,7 %)<br />

5 (4,2 %)<br />

33 (28,3 %)<br />

22 (18,7 %)<br />

5 (4,3 %)<br />

19 (16,1 %)<br />

16 (13,7 %)<br />

9 (7,7 %)<br />

2 (1,7 %)<br />

3 (2,6 %)<br />

1 (0,9 %)<br />

0 (0 %)<br />

23 (19,7 %)<br />

46 (39,3 %)<br />

19 (16,2 %)<br />

15 (12,8 %)<br />

14 (12 %)<br />

117 (100 %)<br />

30 (25,6 %)<br />

33 (28,2 %)<br />

31 (26,5 %)<br />

23 (19,7 %)<br />

117 (100 %)<br />

74 (63,2 %)<br />

43 (36,8 %)<br />

117 (100 %)<br />

76 (65 %)<br />

31 (26,5 %)<br />

10 (8,5 %)<br />

117 (100 %)<br />

70 (59,9 %)<br />

47 (40,1 %)<br />

117 (100 %)<br />

10 (8,6 %)<br />

26 (22,1 %)<br />

25 (21,4 %)<br />

14 (12 %)<br />

13 (11,1 %)<br />

14 (12 %)<br />

7 (6 %)<br />

8 (6,8 %)<br />

χ² = 15,236<br />

DDL = 4<br />

Sig. = 0,05<br />

Contingence = 0,337<br />

χ² = 12,33<br />

DDL = 3<br />

Sig. = 0,006<br />

Contingence = 0,313<br />

α = 0,05<br />

χ² = 2,123<br />

DDL = 1<br />

Sig. = 0,146<br />

Contingence = 0,131<br />

α = 0,05<br />

χ² =0,457<br />

DDL = 2<br />

Sig. = 0,796<br />

contingence = 0,062<br />

α = 0,05<br />

χ² = 0,001<br />

DDL = 1<br />

Sig. = 0,972<br />

Contingence = 0,003<br />

α = 0,05<br />

χ² = 30,706<br />

DDL = 7<br />

Sig. = 0,000<br />

Contingence = 0,456<br />

α = 0,05<br />

117 (100 %)<br />

FESF : femmes entrepreneurs du secteur formel ; FESI : femmes entrepreneurs du secteur informel<br />

Ce tableau permet <strong>de</strong> savoir que sur les 117 femmes entrepreneurs enquêtées, 94 (c'està-dire<br />

80, 3 %) au moins ont le niveau du secondaire. En révélant ainsi que le niveau <strong>de</strong><br />

formation scolaire <strong>de</strong>s femmes qui entrent en affaires dans ce contexte est élévé, ces résultats<br />

indiquent que les problèmes <strong>de</strong> formation insuffisante <strong>de</strong>s femmes entrepreneurs<br />

généralement avancés par certaines étu<strong>de</strong>s (BIT, 2005 ; Tchamanbé et Tchouassi, 2001) sont<br />

davantage liés à la formation professionnelle, en gestion notamment, qu’à une insuffisance <strong>de</strong><br />

la formation académique. En effet, 48 ( soit 41 %) femmes entrepreneurs sont titulaires du<br />

Bac ; 14 (12 %) femmes entrepreneurs disposent au moins d’un diplôme équivalent à la<br />

licence (Bac + 3). Bien que ne défendant pas l’ambition d’une généralisation, fut elle à


l’échelle nationale, ces résultats recouvrent <strong>de</strong>s réalités à analyser au regard <strong>de</strong> la littérature en<br />

entrepreneuriat.<br />

Ce niveau <strong>de</strong> formation relativement élevé et constaté chez les femmes entrepreneurs est<br />

en phase avec le taux <strong>de</strong> scolarisation du pays estimé à 63,4 % (PNUD, 2001). C’est une<br />

conséquence du relâchement progressif <strong>de</strong> certains préjugés défavorables sur la formation <strong>de</strong>s<br />

femmes et qui permet finalement un accès égal <strong>de</strong>s hommes et <strong>de</strong>s femmes à la formation<br />

scolaire. Néanmoins, par rapport au nombre d’années <strong>de</strong> formation, le taux <strong>de</strong> 41 % constaté<br />

au Cameroun pour ce qui est <strong>de</strong> la formation post secondaire reste faible à côté <strong>de</strong>s 71 %<br />

enregistrés au Québec (Borges, Simard et Filion, 2005). Dans le contexte québécois, 29 % <strong>de</strong><br />

femmes entrepreneurs justifient même d’une formation post licence contre 12 % <strong>de</strong>s femmes<br />

enquêtées dans le contexte du Cameroun. C’est ce qui expliquerait la quasi absence <strong>de</strong>s<br />

femmes entrepreneurs du Cameroun dans les secteurs technologiques et techniques.<br />

Certaines étu<strong>de</strong>s établissent un lien positif entre le niveau <strong>de</strong> formation académique et la<br />

propension à créer une entreprise. Ainsi en France, le rapport entre les femmes créatrices<br />

d’entreprises et la population féminine totale <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 15 ans, selon le niveau <strong>de</strong> formation,<br />

est estimé à 10 % chez les créatrices sans diplômes et à 88 % chez celles qui ont un niveau <strong>de</strong><br />

formation bac + 3 (Duchéneaut et Orhan, 2000 : 88). Les données issues <strong>de</strong> notre enquête<br />

révèlent le même constat mais avec une prépondérance <strong>de</strong>s femmes entrepreneurs ayant arrêté<br />

leurs étu<strong>de</strong>s au niveau du secondaire (39,3 %). Mais le plus intéressant dans ces résultats se<br />

trouve dans leur distribution entre les secteurs formel et informel. En effet, les résultats<br />

indiquent l’existence d’une relation significative entre le secteur d’activité (secteur formel vs<br />

secteur informel) et le niveau <strong>de</strong> formation <strong>de</strong> la femme entrepreneur. Les femmes<br />

entrepreneurs justifiant d’un niveau <strong>de</strong> formation post bac semblent avoir une préférence pour<br />

le secteur formel tandis que celles qui ont un niveau secondaire et moins privilégieraient le<br />

secteur informel.<br />

25,6 % <strong>de</strong>s femmes entrepreneurs <strong>de</strong> notre échantillon ont moins <strong>de</strong> 31 ans. Alors que<br />

plus <strong>de</strong> la moitié (soit 54,7 %) ont un âge compris entre 31 et 40 ans. 19, 7 % <strong>de</strong>s femmes<br />

entrepreneurs sont âgées <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 40 ans. Ces résultats contrastent avec les résultats obtenus<br />

en France où 33 % seulement <strong>de</strong> femmes entrepreneurs ont moins <strong>de</strong> 40 ans (Duchéneaut et<br />

Orhan, 2000) et au Québec où la proportion est estimée à 36 % (St-Cyr, 2001). Ce<br />

déséquilibre peut se justifier par le fait que contrairement au Québec ou en France où les<br />

femmes entrent généralement en affaires au départ d’une situation d’employée, au Cameroun<br />

comme dans la plupart <strong>de</strong>s pays en Afrique au Sud du Sahara, c’est à l’âge <strong>de</strong> 30 ans que la<br />

plupart <strong>de</strong>s femmes entre dans la vie active, soit comme employée ou en s’établissant à leur<br />

propre compte.<br />

Les femmes mariées sont majoritaires dans l’échantillon. Elles possè<strong>de</strong>nt le plus<br />

d’entreprises dans le secteur formel. Ce résultat renseigne sur les contours <strong>de</strong> la trajectoire<br />

entrepreneuriale <strong>de</strong>s femmes. En <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> celles qui ont un niveau <strong>de</strong> formation élevé, les<br />

femmes entrent en affaires essentiellement par le secteur informel. Les coûts d’entrée dans ce<br />

secteur étant réputés faibles par rapport aux coûts <strong>de</strong> formalisation. L’entrée dans le secteur<br />

formel se fait plus tard quand l’affaire a gagné en envergure. En général, la femme accè<strong>de</strong> à<br />

cette phase <strong>de</strong> son parcours entrepreneurial quand elle est déjà mariée.<br />

Le capital <strong>de</strong> départ se révèle aussi comme une variable force dans les déterminants <strong>de</strong><br />

l’entrée <strong>de</strong>s femmes en affaires. Il est positivement associé au choix d’entrer dans le secteur


informel ou dans le secteur formel. En effet, les résultats obtenus à l’issue <strong>de</strong> l’enquête<br />

indiquent que plus le capital <strong>de</strong> départ est important plus la chance que la femme entre en<br />

affaires par le secteur formel est gran<strong>de</strong>. On trouve là une explication <strong>de</strong> la forte présence <strong>de</strong>s<br />

femmes entrepreneurs dans le secteur informel. Près <strong>de</strong> 53 % <strong>de</strong>s femmes entrepreneurs <strong>de</strong><br />

l’échantillon sont entrées en affaires avec un capital <strong>de</strong> départ inférieur ou égal à 500 000<br />

FCFA, dont plus <strong>de</strong> 33 % dans le secteur informel. La proportion tombe à moins <strong>de</strong> 13 %<br />

pour les femmes entrées en affaires avec un capital supérieur à 500 000 FCFA. C’est plus par<br />

contrainte que par volonté que les femmes entrent en affaires par le secteur informel.<br />

Globalement, les caractéristiques <strong>de</strong>s femmes entrepreneurs ont été présentées. Elles<br />

recouvrent <strong>de</strong>s spécificités susceptibles <strong>de</strong> défendre la singularité <strong>de</strong> l’entrepreneuriat féminin<br />

en Afrique. Ces spécificités tiennent notamment à l’âge <strong>de</strong> la femme entrepreneur, son niveau<br />

<strong>de</strong> formation, le niveau du capital <strong>de</strong> départ qui détermine son entrée en affaires dans le<br />

secteur formel ou dans le secteur informel. Si les caractéristiques <strong>de</strong>s femmes entrepreneurs<br />

<strong>de</strong> l’échantillon dégagent <strong>de</strong>s tendances qui établissent leur spécificité par rapport aux<br />

femmes entrepreneurs <strong>de</strong>s pays du Nord, il convient maintenant d’examiner ce que recouvrent<br />

leurs motivations.<br />

4. Entre les références aux valeurs du groupe et la situation <strong>de</strong> la<br />

femme entrepreneur : la prééminence <strong>de</strong>s motivations<br />

communautaires et d’autonomie<br />

La littérature récente en entrepreneuriat ne pointe pas <strong>de</strong> différences significatives entre<br />

hommes et femmes en matière <strong>de</strong> motivations à entrer en affaires ; rendant du coup recevable<br />

le dispositif <strong>de</strong> recueil <strong>de</strong> données utilisé et dont les variables sont issues, pour la plupart, <strong>de</strong>s<br />

conclusions <strong>de</strong>s premiers travaux sur les motivations fondés sur <strong>de</strong>s échantillons<br />

d’entrepreneurs essentiellement masculins. 19 variables motivationnelles ont été finalement<br />

retenues et servies à la construction d’une échelle <strong>de</strong> mesure <strong>de</strong>s motivations à entrer en<br />

affaires. La cohérence <strong>de</strong> l’échelle a été éprouvée par un test <strong>de</strong> validité qui, avec un alpha <strong>de</strong><br />

Cronbach <strong>de</strong> 0,781 a finalement révélé une très bonne fiabilité du dispositif utilisé. Les<br />

composantes découlant du modèle factoriel retenu sont présentées dans le tableau ci-<strong>de</strong>ssous.<br />

Tableau 5. Analyse factorielle en composantes principales <strong>de</strong>s motivations entrepreneuriales<br />

<strong>de</strong>s femmes (après rotation varimax)<br />

Composantes et variables coefficients Variance en %<br />

Réelle Interne<br />

Composante I (motivations d’autonomie1)<br />

Etablir mon propre horaire <strong>de</strong> travail<br />

Etre libre vis-à-vis <strong>de</strong> mon travail<br />

Etre mon propre patron<br />

Etre indépendante sur le plan financier<br />

Composante II (motivations d’autonomie2)<br />

Faire plus d’argent et être riche<br />

Avoir plus d’influence dans mon milieu<br />

Echapper aux frustrations <strong>de</strong> l’emploi précé<strong>de</strong>nt<br />

Composante III (motivations communautaires1)<br />

Ai<strong>de</strong>r ma communauté<br />

0,836<br />

0,790<br />

0,744<br />

0,621<br />

0,784<br />

0,669<br />

0,659<br />

0,814<br />

21,838<br />

9,175<br />

8,637<br />

33,53<br />

14,09<br />

13,25


S’occuper <strong>de</strong>s affaires <strong>de</strong> la famille<br />

Composante IV (motivations communautaires2)<br />

Assurer l’avenir <strong>de</strong>s enfants<br />

Assurer la sécurité et le bien être <strong>de</strong> la famille<br />

Elever le statut et le prestige <strong>de</strong> la famille<br />

Composante V (motivations d’évasion)<br />

Continuer la tradition <strong>de</strong> la famille<br />

Quitter la situation <strong>de</strong> sans emploi<br />

Besoin d’argent pour vivre<br />

Composante VI (motivations <strong>de</strong> défi1)<br />

Suivre un modèle d’homme d’affaires<br />

Relevé un défi<br />

Composante 7 (motivations <strong>de</strong> défi2)<br />

Tirer meilleur profit <strong>de</strong> ma formation<br />

0,667<br />

0,777<br />

0,675<br />

0,512<br />

0,671<br />

0,661<br />

0,657<br />

0,619<br />

0,611<br />

7,301<br />

6,520<br />

6,099<br />

11,21<br />

10,00<br />

9,36<br />

0,815 5,574 8,56<br />

Total 65,143 100<br />

Mesure <strong>de</strong> précision d’échantillonnage <strong>de</strong> Kaiser-Meyer-Olkin<br />

Test <strong>de</strong> sphéricité <strong>de</strong> Barlett χ²<br />

DDL<br />

Signification <strong>de</strong> Barlett<br />

0,689<br />

526,721<br />

171<br />

0,000<br />

Alpha <strong>de</strong> Cronbach 0,781<br />

Le modèle factoriel explique 65 % <strong>de</strong>s motivations <strong>de</strong>s femmes à entrer en affaires.<br />

Même si près <strong>de</strong> 35 % <strong>de</strong> ces motivations restent inexpliquées par les variables choisies, les<br />

valeurs <strong>de</strong>s tests KMO et Barlett justifient l’intérêt <strong>de</strong> remplacer les 19 variables initiales par<br />

7 composantes ou principaux facteurs explicatifs <strong>de</strong> l’entrée <strong>de</strong>s femmes en affaires. Les<br />

résultats <strong>de</strong> la recherche révèlent finalement sept types <strong>de</strong> motivations entrepreneuriales chez<br />

les femmes entrepreneurs au Cameroun, avec une prééminence <strong>de</strong>s motivations d’autonomie<br />

et communautaires.<br />

L’analyse en composantes principales a dégagé sept facteurs représentant désormais les<br />

types <strong>de</strong> motivations entrepreneuriales <strong>de</strong>s femmes dans le contexte du Cameroun. Cependant,<br />

trois principaux types <strong>de</strong> motivations entrepreneuriales et qu’il convient d’analyser se<br />

dégagent du tableau 5 : « les motivations d’autonomie », « les motivations communautaires »<br />

et « les motivations <strong>de</strong> survie ».<br />

La première composante regroupe les motivations d’autonomie <strong>de</strong> type 1. Avec une<br />

variance interne <strong>de</strong> 33,53 %, ces motivations sont d’un grand intérêt pour les répondantes. En<br />

effet, les femmes entrepreneurs enquêtées expliquent leur entrée en affaires par le désir d’être<br />

indépendantes sur le plan financier, mais surtout d’accé<strong>de</strong>r à une autonomie par rapport à la<br />

conduite et à l’organisation <strong>de</strong> leur travail. Pour la majorité <strong>de</strong> ces femmes, obtenir une<br />

flexibilité et plus d’autonomie dans l’organisation <strong>de</strong> leur travail <strong>de</strong>vient une possibilité en<br />

créant soi même sa propre entreprise. La hiérarchie <strong>de</strong>s variables caractéristiques <strong>de</strong>s<br />

motivations d’autonomie laisse transparaître l’influence <strong>de</strong> la situation sociale ou<br />

professionnelle précédant l’entrée <strong>de</strong> la femme en affaires. En effet, même si une proportion<br />

<strong>de</strong> femmes ne justifiant pas d’une expérience professionnelle avant leur entrée en affaires<br />

(36,8 %) a été introduite dans l’échantillon, l’envie d’en finir avec les « tracasseries <strong>de</strong><br />

l’organisation » semble manifestement sous tendre le désir <strong>de</strong>s femmes à créer.


Les motivations d’autonomie <strong>de</strong> type 2 sont constitutives <strong>de</strong> la <strong>de</strong>uxième<br />

composante du modèle factoriel. A la différence <strong>de</strong>s motivations d’autonomie du type 1, ce<br />

groupe <strong>de</strong> motivations exprime le désir d’affirmation <strong>de</strong> la femme vis-à-vis du contexte d’où<br />

elle émerge. Comme dans la plupart <strong>de</strong>s pays en Afrique au Sud du Sahara, les femmes<br />

subissent <strong>de</strong> nombreuses contraintes dans les sociétés patriarcales au Cameroun (Yana, 1997).<br />

Dans la famille, à l’école ou en entreprise, les rapports entre Hommes et Femmes et les<br />

représentations qu’ils ont <strong>de</strong> leurs rôles respectifs renvoient aux modèles culturels transmis au<br />

sein <strong>de</strong> chaque ethnie et intériorisé dans le processus <strong>de</strong> socialisation. Mais les comportements<br />

observés dans le contexte actuel commencent à s’écarter <strong>de</strong> ce schéma traditionnel.<br />

Aujourd’hui, dans la plupart <strong>de</strong>s villes africaines, <strong>de</strong>s changements réels sont perceptibles<br />

dans les rapports sociaux. Des changements qui s’imposent par les effets inévitables <strong>de</strong> la<br />

mondialisation et qui détonnent sur les rapports que <strong>de</strong>s individus entretiennent avec leurs<br />

cultures d’origine, provoquant généralement un relâchement <strong>de</strong> l’emprise <strong>de</strong>s normes et<br />

valeurs caractéristiques <strong>de</strong>s cultures sur le comportement social. A titre d’illustration, l’argent<br />

qui apparaît comme la variable la plus importante au sein <strong>de</strong> la <strong>de</strong>uxième composante <strong>de</strong> notre<br />

modèle, est un moyen d’échange qui s’impose désormais comme tel en Afrique où dans un<br />

passé pas assez lointain, les échanges étaient basés essentiellement sur le troc. De nos jours,<br />

l’argent confère autorité et pouvoir à celui qui le possè<strong>de</strong> sur son environnement. Dans<br />

certaines sociétés, comme l’Ouest du Cameroun par exemple, l’accumulation <strong>de</strong> l’argent en<br />

tant que richesse permet même d’accé<strong>de</strong>r à certains titres nobiliaires à l’accès pourtant<br />

lignagère (Warnier, 1993).<br />

Les motivations communautaires sont regroupées au sein <strong>de</strong>s composantes 3 et 4. Le<br />

poids <strong>de</strong> la variable « ai<strong>de</strong>r ma communauté » donne une indication sur l’étendue <strong>de</strong> la<br />

famille. Il illustre la longueur et l’importance <strong>de</strong> la chaîne <strong>de</strong>s attentes que doit<br />

nécessairement tirer tout acteur qui a réussi dans ce contexte. En effet, la famille dans le<br />

contexte africain dépasse le cadre restreint que lui réserve sa conception mo<strong>de</strong>rne ou<br />

occi<strong>de</strong>ntale (père, mère et enfants). C’est une famille dynastique avec <strong>de</strong>s contours difficiles à<br />

délimiter. C’est ainsi qu’on retrouve facilement, vivant sous un même toit, le père, la mère,<br />

les enfants et <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux belles familles (la famille du mari et celle <strong>de</strong> la femme).<br />

Evi<strong>de</strong>mment, pour les <strong>de</strong>ux époux, cela représente un ensemble complexe d’attentes et <strong>de</strong><br />

besoins à satisfaire. Si la théorie néo institutionnelle présente l’entreprise comme un lieu<br />

d’internalisation <strong>de</strong>s coûts du marché, plus que dans d’autres contextes, en Afrique,<br />

l’entreprise apparaît comme un lieu d’internalisation <strong>de</strong>s coûts sociaux. En Afrique, l’acteur<br />

qui a réussi (la femme entrepreneur dans notre cas) a <strong>de</strong>s « obligations communautaires ».<br />

Elle doit apporter <strong>de</strong>s réponses favorables aux sollicitations <strong>de</strong> sa communauté d’origine. Cela<br />

semble d’autant plus important que la famille intervient <strong>de</strong> façon prépondérante dans<br />

l’alimentation du processus entrepreneurial en ressources matérielles, financières et humaines.<br />

Ce potentiel du projet entrepreneurial en termes <strong>de</strong> satisfaction <strong>de</strong>s attentes familiales et<br />

communautaires en fait un facteur qui influence positivement l’attraction ; c'est-à-dire la<br />

désirabilité <strong>de</strong> l’entrepreneuriat.<br />

Par ailleurs, dans la répartition <strong>de</strong>s rôles sociaux notamment, l’éducation <strong>de</strong>s enfants<br />

semble davantage relever <strong>de</strong> la sphère <strong>de</strong>s obligations <strong>de</strong> la femme dans le contexte africain.<br />

Faire face à cette exigence <strong>de</strong>vient donc une obsession pour la femme d’autant plus que<br />

l’ « avenir <strong>de</strong>s enfants » en dépend. Ce qui tend à établir que si la performance économique


constitue d’une manière générale l’un <strong>de</strong>s objectifs dont la réalisation assure la pérennité <strong>de</strong><br />

l’entreprise, la pérennité <strong>de</strong> l’entreprise créée par la femme dans le contexte africain semble<br />

reposer sur un bon arbitrage entre coûts sociaux et coûts <strong>de</strong> marché. La prééminence <strong>de</strong>s coûts<br />

sociaux qu’induisent les contrats (implicites et explicites) au sein <strong>de</strong> l’entreprise soumet le<br />

fonctionnement <strong>de</strong> cette <strong>de</strong>rnière non plus à la coordination <strong>de</strong> l’autorité <strong>de</strong> la femme<br />

entrepreneur mais à « un mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> coordination sociale et communautaire ».<br />

Néanmoins, par <strong>de</strong>là les sociétés le poids <strong>de</strong>s « contraintes communautaires » reste à<br />

relativiser. Tout comme il semble important <strong>de</strong> souligner qu’à l’intérieur <strong>de</strong> chaque<br />

communauté, les contraintes <strong>de</strong> la vie mo<strong>de</strong>rne aidant, apporter <strong>de</strong>s réponses aux appels <strong>de</strong> la<br />

communauté ne constitue pas toujours une démarche unanimement partagée par l’ensemble<br />

<strong>de</strong>s membres. En adoptant une stratégie <strong>de</strong> contournement <strong>de</strong> la pression <strong>de</strong> la parentèle,<br />

certains entrepreneurs réussissent à transformer la contrainte <strong>de</strong> la communauté d’origine en<br />

opportunité au double plan économique et social. Cet endiguement <strong>de</strong> la parentèle (Warnier,<br />

1993) permet <strong>de</strong> préserver la pérennité <strong>de</strong> l’affaire tout en se mettant à l’abri <strong>de</strong>s pressions <strong>de</strong><br />

la communauté. Elle consiste pour les entrepreneurs Bamilékés par exemple, en matière <strong>de</strong><br />

recrutement du personnel, à recruter les membres <strong>de</strong> la famille <strong>de</strong> préférence dans <strong>de</strong>s<br />

entreprises peu rentables.<br />

Les cinquième et sixième composantes <strong>de</strong> notre modèle factoriel recouvrent les<br />

motivations d’évasion. Découlant essentiellement d’ « évènements préciptatifs négatifs », le<br />

besoin d’évasion est une motivation associée au désir <strong>de</strong> quitter une situation (active ou non)<br />

manifestement peu enthousiasmante par rapport à la situation d’emploi à laquelle l’on aspire.<br />

Cette motivation est généralement forte chez les chômeurs et les jeunes diplômés à la<br />

recherche d’un premier emploi. Elle est également accentuée chez les employés qui se<br />

trouvent dans <strong>de</strong>s conditions d’emploi précaires ou chez ceux qui partagent le sentiment que<br />

leurs compétences ne sont pas suffisamment valorisées. Dans la littérature en entrepreneuriat,<br />

ce type <strong>de</strong> motivations est souvent associé aux facteurs explicatifs <strong>de</strong> l’entrée en affaires <strong>de</strong><br />

micro entrepreneurs locaux dans le contexte <strong>de</strong>s pays en développement (Torrès, 2001 ;<br />

Saporta et Kombou, 1999). En Asie, ces motivations sont plus accentuées chez les femmes<br />

entrepreneurs (Das, 2000 ; Tambunan, 2009) qui, dans la plupart <strong>de</strong>s cas entrent en affaires<br />

pour « s’occuper » ou parce qu’elles sont contraintes par <strong>de</strong>s circonstances difficiles (décès <strong>de</strong><br />

l’époux, difficultés financières <strong>de</strong> la famille…). Chez les femmes entrepreneurs enquêtées, si<br />

l’évasion constitue un facteur explicatif indéniable <strong>de</strong> l’entrée en affaires, il s’agit plus d’une<br />

évasion par rapport aux contraintes auxquelles la femme entrepreneur potentielle fait face tant<br />

au niveau <strong>de</strong> la famille que dans son milieu professionnel. Ainsi, l’entrée en affaires va<br />

permettre à l’entrepreneur potentiel d’accé<strong>de</strong>r à l’argent dont elle a besoin pour vivre et faire<br />

vivre les membres <strong>de</strong> la famille ou alors d’échapper aux frustrations subies dans sa situation<br />

d’employée.<br />

La <strong>de</strong>rnière composante du modèle factoriel regroupe les motivations <strong>de</strong> challenge ou<br />

<strong>de</strong> défi. Ce type <strong>de</strong> motivation qu’on pourrait facilement associer au need for achievment se<br />

trouve plus accentué chez les femmes entrepreneurs totalisant un nombre élevé d’années <strong>de</strong><br />

formation. Le challenge caractérise aussi les femmes entrepreneurs dont l’entrée en affaires a<br />

fortement été influencée par l’existence d’un modèle d’entrepreneur dans l’entourage<br />

immédiat. Dans le contexte singulier du Cameroun, les motivations <strong>de</strong> challenge ou <strong>de</strong> défi<br />

révèlent aussi leur lien positif avec l’entrée <strong>de</strong>s femmes en affaires dans le secteur formel. Du


coup apparaît <strong>de</strong> façon implacable la relation entre le niveau <strong>de</strong> formation et la création<br />

d’entreprises à forte valeur ajoutée, les entreprises technologiques notamment. Le niveau <strong>de</strong><br />

formation généralement faible <strong>de</strong>s entrepreneurs potentiels dans les pays en développement ne<br />

fait pas jouer l’influence du modèle d’entrepreneur en faveur <strong>de</strong> la création <strong>de</strong>s entreprises<br />

technologiques pourtant plus créatrices <strong>de</strong> valeurs. Cette situation semble plus marquée chez<br />

les femmes dont le taux <strong>de</strong> formation scolaire et professionnelle reste faible malgré<br />

l’évolution favorable <strong>de</strong>s politiques locales <strong>de</strong> formation.<br />

5. Discussion <strong>de</strong>s résultats <strong>de</strong> la recherche<br />

En nous référant à la littérature en entrepreneuriat, les résultats obtenus par cette<br />

recherche polarisent essentiellement sur <strong>de</strong>ux aspects liés, l’un aux caractéristiques<br />

psychologiques <strong>de</strong> la femme entrepreneur (les motivations à entrer en affaires) et l’autre aux<br />

conditions <strong>de</strong> mise en œuvre <strong>de</strong> l’entreprise ; on parlera, dans une optique explicative, <strong>de</strong> la<br />

dimension praxéologique <strong>de</strong> l’entrepreneuriat (Verstraete, 2001) non pas comme un<br />

phénomène, mais comme un processus conduit principalement par la femme entrepreneur<br />

avec un intérêt particulier sur les déterminants <strong>de</strong> son choix d’entrer en affaires par le secteur<br />

formel ou informel.<br />

Motifs d’entrer en affaires : autonomie personnelle vs autonomie communautaire<br />

Le modèle factoriel a conduit au regroupement <strong>de</strong>s motivations entrepreneuriales en six<br />

gran<strong>de</strong>s catégories. Ces facteurs enclencheurs <strong>de</strong> l’entrée <strong>de</strong>s femmes en affaires recouvrent<br />

<strong>de</strong>s réalités qui appellent <strong>de</strong>s explications par rapport à leurs spécificités et du point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong><br />

leurs fon<strong>de</strong>ments. La nécessité et la volonté étant indéniablement <strong>de</strong>s antécé<strong>de</strong>nts <strong>de</strong> la<br />

décision d’entrer en affaires, c’est incontestablement que le modèle push/pull domine les<br />

résultats <strong>de</strong> la plupart <strong>de</strong>s travaux qui s’intéressent aux motivations <strong>de</strong>s entrepreneurs.<br />

Seulement ce modèle dichotomique qui peut aujourd’hui réclamer une portée universelle se<br />

limite à expliquer par quoi l’entrepreneur potentiel est motivé établissant ainsi la suprématie<br />

<strong>de</strong>s théories <strong>de</strong> contenue <strong>de</strong>s motivations. Il reste impuissant <strong>de</strong>vant la nécessité <strong>de</strong> préciser<br />

les déterminants <strong>de</strong> ces motivations, donc leurs fon<strong>de</strong>ments comme l’impose pourtant la<br />

diversité <strong>de</strong>s contextes et <strong>de</strong>s environnements d’où émergent les entrepreneurs potentiels.<br />

Dans tous les cas, les motivations entrepreneuriales semblent <strong>de</strong> types push ou <strong>de</strong> type pull, et<br />

ce, quel que soit le contexte. Mais la force explicative <strong>de</strong> ce modèle est faible lorsque certains<br />

référents contextuels (système d’apprentissage social, valeurs socioculturelles, normes,<br />

lois…) ne sont pas pris en compte ; d’où la nécessité d’étudier les motivations<br />

entrepreneuriales sous la double approche empiriste et situationnelle.<br />

Dans le contexte du Cameroun, à l’instar <strong>de</strong>s autres pays <strong>de</strong> l’Afrique au Sud du Sahara,<br />

la division sexuée <strong>de</strong>s tâches est <strong>de</strong> nature hiérarchique. Elle constitue une réalité qui a connu<br />

cependant une évolution dans le temps. En effet, d’une division primaire qui réservait les<br />

activités <strong>de</strong> faible valeur ajoutée aux femmes (productions vivrières), les cultures<br />

d’exportation (cacao, café, coton…) étant essentiellement effectuées par les hommes, les<br />

activités socio économiques <strong>de</strong>s femmes ont connu un enrichissement dans la quantité et<br />

même dans la qualité. Le positionnement <strong>de</strong> cette évolution par rapport à l’entrepreneuriat<br />

s’illustre par le nombre <strong>de</strong> plus en plus accru d’entreprises créées par les femmes et même<br />

dans les secteurs réputés essentiellement masculins. La division sexuée <strong>de</strong>s tâches a eu<br />

l’avantage <strong>de</strong> donner aux femmes une certaine autonomie financière ; elles étaient libres<br />

d’utiliser à leur guise leur production et les revenus générés (Guérin, 2008). Cependant cette


division <strong>de</strong>s tâches, toujours effective, est assortie d’une répartition <strong>de</strong>s responsabilités ; aux<br />

pères la responsabilité économique et la protection <strong>de</strong> la famille ; aux femmes le <strong>de</strong>voir <strong>de</strong><br />

procréer et d’assumer l’éducation <strong>de</strong>s enfants (Diop, 1981). Devant le poids <strong>de</strong> plus en plus<br />

croissant <strong>de</strong>s responsabilités à assumer par les femmes dans le cadre familial, le cadre<br />

institutionnel plus incitatif à l’initiative privée (promotion <strong>de</strong> l’entrepreneuriat féminin,<br />

création d’organismes <strong>de</strong> soutien et d’accompagnement strictement dédiés aux femmes<br />

entrepreneurs…) et la position favorable <strong>de</strong> l’entrepreneuriat dans le système <strong>de</strong> valeurs<br />

partagées par la communauté constituent le ferment <strong>de</strong> sa faisabilité et sa désirabilité par les<br />

femmes. C’est donc moins aux types <strong>de</strong> motivations (push vs pull) qu’il est utile <strong>de</strong><br />

s’intéresser qu’aux effets <strong>de</strong>s valeurs du groupe, <strong>de</strong>s lois et normes du contexte sur le<br />

comportement <strong>de</strong> la femme. En effet, si la motivation c’est ce qui pousse à agir, le désir <strong>de</strong><br />

passer à l’acte a besoin d’une légitimité sociale qui le rend désirable et d’un dispositif<br />

institutionnel qui facilite sa faisabilité. D’où la nécessité d’abor<strong>de</strong>r les motivations <strong>de</strong>s<br />

femmes à entrer en affaires sous une approche empirico-situationnelle.<br />

En effet, qu’il soit par volonté ou par nécessité, le désir d’accé<strong>de</strong>r à l’autonomie<br />

constitue la principale motivation à entrer en affaires. L’autonomie est marquée toutefois <strong>de</strong><br />

l’empreinte <strong>de</strong>s réalités socioéconomiques du contexte. Ainsi l’entrée en affaires <strong>de</strong>s femmes<br />

dans les pays développés serait dominée par <strong>de</strong>s motifs d’affirmation personnelle tandis qu’en<br />

Afrique au Sud du Sahara, par la création d’entreprise, la femme accè<strong>de</strong> à une autonomie qui<br />

lui permet <strong>de</strong> faire face aux obligations familiales et communautaires, tel que le lui imposent<br />

la culture et la précarité économique et sociale <strong>de</strong> son environnement. En effet, comme<br />

l’illustre la figure ci-<strong>de</strong>ssous, si l’accès à l’autonomie constitue finalement la caractéristique<br />

principale <strong>de</strong>s motivations <strong>de</strong>s femmes à entrer en affaires, force est <strong>de</strong> constater que cette<br />

autonomie se partage entre l’individualisme et le communautarisme.<br />

Figure 1. Entrée en affaires <strong>de</strong>s femmes : individualisme vs communautarisme<br />

Apprentissage social<br />

Valeurs du groupe<br />

Normes<br />

Lois<br />

Motivations Push/Pull<br />

Etablir mon propre horaire <strong>de</strong> travail<br />

Etre libre vis-à-vis <strong>de</strong> mon travail<br />

Etre mon propre patron<br />

Etre indépendante sur le plan financier<br />

Faire plus d’argent et être riche<br />

Avoir plus d’influence dans mon milieu<br />

Echapper aux frustrations <strong>de</strong> l’emploi précé<strong>de</strong>nt<br />

Création d’entreprise<br />

=<br />

Autonomie personnelle<br />

(individualisme)<br />

Création d’entreprise<br />

=<br />

Autonomie <strong>de</strong> la famille<br />

(communautarisme)<br />

Entrée en affaires par le secteur informel : Prééminence <strong>de</strong> la nécessité sur une volonté<br />

apparente<br />

Le <strong>de</strong>uxième aspect exploré par cette recherche concerne les conditions d’entrée <strong>de</strong>s<br />

femmes en affaires au Cameroun. Il s’agissait <strong>de</strong> pointer les déterminants du choix d’entrer en<br />

affaires par le secteur formel ou par le secteur informel. Les conditions d’entrée en affaires<br />

par le secteur informel (absence totale <strong>de</strong> barrières à l’entrée) font <strong>de</strong> ce <strong>de</strong>rnier le cadre


d’exercice idéal <strong>de</strong>s micro entrepreneurs aux moyens <strong>de</strong> financement mo<strong>de</strong>stes ; une catégorie<br />

qui compte l’essentiel <strong>de</strong>s femmes qui entrent en affaires. Dans le contexte du Cameroun, le<br />

secteur informel n’est pas exclusivement réservé aux micro entrepreneurs. L’accès au secteur<br />

formel soumet l’entrepreneur à <strong>de</strong>s obligations administratives qui ont <strong>de</strong>s répercussions sur<br />

les finances et sur l’organisation interne <strong>de</strong> l’entreprise (i<strong>de</strong>ntification <strong>de</strong> l’entreprise et du<br />

personnel, lorsqu’il existe, auprès <strong>de</strong>s administrations fiscale (impôts) et parafiscale (CNPS 5 ),<br />

tenue d’une comptabilité conforme à l’OHADA, etc.). Un ensemble <strong>de</strong> contraintes<br />

inaccessible pour la majorité <strong>de</strong>s femmes entrepreneurs. Les résultats <strong>de</strong> la recherche révèlent<br />

cependant l’existence d’un lien positif entre certaines caractéristiques <strong>de</strong> la femme<br />

entrepreneur et son choix d’entrer en affaires par le secteur informel ou formel. Il s’agit<br />

notamment <strong>de</strong> l’âge <strong>de</strong> la femme entrepreneur, son niveau <strong>de</strong> formation, le niveau <strong>de</strong> son<br />

capital <strong>de</strong> départ ainsi que l’existence d’un modèle d’entrepreneur dans la famille. Néanmoins<br />

en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> cette <strong>de</strong>rnière caractéristique, comme l’attestent les coefficients <strong>de</strong> contingence<br />

correspondants, la force <strong>de</strong> l’association reste globalement faible. L’association semble se<br />

consoli<strong>de</strong>r avec le temps qui lui-même contribue à la consolidation <strong>de</strong> l’affaire initiée par la<br />

femme. Ce qui indique finalement qu’il existe un lien positif entre l’envergure (financière et<br />

structurelle) <strong>de</strong> l’affaire et le secteur formel en dépit <strong>de</strong> la présence en son sein <strong>de</strong> micro<br />

entreprises.<br />

Conclusion et perspectives<br />

A défaut d’inviter à une relecture <strong>de</strong>s motivations <strong>de</strong>s femmes à entrer en affaires <strong>de</strong><br />

façon générale, les résultats obtenus par cette recherche ten<strong>de</strong>nt à établir un fait : qu’elles<br />

soient <strong>de</strong> type push ou <strong>de</strong> type pull, les motivations à entrer en affaires <strong>de</strong>s femmes sont<br />

essentiellement <strong>de</strong>s motivations d’autonomie, d’une part, et d’autre part, que leur<br />

caractérisation doit tenir compte <strong>de</strong> l’influence <strong>de</strong>s réalités socioéconomiques et du niveau <strong>de</strong><br />

développement du contexte d’où émerge la femme entrepreneur. Dans cette veine et au regard<br />

<strong>de</strong>s résultats obtenus, l’on peut se prêter à avancer que si la femme occi<strong>de</strong>ntale, influencée par<br />

<strong>de</strong>s règles <strong>de</strong> compétition essentiellement individualistes (Albagli, 1996) entre en affaires<br />

pour accé<strong>de</strong>r à une autonomie <strong>de</strong> soi, sa consœur du Sud, et singulièrement la femme<br />

entrepreneur au Cameroun entre affaire pour permettre à son groupe d’appartenance (famille,<br />

clan, ethnie…), d’accé<strong>de</strong>r à une autonomie économique et sociale. Finalement, par rapport au<br />

développement <strong>de</strong> l’entrepreneuriat féminin, ces résultats appellent à s’intéresser moins à la<br />

caractérisation <strong>de</strong>s facteurs motivationnels qu’à travailler à la valorisation <strong>de</strong>s systèmes<br />

d’apprentissage sociaux, à l’i<strong>de</strong>ntification <strong>de</strong>s normes et lois propices à la diffusion <strong>de</strong> l’esprit<br />

d’entreprise en Afrique, et singulièrement au Cameroun.<br />

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