19.03.2015 Views

1baromaitre

1baromaitre

1baromaitre

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

#4LE BAROPÔLE<br />

biens ou de la fourniture de services ou (ii)<br />

lorsque ces préjudices résultent de pratiques<br />

anticoncurrentielles. L’article ajoute que<br />

l’action de groupe ne peut porter que sur<br />

la réparation des préjudices patrimoniaux<br />

résultant des dommages matériels subis par<br />

les consommateurs.<br />

À la différence des class actions américaines,<br />

l’action de groupe à la française<br />

permet donc uniquement la réparation des<br />

préjudices patrimoniaux. Sont ainsi écartés<br />

les préjudices corporels ou moraux. De plus,<br />

l’action de groupe ne s’applique qu’aux<br />

atteintes au droit de la consommation et<br />

de la concurrence, excluant notamment les<br />

domaines de la santé et de l’environnement 1 .<br />

Troisième raison de ne pas craindre des<br />

dérives : seules les associations de consommateurs<br />

agréées et représentatives au niveau<br />

national – une quinzaine au total – peuvent<br />

agir en justice, évitant ainsi le phénomène de<br />

l’ambulance-chasing américain 2 .<br />

PROCÉDURE<br />

UN DISPOSITIF EN TROIS ÉTAPES<br />

Autre garde-fou : la procédure de l’action<br />

de groupe est strictement encadrée 3 . Celle-ci<br />

commence par un jugement de responsabilité<br />

du professionnel sur la base de plusieurs – au<br />

moins deux – cas individuels démontrant<br />

l’existence d’un groupe homogène. Si la demande<br />

est accueillie, le tribunal doit définir<br />

le groupe de consommateur en fixant les critères<br />

de rattachements mais aussi définir les<br />

préjudices indemnisables en déterminant leur<br />

montant ou tous les éléments permettant leur<br />

évaluation. Contrairement au droit commun,<br />

et de façon favorable au professionnel, l’appel<br />

et le pourvoi en cassation sont suspensifs<br />

d’exécution.<br />

La deuxième phase de la procédure démontre,<br />

là encore, la volonté de cantonner la<br />

responsabilité des professionnels. L’adhésion<br />

au groupe est guidée par le système de<br />

l’opt-in : les consommateurs doivent se faire<br />

connaître afin d’adhérer au groupe. A cette<br />

fin, le jugement sur la responsabilité indique<br />

les mesures de publicité dont il fera l’objet<br />

afin de le porter à la connaissance des potentielles<br />

victimes. Cette option est bien moins<br />

sévère que le système inverse, l’opt-out,<br />

adopté aux Etats-Unis ou au Portugal, dans<br />

lequel tous les consommateurs font partie du<br />

groupe, à l’exception de ceux qui manifestent<br />

la volonté de s’exclure.<br />

Enfin, dernière étape, la liquidation judiciaire<br />

des préjudices consiste à indemniser<br />

individuellement chaque consommateur<br />

directement par le professionnel, le juge<br />

pouvant intervenir en cas de difficulté.<br />

L’indemnisation ainsi versée correspond<br />

exactement au préjudice subi. Le législateur<br />

n’a donc pas voulu introduire les punitive<br />

damages américains, source de montants<br />

exorbitants aux Etats-Unis. Le dispositif<br />

s’inscrit ainsi dans une logique de réparation<br />

et non de punition.<br />

Au final, si l’introduction de l’action de<br />

groupe est une avancée notable pour la<br />

protection du consommateur, son régime<br />

présente néanmoins de nombreux gages<br />

protecteurs à l’égard du professionnel. Dès<br />

l’entrée en vigueur du texte, le groupe<br />

Foncia était la cible de la première action de<br />

groupe par l’association de consommateurs<br />

UFC Que-Choisir pour un préjudice estimé<br />

à 44 millions d’euros. Reste à connaître la<br />

pratique qui sera donnée à ce nouveau mécanisme<br />

afin de vérifier si les garde-fous mis<br />

en place par le législateur sont suffisants. <br />

Daniel Da Cruz Rodrigues<br />

1 Le projet de loi de santé<br />

présenté le 15 octobre 2014 prévoit<br />

d’étendre le domaine d’application<br />

de l’action de groupe à la<br />

santé et aux préjudices corporels :<br />

ainsi, une association d’usagers du<br />

système de santé agréée pourra engager<br />

une procédure en réparation<br />

des dommages individuels corporels<br />

occasionnés par la même cause.<br />

2 Le terme vient d’un stéréotype<br />

américain selon lequel les avocats<br />

suivraient les victimes d’accidents<br />

jusqu’à la salle d’urgence afin de<br />

les inciter à lancer une action en<br />

justice.<br />

3 Il est ici fait référence au<br />

régime de droit commun. Des<br />

spécificités existent en matière de<br />

pratiques anticoncurrentielles. De<br />

plus, une procédure d’action de<br />

groupe simplifiée existe ainsi que<br />

la possibilité d’avoir recours à la<br />

médiation.<br />

AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE #4 | 37

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!