Sauvagerie, barbarie et civilisation - les atomes de l'âme
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14 Asger Jorn <strong>Sauvagerie</strong>, <strong>barbarie</strong> <strong>et</strong> <strong>civilisation</strong><br />
ment une étu<strong>de</strong> sur le culte <strong>de</strong> la pierre à aiguiser. Le silence sur ces <strong>de</strong>ux<br />
points ne perm<strong>et</strong> pas la découverte <strong>de</strong> rapports autres que superficiels entre<br />
<strong>les</strong> Templiers <strong>et</strong> <strong>les</strong> graffitis normands.<br />
Il faut lever ce mystère, facteur <strong>de</strong> troub<strong>les</strong> du jugement, <strong>et</strong> dénoncer,<br />
à propos <strong>de</strong> ce cas particulier, le mépris que traditionnellement <strong>les</strong> positions<br />
officiel<strong>les</strong> affectent à l’égard <strong>de</strong> tout ce qui dépasse le cadre général d’une époque.<br />
Nous n’avons pas l’impression que le récit <strong>de</strong> ce combat — <strong>de</strong> c<strong>et</strong> affrontement<br />
— soit effectué par un témoin neutre <strong>et</strong> impersonnel, mais plutôt que<br />
le récitant lui-même a été engagé dans l’aventure qui nous est narrée. Qui estil<br />
? À notre avis : un adversaire d’Odin, donc Thor. L’hypothèse selon<br />
laquelle Thor serait le narrateur, s’accor<strong>de</strong> assez bien avec <strong>les</strong> compte-rendus<br />
sur l’époque où la paix régnait entre Thor <strong>et</strong> Odin. Elle explique également le<br />
blâme d’Odin comme correspondant aux traces, dans sa mémoire, <strong>de</strong> leur longue<br />
hostilité antérieure. Revenons aux idées qui nous sont chères : dans tout<br />
conflit, il y a toujours trois éléments <strong>et</strong> l’un seulement d’entre eux joue — sur<br />
le plan psychologique — le rôle <strong>de</strong> victime . Je pense ici au décapité par l’éclat<br />
<strong>de</strong> pierre dans le front. Appelons-le Mimir, la sagesse qui possédait l’œil<br />
d’Odin. Qu’aurait-il pu nous dire ?<br />
Essayons d’i<strong>de</strong>ntifier son histoire avec celle <strong>de</strong> Baldr, tué par l’aveugle<br />
Ho<strong>de</strong>r qu’assista Loke. Remarquons au passage que ce mythe comporte<br />
d’étranges rapports avec celui <strong>de</strong> Palna-Toke — fondateur <strong>de</strong> l’organisation<br />
<strong>de</strong>s Jomvikings — <strong>et</strong> <strong>de</strong> Guillaume Tell, tous <strong>de</strong>ux tirant à l’arc sur une pomme<br />
placée sur la tête <strong>de</strong> leur fils. L’utilisation par Ho<strong>de</strong>r du gui comme flèche, fait<br />
apparaître certains liens possib<strong>les</strong> avec le mon<strong>de</strong> celtique. Cependant, nombre<br />
d’autres éléments indiquent que ce culte est pré-celtique : lié à la culture ibéroligure.<br />
Dans celle-ci, on r<strong>et</strong>rouve le nom <strong>de</strong> Baldr sous la forme <strong>de</strong> Bellin.<br />
Curieusement, une statue phallique portant ce nom a été découverte dans le<br />
sud <strong>de</strong> la France par un archéologue du nom <strong>de</strong> Bellin. Le récit <strong>de</strong> celui-ci est<br />
fort amusant, car M. Bellin ignore complètement l’usage populaire qu’il est<br />
fait, en Ligurie, <strong>de</strong> ce mot à signification phallique. Il est d’un irrésistible intérêt<br />
pour un artiste <strong>de</strong> découvrir la relation qui unit Bellin au concept <strong>de</strong> belleza<br />
: la beauté liée à l’agressivité belliqueuse — ce qui rappelle fort l’idée <strong>de</strong><br />
Shiva. L’origine <strong>de</strong> ce mot n’est pas latine. Pas <strong>de</strong> traces non plus en langues<br />
germaniques, sinon le mot shön dont l’équivalent en langue Scandinave kön,<br />
signifie à la fois sexe <strong>et</strong> beauté.<br />
Que le Scandinave comporte encore un troisième mot pour exprimer<br />
la beauté — le mot smuk — ne me paraît pas être dû au hasard. Aux In<strong>de</strong>s,<br />
la très ancienne Harivamska appelle la divinité pré-aryenne Vayupurana «<br />
Smukha Trishira », c’est-à-dire « la belle aux trois têtes ». C’est aux In<strong>de</strong>s éga-<br />
éditions <strong>les</strong> <strong>atomes</strong> <strong>de</strong> l’âme